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Débats du Sénat (hansard)

2e Session, 35e Législature,
Volume 135, Numéro 53

Le mardi 26 novembre  1996
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le mardi 26 novembre 1996

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

 

VISITEURS DE MARQUE

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je vous signale la présence à notre tribune d'une délégation de parlementaires du Bangladesh. Le chef de la délégation est M. Suranjit Sen Gupta, conseiller du premier ministre en matière d'affaires parlementaires.

Nous vous souhaitons la bienvenue au Sénat du Canada.

 

LE PROGRAMME D'ÉCHANGE DE PAGES
AVEC LA CHAMBRE DES COMMUNES

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, nous avons encore cette semaine un échange de pages avec la Chambre des communes, et je voudrais vous présenter les deux pages de la Chambre des communes qui sont parmi nous.

[Français]

Kelly McGuire, de Belle River, en Ontario, est étudiante à la faculté des sciences de la santé de l'Université d'Ottawa.

[Traduction]

Kelly se spécialise en sciences de l'activité physique. Bienvenue au Sénat.

Je vous présente maintenant Jared Orynik, qui étudie à la faculté des arts de l'Université d'Ottawa. Jared vient de Prince Albert, en Saskatchewan. Bienvenue au Sénat.

 

Le Sénat

Les greffiers principaux adjoints-
Félicitations à l'occasion de leur nomination

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, vous aurez sûrement remarqué la présence aujourd'hui d'une nouvelle greffière au Bureau. Il s'agit de Heather Lank, que certains d'entre vous connaissent en sa qualité de greffière du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Mme Lank fait partie des trois greffiers qui ont réussi récemment le concours de greffier principal adjoint.

[Français]

Outre ses responsabilités au Bureau du Sénat, Mme Lank continuera à oeuvrer à la direction des comités, qui a été son poste d'attache depuis son arrivée au Sénat en 1991. Elle y travaillera étroitement avec le directeur, M. Gary O'Brien.

[Traduction]

Se joint aussi à eux M. Blair Armitage, nouveau greffier principal adjoint. M. Armitage est au Sénat depuis 1988. Il travaille maintenant comme agent de comité. Nous sommes nombreux cependant à l'identifier au travail qu'il a fait et qu'il continue de faire auprès des associations parlementaires. Certains se rappelleront aussi de son affectation au Bureau il y a quelques années.

(1410)

[Français]

La troisième recrue au poste de greffier principal adjoint est Charles Robert, adjoint administratif du greffier et, cette dernière année, greffier au Bureau.

[Traduction]

Dans son nouveau rôle, M. Robert travaillera aussi avec Richard Greene, greffier adjoint, sous la responsabilité duquel il s'occupera de la recherche procédurale et du bureau des Journaux.

Madame Lank débute ses fonctions de greffière au Bureau aujourd'hui même. Je suis sûr que nous voulons tous lui offrir, ainsi qu'à Blair et à Charles, nos meilleurs voeux de succès dans leurs nouvelles fonctions.

Bienvenue à nouveau.

Des voix: Bravo!

 


[Français]

 

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Le Sénat

Échange de bons procédés avec
la Chambre des communes

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, nous avons reçu aujourd'hui une lettre du greffier du Sénat, M. Paul Bélisle, nous informant que M. Robert Desramaux, directeur général des technologies de l'information à la Chambre des Communes, a accepté une affectation au Sénat en tant que conseiller spécial du greffier jusqu'au 30 juin 1997.

Il nous informe également que M. Desramaux mettra ses compétences et ses connaissances en pratique dans différents projets spéciaux touchant la technologie de l'information.

Il s'agit ici d'un échange de bons procédés entre la Chambre des Communes et le Sénat. M. Bélisle nous assure que M. Desramaux contribuera utilement aux opérations du Sénat et qu'il se réjouit à l'idée de travailler étroitement avec lui.

Je veux simplement ajouter qu'ayant travaillé à la Chambre des communes pendant de nombreuses années avec M. Desramaux, je trouve que c'est une excellente addition pour le Sénat. Nous allons grandement profiter des qualifications de M. Desramaux. Sur une note encore plus personnelle, ce que bien des gens ne savent pas, c'est que M. Desramaux est une personnalité canadienne bien connue au Congrès américain, puisqu'il a travaillé étroitement à l'implantation du programme CSPAN, qui diffuse les Débats du Sénat et du Congrès américain. Il s'agit ici d'une très heureuse addition au Sénat. Je me réjouis de l'annonce de cette affectation.

[Traduction]

 

La Journée nationale de l'enfant

L'honorable Landon Pearson: Honorables sénateurs, la Journée nationale de l'enfant a eu lieu la semaine dernière, pendant notre absence du Sénat. Hier, d'autres déclarations importantes ont été faites, je voudrais maintenant dire quelques mots au sujet de cette célébration d'une grande portée.

Le 20 novembre 1959, les Nations Unies ont adopté la Déclaration des droits de l'enfant. Le 20 novembre 1989, 30 ans plus tard, elles ont adopté la Convention relative aux droits de l'enfant. Pour commémorer ces événements, en 1993, le Parlement du Canada a désigné le 20 novembre Journée nationale de l'enfant.

Le ministre de la Santé, l'honorable David Dingwall, a fait parvenir un message à tous les députés et les sénateurs pour marquer le quatrième anniversaire de la Journée nationale de l'enfant. Dans sa note, le ministre a mentionné qu'il s'agit là d'une journée importante pour réfléchir aux besoins des enfants et à la façon dont nous, en tant que société, pouvons nous assurer que ces besoins sont satisfaits, non seulement le 20 novembre, mais encore tous les autres jours de l'année.

La Journée nationale de l'enfant est aussi une journée pour célébrer les enfants simplement pour ce qu'ils sont. C'est une journée pour nous rappeler que les enfants sont de petites personnes qui méritent le respect et que les respecter signifie apprendre à écouter ce qu'ils ont à dire. Si nous agissons ainsi, une des premières choses qui se passera, c'est que nous percevrons les situations d'une manière nouvelle, apprenant à les comprendre à travers les yeux des enfants. Nous avons besoin de leur entendre dire ce qui va bien ou mal dans leur vie pour pouvoir apprendre à réagir d'une façon qu'ils respecteront et accepteront.

La Journée nationale de l'enfant existe pour nous rappeler chaque année de nous demander: qu'avons-nous fait à la maison et au travail pour permettre aux enfants de s'exprimer? Avons-nous insisté pour que les écoles et les autres établissements qui touchent directement leur vie leur offrent des possibilités de participer à des décisions importantes et les aident à appliquer ces décisions, ce qui leur permet d'acquérir le sentiment de leur propre dignité et le respect de soi, ainsi que de devenir de bons citoyens?

Cette semaine, lorsque je ne suis pas au Sénat, je participe à une conférence nationale remarquable ayant pour thème «Les enfants du Canada, l'avenir du Canada». Sur les 1 100 délégués, 160 sont des jeunes. Nous tâchons d'élaborer un projet national pour garantir l'avenir des enfants du Canada, et la contribution des jeunes à la conférence est extraordinaire.

Dimanche soir dernier, à la cérémonie d'ouverture, nous avons entendu une chorale composée de personnes de tous les âges entonner un ensemble de chansons canadiennes. Il s'agissait d'une chorale d'aînés et d'une chorale d'élèves d'une école primaire qui étaient accompagnées par des musiciens d'une école secondaire et un groupe de jeunes adultes. Leurs chants étaient à la fois retentissants et émouvants. C'est ainsi que nous devrions percevoir la Journée nationale de l'enfant: comme une célébration pour les gens de tous les âges, qui nous enrichit tous.

L'honorable Brenda M. Robertson: Honorables sénateurs, comme le sénateur Pearson vient de le mentionner, mercredi dernier, soit le 20 novembre 1996, a marqué pour la quatrième fois la Journée nationale de l'enfant. En 1991, le Canada a désigné cette journée pour reconnaître deux initiatives des Nations Unies: la Déclaration des droits de l'enfant, en 1959, et l'adoption de la Convention relative aux droits de l'enfant, en 1989.

En ratifiant la Convention, le Canada s'est engagé à garantir que les besoins des enfants - bonne alimentation, accès à des services décents en matière de santé et d'éducation, et protection contre les mauvais traitements - représentent une priorité nationale. Je suis certaine que tous les sénateurs ont été attristés par le bulletin de 1996 de Campagne 2000, qui décrit l'affligeante réalité que vit un enfant pauvre sur cinq au Canada et qui nous rappelle que le Canada possède le deuxième taux en importance pour ce qui est de la pauvreté chez les enfants des pays industrialisés.

Le bulletin de 1996 révèle que, depuis un an, le gouvernement fédéral a notamment réduit ses dépenses en faveur des enfants, quand il a remplacé le Régime d'assistance publique du Canada par le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux et retardé l'adoption d'une politique concernant les garderies.

Honorables sénateurs, le bulletin de 1996 rappelle cruellement qu'il reste peu de temps pour appliquer la résolution multipartite de la Chambre des communes visant à éliminer la pauvreté chez les enfants avant l'an 2000. Le triste rendement du gouvernement montre bien qu'il n'est pas vraiment engagé à aider les enfants et les familles à échapper aux terribles conséquences de la pauvreté.

Le 1er janvier 1997 marquera le début de la Décennie pour l'élimination de la pauvreté, désignée par les Nations Unies. La lutte contre la pauvreté doit être une priorité pour tous les Canadiens. Étant donné que nous vivons dans un pays où, selon les Nations Unies, nous jouissons de la meilleure qualité de vie dans le monde, il serait vraiment scandaleux que nous n'arrivions pas à livrer la guerre la plus acharnée contre la pauvreté chez les enfants.

 

Peuples autochtones

Le rapport de la Commission royale

L'honorable Charlie Watt: Honorables sénateurs, je voudrais faire quelques observations à propos du rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones qui a été déposé à la Chambre des communes le 21 novembre 1996, à l'issue de quatre années de travaux. Je dois préciser que le travail de rédaction du rapport lui-même a débuté officiellement il y a environ quatre ans, mais une grande partie du travail avait déjà été effectué auparavant.

Honorables sénateurs, je ne voulais pas laisser passer l'occasion sans parler du rapport de façon substantielle. J'ai décidé de signaler aux honorables sénateurs certains aspects que je considère importants, des aspects que nous devrions tous prendre au sérieux.

Le rapport de la commission royale représente une sommede travail importante et fait des recommandations surun vaste éventail de questions autochtones. Il contient 440 recommandations. Cette vaste entreprise a été lancée par le gouvernement conservateur précédent. L'étude a ensuite été prolongée et menée à terme par le gouvernement libéral quand il a assumé les responsabilités gouvernementales.

Le rapport est le fruit de vastes consultations menées auprès des peuples autochtones et des Canadiens non autochtones. Les peuples autochtones ont participé à part entière au processus d'élaboration et de rédaction du rapport, dont ils ont compté parmi les concepteurs et les architectes. Un grand nombre de non-autochtones venant de nombreux horizons professionnels y ont également contribué.

(1420)

J'ignore si un travail aussi énorme que celui de la Commission royale sur les peuples autochtones a déjà été entrepris par un gouvernement canadien, en sachant qu'il aboutirait à un ensemble aussi vaste de recommandations. On se demande si ces recommandations seront un jour mises en oeuvre.

Je voudrais me montrer optimiste et espérer que le gouvernement prendra le rapport au sérieux. J'exhorte le gouvernement à s'attaquer rapidement aux problèmes d'une importance cruciale liés aux besoins de services dans les domaines du logement, de l'éducation et de la santé, de même qu'aux problèmes liés à la nécessité de créer un climat capable d'insuffler un meilleur esprit chez nos jeunes qui sont aujourd'hui victimes de notre société. Cette situation n'existe peut-être pas uniquement au sein de la société autochtone, mais elle y est plus visible.

Je ne veux pas m'attarder trop longtemps à ce problème. Je veux simplement signaler les préoccupations des autochtones. Le problème revêt pour eux une grande priorité et exige l'attention non seulement du gouvernement mais aussi du public.

J'espère que nous pourrons un jour nous asseoir ensemble dans un esprit d'harmonie et utiliser l'instrument mis à la disposition de chacun de nous aujourd'hui, le processus politique. Ce processus est un outil qui est à votre disposition, et il devrait être à la disposition également des peuples autochtones.

Certains se demandent s'il n'est pas irréaliste de parler d'un État dans l'État et d'un Parlement dans un Parlement. Certains estiment que cela est impossible. Cependant, si les gens ont la volonté de le faire, cela devient possible. Je crois que les Canadiens en arriveront un jour à comprendre que l'on réglera le problème en s'asseyant pour définir le modèle. Ce qui est à déplorer au Canada quand nous parlons du désir de devenir autonomes et indépendants, c'est que nous oublions rapidement que si nous ne définissons pas ce que sera cet instrument et quels seront ses liens avec les structures existantes, entre autres éléments de cette nature, personne ne comprendra.

Des voix: Bravo!

 

La santé

L'aménagement de locaux pour fumeurs
sur la colline du Parlement

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, voici revenue la saison où certains employés du Sénat sont condamnés à aller geler à l'extérieur pour faire quelque chose de parfaitement légal, fumer.

Les dangers que le tabac présente pour la santé sont très bien établis, et j'appuie les mesures qui visent à réduire la consommation de tabac. Mais je suis désolé de voir certains de nos collègues et des employés du Sénat condamnés à sortir à l'extérieur, bannis comme des malotrus et exposés aux rigueurs de l'hiver d'Ottawa. Je crois que c'est injuste et inacceptable.

Nous ne devrions pas punir ceux qui décident de fumer ni leur faire honte. Nous sommes tous d'accord pour dire qu'il faut prendre des mesures raisonnables pour réduire la consommation de tabac, mais il faudrait certes prendre des mesures raisonnables également pour fournir des locaux adéquats et bien ventilés aux fumeurs.

L'honorable Philippe Deane Gigantès: Honorable sénateur Di Nino, j'ai un ami proche qui vient d'être opéré pour un cancer au poumon après avoir fumé pendant des années.

Ses médecins lui ont dit qu'il devait éviter à tout prix d'inhaler de la fumée secondaire. Je vous félicite donc d'avoir proposé que nous trouvions des locaux particulièrement bien ventilés pour les fumeurs afin que la fumée secondaire soit expulsée à l'extérieur.

 


AFFAIRES COURANTES

L'ajournement

L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, ce soit à 13 h 30 demain, le mercredi 27 novembre 1996.

Son Honneur le Président: Permission accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

 

Affaires étrangères

Autorisation au comité de siéger
en même temps que le Sénat

L'honorable John B. Stewart: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)a), je propose:

Que le comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit autorisé à siéger à 15 h 15 demain, le mercredi 27 novembre 1996, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président: Permission accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

 


PÉRIODE DES QUESTIONS

L'Accord de libre-échange nord-américain

Le bois d'oeuvre-L'accord avec les États-Unis sur les quotas d'exportation-L'incidence sur l'emploi dans les provinces productrices-La position du gouvernement

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, ma question s'adresse à madame le leader du gouvernement au Sénat et traite de l'accord canado-américain sur le bois d'oeuvre. Cet accord est entré en vigueur en avril dernier. Aujourd'hui, nous apprenons que, en raison des quotas d'exportation vers les États-Unis précisés dans l'accord, bien des scieries qui ont atteint leurs quotas pour le trimestre ferment leurs portes plus tôt, mettant à pied des milliers de travailleurs. Par ailleurs, le prix du bois d'oeuvre a plus que doublé depuis l'entrée en vigueur de cet accord, ce qui a fait augmenter d'environ 3 000 de dollars, sinon plus le prix d'achat moyen d'une maison au Canada et aux États-Unis.

Cet accord nous fait perdre des emplois et aura un effet inflationniste. Sans vouloir reprendre l'expression utilisée par le chef de l'Association des manufacturiers du bois de sciage de l'Ontario, je dirais que le Québec et surtout l'Ontario se sont faits «avoir». Je ne crois pas que la province de l'Alberta soit très contente, elle non plus.

Madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle nous dire si ces résultats sont ceux auxquels s'attendait le gouvernement aux termes de l'accord? Dans la négative,le gouvernement est-il disposé à abolir cet accord que le gouvernement fédéral a négocié avec les États-Unis?

(1430)

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme le sait fort bien le sénateur, les quotas de bois d'oeuvre ont été établis avec soin afin de créer un système juste et équilibré tant pour l'industrie que pour les quatre provinces visées. Le gouvernement a collaboré de près avec le secteur manufacturier et les provinces pour élaborer le système de quotas qu'on commence à peine à appliquer.

La semaine dernière, en réponse à certaines questions à la Chambre des communes, le ministre des Affaires étrangères a déclaré que, une fois les quotas attribués, beaucoup d'entreprises se sont hâtées de produire le bois pour tirer profit des conditions du marché. Maintenant qu'elles ont rempli leurs quotas, elles cherchent des moyens d'en obtenir d'autres. Il a ajouté qu'il existait une banque de quotas de réserve pouvant être attribués aux entreprises qui veulent anticiper sur leurs quotas de l'an prochain.

Je ne sais pas si cela répond aux questions de mon honorable collègue. Je tenterai d'obtenir de plus amples renseignements auprès du ministre du Commerce international. Je crois que le système a été soigneusement négocié avec les provinces concernées. Le gouvernement ne voudra sûrement pas l'abolir, contrairement à ce que propose le sénateur. J'essaierai cependant d'obtenir des précisions sur l'autre partie de sa question.

Le sénateur St. Germain: Honorables sénateurs, madame le leader du gouvernement au Sénat a raison de dire que le gouvernement a été entraîné dans cette histoire. D'après ce que j'ai pu voir et les renseignements que j'ai pu recueillir, il ne fait aucun doute qu'il a consulté les provinces et le secteur. En dépit de cela, toutefois, je crois qu'on n'a pas respecté les dispositions de l'Accord de libre-échange.

Honorables sénateurs, nous aurions dû tenir bon et ne pas nous laisser bousculer par les Américains. Voici maintenant qu'ils ont droit de regard sur la gestion de nos ressources. Nous aurions dû tenir bon en dépit du fait que ma propre province, la Colombie-Britannique, et le secteur ont exercé des pressions abusives sur le ministre responsable, ici, à Ottawa, pour qu'il en arrive à un accord.

En fait, honorables sénateurs, on est en train de créer l'équivalent d'un office de commercialisation. La production est à toutes fins pratiques réglementée et, en principe, les prix le seront aussi.

Le premier ministre a récemment quitté le Canada après avoir conclu un accord avec le Chili dans un esprit de libéralisation des échanges et après avoir signé aussi cet accord, qui va à l'encontre du principe de la libéralisation des échanges. Madame le leader du gouvernement au Sénat ne croit-elle pas qu'il est absolument paradoxal de laisser créer un office de commercialisation du bois d'oeuvre d'une part, tout en parlant de libéralisation des échanges d'autre part?

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, c'est avec beaucoup d'intérêt que j'ai écouté les observations de mon collègue vu que ces négociations ont toujours été entre gouvernements. Dans ce cas-ci, le député a raison de dire que la Colombie-Britannique puis d'autres provinces intéressées ont exercé d'énormes pressions pour participer activement à ces négociations. L'accord qui a été conclu à l'époque était certes le meilleur possible dans les circonstances.

Je sais que des hauts fonctionnaires du ministère du Commerce international se sont entretenus plus tôt ce mois-ci avec des représentants de scieries de tout le pays ainsi que, comme le sénateur ne l'ignore pas, d'associations provinciales du secteur pour leur expliquer les méthodes d'attribution qui avaient été mises au point pour chacune des provinces.

Je comprends cependant la préoccupation du sénateur. Je vais la transmettre au ministre et voir si je peux obtenir une réponse qui contribuera à alléger cette préoccupation.

 

L'énergie

Le tracé du gazoduc extracôtier du Canada atlantique-Le rôle du Cabinet dans la prisede décision-La position du gouvernement

L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, ma question s'adresse aussi à la ministre. Je voudrais revenir sur le tracé du gazoduc de l'île de Sable, qui préoccupe vivement de nombreux Néo-Écossais et qui devrait préoccuper l'ensemble des Canadiens.

La ministre peut-elle nous dire si le Cabinet participera, de quelque façon que ce soit, au processus décisionnel concernant le choix du tracé du gazoduc?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je ne puis répondre à cette question. Comme le veut l'usage, les projets seront traités conformément à la procédure normale suivie par les organismes fédéraux de réglementation. Ces organismes s'appuient sur des principes de justice, d'équité et d'efficacité, qui serviront à évaluer tous les projets visés. Finalement, ce sont les forces du marché qui détermineront le projet retenu. C'est la ligne de conduite que l'on suit au Canada dans ces circonstances, et je n'ai aucune raison de penser qu'on agira autrement dans ce cas-ci.

Le sénateur Comeau: Honorables sénateurs, je crois savoir que les recommandations concernant l'évaluation environnementale du projet seront soumises au Cabinet pour qu'il les accepte ou qu'il les rejette. Puisqu'elle fait partie du Cabinet, la ministre reconnaîtra sûrement que le premier ministre a compromis tout le processus par les déclarations inacceptables qu'il a faites, non pas à une, mais bien à deux occasions, lorsqu'il a dit privilégier un certain tracé plutôt qu'un autre.

Comment madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle continuer à défendre un processus auquel son propre chef, le premier ministre de notre pays, a porté préjudice?

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, ce n'est pas la première fois que l'honorable sénateur me pose cette question. Il a porté à notre attention des observations que le premier ministre a faites, si je ne m'abuse, lors de discussions libres dans le Canada atlantique. À chaque occasion, le premier ministre a toutefois précisé que ce seraient les forces du marché qui prévaudraient.

[Français]

 

L'Accord de libre-échange nord-américain

La production du bois d'9uvre-Entente avec les États-Unis sur les contingents d'exportation-
Les raisons d'un engagement de 5 ans-
La position du gouvernement

L'honorable Roch Bolduc: Honorables sénateurs, est-ce que le leader du gouvernement au Sénat pourrait nous dire pourquoi le gouvernement a conclu engagement de cinq ans dans une matière aussi conjoncturelle que la production du bois d'9uvre?

On peut imaginer qu'en 1994, il y avait des pressions assez fortes des États-Unis pour conclure un marché et même si je trouvais qu'il n'était pas acceptable, on l'a conclu. Pourquoi l'a-t-on conclu pour cinq ans quand on sait qu'au début de l'entente, le prix des maisons a grimpé de 3 000 $ aux États-Unis en raison d'une pression énorme?

Il est évident que cela n'a pas de sens. Pourquoi a-t-on signé pour cinq ans? Pourquoi s'engager pour cinq ans?

[Traduction]

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je ne puis répondre à cette question, mais je me renseignerai.

 

La pauvreté au Canada

La parution des dernières statistiques-
La position du gouvernement

L'honorable Brenda M. Robertson: Honorables sénateurs, madame le leader du gouvernement au Sénat informerait-elle le Sénat des mesures particulières que le gouvernement envisage pour modifier ses orientations qui, selon l'Organisation nationale antipauvreté, sont à l'origine d'une aggravation de la pauvreté plutôt que de l'inverse?

Quand ils étaient dans l'opposition, les libéraux se scandalisaient du fait que, sous le gouvernement conservateur, 4,2 millions de Canadiens vivaient dans la pauvreté. Or, il y a maintenant 4,9 millions de Canadiens qui vivent au-dessous du seuil de pauvreté. Pendant la même période, le pourcentage d'enfants vivant dans la pauvreté est passé de 14 à 19 p. 100.

(1440)

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je voudrais que madame le sénateur sache que le ministre de la Santé nationale et du Bien-être social, le premier ministre et d'autres se sont dits fort inquiets à cet égard. Le gouvernement du Canada n'est certainement pas insensible à ce qui constitue une situation inacceptable dans notre pays. Je pense que tous les membres du gouvernement et tous les sénateurs en conviendront.

Le gouvernement poursuit ses efforts de concert avec les provinces et les territoires afin d'adopter des mesures visant à aider les familles de travailleurs avec enfants et les familles à bas revenu à se sortir du cercle vicieux de la pauvreté. Comme madame le sénateur le sait, le dernier budget prévoyait des mesures à cet égard, y compris l'amélioration du supplément du revenu gagné, les nouvelles lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants et les nouvelles allocations de soutien de l'enfant. Ce sont là des mesures que nous avons prises. Mais il reste beaucoup à faire. C'est une question à laquelle songent les ministres fédéraux, dont certainement le ministre du Développement des ressources humaines, qui est actuellement en pourparlers avec ses homologues provinciaux.

Le sénateur Robertson: Honorables sénateurs, on rapporte que le ministre de la Santé, M. Dingwall, a dit, à l'occasion d'une conférence de presse tenue hier sur le bien-être des enfants, que la situation des 1,4 million d'enfants vivant dans la pauvreté était liée aux problèmes de la criminalité juvénile, du décrochage scolaire, du suicide et des mauvais traitements, qui s'aggravent. Il a dit qu'il craignait que le pays n'en fasse pas assez. Je pense que tous les sénateurs seraient d'accord avec le ministre Dingwall à cet égard.

Dans les journaux d'aujourd'hui, il est question d'une annonce du comité interministériel d'examen des programmes sur cette question. Comte tenu du fait que nous n'en faisons pas assez et que, par conséquent, le gouvernement revoit ses dépenses en matière de programmes destinés aux enfants, madame le leader du gouvernement au Sénat pourrait-elle nous dire à qui le comité interministériel fera rapport? Quelle est la date limite du dépôt du rapport? Quel est le mandat de ce comité? Consultera-t-il les provinces, les groupes de représentation et d'autres parties intéressées?

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, c'est avec plaisir que je vais obtenir ces détails pour vous.

 

L'alphabétisation

L'utilisation des économies réalisées sur les
stocks ministériels excédentaires pour réduire
la taxe sur les produits et services sur les
imprimés-La position du gouvernement

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, chaque fois que nous demandons au ministre des Finances de ne plus imposer la TPS sur les livres, il répond que le gouvernement n'a pas d'argent et il nous demande de lui suggérer des moyens d'en trouver.

Honorables sénateurs, aujourd'hui, le vérificateur général a déclaré que, l'an dernier, le gouvernement avait gaspillé 1,25 milliard de dollars en gardant des stocks trop élevés. Il fallait y penser! Il a déclaré que, bien souvent, les ministères ne savent pas ce qu'ils ont en stock ni où leurs stocks se trouvent.

Ma question au leader du gouvernement au Sénat est la suivante: quelles mesures prendra le gouvernement pour éliminer ce problème honteux? S'engagera-t-il à utiliser les économies qu'il pourrait réaliser à ce chapitre pour abolir la TPS sur les livres?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le vérificateur général et le gouvernement sont préoccupés par ce problème, qui n'est pas nouveau. Le vérificateur général l'avait mentionné il y a quelque temps et il est déçu qu'il n'ait pas été réglé plus rapidement au fil des ans.

Honorables sénateurs, le gouvernement est donc sommé d'être plus efficace. Je suis convaincue que les ministres redoubleront d'efforts pour améliorer la situation. De grands progrès ont déjà été enregistrés.

Quant à la deuxième partie de la question de mon collègue, j'admire son esprit. Je partage son enthousiasme pour l'idée d'utiliser toutes les occasions pour accroître les possibilités d'alphabétisation, mais il comprendra qu'il m'est impossible de répondre à sa question.

Le sénateur Di Nino: Honorables sénateurs, je suis déçu que la ministre ne puisse pas répondre. J'espérais qu'elle propose de nous faire part d'une réponse à une date ultérieure.

J'ai une question complémentaire. En tant que ministre responsable de l'alphabétisation, peut-elle dire si son ministère a entrepris un examen des dépenses gouvernementales pour aider son collègue, le ministre des Finances, à trouver assez d'argent pour abolir la TPS sur les livres et les magazines? Peut-elle nous dire quelles mesures elle a prises en ce sens?

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, comme le sait le sénateur, lorsque le ministre des Finances a fait cette déclaration, il a beaucoup fait pour rendre les livres plus accessibles à beaucoup de Canadiens puisqu'il a majoré la remise sur le prix des livres pour les bibliothèques, les collèges, les universités, les conseils scolaires, les organisations d'alphabétisation et, bien sûr, les bibliothèques publiques. En outre, après des discussions avec moi et avec d'autres personnes, il s'est engagé à trouver d'autres moyens de remédier aux problèmes des Canadiens qui n'ont peut-être pas accès aux institutions que je viens d'énumérer. Nous voulons collaborer pour trouver des solutions pour ces gens. Nous reparlerons de cela au cours des semaines et des mois qui viennent.

 

L'énergie

Le tracé du gazoduc extracôtier du Canada
atlantique-La préférence du premier ministre-
La position du gouvernement

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire qui fait suite aux questions posées plus tôt par le sénateur Comeau. Elle concerne le transport du gaz de l'île de Sable.

Bien qu'on ait encore beaucoup de choses à apprendre et à comprendre au sujet des modalités de ce projet, la préoccupation que je veux exprimer aujourd'hui en est une que j'avais déjà il y a quelques semaines. Elle a trait à la capacité de l'Office national de l'énergie ou du Cabinet fédéral de prendre une décision libre et impartiale après avoir entendu le premier ministre du Canada dire à deux reprises qu'il préférait que le gaz de l'île de Sable soit transporté jusqu'au Maine via le Québec. Il a peut-être raison. Il a droit à son opinion. Toutefois, comment les habitants de la Nouvelle-Écosse peuvent-ils s'attendre à ce que l'Office national de l'énergie prenne une décision juste et équitable, connaissant la préférence du premier ministre?

Je n'ai pas besoin, honorables sénateurs, de rappeler à la ministre ce qui se passe au Cabinet, mais elle sait que le Cabinet doit d'abord approuver l'évaluation environnementale.

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je dirai au sénateur, tout comme j'ai dit au sénateur Comeau, que le premier ministre, lorsqu'il a été interrogé à ce sujet - plus d'une fois, je crois - a répondu aux questions qu'on lui avait posées. À la fin, il a dit clairement que l'organisme de réglementation, en qui les Canadiens et lui-même ont confiance, était l'Office national de l'énergie. C'est l'Office qui prendra une décision fondée sur les forces du marché, décision qui sera la plus avantageuse possible pour les Canadiens. C'est comme cela que la décision sera prise, et c'est ce que le premier ministre a dit.

Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, je suis étonné, consterné et presque sidéré. Comment peut-on s'attendre à ce qu'une décision impartiale soit prise lorsque le grand patron a dit qu'il voulait que les choses se fassent de telle ou telle façon? N'a-t-il pas au moins nui à cette capacité de prendre une décision impartiale? A-t-il mis ces gens sur un piédestal? Vont-ils renier leur pays et Dieu et le premier ministre et tout le reste du monde?

(1450)

Le premier ministre a dit à l'Office national de l'énergie quel tracé il préconise pour ce gazoduc. La ministre soutient-elle aux habitants de la Nouvelle-Écosse que ni l'Office national de l'énergie ni le Cabinet ne tiendront compte de cette préférence?

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, je ne sais pas ce qui s'est passé sous le gouvernement précédent, mais le premier ministre a dit que la décision qui sera retenue en fin de compte sera la décision économiquement réalisable que prendra l'Office national de l'énergie. Voilà comment cela se fera. Cela se fera équitablement, et avec toute la compétence que cet organisme a la réputation de posséder et qu'on lui reconnaît d'un bout à l'autre du pays. Rien ne viendra affaiblir la décision de cet organisme et, non, le premier ministre ne lui a pas dicté la décision à prendre, sénateur Forrestall.

 

La régie des sociétés

La démission du conseil d'administration des
Lignes aériennes Canadien international-
L'application de la recommandation du comité
des banques-La position du gouvernement

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, je désire poser une question apolitique au leader du gouvernement au Sénat au sujet des Lignes aériennes Canadien international.

Au mois de mai 1996, le comité sénatorial permanent des banques et du commerce a déposé son rapport sur la régie des sociétés. Ce rapport a été rédigé après la tenue d'audiences à la grandeur du Canada, pendant lesquelles le comité a rencontré les présidents-directeurs généraux, les présidents et les membres des conseils d'administration de la plupart des grandes sociétés canadiennes. Le sujet qui est revenu le plus souvent pendant les audiences était la responsabilité des administrateurs. Le comité a recommandé que la Loi canadienne sur les sociétés par actions soit modifiée pour donner aux administrateurs une défense basée sur la diligence raisonnable.

Le 15 novembre 1996, l'ensemble du conseil d'administration de la compagnie Canadien international démissionnait par crainte de devoir assumer la responsabilité des difficultés financières que la société commençait à éprouver. Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas rapidement pris des mesures pour appliquer les recommandations du comité sénatorial permanent des banques et du commerce?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, il s'agit de toute évidence d'une question apolitique à laquelle je tenterai d'obtenir une réponse apolitique.

 

Énergie atomique du Canada

La vente de réacteurs CANDU à la Chine-
L'application des normes en matière d'environnement
et de sécurité-La position du gouvernement

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, je voudrais poser une question à trois volets au leader du gouvernement au Sénat.

Le premier ministre a participé avec enthousiasme, c'est le moins qu'on puisse dire, à la signature d'un accord de vente de réacteurs CANDU à la Chine. Il aurait dit que l'examen prévu par la Loi canadienne sur la protection de l'environnement ne s'applique pas aux ventes à l'étranger et aurait en outre indiqué qu'il y aurait d'autres ventes à la Chine.

Compte tenu de ce que je viens de dire, je voudrais, premièrement, savoir sur quelle évaluation de la protection de l'environnement se fonde le premier ministre pour arriver à la conclusion que la vente du réacteur CANDU à la Chine ne pose pas de risques pour l'environnement. Nous savons tous que les problèmes environnementaux font fi des frontières. Cependant, je ne parle pas ici d'évaluation par la Chine, mais d'évaluation par le Canada.

Deuxièmement, quelles mesures de sécurité ont été prises, en dehors des voeux pieux mentionnés dans l'accord, pour s'assurer que le réacteur CANDU sera utilisé à des fins pacifiques et non à des fins militaires?

Enfin, si nous sommes prêts à vendre des réacteurs aux autres pays sans nous préoccuper des normes en matière d'environnement et de sécurité, pourquoi estimons-nous devoir maintenir des normes différentes au Canada? Est-ce que cela veut dire que nous allons maintenant vendre des réacteurs CANDU sans nous préoccuper des risques pour l'environnement et sans nous préoccuper de la sécurité dans les autres pays, ou le cas de la Chine est-il unique, spécial?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je prends note de certaines de ces questions.

Je voudrais cependant faire remarquer que lors de la signature de l'accord de coopération nucléaire avec la Chine en novembre, il y a deux ans, la Chine s'est engagée formellement à utiliser à des fins pacifiques et non explosives toutes les matières qui lui sont fournies par le Canada. Cet engagement inclut les méthodes de vérification et toutes les questions concernant les réacteurs. Le réacteur CANDU sera conçu, construit et exploité conformément aux normes et codes canadiens, auxquels sera également soumise l'adaptation de ces réacteurs aux conditions locales en Chine.

Le sénateur sait que le gouvernement a été d'avis que la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale ne s'appliquait pas à cette vente étant donné qu'elle ne régit pas les transactions de la SEE. EACL a pour principe de procéder à une évaluation environnementale de tous ses projets et a travaillé avec les autorités chinoises à la préparation de celui. Cependant, je chercherai à obtenir d'autres détails pour mon honorable collègue.

Le sénateur Andreychuk: Honorables sénateurs, la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale a été mise en place dans le simple but de permettre une évaluation environnementale plus indépendante. Pourquoi le gouvernement canadien pense-t-il que les évaluations réalisées à l'interne par Énergie atomique du Canada sont suffisantes?

Si nous nous préoccupons de l'environnement, comme semble l'indiquer le fait que nous exigions des accords parallèles dans nos arrangements commerciaux avec le Chili et dans l'ALENA, pourquoi ne pas en faire de même avec la Chine et pourquoi ne pas la soumettre au même examen minutieux?

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, j'ajouterai ces questions à ma liste.

 

RÉPONSES DIFFÉRÉES À DES QUESTIONS ORALES

L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai la réponse différée à une question que l'honorable sénateur Lynch-Staunton a posée au Sénat le 29 octobre 1996 au sujet du renvoi de questions constitutionnelles à la Cour suprême du Canada et la réponse à une question que l'honorable sénateur Forrestall a posée au Sénat le 31 octobre 1996 au sujet de l'harmonisation de la TPS avec les taxes de vente provinciales et de son effet sur les entreprises.

 

L'UNITÉ NATIONALE

Le renvoi de questions constitutionnelles à la Cour suprême du Canada-La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable John Lynch-Staunton le 29 octobre 1996)

Les trois questions concernant directement le Québec ont été renvoyées à la Cour suprême le 30 septembre 1996.

Voici le libellé des trois questions constitutionnelles qui ont été renvoyées à la Cour suprême le 30 septembre dernier:

1. L'Assemblée nationale, la législature, ou le gouvernement du Québec peut-il, en vertu de la Constitution du Canada, procéder unilatéralement à la sécession du Québec du Canada?

2. L'Assemblée nationale, la législature, ou le gouvernement du Québec, possède-t-il, en vertu du droit international, le droit de procéder unilatéralement à la sécession du Québec du Canada? À cet égard, en veru du droit international, existe-t-il un droit à l'autodétermination qui procurait à l'Assemblée nationale, la législature, ou le gouvernement du Québec le droit de procéder unilatéralement à la sécession du Québec du Canada?

3. Lequel du droit interne ou du droit international aurait préséance au Canada dans l'éventualité d'un conflit entre eux quant au droit de l'Assemblée nationale, de la législature ou du gouvernement du Québec pour procéder unilatéralement à la sécession du Québec du Canada?

 

La taxe sur les produits et services

L'harmonisation avec les taxes de vente provinciales--
L'effet sur les entreprises--
La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable J. Michael Forrestall le 31 octobre 1996)

Les Canadiens ont dit avec fermeté qu'ils préféraient connaître le prix global des biens et des services qu'ils achètent, avant d'en faire l'acquisition. La méthode d'établissement des prix toutes taxes comprises sous le régime de la taxe de vente harmonisée avec les trois provinces de l'Atlantique répond directement à cette préférence des consommateurs. Grâce à une telle méthode d'établissement des prix, les consommateurs du Nouveau-Brunswick, de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve et du Labrador sauront, avant de se présenter à la caisse, ce que leurs achats leur coûtent véritablement. Ils pourront ainsi prendre des décisions d'achat tout en étant mieux informés.

Les gouvernements participants ont mené de vastes consultations auprès du secteur de l'entreprise et ils poursuivent leurs consultations au sujet de la question de l'observation. Les gouvernements savent que des rajustements opérationnels devront être apportés à la méthode d'établissement des prix toutes taxes comprises. En conséquence, des règles ont été établies pour minimiser les perturbations pour le monde des affaires tout en répondant aux souhaits des consommateurs.

Qui plus est, le fait de retrancher la taxe de vente provinciale des intrants d'entreprise et d'adopter un mécanisme de gestion unique de la taxe aura des retombées économiques importantes pour les entreprises des provinces participantes. Les gouvernements participants sont d'avis que les consommateurs devraient également en tirer profit. Et c'est pourquoi ils ont proposé la méthode de l'établissement des prix toutes taxes comprises.

 


ORDRE DU JOUR

Projet de loi portant mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange Canada-Israël

Deuxième lecture-Ajournement du débat

L'honorable Peter A. Stollery propose: Que le projet de loi C-61, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange Canada-Israël, soit lu une deuxième fois.

-Honorables sénateurs, le Canada, plus que tout autre pays développé du monde, dépend du commerce pour créer des emplois et assurer la croissance économique. Un emploi canadien sur trois dépend de nos exportations. Chaque tranche d'exportations d'un milliard de dollars crée ou maintient 11 000 emplois. Les exportations génèrent 37 p. 100 de notre produit intérieur brut. Nous avons donc le choix entre l'expansion et la diversification de notre commerce ou la stagnation et même le déclin de notre niveau de vie.

Le Canada est présent dans presque toutes les régions du monde où il s'efforce de dégager de nouveaux marchés et de libéraliser le commerce. Je suis donc heureux de parler aujourd'hui du nouvel accord intervenu entre le Canada et Israël.

Depuis de nombreuses années, le Canada et Israël s'intéressent activement à l'instauration du libre-échange à l'échelle mondiale. Alors que le Canada établissait le libre-échange avec les États-Unis, grâce à l'Accord de libre-échange nord-américain, Israël s'occupait aussi de l'expansion de son commerce en signant des accords de libre-échange avec les États-Unis et, plus récemment, avec l'Union européenne, la Turquie, la République tchèque et la Slovaquie. Cependant, le commerce entre nos deux nations était demeuré stagnant.

En novembre 1994, les premiers ministres Jean Chrétien et Itzhak Rabin ont décidé de remédier à cette situation. Les deux leaders ont annoncé le début des négociations qui mèneraient à la signature d'un accord de libre-échange entre le Canada et Israël. En janvier 1996, nos deux pays étaient parvenus à un accord de principe, que les deux gouvernements ont continué d'améliorer. Le 31 juillet dernier, Art Eggleton, ministre du Commerce international, et Natan Charansky, ministre israélien du Commerce international, ont signé l'Accord de libre-échange Canada-Israël.

L'Accord de libre-échange Canada-Israël incitera les deux nations à devenir plus concurrentielles dans le contexte de la mondialisation des marchés et à intensifier le commerce bilatéral.

(1500)

On prévoit que cet accord ouvrira un plus grand nombre de débouchés puisque, à compter du 1er janvier 1997, les entreprises canadiennes et israéliennes auront directement accès, en franchise, à leurs marchés réciproques pour presque tous les produits industriels. En outre, les deux partenaires bénéficieront de la réduction ou de l'élimination des droits de douane sur les produits agricoles.

Toutefois, à la demande des deux pays, les produits laitiers, les oeufs et la volaille sont exclus de l'accord en ce qui concerne la réduction des droits de douane. Il en est de même des industries culturelles et du Pacte de l'automobile.

D'autres secteurs commerciaux comme ceux des services et des marchés publics continueront à être réglementés en fonction des droits et des obligations aux termes de l'Organisation mondiale du commerce.

L'accord définit aussi des règles d'origine claires et explicites, ce qui est un élément crucial de toute relation commerciale fructueuse. Par ailleurs, pour régler les différends pouvant survenir dans le cadre de cet accord, les deux parties ont convenu de s'en remettre à un mécanisme de règlement exécutoire des différends.

Il y a dans l'économie israélienne plusieurs secteurs dans lesquels les entreprises canadiennes pourront faire des percées plus marquées. Il s'agit entre autres des systèmes de communication électronique de pointe, des projets énergétiques, de la recherche d'hydrocarbures, de l'agroalimentaire, des produits du poisson et du matériel écologique.

Dans le seul secteur de l'agroalimentaire, le nouvel accord avec Israël ouvrira de nouveaux marchés aux produits canadiens tels que les céréales, les graines oléagineuses, les légumineuses à grain, le boeuf, le sirop d'érable, les boissons alcooliques et une variété d'aliments préparés. Chaque région canadienne bénéficiera dans une certaine mesure de l'amélioration de l'accès au marché israélien.

Pour le moment, les échanges entre les deux pays sont encore modestes bien qu'ils soient en hausse. En 1995, les échanges bilatéraux ont augmenté de 37 p. 100 pour dépasser les 450 millions de dollars. Je suis convaincu que ce chiffre ne peut qu'augmenter avec l'ouverture de nos marchés grâce à l'accord.

Le Canada a lancé une offensive sur plusieurs fronts pour renforcer ses liens bilatéraux avec Israël et pour récolter les fruits que des rapports aussi étroits devraient produire sur le plan économique. Une fois l'accord en vigueur, les exportateurs canadiens seront un même pied que leurs concurrents américains et européens qui bénéficient déjà d'accords commerciaux avec Israël.

Les entreprises et les provinces canadiennes, qui connaissent la valeur du commerce, appuient l'accord de libre-échange Canada-Israël. Du fait de son niveau de vie élevé et de sa croissance économique impressionnante, Israël représente un marché en expansion pour beaucoup de biens et de services canadiens. De plus, les exportateurs canadiens désireux de vendre des produits et des services en Israël peuvent bénéficier de tous les services financiers et de gestion des risques offerts par la Société pour l'expansion des exportations, grâce à quatre lignes de crédit, pour financer les achats par des Israéliens.

La nouvelle atmosphère de collaboration entre le Canada et Israël montre déjà des résultats tangibles, même avant l'entrée en vigueur de l'accord. Par exemple, la Fondation Canada-Israël pour la recherche et le développement industriels, a été créée en 1993 pour promouvoir la collaboration industrielle entre sociétés des deux pays. La fondation appuie des projets bilatéraux en mettant en rapport des sociétés canadiennes et des sociétés israéliennes. Elle fournit également des prêts remboursables pour des entreprises conjointes prometteuses. Le Canada ouvre une nouvelle voie avec ce projet innovateur, cofinancé par des partenaires des secteurs publics et du secteur privé.

Même si l'accord de libre-échange est entre le Canada et Israël, nous avons proposé d'en étendre les avantages à la Cisjordanie et à Gaza, ce qu'Israël a accepté. Nous recherchons des moyens de parvenir à une collaboration avec les autorités palestiniennes.

Nous sommes également prêts à examiner des moyens de développer le commerce avec d'autres pays du Moyen-Orient. Cette région représente en effet un riche marché pour le Canada et la conclusion d'un accord avec Israël est une progrès notable vers la réalisation de nos objectifs.

Dans la décennie qui a suivi la fondation de l'État d'Israël, le Canada a offert son amitié et son soutien. Le bien-être et la sécurité d'Israël sont de la plus grande importance pour le Canada. Nous pensons que la meilleure façon d'assurer la sécurité d'Israël, et d'ailleurs la sécurité de toute la région, est de poursuivre le processus de paix.

Bien des choses ont été accomplies en ce sens, depuis un traité de paix en bonne et due forme signé par Israël et la Jordanie jusqu'aux accords provisoires conclus entre Israël et l'OLP concernant l'autonomie palestinienne en Cisjordanie et à Gaza. Quand on contemple tout ce qui a été accompli, on se rend compte de la gravité des événements récents et des défis qui nous attendent. Nous sommes rassurés par le fait qu'au sommet de Washington les dirigeants palestiniens et israéliens ont promis de renoncer à la violence et de reprendre immédiatement les négociations. Ce n'est que par le dialogue qu'il est possible de rétablir une confiance qui a été mise à dure épreuve.

Nous souhaitons vivement que ces négociations débouchent sur l'application suivie des accords d'Oslo et, de là, sur la reprise des négociations sur le statut final. La résolution des difficiles problèmes auxquels sont confrontés Israël et les Palestiniens passe par la négociation, et non pas par les actes de violence commis de part et d'autre. Je suis d'avis que notre participation active au processus de paix a contribué au rétablissement de la confiance et de la paix. Au cours des 50 dernières années, le Canada a participé aux efforts visant à ramener la paix dans la région. Aujourd'hui, nous perpétuons cette tradition de dévouement à la cause de la paix. Nous avons accepté le défi en présidant le groupe de travail sur les réfugiés dans le cadre des efforts multilatéraux pour la continuation du processus de paix. Nous continuerons d'appuyer le développement économique de la région, y compris l'aide aux Palestiniens. Notre objectif consiste en une paix juste, globale et durable, fondée sur les principes énoncés dans les résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité des Nations Unies.

Le Canada assume ses responsabilités à l'égard du processus de paix. Nous sommes prêts à poursuivre le combat en faveur de la paix, à défendre la cause de la paix et à appuyer les dirigeants de la région qui sont résolus à prendre des risques pour la paix.

Par ailleurs, il ne faut pas oublier les importants progrès que l'on a réalisés grâce à l'établissement de relations économiques dans la région. En 1994 et en 1995, des dirigeants politiques et des chefs d'entreprise de la région ainsi que des représentants de la communauté internationale se sont réunis, d'abord à Casablanca et, l'année dernière, à Amman, en Jordanie. Plus tard ce mois-ci, le Canada se joindra à d'autres pays au Caire. Fait sans précédent, nous envoyons à cette réunion une délégation du secteur privé, ce qui témoigne non seulement de l'intérêt que nous portons à cette région mais également de notre conviction que d'importantes opportunités d'affaires s'y présentent.

L'objectif de ces sommets est d'accroître la coopération économique régionale. Toujours dans le même esprit, on a créé la Banque de développement du Moyen-Orient pour favoriser l'activité commerciale. Le Canada appuie également le Sommet du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord qui devrait avoir lieu plus tard ce mois-ci au Caire.

L'Accord de libre-échange Canada-Israël va compléter nos efforts d'expansion des échanges commerciaux sur d'autres marchés importants. Depuis 1993, les exportations canadiennes ont augmenté de près de 30 p. 100. Le gouvernement canadien entend doubler d'ici l'an 2000 le nombre d'entreprises exportatrices. Nous pensons que cela apportera une contribution importante à la croissance économique et à la création d'emplois. Une bonne partie de ces nouveaux exportateurs seront des petites et moyennes entreprises, les principaux créateurs d'emplois au Canada. Nous espérons que certaines d'entre elles choisiront de se lancer dans l'exportation sur le marché israélien qui est solide et en pleine expansion.

Le gouvernement fédéral adopte la méthode «Équipe Canada» dans le cadre de ses projets de développement sur le marché international, en faisant participer tous les ordres de gouvernement et le secteur privé. Ce partenariat améliore les services d'exportation et ainsi, les exportations augmentent.

Le gouvernement fédéral poursuit sa stratégie de création d'emplois, qui répond aux besoins de création d'emplois immédiats et à long terme et met l'accent sur les partenariats à tous les niveaux. L'objectif de cette stratégie est de stimuler l'économie canadienne et de créer ainsi des emplois pour les Canadiens. Le gouvernement et les Canadiens eux-mêmes déploient d'énormes efforts depuis deux ans et demi et consentent des sacrifices pour créer un climat sain dans lequel les entreprises peuvent prendre de l'expansion et offrir de nouveaux débouchés. Les résultats se font déjà sentir. Le nombre d'emplois augmente. On a créé plus de 113 000 emplois durant le premier semestre de 1996, et on prévoit que le Canada profitera de la plus forte croissance de l'emploi parmi tous les pays du G-7, cette année et l'année prochaine.

Les initiatives du gouvernement au Canada pour créer de l'emploi, ainsi que ses activités de développement du commerce international et ses efforts continus pour libéraliser les échanges, permettront aux Canadiens de réussir au Canada et à l'étranger. En plus d'accroître les échanges et de créer des emplois, l'Accord de libre-échange Canada-Israël envoie le message que le Canada est prêt à commercer avec le monde entier. Il renforce notre position selon laquelle pour nous, le libre-échange n'est pas synonyme de blocs commerciaux, mais bien d'échanges libéralisés dans le monde entier. On dit également clairement ainsi que le Canada croit dans le processus de paix au Moyen-Orient. Nous pensons que la prospérité aide à conduire à la stabilité et que la santé économique est essentielle à une paix durable dans la région.

Le monde est au bord d'une nouvelle ère captivante, alors que les marchés et les esprits s'ouvrent au libre-échange de produits, de services et d'idées. Dans ce monde, les Canadiens ne peuvent être et ne seront pas des observateurs passifs. Nous devons considérer ces nouveaux défis comme autant de nombreux nouveaux débouchés.

Les Canadiens ont déjà montré qu'ils étaient capables d'être compétitifs dans ces nouvelles conditions, et il faut donc continuer à ouvrir les portes aux entrepreneurs canadiens. Continuons de chercher de nouveaux marchés et de nouveaux débouchés. Sachons que cet Accord de libre-échange avec Israël est un autre pas important dans la voie de la paix et de la prospérité.

(1510)

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, je serai bref, puisque, à la deuxième lecture, on nous demande de voter sur le principe du projet de loi.

La position du Parti conservateur sur le libre-échange ne laisse planer aucun doute. Nous, pour notre part, avons été constants. Notre position a été claire au fil des ans et nous la maintenons aujourd'hui. Par conséquent, nous accueillons favorablement cette mesure législative aujourd'hui. Nous avons hâte de la renvoyer au comité où elle sera examinée.

Honorables sénateurs, je ne peux pas formuler ces observations sans souligner que notre position, bien que constante, contraste beaucoup avec celle des libéraux, qui, pendant de nombreuses années, ont dénigré le libre-échange en général. Ils ont dit une chose lorsqu'ils étaient dans l'opposition. Maintenant, comme nous l'avons entendu, sans la moindre honte, ils adoptent une position diamétralement opposée, car ils doivent affronter, en tant que gouvernement, la réalité qu'est la mondialisation de l'économie et trouver les meilleurs moyens pour s'y adapter.

Je vais citer un passage du livre rouge, car on nous demande toujours d'y croire. Pas plus tard que le mois dernier, on nous a dit que 78 p. 100 des promesses qu'il renfermait avaient été tenues. À la page 21 du livre rouge des libéraux, on dit:

En 1988, les libéraux étaient opposés au traité de libre-échange canado-américain, parce qu'il était très imparfait. Le marché américain ne s'est pas ouvert tout grand.

Un peu plus loin, on dit:

Un gouvernement libéral renégociera le traité de libre-échange canado-américain et l'ALENA...

Il s'agit du même livre dans lequel on dit ailleurs que les libéraux remplaceront la TPS.

Le livre rouge des libéraux menaçait même de résilier les accords de libre-échange «s'ils ne peuvent pas être révisés de manière satisfaisante».

Ce sont là des propos hardis que beaucoup de Canadiens ont écoutés très attentivement. Un grand nombre d'entre eux ont été influencés par ces paroles lorsqu'ils ont voté pour le Parti libéral en octobre 1993.

Le sénateur Murray: Le sénateur Stollery était encore plus négatif.

Le sénateur Lynch-Staunton: Je ne voudrais pas causer le moindre embarras au sénateur Stollery en citant certaines de ses paroles. Je suis certain que même lui protesterait. Il invoquerait le Règlement, avec raison, et je l'approuverais.

Quels sont les résultats de ces fermes engagements? En mai dernier, le ministre du Commerce international a admis en toute candeur devant un comité de la Chambre des communes que les négociations n'avaient pratiquement rien donné et qu'aucune abrogation n'était prévue. En fait, les accords de libre-échange ont en grande partie eu du succès sans qu'il y ait eu la moindre amélioration.

M. Eggleton, comme son prédécesseur, n'hésite jamais à citer les volumes d'exportation records qui sont atteints depuis l'entrée en vigueur de l'ALE. En fait, l'enthousiasme des libéraux pour la libération des échanges est sans borne. Le premier ministre parcourt le monde en louant ses mérites et en offrant de signer d'autres accords avec n'importe quel régime, démocratique ou despote. À Manille, il élimine de son vocabulaire l'expression «droits de la personne». À Shan-Ghai, les préoccupations environnementales sont balayées du revers de la main comme étant un irritant inacceptable. Tout cela est le fait de celui-là même qui invite les Canadiens à croire au livre rouge qui dit que, pour mettre en oeuvre la réforme écologique, le gouvernement doit être dynamique sur les dossiers prioritaires.

C'est ce même gouvernement qui adopte des règlements qui exemptent les réacteurs nucléaires CANDU vendus à la Chine de certaines dispositions de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Comment cela respecte-t-il les obligations du livre rouge? Je pense que même les auteurs pourraient difficilement répondre.

Quant à l'Accord de libre-échange Canada-Israël, il s'accompagne d'une histoire incomparable qu'il vaut la peine de rappeler. L'accord a d'abord été proposé par Israël en 1988, mais le Canada n'y a pas donné suite à ce moment, parce que le gouvernement était très occupé à conclure l'accord de libre-échange avec les États-Unis. L'administration Clinton a convaincu le Congrès de conclure rapidement les deux accords. En conséquence, les exportations des États-Unis vers Israël ont augmenté considérablement ces dernières années pendant que les exportateurs canadiens étaient confrontés à des taux tarifaires allant jusqu'à 20 p. 100. Au même moment, Israël bénéficie de tarifs préférentiels et est considéré comme un pays en développement.

Ceux qui présentent aujourd'hui l'accord doivent accepter le blâme concernant le retard mis à déposer l'accord devant le Parlement et les ennuis que ce retard a causés aux exportateurs canadiens. Ils sont responsables d'avoir maintenu les Canadiens dans une position désavantageuse face aux États-Unis et à l'Europe en ce qui a trait aux exportations vers Israël.

Ils veulent maintenant faire adopter un accord de libre-échange entre nos deux pays. Ils peuvent revendiquer à bon droit - je leur en reconnais le mérite - la responsabilité d'avoir cherché à conclure cet accord malgré les vives objections, nous dit-on, de fonctionnaires peu favorables à cette initiative.

Le premier ministre Rabin a été le premier dirigeant étranger à visiter Ottawa après les dernières élections. On croit savoir qu'il hésitait à soulever la question étant donné le peu d'intérêt que le Canada y portait auparavant. En fait, c'est M. Chrétien qui, nous dit-on, a abordé le sujet avec M. Rabin et a fait pression sur les hauts fonctionnaires pour que des négociations en bonne et due forme débutent un an plus tard, en novembre 1994. C'est donc le premier ministre qu'il faut féliciter d'avoir incité son gouvernement à conclure cet accord en dépit de la résistance des hauts fonctionnaires au ministère des Affaires étrangères, à ce qu'on dit.

J'espère que les audiences du comité permettront un examen complet de notre politique générale à l'endroit du Moyen-Orient, car c'est une région à laquelle nous accordons trop peu d'attention. Cet accord nous amènera inévitablement à nous intéresser de plus près à ce qui s'y passe.

Quant à l'accord lui-même, il comporte des dispositions qui lui sont uniques et auxquelles il faut apporter une attention particulière. Par exemple, on trouve plusieurs fois répétée dans le projet de loi l'expression «ou autre bénéficiaire de l'ALÉCI». On présume qu'il s'agit d'une allusion à la Palestine, bien que le paragraphe 58.4(1) stipule ceci:

Le gouverneur en conseil peut, par règlement, définir les expressions «Israël ou autre bénéficiaire de l'ALÉCI» et «importé d'Israël ou d'un autre bénéficiaire de l'ALÉCI».

La question se pose d'elle-même: faut-il interpréter cette expression comme signifiant que l'application de l'accord peut être élargie sans le consentement du Parlement?

J'espère que cette question et d'autres concernant l'accord en particulier et notre politique au Moyen-Orient en général seront abordées devant le comité des affaires étrangères. Pour ma part, je suis impatient d'assister aux audiences qu'il consacrera à cette mesure législative extrêmement importante.

(Sur la motion du sénateur Prud'homme, le débat est ajourné.)

 

Code de conduite

Le comité mixte spécial-Autorisation de reporter
la date de présentation du rapport final

L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je propose:

Que le Sénat se joigne à la Chambre des communes afin de reporter la date de présentation du rapport du comité mixte spécial sur un code de conduite au vendredi 13 décembre 1996;

Que, sans égard aux pratiques habituelles, si le Sénat ne siège pas lorsque le rapport final du comité sera terminé, le rapport puisse être déposé auprès du greffier du Sénat et qu'il soit considéré comme ayant été présenté à cette Chambre; et

Qu'un message soit transmis à la Chambre des communes pour l'en informer.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

 

Terre-Neuve

Les changements apportés au système scolaire-
La modification de la clause 17 de la Constitution-
Le rapport du comité-La motion d'amendement-
Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Rompkey, c.p., appuyée par l'honorable sénateur De Bané, c.p., tendant à l'adoption du treizième rapport du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles (modification de la Constitution du Canada, clause 17 des Conditions de l'union de Terre-Neuve avec le Canada), déposé auprès du greffier du Sénat le 17 juillet 1996.

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Doody, appuyée par l'honorable sénateur Kinsella, que le rapport ne soit pas adopté maintenant, mais qu'il soit modifié par substitution aux mots «sans amendement, mais avec une opinion dissidente», des mots:

«avec l'amendement suivant:

Supprimer le passage de l'alinéa b) de la clause 17 qui précède le sous-alinéa (i) et le remplacer par les mots «là ou le nombre le justifie.»

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Cogger, appuyé par l'honorable sénateur Bolduc: Que la motion d'amendement soit modifiée par substitution aux mots «avec l'amendement suivant:» des mots «avec les amendements suivants: a)», par suppression du point à la fin de l'amendement et par adjonction des mots suivants:

«b) Supprimer les mots «d'y régir» à l'alinéa c) de la clause 17 et y substituer les mots «d'y déterminer et d'y régir».»

L'honorable Gérald-A. Beaudoin: Honorables sénateurs, je voudrais dire quelques mots de la modification proposée à la Constitution du Canada, à la clause 17 des Conditions de l'union de Terre-Neuve avec le Canada.

(1520)

[Français]

Le rapport du comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles démontre le rôle que joue le Parlement, en particulier le Sénat, en matière de protection des droits des minorités et des droits confessionnels. Plusieurs points de vue ont été exprimés à Ottawa et à Terre-Neuve devant notre comité. Les séances à Terre-Neuve ont été particulièrement intenses. Je suis heureux d'y avoir participé. Le débat a été et demeure assez émotif. Il ne faut pas s'en surprendre!

Sur le plan juridique, par contre, il y a lieu de retenir les points suivants: premièrement, il s'agit d'un amendement constitutionnel qui tombe clairement sous l'article 43 de la Loi constitutionnelle de 1982, soit la formule bilatérale d'amendement; en effet, Terre-Neuve se trouve dans une situation qui ne ressemble à celle d'aucune autre province; les juristes s'accordent tous sur ce point; deuxièmement, il n'y avait pas lieu, sur le plan strictement juridique, de tenir un référendum; le référendum, dans notre système, étant purement consultatif et ne faisant pas partie de la formule d'amendement, il n'était pas nécessaire d'y recourir; on est porté, au Canada, à recourir trop souvent à des référendums; troisièmement, en se prononçant sur cette question, le Sénat ne s'ingère pas dans la compétence exclusive de la province en matière d'éducation; il remplit tout simplement le devoir que lui dicte la Constitution, plus précisément l'article 43 de la Loi constitutionnelle de 1982; quatrièmement, la Charte canadienne des droits et libertés n'a pas d'incidence sur la question des droits confessionnels, ainsi que le prévoit l'article 29 de la Loi constitutionnelle de 1982, qui prévoit:

[Traduction]

Les dispositions de la présente charte ne portent pas atteinte aux droits ou privilèges garantis en vertu de la Constitution du Canada concernant les écoles séparées et autres écoles confessionnelles.

[Français]

De plus, la Cour suprême du Canada s'est déjà prononcée sur cette question en 1987, dans le Renvoi sur le projet de loi 30 de l'Ontario, dans lequel Mme le juge Wilson déclare:

Les droits ou privilèges garantis par le par. 93(1) ne peuvent faire l'objet d'un examen en vertu de l'art. 29 de la Charte. J'estime que cela est clair. [...] À mon avis, on n'a jamais voulu que la Charte puisse servir à annuler d'autres dispositions de la Constitution et, en particulier, une disposition comme l'art. 93, qui représente une partie fondamentale du compromis confédéral.

[Traduction]

Les droits à l'enseignement confessionnel mentionnés à l'article 93 sont des droits collectifs, comme l'ont dit le Conseil privé et la Cour suprême. Les droits garantis par la Charte canadienne des droits et libertés sont par contre des droits individuels, comme l'a déclaré la Cour suprême du Canada. Une disposition de la Constitution ne peut contredire une autre disposition de la même Constitution. La charte de 1982 n'écarte pas l'article 93, qui constitue en soi un code. Cela fait partie du compromis de 1867, pour reprendre les propos de sir Lyman Duff, l'un des plus grands juges en chef du Canada. La clause 17 fait partie du compromis qu'était l'accord conclu en 1949 à l'entrée de Terre-Neuve et du Labrador dans le Canada. Jusqu'à maintenant, la Cour suprême a reconnu deux catégories de droits collectifs, les droits à l'enseignement confessionnel et les droits des autochtones.

(1530)

Depuis 1867, nos textes constitutionnels disent que l'éducation relève des provinces, sous réserve des droits existants à l'enseignement confessionnel. C'est le cas au Québec et en Ontario depuis 1867. Il est question de ces deux provinces dans l'article 93 de la Constitution.

La province de Terre-Neuve et du Labrador veut maintenant que les droits à l'enseignement constitutionnel garantis par la clause 17 soient désormais assujettis au droit provincial d'application générale. Dans les démocraties parlementaires, aucune disposition n'est éternelle. Le régime peut être modifié du tout au tout. C'est une question de choix et de principes.

[Français]

Dans le cas de la résolution de Terre-Neuve qui est devant nous, on laisse entendre que l'école confessionnelle sera protégée alors qu'une simple loi provinciale suffira pour l'écarter. C'est dire qu'on laisse tomber une garantie constitutionnelle. Je ne crois pas que ce soit la bonne façon de procéder. Jusqu'ici, la province avait compétence en éducation sous réserve des garanties constitutionnelles. Dorénavant, elle légiférera tout simplement sans égard à aucune garantie.

L'amendement proposé par l'honorable sénateur Doody abroge l'alinéa 1b) de la clause 17 et y substitue le critère juridique «là où le nombre le justifie». C'est un critère très bien connu en droit constitutionnel canadien, qui a été utilisé à l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés de 1982 et qui a déjà fait l'objet de décisions de la Cour suprême du Canada. L'amendement du sénateur Cogger m'apparaît utile également.

[Traduction]

Aux audiences du comité des affaires juridiques et constitutionnelles, à Terre-Neuve, un juriste, M. Colin Irving, a proposé l'amendement «là où le nombre le justifie». Il m'a convaincu qu'on pouvait utiliser l'expression au sujet des droits à l'enseignement confessionnel.

[Français]

Je désire expliquer qu'il faut situer le vote sur la résolution relative à la clause 17 dans le contexte propre à Terre-Neuve. D'autres provinces pourraient désirer un amendement à l'article 93. Il est à prévoir que d'autres provinces suivront. Ainsi, le Québec pourrait vouloir amender l'article 93 pour départager son système scolaire selon la langue, plutôt que selon la religion, comme c'est le cas au Québec depuis 1867; personnellement, je pourrais voir d'un 9il favorable un tel amendement demandé par le Québec si, par exemple, on retenait aussi le principe de l'école confessionnelle «là où le nombre le justifie». À mon avis, ce serait agir selon les grandes lignes de force de l'histoire du Québec et du Canada.

Dans le domaine de l'éducation et des droits confessionnels, il n'est pas vrai que tout peut se régler par un «oui» ou un «non». Dans les pays où l'école, en principe, est laïque, il existe toujours des ententes ou compromis pour l'école libre ou confessionnelle. Chaque pays a son histoire constitutionnelle. Je me suis toujours méfié des solutions simplistes. On risque de créer d'autres problèmes. Le monde de l'éducation est complexe. Il faut savoir nuancer. Car enfin, les amendements à l'article 93 ne font peut-être que commencer. C'est pour cette raison que je vais voter en faveur des amendements proposés par les honorables sénateurs Doody et Cogger, et je vous invite à le faire également.

[Traduction]

L'honorable Bill Rompkey: Honorables sénateurs, je voudrais faire certaines observations au sujet des modifications à la clause 17. Mon opinion sur la résolution comme telle et sur la clause 17 est bien connue; je l'ai exprimée très clairement. Je ne partage pas du tout l'avis de mon collègue, le sénateur Beaudoin, et j'exhorte mes collègues à voter contre ces deux amendements.

Le sénateur Beaudoin et moi avons, tous deux, entendu des témoins à St. John's. Mon collègue a naturellement mentionné le témoignage de Colin Irving. Toutefois, le sénateur Beaudoin n'est pas sans savoir que d'autres représentants du milieu juridique de St. John's ont donné des avis contraires.

Ce qui revêt, à mes yeux, plus d'importance, c'est la position du gouvernement de Terre-Neuve. Le ministre de l'Éducation, qui parlait au nom du gouvernement, nous a bien précisé que l'adoption de l'amendement «là où le nombre le justifie» aurait pour effet de préserver le statu quo. Autrement dit, absolument rien de changerait.

Essentiellement, honorables sénateurs, il ne s'agit pas ici de la question des droits des minorités. Il faut plutôt déterminer qui devrait exercer le pouvoir sur l'éducation à Terre-Neuve. Ce point a été mentionné au Sénat hier, mais je tiens de nouveau à y insister aujourd'hui.

Les gens ne comprennent pas encore en quoi le système en vigueur dans notre province est unique et ne connaissent pas la situation qui existe depuis 1949 et le pouvoir que détiennent les Églises. Dans certains cas, les Églises détiennent plus de pouvoir que les représentants élus du peuple.

Il m'est impossible d'accepter cette situation en tant que démocrate et il m'est impossible non plus d'accepter, en tant que libéral, le fait que des représentants élus doivent demander aux chefs des Églises s'ils peuvent exercer un certain pouvoir sur l'administration des écoles, y compris sur les dépenses publiques à ce titre. Ce système n'existe nulle part ailleurs au Canada et il ne devrait pas exister à Terre-Neuve. En 1996, cela ne devrait pas exister dans une démocratie.

L'assemblée législative devrait avoir la prééminence. C'est essentiel dans n'importe quelle démocratie, qu'il s'agisse d'un pays ou d'une province. La clause 17 ne fera que mettre notre province sur un pied d'égalité avec les autres provinces canadiennes. On ne devrait pas penser en termes de rivalité entre les catholiques et les protestants, comme certains ont décrit la situation.

En fait, à Terre-Neuve, sept confessions chrétiennes se partagent le pouvoir. Voilà la réalité. Bien des gens ont du mal à comprendre la situation, c'est pourtant la réalité. Sept confessions chrétiennes détenaient jusqu'à maintenant le pouvoir de gérer les écoles, y compris le pouvoir de gérer et d'engager des dépenses publiques pour les écoles.

(1540)

Cette situation n'existe pas en Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick, en Ontario, au Québec, en Colombie-Britannique ou ailleurs au pays. Prétendre qu'il existe des similitudes entre l'article 93 et la clause 17 est également irréaliste.

L'article 93 a été mis à l'origine dans la Constitution pour protéger les écoles catholiques et protestantes; c'est tout à fait vrai. Toutefois, le sénateur Beaudoin n'ignore pas non plus que, lorsque Terre-Neuve est entrée dans la confédération, en 1949, les deux parties, soit les gouvernements fédéral et provincial, ont convenu que la clause 17 constituait une solution de rechange à l'article 93. Pourquoi? Parce que notre système était unique. Cette situation n'existait dans aucune autre région du Canada. Par conséquent, la clause 17 dans la forme qu'elle avait prévoyait les pouvoirs constitutionnels qui valent encore aujourd'hui, mais devons-nous les garder tels quels pour toute l'éternité? J'estime que non. Certes, cela revient à réduire les droits qui sont prévus dans la Constitution, mais des non-élus doivent-ils avoir autant de pouvoir aujourd'hui au Canada - plus de pouvoir que les élus? Non, et c'est pourquoi je demande à mes collègues de rejeter ces deux amendements.

Le premier amendement est vraiment mineur et je suis persuadé que le sénateur Beaudoin conviendra, compte tenu des audiences que nous avons tenues à Terre-Neuve, qu'il a été débattu des deux côtés. Je ne crois pas qu'on ajoute beaucoup à l'amendement avec l'expression «déterminer et régir». Toutefois, si l'amendement prévoyant «là où le nombre le justifie» était adopté, le statu quo serait maintenu à Terre-Neuve et je ne crois pas que cela soit souhaitable en 1996, au Canada.

Je me permets de le répéter simplement: je crois que toutes les personnes qui veulent que la clause 17 soit modifiée, y compris nous, de ce côté-ci, le veulent parce qu'il y a eu un référendum à Terre-Neuve. Le référendum n'était pas essentiel et ses résultats ne sont pas exécutoires. Il a eu lieu et il a donné certains résultats, mais ce qui importe vraiment, c'est que nous tenions compte du rapport de la commission royale, y compris ses consultations et ses recommandations, le vote du gouvernement, le vote unanime de l'assemblée législative. Enfin, il nous faut tenir compte aussi des élections elles-mêmes. Le gouvernement terre-neuvien a fait sa dernière campagne électorale avec la clause 17 dans son programme et il a été élu avec une majorité écrasante. Cela me semble important.

En fin de compte, honorables sénateurs, la question est de savoir qui va avoir droit de regard sur l'éducation à Terre-Neuve. Telle est la situation et j'exhorte mes collègues à rejeter ces deux amendements et à adopter clause 17 telle que modifiée initialement.

Après avoir parlé des droits des minorités et des pouvoirs, nous devons demander qu'est-ce qui est important pour les enfants de notre province, qui ont connu d'énormes difficultés économiques et qui ont maintenant des possibilités d'avenir? Je peux mentionner des choses comme la baie de Voisey et d'autres opportunités pour notre province, mais elles ne sont possibles que si nous avons le capital social. L'argent qui sera investi dans la baie de Voisey n'est rien à côté du genre de capital social qu'il faudra investir. C'est-à-dire l'éducation. C'est là-dessus que nous nous prononçons ici, les droits non pas des Églises, mais bien des enfants.

L'honorable Jean B. Forest: Honorables sénateurs, je voudrais simplement dire que, dans ma province, les droits que la Constitution garantit aux minorités, au titre des écoles confessionnelles, ne sont certainement pas assujettis à la législation provinciale.

Des voix: Bravo!

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, s'agissait-il d'une question ou d'une observation?

Honorables sénateurs, je déplore vivement l'agressivité dont fait preuve M. Tobin lorsqu'il fustige le Sénat. Cela ne favorise pas la tenue d'un débat intelligent. Sincèrement, cela me déplaît beaucoup. C'est presque du chantage de dire: «Vous n'existez pas. Je me fiche éperdument de vos opinions, vieux je-ne-sais-quoi. Le premier ministre mange dans ma main.» Je dois dire que c'est une forme de politique très disgracieuse, mais, pour avoir siégé pendant 15 ans aux côtés du premier ministre Tobin, je sais ce dont il est capable. Je le déplore. Le moins que l'on puisse dire, c'est que c'est fort disgracieux - j'essaie de peser soigneusement mes mots en français et en anglais - de faire cela à la veille d'un débat aussi important que celui-ci. Il aurait pu agir plus intelligemment au lieu de faire de la provocation avec l'article que j'ai fait circuler depuis ce matin et qui rend mal à l'aise, j'en suis sûr, beaucoup de collègues du sénateur. Quoi qu'il en soit, c'est la vie. Je pose la même question. Demain, je n'interviendrai peut-être pas.

Je suis un grand admirateur de sir Wilfrid Laurier. Si vous me le permettez, je vais paraphraser un autre article qui est paru au cours du week-end et qui disait ceci: «Si untel était ici aujourd'hui, je sais dans quel camp il se rangerait.» C'est M. Bouchard que je cite. Cela n'a rien à voir avec le débat, et je n'aime pas voir les gens utiliser le nom de personnes que j'ai probablement mieux connues qu'eux. Je demande à mes collègues: si sir Wilfrid Laurier était ici aujourd'hui, de quel côté pensez-vous qu'il se rangerait dans un débat aussi important que celui concernant les droits des minorités?

Le sénateur Rompkey: Honorables sénateurs, je ne sais pas ce que dirait sir Wilfrid Laurier s'il était parmi nous aujourd'hui, mais je sais qu'il serait en faveur de l'égalité partout au Canada, et j'ai tenté de faire remarquer que c'est exactement ce que nous voulons établir. Nous voulons établir l'égalité en matière de chances, de contrôle, de compétence et de pouvoirs dans tout le Canada. Personne ne devrait être plus égal qu'autrui. Cela ne fait que placer Terre-Neuve sur le même pied que les autres provinces.

Il est faux de dire que les droits des minorités sont supprimés. Il est vrai de dire que les droits des minorités sont restreints, mais je prétends depuis toujours que l'accès aux fonds publics n'est pas un droit que les confessions devraient avoir en 1996. C'est ce droit-là qui est restreint. Le droit de donner une éducation religieuse est toujours là, il est garanti par la Constitution. Le droit aux pratiques religieuses dans les écoles est toujours là, il est garanti par la Constitution. Cela est stipulé clairement dans la nouvelle clause 17. Les confessions continueront d'avoir ces droits. Les ministres de l'Église anglicane pourront continuer d'entrer dans les écoles de Terre-Neuve, et la Constitution leur donnera le droit à leurs pratiques, à leurs croyances et à leur enseignement religieux, et il en ira de même avec les autres confessions. Ce ne sera peut-être pas le cas des juifs, ni des musulmans, mais ce le sera pour les sept confessions chrétiennes reconnues dans la Constitution, qui pourront continuer de dispenser leur enseignement religieux dans les écoles de Terre-Neuve. La Cour suprême, soit dit en passant, a statué que telle était la teneur des droits confessionnels. Selon elle, la teneur des droits confessionnaux, par conséquent, ne comprend pas le droit de puiser dans les fonds publics.

Je ne sais pas ce que sir Wilfrid Laurier dirait s'il était des nôtres aujourd'hui. Je ne puis que parler en mon nom personnel.

Le sénateur Prud'homme: À la fin de son intervention, l'honorable sénateur a mentionné les juifs et les musulmans. Rien n'empêche le gouvernement d'étendre les droits. Il y a quelques années, ils sont venus nous demander d'élargir les droits. Il n'y a même pas eu de débat. Qui s'opposerait à l'idée d'élargir les droits? J'ai écouté des sénateurs de l'Alberta et d'ailleurs dire que nous ne nous opposions pas à l'idée d'élargir les droits. Là où nous ne sommes pas d'accord, c'est que c'est la première fois au cours de ma carrière politique, c'est-à-dire après 40 ans comme libéral, aujourd'hui comme indépendant - car je ne suis pas conservateur -, que je vois les Libéraux prendre la parole pour tenter de nous convaincre que nous devons restreindre des droits et non pas les élargir. Si vous parlez d'élargir les droits, bien sûr, je sais que les bouddhistes ou d'autres groupes ne peuvent peut-être pas avoir leurs propres écoles, mais ils peuvent fréquenter l'école publique à Terre-Neuve. Tous ces groupes religieux qui ne veulent pas être protégés formeront quoi? Ils formeront leur propre système scolaire. Si les anglicans ne veulent pas administrer leur propre école, ce qu'ils ont le droit de faire, je n'ai aucune objection. Cependant, cela ne veut pas dire que ceux qui ont ce droit devraient le perdre.

(1550)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'ai le regret de vous informer que la période de 15 minutes prévue pour l'intervention du sénateur Rompkey et les questions est terminée, sauf si on accorde au sénateur Prud'homme la permission de continuer.

L'honorable Eric Arthur Berntson (chef adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, lorsque nous avons commencé aujourd'hui, le débat avait été ajourné à mon nom. J'aimerais que le débat soit encore ajourné à mon nom.

Son Honneur le Président: Acceptez-vous, honorables sénateurs que la question reste inscrite au Feuilleton au nom du sénateur Berntson?

Des voix D'accord.

(Sur la motion du sénateur Berntson, le débat est ajourné.)

 

La Loi sur la radiodiffusion

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture-
Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Whelan, c.p., appuyé par l'honorable sénateur Losier-Cool, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-216, Loi modifiant la Loi sur la radiodiffusion (politique canadienne de radiodiffusion).-(L'honorable sénateur Gauthier).

L'honorable Noël A. Kinsella: Honorables sénateurs, en ce qui concerne le projet de loi d'intérêt public de la Chambre des communes C-216, Loi modifiant la Loi sur la radiodiffusion, le Feuilleton indique que cet article est inscrit au nom du sénateur Gauthier. J'aimerais faire quelques remarques au sujet de ce projet de loi.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je suppose que je dois demander si le sénateur Gauthier est d'accord pour que d'autres sénateurs interviennent dans le débat sur ce projet de loi.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Le sénateur Gauthier a dit que tout autre sénateur qui désirait parler de cette mesure devrait se sentir libre de le faire.

Son Honneur le Président: Très bien. Je donne la parole au sénateur Kinsella, et cet article restera inscrit au Feuilleton au nom du sénateur Gauthier.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, il est important que les travaux du Sénat se déroulent de la façon la plus expéditive possible. Pourtant, nous devons être conscients des incapacités qui, très souvent, nous sont cruellement imposées par le temps, la distance et la maladie. Toutefois, ce projet de loi est une mesure législative très importante qui comporte de nombreuses ramifications techniques. Je n'aborderai pas cette question tout de suite.

Comme les sénateurs le savent et comme l'a expliqué le sénateur Whelen, ce projet de loi vise à empêcher les câblodistributeurs de recourir à une technique de marketing peu populaire connue sous le nom de facturation par défaut. Cette mesure législative empêcherait les câblodistributeurs de facturer une nouvelle série de services sans le consentement préalable du consommateur.

Honorables sénateurs, je ne connais pas un seul sénateur qui s'opposerait à cet objectif fondamental. Cependant, plusieurs sénateurs ont signalé que, sous sa forme actuelle, ce projet de loi pourrait avoir de graves conséquences imprévues qui pourraient même aller à l'encontre des grands objectifs de la Loi sur la radiodiffusion.

Le débat à l'étape de la deuxième lecture est ajourné au nom de notre collègue et ami, le sénateur Jean-Robert Gauthier, qui, comme nous le savons, est malheureusement gravement malade à l'hôpital. On ne sait pas quand il pourra revenir au Sénat. À cause de cela, honorables sénateurs, nous avons reçu au cours des derniers jours des centaines d'appels de gens accusant le Sénat de bloquer l'étude de ce projet de loi et disant que nous nous opposons à cette mesure. Les sénateurs qui ont regardé l'émission Canadian Air Farce au réseau anglais de la SRC le week-end dernier auront remarqué qu'il y a été question de cette affaire. Le message, quoique inexact, était que le Sénat s'oppose à l'interdiction de la facturation par défaut. Cela ne semble pas être le message que j'ai de mes collègues sénateurs.

Honorables sénateurs, à ce qu'il me semble nous n'adoptons pas une stratégie qui permettra au projet de loi d'expirer au Feuilleton. Il y a de toute évidence des convictions bien ancrées, bien que tout à fait fausses. Nous devons faire le nécessaire pour renvoyer le projet de loi au comité pour qu'il puisse en examiner toutes les complexités avec les nombreux témoins qu'il entendra.

.Honorables sénateurs, je tiens à ce qu'il soit bien entendu que les sénateurs de ce côté-ci appuient sans équivoque l'esprit de la modification proposée. Nous nous opposons à l'abonnement par défaut et nous souhaitons que le projet de loi soit adopté après que nous aurons examiné tous les amendements possibles qui permettront de prévenir les conséquences et de répondre aux préoccupations dont certains sénateurs ont fait état.

Étant donné la situation où nous nous trouvons et compte tenu de l'ensemble des circonstances, que devons-nous faire? Nous pourrions, entre autres, convenir de renvoyer le projet de loi à un comité pour qu'il l'examine en profondeur, étant entendu que notre collègue, le sénateur Gauthier, aurait la possibilité de parler du projet de loi à l'étape de la troisième lecture. Nous pourrions aussi convenir de ne pas prendre de décision sur le principe du projet de loi, qui fait habituellement l'objet du débat à l'étape de la deuxième lecture. Certains sénateurs sont d'avis que si nous ne nous prononçons pas sur le principe du projet de loi, une autre possibilité s'offre à nous. Il s'agirait de ne pas lire le projet de loi une deuxième fois et d'en renvoyer la teneur à un comité.

Honorables sénateurs, nous devons résoudre la question aujourd'hui ou demain, mais il faut agir rapidement. Étant donné que le projet de loi a été parrainé par un sénateur ministériel, nous pourrions peut-être, honorables sénateurs, prendre jusqu'à demain pour réfléchir. Nous saurons peut-être alors s'il faut renvoyer la teneur du projet de loi à un comité après en avoir examiné le principe, ou ne pas le lire une deuxième fois et renvoyer sa teneur à un comité.

(1600)

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, les arguments présentés par le sénateur Kinsella sont fondés. Il n'est pas question de ce côté-ci de retarder ou de contourner le processus. Le sénateur Losier-Cool veut intervenir à propos de ce projet de loi et a l'intention de le faire jeudi.

Le parrain du projet de loi, le sénateur Whelan, ne pouvait être présent aujourd'hui. Je suggère que nous réexaminions la situation à la fin de la semaine, au plus tard au début de la semaine prochaine, et que nous déterminions alors la position du sénateur Gauthier qui, comme on l'a fait savoir, veut prendre la parole à propos du projet de loi. Nous pourrons à ce moment-là décider à quel comité le projet de loi devrait être renvoyé et quand.

Je tiens à assurer à tous les honorables sénateurs et au public en général que le Sénat n'a pas l'intention de retarder le processus ou les audiences.

L'honorable Finlay MacDonald: Honorables sénateurs, je voudrais poser une question au leader adjoint. Quand le projet de loi sera renvoyé à un comité, pourrait-on aussi envisager de le faire rayer du Feuilleton afin qu'il soit bien clair pour les centaines de gens qui ont appelé - et j'ai reçu moi-même à environ 40 appels en provenance de la Nouvelle-Écosse - que ce projet de loi ne va pas mourir au Feuilleton?

Le sénateur Graham: Oui. Que tous les sénateurs soient rassurés, nous n'avons pas l'intention de laisser ce projet de loi mourir au Feuilleton.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, est-ce d'accord pour que le projet de loi reste inscrit au nom de l'honorable sénateur Gauthier?

Des voix: D'accord.

(Sur la motion du sénateur Graham, au nom du sénateur Gauthier, le débat est ajourné.)

 

ÉDUCATION POSTSECONDAIRE

Adoption du rapport du comité des affaires
sociales, des sciences et de la technologie

Le Sénat passe à l'étude du huitième rapport du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie (Budget - Étude sur l'éducation postsecondaire), présenté au Sénat le 25 novembre 1996.

L'honorable Mabel M. DeWare, présidente du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, propose: Que le rapport soit adopté.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

 

LE BUDGET DES DÉPENSES, 1996-1997

Adoption du rapport du comité sénatorial
permanent des finances nationales

Le Sénat passe à l'étude du sixième rapport du comité sénatorial permanent des finances nationales (Budget des dépenses supplémentaire (A)), présenté au Sénat le25 novembre 1996.

L'honorable Pierre De Bané, vice-président du comité sénatorial permanent des finances nationales, propose: Que le rapport soit adopté.

 

AFFAIRES JURIDIQUES ET CONSTITUTIONNELLES

Autorisation au comité de siéger
en même temps que le Sénat

L'honorable Sharon Carstairs, conformément à l'avis donné le 25 novembre 1996, propose:

Que le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à siéger à 15 h 15 demain, le mercredi 27 novembre 1996, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 27 novembre 1996, à 13 h 30.)

 


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