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Débats du Sénat (hansard)

2e Session, 35e Législature,
Volume 135, Numéro 59

Le mardi 10 décembre  1996
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le mardi 10 décembre 1996

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

 

Le décès de l'honorable Cyril B. Sherwood

Annonce

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'ai le regret de vous faire savoir que nous avons reçu un appel téléphonique nous informant du décès de notre ancien collègue, Cyril Sherwood. Nous n'avons pas d'autres détails, mais nous communiquerons l'information aux honorables sénateurs dès que nous la recevrons.

 

Visiteur de marque

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je vous signale que nous avons un visiteur de marque à notre tribune. Nous sommes honorés d'accueillir parmi nous aujourd'hui M. Victor Musiyaka, vice-président du Parlement d'Ukraine.

Nous vous souhaitons la bienvenue au Sénat du Canada, Monsieur.

 


DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

La Journée internationale des droits de l'homme

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, aujourd'hui marque une journée très importante dans l'histoire du monde moderne parce que c'est la Journée internationale des droits de l'homme. Cette journée est particulièrement importante parce que beaucoup des droits dont nous jouissons aujourd'hui et qui sont garantis en droit international n'existaient pas il n'y a pas si longtemps.

La Déclaration universelle des droits de l'homme a été adoptée par l'assemblée générale des Nations Unies en 1948, seulement trois ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, et la première Journée internationale des droits de l'homme a été célébrée le 10 décembre 1950. Cependant, il a fallu 18 ans pour que la myriade de pactes régissant la protection des droits de la personne soit ratifiée. Les raisons de ce retard sont complexes, mais une des principales raisons a été la difficulté de définir les différents droits fondamentaux et de déterminer lesquels devaient être inclus dans la déclaration. Il fallait aussi instaurer un équilibre entre la préoccupation internationale envers les violations des droits de la personne et la répugnance des États membres à se soumettre à un examen international exécutoire.

Les principes d'égalité et de protection contre toute discrimination qui régissent la déclaration des Nations Unies et ses pactes doivent être accordés à tous, sans distinction de race, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique, de fortune, de naissance ou d'état civil. Les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels incluent aussi un large éventail de protections qui vont du droit à la liberté d'expression au droit de travailler.

Cependant, on nous rappelle chaque jour qu'il existe des régions du monde où la répression de la liberté existe toujours. Nous comprenons aussi que la protection des droits est un processus continu. Cela est particulièrement vrai à l'ère de la technologie. Nous devons protéger et promouvoir ces droits sans relâche.

Après avoir lu les histoires d'horreur au sujet de la main-d'oeuvre enfantine, je crois que tous les sénateurs appuieront un des développements les plus récents, soit le fait que les droits de l'enfant sont devenus une priorité non seulement au Canada mais partout dans le monde. C'est même un jeune Canadien qui a contribué à porter ce problème à l'attention du monde entier: Craig Kielburger.

Nous avons été témoins de nombreux succès retentissants sur le plan des droits de la personne au cours des dernières années, allant de l'abolition de l'apartheid en Afrique du Sud - un pas de géant pour le monde en ce qui concerne l'élimination de la discrimination fondée sur la race - jusqu'à la fin de la guerre froide, marquée par le démantèlement du mur de Berlin. Lors de la quatrième conférence mondiale sur les femmes, qui a eu lieu à Beijing, en Chine, en 1995, on a adopté de nombreuses résolutions visant à protéger les droits des femmes dans divers domaines, résolutions que beaucoup de pays ont déjà mises en application. Cependant, malgré nos progrès sur de nombreux fronts, nous ne devons jamais nous asseoir sur nos lauriers lorsqu'il est question de droits de la personne. Nous devons nous engager à être vigilants pour protéger les droits de la personne non seulement aujourd'hui, mais chaque jour, dans un monde qui présente de plus en plus de défis. Nous devons le faire constamment en recourant à la diplomatie bilatérale et multilatérale et en aidant les gouvernements du monde entier à établir des institutions démocratiques.

(1410)

[Français]

 

Le compte rendu officiel

Plainte au sujet d'une traduction

L'honorable Maurice Riel: Honorables sénateurs, dans une allocution que j'ai prononcée le 3 décembre dernier, il y a eu une petite erreur, je crois, dans la traduction. Je voulais dire et j'ai dit en français:

Plus riches sommes-nous de posséder deux langues et plus riches encore d'en parler trois - comme le propose une résolution adoptée au dernier congrès péquiste et comme le veut une loi française récente -

Or, dans la version anglaise, la traduction est mal placée, je ne dirais pas qu'elle est fautive, mais elle est mal construite. On semble dire que la résolution du Parti québécois et la loi française ne recommandent que l'enseignement d'une seule langue, ce qui n'est pas exact.

Je voudrais donc vous demander la permission de remplacer ce texte par celui que je viens de vous lire. C'est un amendement de substance, je crois, et aujourd'hui, j'en ai profité pour faire quelques petites corrections de style et de ponctuation.

[Traduction]

 

Les communications

Les compressions budgétaires touchant Radio Canada International

L'honorable Finlay MacDonald: Honorables sénateurs,le 6 juin 1991, il y a cinq ans et demi, j'ai prononcé le discours suivant devant le caucus du gouvernement conservateur:

La voix du Canada dans le monde, Radio Canada International, a vu son budget de fonctionnement soumis à de très lourdes compressions. Les mesures prises par le gouvernement donnent à penser qu'il a sauvé le service de radiodiffusion internationale, mais je me sens maintenant obligé de poser la question: à quel prix?

Alors que tous les pays du G-7 augmentent le financement de leurs services de radiodiffusion internationale, pourquoi le Canada réduit-il le financement du sien? Pourquoi avons-nous décidé de saigner presque complètement l'organe le plus prestigieux et le plus rentable dont nous disposons pour faire connaître le Canada au reste du monde?

Radio Canada International réalisait les objectifs poursuivis par le gouvernement et le Canada. Il était la voix qui permettait au Canada de s'expliquer et d'expliquer ses politiques au reste du monde.

Honorables sénateur, pendant 46 ans RCI s'est mérité une réputation unique. Il a réussi, avec peu de moyens et de façon discrète, à attirer plus de 16 millions d'auditeurs en leur offrant un journalisme honnête et pondéré.

Quelles sont les conséquences de notre politique de réduction du déficit pour Radio Canada International?

Ce service a vu son budget réduit de 20 millions de dollars à 13,5 millions. RCI s'est retrouvé dans l'obligation de supprimer ses services en sept langues étrangères.

Les émissions de RCI qui faisaient la promotion du commerce et du tourisme canadiens ne sont plus produites. Les pertes dans la seule industrie touristique, sans parler des conséquences pour le commerce, la politique et l'image du Canada dans le monde, pourraient être supérieures aux économies de sept millions que représentent les compressions budgétaires.

Qu'allons-nous répondre à la communauté internationale bouleversée et aux 16 associations membres du Conseil international des études canadiennes, qui se demandent si le Canada veut continuer de s'adresser à la communauté internationale?

Dans une lettre datée du 11 juin 1991, le Conseil, composé de seize associations nationales et multinationales réparties dans le monde qui se consacrent aux études canadiennes, s'est dit d'avis que le travail accompli par Radio Canada International était extrêmement précieux et important pour la réputation internationale du Canada. Qu'en outre, réduire de façon aussi draconienne la programmation de Radio Canada International alors même que le études canadiennes connaissent une expansion sans précédent dans le monde est extrêmement pénible et décourageant pour toutes les personnes concernées par les études canadiennes. Pour beaucoup de professeurs qui donnent des cours sur le Canada dans le monde, la programmation de RCI est une source d'information essentielle et, comme telle, devrait être préservée.

Le 26 mai 1991, Radio Moscou a dit au monde entier que ce que l'on faisait à RCI équivalait à «réduire le Canada au silence».

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je regrette d'interrompre le sénateur MacDonald, mais son temps de parole a expiré.

Honorables sénateurs, la permission de continuer lui est-elle accordée?

Des voix: D'accord.

Le sénateur MacDonald: Honorables sénateurs, je vous remercie. Je poursuis avec les paroles que j'ai prononcées en 1991 au caucus du gouvernement conservateur.

Le mieux que nous puissions dire est que, au moins, nous avons sauvé nos fréquences.

Je dois féliciter M. Clark d'avoir réussi à puiser les 13 millions de dollars dans la Réserve des priorités. Apparemment, le gouvernement n'avait pas vraiment d'autre solution. Il ne pouvait tout simplement pas priver le monde de la voix du Canada. Ç'eût été déraisonnable.

Je le répète, honorables sénateurs, c'était il y a cinq ans et demi.

Honorables sénateurs, à 16 h 45 vendredi dernier, le déraisonnable s'est produit. La Société Radio-Canada a annoncé qu'après 51 ans, Radio Canada International va cesser d'exister. Les fréquences ne vont plus nous appartenir. Il est impossible de les recouvrer. La voix du Canada n'est plus. Et voilà la réponse du gouvernement aux recommandations du comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des commune chargé d'examiner la politique étrangère du Canada, coprésidé par les sénateurs Gauthier et MacEachen.

Le 7 février 1995, le gouvernement a répondu ceci:

Bien sûr, en présentant le Canada et les valeurs canadiennes à l'étranger, RCI peut jouer un rôle appréciable dans la promotion de la paix et de la compréhension dans le monde. Le dialogue et le compromis, la promotion de la démocratie, les droits de la personne, la justice économique et sociale, la préservation de l'environnement, le maintien de la paix et le respect de la diversité sont des valeurs que RCI peut vraiment faire rayonner à l'étranger.

En outre, RCI et d'autres organes d'information libres jouent un rôle important en assurant la promotion de la vérité, de la transparence et de la justice grâce à la collaboration de diverses sources d'information opérant librement.

Ne convient-il pas maintenant de demander, surtout au nom des peuples du monde, quel droit a le Canada d'avoir ses entrées dans les cercles diplomatiques et, bien sûr, extradiplomatiques, s'il ne fait rien pour que ces gens aient accès à un service de radiodiffusion canadien qu'ils n'auraient pas autrement? Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'en tuant RCI, on fait le contraire de ce que devrait être le rôle du Canada en tant que médiateur international, gardien de la paix et observateur du respect des droits de la personne à l'étranger.

Je suis perplexe. Que voulait dire le ministre des Affaires étrangères, l'honorable Lloyd Axworthy, quand il a dit devant un groupe vendredi dernier, ce même vendredi noir :

... en tant que puissance moyenne dotée de forces armées restreintes, le Canada réunit les conditions idéales pour jouer un rôle international par la force de la persuasion et la formation de coalitions. Il est donc impérieux et pressant que nous réexaminions deux aspects de notre politique étrangère.

M. Axworthy continue:

Comment nous présentons-nous au monde extérieur, à l'ère de l'information? Comment utilisons-nous la nouvelle technologie de l'information pour nous aider à atteindre les objectifs de notre politique étrangère?

L'utilisation stratégique de l'information est devenue un outil indispensable à la réalisation de notre politique étrangère. Notre politique étrangère et nos programmes devraient en tenir compte.

(1420)

Ces paroles devraient-elles nous donner de l'espoir? Le ministre pense-t-il inclure RCI? La Société Radio-Canada n'est que le siège administratif de RCI. La nécessité d'avoir un service de radio internationale est décidée par le ministre des Affaires étrangères.

[Français]

 

la Journée internationale
des droits de l'homme

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, le leader du gouvernement au Sénat nous a rappelé qu'aujourd'hui, le 10 décembre, était la Journée internationale des droits de l'homme.

J'ai toujours pensé et vous l'ai dit souvent, que lorsque nous parlons des droits de l'homme, nous croyons dans l'universalité et ne faisons pas d'exception.

J'ai toujours pris très au sérieux les gens qui, sans crainte, lorsqu'ils parlent des droits de la personne, n'excluent personne en mentionnant les endroits les plus troublés de la planète.

En cette journée mémorable proclamée par les Nations Unies, je voudrais soulever, une fois de plus, honorables sénateurs, un sujet très litigieux: celui de la situation du peuple palestinien.

J'ai toujours trouvé très étrange que tous les grands champions des droits de la personne ne soient plus entendus dès qu'ils s'expriment sur cette situation des plus pitoyables qui est celle du peuple palestinien, privé de ses terres, de son eau et de sa dignité.

Aujourd'hui est certainement une occasion supplémentaire de rappeler à la conscience des honorables sénateurs la situation terrible qui existe en Palestine, alors que nous allons probablement récompenser un homme qui refuse la paix en signant avec son pays un traité de libre-échange. Je trouve cela bizarre.

[Traduction]

Récemment, un sénateur m'a parlé de ce phénomène. Au Sénat, il est permis de parler de n'importe quel sujet. On peut parler de religion ou de sport. Cependant, dès que je me lève en cette enceinte pour aborder des questions concernant les Palestiniens, les sénateurs se détournent. Érudits ou politiciens, ils se détournent et se mettent à parler entre eux d'affaires, de sport ou de hockey.

Je ne détourne jamais la tête, car je crois que lorsque vous croyez passionnément aux droits de la personne, vous ne faites aucune exception. Vous croyez en l'universalité de ces droits. Vous ne faites pas d'exception. Dans ce cas, vous ne devez pas hésiter à intervenir de temps à autre pour rappeler aux gens la triste situation qui règne là-bas et qui pourrait dégénérer en une nouvelle guerre néfaste pour cet État que nous voulons tous protéger.

L'honorable Noël A. Kinsella: Honorables sénateurs, il était fort à propos que le leader du gouvernement au Sénat et mon collègue attirent notre attention sur la question des droits de la personne en cette Journée internationale des droits de l'homme.

Comme le leader du gouvernement au Sénat l'a souligné, c'est le 10 décembre 1948, à Paris, que l'assemblée générale des Nations Unies a proclamé la Déclaration universelle des droits de l'homme. La communauté internationale célébrera donc, dans un an environ, le 50e anniversaire de ce texte qui est considéré comme la Grande Charte des droits de l'homme. Il importe que le gouvernement du Canada, par le truchement du ministère du Patrimoine canadien peut-être, annonce bientôt son plan d'action pour diriger la participation du Canada à cet anniversaire historique. Le Canada doit profiter du 50e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme pour promouvoir l'attachement aux droits de la personne, un attachement que partagent tous les Canadiens et qui est caractéristique de la citoyenneté canadienne.

Il importe que le gouvernement du Canada convoque au début de 1997 une conférence fédérale-provinciale-territoriale des ministres responsables des droits de la personne au Canada afin qu'ils élaborent un plan d'action pancanadien pour promouvoir tous les droits de la personne.

Il est également pertinent qu'en cette Journée internationale des droits de l'homme, nous signalions les réalisations du gouvernement dans le domaine des droits de la personne, que nous établissions son bulletin de notes en la matière. Au nombre des réalisations qui méritent d'être soulignées et que j'approuve, signalons par exemple la nomination tant attendue des membres de la Fondation canadienne des relations raciales en vertu de la Loi de 1989 sur la Fondation du même nom. Je donne aussi une bonne note à la décision du gouvernement de ne pas présenter de nouveau son projet de loi sur l'aéroport Pearson, lequel aurait empêché les parties de recourir aux tribunaux.

Par contre, je lui donne un zéro pour avoir intensifié les échanges commerciaux avec l'Indonésie en dépit des violations flagrantes des droits politiques et culturels de base dans ce pays. Je lui donne un autre zéro pour avoir abrogé les droits que la Constitution garantit aux minorités pentecôtiste, adventiste du septième jour et catholique à Terre-Neuve. Refuser de contredire le président chinois Jiang Zemin qui prétend que la Chine est une démocratie mérite un zéro, tout comme d'ailleurs refuser de parler des prisonniers politiques détenus par la Chine au cours d'un entretien avec son président.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je suis au regret d'informer le sénateur Kinsella que son temps de parole a expiré. La période de 15 minutes réservées aux déclarations de sénateurs a également expiré.

Le Sénat accorde-t-il sa permission pour que le sénateur Kinsella termine sa déclaration?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Kinsella: Une autre réalisation du gouvernement dans le domaine des droits de la personne qui lui vaut une bonne note cette année est, à mon avis, l'imposition de sanctions commerciales contre le gouvernement renégat du Nigéria pour avoir violé les droits de ses citoyens. La commande d'un étude sur le travail des enfants dans les pays en voie de développement et sur la faisabilité de l'apposition d'étiquettes certifiant que les tapis vendus au Canada ne sont pas produits par des enfants ou des travailleurs asservis mérite un A plus.

Toutefois, perdre de vue les anciens objectifs commerciaux du Canada et séparer commerce et droits de la personne méritent la note D moins; autoriser des exportations de produits militaires et stratégiques à des pays en développement dont le gouvernement viole les droits des citoyens et où ont eu lieu récemment des conflits armés mérite un zéro.

Toutefois, le gouvernement mérite la note de passage pour avoir modifié la Loi canadienne sur les droits de la personne pour y inclure l'orientation sexuelle, encore que certains puissent penser que la note D serait suffisante vu le temps que cela a pris.

Pour le simulacre du député de Shawinigan - c'est-à-dire pour avoir donné l'impression de soulever la question des droits de la personne avec les dirigeants de la région Asie-Pacifique - le gouvernement mérite un zéro. Pour s'être attribué le mérite en ce qui concerne la crise humanitaire de proportion épique qui existe au Zaïre et au Rwanda, le gouvernement mérite aussi un zéro.

 


Visiteur de marque

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je vous signale la présence d'un visiteur de marque à notre tribune. Nous accueillons aujourd'hui M. Alex Morrison, président du Centre international Lester B. Pearson pour le maintien de la paix.

 


(1430)

 

AFFAIRES COURANTES

Examen de la réglementation

Présentation du quatrième rapport du comité
mixte permanent et impression en annexe

L'honorable P. Derek Lewis: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter le quatrième rapport du comité mixte permanent du Sénat et de la Chambre des communes sur l'examen de la réglementation, qui traite du budget du comité. Je demande que le rapport soit imprimé en annexe des Journaux du Sénat de ce jour.

Son Honneur le Président: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(Le texte du rapport figure aux Journaux du Sénat de ce jour.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Lewis, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

 

L'ajournement

L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, ce soit jusqu'à demain, le mercredi 11 décembre 1996, à 13 h 30.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Français]

 

L'Assemblée internationale des parlementaires de langue française

Dépôt du rapport de la XXIIe session ordinaire
tenue à Antananarivo, Madagascar

L'honorable Thérèse Lavoie-Roux: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre, dans les deux langues officielles, le rapport de la section canadienne de l'Assemblée internationale des Parlementaires de langue française, ainsi que le rapport financier de la XXIIe session ordinaire de l'AIPLF, tenue à Antananarivo, à Madagascar, du 8 au 10 juillet 1996.

 

Dépôt du rapport de la réunion du Bureau
tenue à Antananarivo, Madagascar

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool: Honorables sénateurs, en vertu de l'article 23(6) du Règlement, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre, dans les deux langues officielles, le rapport de la section canadienne de l'Assemblée internationale des parlementaires de langue française ainsi que le rapport financier de la réunion du Bureau tenue à Antananarivo, Madagascar, les 6 et 8 juillet 1996.

[Traduction]

 

Affaires étrangères

Autorisation au comité de siéger
en même temps que le Sénat

L'honorable John B. Stewart, président du comité sénatorial permanent des affaires étrangères, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)a) du Règlement, propose:

Que le comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit autorisé à siéger à 15 h 30, aujourd'hui, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

 

État du système financier

Avis de motion autorisant le comité des
banques et du commerce À se déplacer
et reportant la date de son rapport

L'honorable Michael Kirby: Honorables sénateurs, je donne avis que mercredi prochain, le 11 décembre 1996, je proposerai:

Que nonobstant l'ordre de renvoi adopté par le Sénatle jeudi 21 mars 1996, le comité sénatorial permanent des banques et du commerce soit autorisé à reporter le dépôt de son rapport sur l'état du système financier du Canada et à présenter ce rapport le 11 décembre 1997 au lieu du 12 décembre 1996;

Que le comité soit autorisé à se rendre d'un endroit à l'autre à l'extérieur du Canada aux fins de poursuivre son études; et

Que, nonobstant les usages, si le Sénat ne siège pas au moment du dépôt du rapport, le comité soit autorisé à remettre ce dernier au greffier du Sénat et que ledit rapport soit réputé déposé à la Chambre.

 

Affaires juridiques et constitutionnelles

Autorisation au comité de siéger
en même temps que le Sénat

L'honorable Sharon Carstairs, présidente du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)a) du Règlement, propose:

Que le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à siéger à 16 heures aujourd'hui, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

 

Affaires sociales, sciences et technologie

Autorisation au comtié de siéger
en même temps que le Sénat

L'honorable Mabel DeWare, présidente du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)a) du Règlement, propose:

Que le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, soit autorisé à siéger à 16 heures aujourd'hui, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

 

Le Code criminel

La disposition sur la libération conditionnelle anticipée-Présentation d'une pétition

L'honorable Dalia Wood: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter une pétition qui exprime les sentiments et les opinions de certains habitants de l'Alberta, notamment de la ville d'Okotoks. Il s'agit de la ville où Laurie Boyd, âgée de 16 ans, a été violée et tuée il y a près de 15 ans. Les pétitionnaires s'opposent à l'article 745 du Code criminel du Canada qui, à l'heure actuelle, selon eux, permet à des personnes condamnées pour meurtre de demander une libération conditionnelle anticipée. Ils réclament l'abolition de cet article du Code criminel.

 

La taxe sur les produits et services

L'exemption des imprimés-Présentation d'une pétition

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, j'ai le plaisir de présenter une pétition au nom de 793 Ontariens. La pétition s'adresse au Sénat du Canada et se lit comme suit:

Nous, soussignés, estimons que l'application d'une TPS de 7 p. 100 sur les imprimés est injuste et malavisée. L'éducation et l'alphabétisation sont essentielles au développement de notre pays et une taxe régressive sur les imprimés nuit à ce développement.

Nous exhortons le Sénat à adopter le projet de loi S-11, qui exempterait les imprimés de la TPS. Nous exhortons tous les niveaux de gouvernement à démontrer leur appui à l'enseignement et à l'alphabétisation en éliminant la taxe de vente sur les imprimés. Nous demandons au Parlement d'appliquer la TPS au taux nul aux livres, aux magazines et aux journaux. Nous demandons au Parlement et aux gouvernements provinciaux d'appliquer la taxe de vente harmonisée proposée au taux nul aux imprimés. Nous demandons au premier ministre de respecter la promesse sans équivoque que son parti a faite à maintes reprises de supprimer la taxe de vente fédérale sur les livres, les magazines et les journaux.

La pétition comporte la citation suivante:

C'est une atteinte au concept de la liberté d'expression que de taxer la parole écrite, que de taxer la possibilité que les gens ont de communiquer entre eux.

Cette citation est tirée d'un discours que le premier ministre de Terre-Neuve, Brian Tobin, a prononcé à la Chambre des communes en décembre 1990.

 


[Français]

 

PÉRIODE DES QUESTIONS

Les communications

Radio Canada international-l'Annonce de sa fermeture-Demande de reconsidérer
la décision gouvernementale

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, nous avons entendu tantôt le sénateur Finlay MacDonald faire un appel spécial et pressant au gouvernement pour qu'il reconsidère sa décision de fermer définitivement Radio Canada International. Nous n'avons pas à faire un discours sur l'importance et sur l'histoire de cette institution et sur ce qu'elle représente pour le Canada.

(1440)

Je ne comprends pas que nous ne puissions trouver les fonds nécessaires à même le fonds consolidé, au moment où nous voulons jouer un rôle de plus en plus grand sur le plan international et où nous faisons appel à peu près à toutes les possibilités de Team Canada en Afrique, en Asie et partout au monde.

[Traduction]

Par ailleurs, il me semble qu'il y ait une incohérence. D'une part, nous tentons d'accroître le rôle du Canada sur la scène internationale. D'autre part, nous fermons cette institution, qui n'est pas aussi coûteuse que les gens le pensent. Cependant, la réputation du Canada sur le plan international en souffre.

Puis-je demander au leader du gouvernement d'informer le gouvernement que certains d'entre nous désirent réexaminer cette fermeture et de faire rapport au Sénat? Je crois que cette question ferait l'unanimité.

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai écouté attentivement la déclaration du sénateur MacDonald. Bien sûr, je transmettrai les préoccupations et les propositions de tous les sénateurs à mes collègues du Cabinet. Je ferai de mon mieux pour donner une réponse au Sénat.

Le sénateur Prud'homme: Honorables sénateurs, en tant que sénateur indépendant, j'ai du mal à trouver quelqu'un pour m'appuyer. Demain, un sénateur qui aura quelqu'un pour l'appuyer consentira peut-être à présenter une motion demandant au gouvernement de réexaminer sa position sur cette question.

 

Radio Canada International-L'annonce de sa fermeture-L'effet sur la localité de Sackville,
au Nouveau-Brunswick-La position du gouvernement

L'honorable John G. Bryden: Honorables sénateurs, je voudrais adresser une question complémentaire à madame le leader du gouvernement au Sénat. Pourrait-elle également demander à ses collègues du Cabinet de s'informer pour savoir ce qu'il adviendra des installations et des employés dans la localité de Sackville, au Nouveau-Brunswick, qui est située près de l'endroit dont je suis originaire? Je n'ai eu une aucune indication de ce qui se passera là-bas. Il nous serait utile d'obtenir ces renseignements.

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je tâcherai d'obtenir également ces renseignements. Comme je l'ai dit au sénateur Prud'homme, je transmettrai ses préoccupations au gouvernement.

[Français]

 

La Société Radio-Canada-le Temps d'antenne
arbitraire accordé à deux événements-
La position du gouvernement

L'honorable Roch Bolduc: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. C'est une question supplémentaire au sujet de Radio-Canada, une institution pour laquelle j'éprouve beaucoup de respect à certains égards.

Dimanche soir, je regardais les informations. M. Charest, le chef du Parti progressiste-conservateur, un parti national qui a obtenu 14 ou 15 p. 100 des votes à la dernière élection - nous en obtiendrons davantage à la prochaine - a parlé devant 900 personnes à Montréal: on a eu droit à un gros 30 secondes de la part de Radio-Canada pour nous expliquer ses propos. Trente secondes après, on a appris qu'il y avait 100 personnes à peine à Joliette pour rencontrer M. Chevrette et M. Duhaime. On a eu un reportage de cinq minutes. Il y avait 75 personnes dans la salle pour représenter un parti régional sur la scène fédérale. Un organisme fédéral nous présente un reportage de trois ou quatre minutes sur ce sujet et, quand le chef de notre parti parle, on a à peu près 30 secondes.

Je voudrais que le leader du gouvernement au Sénat demande au ministre du Patrimoine de s'informer auprès du président de Radio-Canada quant à sa notion de l'équité. C'est une simple question d'équité.

[Traduction]

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je serai heureuse de transmettre la requête du sénateur Bolduc à mes collègues du Cabinet.

 

Radio Canada International-Le sort des fréquences fermées-La position du gouvernement

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, lorsqu'elle cherchera à obtenir ce renseignement, madame le leader du gouvernement au Sénat pourrait aller un peu plus loin et obtenir des renseignements détaillés sur l'avenir des fréquences en question? Non seulement ces fréquences rapportent de l'argent, mais elles sont inestimables en ce qui concerne la présentation du Canada au reste du monde. Elle sera peut-être en mesure de répondre à cette question demain.

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je ne peux garantir que je serai en mesure de répondre à cette question demain. Cependant, je vais ajouter la question de l'honorable sénateur à la liste.

 

Les droits de la personne

Le lien entre l'aide canadienne et le respect
des droits de la personne et les dépenses
militaires dans les pays bénéficiaires

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, en mai 1993, dans leur document sur la politique étrangère, les libéraux ont promis de chercher de façon efficace et transparente à lier l'aide canadienne au respect des droits de la personne et aux dépenses militaires dans les pays bénéficiaires.

Madame le leader du gouvernement pourrait-elle nous confirmer que plus de la moitié des pays qui ont reçu de l'aide étrangère du Canada au cours des deux dernières années ont des dépenses militaires supérieures à celles du Canada en pourcentage du produit intérieur brut?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je ne peux confirmer cette statistique. Je vais transmettre la question du sénateur Di Nino pour obtenir plus de renseignements.

Le sénateur Di Nino: Honorables sénateurs, pendant qu'elle y sera, madame le leader du gouvernement au Sénat pourrait-elle également obtenir pour les sénateurs un bilan sur l'aide offerte par le gouvernement du Canada à divers pays et sur la façon dont le gouvernement libéral tient ses promesses à cet égard?

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, je voudrais poser à mon honorable collègue une question pour obtenir des éclaircissements. Demande-t-il de l'information sur l'aide offerte à tous les pays ou seulement à certains pays?

Le sénateur Di Nino: Honorables sénateurs, ma question porte sur tous les pays qui reçoivent de l'aide liée aux dépenses militaires. En fait, la ministre pourrait-elle nous préciser dans quelle mesure on a tenu la promesse faite en 1993?

Le sénateur Fairbairn: Je vais transmettre la question de mon honorable collègue, honorables sénateurs. Je ne m'attends certes pas à obtenir une réponse immédiatement.

 

L'agriculture

L'effet défavorable de la hausse des prix des
produits de base sur les marges bénéficiaires des
agriculteurs des Prairies-La position du gouvernement

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, ma question s'adresse à madame le leader du gouvernement au Sénat et porte sur l'escalade des coûts des intrants agricoles, qui inquiète beaucoup les agriculteurs des Prairies.

Statistique Canada vient de confirmer un fait que connaissent trop bien les agriculteurs: les ventes de céréales sont excellentes, mais il en va autrement du revenu net des agriculteurs. En fait, leur marge bénéficiaire a rétréci de 9 p. 100 l'an dernier. La principale cause de cette situation est la hausse considérable des prix, qui peut atteindre 63 p. 100 dans le cas du gaz propane et 50 p. 100 dans celui des engrais. Le Bureau de la politique de concurrence d'Industrie Canada a réclamé une enquête sur les hausses injustifiées du prix du gaz propane. Cette enquête est nécessaire tout de suite, car les agriculteurs doivent maintenant sécher les céréales et chauffer leurs maisons. À mon avis, l'enquête doit aussi examiner toutes les fortes hausses de prix qui touchent les activités agricoles.

Madame le leader du gouvernement au Sénat pourrait-elle vérifier si les ministres de l'Industrie et de l'Agriculture seraient prêts à envisager la formation d'une commission d'enquête sur ce qui, pour bien des gens, prend l'allure d'une exploitation outrageuse des agriculteurs?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, la question posée par l'honorable sénateur est importante pour toute la communauté agricole. Je me ferai un plaisir de transmettre ses préoccupations aux deux ministres, en particulier au ministre de l'Agriculture. Je serai heureuse aussi d'obtenir les renseignements qu'elle demande sur la tenue éventuelle d'une enquête.

 

Réponses différées à des questions orales

L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai une réponse à une question que l'honorable sénateur Comeau a posée au Sénatle 29 octobre 1996, concernant le tracé du gazoduc pour le gaz naturel extra-côtier de la Nouvelle-Écosse.

 

L'énergie

Le tracé du gazoduc pour le gaz naturel extra-côtier de la Nouvelle-Écosse-L'influence du premier
ministre sur l'Office national de l'énergie-
La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable Gerald J. Comeau le 29 octobre 1996)

L'ancien ministre Collenette a offert sa démission au premier ministre, qui l'a acceptée, après qu'il eut envoyé une lettre à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié pour le compte d'un commettant dont le cas était examiné par la Commission. Il s'agissait là d'un contact direct d'un ministre avec un organisme quasi judiciaire, et l'ex-ministre a ensuite agi tout à fait comme il devait le faire dans les circonstances en offrant sa démission.

Quant aux déclarations du premier ministre concernant le gazoduc pour le gaz naturel de l'île de Sable, la situation est complètement différente. Le premier ministre a toujours soutenu que l'Office national de l'énergie décidera du tracé que suivra le gazoduc pour le gaz naturel de l'île de Sable. Le premier ministre a déclaré le 27 octobre au réseau de télévision CTV qu'il «incombe à l'Office national de l'énergie, non au gouvernement, de prendre la décision». Il a également affirmé à plusieurs reprises que le projet doit être viable pour aller de l'avant.

L'Office national de l'énergie a compétence en ce qui a trait aux pipelines internationaux et interprovinciaux. C'est un organisme de réglementation quasi-judiciaire indépendant. Les principes de justice, d'équité et d'efficacité s'appliquent à tous les projets proposés de gazoduc.

Dans une lettre datée du 18 septembre 1996 qu'elle a fait parvenir au Chronicle de Halifax, l'honorable Anne McLellan a déclaré que «le Canada n'a pas l'intention d'intervenir dans le processus de réglementation en faveur de l'un ou l'autre projet et, en fin de compte, ce sont les forces du marché qui détermineront quel projet l'emportera».

 


Décision de la présidence

Recours au Règlement concernant l'article 49-
Les conséquences du maintien au Feuilleton
pour une longue période de questions
inscrites au nom d'un sénateur

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, avant de passer à l'ordre du jour, je tiens à faire une déclaration concernant une question posée par l'honorable sénateur Lynch-Staunton.

(1450)

Le mercredi 4 décembre dernier, juste avant que le Sénat s'ajourne au lendemain, l'honorable sénateur Lynch-Staunton a soulevé une question de procédure sur l'étude des articles inscrits à l'ordre du jour. Le sénateur a demandé ce que l'on devait faire dans le cas d'un article au Feuilleton qui est constamment ajourné au nom du même sénateur pendant une assez longue période. Il a aussi demandé si le fait de reporter constamment le débat d'une motion à une séance ultérieure pouvait retarder, voire empêcher, la mise aux voix de la motion.

[Français]

J'ai alors exprimé quelques commentaires préliminaires en indiquant que je vérifierais le sujet plus à fond et que je reviendrais au Sénat présenter mes conclusions. La nécessité de fournir une explication concernant cette pratique s'est précisée le lendemain, le jeudi 5 décembre, lorsque l'ordre du jour a appelé la reprise du débat sur le projet de loi S-13, inscrit au nom du sénateur Lavoie-Roux.

[Traduction]

L'ajournement du débat des questions inscrites au Feuilleton est régi par l'article 49 du Règlement du Sénat. Le paragraphe 49(1) du Règlement, qui porte sur les affaires non gouvernementales, stipule que:

Toute motion d'ajournement d'un débat sur une affaire autre que gouvernementale est considérée comme une motion pour reporter le débat au jour indiqué dans la motion ou, à défaut, au jour de séance suivant. Dans les deux cas, l'affaire demeure inscrite au Feuilleton au nom du sénateur qui a proposé l'ajournement ou d'un autre sénateur, le cas échéant.

Le paragraphe 49(2), qui porte sur le règlement des affaires du gouvernement, dit ceci:

Toute motion d'ajournement du débat sur une affaire du gouvernement est considérée comme une motion pour reporter le débat au jour de séance suivant. Le sujet alors ne reste pas inscrit à l'ordre du jour ni au Feuilleton au nom d'un sénateur, mais peut être réinscrit selon l'article 27(1) du Règlement.

[Français]

Avant 1991, on ne distinguait pas entre les affaires du gouvernement et les autres affaires. Toute affaire reportée à une séance ultérieure restait inscrite au Feuilleton au nom du sénateur qui avait proposé l'ajournement. Depuis 1991, toutefois, nous faisons cette distinction. Et bien que l'application de cette règle aux affaires du gouvernement ne semble pas poser de difficultés, la situation n'est pas aussi claire en ce qui concerne les affaires non gouvernementales, comme en témoignent les questions que m'a posées le sénateur Lynch-Staunton le 4 décembre.

[Traduction]

Lorsqu'il est proposé d'ajourner le débat d'une affaire du gouvernement et que la motion est adoptée, l'affaire reste inscrite au Feuilleton au nom du sénateur qui a proposé l'ajournement ou du sénateur au nom de qui l'ajournement a été proposé. Le nom du sénateur figure entre parenthèses et ne fait qu'indiquer lequel des sénateurs a proposé l'ajournement la dernière fois où la question a été débattue. Cela ne signifie pas que seul ce sénateur a le droit de décider si l'affaire va être débattue, bien que cette impression ait pu avoir été donnée en raison de la courtoisie témoignée habituellement par le Sénat envers le sénateur qui propose l'ajournement de la question. On le constate lorsqu'un sénateur désire reprendre le débat sur une question qui est déjà inscrite au nom d'un autre sénateur. C'est justement ce qui s'est produit le 4 décembre. Le sénateur Lavoie-Roux a indiqué qu'elle voulait débattre la motion proposée à l'origine par le sénateur Beaudoin. Le sénateur Petten, au nom de qui le débat a été ajourné, a accepté, pourvu que l'affaire continue d'être inscrite à son nom.

[Français]

Cela peut donner à penser que le Sénat doit obtenir le consentement du sénateur Petten, mais il n'en est rien. Comme le précise l'article 49, lorsque le débat sur la question est reporté, il est reporté à un jour précis ou au jour de séance suivant. Ce jour-là, le Sénat peut débattre la question selon l'ordre du jour qu'il a adopté. Habituellement, lorsqu'un sénateur demande que le point soit reporté de nouveau, le Sénat accepte implicitement et il passe à l'affaire suivante. Si le Sénat décidait de débattre l'affaire, il accordera habituellement au sénateur qui a demandé l'ajournement la possibilité de prendre la parole le premier. Autrement, n'importe quel autre sénateur pourrait intervenir.

[Traduction]

Si la question est débattue et reportée de nouveau, elle pourra être inscrite au nom du sénateur qui a demandé l'ajournement du débat ce jour-là ou, si le Sénat y consent, au nom du sénateur qui en avait demandé l'ajournement précédemment. Tout autre mode de fonctionnement pourrait créer une situation où le sénateur qui a ajourné le débat peut continuellement le reporter jusqu'à ce que la question soit rayée du Feuilleton conformément au paragraphe 27(3) du Règlement ou, comme le sénateur Lynch-Staunton l'a supposé, empêcher qu'une décision soit prise. Je ne pense pas que pareille interprétation soit dans l'intérêt du Sénat.

[Français]

Je remercie l'honorable sénateur Lynch-Staunton d'avoir soulevé cette question, qui nous permet de clarifier la situation.

 


[Traduction]

 

ORDRE DU JOUR

Le Code criminel

Projet de loi modificatif-Troisième lecture-Ajournement du débat

L'honorable Lorna Milne propose: Que le projet de loi C-45, Loi modifiant le Code criminel (révision judiciaire de l'inadmissibilité à la libération conditionnelle) et une autre loi en conséquence, soit lu une troisième fois.

- Honorables sénateurs, c'est avec plaisir que je propose la troisième lecture du projet de loi C-45, Loi modifiant le Code criminel, en ce qui concerne la révision judiciaire de l'inadmissibilité à la libération conditionnelle, et une autre loi en conséquence. Comme j'ai déjà proposé un aperçu complet du projet de loi à l'étape de la deuxième lecture, je vais me contenter aujourd'hui d'en résumer brièvement les dispositions.

Le projet de loi vise à modifier l'article 745.6 du Code criminel, qui prévoit une révision judiciaire de l'inadmissibilité à la libération conditionnelle dans le cas des peines d'emprisonnement à perpétuité pour meurtre et haute trahison. La personne reconnue coupable de meurtre au premier degré ou de haute trahison est automatiquement passible de la peine d'emprisonnement à perpétuité, sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans. Le juge qui prononce la sentence n'a aucune latitude. Aux termes de l'article 745.6, un contrevenant ne peut demander une révision qu'après avoir purgé 15 ans de sa peine. Le projet de loi ne change rien à cette politique fondamentale.

Le projet de loi comprend trois éléments. Le premier est l'élimination, à l'avenir, du droit de demander une révision judiciaire pour toutes les personnes qui ont commis plusieurs meurtres, que ces meurtres aient été commis en même temps ou non. Deuxièmement, le projet de loi prévoit un processus de sélection dans lequel un juge de la Cour supérieure fera un examen du dossier pour voir s'il y a des chances raisonnables de succès avant que la demande ne fasse l'objet d'une audience en bonne et due forme. Cela contribuera à faire en sorte que seuls les cas méritoires feront l'objet d'une audience avec jury aux termes de l'article 745.6 et à épargner à certaines familles la pénible expérience de ces audiences. Troisièmement, le projet de loi modifie le seuil d'approbation des deux tiers par le jury; l'unanimité sera désormais exigée du jury en ce qui concerne la décision d'accorder une réduction.

Je voudrais prendre le temps d'expliquer à fond l'exigence d'unanimité, car beaucoup la jugent trop sévère. Le jury prend part à trois décisions. Il doit décider d'abord s'il y a lieu de réduire la période d'inadmissibilité, deuxièmement dans quelle mesure il faut réduire cette période, et enfin si un requérant qui n'a pas eu gain de cause peut refaire une demande et quand. L'unanimité n'est nécessaire que pour la première décision. Quant à l'importance de la réduction et à la possibilité de faire une nouvelle demande, la majorité des deux tiers suffit.

Notre comité a fait du projet de loi une étude approfondie. Nous avons entendu des témoins très divers. Certains, comme les familles de victimes, ne s'opposaient pas tant au projet de loi lui-même qu'à l'existence même de l'article 745.6. Personne ne niera que ce processus est pénible pour les familles. Il doit être extrêmement difficile de se représenter devant les tribunaux au bout de 15 ans. Certains nous ont fait comprendre de façon saisissante à quel point l'expérience pouvait être pénible.

Il est toutefois intéressant de signaler que, parmi les membres des familles de victimes qui ont témoigné, certains s'opposaient au projet de loi parce qu'il n'abrogeait pas carrément l'article 745.6. D'autres auraient préféré l'abrogation de l'article, mais ils ont exhorté le Sénat à adopter le projet de loi parce que, au moins, il resserre les conditions d'application.

Ce qui ressort le plus souvent des témoignages des familles des victimes est le fait qu'elles ont toutes été surprises et même bouleversées d'apprendre l'existence de l'article 745.6, même s'il est en vigueur depuis 1976. L'un des témoins a décrit le choc qu'elle a subi en écoutant sur son répondeur le message que lui avait laissé un journaliste qui lui apprenait que le tueur de sa fille pourrait être libéré au bout de seulement 15 années d'emprisonnement, alors qu'elle pensait qu'il ne pourrait pas être libéré avant 25 ans. Je partageais sa souffrance en l'écoutant nous raconter cette expérience des plus horribles.

À ce stade-là, les membres du comité se sont découvert des points communs dans le cadre d'un débat qui les divisait énormément. Le rapport du comité ne contient aucun amendement, mais une observation très importante. Lorsque la famille de la victime rencontre le procureur, on lui parle notamment de la solidité des accusations portées contre le contrevenant, de ce qu'elle doit attendre du procès, du processus de détermination de la peine. Toutefois, la famille n'est apparemment pas informée de l'existence de l'article 745.6 du Code criminel. L'existence de cette disposition ne devrait pas renverser la famille de la victime 15 ans après le procès. La famille devrait être au courant. En l'informant de l'existence de l'article 745.6 du Code criminel au moment du procès, on lui épargnerait bien des souffrances. Nous avons donc recommandé au ministre de la Justice d'exhorter ses homologues provinciaux à enjoindre les procureurs de la Couronne de fournir ce renseignement aux familles des victimes.

(1500)

D'autres témoins, notamment les représentants des Sociétés Elizabeth Fry et John Howard, sont venus dire au comité qu'ils s'opposaient à ce projet de loi, car ils le jugent trop dur. Ils craignent essentiellement qu'un détenu réellement méritant, qui s'est réadapté et est prêt à réintégrer la société, demeure emprisonné à la suite de la décision d'un seul membre du jury, les onze autres ayant voté en faveur de la libération conditionnelle. Je partage leurs inquiétudes.

Cela m'amène à vous parler des témoignages de Julian Roberts, de l'Université d'Ottawa, et de Patrick Healy, de l'Université McGill. Leurs témoignages résument bien les sentiments que j'ai éprouvés tout au long des travaux du comité. Je crois, moi aussi, que nous devrions avoir un mécanisme de libération anticipée. Bien que le meurtre demeure le crime le plus abominable qui soit, les causes diffèrent toujours. Il faudrait laisser à la collectivité la possibilité de décider si un contrevenant a payé sa dette envers la société et est prêt à réintégrer la société. Les statistiques nous apprennent que le taux de récidive chez les condamnés à l'emprisonnement à perpétuité qui obtiennent une libération anticipée est extrêmement faible, comparativement au taux observé chez les contrevenants qui ont été reconnus coupables d'un délit moins grave et libérés d'office. Selon les statistiques, on réussit très bien dans le cadre du système en place à déterminer les détenus qui sont prêts à réintégrer la société. Par conséquent, je ne vois pas la nécessité de changer quoi que ce soit au statu quo.

Toutefois, les très nombreux témoignages en faveur de l'abrogation de l'article 745.6 et le sentiment populaire que notre système judiciaire est parfois trop clément m'ont fait réfléchir. En dernière analyse, ce projet de loi répond aux préoccupations les plus importantes des adversaires de l'article 745.6. Ce projet de loi va redonner confiance dans le système judiciaire tout en préservant un système de libération anticipée qui a fait ses preuves.

Je veux revenir sur une autre observation de M. Roberts. Celui-ci a dit douter que la majorité des Canadiens sont contre l'article 745.6 et appuieraient sa révocation. Comment expliquer alors, a-t-il demandé, que des jurys recommandent la réduction des périodes d'inadmissibilité? Les jurés sont habituellement des membres de la collectivité dans laquelle le crime a été commis. Ces gens-là ou, du moins, les deux tiers d'entre eux conviennent que beaucoup des cas qui leur sont soumis méritent la libération. C'est ce même échantillon de la population qui dénonce la mise en liberté anticipée dans les sondages d'opinion. Cette ambivalence des Canadiens a aussi été signalée par les hauts fonctionnaires du ministère. Ils ont cité l'exemple des groupes de discussion à qui on a décrit en détail un crime violent. À partir de cette seule information, ces groupes ont tous trouvé que le juge était trop clément dans le prononcé de la sentence. Après avoir pris connaissance de tous les faits et de toute la preuve présentée au tribunal, ces mêmes groupes estimaient habituellement que ce même juge était trop sévère.

Cela pose un problème: comment concevoir un système qui soit juste sans être cruel et qui aura l'appui de la population? Il faut trouver un équilibre. Je crois que le ministre de la Justice a trouvé cet équilibre. Je reviens à nouveau au témoignage de M. Roberts. Celui-ci approuve la disposition de l'article 745.6 relative à la libération anticipée. Il n'approuve pas d'autres parties du projet de loi qu'il trouve trop sévères.

Comme l'a signalé M. Healy, rien ne lui prouve que le système actuel ne fonctionne pas. Toutefois, M. Roberts recommande que l'on adopte le projet de loi parce que, selon lui, il faut que le projet de loi plaise davantage à la population pour pouvoir garder cette bonne politique. À cet égard, il convient avec M. Healy, de l'Université McGill, que même si le projet de loi C-45 empêche que les cas manifestement indésirables soient soumis à un jury, aucun cas qui le mérite vraiment ne sera privé de cette possibilité.

Enfin, permettez-moi de parler d'une proposition que le procureur général de l'Ontario, l'honorable Charles Harnick, a faite au comité. Il a dit que, dans le processus de sélection proposé, le ministre de la Justice du Canada devrait remplacer le juge. À première vue, cela pourrait sembler une idée intéressante, mais je m'y oppose pour deux raisons. Premièrement, je suis sûr qu'aucun ministre de la Justice ne voudrait être responsable des ministres provinciaux et, en tout cas, n'aurait probablement pas assez de temps pour le faire convenablement. Si j'étais ministre de la Justice, je détesterais donner le feu vert à toute demande, car je ne voudrais pas faire l'objet des critiques associées à pareille décision.

Deuxièmement, et c'est là le plus important, il y a un conflit d'intérêts inhérent dans cette proposition. On nous a donné l'exemple d'une demande qui vise à faire déclarer quelqu'un délinquant dangereux et qui doit recevoir le feu vert du procureur général d'une province avant de pouvoir être étudiée. Comme les représentants du ministère de la Justice l'ont expliqué à juste titre, cet exemple n'est pas utile. Pour demander qu'un individu soit déclaré délinquant dangereux, le procureur de la Couronne doit absolument obtenir l'autorisation de son supérieur. Dans le cas d'une demande concernant l'inadmissibilité à la libération conditionnelle, le demandeur n'est pas à l'emploi de l'État. Il ne devrait pas avoir besoin de la permission de l'État pour présenter une demande au tribunal. Une telle idée porte en effet atteinte aux fondements mêmes de notre système adversatif. Pourquoi l'État se donnerait-il la peine de contester le bien-fondé d'une demande présentée à un tribunal s'il pouvait simplement la torpiller avant même qu'elle ne soit énoncée?

Nous ne pouvons laisser le gouvernement actuel empêcher le citoyen canadien d'avoir accès aux tribunaux. Je ne suis pas avocate, mais il me semble évident que pareille disposition serait déclarée inconstitutionnelle en cas de contestation dont elle ferait inévitablement l'objet.

L'honorable Dalia Wood: Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour donner mon avis sur le projet de loi C-45, Loi modifiant l'article 745 du Code criminel, à l'étape de la troisième lecture.

Les questions de crime et de châtiment ne sont jamais simples. Comme dans tous les aspects de la vie au sein d'une société organisée, le règlement de ces questions passe par un équilibrage des intérêts conflictuels, qu'il s'agisse d'intérêts collectifs ou individuels. Dans notre pays, l'atteinte d'un tel équilibre incombe au gouvernement, qui est composé d'élus représentant les intérêts de leurs électeurs. Les lois sont le fruit d'un compromis entre les intérêts conflictuels et constituent les règles de la conduite acceptable au sein de la société.

Le Code criminel du Canada est un bel exemple de loi résultant de la mise en équilibre d'intérêts conflictuels. Il représente ce que la société ou ses représentants considèrent comme conduite inacceptable et prévoit des sanctions pour cela. Les modifications apportées au Code criminel reflètent habituellement les changements de tendance qu'on observe au fil du temps dans la société quant à la gravité des infractions et aux limites de la tolérance envers certains comportements. La complexité du Code criminel est évidente. La Commission canadienne sur la détermination de la peine a fait remarquer dans son rapport de 1987 que le Code criminel est:

... un labyrinthe de dispositions où errent les juristes et se perdent les citoyens.

Cela s'applique de façon particulière à l'article 745.

Honorables sénateurs, la plupart des Canadiens ne connaissaient même pas l'existence de cette disposition jusqu'à ce que des meurtriers condamnés commencent à y recourir. Comme vous le savez, cet article faisait partie des dispositions qui ont remplacé la peine capitale en 1976. Les Canadiens ont accepté que l'on impose une peine d'emprisonnement minimale de 25 ans en échange de l'abolition de la peine de mort. L'article 745 vient détruire ce compromis en donnant aux criminels la possibilité de raccourcir leur période d'inadmissibilité à la libération conditionnelle.

Je voudrais attirer l'attention des sénateurs sur le rapport du vérificateur général de novembre 1996, et plus particulièrement sur le chapitre qui porte sur le Service correctionnel du Canada et le rôle qu'il joue dans la réintégration des délinquants dans la société. Certes, il n'y a pas de liens directs entre cette vérification et l'article 745, mais je voudrais quand même faire quelques déductions.

L'article 745.3 du Code criminel énonce les critères à considérer lors de l'audition de la demande d'un détenu aux termes de l'article 745. Parmi ces critères, on compte le caractère du demandeur, sa conduite pendant son incarcération, la nature de l'infraction qu'il a commise, les déclarations des victimes et tout autre renseignement jugé pertinent par le juge. Une partie considérable des renseignements analysés viennent des Services correctionnels du Canada.

(1510)

Or, honorables sénateurs, le vérificateur général du Canada a découvert de graves problèmes au sein de cet organisme. En effet, il semble que le Service correctionnel du Canada ait de la difficulté à obtenir des renseignements cruciaux - comme les rapports de police, les mémoires de la Couronne et les motifs des juges pour la détermination de la peine - des sources officielles. Les dossiers des personnes chargées de prendre les décisions relatives à la réintégration des détenus dans la société sont incomplets et peuvent donc donner lieu à des décisions erronées.

Honorables sénateurs, à mon grand étonnement et à ma grande consternation, le vérificateur général a déclaré que des décisions concernant la réinsertion sociale de contrevenants étaient fondées sur des renseignements fournis par ces contrevenants eux-mêmes. Il dit:

Lorsque le Service correctionnel n'a pas assez de renseignements sur le délinquant et sur le crime, les renseignements utilisés proviennent du délinquant - qui peut minimiser ou nier les détails et les circonstances de son crime.

On lit encore:

[...] le problème de la disponibilité de l'information et, donc, du «recours excessif à la version donnée par le délinquant au sujet de son crime» a été un facteur qui a contribué à la piètre qualité d'un certain nombre des décisions concernant la mise en liberté.

Honorables sénateurs, lorsque nous avons affaire à des meurtriers, les erreurs dans les décisions concernant leur remise en liberté sont totalement inacceptables. À mon avis, et beaucoup de Canadiens pensent comme moi, l'intérêt de la société n'est pas bien servi dans ces décisions. Il semble que le détenu jouisse souvent d'un avantage évident dans la présentation de ses arguments en faveur de sa libération. Trop souvent, on ne tient aucun compte de l'intérêt des familles des victimes. Ces derniers temps, on a vu davantage le ministre de la Justice comme le protecteur des droits des criminels que comme le protecteur des citoyens respectueux des lois.

Honorables sénateurs, tout cela pour dire que l'article 745.6 actuel et la proposition de modification de cet article contenue dans le projet de loi C-45 n'établissent pas un juste équilibre entre les intérêts divergents en cause dans le débat. Ces intérêts sont ceux des familles des victimes et ceux des détenus condamnés à l'emprisonnement à perpétuité.

Les témoignages entendus par le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles sur cette question illustrent à petite échelle les forces qui s'opposent au sein de la société. Le comité a entendu des victimes et des détenus, de même que des universitaires et des législateurs. Les témoignages en disent long, notamment sur l'absence de consensus et l'absence de soutien pour le projet de loi.

Honorables sénateurs, je ne comprends pas trop bien comment le projet de loi C-45 a vu le jour. Le ministre de la Justice a bien dû mener des consultations. Je me demande alors pourquoi les seuls à le soutenir sont les représentants du gouvernement. Les universitaires acceptent la mesure proposée, mais émettent des réserves. Les condamnés à l'emprisonnement à perpétuité, l'Association du Barreau canadien et les familles des victimes s'y opposent tous. Les raisons de leur opposition illustrent les positions diamétralement opposées de ces groupes sur le système correctionnel et ses objectifs.

L'Association du Barreau canadien, les condamnés à perpétuité et les organisations qui les appuient sont contre le projet de loi C-45 parce que, selon eux, l'article 745 du Code criminel devrait rester inchangé.

M. Brian Gough, condamné à perpétuité et membre du personnel d'une organisation du nom de Project Lifeline, a témoigné devant le comité le 21 novembre 1996. Il a exprimé le point de vue des condamnés à perpétuité et des organisations qui les appuient au sujet du système correctionnel, en disant ceci:

Le système correctionnel fédéral a pour but d'assurer l'exécution de la sentence prononcée par le tribunal; mais il lui incombe aussi de reconnaître les changements interpersonnels et intrapersonnels qui s'opèrent chez un délinquant. Le système doit punir les délinquants en les privant de leur droit le plus précieux, le droit à la liberté. Il doit aussi faire tous les efforts possibles pour aider les délinquants à réintégrer la société en tant que citoyens respectueux des lois...

Priver un condamné à perpétuité d'une deuxième chance fait disparaître toute apparence de traitement juste et humanitaire et va à l'encontre des principes d'une société libre et démocratique dont les valeurs morales reflètent la doctrine chrétienne de la rédemption et du pardon.

Il a ajouté ceci au sujet du projet de loi C-45:

Les modifications à l'article 745 enlèvent tout espoir. Lorsque, en tant qu'individus ou en tant que gouvernement, nous enlevons tout espoir à une personne ou à des personnes, nous nous abaissons en tant que société.

Enfin, au sujet de ceux qui sont actuellement admissibles à un examen judiciaire en vertu de l'article 745, il a dit ceci:

... les condamnés à perpétuité [...] sont aussi des Canadiens. Malgré le crime qu'ils ont commis, ce sont quand même des êtres humains qui espèrent un avenir meilleur. Ils ont de la valeur pour nous tous.

Honorables sénateurs, ces déclarations ont un certain mérite. Toutefois, ce n'est là qu'un côté de la médaille. Les intérêts des familles des victimes étaient également représentés aux audiences du comité par ce que le ministre de la Justice aurait appelé «les victimes professionnelles» ou «l'industrie des victimes».

La majorité des familles des victimes ne peuvent pas appuyer le projet de loi C-45 parce qu'elles ne peuvent accepter rien de moins que l'abrogation totale de l'article 745.

Mme Darlene Boyd, dont la fille de seize ans, Laurie, a été violée, poignardée à 18 ou 20 reprises, puis aspergée d'essence et brûlée, a comparu devant le comité le 21 novembre. Elle a donné une nouvelle dimension au débat en parlant de sa fille dont elle a été privée de façon si brutale et si soudaine. Mme Boyd a déclaré ce qui suit à propos de l'opinion de la majorité des familles de victimes concernant le projet de loi C-45 et le système correctionnel:

Notre demande concernant l'abrogation de l'article 745 n'est pas motivée par un esprit de vengeance ou de rétribution. Elle correspond, au contraire, à l'intention initiale de la peine d'emprisonnement d'une durée minimale de 25 ans et, de ce fait, appuie pleinement l'uniformisation des peines. Elle représente ce sur quoi la justice devrait être fondée, la vérité.

Nous devons nous interroger sur la manière de définir une peine. Lorsqu'un individu tue une ou plusieurs personnes de façon brutale, intentionnelle et préméditée, il doit exister des règles de punition fixes, une peine proportionnelle au crime commis. Les auteurs de crimes doivent rendre compte de leurs actes. Il ne faut pas confondre cela avec la réadaptation. Selon moi, aucun individu compris dans cette catégorie de criminel ne pourra jamais être réadapté au point d'être réintégré dans la société canadienne. Les auteurs de meurtres, qu'il s'agisse de meurtres multiples, en série ou simples, devraient purger la totalité de leur peine. Nous ne pouvons pas établir de catégorie puisque ces crimes aboutissent tous au même résultat: la mort d'une personne.

Mme Boyd a rejeté ensuite l'appel à la compassion et à l'équité des délinquants condamnés à perpétuité en disant ce qui suit:

J'ai lu dans les mémoires présentés plus tôt que chaque personne devrait être traitée avec dignité, égalité, équité et compassion. Aucune personne condamnée pour meurtre au premier degré ne devrait avoir droit à ce genre de traitement. Jim Peters n'a jamais montré de compassion envers notre fille et les autres jeunes filles qui lui ont demandé de les épargner. Il n'a pas respecté leur dignité. Pour ce qui est de l'équité, comment une fille de 16 ans peut-elle se défendre contre deux hommes adultes animés par la perversion?

Leslie, la fille de Mme Debbie Mahaffy, a été enlevée, gardée en captivité, ligotée et tuée par Paul Bernardo et Karla Homolka. Son corps profané a été retrouvé dans des blocs de ciment, pas très loin de la maison de la famille Mahaffy. Mme Mahaffy a aussi témoigné devant le comité le 21 novembre. Son témoignage est un rappel brutal de l'épreuve et de la douleur que doivent supporter les familles des victimes. Elle a dit:

J'espère qu'il n'est arrivé à personne dans ce gouvernement d'entendre son enfant crier et pleurer de douleur, lançant des appels au secours. Quelques minutes plus tard, on lui retirait le bandeau qu'on lui avait mis aux yeux et fait porter de force pendant des jours, et on la tuait. Comment osez-vous ne pas écouter les cris, la terreur et la douleur des victimes et les appels des Canadiens qui réclament que vous vous engagiez à veiller à la sécurité de tous les citoyens? Comment osez-vous ne pas y répondre?

Honorables sénateurs, je crois que, avec le projet de loi C-45, nous avons failli à notre devoir de législateurs de soigneusement établir un équilibre entre les intérêts en jeu dans ce débat. Ces dernières années, depuis le rapatriement de la Constitution en 1982 et l'avènement de la Charte canadienne des droits et libertés, les droits de l'accusé et du détenu l'ont emporté sur d'autres considérations. Nous avons oublié les principaux objectifs du système de justice pénale et du processus de détermination de la peine - la punition de ceux qui ont commis des infractions. L'attention semble maintenant se retourner vers les droits des victimes et de leurs familles.

M. David Tilson, adjoint parlementaire du procureur général de l'Ontario, a admis ce changement dans son témoignage du 28 novembre devant le comité. Il a dit alors:

Les Ontariens sont révoltés par les crimes commis par ces meurtriers qui réclament ensuite de la compassion. Ils sont pleins de compassion pour les victimes de ces crimes. Ils en sont venus à croire, comme le croit le gouvernement de l'Ontario, que nous devons repenser notre système de justice pénale afin de faire en sorte que ce ne soient pas ceux qui commettent ces crimes odieux qui bénéficient de la sympathie et du soutien, mais bien leurs victimes.

Il a ajouté:

Nous devrions assurer notre compassion aux victimes. Nous devrions assurer aux criminels un traitement juste.

Honorables sénateurs, il faut que justice soit rendue pour ces familles qui ont été déchirées par les gestes violents et abominables de certaines personnes. Nous ne pouvons permettre que la foi des Canadiens dans notre système de justice pénal soit ainsi minée par un tel déséquilibre des intérêts. Leur foi est déjà défaillante. Nous ne pouvons permettre que cela continue. Je partage l'opinion de l'honorable Charles Harnick, procureur général de l'Ontario, qui a déclaré au comité, le 28 novembre:

En tant que nation, les Canadiens ont un profond respect de la loi. Nous acceptons le principe du compromis et l'idée que c'est souvent la meilleure chose à faire. Le projet de loi C-45 n'a pas de juste milieu et les amendements que vous envisagez non plus. Ils sont conçus pour réparer les lacunes les plus inacceptables du projet de loi original. La population n'appuie pas cette mesure...

Nous sommes législateurs. Nous avons la responsabilité et le privilège de concevoir les lois qui visent à protéger nos concitoyens. Nous devons nous acquitter correctement de cette responsabilité. Notre tâche est de gouverner pour le bien de toute la société.

(1520)

Nous ne pouvons pas faire fi de la volonté populaire. Les lois qui n'ont pas l'approbation du public, qui font l'objet d'un mépris généralisé, sont de mauvaises lois. Elles jettent le discrédit sur l'administration de la justice et menacent l'intégrité du système de justice pénal.

On a souvent décrit la politique comme étant l'art du compromis. S'ils ne parviennent pas à un compromis, les politiciens manquent à leur devoir élémentaire envers la société et à l'égard des intérêts qu'ils défendent.

À mon avis, le projet de loi C-45 est une mauvaise loi. Je crois que les intérêts de l'accusé sont protégés du fait de la tenue d'un procès. Le projet de loi C-45 nuit à notre système de justice pénale en permettant la révision, 15 ans après, d'une peine dûment prononcée par un juge. Une fois qu'une peine a été prononcée, je considère que le droit des familles des victimes de voir les meurtriers punis proportionnellement à l'atrocité des crimes qu'ils ont commis devrait prévaloir.

Le fait que seuls quelques universitaires aient exprimé leur appui à la mesure proposée montre que les Canadiens ne sont pas contents des résultats de nos délibérations. Je refuse de modifier une disposition inacceptable au départ d'une manière qui ne réponde pas adéquatement aux préoccupations de la population canadienne. Je ne peux donc pas appuyer ce projet de loi sans amendement.

(Sur la motion du sénateur Nolin, le débat est ajourné.)

 

Projet de loi sur les additifs
à base de manganèse

Deuxième lecture-Ajournement du débat

L'honorable Colin Kenny propose: Que le projet de loi C-29, Loi régissant le commerce interprovincial de l'importation à des fins commerciales de certaines substances à base de manganèse, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, c'est avec plaisir que je m'adresse au Sénat à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-29, Loi sur les additifs à base de manganèse.

La qualité de l'air est mauvaise dans la plupart des centres urbains de la planète, et les grandes villes canadiennes ne font pas exception. Le smog, mélange de polluants multiples et variés, affecte la santé des citadins et leur impose un lourd fardeau économique en raison de la perte de productivité et des frais médicaux qu'il entraîne.

Les gouvernements successifs ont fait une priorité de l'assainissement de l'air. Les émissions de gaz d'échappement sont une source importante de smog et le gouvernement a déjà imposé des normes plus strictes pour les modèles qui sortiront en 1998, normes qui contribueront à l'assainissement de l'air dans les villes.

Le projet de loi sur le MMT dont nous sommes saisis est un élément important de notre stratégie de lutte contre la pollution de l'air. Il ne signale en rien la fin de la campagne d'assainissement de l'air. Des efforts encore plus importants seront nécessaires à l'avenir, et nous les ferons.

Lorsque tous ces règlements et toutes ces normes seront en place, les Canadiens verront la différence, ils sentiront la différence et ils respireront la différence. Dans les années à venir, les initiatives du gouvernement pour améliorer la qualité de l'air se traduiront par des économies de frais médicaux s'élevant à des milliards de dollars. Elles contribueront à épargner aux jeunes et aux personnes âgées les souffrances que leur inflige la pollution les jours où les villes sont noyées dans le smog.

Le projet de loi C-29 dont nous sommes saisis a pour titre Loi sur les additifs à base de manganèse. MMT est le sigle utilisé communément pour désigner cet additif qui sert à augmenter l'indice d'octane de l'essence. On a d'abord pensé que le MMT pouvait remplacer le plomb dans l'essence. Il est utilisé au Canada depuis 1977. Depuis 1990, il n'y a pratiquement plus de plomb dans l'essence vendue au Canada.

En supprimant graduellement le plomb, on a amélioré considérablement la qualité de l'air dans les villes. Cependant, de nos jours, presque tous les automobilistes canadiens utilisent du MMT, tout simplement parce que les raffineries canadiennes en ajoutent à l'essence. La quantité exacte de MMT peut varier d'un lot à l'autre. En général, les supercarburants contiennent plus de MMT que les essences ordinaires.

Honorables sénateurs, comme vous le savez, le MMT a toujours été source de controverse. En 1978, on a interdit l'addition de MMT à l'essence sans plomb aux États-Unis parce qu'on craignait qu'il n'endommage les dispositifs de contrôle des émissions. Le MMT n'aura certainement pas sa place dans les essences de l'avenir, plus propres et de haute technologie.

Le Canada doit maintenant s'attaquer aux problèmes causés par le MMT non pas parce qu'un nouveau danger environnemental nous menace, mais parce que nous savons mieux lutter contre les émissions polluantes grâce à la technologie. Pour assurer une meilleure qualité de l'air, nous devons utiliser des carburants plus propres et compter sur l'arrivée d'une nouvelle génération d'automobiles et de camions qui brûleront plus proprement le carburant.

Les recherches se poursuivent relativement aux produits que nous versons dans nos réservoirs d'essence, mais aussi dans le domaine du matériel, c'est-à-dire les moteurs qui brûlent le carburant et contrôlent les dispositifs qui réduisent les émissions. Les progrès technologiques ont constamment fait diminuer les émissions toxiques produites par nos tuyaux d'échappement. En fait, depuis l'avènement des normes nationales au début des années 70, les nouveaux véhicules vendus de nos jours suppriment plus de 90 p. 100 des polluants les plus toxiques qui s'échappent de nos véhicules.

Nous avons réalisé un autre progrès majeur en installant dans les véhicules des dispositifs évolués, des systèmes de diagnostic à bord qui veillent au bon fonctionnement des systèmes de contrôle des émissions. Ces systèmes peuvent être très salutaires pour la qualité de l'environnement. Ils surveillent le contrôle des émissions et avertissent le conducteur en cas de défauts de fonctionnement, lesquels peuvent ensuite être corrigés. Si on les utilise adéquatement, ces systèmes de diagnostic veillent à ce que les moteurs plus propres d'aujourd'hui et de demain fonctionnent de la façon appropriée. Ils indiquent aux conducteurs à quel moment leur véhicule a besoin d'entretien pour réduire au minimum les émissions et améliorer l'économie d'essence.

 

Honorables sénateurs, c'est une technologie très prometteuse, mais nous ne pourrons pas en profiter au maximum si elle ne fonctionne pas ou si on l'empêche de faire son travail comme il faut. C'est là où surgit le problème du MMT, car l'industrie de l'automobile nous a fait savoir que les essences au MMT encrassent les systèmes de diagnostic de bord.

Honorables sénateurs, je sais bien que l'affaire du MMT ne fait pas l'unanimité. Il y a eu de longs débats et de nombreux rapports scientifiques, mais la plus importante considération est certainement l'aspect santé, c'est-à-dire ses conséquences pour la santé de l'humain et de l'environnement. C'est pour une bonne raison que je mets cette considération en premier, c'est parce que les risques sanitaires sont une priorité du gouvernement. Or, on sait que le MMT est un additif qui risque de nuire au bon fonctionnement des dispositifs antipollution des automobiles. Nous dépendons de ces dispositifs pour réduire les émissions qui causent les brumards et, par la suite, pour protéger la santé des Canadiens. Nous ne voulons pas jouer avec la qualité de l'air que nous respirons.

Les transports, et en particulier l'automobile, sont la principale source de pollution atmosphérique. Il y a environ 14 millions de voitures et de camionnettes sur les routes canadiennes et chacune produit plus de quatre tonnes de polluants atmosphériques par année.

(1530)

Qu'est-ce que cela signifie en termes pratiques? En 1994, la dernière année pour laquelle nous avons des statistiques, durant 40 jours environ la qualité de l'air n'était que moyenne ou mauvaise à Toronto, la plus importante ville du Canada. L'augmentation des niveaux de pollution atmosphérique se reflète dans les statistiques sur la santé et les admissions dans les hôpitaux. Ces jours-là, les asthmatiques, surtout les enfants, courent un risque beaucoup plus élevé et les bébés sont les plus vulnérables de tous. Ils sont particulièrement sensibles à la pollution atmosphérique. En effet, 15 p. 100 des admissions de bébés dans les hôpitaux pour des troubles respiratoires sont reliées à la pollution causée par la concentration de sulfates dans la couche d'ozone. En fait, une étude effectuée en Ontario a montré que chaque jour, de mai à août, 5 p. 100 de toutes les admissions dans les hôpitaux pour des troubles respiratoires en Ontario étaient attribuables à l'ozone troposphérique.

En ce qui concerne le MMT lui-même, le gouvernement a reçu des instances d'un grand nombre de groupes écologiques, de parents d'enfants qui ont des problèmes d'apprentissage et du service de santé publique de la ville de North York. Dans tous les cas, on a réclamé l'élimination du MMT, car son utilisation réduit de façon inacceptable notre marge de sécurité.

Nous devons nous poser la question: pouvons-nous nous permettre de courir le risque de compter sur l'efficacité des dispositifs de surveillance de la pollution? Je ne le pense pas. Si nous devons nous tromper, il vaut mieux faire preuve d'un excès de prudence. C'est le principe de la prévention.

Lorsque 21 fabricants d'automobiles affirment que le MMT encrasse les dispositions de détection de la pollution, nous devons les écouter. Les fabricants ont dit au gouvernement que le MMT nuit au bon fonctionnement des systèmes de diagnostic intégrés qui signalent aux conducteurs les problèmes et les dangers de pollution. Ils ont soumis des pétitions au gouvernement et nous ont fait part de leurs préoccupations. À quoi sert de réclamer de nouvelles technologies et de nouvelles normes d'émissions, si le carburant contenant du MMT empêche le bon fonctionnement de la technologie? Il est clair que le gouvernement doit réagir, ce qu'il a fait avec ce projet de loi qui mettra un terme à l'utilisation du MMT dans l'essence.

Le Conseil canadien des ministres de l'Environnement a reconnu l'importance de réduire la pollution atmosphérique créée par les véhicules pour protéger la santé humaine. Le conseil s'est entendu sur la nécessité d'avoir des véhicules et des carburants plus propres et il a publié un rapport réclamant ce type de véhicules et de carburants. On dit dans ce rapport qu'il faut traiter les carburants et la technologie de contrôle des émissions comme des éléments d'un système de gestion intégrée pour la réduction des émissions des véhicules automobiles.

Le projet de loi C-29 va tout à fait dans le sens de l'approche du conseil. De plus, le conseil a également ouvert la voie à une harmonisation constructive et progressive, ainsi qu'à la mise sur le marché de carburants plus propres. Le projet de loi C-29 vient compléter les efforts pour parvenir à une plus grande harmonisation environnementale et la politique du Conseil canadien des ministres de l'Environnement destinée à encourager la mise au point de carburants plus propres.

Le gouvernement a pour politique d'encourager les carburants de remplacement, les carburants renouvelables et les carburants plus propres. Le gouvernement américain souscrit à une politique semblable. On dit souvent que la loi canadienne sur le MMT devrait aller dans le même sens que la loi américaine. Il est tout à fait sensé sur les plans économique et commercial de fabriquer des automobiles et des camions munis de systèmes de contrôle des émissions qui fonctionnent sur tout le continent. Dans ce contexte également, il est très clair que la tendance est à des carburants plus propres et que l'additif MMT n'a plus d'avenir. En fait, au moins 15 des grosses sociétés pétrolières américaines ont signalé qu'elles n'entendaient plus utiliser le MMT. La liste comprend pratiquement tous les principaux producteurs pétroliers, dont Amoco, Anchor, Arco, BP, Chevron, Conoco, Exxon, Hess, Marathon, Mobile, Penzoil, Phillips, Shell, Sun et Texaco.

Les pétrolières ont décidé de ne pas utiliser le MMT, en dépit d'une décision qu'un tribunal américain a rendue récemment sur un point de procédure et qui ordonnait à l'agence de protection de l'environnement d'autoriser la vente du MMT comme additif dans l'essence. En outre, dans un avenir rapproché, environ le tiers du marché de l'essence, y compris celui de la Californie, utilisera une essence reformulée dans les régions qui souffrent d'une pollution atmosphérique aiguë.

Aux termes de la Clean Air Act des États-Unis, le MMT n'est pas autorisé dans l'essence reformulée, dont on peut prévoir qu'elle s'emparera d'une part grandissante du marché des États-Unis, à mesure que ce pays utilisera des carburants plus propres dans les années à venir. En fait, l'État de la Californie, chef de file bien connu dans la lutte contre les émissions, interdit déjà expressément l'utilisation du MMT comme additif dans les carburants, et ce, depuis 1977.

Autrement dit, honorables sénateurs, pendant encore un certain temps, il y aura sur le marché nord-américain des carburants avec MMT et des carburants sans MMT. Cependant, la tendance veut clairement que le MMT soit supprimé, notamment dans les États plus progressistes.

Honorables sénateurs, le débat sur le MMT oppose deux grands secteurs industriels: les fabricants automobiles et l'industrie pétrolière. Les constructeurs automobiles soutiennent que le MMT endommage leurs produits, tandis que les raffineries disent que l'élimination du MMT augmenterait leurs coûts.

Les consommateurs canadiens sont un segment de la population dont on a largement fait abstraction dans ce débat. La présence constante de MMT dans les carburants est susceptible d'entraîner des coûts accrus pour les consommateurs. Comme je l'ai dit, les systèmes de diagnostic de bord risquent d'être encrassés par le MMT. Ce projet de loi fera en sorte que les consommateurs canadiens aient accès à des carburants sans MMT, ce qui permettra au nouvel équipement de surveillance et de contrôle des émissions de fonctionner comme il le doit. Sinon, les consommateurs risquent de devoir effectuer des visites inutiles chez leur garagiste pour faire entretenir et réparer leur véhicule. En outre, toute augmentation des coûts de garantie attribuable aux effets négatifs du MMT sur les systèmes antipollution serait supportée en fin de compte par le consommateur canadien.

En fait, l'association canadienne des concessionnaires automobiles a déjà exprimé des préoccupations semblables au sujet du MMT et des garanties des voitures.

Examinons enfin, honorables sénateurs, la position de l'industrie du raffinage, selon laquelle l'élimination du MMT sera dommageable sur le plan financier. Il ressort de l'étude commandée par le CMEC que les conséquences financières de l'élimination progressive du MMT ne seraient pas trop désastreuses pour l'industrie canadienne du raffinage. Les auteurs de l'étude estiment en effet qu'il en coûterait, au total, 155 millions de dollars en dépenses d'immobilisation et 15 millions de dollars par année en frais d'exploitation supplémentaires aux raffineries pour éliminer le MMT à l'échelle du Canada.

Oui, ces frais se répercuteront sur le prix de l'essence. L'augmentation serait d'environ 0,2 cents par litre, en moyenne, pour les raffineries, ce qui se traduirait par une augmentation d'environ 5 $ par année pour l'automobiliste moyen. Ce n'est pas excessif. Cette augmentation sera amplement compensée par les économies réalisées car l'automobiliste n'aura plus à réparer les dispositifs de détection encrassés.

La réduction de la pollution automobile présente d'importants avantages. Je pense aux économies que feraient les Canadiens dans le domaine de la santé, une fois gagnée la bataille contre la pollution atmosphérique et le smog.

D'après l'étude de 1994 commandée par le Conseil des ministres de l'environnement du Canada, on pourrait économiser jusqu'à 31 milliards de dollars en 23 ans dans le domaine de la santé si l'on utilisait des carburants plus propres et appliquait des normes plus rigoureuses à l'égard des systèmes d'échappement des véhicules.

L'élimination du MMT de l'essence s'impose pour des raisons qui transcendent les considérations purement économiques. Les Canadiens croient, à juste titre, que leur gouvernement a un rôle à jouer quand il s'agit de protéger la vie humaine et de préserver la qualité de notre environnement. En interdisant l'ajout de MMT à l'essence, le projet de loi C-29 contribue à l'atteinte de ces objectifs. Il contribue également à la protection de la technologie automobile canadienne et des emplois dans ce secteur, sans compter les avantages qu'il procure aux consommateurs.

(1540)

Pour toutes les raisons que je viens d'énumérer, c'est-à-dire la santé humaine et environnementale, les avantages financiers, la protection accrue des consommateurs et le mouvement d'harmonisation à l'échelle de l'Amérique du Nord, cette mesure législative est nécessaire. Il nous faut, par conséquent, adopter la mesure dont nous sommes saisis aujourd'hui si nous voulons que les Canadiens puissent respirer de l'air pur. J'invite donc tous les sénateurs réunis ici aujourd'hui à adopter rapidement le projet de loi C-29 à l'étape de la deuxième lecture.

L'honorable Eric Arthur Berntson (chef adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, pourrait-on poser une question au sénateur?

Le sénateur Kenny: Je vous en prie, honorables sénateurs. Je serais heureux de répondre.

Le sénateur Berntson: Comme je fais partie de ceux qui ne s'y connaissent guère dans ce domaine, j'aimerais que le sénateur me dise ce que les lettres MMT veulent dire au juste.

Le sénateur Kenny: C'est une question difficile, honorables sénateurs, sans compter qu'elle est injuste. Je ne peux même pas prononcer le nom du composé que désigne le sigle MMT.

Le sénateur Taylor: Dites-leur que c'est un dérivé du manganèse.

Le sénateur Kenny: C'est absolument vrai.

L'honorable Noël A. Kinsella: Honorables sénateurs, sachez que MMT signifie méthylcyclopentadiényl manganèse tricarbonyle. C'est presque pareil dans l'autre langue officielle.

Je tiens à remercier le sénateur Kenny pour son discours.

Ma première question est la suivante: y a-t-il des études réalisées pour le compte du gouvernement qui prouvent que les carburants à base de MMT nuisent au bon fonctionnement des dispositifs modernes de réduction des émissions dont le sénateur a parlé?

Le sénateur Kenny: Honorables sénateurs, je tiens d'abord à féliciter le sénateur Kinsella qui a réussi l'exploit presque impossible qui consiste à prononcer l'appellation que représente le MMT. Je crois qu'il a prouvé que cette appellation est pratiquement imprononçable.

Honorables sénateurs, j'ai appris que le gouvernement possédait des études sur le produit. J'ai alors demandé si nous pouvions y avoir accès. Les responsables nous feront parvenir ces études. J'en distribuerai des copies aux intéressés.

Le sénateur Kinsella: Le sénateur Kenny a fait allusion au lobbying considérable entourant ce projet de loi. Nous avons tous reçu beaucoup de documentation de la part des divers groupes intéressés. Comme le sénateur Kenny l'a fait remarquer, ce projet de loi a mis en opposition deux des principaux secteurs industriels de notre économie, soit les fabricants automobiles et les pétrolières, ce qui a provoqué un lobbying intense. Pourrait-on savoir quels montants ces géants industriels ont consacrés à tout ce lobbying auprès du gouvernement et des parlementaires?

Le sénateur Kenny: Honorables sénateurs, je ferai respectueusement remarquer que je n'ai pas fait la moindre allusion au lobbying. On me corrigera si j'ai tort.

Quant à la question, j'ignore complètement le montant des dépenses. Je doute qu'un sénateur ou un législateur sache combien d'argent chaque société peut dépenser pour influencer le sort d'un projet de loi. C'est peut-être une bonne question à poser aux témoins qui se présentent devant le comité. Nous pouvons leur demander combien d'argent ils consacrent au lobbyisme. Il ne serait pas raisonnable de s'attendre qu'un sénateur ou, en fait, le gouvernement sache combien d'argent des membres du secteur privé dépensent sur des questions comme celle-ci. On ne peut avoir accès à ces renseignements.

Le sénateur Kinsella: À l'étape de la deuxième lecture du projet de loi par le Sénat, on nous demande de centrer notre attention sur le principe qui le sous-tend. Quand je me suis arrêté là-dessus, je me suis posé la question que je pose maintenant à l'honorable sénateur: quels sont les principes d'intérêt public qui sous-tendent ce projet de loi?

Dans son discours, le sénateur Kenny a attiré notre attention sur la santé publique. Je l'ai écouté attentivement. Si l'argument du gouvernement voulant qu'il faut appuyer le projet de loi C-29, parce qu'il est nécessaire pour prévenir un problème de santé publique et qu'il y a des preuves à cet effet, ce que le comité vérifiera sûrement, alors pourquoi ne sommes-nous pas saisis d'une modification proposée aux lois concernant la santé publique, au lieu de ce genre de projet de loi?

Le sénateur Kenny: Les honorables sénateurs auront remarqué que la plupart de mes observations avaient trait à l'impact du MMT sur le matériel de diagnostic des véhicules. Je n'ai pas beaucoup traité de la question de savoir si le MMT était une substance nocive ou une substance polluante du seul fait qu'elle existe. D'aucuns pourront prétendre que c'est le cas. Toutefois, nous savons qu'il existe des études qui donnent à penser que ce n'est pas le cas.

Le fondement de mon argument, et aussi du projet de loi, c'est que le MMT encrasse le matériel de diagnostic des véhicules et empêche son bon fonctionnement, provoquant ainsi une pollution nuisible à la santé. Autrement dit, le MMT endommage le matériel qui aide à déterminer si les dispositifs de prévention et de contrôle de la pollution fonctionnent. Si ces dispositifs antipollution ne fonctionnent pas, la pollution sera plus grande, l'air sera plus vicié et la santé des Canadiens en souffrira.

Le sénateur Kinsella: Si le principal argument du gouvernement est la crainte que l'essence contenant du MMT encrasse les dispositifs de détection à bord des véhicules, j'ai deux questions à poser. L'honorable sénateur est-il convaincu qu'il existe des preuves catégoriques étayant cette hypothèse?

L'honorable sénateur est-il d'accord que, lorsque le projet de loi sera renvoyé à un comité, c'est là l'une des questions devant faire l'objet d'un examen approfondi par le comité lui-même?

(1550)

Si, selon le sénateur, l'argument du gouvernement repose sur cette hypothèse, alors nous devons avoir tous les faits devant nous. Certains documents que j'ai reçus abondent dans un sens, tandis que d'autres vont dans l'autre sens.

Le sénateur a aussi mentionné qu'il y a environ 14 millions de véhicules au Canada. Ai-je raison de dire que les dispositifs de détection qui sont censés être encrassés par l'essence contenant du MMT sont ceux des modèles récents, soit ceux qui ont été construits depuis 1994? La plupart des véhicules plus anciens ne sont pas dotés de ces dispositifs, de sorte que, dans leur cas, le fait d'utiliser de l'essence contenant du MMT ne poserait pas de problème.

Le sénateur Kenny: Honorables sénateurs, si vous me le permettez, je vais répondre aux questions.

En ce qui a trait à la deuxième question, le sénateur a raison. Nous parlons ici des véhicules récents et de ceux qui seront construits dans l'avenir.

Pour ce qui est de la première question, le degré de l'approche scientifique à adopter est une question de jugement qui sera fonction du point de vue de chaque sénateur.

J'ai signalé que 21 constructeurs de véhicules - pas un, deux ou trois, mais bien 21 constructeurs de véhicules - ont déclaré que le fait d'utiliser le MMT encrasserait leur matériel de diagnostic. J'ai aussi signalé que 19 grandes raffineries ont décidé d'elles-mêmes de ne pas se servir de cet additif. Je ne parle pas de petites raffineries. Les honorables sénateurs m'ont entendu donner les noms. Un grand nombre d'entre elles ont dit: «Nous n'allons pas nous servir du MMT.»

Il est intéressant de constater qu'un si grand nombre de raffineries et de constructeurs d'automobiles ont conclu que l'utilisation du MMT pose un problème. Il n'y a vraiment qu'une société, Ethylcorp, qui a un intérêt direct et qui fait des efforts afin que le MMT soit utilisé. Je reconnais que certaines raffineries au pays ne sont pas équipées pour utiliser ce produit et que l'utilisation du MMT entraîne certains coûts. J'en ai fait mention dans mon discours. Toutefois, de nombreuses raffineries sont équipées pour produire de l'essence ayant l'indice d'octane approprié, sans avoir recours au MMT, et ces raffineries vont de l'avant.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, j'entends un collègue dire que ce genre de discussion devrait se tenir en comité. Étant donné que cette suggestion vient de quelqu'un qui est assis derrière moi, je propose l'ajournement du débat.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, le débat est ajourné.)

 

Le Code criminel

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Roberge, appuyée par l'honorable sénateur Cohen, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-10, Loi modifiant le Code criminel (organisation criminelle).-(L'honorable sénateur Losier-Cool).

L'honorable Eric Arthur Berntson (chef adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, après l'adoption de la motion de deuxième lecture, le sénateur Roberge m'a demandé de proposer en son nom que le projet de loi S-10 soit renvoyé au comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles.

Son Honneur le Président: Le sénateur Roberge propose: Que le projet de loi soit lu une deuxième fois. Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

 

Renvoi au comité

Son Honneur le Président: Quand lirons-nous le projet de loi une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Berntson, au nom du sénateur Roberge, le projet de loi est renvoyé au comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.)

 

La Loi sur la taxe d'accise

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture-
Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Di Nino, appuyée par l'honorable sénateur Beaudoin, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-11, Loi modifiant la Loi sur la taxe d'accise.-(L'honorable sénateur Bosa).

L'honorable Peter Bosa: Honorables sénateurs, certains ont peut-être vu dans la présentation du projet de loi S-11 par le sénateur Di Nino un effort sérieux pour supprimer la TPS sur les livres auxquels elle s'applique encore pour faire avancer la cause de l'alphabétisation. Cependant, un examen attentif de cette mesure révèle qu'elle a plus à voir avec la politique qu'avec la cause de l'alphabétisation. Après tout, c'est bien le parti du sénateur Di Nino qui nous a donné cette taxe sur tous les livres pour commencer. Voilà maintenant que mon honorable collègue et son parti veulent faire figure de champions dans la lutte pour la suppression de la taxe sur les livres, alors que c'est à eux-mêmes qu'on doit son imposition.

Le sénateur Di Nino et tous les sénateurs de son parti ont eu l'occasion en 1990 de voter en faveur d'un amendement visant à exonérer de la TPS les articles de lecture. Ils ont refusé de le faire, mais ils voudraient maintenant que le gouvernement libéral défasse ce qu'ils ont fait il y a six ans.

Dans son intervention sur le projet de loi S-11, le sénateur Di Nino a dit que les progressistes conservateurs ont été francs et cohérents à ce sujet depuis six ans. Mon honorable collègue aura du mal à en convaincre les Canadiens. Le fait est que le gouvernement actuel a pris des mesures en vue de réduire et de supprimer la taxe sur les livres en accord avec son désir d'améliorer les niveaux d'alphabétisme dans notre pays et d'aider ainsi les Canadiens à mieux se préparer à participer à part entière à la vie économique.

Personne ne conteste que nous avons un problème quand jusqu'à 42 p. 100 des adultes canadiens éprouvent à divers degrés de difficulté à maîtriser les aptitudes de lecture et d'écriture de base. Il faut nous demander comment nous pouvons promouvoir l'alphabétisation avec les ressources limitées dont nous disposons, et les ressources sont limitées parce que, outre la TPS, le gouvernement précédent nous a aussi légué un déficit énorme à rembourser.

Cette mesure montre très clairement que le gouvernement est déterminé à favoriser l'alphabétisation, puisque, malgré les contraintes du déficit, le ministre des Finances a annoncé le remboursement intégral de la TPS sur tous les livres achetés par les bibliothèques publiques, les écoles, les universités, les collèges, les municipalités, les organismes de charité, les organismes sans but lucratif et les groupes d'alphabétisation. Cela vaut pour tous les manuels distribués gratuitement aux élèves du primaire et du secondaire et les livres employés par les groupes d'alphabétisation pour former et conseiller ceux qui apprennent à lire et encourager l'éducation permanente. En d'autres termes, tous les établissements et tous les groupes qui achètent des livres pour aider les gens à apprendre ne paieront plus la TPS sur les livres.

Le gouvernement a également envisagé une exonération pour les livres achetés dans les librairies des universités et collèges. Malheureusement, il aurait été impossible d'appliquer cette mesure de façon équitable et rentable. Tous les livres de ces librairies ne sont pas nécessairement des manuels, et tous les acheteurs ne sont pas nécessairement des étudiants. Le gouvernement croit que le crédit pour études est un moyen beaucoup plus efficace d'aider les étudiants à assumer les frais de scolarité, bien connus ceux-là, des études supérieures.

Au dernier budget, le gouvernement a augmenté ce crédit de 25 p. 100 pour le porter à 100 $ par mois. En outre, la plupart des étudiants ont droit au rabais de 199 $ pour TPS accordé aux contribuables à faible revenu, ce qui correspond à la taxe sur des achats de 2 800 $. Les étudiants qui n'habitent pas chez leurs parents ont aussi droit à un supplément de 105 $ pour personne seule, ce qui porte le crédit à 304 $, soit le montant de la TPS correspondant à des achats de $4 300. Étant donné que les grandes dépenses des étudiants sont la nourriture, le loyer et les frais de scolarité, autant d'éléments qui échappent à la taxe, on peut dire que la plupart d'entre eux ne paient aucune TPS, ou alors un montant très minime.

(1600)

Outre l'augmentation du crédit d'impôt pour études, le gouvernement a pris récemment d'autres initiatives favorisant l'apprentissage et l'éducation. Il a notamment haussé le plafond de transfert des crédits pour frais de scolarité et études, afin d'aider les parents qui paient une partie des frais de scolarité de leurs enfants, de même que le plafond des cotisations au régime enregistré d'épargne-études.

De plus, dans le cadre de l'harmonisation de la TPS et de la taxe de vente provinciale dans trois provinces de l'Atlantique, le gouvernement fédéral a également convenu d'administrer un remboursement au point de vente de la somme que représente la taxe provinciale sur les livres. Autrement dit, il n'y aura aucune hausse du prix des livres par suite de l'harmonisation.

Le remboursement de 100 p. 100 de la TPS s'appliquera aussi aux établissements et aux groupes d'alphabétisation de ces provinces. Contrairement à ce que craignait le sénateur Di Nino, les bibliothèques, les écoles, les groupes d'alphabétisation et d'autres organismes appuient fortement la hausse de ce remboursement annoncée par le ministre des Finances.

Les écoles catholiques d'Edmonton, par exemple, épargneront environ 35 000 $ par année. Les écoles publiques d'Edmonton épargneront quelque 75 000 $. La bibliothèque de l'Université de l'Alberta épargnera à peu près 200 000 $. Les établissements et les groupes d'alphabétisation de l'ensemble du pays épargneront de l'argent. L'Association canadienne des commissions scolaires a félicité le gouvernement fédéral qui a décidé d'appuyer l'alphabétisation, en accordant un remboursement de 100 p. 100 de la TPS sur les livres, comme il vient de l'annoncer.

Il me semble, honorables sénateurs, que le sénateur Di Nino devrait écouter ce que les gens ont à dire au sujet des efforts que déploie le gouvernement fédéral pour réduire ou éliminer la taxe sur les livres que nous a imposée le gouvernement précédent. S'il le faisait, il s'apercevrait que nous sommes sur la bonne voie. Il devrait féliciter le gouvernement pour l'excellent travail qu'il fait au lieu de présenter des mesures législatives comme le projet de loi S-11.

(Sur la motion du sénateur Berntson, le débat est ajourné.)

 

La situation des arts au canada

Interpellation-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Johnson, attirant l'attention du Sénat sur la situation des arts au Canada.

L'honorable Michael A. Meighen: Honorables sénateurs, à propos de la situation des arts au Canada, je déclarerai tout d'abord un intérêt. Je suis le président du conseil d'administration du Festival de Stratford et j'espère que vous comprendrez que, si je fais allusion au festival dans le cours de mes observations, ce ne sera pas pour faire valoir sa cause, mais bien pour citer un exemple - que je me trouve à très bien connaître - de la grande communauté des industries et institutions culturelles de notre pays.

C'est délibérément que j'emploie le mot «communauté», car la vie culturelle d'un pays ne tient pas dans une collection disparate d'entreprises isolées et indépendantes qui cherchent toutes désespérément à l'emporter les unes sur les autres. C'est plutôt un ensemble organique dont chaque partie nourrit, alimente et inspire les autres et dont la compétitivité profite non seulement aux consommateurs en offrant un plus grand choix, mais encore aux concurrents eux-mêmes en les mettant directement au défi d'avoir l'imagination de redécouvrir, de surpasser et de redéfinir ce qui a déjà été fait.

Les sénateurs Johnson et Gigantès ont décrit avec éloquence les avantages économiques qu'il y a pour tout pays d'investir dans les industries culturelles et le rôle central que les arts jouent dans la création d'une identité nationale. Qui peut douter de la véracité de ces deux points?

En ce qui concerne le premier de ces points, je n'arrive pas à comprendre pourquoi tant de gens persistent à voir dans les arts un parent perpétuellement pauvre qui n'arrive jamais à joindre les deux bouts et qui a toujours besoin d'aide. La vérité, c'est que les arts donnent beaucoup plus qu'ils ne prennent. Une activité artistique est aussi une activité économique; elle suppose une entreprise et des emplois. Elle est le centre d'un énorme éventail d'activités accessoires telles que l'hôtellerie, les gîtes touristiques, la restauration, et cetera.

Permettez-moi de citer l'exemple du Festival de Stratford, une institution artistique qui a un budget annuel de près de 25 millions de dollars et qui fait que 500 résidents sont employés à longueur d'année et que 100 millions de dollars sont injectés chaque année dans l'économie locale. En 1996, le festival a reçu de tous les paliers de gouvernement un peu moins de deux millions de dollars en subventions d'exploitation. Cela ne représente que 8 p. 100 de son budget de fonctionnement. Pourtant, on estime à environ 25 millions de dollars les impôts que les gouvernements tirent de tous les volets du Festival de Stratford. Ce n'est pas un mauvais échange.

Le milieu des arts est extrêmement rentable, car il est, dans une large mesure, alimenté par l'amour et le dévouement de ceux qui y travaillent. Les organismes artistiques sont économes et travaillent dans un esprit de coopération. Ils recyclent, improvisent et mettent à contribution des ressources qu'ils ont en commun; ils ont d'autres manières moins concrètes de s'épauler. Ainsi, le Shaw Festival et le Festival de Stratford ne sont pas seulement des tribunes où des pièces sont jouées, ce sont aussi des lieux de formation où des acteurs aux antécédents variés peuvent se mesurer à certains textes qui posent les plus grands défis de la langue anglaise et où de jeunes acteurs, metteurs en scène et décorateurs peuvent travailler aux côtés des plus grands talents de notre pays, apprendre de leur expérience, relever les défis qu'ils leur lancent et être encouragés par eux. Les talents que les artistes de théâtre acquièrent, polissent et raffinent dans de tels contextes ont des applications illimitées. Ces artistes acceptent d'autres engagements ailleurs et apportent alors avec eux ce qu'ils ont ainsi appris, dans l'intérêt de toute la communauté canadienne des arts de la scène.

Voilà donc, chers sénateurs, une activité économique qui est un modèle de collaboration, de coopération et de rentabilité et qui a des retombées économiques supérieures à l'investissement nécessaire pour la lancer et la maintenir. Cette activité économique n'a pas d'effets préjudiciables sur l'environnement, et sa survie dépend de la culture des idées, de l'imagination et de l'innovation. Si seulement on pouvait dire la même chose de toutes les industries et institutions canadiennes.

Je voudrais revenir sur ce que le sénateur Johnson a dit à propos du rôle important que joue une culture dynamique, diversifiée et florissante pour ce qui est de définir un pays et d'inspirer de la fierté à sa population. Il est facile d'oublier à quel point les Canadiens sont fiers du travail de leurs artistes. En raison de mes liens avec le Festival de Stratford, je me rends compte de cette fierté, car j'entends et je lis certains témoignages que le personnel de théâtre reçoit en ce sens. Une femme a écrit aux organisateurs du Festival de Stratford pour leur dire que la production du Marchand de Venise, une production difficile, controversée et, pour bien des personnes, très douloureuse émotivement, l'a rendue fière d'être Canadienne.

[Français]

Les Canadiens sont fiers de leur patrimoine artistique, un domaine qui suscite l'admiration et même parfois l'envie d'autres pays. Pourtant, lorsque l'on parle de culture au Canada, c'est avec appréhension par rapport à nos voisins du sud, ceux dont les produits culturels s'infiltrent un peu partout dans le monde. Assiégés par la crainte que nos modestes industries culturelles soient évincées par celles des État-Unis, plus robustes du point de vue économique, nous oublions à quel point l'art canadien est admiré et envié par ces mêmes conquérants industriels. Ainsi, ce n'est nullement une coïncidence géographique si 35 p. 100 du public du Festival de Stratford vient des États-Unis.

[Traduction]

Cet argument de la fierté nationale et de l'identité culturelle est peut-être même encore plus irrésistible que celui ayant trait au bon sens économique. John Ruskin, le grand penseur de l'époque victorienne, a déclaré un jour:

Les grandes nations ont une histoire qui s'écrit en trois volumes: un volume sur leurs réalisations, un volume sur leur discours et un volume sur leur art.

Au moment où il écrivait ces mots, Ruskin vivait dans un pays qui était une grande puissance impérialiste et un centre commercial et industriel. Mais il considérait quand même l'art comme une composante essentielle de la grandeur. Comme il l'a dit dans une autre célèbre citation:

La vie sans industrie n'est que honte; la vie sans art n'est que brutalité.

(1610)

[Français]

Mon troisième argument domine les autres en importance, car même si les arts n'engendraient aucun bénéfice économique pour la société, même si les arts n'instillaient pas ce sentiment de fierté nationale, nous insisterions néanmoins sur leur importance, tout comme nous insistons sur l'importance des écoles et des hôpitaux. Les arts doivent constituer une obligation fondamentale de toute société, un médium indispensable à la création et à la continuité de toute civilisation. L'art, dans sa plus haute expression, transporte l'imagination et fait ressortir le sublime chez l'être humain; il ouvre le coeur et l'esprit à la condition humaine.

On pourrait me reprocher mon sentimentalisme, alors je dis: comment définir une société ... une civilisation? N'est-ce pas une entente entre individus pour établir et maintenir des principes de coexistence et de collaboration fondés sur la compréhension mutuelle, la compassion et le respect d'autrui? Et comment pourrait-on accomplir cette oeuvre sans faire appel à l'imagination et à l'intellect? Comment accomplir cette oeuvre sans une ouverture de coeur et d'esprit?

(1610)

[Traduction]

Encore une fois, je voudrais illustrer mon point de vue en donnant l'exemple du Festival de Stratford. Richard Monette, le directeur artistique du festival, a reçu dernièrement une lettre d'un habitué reconnaissant. Il s'agit d'un ministre de l'Église unitarienne qui vit dans l'Illinois.

Une grande pièce met en scène tous les aspects de la vie humaine de manière à les purifier de tout ce que l'expérience humaine ordinaire considère comme aléatoire, déplaisant ou vulgaire. Si je me rends au Festival de Stratford tous les ans, c'est parce que la purification poétique qu'il opère est concrète, vivante, inventive et fraîche d'une manière à laquelle les cérémonies religieuses les plus soignées parviennent rarement.

En comparant l'art de produire du grand théâtre avec des mystères plus ouvertement spirituels, cet homme a soulevé un point capital. Dans un pays comme le Canada, la plupart de nos besoins matériels sont satisfaits. Du point de vue matériel, nous sommes l'un des pays les plus privilégiés sur terre. Il n'en reste pas moins qu'il y a encore en nous un souhait presque indéfinissable, la recherche d'un sens à la vie, un besoin de croire en quelque chose qui nous échappe, quelque chose que nous voulons partager avec d'autres êtres humains.

Pour l'auteur de cette lettre, un ministre du culte, l'art est aussi nécessaire, en tant que moyen de communion spirituelle, de compréhension des mystères de la vie, que la foi qu'il pratique. La lettre poursuit:

L'art et la vie nous font croître et nous troublent sans cesse. L'excellence dans les arts et l'excellence dans la religion célèbrent la vie tout en confessant ses tragédies et ses mystères suprêmes.

Le mot «célébrer» est capital. L'art est l'affirmation de la foi en l'humanité même quand il en illustre les côtés sombres. Il nous dit qui nous sommes et ce que nous pouvons devenir, que ce soit bon ou mauvais. Il nous place en plein coeur des choses. Même dans les pièces les plus sombres - dans les grandes tragédies comme Oedipe Roi ou le Roi Lear ou, dans les temps modernes, peut-être, dans une pièce apparemment nihiliste comme En attendant Godot -, l'art est une exaltation et une célébration du potentiel humain. Le grand art est affaire de partage d'expériences ultimes: c'est ce qui reste d'une civilisation longtemps après que ses villes aient été rasées, que ses armées aient été dissoutes et que ses institutions politiques aient été oubliées. Le grand art nous unit, nous console, nous inspire et nous remplit d'enthousiasme. C'est une forme de communion.

La culture de ce genre de foi commune dans l'humanité, de cette volonté de regarder honnêtement qui nous sommes, peu importe à quel point la vérité peut être pénible ou douloureuse, tout en reconnaissant la magnificence de ce dont nous sommes capables n'est rien de moins que le fondement de toute civilisation. L'art est un des grands moyens dont dispose l'individu pour établir des rapports avec la collectivité. C'est un des outils grâce auxquels nous transformons la sauvagerie en civilisation, par lesquels, pour utiliser les mots de l'écrivain déjà cité, nous «purifions» l'expérience humaine de ce qui est «aléatoire, mauvais ou bestial». C'est un besoin humain fondamental.

Comment pouvons-nous le mieux combler ce besoin? Le libre marché est le meilleur mécanisme qui ait jusqu'à maintenant été élaboré par l'humanité pour combler nos besoins matériels. Au fil des choix exercés par les consommateurs, ce système nous donne les meilleurs ordinateurs, les meilleures automobiles, les meilleures lessiveuses que notre ingéniosité est capable de produire. Toutefois, est-ce le meilleur système pour combler les besoins de notre imagination, de nos coeurs et de nos âmes? Le libre marché peut-il, à lui seul et de son propre mouvement, produire la meilleure culture et la meilleure civilisation?

Tout semble indiquer que le marché ne peut pas, à lui seul, nous mener jusqu'au bout. Pour faire ce qu'il y a de mieux, pour être un pays dont la vie artistique passera à l'histoire, nous devons être prêts à ajouter le pouvoir de la volonté consciente à la lutte purement darwinienne du marché. Nous devons insister pour avoir les normes les plus élevées et devons être prêts, en tant que société, à payer pour le respect de ces normes.

Honorables sénateurs, je crois que la communauté artistique reconnaît aussi bien que quiconque que, en tant que Canadiens, nous sommes obligés de contribuer à la réalisation de l'objectif de réduction et d'élimination du déficit. Je crois que la plupart des artistes comprennent qu'aucun secteur de notre société n'est donc à l'abri d'une réduction, mais non de l'élimination, de l'aide gouvernementale. Tout le monde doit faire des sacrifices, mais il n'est clairement pas dans notre intérêt de laisser la vie artistique de notre pays se détériorer à cause d'un manque de soutien financier résultant de la réduction malheureuse mais nécessaire de l'aide gouvernementale.

On peut certainement résoudre le problème en prenant des mesures immédiates pour favoriser une augmentation importante des dons de charité dans les secteurs tels que l'éducation, les soins de santé, l'aide sociale et les arts. Heureusement, on a proposé au gouvernement une proposition qui offre justement la possibilité d'augmenter de façon considérable les dons de charité sans entraîner une réduction importante des recettes fiscales du gouvernement.

En fait, c'est le ministre des Finances qui a fait les premiers pas dans cette direction dans son budget de mars 1996. Cependant, bien qu'elles soient utiles, les mesures qu'il a proposées ne suffiront pas. Les changements supplémentaires qui s'imposent concerne la raison la plus importante qui fait que, bien que les incitatifs concernant les dons en argent soient plus élevés au Canada, les Américains contribuent quatre fois plus par habitant à des organismes de charité que les Canadiens. Je veux parler du traitement fiscal des dons de biens en immobilisation qui ont augmenté de valeur, qui est l'une des principales raisons pour lesquelles 95 p. 100 des dons faits aux organismes de charité aux États-Unis viennent de seulement 5 p. 100 des donateurs.

Nous devons donner aux principaux organismes sans but lucratif les mêmes possibilités de se constituer un patrimoine. Le seul moyen de le faire de façon responsable est de prévoir une exemption pour gains en capital sur les dons de charité. Une vaste coalition de personnes travaillant pour les bonnes oeuvres, de responsables communautaires, d'administrateurs et de bénéficiaires ont réclamé au ministre des Finances cette mesure vitale. Les organisations qui appuient cette mesure incluent notamment l'Association des universités et collèges du Canada, qui représente plus de 88 établissements membres, la Canadian Association of Gift Planners, 82 hôpitaux de toutes les provinces, les principales organisations culturelles et artistiques du Canada, le United Way of Greater Toronto, et de plusieurs autres villes du Canada, de Halifax à Victoria. Et la liste continue.

En mars dernier, le ministre des Finances a expressément reconnu que plus de mesures devaient être prises pour encourager les dons de charité. Un grand nombre de Canadiens sont de cet avis et lui demandent instamment d'accepter cette recommandation d'accorder une exemption pour gains en capital sur les dons de charité.

Honorables sénateurs, encourager les dons de charité est un moyen d'aider le secteur artistique. Peut-être aussi d'autres secteurs. Une revue de la politique fédérale dans le secteur des arts et de la culture est certes nécessaire. Nous devons veiller à adapter nos politiques aux temps nouveaux, or elles n'ont pas été revues depuis plusieurs années. J'appuie l'idée du sénateur Johnson de constituer un comité spécial du Sénat pour examiner et analyser les problèmes auxquels sont confrontés les arts au Canada. Nous devons chercher des solutions qui aideront ce secteur en cette veille du XXIe siècle.

Oserons-nous le faire, honorables sénateurs? Sommes-nous prêts à nous contenter de ce que le marché peut produire de meilleur pour nous, ou oserons-nous exiger de grandes choses de nos artistes et de notre pays dont ils traduisent les rêves?

(Sur la motion du sénateur Stratton, le débat est ajourné.)

(1620)

 

Le règlement des demandes de
pension des anciens combattants

Adoption de la motion autorisant le comité des affaires sociales, des sciences et de la technologie
à étudier l'accélération du règlement des
demandes de pension des anciens combattants

L'honorable M. Lorne Bonnell: Honorables sénateurs, avis ayant été donné le mercredi 4 décembre 1996, je propose:

Que le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à examiner des mesures visant à accélérer le règlement des demandes de pension et à présenter un rapport sur la mise en oeuvre de ces mesures par le ministère des Anciens combattants, et

Que le sous-comité des anciens combattants soit autorisé à se rendre à l'administration centrale du ministère, à Charlottetown, et à y recueillir des témoignages, et

Que le comité présente son rapport au plus tard le 30 juin 1997.

Son Honneur le Président: Il semble y avoir un problème, sénateur Bonnell. La motion que vous venez de proposer diffère de celle que vous avez présentée dans l'avis. L'avis de motion original ne mentionnait pas le déplacement à l'administration centrale du ministère, à Charlottetown. Le sénateur aura besoin d'un budget à cette fin.

Le sénateur Bonnell: Nous devrons le soumettre en bonne et due forme, Votre Honneur.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, est-il possible de s'entendre pour exclure pour le moment la partie de la motion portant sur le déplacement à l'administration centrale du ministère, ce qui permettrait au sénateur de prononcer son discours dès maintenant? On pourrait discuter de cette question une autre fois.

Des voix: D'accord.

Le sénateur Bonnell: Honorables sénateurs, depuis 1994 et même bien avant, les anciens combattants et leurs organisations se plaignent de la lenteur du traitement des demandes de pension. Les anciens combattants sont âgés de 73 ans, en moyenne. Ils ne peuvent donc tolérer l'application d'un processus qui durerait de 18 à 20 mois, au premier niveau, et qui, si la décision a été négative, comme c'est trop souvent le cas, donnerait lieu à des délais supplémentaires de deux à trois ans avant que l'appel soit entendu et qu'une décision finale soit rendue.

Lors du congrès annuel de la Légion, en juin 1994, le secrétaire d'État aux Anciens combattants, l'honorable Laurence MacAulay, avait promis que le gouvernement rendrait le système plus efficace et plus sensible aux besoins des clients. Il avait dit, en particulier, que le gouvernement prendrait des mesures pour réduire de presque moitié le temps qu'il fallait pour traiter les demandes de pension et pour entendre les appels.

Le sous-comité des affaires des anciens combattants du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a remis son dernier grand rapport intitulé «Fidèles à la parole donnée: d'hier à demain», en octobre 1994. La deuxième partie du rapport évalue les propositions du gouvernement en vue de modifier entièrement le processus de traitement des demandes de pensions d'invalidité et fait des recommandations à ce sujet. De ce rapport est né le projet de loi C-67, qui a pris force de loi l'an dernier, au mois de juin.

Presque tous les regroupements d'anciens combattants ont dénoncé la proposition de remettre au ministère la responsabilité de la décision de première instance, craignant que cela n'entraîne des retards supplémentaires et que les fonctionnaires ne se laissent influencer par des impératifs budgétaires. Ils craignaient plus particulièrement que l'accès aux avocats du Bureau des services juridiques des pensions ne soit éliminé à cette étape. Par conséquent, lorsque le comité fit rapport du projet de loi C-67, en juin 1995, il fit plusieurs recommandations suggérant, entre autres:

Que le sous-comité des affaires des anciens combattants surveille de près la mise en oeuvre du nouveau système régissant l'octroi de pensions, ainsi que les règlements et les décrets administratifs en la matière, qu'il veille à ce que le ministre tienne sa promesse, et qu'il fasse rapport au bout d'un an.

Le sous-comité a l'obligation envers les anciens combattants et des organismes qui les représentent de retourner à Charlottetown et d'examiner la façon dont sont traités les requérants en vertu du nouveau système, maintenant qu'il est en place et qu'il fonctionne, et de demander aux responsables si les délais de traitement des demandes avaient été sensiblement réduits, et si on accordait le bénéfice du doute à un plus grand nombre d'anciens combattants en première instance.

Pour mener à bien son étude, le sous-comité va devoir faire comparaître les principaux regroupements d'anciens combattants et leur demander ce qu'ils pensent du nouveau système. Sans aucun doute, ces témoins soulèveront d'autres questions qui les préoccupent, questions sur lesquelles le sous-comité devrait avoir le pouvoir de faire enquête et qu'il devrait pouvoir inclure dans son rapport.

L'honorable Orville H. Phillips: Honorables sénateurs, j'ai bien apprécié la motion et les commentaires de l'honorable sénateur Bonnell.

On ne peut pas dire que l'honorable sénateur Bonnell soit un ancien combattant de la Seconde Guerre mondiale, mais il a sûrement aidé les anciens combattants à cause de sa formation durant la Seconde Guerre et de sa pratique en médecine générale. Je le remercie donc de sa motion.

En juin 1995, le sous-comité sénatorial a fait rapport de son étude du projet de loi C-67. Si je me souviens bien, c'est le sénateur Bonnell qui a alors présenté au sous-comité la motion voulant que l'on suive de près les progrès et les résultats du projet de loi C-67.

À cette époque, honorables sénateurs, je n'avais prévu aucune difficulté car le comité appuyait certains amendements. Cependant, le sous-ministre a témoigné devant le sous-comité et a pris des engagements au nom du secrétaire d'État aux Anciens combattants. Lorsque j'y repense, je me demande souvent si nous avons eu raison d'accepter ces garanties. Nous aurions peut-être dû imposer les amendements. Je songe particulièrement à mon ami, le sénateur Graham, qui était présent à cette séance du comité. Il s'en rappelle et il se souvient de nous avoir remerciés. Vous en souvenez-vous, cher collègue?

Le sénateur Graham: Oui.

(1630)

Le sénateur Phillips: Je m'en souviens, parce que j'ai apprécié le geste. Toutefois, je ne blâmerai pas le sénateur Graham ou qui que ce soit d'autre. Le comité était prêt à faire certains amendements, mais le gouvernement a déclaré qu'en le renvoyant à la Chambre des communes nous allions le retarder, nous allions perdre du temps. Le temps est crucial, honorables sénateurs. Je ne conteste pas ce fait.

Je pense que ce qui a emporté la décision, c'est lorsque le sous-ministre a comparu devant le comité où il a présenté une lettre du secrétaire d'État aux Anciens combattants en nous garantissant que nos objections seraient prises en considération. Je voudrais mettre au compte rendu, honorables sénateurs, certaines des déclarations de M. Nicholson, sous-ministre des Anciens combattants. On peut lire ces déclarations dans le compte rendu du comité. Il disait:

Là encore, je m'engage en tant que sous-secrétaire du ministère à revenir et à passer en revue les progrès dans ce domaine.

Puis il disait plus loin:

Nous nous engageons à revenir devant le comité et à présenter nos problèmes et nos progrès et, si nécessaire, nous envisagerons la préparation d'une mesure législative de rationalisation sous forme d'un projet de loi omnibus.

Honorables sénateurs, je me souviens très bien du témoignage de M. Nicholson. Le comité était prêt à faire des amendements, mais nous avons accepté la lettre de M. McAuley, le secrétaire d'État, et les assurances du sous-ministre Nicholson. Rétrospectivement, j'ai maintenant des doutes.

À la fin de la séance, le sénateur Bonnell et moi avons pris rendez-vous pour visiter le ministère à Charlottetown et, comme de coutume, nous avons été reçus cordialement, mais nous avons aussi été inondés de tableaux. Il y en avait partout. «En septembre nous avons eu tant de demandes, et en février tant d'autres.» Mais tous ces tableaux étaient inutiles, parce qu'ils n'étaient pas conçus pour nous informer, mais pour camoufler de l'information. C'est très bien de dire que l'on a eu 2000 cas en septembre et 2500 en novembre, mais qu'est-ce que cela signifie pour l'ancien combattant qui attend une décision au sujet de sa pension? Honorables sénateurs, cela ne signifie rien et je le dis très fort, parce que l'on oublie encore les anciens combattants.

Comme je l'ai dit, le sénateur Bonnell et moi avons visité le ministère en juin. J'y suis retourné en août, avec l'attitude adoptée par M. Cliff Chadderton, président du Conseil national des anciens combattants du Canada. J'y suis retourné avec cette attitude pour une raison, honorables sénateurs: dans son témoignage, il a dit que son organisme suivra de près ce projet de loi. Il a souligné que le MAC avait dépensé des millions de dollars pour des ordinateurs et qu'il devrait être facile de suivre de près les plaintes des anciens combattants.

Cependant, j'ai trouvé que les employés du MAC étaient déroutés. M. Chadderton leur a dit comment procéder. S'il y a une plainte au sujet d'un problème d'arthrite, d'une incapacité auditive, de troubles de la colonne vertébrale, il suffit d'introduire l'information dans l'ordinateur. Au MAC, on adit - délibérément, je crois - qu'on ne pouvait pas procéder ainsi, car certains anciens combattants se plaignaient de deux ou trois invalidités à la fois. Comment les inscrire dans l'ordinateur? C'est très simple. On inscrit les trois dans l'ordinateur.

Honorables sénateurs, après la rencontre de juin, le sénateur Bonnell et moi avons reçu des tableaux et des brochures en abondance. Ils étaient magnifiques et coûteux. Je suis certain que le ministère a dépensé davantage pour les brochures que pour les pensions. Les brochures étaient vraiment magnifiques.

En août, nous avons entendu seulement tant de cas, car les demandes étaient tellement nombreuses, mais nous avons fait des progrès en novembre. Les chiffres étaient plus élevés, mais ils ne signifiaient rien. Honorables sénateurs, ils ne signifiaient rien parce qu'ils représentaient le nombre de cas entendus. Je serais curieux de savoir, tout comme le sénateur Bonnell, combien de demandes ont été accueillies. À quoi cela sert-il d'entendre 1 000 demandes si on n'accorde que 200 pensions?

(1640)

Honorables sénateurs, c'est inacceptable. À l'instar du sénateur Bonnell, j'ai essayé d'obtenir des renseignements. Ce ne devrait pas être difficile, car le sous-ministre a comparu devant le sous-comité à l'occasion de sa dernière réunion. Le sénateur Bonnell hoche la tête pour signifier son accord. Parfois, je pense que nous avons été idiots d'accepter la recommandation, mais nous l'avons fait.

Honorables sénateurs, à la page 28, le sous-ministre a déclaré qu'il entendait bien examiner les progrès dans ce domaine - et ce n'est peut-être pas le seul domaine - et il a ajouté ensuite qu'il n'était pas contre le fait de présenter une loi sur la rationalisation dans un projet de loi omnibus. Nous avons reçu l'assurance du secrétaire d'État et du sous-ministre qu'ils allaient revoir ces situations.

Honorables sénateurs, cette session a commencé en janvier l'année dernière et j'ignore vraiment pourquoi, un an plus tard, le sous-comité des affaires des anciens combattants n'est pas encore formé. Je serais tenté de dire que c'est la faute des leaders.

Si je disais cela, honorables sénateurs, je voudrais poursuivre à partir de là. Je voudrais signaler à nouveau que cette session a débuté en janvier. Nous sommes maintenant en décembre. Il a fallu un an, honorables sénateurs, pour organiser le sous-comité. Ou on s'intéresse aux affaires des anciens combattants au Sénat, et le Sénat est connu pour cela, ou les whips se sont entendus là-dessus. Ou on établit le comité des affaires des anciens combattants avec la réputation qu'il a toujours eue parmi les anciens combattants ou on cesse de tourner autour du pot, de donner des excuses pour ne pas créer ce comité.

Honorables sénateurs, sans en avoir le pouvoir, j'ai demandé au greffier d'organiser une réunion d'organisation pour demain. J'espère que le leader adjoint du gouvernement n'interviendra pas pour empêcher cela. Ai-je l'assurance du sénateur Graham?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, voudriez-vous que je vous donne mon point de vue? Vous avez certes mon assurance, et je pourrais peut-être ajouter une observation une fois que vous aurez terminé votre intervention.

Le sénateur Phillips: Je ne m'attends pas à ce que vous soyez d'accord avec tout ce que je dis.

Son Honneur le Président: J'hésite à vous interrompre, sénateur Phillips, mais les 15 minutes qui vous étaient allouées sont écoulées.

Le sénateur Phillips: Honorables sénateurs, je voudrais que vous m'accordiez un peu plus de temps, surtout pour me permettre d'aborder la question des anciens combattants. Si le Sénat refuse de m'entendre, je n'y peux rien. Je me plierai aux règles. Y a-t-il consentement unanime, monsieur le Président, pour me permettre de poursuivre?

Son Honneur le Président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: La permission est accordée.

Le sénateur Phillips: Merci beaucoup, honorables sénateurs. Il faut que je vous dise que, si j'ai besoin de plus de temps, c'est que j'avais pris des notes - et je pensais bien en avoir pour une dizaine de minutes, tout au plus - mais que j'ai l'habitude d'utiliser mes notes comme point de départ et de les développer chemin faisant. De toute évidence, votre honneur, j'ai dépassé les dix minutes.

Honorables sénateurs, laissez-moi jeter un coup d'oeil à mes notes pour voir de quoi je vais parler. Nul besoin de vous dire que je vais m'en écarter.

Lors des audiences sur le projet de loi C-67, M. Chadderton, du Conseil national des anciens combattants du Canada, a dit que, si le projet de loi était adopté, cet organisme surveillerait la situation. Le ministère des Anciens combattants a le soutien informatique. Il a l'information. Ce témoignage l'a clairement fait ressortir. Le ministère a dépensé des millions de dollars pour se doter d'ordinateurs. M. Chadderton a dit au ministère comment faire, mais ce dernier a décidé que ce n'était pas à lui à le faire.

Nous nous sommes rendus, le sénateur Bonnell et moi, au ministère des Anciens combattants, à Charlottetown. Comme vous le savez, nous nous intéressons tous les deux aux affaires des anciens combattants. On nous a montré, comme je l'ai dit, ces merveilleux tableaux, mais pas le moindre renseignement. Nous avons demandé, entre autres choses, quel pourcentage des réclamations pour déficience auditive proviennent d'anciens combattants et combien d'entre eux avaient obtenu gain de cause. Personne n'a été en mesure de nous le dire. L'excuse que l'on nous a donnée est la suivante. Ils peuvent s'être plaints de perte auditive et d'autre chose en même temps, et l'on ne sait pas comment départager cela. Honorables sénateurs, après avoir dépensé 25 ou 30 millions de dollars pour des ordinateurs, quelqu'un peut certainement nous donner une réponse à cette question. Je n'accepte pas cet argument.

(1650)

Au conseil national des anciens combattants du Canada, à Winnipeg, le ministre et le sous-ministre ont fait une présentation et ont invité les participants à poser des questions. On leur a d'abord demandé quel était le taux de la pension accordée. Après bien des bégaiements, ils ont dit 30 p. 100. Honorables sénateurs, je doute que ce soit exact.

Honorables sénateurs, je voulais traiter des problèmes que soulève le processus d'appel pour les anciens combattants. Ces problèmes font suite à l'adoption du projet de loi C-67. La demande d'un ancien combattant est acceptée par un arbitre - arbitre du milieu médical - qui lui accorde 7, 8, 9 ou 10 p. 100, ce qui déçoit l'ancien combattant. Il dit: «J'aurais dû recevoir davantage.» Il s'adresse alors au Tribunal des anciens combattants (révision et appel), mais il y a un arriéré. Dans mon esprit, il ne fait aucun doute que le ministère des Anciens combattants fait pression pour que ces cas soient traités avant ceux d'une catégorie spéciale, celle des anciens combattant qui ont interjeté appel avant l'adoption du projet de loi C-67. C'est pourquoi je reçois des plaintes d'anciens combattants qui disent que, même s'ils ont interjeté un appel devant le Tribunal des anciens combattants il y a deux ans et demi, ils n'arrivent pas à se faire entendre. Il faudrait enquêter là-dessus.

Honorables sénateurs, je m'arrête brièvement sur un passage du projet de loi C-67 qui confère au président du Tribunal des anciens combattants (révision et appel) le pouvoir de dire une chose à l'ancien combattant déçu et insatisfait de la décision rendue par l'arbitre et par la pension qui lui a été accordée. L'ancien combattant a pu s'adresser au Tribunal parce qu'on lui a octroyé 10 p. 100. Le président - et cela est très rare dans laloi - peut dire: «Nous allons entendre votre cause, parce que votre appel est vexatoire et non fondé.» Cela s'est produit dans plus d'une centaine de cas. Ce n'est pas juste.

Honorables sénateurs, je propose la formation du sous-comité des affaires des anciens combattants, parce que le ministère est en train de rédiger une mesure législative devant combler les lacunes du projet de loi C-67. Le ministère fait connaître certains règlements. Ces règlements m'effraient plus que n'importe quelle mesure législative.

Honorables sénateurs, je propose que nous appuyons la motion et allions de l'avant pour former le comité.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'aimerais dire un mot et obtenir l'attention du sénateur Phillips. Je pense que personne ici ne s'est intéressé plus au sort des anciens combattants que ne l'a fait le sénateur Phillips. Je me souviens très bien que, lorsque je présidais le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, notre sous-comité des affaires des anciens combattants avait effectué une étude approfondie des affaires des anciens combattants. Le sénateur Phillips et le sénateur Bonnell étaient deux membres précieux de ce sous-comité dirigé par le sénateur Marshall. Nous nous étions rendus à Charlottetown, où se trouve le siège du ministère des Anciens combattants. Je me souviens aussi de l'aide apportée par le sénateur Phillips lors de l'adoption du projet de loi C-67.

Je tiens à préciser un point en particulier. Lorsqu'il s'agit de créer un sous-comité, le comité principal a pleins pouvoirs. Il peut constituer un sous-comité s'il le désire. Ce que laisse entendre le sénateur Phillips est du nouveau pour moi. Sauf erreur, celui-ci laisse entendre que ce côté-ci n'a pas appuyé la création d'un tel sous-comité. Ce n'est pas vrai. Je n'ai jamais entendu de recommandation proposant la création d'un tel sous-comité. J'ai toujours présumé que le comité principal prenait son temps et que ses membres allaient, en temps utile et lorsqu'ils le jugeraient faisable et nécessaire, créer un sous-comité des affaires des anciens combattants.

(1700)

Nous appuyons de tout coeur l'initiative proposée par le sénateur Bonnell, et maintenant appuyée par le sénateur Phillips. Quant au moment où sera convoquée une réunion pour établir un tel sous-comité, c'est aux dirigeants du comité principal et aux membres du comité lui-même qu'il appartient de le décider.

Je remercie le sénateur Bonnell et le sénateur Phillips d'avoir porté ces questions à l'attention du Sénat. Il existe, j'en suis convaincu, des préoccupations très légitimes à cet égard, comme les sénateurs Phillips, Bonnell et d'autres l'ont montré. Je suis persuadé que le sous-comité saura les aborder dans ses délibérations.

Le sénateur Phillips: Honorables sénateurs, puis-je poser une question à l'honorable sénateur Graham? J'en ai parlé au président du comité, aux whips et aux leaders.

Le sénateur Graham: Vous n'en avez pas parlé aux leaders de ce côté-ci.

Le sénateur Phillips: Oui; c'est pourquoi j'adresse une question au leader adjoint du gouvernement. Finalement, le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a réussi à soumettre des noms de membres éventuels du sous-comité, qui devrait se composer de cinq membres. Nous n'avons jamais réussi à en avoir cinq. Puis, quand nous avons été saisis du projet de loi sur l'assurance-emploi, certains membres ont été retirés du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie qui faisaient également partie du sous-comité des affaires des anciens combattants.

L'honorable sénateur Graham sait très bien que des sénateurs ne peuvent pas faire partie d'un sous-comité à moins de faire partie du comité principal. Nous avons fini avec deux membres: le sénateur Bonnell et moi-même. Nous étions les deux seuls à continuer de nous intéresser aux affaires des anciens combattants, mais deux membres ne peuvent constituer le quorum, même d'un sous-comité.

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je ne veux pas me lancer dans un débat sur le mode de nomination des membres des comités ni reprendre les termes du sénateur Phillips, qui a parlé de retirer des membres du comité. Je réprouve l'utilisation de ce terme en ce qui concerne nos membres. Je suis persuadé que le whip peut donner l'assurance qu'aucun sénateur de ce côté-ci n'a été de propos délibéré retiré de ce comité pour une raison particulière, peu importe la mesure législative qui était à l'étude. Il se peut qu'ils aient été remplacés parce qu'ils ne pouvaient pas assister à une séance ou qu'ils aient été remplacés provisoirement, mais le comité est tel qu'il a été constitué au départ par le comité de sélection, au début de la session.

Le sénateur Phillips: Honorables sénateurs, on a dit que personne n'avait été retiré du comité. J'invite le sénateur Graham à vérifier la liste des membres. Le sénateur s'engage-t-il à le faire? J'aimerais nommer les sénateurs qui ont été retirés, mais je ne crois pas que cela soit équitable. Le sénateur Graham aurait-il l'obligeance de vérifier?

Le sénateur Graham: Je le ferai.

Le sénateur Phillips: Plus particulièrement pendant l'étude de certains projets de loi, un sénateur libéral du sous-comité qui n'était pas content des mesures proposées a soudain été retiré. Je le répète, le quorum est de trois sénateurs, et le sénateur Graham a retiré le troisième membre du comité.

Le sénateur Graham: C'est complètement faux. Nous n'avons retiré aucun sénateur d'un comité. Nous avons pu remplacer temporairement un sénateur qui ne pouvait assister à une séance en particulier. Toutefois, le terme «retirer» est incorrect.

Le sénateur Phillips: Honorables sénateurs, je n'accepte pas qu'on dise que le verbe que j'utilise est incorrect. L'honorable sénateur me traite-t-il de menteur?

Le sénateur Graham: Non, je suis bien disposé à réexaminer la liste originale de candidats soumise par le comité de sélection pour nous aider à déterminer qui les honorables sénateurs veulent proposer comme candidats pour remplir les fonctions...

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, il n'est pas question d'un débat. Vous pouvez poser des questions, c'est tout.

Le sénateur Phillips: J'ai une question à poser qui découle de la déclaration de l'honorable sénateur Graham, où j'ai eu l'impression qu'il me traitait de menteur.

Le sénateur Graham: Jamais.

Le sénateur Phillips: J'ai envie de dire que la même chose vaut pour vous, mais je ne le ferai pas, pas en public du moins.

Je demanderais à l'honorable sénateur Graham de surveiller surtout la situation en ce qui concerne les sénateurs Cools et Rompkey. Je crois comprendre que le sénateur Rompkey était tout à fait disposé à faire partie du sous-comité, mais n'a pas pu le faire parce qu'il a été soudainement retiré du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie et qu'il faut faire partie d'un comité pour pouvoir siéger à un sous-comité de ce comité. Je suis persuadé que le sénateur Graham comprend cela.

Ai-je besoin de le lui expliquer?

Le sénateur Graham: Non. Ai-je la permission des sénateurs pour lire officiellement la liste des membres du comité?

Son Honneur le Président: Répondez-vous à une question, sénateur Graham? Nous sommes en train de nous embarquer dans un débat qui n'est vraiment pas parlementaire. Si c'est pour répondre à une question, vous avez la parole.

Le sénateur Graham: Je réponds à la question, à l'allégation selon laquelle le sénateur Cools et peut-être même le sénateur Rompkey ont été retirés du comité. Le sénateur Rompkey a été remplacé parce qu'il avait du travail au sein d'autres comités.

Le sénateur Phillips: Je ne conteste pas le fait qu'ils n'étaient pas disponibles.

Le sénateur Graham: Comme le sénateur Phillips l'a proposé tout à l'heure, je serai très heureux d'examiner la liste originale des membres de ce comité et de déterminer quels honorables sénateurs auraient le plus à apporter au travail du sous-comité que l'on propose d'instituer.

Le sénateur Phillips: Honorables sénateurs, je me laisse peut-être embobiner, mais je vais accepter ce qu'a dit l'honorable sénateur Graham.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, si personne d'autre ne veut prendre la parole, je mettrai la question aux voix.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

(1710)

Affaires juridiques et constitutionnelles

Autorisation au comité de siéger
en même temps que le Sénat

L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement) propose, nonobstant l'alinéa 58(1)a) du Règlement:

Que le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à siéger pendant la séance du Sénat à 15 h 15 le mercredi 11 décembre 1996, et que l'application du paragraphe 95(4) soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 11 décembre 1996, à 13 h 30.)


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