TABLE DES MATIÈRES
Le lundi 17 février 1997
Projet de loi C-296. Motion de deuxième lecture 8165
M. Leroux (Richmond-Wolfe) 8173
M. Chrétien (Frontenac) 8181
M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 8186
M. Harper (Simcoe-Centre) 8189
M. Tremblay (Lac-Saint-Jean) 8190
M. White (Fraser Valley-Ouest) 8191
M. Martin (LaSalle-Émard) 8192
M. Martin (LaSalle-Émard) 8193
M. Martin (LaSalle-Émard) 8193
M. Martin (LaSalle-Émard) 8193
M. Martin (LaSalle-Émard) 8193
M. Martin (LaSalle-Émard) 8194
M. Martin (LaSalle-Émard) 8194
M. Martin (LaSalle-Émard) 8194
M. Chrétien (Saint-Maurice) 8195
M. Chrétien (Saint-Maurice) 8195
M. Martin (LaSalle-Émard) 8195
M. Martin (LaSalle-Émard) 8196
M. Martin (LaSalle-Émard) 8196
M. Martin (LaSalle-Émard) 8197
Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 8197
M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 8197
Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 8197
M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 8197
M. Leroux (Richmond-Wolfe) 8198
M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 8199
M. Leroux (Richmond-Wolfe) 8199
M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 8199
M. Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing) 8200
Reprise de l'étude de la motion et de l'amendement 8203
Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 8206
M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 8209
M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 8225
M. Chrétien (Frontenac) 8227
M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 8228
M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 8229
M. Chrétien (Frontenac) 8230
M. Chrétien (Frontenac) 8230
8165
CHAMBRE DES COMMUNES
Le lundi 17 février 1997
La séance est ouverte à 11 heures.
_______________
Prière
_______________
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[
Traduction]
M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.) propose: Que le
projet de loi C-296, Loi modifiant la Loi sur le système
correctionnel et la mise en liberté sous condition (programmes de
réadaptation), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
-Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui au sujet
de mon projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi
C-296, Loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise
en liberté sous condition (programmes de réadaptation).
(1105)
Ce projet de loi vise à exiger des détenus des établissements
fédéraux qu'ils suivent les programmes susceptibles de favoriser
leur réadaptation et à faire dépendre leur libération conditionnelle
de leur réussite à ces programmes.
J'espère aussi pouvoir jeter une certaine lumière sur les
problèmes qui existent dans le système correctionnel canadien.
J'ajouterai que je ne suis pas le seul à croire à l'existence de ces
problèmes, car le vérificateur général semble confirmer mes
craintes dans son dernier rapport.
La mission du Service correctionnel du Canada est d'encourager
et d'aider activement les délinquants à devenir de bons citoyens
respectueux de la loi. Il ne s'agit pas seulement de châtier, mais
aussi de réhabiliter. Un bon régime correctionnel réduit
effectivement les risques de récidive.
Pour commencer, je voudrais expliquer ce qui se passe au juste
lorsqu'un délinquant est envoyé dans un pénitencier fédéral.
D'abord, on évalue le risque qu'il pose et ses besoins en matière de
programmes. À son retour au pénitencier, le délinquant est soumis à
des tests standardisés au cours desquels on lui pose des questions
concernant son niveau d'instruction, son intelligence, ses emplois,
sa psychologie et son style de vie. Un délinquant a le droit de faire
des suggestions quant à la planification correctionnelle, mais il est
rare qu'on en tienne vraiment compte.
Le dernier rapport du vérificateur général montre que le
processus d'évaluation est effectivement faible. Le vérificateur y
met en doute les compétences des personnes qui évaluent les
délinquants à leur arrivée au pénitencier. Il a ajouté que les détenus
doivent attendre trop longtemps avant d'obtenir de la thérapie, ce
qui pose un autre problème.
Les carences du système, les contraintes de temps, les problèmes
de planification de même que l'évaluation et l'accessibilité des
programmes nuisent à l'efficacité du processus d'élaboration des
programmes et aux avantages qui pourraient en découler. Un détenu
doit parfois attendre jusqu'à trois ans avant de pouvoir participer à
un programme. Dans de telles conditions, un programme, c'est trop
peu trop tard. Un contrevenant est plus en mesure de profiter d'une
thérapie dès son arrivée à un établissement de détention. Les
programmes n'ont que peu d'effets sur ceux qui sont livrés à
eux-mêmes pendant des mois, peut-être même des années.
Dans les documents diffusés par le Service correctionnel du
Canada lui-même, on dit bien que les programmes doivent
directement viser à satisfaire aux besoins des contrevenants, surtout
lorsque la situation est urgente. Dans de tels cas, un programme
pourrait mener à l'adoption d'un comportement pro-social. Le
programme devrait chercher à modifier le style de vie des
contrevenants afin que ceux-ci puissent, au moment de leur
libération, contribuer à la société. On ajoute, dans les documents du
Service correctionnel, que les établissements doivent prévoir un
processus permettant de mettre en oeuvre les recommandations
formulées par les agents de gestion des cas et les agents de
programmes concernant les programmes à élaborer et les travaux à
réaliser.
Beaucoup de questions restent sans réponse. Le système actuel
comporte des lacunes évidentes. Mon projet de loi n'apporte
peut-être pas la solution miracle, mais il parviendra, je l'espère, à
faire ressortir les problèmes qui menacent notre société et nos
foyers.
Le vérificateur général a laissé entendre que le Service
correctionnel du Canada pourrait, dans l'ensemble, faire beaucoup
mieux. Dans son rapport, il déclare que la gamme de programmes
qu'offre le service est impressionnante, mais qu'il y a matière à
amélioration. Il ajoute qu'il a également décelé de graves
problèmes dans les efforts que le gouvernement fédéral déploie
pour la réadaptation des contrevenants et leur réinsertion dans la
société.
Le vérificateur a en outre découvert un certain nombre de
différences de coûts au sein du système. Dans un programme, le
coût de traitement d'un délinquant est de 2 000 $ dans un
établissement alors que, en vertu d'un autre programme, le même
traitement peut
8166
coûter jusqu'à 7 000 $ par délinquant. En mon nom personnel et au
nom de mes électeurs, je dois dire que cette situation est
inacceptable. J'estime qu'il devrait y avoir une certaine uniformité
dans tous les programmes.
Le vérificateur général a par ailleurs souligné qu'on affectait un
montant disproportionné de ressources à quelques délinquants
seulement. Par exemple, dans le budget de 1994-1995 seulement,
70 p. 100 des ressources étaient consacrées à la réadaptation de
délinquants sexuels, qui ne sont qu'une vingtaine au Québec. Le
montant qui leur est consacré s'élève dont à environ 85 000 $ par
délinquant. C'est incroyable et, bien sûr, inacceptable.
(1110)
Et nous n'avons pas la preuve que des délinquants terminent le
programme avec succès. Entre temps, 35 p. 100 de tous les
délinquants sexuels qui ont été libérés des prisons fédérales n'ont
reçu aucun traitement préventif. Au nom de mes électeurs, voire de
la plupart des Canadiens, je déclare que cela est inacceptable.
Selon les études que j'ai reçues des Services correctionnels du
Canada, il semble que le problème ne réside pas dans les
programmes en tant que tels. Au contraire, les programmes conçus
par les attachés de recherche des services correctionnels comptent
parmi les meilleurs dans le monde. Le problème réside plutôt dans
le mode de gestion des programmes.
Tous les programmes ne sont pas offerts dans tous les
établissements fédéraux. e peut être à cause d'une pénurie de
professionnels formés pour donner les traitements. Par exemple, on
a appris récemment qu'au pénitencier de Warkworth, il n'y a que
quatre thérapeutes pour 680 détenus. Comment quatre personnes
peuvent-elles faire du bon travail si elles doivent s'occuper de 680
détenus? J'estime qu'elles ne peuvent pas faire grand-chose. Il en
est résulté les deux tragédies suivantes qui concernent deux jeunes
détenus du même pénitencier.
Le premier est âgé de 25 ans et s'appelle Jamie Taylor. Il purge
une peine d'emprisonnement pour avoir tué son meilleur ami quand
il avait 17 ans. Lorsqu'il a été emprisonné, il était encore considéré
comme un jeune contrevenant et a commencé à purger sa peine dans
des centres de détention pour jeunes où il a reçu des traitements
quotidiens pour son comportement violent et colérique. Il était suivi
par un agent de gestion de cas et faisait des progrès au point où on a
constaté que son comportement commençait à changer.
Rendu à l'âge adulte, il a toutefois été transféré au pénitencier
fédéral de Warkworth pour finir de purger sa peine
d'emprisonnement à perpétuité pour meurtre au second degré. Il est
admissible à une libération conditionnelle en l'an 2000, ce qui, je le
signale à la Chambre, est dans trois ans à peine. En attendant, Jamie
Taylor prend son mal en patience. Avec seulement quatre
thérapeutes pour l'ensemble de la population carcérale, son
traitement et ses séances de thérapie ont littéralement cessé.
Le deuxième exemple est celui de Mark Williams. Ce dernier est
un détenu de 24 ans qui est incarcéré au même établissement et qui
purge une peine d'emprisonnement à perpétuité pour avoir tué une
Torontoise durant un vol qu'il a commis alors qu'il avait 17 ans.
Mark décrit le pénitencier comme une entreprise commerciale et il
se voit comme une marchandise en attente sur une tablette. Il dit
qu'il n'a pratiquement reçu aucun traitement depuis qu'il a
commencé à purger sa peine. Il n'a vu l'équipe responsable de son
cas que quatre fois en six ans. Il estime n'avoir eu aucun moyen de
se réadapter ni aucun encadrement. Il n'a essentiellement éprouvé
que de la colère depuis son incarcération et il n'a eu aucune aide
pour composer avec celle-ci.
Mark Williams est admissible à une libération conditionnelle en
1998, dans un an à peine. S'il ne reçoit pas d'aide pour surmonter
ses problèmes et la colère qu'il ressent, on lui refusera
probablement une libération conditionnelle. J'espère sincèrement
qu'on la lui refusera parce qu'il n'est pas prêt à réintégrer la société.
Lorsqu'un individu comme Mark Williams est remis en liberté, il
constitue une menace pour notre société et l'ensemble de notre
pays.
Le projet de loi que le ministre de la Justice a présenté vise à
punir et à assurer la réadaptation. Par conséquent, nous avons,
envers des personnes comme Jamie Taylor et Mark Williams, la
responsabilité de mettre des programmes à leur disposition
quotidiennement; une équipe de quatre thérapeutes pour 680
détenus ne peut toutefois suffire à la tâche.
Ces délinquants seront remis en liberté un jour, lorsqu'ils auront
purgé leur peine et, si nous ne nous occupons pas de leur cas
maintenant, on peut déjà prévoir les problèmes qu'ils causeront
dans nos collectivités un jour.
Mon projet de loi n'a rien de révolutionnaire. Il dit simplement
qu'un détenu qui demande une libération conditionnelle doit, pour
l'obtenir, avoir au préalable suivi un programme de réadaptation.
Nous devrions profiter du temps que les délinquants passent en
prison pour leur permettre d'acquérir des compétences qui leur
permettraient d'être des membres utiles de la société après leur
libération. De cette manière, on réduirait beaucoup le risque qu'ils
récidivent. En offrant des programmes de réadaptation aux
délinquants, on brise le cercle vicieux qui fait d'eux des criminels
endurcis.
(1115)
Le Service correctionnel du Canada ne consacre que 7 p. 100 du
budget total de ses services aux programmes de réadaptation. Si ces
programmes ne sont pas efficaces parce qu'il manque de fonds, la
commission pourrait peut-être lui consacrer une plus grande portion
de son budget.
Je ne demande pas de fonds frais, au contraire, la dernière chose
que nous devons faire, c'est de demander aux contribuables de
prendre une part de leur argent durement gagné pour le consacrer à
ces programmes. Je dis simplement que l'argent qui est déjà prévu
pour ces programmes pourrait peut-être être dépensé plus sagement
et plus efficacement.
Il n'y a pas que le vérificateur général qui réclame des
changements, les groupes des droits des victimes aussi doutent qu'il
soit sûr de remettre des délinquants en liberté avant qu'ils aient eu la
possibilité de se réadapter.
8167
On a vu récemment dans les journaux que le Centre canadien de
ressources pour les victimes de crimes a réclamé une enquête sur la
décision de la Commission des libérations conditionnelles de
remettre en liberté George Harvey Milne, condamné pour des
crimes d'ordre sexuel. Milne fait face à de nouvelles accusations
d'agressions sexuelles contre de jeunes garçons. Dans son rapport,
la commission a fait état du risque qu'il ferait courir à la
collectivité, mais elle a tout de même approuvé sa remise en liberté.
Selon le rapport, Milne ne manifestait aucun réel désir de
changer et ce n'est que lorsque toutes les autres options ont été
envisagées qu'il a suivi un traitement. Lorsque Milne s'est présenté
pour l'audition de sa demande de libération conditionnelle, le 30
octobre 1991, la commission a constaté une fois de plus qu'il
n'avait pas tiré pleinement profit du traitement et a rejeté sa requête.
À peine un mois plus tard, la commission statuait que Milne ne
présentait pas un risque insurmontable pour la collectivité et lui
accordait une libération conditionnelle. Je trouve cela honteux.
On me traitera peut-être d'insensé, mais je ne crois pas que cet
homme ait pu être réadapté en moins d'un mois. Les accusations
dont il est maintenant l'objet semblent bien me donner raison.
Ce cas est un autre exemple de la menace qui pèse sur la sécurité
publique. Si la commission estimait que la réadaptation de Milne
n'était pas complète et qu'il présentait encore un risque, même
minime, elle n'aurait pas dû lui accorder une libération
conditionnelle totale. À cause de cette décision, d'autre jeunes
garçons, ainsi que leurs familles et toute la communauté ont subi de
terribles souffrances aux mains de cet inqualifiable individu.
Mon projet de loi a également reçu l'attention de personnes qui
représentent, entre autres, des détenus purgeant une peine de longue
durée en Saskatchewan. Un certain Darrell McPhedran, qui est
actuellement le représentant de ces détenus m'a donné un aperçu de
la façon dont le système correctionnel fonctionne du point de vue
des délinquants.
McPhedran m'a dit avoir reçu de nombreuses opinions, positives
et négatives, au sujet de l'utilité des programmes de réadaptation et
des conditions dans lesquelles ces programmes sont appliqués dans
l'établissement où il est détenu.
Selon lui, il existe un consensus général selon lequel les
programmes qui sont appliqués sous la direction du service de
psychologie sont utiles. Il semble toutefois que les programmes de
base, nommément les programmes éducatifs, professionnels et les
programmes de traitement pour abus de drogue soient très
élémentaires et édulcorés.
McPhedran a déclaré que les programmes ont une portée très
limitée et que le personnel qui les offre n'a pas les compétences
nécessaires. Il s'est dit très préoccupé par la façon dont le Service
correctionnel du Canada administrait ses établissements, mais
finalement, ce qui l'inquiète surtout, ce sont les programmes et le
manque de places, ssurtout pour les détenus purgeant une peine de
longue durée.
Certains diront peut-être: Pourquoi s'en faire pour des détenus
qui purgent une peine de longue durée? Après tout, ils sont
condamnés à perpétuité. Je rappelle aux gens et à tout le monde à la
Chambre qu'aujourd'hui, il n'y a plus de peine capitale et qu'il va
arriver un jour où ces individus vont avoir purgé la totalité de leur
peine et vont devoir se réinsérer dans la société.
Un délinquant condamné à une peine à perpétuité est admissible
à la libération conditionnelle au bout de 14 ou 15 ans. Devons-nous
donc l'oublier pendant ces 14 ou 15 années? À mon avis, non. Nous
ne pouvons pas nous contenter de jeter des gens en prison et de les
laisser moisir là, étant donné qu'il est toujours possible qu'au bout
d'environ 14 ans, ils soient mis en liberté.
Nous sommes convaincus que, grâce à ces programmes, le risque
qu'ils récidivent une fois réinsérés dans la société sera nettement
moins grand. Ces individus finiront par être admissibles à la
libération conditionnelle.
(1120)
Je répète que mon projet de loi propose que les individus
purgeant une peine de longue ou de courte durée qui font une
demande de libération conditionnelle anticipée ne devraient voir
leur demande acceptée qu'à condition qu'ils aient suivi avec succès
un programme de réadaptation.
Cela m'amène à un autre défaut du système, à savoir l'absence de
soutien adéquat pour aider les détenus à faire la transition entre la
prison et la société. Il devrait y avoir dans la société des groupes qui
aideraient les détenus à faire cette transition une fois réinsérés dans
la société.
Le vérificateur général a signalé que les services correctionnels
n'avaient pas établi de programme permanent qui permettrait
d'aider ces personnes à faire la transition vers leur réintégration
dans la collectivité. Des études ont montré qu'il est essentiel
d'offrir de tels programmes de traitement aux délinquants afin de
faciliter leur réintégration et d'assurer davantage la sécurité de la
population, bien sûr.
Au moment de leur sortie, les délinquants doivent de nouveau
faire face aux conditions qui les ont amenés à poser un acte
criminel. Selon le vérificateur général, on a satisfait à environ 65 p.
100 de la demande de programmes communautaires de prévention
des recidive chez les délinquants sexuels. Ce sont les 35 p. 100 qui
restent qui m'inquiètent. C'est pourquoi nous devons prendre des
mesures à cet égard.
L'une des critiques formulées à l'endroit de mon projet de loi m'a
surpris. On a dit qu'il serait inconstitutionnel, qu'on ne respecterait
pas les droits constitutionnels des personnes en les obligeant à
participer à ces programmes contre leur gré.
8168
J'entends des commentaires des députés d'en face. C'est
malheureux que les critiques viennent du Parti réformiste. Je crois
qu'on a atteint un sommet en matière d'hypocrisie. En public, ces
députés disent qu'il faut pendre les criminels haut et court ou les
enfermer à double tour et jeter la clé. Ils se donnent des airs de
redresseurs de torts entièrement voués à leur oeuvre, mais en privé,
ce n'est plus pareil.
Je suis déçu qu'il n'y ait pas un seul député réformiste qui prenne
la parole pour appuyer le projet de loi tout en présentant des
critiques ou des idées constructives sur la manière d'améliorer le
système qui, malheureusement, dans l'état actuel des choses, ne
fonctionne pas. Ce sont des redresseurs de torts qui font cavaliers
seuls.
Quant à savoir si mon projet de loi est inconstitutionnel, je
précise que je ne demande à personne de faire quoi que ce soit
contre son gré. Je cherche seulement à assurer aux délinquants
l'aide qui leur permettra de se réadapter et de prouver qu'ils peuvent
réintégrer la société sans présenter de risque de récidive. S'ils ne
sont pas disposés à s'inscrire au programme de réadaptation, leur
demande de libération conditionnelle ne devrait pas être étudiée.
Le ministre de la Justice a présenté des amendements qui
augmentent la sévérité des peines pour les délinquants jugés
dangereux. Il a fait adopter des mesures qui permettent de surveiller
les délinquants dangereux après leur libération. Je le félicite pour
ces initiatives, mais nous devons continuer à apporter de petites
améliorations au système, parce que rien ni personne n'est parfait.
Je ne crois pas que mon projet de loi soit la seule solution ou la
solution parfaite. Je crois que ce serait une amélioration qui nous
aiderait à assurer la sécurité de la société, et qui aiderait peut-être
aussi les gens qui ont purgé leur peine à redevenir des éléments
utiles au sein de la société. J'espère que mon projet de loi aura
l'appui des députés.
Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley,
Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec grand intérêt mon
collègue d'en face parler du projet de loi d'initiative parlementaire
qui, à l'entendre, solutionne tous les problèmes des prisons.
Je ne comprends même pas pourquoi ce projet de loi est présenté
à la Chambre. L'évaluation des détenus est faite avant qu'ils ne
soient placés en permanence dans une institution. Les responsables
consacrent de six semaines à deux mois à cette évaluation.
Il existe déjà une équipe de gestion de cas qui recommande le
traitement approprié à chaque détenu. Cela ne se produit peut-être
pas aussi souvent dans le cas des prisonniers dont le député a parlé.
(1125)
Il faut examiner tout le système carcéral pour voir ce qui se passe
vraiment au lieu de parler à un ou deux détenus non satisfaits du
traitement, ou de l'absence de traitement, qui leur est réservé.
Le financement de ces programmes pose certains problèmes. Le
nombre de places ne suffit pas pour tous les détenus. Cependant, les
difficultés viennent aussi des prisonniers qui ne manifestent aucun
remords pour les infractions commises et ne ressentent rien à
l'égard des victimes, mais qui profitent des programmes de
traitement parce que ceux-ci équivalent à un billet de sortie pour
eux. Ils savent qu'ils ont peu de chance d'obtenir une libération
conditionnelle s'ils ne participent pas à ces programmes.
Le député d'en face devrait parler aux intervenants qui
administrent les programmes de traitement et les entendre raconter
comment certains détenus considèrent que tout cela n'est qu'une
farce et qu'ils peuvent participer aux programmes de traitement
uniquement pour obtenir leur libération conditionnelle. Non, ça ne
marche pas parce que ces détenus ne sont pas réceptifs.
Le député aurait dû assister à la réunion du Comité de la justice et
des affaires juridiques, l'autre jour, lorsque des experts sont venus
parler des programmes de traitement. Ils ont dit que pour certains
contrevenants violents les programmes de traitement étaient
inopérants parce qu'ils étaient psychopathes et que tout ce qu'ils en
retiraient c'était une meilleure compréhension de la façon de
manipuler le système à leur avantage.
Les programmes de traitement sont une panacée. Oui en ce qui
concerne l'intervention précoce chez les jeunes; oui certains
programmes de traitement de l'alcoolisme et de la toxicomanie
seraient beaucoup plus efficaces dans nos prisons que toute autre
mesure.
Mais en fait que se passe-t-il? On laisse les drogues entrer dans
les prisons en quantités telles que la situation est incontrôlable. Et
que fait-on? On distribue de quoi stériliser les aiguilles à l'eau de
javel. Est-ce que cela aide les détenus à ne pas se droguer? Bien sûr
que non. Et que fait-on pour ceux qui sont alcooliques? Est-ce qu'on
leur offre de les traiter? Jusqu'à un certain point, je suppose.
Certains détenus sont tellement convaincus qu'ils ont besoin de
traitement qu'ils font leur propre alcool en prison.
Je ne pense pas que nous devrions gaspiller notre argent à traiter
des détenus qui n'en ont ni le désir, ni l'envie et qui n'en prennent
pas l'initiative. Je ne pense pas que ce projet de loi cerne ou
reconnaisse le problème. Je le répète, je me demande bien pourquoi
la Chambre l'étudie.
On va forcer les gens à participer à des programmes de traitement
simplement pour qu'ils puissent être libérés sous condition. C'est
déjà ce qu'on fait. Une des conditions de la libération conditionnelle
est que les détenus doivent prouver qu'ils essayent d'être
repentants, d'admettre que leur comportement a fait du tort à
quelqu'un et qu'ils font quelque chose pour y remédier. Ils n'ont
déjà guère de chance d'obtenir une libération conditionnelle s'ils ne
suivent pas les programmes de traitement mis à leur disposition.
Je ne vois absolument pas l'intérêt d'adopter une autre mesure
législative. La loi est là et les programmes sont là. Bien sûr, nous
pourrions mettre plus d'argent dans ces programmes, je ne le nie
pas, mais nous n'avons pas besoin d'une nouvelle loi pour donner
plus de services aux détenus. Ce dont nous devons nous assurer,
c'est que les traitements soient donnés aux détenus qui peuvent en
profiter. Si quelqu'un à une personnalité violente, n'a pas de re-
8169
mords, ne veut pas de traitement et ne voit pas l'intérêt d'en avoir,
l'obliger ne servira à rien. Cela a déjà été prouvé par le passé.
Le député devrait parler avec certains de ceux qui offrent les
traitements, en particulier aux délinquants sexuels. Les traitements
ne servent absolument à rien, à moins que le détenu n'ait réalisé
qu'il avait un problème et qu'il ne soit prêt à faire quelque chose.
Ce député qui essaie de changer le système, de l'améliorer,
d'aider ces malheureux détenus qui ont besoin de traitement, a voté
contre un projet de loi d'initiative parlementaire qui aurait exigé des
évaluations des détenus dangereux ayant commis des infractions
sexuelles graves contre un adulte et n'importe quelle infraction
sexuelle contre un enfant, et je trouve cela répugnant. En regardant
le bilan du vote, j'ai constaté que ce député avait voté contre. Cela
me trouble. S'il veut tellement que l'on offre des traitements pour
protéger la société, pourquoi a-t-il voté contre l'autre projet de loi?
Lorsque le député dit que, selon un réformiste, c'était non
constitutionnel, j'ai du mal à le croire, parce que j'ai un projet de loi
à l'étude du Comité de la justice et ce sont les députés libéraux qui
me disent qu'il est non constitutionnel d'essayer de faire en sorte
que l'on empêche les délinquants dangereux d'être libérés. Et ce
sont les députés libéraux et, à leur tête, le ministre libéral de la
Justice qui me disent que c'est non constitutionnel.
(1130)
Je ne crois pas un seul instant qu'un membre du Parti réformiste
ou un député réformiste aurait le sentiment qu'une question d'ordre
constitutionnel soit un motif suffisant pour renoncer à faire ce qu'il
convient de faire. Or, ce sont les mêmes libéraux qui se servent
constamment de la Charte des droits comme d'une excuse pour
passer une mauvaise mesure législative, pour forcer le
gouvernement à persister dans son immobilisme au lieu de
s'attaquer aux vrais problèmes de notre société.
C'est à ne plus rien comprendre. Ce député libéral présente un
projet de loi qui est carrément inutile. Il ne servira à rien. Il prétend
que c'est la solution ultime. J'ai plutôt l'impression que ce député
cherche à obtenir l'appui du public en prévision de ce qui s'en vient
au cours des prochains mois. Ce député est probablement en quête
de quelques voix. Il croit que, s'il peut faire publiquement l'étalage
de ce projet de loi d'initiative parlementaire, qui, bien que
parfaitement inutile, fait bonne impression, il réussira peut-être à
convaincre les Canadiens qu'il prend au sérieux le dossier de la
criminalité.
Je ne pense pas que les Canadiens soient dupes. Ils vont voir clair
dans son jeu. Ils n'ont qu'à regarder le bilan de ce député et de ses
collègues libéraux pour avoir une représentation fidèle de la réalité.
La réalité, c'est que les députés libéraux n'ont aucunement
l'intention de se montrer plus sévères avec les criminels. Ils n'ont
aucunement l'intention de réformer en profondeur notre système
judiciaire. Ils n'ont aucunement l'intention d'adopter des projets de
loi qui visent vraiment à aller au fond des choses, lorsqu'il s'agit de
résoudre un problème. Ils se gardent bien d'appuyer un projet de loi
d'initiative parlementaire visant à ce que les délinquants dangereux
ne puissent être relâchés. Ils optent plutôt pour des mesures à l'eau
de rose qui répondent aux desiderata de ceux qui se font les
porte-parole des détenus.
Les gens qui commettent des infractions, qui tuent leurs
meilleurs amis, devraient peut-être songer à la vie qu'on mène
derrière les barreaux avant de passer aux actes. Ils devraient
peut-être suivre des séances de counselling pouvant les aider à gérer
leur colère et à cesser de consommer de la drogue, au lieu d'attendre
de se retrouver en prison. Ils devraient peut-être se soucier de
poursuivre leurs études s'ils ne veulent pas se retrouver en prison. À
mon avis, il serait beaucoup plus logique de dépenser notre argent à
des programmes de traitement contre l'alcool et les drogues avant
que des jeunes ne se retrouvent en prison. Notre argent devrait être
consacré à l'amélioration des établissements d'enseignement pour
les jeunes qui ont abandonné l'école secondaire, avant qu'ils ne se
retrouvent en prison.
Pourquoi le gouvernement estime-t-il que toutes ces ressources
devraient être consacrées à ces personnes après qu'elles ont enfreint
la loi, après qu'elles ont commis un meurtre, après qu'elles ont été
incarcérées? Je trouverais beaucoup plus facile d'appuyer un projet
de loi d'initiative parlementaire qui traiterait de ces questions, au
lieu d'un projet de loi qui me fait perdre mon temps et celui de la
Chambre.
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ):
Monsieur le Président, pour bien comprendre le projet de loi C-296
présenté par le député, il faut avoir à l'esprit la mission que s'est
donnée le Service correctionnel du Canada.
Pour vraiment examiner et comprendre le projet de loi du député,
il faut penser à la mission. La mission, je vous la cite, et on la
retrouve dans un document très officiel du Service correctionnel du
Canada. On y dit: «Le Service correctionnel du Canada, en tant que
composante du système de justice pénal, contribue à la protection
de la société en incitant activement et en aidant les délinquants à
devenir des citoyens respectueux des lois, tout en exerçant un
contrôle raisonnable, sûr, sécuritaire et humanitaire.»
Immédiatement, nous, du Bloc québécois, vous disons que le
système n'est peut-être pas parfait, mais il n'est pas aussi
catastrophique que les députés réformistes le laissent entendre. Au
Canada, le système correctionnel fonctionne. Cependant, on voit
certaines lacunes. On a beaucoup d'interrogations, et je pourrai
peut-être y revenir en dernier lieu.
(1135)
Plus précisément, lorsqu'on regarde la mission que le Service
correctionnel s'est donnée, avec l'objectif visé par le projet de loi,
le sommaire du projet de loi du député dit:
Ce projet de loi vise à exiger des détenus des établissements fédéraux qu'ils
suivent les programmes susceptibles de favoriser leur réadaptation et à faire
dépendre leur libération conditionnelle de leur réussite à ces programmes.
8170
Immédiatement, quelque chose me saute aux yeux par rapport à
la mission que le Service correctionnel s'est donné et par rapport au
projet de loi du député. Immédiatement, il me saute aux yeux que le
député-et cela m'étonne que cela vienne du député
ministérielle-dépose un projet de loi dans lequel il fait un constat
d'échec. C'est ce que le projet de loi stipule, parce qu'il faudra
«obliger les détenus», alors que, lorsqu'on connaît le système
correctionnel canadien, cela se fait.
On le propose, on les suit, on les aide, lorsqu'on sait qu'un détenu
a des problèmes psychologiques, des problèmes de réinsertion
sociale, lorsqu'il a un problème sexuel ou autre. On va les aider afin
que, lorsque le détenu sortira de l'institution carcérale, il sera un
citoyen qui s'intégrera à la population, et on ne pourra pas voir la
différence, à première vue. C'est la mission que le système carcéral
s'est donné en ce qui a trait aux libérations. Mais le projet de loi
semble dire qu'il y a un échec, que le système ne fait pas bien son
travail, donc, on va obliger les détenus, en facilitant leur remise en
liberté, si le détenu utilise des programmes qui sont déjà à sa
disposition.
C'est louable, mais je trouve que c'est dangereux de procéder de
cette façon, parce que le député ministériel semble dire qu'il y a un
problème. De deux choses l'une: ou bien les statistiques que le
ministère nous donne relativement aux récidives sont bonnes, ou
elles ne sont pas bonnes. Je tiens pour acquis que les statistiques
qu'on nous donne sont bonnes, à moins que le calcul des libérations
et toute la question de la récidive, les calculs que le ministère du
Solliciteur général nous soumet chaque année ne soient pas justes.
Mais si les statistiques sont exactes, cela veut donc dire qu'il y a un
taux d'échec très minime et que le système fonctionne; cela veut
donc dire que les détenus utilisent les programmes mis à leur
disposition.
Par contre, le projet de loi du député laisse sous-entendre que les
statistiques ne sont pas exactes, parce que le député s'intéresse à
cela. Il veut obliger les détenus à procéder et à suivre cette
formation.
Donc, oui, c'est un projet de loi louable, mais je m'interroge à
savoir s'il est utile de l'adopter.
Je sais qu'il y a deux versions en ce qui touche la récidive. Dans
le milieu policier, on semble dire que les chiffres du ministère ne
sont peut-être pas exacts. En ce qui a trait aux libérations
anticipées-et j'ai été fort surpris de lire cela dans le journal
L'Express, une revue qui traite du domaine juridique-qu'il y a un
taux d'échec d'environ 80 p. 100 en ce qui a trait aux libérations
anticipées. Si le taux d'échec est effectivement de 80 p. 100, il y a un
problème; ce problème touche leur réinsertion dans la société de
façon anticipée, ou bien il y a un problème dans le calcul que le
solliciteur général nous transmet annuellement.
Mais chose certaine, pour avoir siégé au Comité de la justice et
des questions juridiques, pour avoir questionné les témoins qui ont
comparu devant le comité, bien que ce ne soit pas encore la
catastrophe dans le domaine, si on continue à couper comme on le
fait, si on continue à enlever les programmes qui existent, tels les
programmes de scolarisation, d'ordinateur ou ceux qui servent à la
réhabilitation et à la réinsertion sociale, parce que, de plus en plus,
faute de budget, le système carcéral doit couper certains
programmes, on aura beau avoir n'importe quel projet de loi comme
celui présenté par le député d'en face, si on n'a pas les ressources
pour l'appliquer, on aura un problème.
Une chose est certaine, c'est que plus on fait des coupures, moins
on offre de programmes aux détenus, il est bien évident que,
lorsqu'ils sortiront, les détenus seront véritablement démunis et ils
pourront se retrouver très rapidement dans le système carcéral de
nouveau.
(1140)
Le projet de loi est louable, cependant, il est très inquiétant que
cela vienne d'un député d'en face, que ce soit quelque chose de
conditionnel, car j'ai l'impression que cela peut affecter les
résultats en bout de ligne. Ce n'est pas vrai qu'en obligeant
quelqu'un par une loi, on aura une meilleure réussite en fin de
compte. Je pense que même à l'intérieur, même en accordant du
temps aux prisonniers, c'est de l'intérieur qu'on devrait les inciter
et non pas les obliger.
Les gens qui vont en prison, ce ne sont pas des gens qui respectent
les lois comme un citoyen ordinaire. Parfois, ils ont une petite
révolte à l'intérieur; il suffit de leur dire que c'est obligatoire pour
qu'ils ne veuillent pas le suivre. Je pense qu'il faut continuer, il faut
insister davantage sur les programmes qui existent et leur demander
de suivre ces programmes, pas de façon spontanée, mais de les y
inciter, ne pas faire que ce soit obligatoire. Je pense qu'en bout de
ligne, ce peut être très dangereux de rendre cela obligatoire.
Je conclus en disant que dans le domaine de la Loi sur le système
correctionnel et les mises en liberté, etc., au cours des dernières
semaines, des derniers mois, des dernières années, on a eu toutes
sortes de dossiers. L'actualité a démontré de grandes lacunes dans le
système. Elle nous a également démontré qu'il y a des choses qui
fonctionnent bien.
Le gouvernement d'en face ne semble pas avoir une idée
d'ensemble de ce problème de société que sont les détenus et leur
mise en liberté. On a des députés, ici et là, qui présentent des projets
de loi privés pour modifier la loi. Le gouvernement même,
occasionnellement, apporte des modifications, des amendements à
la loi, mais il va faire cela à la pièce, pour tenter de mettre des
pansements sur les bobos. Ils ne vont pas régler définitivement le
problème.
On a vu des cas très humains dans l'actualité où même le père
d'une jeune fille assassinée par quelqu'un qui était en libération
conditionnelle a pris part au débat en disant: «Le système
correctionnel a certaines lacunes, il est bon à certains égards, mais il
faudrait peut-être impliquer davantage la société.» Loin de
condamner le système, il dit qu'il faudrait l'améliorer. Je fais
référence à l'affaire Bolduc.
8171
Au lieu de modifier cela à la pièce, au lieu de faire de petites
modifications de bouts de chandelle pour faire plaisir à l'électorat,
au lieu de pencher complètement à droite comme les réformistes,
pourquoi le gouvernement d'en face ne se plierait-il pas à la
demande de l'opposition officielle? Depuis plusieurs semaines,
plusieurs mois, on demande que tout ce problème soit examiné de
façon sérieuse par une commission d'enquête ou par une
commission parlementaire qui ferait rapport. On verrait vraiment ce
qui fonctionne, ce qui ne fonctionne pas, ce qu'il faut modifier ou
pas, et non pas faire cela à la pièce.
[Traduction]
M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je
veux rendre hommage à mon collègue de Scarborough-Centre pour
l'intérêt qu'il porte aux collectivités et à la sécurité en milieu
urbain. Ce n'est pas la première fois que le député soulève des
questions très préoccupantes au nom de ses électeurs. C'est un
homme infatigable qui l'a fait à de nombreuses reprises.
Il est important de voir en quoi consiste l'objectif de ce projet de
loi d'initiative parlementaire. Comme on le précise, on veut exiger
des détenus dans les établissements fédéraux qu'ils suivent les
programmes susceptibles de favoriser leur réadaptation et faire
dépendre leur libération conditionnelle de leur réussite à ces
programmes.
Le Service correctionnel du Canada doit investir davantage dans
les programmes et inciter les délinquants, par divers moyens, à
participer aux programmes destinés à modifier leur comportement
criminel.
(1145)
Mon collègue a présenté ce projet de loi à la suite des
observations faites par le vérificateur général. Ce qui l'a
probablement motivé aussi, c'est le fait que, en 1996, sur les 7 481
détenus qui ont profité d'une libération conditionnelle, on a dû en
réincarcérer presque la moitié, 32 p. 100 ayant commis de nouveaux
crimes et dans 68 p. 100 n'ayant pas respecté les conditions de leur
libération conditionnelle. Il y a certes de quoi s'inquiéter.
Par son initiative, mon collègue essaie d'attirer l'attention de la
Chambre et de la population sur un problème qui existe, et il s'agit
peut-être d'une façon d'essayer de le résoudre. Je suis persuadé que
mon collègue n'a pas l'intention de demander qu'on consacre
davantage d'argent à ce problème. Je suis sûr qu'il reconnaît que le
montant de trois millions de dollars et plus consacré chaque année à
la réinsertion sociale des détenus pour s'occuper de plus de 14 400
détenus est une somme importante. Il s'agit de savoir comment
nous dépensons cet argent.
On a mis en place des programmes dans le cadre d'initiatives
prises par le gouvernement. Cependant, il y a encore du chemin à
faire. Les gouvernements provinciaux doivent collaborer en ce qui
concerne la communication des renseignements, la normalisation et
l'accès à l'information.
Une de mes collègues réformistes a essayé de faire croire que le
gouvernement ne faisait rien. Le fait est que nous faisons beaucoup.
La prévention est encore la meilleure solution. Ce que j'essaie de
dire, c'est que, si on se penche sur ce que le gouvernement fait
depuis trois ans, on s'aperçoit que la majeure partie des mesures
législatives qu'il présente portent sur la question de la prévention
dans les collectivités.
Ainsi, il y a le projet de loi sur le contrôle des armes à feu auquel
les membres de l'opposition et les députés réformistes se sont
malheureusement opposés. Cela touche au coeur même de la
question, au fait qu'il faut retirer leurs armes à ceux qui, s'ils
demeurent armés, risquent de commettre des crimes.
Le gouvernement a également apporté des modifications à la Loi
sur les jeunes contrevenants. Il faut l'en féliciter. Il s'est occupé du
cas des jeunes délinquants dans notre société. Le solliciteur général
et le ministre de la Justice ont créé un conseil de prévention du
crime qui obtient d'excellents résultats.
Toute cette question doit être centrée sur la prévention. Je
voudrais citer un exemple pris dans ma circonscription,
Ottawa-Centre, qui illustre comment et où la prévention donne
d'excellents résultats. Je voudrais rendre hommage à la Police
d'Ottawa qui collabore sans relâche avec des groupes
communautaires de ma région et qui a prouvé maintes fois qu'il
était possible de changer la tendance pour que la collectivité soit un
lieu sûr où la vie est agréable. Évidemment, une amélioration est
toujours possible.
Je veux mentionner le nom d'un membre du service de police,
l'inspecteur Susan O'Sullivan qui est déterminée, dévouée,
énergique et remarquable. Elle et ses collègues du service de police
d'Ottawa ont entrepris diverses initiatives importantes, afin
d'établir des centres d'action sociale partout dans la circonscription
et la région d'Ottawa. Le service de police dotent ces centres locaux
avec la collaboration de bénévoles. Cette initiative et bien d'autres
qui ont été lancées par ce corps policier dans ma circonscription ont
donné d'excellents résultats.
Pour le constater, il suffit de parler avec des membres de la
collectivité, par exemple Cheryl Parrot, qui, avec d'autres
bénévoles, s'est attaquée à la prostitution. Ils ont travaillé très fort
et, avec l'aide du service de police d'Ottawa, ils ont littéralement
réussi à éliminer ce problème dans la collectivité. Voilà un excellent
exemple de partenariat entre le secteur public et la collectivité, entre
un organisme sans but lucratif et des bénévoles.
(1150)
D'autres membres de la collectivité ont collaboré avec des
policiers d'Ottawa et, ensemble, ils ont prouvé qu'il est possible de
lutter contre la criminalité et de garantir la sécurité des citoyens.
C'est le cas d'Angelo Peloso et de ses collaborateurs qui ont formé
un autre groupe communautaire et qui ont amélioré la situation en
collaborant avec des policiers.
8172
On ne pourra jamais régler un problème si l'on se contente de le
regarder en espérant qu'il disparaisse. Il nous faut plutôt y consacrer
davantage de ressources, et en fournir davantage aux gens qui
travaillent sur le terrain, et plus spécialement aux agents de police
qui sont chargés de maintenir la paix non seulement à l'échelle de la
ville mais à celle du pays tout entier. Les provinces doivent mettre à
la disposition des forces policières de leurs municipalités les outils
dont elles ont besoin. Elles doivent notamment veiller à ce qu'elles
aient les programmes d'extension de services nécessaires, les
ressources dont elles ont besoin pour travailler avec la communauté.
Ce n'est qu'en travaillant collectivement et en coopération avec
ces groupes et ces organismes que nous pourrons vraiment nous
attaquer au problème. Il est injuste de rejeter la mesure que le
député a proposée à la Chambre en la qualifiant d'initiative
injustifiée. Il faut dire que le gouvernement a adopté depuis
longtemps pour position qu'il faut nous attaquer à la racine du
problème. Nous devons nous assurer d'avoir les mesures
nécessaires en place. Nous devons avoir les programmes de
prévention qui s'imposent. Nous devons collaborer avec les forces
de maintien de l'ordre au niveau local. Nous devons collaborer avec
les provinces.
Le gouvernement s'est employé à le faire. Cela suffit-il? Non. Il
faut continuer de travailler jusqu'à ce qu'il ne se commette plus un
seul crime dans n'importe quel coin de la ville et dans n'importe
quelle partie du pays.
J'ai par ailleurs eu le grand honneur de travailler avec des
groupes communautaires et avec le service de la police d'Ottawa
dans ma circonscription. Nous avons entrepris une expérience qui a
eu d'excellents résultats. Il est important de partager avec les autres
localités de tout le pays et de toute la province. Nous, du secteur
public, pouvons cependant susciter dans nos localités et dans nos
champs d'action respectifs, une sensibilisation au fait que nos
forces de police ont besoin de plus d'outils pour accomplir leur
travail.
Le travail de maintien de la paix est un champ de compétence
provinciale et municipale. Or, le gouvernement fédéral peut quand
même mettre à la disposition des deux autres paliers l'expérience et
la compétence existant au sein de ses divers ministères pour
collaborer avec les gouvernements provinciaux et faciliter la
coopération entre les différents gouvernements. Nous aurons ainsi
une norme nationale en ce qui concerne non seulement le partage de
l'information, mais aussi le partage de la fonction de maintien de la
paix.
Je tiens à féliciter encore une fois mon collègue d'avoir saisi la
Chambre d'une mesure qui aura pour effet de sensibiliser davantage
la population à ces besoins. Je sais qu'il ne s'attend pas à ce que la
mesure qu'il a proposée prenne force de loi. Comme beaucoup
d'orateurs l'ont déjà fait remarquer, le ministère a déjà entrepris la
mise en oeuvre de plusieurs éléments de cette proposition.
Il faut reconnaître qu'il a voulu sensibiliser davantage la
population sur ce point. Je le félicite donc de son initiative et je le
remercie de m'avoir fourni l'occasion de signaler aux députés ce
qui se fait dans ma circonscription.
M. John Finlay (Oxford, Lib.): Monsieur le Président, après les
propos très constructifs de mon collègue, je tiens à appuyer le
député de Scarborough-Centre parce que ce projet de loi, bien qu'il
ne puisse faire l'objet d'un vote, donne une tournure positive au
débat.
Mon collègue d'Ottawa-Centre a signalé qu'un grand nombre des
initiatives du gouvernement dans le domaine de la justice sont axées
sur la prévention et ont été fructueuses.
Je tiens à dire à ma collègue de Surrey-White Rock-South
Langley que ce projet de loi est constructif. Ses observations
semblent supposer qu'il y a une seule manière de traiter avec les
transgresseurs, soit de les enfermer en prison et de jeter la clé. Je ne
pense pas que ce soit le fonds de sa pensée, mais c'est ce que ses
propos laissent entendre. Il est très important de ne pas juger les
autres trop sévèrement, de crainte d'être soi-même jugé. Le projet
de loi de mon collègue présente l'envers de la médaille.
(1155)
Depuis le début de la législature en cours nous avons apporté une
douzaine de modifications au Code criminel. La plupart de ces
projets de loi visaient à rendre les peines plus lourdes, plus sévères
et plus obligatoires pour les délinquants endurcis et pour les crimes
graves. Ainsi, même si le projet de loi sur les armes à feu est
préventif, il a porté à quatre ans la peine pour les crimes commis
avec une arme à jeu. Je n'ai aucune objection. Je suis même en train
de travailler à un projet de loi qui augmenterait les peines pour les
délits d'ordre sexuel sur des enfants.
Le projet de loi ajoute cependant une autre dimension. Pour
reprendre la discussion à partir de l'énoncé de mission de la
Commission des libérations conditionnelles dont le député de
Berthier-Montcalm a parlé, l'objet du système correctionnel
fédéral est de contribuer à la préservation d'une société juste,
pacifique et sûre en facilitant la réadaptation des délinquants et leur
intégration dans leur milieu comme citoyens respectueux des lois au
moyen de programmes dispensés dans les établissements carcéraux
et dans la collectivité.
Certains de ces programmes ont été et demeurent d'avant-garde.
Ce sont des programmes qui portent sur les toxicomanies et la
gestion de l'agressivité, font appel à la spiritualité autochtone et aux
conseils des anciens, visent à améliorer l'instruction et à répondre à
d'autres besoins de ces personnes. Comme les autochtones
représentent un pourcentage important des détenus, deux ou trois de
ces programmes exigent beaucoup plus de travail et de soutien,
notamment en ce qui concerne la spiritualité autochtone et les
conseils des anciens.
Ce projet de loi n'oblige pas les prisonniers à participer à ces
programmes, mais leur tend une carotte. Il accroît leurs chances
d'obtenir une libération conditionnelle. Il laisse entendre que les
détenus qui ne semblent aucunement vouloir s'amender et mener de
meilleures vies devront attendre plus longtemps avant d'être libérés
sous condition.
La mesure législative vise aussi non pas à accroître les dépenses,
mais à dépenser l'argent de façon plus judicieuse, comme le disait
mon collègue en parlant du rapport du vérificateur général, qui nous
signale que certains programmes à intensité moyenne coûtent
2 000 $ par contrevenant, tandis que d'autres programmes similai-
8173
res coûtent 7 000 $ par contrevenant. Il faut donc conclure qu'il
reste encore beaucoup de travail à faire et qu'il faut examiner l'écart
entre les dépenses de ces deux genres de programmes qui offrent
pourtant les mêmes avantages.
On fait sensiblement la même constatation dans le cas des
programmes de formation professionnelle et générale, qui coûtent
beaucoup moins cher par détenu, que les programmes d'emploi
dans les établissements. Ainsi, au lieu de faire fabriquer les plaques
d'immatriculation par les prisonniers, on pourrait confier ce travail
au secteur privé et payer moins cher. Il serait préférable de verser
7 000 $ par année, plutôt que 13 000 $ par année, pour permettre à
ces prisonniers de poursuivre des études qui pourraient leur être
utiles après leur libération conditionnelle.
J'appuie l'initiative de mon collègue et ami, ce projet de loi qui
illustre ce que devrait être notre objectif dans la vie, notre raison
d'être. Nous voulons que tous nos concitoyens soient libres. Nous
voulons que tous nos concitoyens soient utiles. Nous voulons que
tous nos concitoyens contribuent à la société et nous ferons
l'impossible pour qu'il en soit ainsi.
(1200)
M. Rex Crawford (Kent, Lib.): Monsieur le Président, c'est
avec plaisir que je prends la parole ici aujourd'hui au sujet de cette
très importante mesure législative qu'est le projet de loi C-296,
même si c'est avec ironie.
Je tiens d'abord à féliciter mon collègue, le député de
Scarborough-Centre, d'avoir eu l'extraordinaire courage de
présenter le projet de loi. Celui-ci pourrait être considéré comme
quelque peu discutable. Toutefois, les faits sont là. Un délinquant
sur trois qui sont libérés d'établissements correctionnels récidive.
C'est tout simplement inacceptable. À quoi sert-il d'avoir des
prisons si les délinquants ne font qu'y retourner? C'est quelque
chose de coûteux et d'inutile qui ne résout pas le problème de la
criminalité au Canada. Ce projet de loi offre une solution
raisonnable au problème des portes tournantes de notre système
pénitentiaire.
Le Canada se targue d'avoir le meilleur service correctionnel au
monde et celui-ci est effectivement reconnu dans le monde entier. À
propos de notre système pénitentiaire, mes cousins du Michigan
disent toujours que leurs meurtriers viennent se réfugier au Canada
parce que nous nous battons pour les garder ici afin de leur éviter
d'être pendus là-bas. La prison sert effectivement à dissuader les
criminels et à châtier et à réadapter les délinquants.
Conformément à l'article 3 de la Loi sur le système correctionnel
et la mise en liberté sous condition, le système correctionnel vise à
contribuer au maintien d'une société juste, vivant en paix et en
sécurité en aidant au moyen de programmes appropriés dans les
pénitenciers ou dans la collectivité, à la réadaptation des
délinquants et à leur réinsertion sociale à titre de citoyens
respectueux des lois. Je m'inquiète pour les victimes, toutefois,
lorsque ces détenus sont libérés.
Plus précisément, l'article 76 oblige le Service correctionnel à
offrir une gamme de programmes visant à répondre aux besoins des
délinquants et à contribuer à leur réinsertion sociale.
Le Service correctionnel a déjà le mandat d'offrir ces
programmes aux délinquants. Ce projet de loi vise à assurer que les
délinquants profitent de ces programmes avant de réintégrer la
société. Statistique stupéfiante: 70 000 détenus fédéraux ont été
libérés au cours des dix dernières années, la plupart ayant bénéficié
d'une libération conditionnelle anticipée. Toutefois, je le répète, le
tiers de ces délinquants récidivent. Cela nous amène à nous
demander ce que nous pourrions bien faire.
Il y a 25 ans, quand un délinquant participait à un programme de
réhabilitation, il apprenait un métier ou suivait des cours afin de se
réadapter au monde du travail. Aujourd'hui, les programmes sont
axés sur le traitement de problèmes sociaux comme l'alcoolisme ou
la violence sexuelle et tentent de régler les causes sous-jacentes de
nombre de crimes.
Non seulement ces programmes sont mieux ciblés sur les
problèmes des délinquants et les solutions possibles, mais encore ils
sont plus efficaces. Il y a des années, on regroupait tous les détenus
dans une seule catégorie. Aujourd'hui, nous sommes davantage
conscients de la mentalité des criminels et nous pouvons mieux
adapter les programmes pour les rendre plus efficaces.
John Gillis, conseiller spécial de la région de l'Atlantique des
services correctionnels, a dit: «Les plans de traitement des détenus
peuvent être utilisés pour déterminer quel programme convient à un
détenu en particulier, et à quel moment. Cela permet une gestion
plus sélective et plus efficace des cas particuliers et des précieuses
ressources.» En période d'austérité, ces programmes peuvent
réduire le nombre de récidivistes dans nos prisons.
(1205)
J'espère que, plus tard, je pourrai terminer mon discours.
Le vice-président: Je regrette, mais le député ne pourra terminer
son discours parce que cette question a été rayée du Feuilleton
comme article ne pouvant faire l'objet d'un vote.
[Français]
La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés
est maintenant expirée et l'ordre est rayé du Feuilleton.
______________________________________________
8173
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[
Français]
M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe, BQ) propose:
Que la Chambre dénonce l'utilisation de fonds publics dissipés dans des activités de
propagande parrainées par Patrimoine Canada, tels le Bureau d'information du Canada
et l'opération Un million de drapeaux, alors que des compressions sans précédent dans
l'histoire canadienne ont été imposées aux institutions culturelles canadiennes et
québécoises.
8174
-Monsieur le Président, nous abordons la journée de
l'opposition officielle. Comme le dit la motion, nous ferons
aujourd'hui la démonstration très claire et dénoncer, une fois de
plus, la politique du gouvernement fédéral qui consiste
essentiellement, il faut le rappeler, à nier l'existence du peuple
québécois, à nier la culture québécoise et à combattre, sans merci,
par la propagande-nous démontrerons l'ampleur de cette
propagande aujourd'hui-la vitalité nationaliste des Québécoises et
des Québécois et leur volonté de se donner un pays.
Cette motion vise à dénoncer l'utilisation des fonds publics
dissipés dans des activités de propagande de Patrimoine Canada,
tels le Bureau d'information du Canada et l'opération Un million de
drapeaux, sans compter toutes les autres opérations que nous allons
détailler aujourd'hui, alors que des compressions, sans précédent
dans l'histoire canadienne, ont été imposées à toutes les institutions
culturelles canadiennes et québécoises.
Aujourd'hui, 17 février, est le Jour du drapeau. Un jour qui,
peut-être pour l'ensemble des Canadiennes et Canadiens, peut avoir
un sens, une fierté, mais je dois dire du même souffle que le 17
février, Jour du drapeau canadien, est un jour triste pour le Québec.
Je veux rappeler à cette Chambre d'où vient cette détermination
du gouvernement fédéral libéral à utiliser les fonds publics en vue
de combattre, d'une façon très claire et précise, l'aspiration
légitime et démocratique du Québec à sa souveraineté. Je voudrais
rappeler que Pierre Elliott Trudeau, dans un de ses livres, avait
affirmé que pour combattre d'une façon efficace et définitive les
nationalistes québécois, «il fallait leur offrir, leur opposer le
nationalisme canadien et y consacrer tout l'argent nécessaire.»
Aujourd'hui, nous allons nous adresser, non seulement à cette
Chambre, mais aussi aux Québécoises et Québécois et aux
Canadiennes et Canadiens pour leur démontrer que ce
gouvernement est obsédé, depuis cette politique des libéraux de
Pierre Elliott Trudeau, à consacrer tout ce qu'il faut en termes
d'énergie, de ressources et d'argent à les combattre et à combattre le
Québec.
Je rappelle que dans cette institution, on utilise les fonds publics,
et dans ces fonds publics, il y a la part du Québec. Dans ces 30
milliards de dollars d'impôts versés annuellement dans ce pays, on
utilise son propre argent pour le combattre dans son aspiration
démocratique à devenir un pays.
Cette pensée de Trudeau de dépenser sans compter pour
combattre le Québec et sa marche vers la souveraineté, aujourd'hui,
en ce 17 février, Jour du drapeau canadien, force nous est de
constater que la ministre du Patrimoine, avec son opération Un
million de drapeaux, qui coûtera à l'ensemble des contribuables
canadiens et québécois au-delà de 15 millions de dollars, la
poursuit.
(1210)
Aujourd'hui, 17 février, est le Jour du drapeau canadien, mais
c'est un triste jour pour le Québec. Rappelons-nous, il y a un an, cet
événement qui a eu lieu à Hull, où on fêtait le drapeau canadien. Cet
événement s'est noirci, lorsque le premier ministre a pris à la gorge
un manifestant. Ça s'est noirci davantage lorsque, immédiatement,
la vice-première ministre et ministre du Patrimoine a déclaré, à la
suite de ces événements, que ce manifestant était de toute évidence
un séparatiste, alors que tout le monde a compris, dès les heures qui
ont suivi, que ce manifestant revendiquait pour contrer la pauvreté
dans ce pays, et la pauvreté engendrée par ce gouvernement.
Mais tout de suite, la vice-première ministre, championne de la
propagande, mettait sur les ondes, en point de presse, que c'était un
séparatiste qui avait manifesté et que le premier ministre avait pris à
la gorge.
Ce sont des accusations non fondées de la vice-première
ministre. Mais elle était guidée par son état d'esprit, qui est celui de
constamment essayer d'incriminer les souverainistes du Québec,
alors que tout le monde sait, dans ce pays, que l'évolution et la
trajectoire du Québec vers sa souveraineté se fait dans des
conditions démocratiques et dans le respect des règles
démocratiques.
Aujourd'hui, 17 février, est un jour triste pour le Québec, parce
que depuis le rapatriement de la Constitution, en 1982, il faut se
rappeler que tout a été mis en oeuvre, même contre une motion
adoptée à l'Assemblée nationale qui visait à ce qu'on ne rapatrie pas
la Constitution d'une façon unilatérale.
Les libéraux de l'époque, avec Pierre Elliott Trudeau en tête, ont
fait fi de l'institution qui s'appelle l'Assemblée nationale au
Québec et ont rapatrié la Constitution d'une façon unilatérale,
consacrant ainsi, au grand plaisir des libéraux fédéraux, que, pour
une fois dans l'histoire, on venait de sacrer le peuple québécois
dehors. Il n'était plus un peuple fondateur, la culture québécoise
n'existait plus, la culture québécoise, l'essence même du peuple
québécois, à travers ses créateurs, à travers ses artistes, ses
écrivains, ses cinéastes, la propre culture québécoise n'existait plus,
et les libéraux fédéraux, d'un élan, niaient l'existence du peuple
québécois et de sa culture.
Désormais, le peuple québécois devra, dans le Canada anglais,
selon le gouvernement, être une grosse communauté culturelle,
mais dans un Canada anglais. On veut ramener le peuple québécois
à une grosse communauté culturelle dans un Canada anglais.
La culture québécoise est triste aujourd'hui, parce que les critères
politiques de ce gouvernement sont devenus au premier plan, avant
le critère artistique, avant le critère de la création. Aujourd'hui,
cette politique de propagande, qui vise à nier la culture québécoise,
qui vise à nier l'aspiration du Québec à sa souveraineté, est
maintenant clairement établie dans tous les ministères, y compris au
ministère des Affaires extérieures qui, lui, est venu établir la
semaine dernière sa politique de diffusion culturelle à travers le
monde, en autant que les oeuvres artistiques démontrent clairement
qu'elles travaillent pour l'unité nationale du Canada.
Le ministère du Patrimoine, il est clair, a reçu un mandat de
mettre le paquet dans l'identité nationale et canadienne avec comme
mission de combattre l'identité nationale québécoise. Voilà la
mission de Patrimoine Canada, et voilà ce que nous allons
démontrer aujourd'hui, les détournements de fonds à des fins de
propagande. Tous les ministères sont mis à contribution dans cet
exercice, et tout
8175
l'appareil gouvernemental est mis à contribution dans cet exercice
de propagande.
(1215)
Dans cette foulée, c'est un triste jour pour les industries
culturelles, un triste jour pour les créateurs et les artistes, appelés à
être au service de l'unité canadienne s'ils veulent que leur projet
artistique soit diffusé. S'ils veulent que leurs créations aient
audience autant au Canada, au Québec, qu'à l'étranger, il faut
d'abord, maintenant, à la demande de ce gouvernement, les libéraux
fédéraux, qu'ils répondent à un critère essentiel, le critère politique
de faire la promotion de l'unité canadienne au détriment de leurs
propres créations et de leurs propres oeuvres.
On a reproché à ce gouvernement ses intrusions dans les champs
de compétence du Québec, particulièrement en formation de la
main-d'oeuvre, mais aussi dans le domaine de la culture et des
communications. Je rappelle très récemment, en ce qui concerne le
référendum, l'intervention de ce gouvernement qui ne s'est pas
gêné, par la bouche de son premier ministre, et par la bouche de sa
vice-première ministre, pour dire à la presse, aux journalistes, qu'ils
ne faisaient pas bien leur travail dans la couverture référendaire.
Ce gouvernement ne s'est pas gêné pour dire aux journalistes
qu'ils ne couvraient pas le référendum dans le but de favoriser
l'unité nationale. C'est un gouvernement qui est de plus en plus
totalitaire, dans la pensée trudeauiste qui vise essentiellement à
contrôler le contenu, à contrôler les gens qui font leur travail dans la
création artistique, ceux qui nous donnent notre identité. Les
travailleurs de la presse et des communications, on leur reproche de
ne pas être au service de l'unité canadienne.
À cet égard, je rappelle l'extrait paru dans La Presse, du 14
novembre 1995: «Les dénonciations de Radio-Canada découlent de
la conviction de plusieurs ténors libéraux, plusieurs ténors libéraux
fédéraux, y compris, s'il faut en croire les déclarations du
week-end, le premier ministre lui-même, que la radiotélévision
publique a manqué à son devoir pendant la campagne référendaire
et a nui activement à la cause fédéraliste.»
On est rendu, dans ce gouvernement, à vouloir contrôler la
presse, à vouloir dire à la presse ce qu'il faut qu'elle dise pour
l'unité canadienne. Nous n'embarquerons pas dans ce jeu, parce que
tous les Québécois et les Québécoises ont fondé la pratique de leur
démocratie sur des règles de jeu claires, dans lesquelles tous les
acteurs et actrices ont le droit de se prononcer, quelle que soit leur
position ou leur option.
Ce gouvernement, accuse Radio-Canada qui, selon lui, a le
mandat de livrer la conviction et de faire la promotion de l'unité
nationale. Le premier ministre a ajouté: «Ce n'est manifestement
pas une de ses préoccupations; ce soir, j'ai vu autre chose lorsque
j'ai regardé la télévision.» Le premier ministre est préoccupé que
son option soit prise en compte par «sa» Radio-Canada et «sa» CBC
parce que par ses propos, le gouvernement venait déclarer qu'il en
était propriétaire.
Dans cette foulée, les créateurs, les artistes et les industries
culturelles sont appelés à être au service de l'unité canadienne. Ils
sont appelés à être au service de l'idéologie politique du
gouvernement, des convictions et des objectifs politiques du
gouvernement, et non au service de leurs propres créations qui sont
essentielles à notre société.
M. Chrétien a déclaré, le soir du 14 novembre, en marge du
Sommet du Commonwealth qui se tenait à Auckland, en
Nouvelle-Zélande, que «Radio-Canada, qui a le mandat de faire la
promotion de l'unité nationale, ne l'a pas fait dans son rôle».
Tout est dit, lorsque le premier ministre d'un pays accuse la
presse de ne pas travailler pour son option politique. En ce sens, le
gouvernement est logique avec lui-même, il faut le reconnaître, il
est logique avec le passé de Trudeau.
(1220)
Il pousse les critères politiques, qui vont désormais guider tout
l'appareil gouvernemental, tous ces vains investissements. Son
appui à la culture, désormais, sa politique interne et externe, repose
essentiellement sur des critères politiques. On vient de le voir par la
politique qui a été annoncée par le ministre des Affaires étrangères.
Aujourd'hui, je lisais avec beaucoup de tristesse l'article de
Stéphane Baillargeon dans «Le Devoir». Le journaliste écrivait:
«Ce sont des objectifs politiques, et non plus artistiques, qui guident
maintenant le soutien accordé, par le ministère des Affaires
étrangères du Canada, aux artistes canadiens en tournée à l'étranger.
Les demandes de subventions seront dorénavant évaluées sur la
base de leur capacité à promouvoir le respect de la souveraineté
canadienne et de l'unité canadienne et à présenter le Canada comme
un pays bilingue composé de cultures diverses.»
Voilà la nouvelle politique de ce gouvernement: à l'extérieur,
comme à l'intérieur, faire une politique culturelle canadian dans un
pays anglais où il y a de la place pour les autres communautés
culturelles. Donc, ce que ce gouvernement essaie de faire, c'est de
faire du Québec et de la culture québécoise, une culture d'une
communauté culturelle parmi les autres dans ce Canada, dans ce
pays canadian, dans ce Canada, rappelons-le, anglais.
Le ministre du Développement des ressources humaines, quant à
lui, et on l'a entendu dans sa déclaration, appuie l'idée que seul le
Canada a et sauve toujours la culture française et québécoise.
Faut-il rappeler que la situation francophone, partout au Canada, est
dans une situation telle que l'on constate, année après année, avec le
rapport du commissaire aux langues officielles, une assimilation
continuelle. Les francophones au Canada sont constamment en
assimilation, et on va venir nous faire croire, par les déclarations du
ministre du Développement des ressources humaines, que c'est le
Canada qui sauve la francophonie et la culture au Québec. Non! Ce
sont les québécois créateurs et artistes qui sauvent et qui font la
culture au Québec.
Dans les dépenses consacrées en propagande, je voudrais
démontrer, depuis 1994 jusqu'à ce jour, combien ce gouvernement a
dépensé, uniquement en propagande, et, par la suite, vous dire
combien il a coupé partout dans les industries culturelles.
8176
En propagande dans cette période, on a dépensé pas moins de 98
millions de dollars dans des programmes du 30e anniversaire du
drapeau canadien: 1,1 million de dollars pour les panneaux
publicitaires, rappelons-nous les fameux panneaux publicitaires,
600 panneaux publicitaires. Comme par hasard, sur les 600
panneaux publicitaires, 300 sont installés au Québec et 300 autres
partout dans le reste du Canada. Voilà la politique de propagande
ciblée de ce gouvernement.
Le 50e anniversaire de l'ONU: 1,8 million de dollars; Reflets du
patrimoine, La minute du patrimoine: 2,2 millions; Promotion
touristique: 15 millions; Campagne Un million de voix: Fédérations
des communautés francophones: 500 000 $; Commission de la
capitale nationale: 3 millions; Unité canadienne: 4 millions;
Passeports canadiens: 25 000 $; Services gouvernementaux
fédéraux, publicités télévisées: 5 millions; Opération unité: 11
millions; Conseil pour l'unité canadienne: 8,4 millions; Bureau
d'information du Canada: 19,5 millions; Opération Un million de
drapeaux: au-delà de 15 millions; Opération unité: 5 millions;
Parole donnée, parole tenue: 600 000 $; Services compris:
400 000 $; Une affaire de coeur: 550 000 $, un demi-million; et
Attractions Canada, le dernier bébé: 1,5 million, pour un total de 98
millions de dollars.
Près de 100 millions de propagande. Et pendant ce temps,
qu'est-ce qu'on fait dans ce gouvernement? On coupe littéralement
dans les industries culturelles, dont les industries majeures et les
institutions majeures au Canada et au Québec, c'est-à-dire
Radio-Canada, Téléfilm Canada et l'Office national du film.
(1225)
Ce gouvernement, qui met près de 100 millions dans la
propagande, a littéralement coupé, d'une façon draconienne, les
diffuseurs mêmes, ceux qui assurent la diffusion de la culture,
ceux-là qui assurent notre identité nationale, c'est-à-dire les artistes
et les créateurs, ceux qui font notre identité propre.
Ce gouvernement parle des deux côtés de la bouche: d'un côté, il
affirme, dans son livre rouge, que ces institutions sont majeures
pour lui, qu'il va trouver un financement stable et il accuse les
conservateurs d'avoir mis la hache là-dedans. Aussitôt au pouvoir,
les libéraux se tournent de bord et que font-ils? Ils coupent
systématiquement; 4 000 postes ont été coupés à Radio-Canada, 14
millions de dollars, un exercice sans précédent; 20 millions à
l'Office national du film.
En conclusion, nous, de l'opposition officielle, déclarons
aujourd'hui, que ce 17 février 1997, Jour du drapeau canadien, est
une journée triste pour le peuple québécois, triste parce que le
Canada est représenté par un gouvernement libéral qui tient deux
langages, parce que d'une part, il promet de soutenir et de
développer l'essence même de notre identité, c'est-à-dire la culture,
et lorsqu'il arrive au pouvoir, il tranche et élimine
systématiquement tous les outils pour ces institutions culturelles en
coupant les budgets.
Lors des prochaines élections, le Bloc québécois, au Québec,
combattra ce gouvernement qui parle des deux côtés de la bouche.
Les élections permettront de ramener ici, à Ottawa, pour défendre
les intérêts du Québec, tous les députés du Bloc en majorité.
M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président,
c'est une journée très heureuse dans ma vie et dans la vie de tout
Canadien et Canadienne de ce pays. Comme vous le savez, la
majorité des Canadiens et Canadiennes, y compris ceux qui vivent
au Québec et ceux qui vivent à l'extérieur du pays, savent qu'on
habite dans le meilleur pays au monde. Non seulement nous le
savons, mais l'Organisation des Nations Unies, à plusieurs
occasions, a déterminé que le Canada était le meilleur pays au
monde où vivre, travailler et élever une famille.
Je suis encore plus fier d'être un député de ce Parlement, du côté
du gouvernement fédéral, sous la gouverne d'un premier ministre
qui vient de la très belle province de Québec. Ce premier ministre
travaille, non seulement avec les collègues de ce côté-ci de la
Chambre, mais avec la population canadienne afin de s'assurer
qu'on a une fédération flexible, dynamique, qui répond aux besoins
de la population canadienne aujourd'hui et dans l'avenir.
Je ne vois pas pourquoi mon collègue attaque le gouvernement et
son approche de la fédération canadienne et essayant de créer une
division entre Canadiens et Canadiennes du Québec et des autres
provinces et de tout le pays quand, en Europe, la France, l'Italie,
l'Espagne, l'Angleterre, l'Allemagne et tous les pays européens
sont réunis dans une confédération pour établir un système d'unité
européenne afin de s'attaquer aux problèmes économiques et
politiques, non seulement en Europe, mais dans le monde entier.
Mon collègue devrait retenir que dans le monde entier,
maintenant, les peuples se joignent l'un à l'autre, se rapprochent les
uns des autres, et qu'il y a maintenant une unité permettant de
s'attaquer aux questions de pauvreté, de chômage et d'incertitude
qui existent dans certains pays.
Mon collègue sait très bien que le temps est arrivé de s'unir tous
pour travailler afin de s'attaquer aux besoins et aux problèmes de la
population canadienne.
(1230)
Mon collègue n'aide pas à faire progresser ce dossier, quand il
essaie de créer une division, quand il essaie de détourner l'attention,
de faire changer les choses et qu'il ne nous donne pas assez de temps
pour s'attaquer au problème du chômage. Il sait que la priorité des
Québécois et des Québécoises est de voir un gouvernement qui
s'attaque au problème du chômage et un gouvernement qui aide le
développement économique, un gouvernement qui s'intéresse
vraiment à leurs besoins.
Ce gouvernement, y compris le premier ministre, a adopté des
résolutions ici, à la Chambre des communes, pour protéger les
besoins du Québec, y compris la culture, le partage des pouvoirs, la
main-d'oeuvre. On le sait, la question de la culture est provinciale,
ce qui inclut le Québec, qui a le droit de décider de ce qu'il veut
avoir au point de vue de son système d'éducation.
8177
C'est la même chose pour la main-d'oeuvre, l'immigration, la
santé, l'environnement et le transport. Si on regarde tout ce dont une
province a besoin pour vraiment décider de ce qui est le mieux pour
sa population, les provinces, y compris le Québec, ont cette autorité.
Elles sont capables de déterminer la meilleure chose à faire.
Finalement, je veux poser une question à mon collègue. N'est-il
pas d'accord avec le fait que la culture française au Québec, en
Amérique du Nord et partout dans le monde, serait mieux protégée
au sein d'une confédération pancanadienne qu'à l'extérieur de cette
confédération?
M. Leroux (Richmond-Wolfe): Monsieur le Président, je
remercie d'abord mon collègue de son intervention. Je sens
beaucoup, dans ses commentaires, sa conviction profonde. Je pense
que mon collègue défend très bien ce qu'il perçoit. Il défend très
bien la politique gouvernementale libérale. Cependant, nous
sommes à des lieues l'un de l'autre.
Je voudrais lui rappeler un certain nombre de faits développés par
son propre gouvernement, par les propres choix de son
gouvernement. Tout d'abord, il y a la question du modèle européen,
de l'unité de commerce international, du libre-échange dans un lieu
physique. Pourrais-je rappeler à mon collègue que le Québec a été
un artisan déterminé et convaincu du libre-échange? Il a porté le
discours du libre-échange. Et qui était contre le libre-échange? Le
premier ministre et le Parti libéral, votre parti, cher collègue.
Que mon collègue ne me donne pas l'exemple du marché
européen et du marché commun. Au Québec, on a fait cet exercice
très clair d'ouverture des marchés. Le marché nord-sud représente
au-delà de 34 milliards de dollars en échanges commerciaux avec
les États-Unis, et à peu près la même somme avec les autres
provinces canadiennes. Je voudrais rappeler à mon cher collègue
que c'est son parti à lui qui a fait la lutte au libre-échange.
Comme deuxième observation, je voudrais lui rappeler
qu'effectivement, l'Union européenne est une union de pays et
qu'en ce sens, ce que veut le Québec, c'est se donner un pays,
enrichir le continent d'un pays francophone.
Au sein des Amériques, nous avons des cultures importantes et
riches: cultures canadienne anglaise, américaine, espagnole,
portugaise. Nous voulons simplement doter les Amériques d'un
pays francophone et d'une richesse additionnelle. Par surcroît, nous
démontrons notre volonté de partenariat en faisant une offre de
partenariat économique à un partenaire ami que nous avons depuis
longtemps qui s'appelle le Canada.
Cet exemple démontre l'ouverture que nous faisons au Canada
anglais en lui demandant d'être un partenaire, après que le peuple
québécois aura choisi d'être un pays et un peuple, et cette union
viendra dans les ententes.
(1235)
D'autre part, je voudrais rappeler au député ses propres
responsabilités ministérielles. Lorsque ce gouvernement a été élu, il
y avait au-delà d'un million de chômeurs dans ce pays, auquel il fait
référence comme le plus beau pays du monde dans le groupe de pays
du G-7. Quand les libéraux ont été élus, il y avait un million de
chômeurs et ils disaient qu'ils allaient combattre le chômage. Il y
avait aussi au-delà d'un million d'enfants pauvres et les libéraux
dénonçaient cette situation insoutenable. La lutte à la pauvreté,
disaient-ils, nous allons la faire.
Aujourd'hui, que se passe-t-il? Nous allons vers des élections,
nous avons au-delà d'un million de chômeurs, nous avons
maintenant 1,5 million d'enfants pauvres dans ce pays. Par votre
entremise, monsieur le Président, je rappelle au député qui vient de
prendre la parole, pour dire que le Canada est le plus beau pays du
monde, que c'est son gouvernement, par les choix budgétaires qu'il
a faits, qui est responsable de la situation aujourd'hui.
À cet effet, je rappelle que ce gouvernement, au lieu d'investir
dans la création d'emplois et la lutte à la pauvreté, a décidé de piger
cinq milliards de dollars par année dans la caisse
d'assurance-chômage. Cet argent appartient aux employés et aux
employeurs, pas au gouvernement. Année après année, ils ont pigé
dans la poche des gens.
Probablement que demain, le ministre des Finances, en se pétant
les bretelles, viendra nous dire qu'il a atteint ses objectifs de lutte au
déficit. Il les a atteints en prenant l'argent dans la poche du monde
plutôt que de le leur redonner, comme ils étaient en droit de
s'attendre, pour la création d'emplois. Il a provoqué des drames
partout dans la société canadienne et québécoise, il a provoqué des
drames par la pauvreté. Voilà votre bilan et il faut que vous
l'avaliez, parce qu'on vous le rappellera pendant toute la campagne
électorale. On vous rappellera votre bilan et vos belles promesses
du livre rouge faites d'un côté de la bouche et de l'autre, en faisant
le contraire aussitôt élu.
[Traduction]
L'hon. Hedy Fry (secrétaire d'État (Multiculturalisme)
(Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, je prends la
parole à la Chambre aujourd'hui pour parler de la motion de
l'opposition qui vise maintes activités du gouvernement actuel,
activités que le député d'en face vient de qualifier de propagande.
Dans son discours passionné, il a parlé des sommes qu'on aurait dû
dépenser pour lutter contre la pauvreté chez les enfants et pour
répondre à de nombreux autres besoins des Canadiens et qui ont
plutôt servi à des fins de propagande.
De la propagande? Selon le directeur général des élections du
Québec, le référendum a coûté aux contribuables québécois 63,5
millions de dollars. Parlons de ce à quoi aurait pu servir cette
somme. Parlons de propagande. Parlons des cinq millions de dollars
dépensés pour promouvoir les votes préréférendaires. Je ne veux
pas m'engager sur ce terrain, mais, dans mon esprit, il ne fait pas
l'ombre d'un doute que parler de propagande, en l'occurrence,
équivaut à de l'hypocrisie.
Lorsque le gouvernement actuel a été porté au pouvoir en 1993,
nous poursuivions un objectif double. Nous étions d'abord
déterminés à créer des emplois et à favoriser la croissance. Quant à
notre
8178
autre but, il était étroitement lié au premier et consistait à renforcer
l'identité et l'unité canadiennes. La différence entre maintenant et
alors, c'est le progrès remarquable que nous avons accompli dans la
réalisation de ces engagements. Comme en témoignent l'économie
canadienne renforcée, la collaboration dans l'ensemble du Canada,
le nombre d'emplois créés et un fort sentiment d'appartenance au
Canada.
Dans cette démarche importante, nous perpétuerons une tradition
canadienne de longue date, une tradition qui consiste à créer des
liens d'un océan à l'autre, des liens entre des collectivités
canadiennes différentes et dispersées un peu partout dans notre
vaste pays. Des gens de tous les milieux ont une chose en commun,
leur fierté d'être Canadiens.
Les caractéristiques uniques du Canada ont façonné notre destin
et nos intérêts. Ainsi, le vaste territoire canadien, sa population
relativement modeste et dispersée, ses composantes bilingues et
multiculturelles ainsi que notre proximité des États-Unis sont
autant de forces qui, ensemble, ont fait de nous ce que nous
sommes.
Au fil des ans, ces forces ont créé en nous le besoin impérieux
d'entretenir des liens, malgré les vastes distances, les
caractéristiques géographiques de notre pays ainsi que les
différences culturelles et linguistiques à surmonter. Les Canadiens
ont réagi à ce besoin et c'est pourquoi le Canada s'est taillé une
bonne place dans le domaine des communications sur la scène
mondiale.
(1240)
Très tôt dans notre histoire, ce besoin d'établir des liens s'est
manifesté dans les transports, notamment les voies navigables dont
se sont servis les premières nations et les coureurs des bois, le
chemin de fer qui relie l'Atlantique au Pacifique et, plus tard, la
Transcanadienne qui traverse tout le pays. Plus récemment, il y a eu
les réseaux perfectionnés de téléphone, de câblodistribution et de
radiodiffusion et encore plus récemment, le Canada a été le premier
pays du monde à se brancher à l'autoroute de l'information et à
l'Internet.
Pour les Canadiens, le besoin d'établir des liens atteint son
sommet dans les liens que nous entretenons entre nous, individus
d'un même peuple, dans nos coeurs et nos esprits, dans le sentiment
partagé que nous éprouvons pour nos valeurs communes qui ont fait
de nous une grande nation. En tant que gouvernement, nous
reconnaissons que, en dernier ressort, c'est ce qui gardera le Canada
uni et fort et lui permettra de croître: nous partageons un sentiment
pour notre identité canadienne et la fierté d'appartenir au pays qui a
été déclaré pour la quatrième année consécutive, le meilleur pays où
vivre.
Nous reconnaissons que la culture occupe une place unique dans
l'identité canadienne. La culture canadienne étaie notre identité et
notre économie. Nous savons qu'un secteur culturel canadien sain
et en pleine croissance est l'un des outils les plus puissants et un des
meilleurs moyens pour promouvoir l'unité et l'emploi. Nous
reconnaissons que l'identité culturelle canadienne est au coeur de
notre destin et à la base de notre force comme pays et comme peuple
uni, mais diversifié.
Que l'on songe seulement à l'impact économique du secteur
culturel du Canada. En 1993-1994, la contribution directe et
indirecte de l'ensemble du secteur culturel à l'économie canadienne
a été de 42,8 milliards de dollars. Ça représente 6,9 p. 100 du
produit intérieur brut, 1,2 million d'emplois et 9,3 p. 100 de la
population active. C'est plus que l'industrie du bâtiment, plus que
les secteurs des transports ou de l'agriculture. C'est pourquoi le
gouvernement du Canada a pris des mesures en vue de renforcer
l'identité et la culture canadiennes. Ces initiatives incluent le
Bureau d'information du Canada et le projet «Un million de
drapeaux», mais ne se limitent pas à cela.
Le fait que certains députés considèrent ces activités importantes
pour le renforcement de l'unité et de la culture canadiennes comme
de la propagande en dit plus long sur la faiblesse de leur engagement
à l'égard du Canada que sur le travail de ce gouvernement.
Néanmoins, pour répondre à la motion du député de
Richmond-Wolfe, je tiens à souligner les réalisations de ce
gouvernement, les initiatives qu'il a mises en place pour soutenir
l'identité canadienne et renforcer l'unité canadienne tout en
améliorant l'économie et en créant des emplois et des débouchés
pour les Canadiens. Ces éléments sont inséparables.
Il y a deux jours à peine, le 15 février, les Canadiens célébraient
le 32e anniversaire de notre drapeau. Le drapeau rouge et blanc à la
feuille d'érable est connu partout au monde pour le très grand pays
qu'il représente. Vendredi, nous avons, dans ma ville à Vancouver,
défilé avec le plus grand drapeau canadien du monde. Des centaines
de gens tenant les bords du drapeau ont défilé sous la pluie dans les
rues de Vancouver pour manifester leur fierté à l'égard de notre
pays. Ce gouvernement s'est engagé à rehausser la fierté à l'égard
du Canada et à promouvoir le sentiment d'appartenance et des
valeurs communes.
C'est un symbole que les Canadiens, où qu'ils aillent dans le
monde, portent sur leur manche, sur leur coeur, sur leur sac à dos.
En fait, j'ai appris de bonne source qu'un jeune qui voyage en
Europe peut payer jusqu'à 200 $, au marché noir, pour un petit
drapeau canadien. Ce sont des jeunes qui ne sont pas Canadiens qui
les achètent, pour les coudre sur leur manche ou leur sac à dos, afin
que les gens croient qu'ils le sont. Ils veulent afficher ce
merveilleux drapeau rouge et blanc à la feuille d'érable.
En tant que gouvernement, nous reconnaissons notre
responsabilité de stimuler la fierté et le sens de l'appartenance
parmi les Canadiens, en éveillant la conscience de nos symboles, de
nos traditions et de nos réalisations. Ce drapeau est reconnu partout
dans le monde, et pas seulement parce que d'autres personnes
veulent le porter. Mais on peut quand même se demander pourquoi
les gens veulent le porter. C'est à cause des valeurs qu'il représente.
Il représente la liberté, la démocratie, le respect, la tolérance, la
compassion et la compréhension. Il représente une nation qui a
appris à trouver des solutions pacifiques aux conflits, d'une nation
qui contribue à maintenir la paix dans le monde.
8179
(1245)
Voilà pourquoi les gens veulent porter notre drapeau. Il
symbolise la fierté et la citoyenneté canadiennes, de même que
toutes les qualités qui font de notre pays un endroit où il fait si bon
vivre.
Le défi du million de drapeaux aide les Canadiens à porter haut
leurs couleurs non seulement à l'étranger, mais ici, chez eux. Il
importe d'afficher notre drapeau avec fierté à l'étranger, mais il faut
aussi savoir célébrer son drapeau chez soi, dans son propre pays. Le
programme a été un grand succès. Il y a maintenant plus de
drapeaux qui flottent sur le Canada que jamais auparavant dans
toute notre histoire. Cela témoigne de l'ampleur de la fierté des
Canadiens à l'égard de leur pays. C'est émouvant de voir les
Canadiens hisser ou agiter leur drapeau avec orgueil. Ils n'ont
jamais eu une meilleure occasion d'ouvrir leurs coeurs, de montrer
leur fierté, de manifester toute l'affection qu'ils portent à ce
magnifique pays et à l'illustre feuille d'érable rouge.
Comme les Canadiens se sont montrés de plus en plus fiers de
leur drapeau, ils affirment maintenant qu'ils veulent en savoir plus
au sujet de leur pays et des gens qui habitent ce vaste territoire. J'ai
remarqué que le besoin de communiquer est une tradition bien
ancrée, sinon une deuxième nature, chez les Canadiens.
La mission du Bureau d'information du Canada est de faciliter le
processus est créant des liens entre les Canadiens d'un océan à
l'autre, d'une côte à l'autre, par-delà les montagnes et les prairies.
Lorsqu'on parcourt le pays, on se rend compte à quel point on se
connaît les uns les autres ou pas. Les qualités qui nous caractérisent
nous différencient aussi.
Le BIC offre des renseignements à jour et exacts sur l'évolution
de la fédération canadienne, sur l'histoire du Canada, et sur le rôle
que le gouvernement joue dans l'édification de la nation, son
objectif premier. Car oui, c'est ce que nous faisons, nous édifions
une nation. Pour ce faire, le BIC donne un coup de main à tous les
Canadiens qui veulent en savoir davantage. Nous travaillons à la
mise en place de partenariats avec les Canadiens et entre ces
derniers.
Je trouve difficile à comprendre comment un député fédéral
puisse critiquer un mécanisme ayant pour objet de faciliter la
circulation et la mise en commun de renseignements exacts et précis
sur la Canada, et ce dans le but de promouvoir le Canada tout entier,
l'identité canadienne dans son ensemble, et la compréhension
mutuelle entre les différents peuples qui forment ce pays.
Le gouvernement est profondément et passionnément fier de son
initiative visant à promouvoir la richesse du Canada, sa diversité,
son patrimoine et son histoire aux multiples visages. Que peut-on
faire de mieux pour et avec les Canadiens que de les informer sur
leur pays, sur ses différentes régions, sur ses différents peuples?
Nous sommes fiers du travail du BIC. J'aimerais maintenant
parler de certaines autres initiatives gouvernementales que nous
avons prises pour renforcer l'identité et l'unité canadiennes tout en
améliorant l'économie et en créant des emplois pour les Canadiens.
Depuis quatre ans, le gouvernement canadien travaille fort pour
faire en sorte que le système de radiodiffusion canadien demeure le
meilleur au monde.
[Français]
La radiodiffusion est l'un des outils les plus puissants pour
favoriser l'unité nationale, un outil d'union économique et d'union
sociale, du respect des responsabilités individuelles et collectives
qu'on utilise pour forger notre identité et assurer notre succès sur la
scène internationale.
[Traduction]
Les diffuseurs du Canada nous donnent une image de
nous-mêmes, nous permettent de nous exprimer, nous donnent une
fenêtre sur nos voisins, qu'ils soient à l'autre bout de la ville ou à
l'autre bout du pays. Je vais vous donner quelques faits
fondamentaux sur les conséquences économiques de la
radiotélédiffusion canadienne.
L'industrie de production cinématographique et télévisuelle
représente 2,7 milliards d'activité, ce qui comprend 800 millions en
recettes de production. Aujourd'hui, il y a plus de 700 entreprises de
production, grandes et petites, qui réalisent des bénéfices de plus de
60 millions, qui fournissent 72 000 emplois et qui nous donnent un
sens d'identité. C'est un secteur qui vaut la peine d'être encouragé
et appuyé, tant d'un point de vue économique que dans une
perspective culturelle ou pour les emplois créés. C'est ce que nous
faisons.
(1250)
En réponse au rapport du comité d'examen du mandat, présidé
par M. Pierre Juneau, la ministre du Patrimoine canadien a annoncé
en septembre dernier la création du Fonds de production
d'émissions pour la télévision et la câblodistribution. Le rapport
demande un contenu canadien plus distinct en cette période de
diversification du choix des spectateurs.
Ce fonds de 200 millions par année répond à ces besoins en
assurant une plus grande présence canadienne sur les écrans de
télévision.
Il résulte d'un partenariat entre le fonds de production pour la
câblodistribution du secteur privé et les programmes de production
télévisuelle de Téléfilm Canada. La réaction à la création du fonds a
été bonne, en particulier de la part des diffuseurs privés du Canada.
Ils savent par expérience combien il est difficile de financer des
programmes canadiens de qualité.
[Français]
Il en coûte environ un million de dollars pour produire une
dramatique canadienne d'une heure.
[Traduction]
C'est ce que ça prend pour produire une heure de radiodiffusion
au Canada. Si nous voulons qu'on nous prenne au sérieux quand
nous nous déclarons décidés à promouvoir l'identité canadienne
dans le domaine de la radiodiffusion, il nous faut y mettre le prix. Le
8180
fonds destiné à la radiodiffusion et à la production, qui s'élève à 200
millions de dollars, sert précisément à cette fin.
Il a remporté un franc succès. Jusqu'ici 140 projets ont bénéficié
d'un budget total de 269 millions de dollars, dont 69 millions de
dollars émargeant au Fonds de production en télévision et en
câblodistribution. Voilà pour les résultats d'un programme qui n'a
pourtant été lancé qu'il y a quelques mois.
Nous estimons que ce fonds de production, un investissement
annuel de 200 millions de dollars, va générer plus de 700 millions
de dollars en termes de production canadienne. Cela se traduira par
la création de 10 000 nouveaux emplois dans le secteur de la
radiodiffusion, qui procure déjà du travail à plus de 60 000
Canadiens. Cela représente une augmentation annuelle de 14 p. 100.
Et que dire maintenant de la radio? J'étais une fan de la radio
canadienne même avant que je n'habite le Canada. Aujourd'hui
j'écoute la radio canadienne d'un océan à l'autre. Pendant près de la
moitié de l'histoire de ce pays, la radio a été la principale source de
découverte et d'expression des Canadiens entre eux. C'est en
quelque sorte une réunion publique électronique qui se tient 24
heures sur 24 et à laquelle peuvent participer 99 p. 100 des
Canadiens. Le Canadien moyen passe 20 heures par semaine à
écouter la radio et, la plupart du temps, il est à l'écoute de stations
radiophoniques exploitées par des Canadiens. Et parmi elles il faut
compter, bien sûr, celles appartenant au réseau de la radio publique,
la Société Radio-Canada.
La SRC est un tout dynamique. Elle rassemble tous ceux qui
habitent ce grand pays. Le gouvernement est bien décidé à faire en
sorte que la voix unique de la radio nationale continue de se faire
entendre d'un bout à l'autre du pays, et ce, dans les deux langues
officielles.
C'est pourquoi une fois de plus, la semaine dernière, la ministre
du Patrimoine canadien a pris des mesures pour aider la radio
publique de deux façons. Tout d'abord, la ministre a annoncé un
accroissement de 10 millions de dollars des crédits annuels pour
financer les services en anglais et en français de la radio de la
Société Radio-Canada à compter du 1er avril 1997.
La ministre a également annoncé que le gouvernement
garantissait un financement stable à la Société Radio-Canada
pendant cinq ans à partir du 1er avril 1998. C'est une bonne nouvelle
pour la radio et pour la culture canadienne.
Ce que je dis, c'est que, en fait, soutenir l'identité du Canada, son
patrimoine et sa culture ne se résume pas à une chose. Il ne s'agit
pas simplement de millions de drapeaux ou de BIC. Il n'est pas
question seulement de l'industrie cinématographique canadienne,
mais également de la télévision canadienne, de la radio canadienne
et de l'édition canadienne. La part de marché des livres d'auteurs
canadiens est passée de 5 p. 100 à 25 p. 100 depuis 1970. Les
exportations de livres canadiens ont augmenté de 151 p. 100 au
cours des cinq dernières années.
Au Canada, nous avons une littérature dont nous pouvons être
fiers. Nous avons des écrivains créatifs dont le talent est reconnu
partout dans le monde. Nous avons des éditeurs qui veulent
s'assurer que les auteurs canadiens parviennent à transmettre leur
message. Nous reconnaissons l'excellence constante du Canada
dans la littérature de langues anglaise et française et dans l'édition
de livres. En tant que gouvernement, nous sommes conscients du
fait qu'il faut relever les très grands défis et faire face aux énormes
changements auxquels sont confrontés les auteurs, les éditeurs et les
distributeurs de livres.
Nous savons que la conjoncture économique, la nécessité de
réduire les déficits gouvernementaux, le changement technologique
et l'évolution du marché sont tous des facteurs propres à menacer le
secteur canadien de l'édition. Face à ces défis, à court et à long
termes, nous prenons des mesures pour veiller à ce que les éditeurs
profitent d'une situation financière plus stable et puissent continuer
de contribuer à la vitalité de notre secteur culturel.
(1255)
Encore une fois, c'est la raison pour laquelle la ministre du
Patrimoine canadien a récemment injecté 5 millions de dollars dans
le Programme d'aide au développement de l'industrie de l'édition.
Un autre aspect dont nous devons traiter dans cette constante
saga de l'édition, c'est la voix de l'industrie canadienne des revues,
qui se heurte à de nombreux obstacles. Nous travaillons avec
acharnement pour défendre vigoureusement la position du Canada
au sein de l'OMC.
Beaucoup de changements se sont produits l'année dernière. Le
projet de loi C-32, Loi sur le droit d'auteur, qui marque un pas
important vers la mise à jour des droits des créateurs, améliorera
considérablement le statut du secteur culturel.
Ce projet de loi a vu le jour parce qu'on a consulté les Canadiens
de toutes les régions et écouté ce qu'ils avaient à dire. Il a apporté
équité et intégrité, valeurs auxquelles adhèrent les Canadiens. Il met
à jour la Loi sur le droit d'auteur, qui fait partie intégrante du
programme de création d'emplois et de croissance, auquel nous
accordons la priorité.
Le secteur culturel du Canada est dynamique et fort prometteur.
Le gouvernement du Canada a pour rôle de soutenir la culture du
Canada avec tous les moyens et toutes les innombrables stratégies
dont il dispose.
Dans l'industrie de l'enregistrement sonore, le secteur de la
musique est complexe, mais nous avons pris des mesures pour
soutenir sa croissance. La ministre a pris cette décision en réponse à
une recommandation formulée en mars 1996 par le Groupe de
travail sur l'avenir de l'industrie canadienne de la musique, pour
que les niveaux de financement du programme d'enregistrement
sonore de son ministère soient augmentés au cours du prochain
exercice financier.
Le gouvernement est déterminé à continuer de répondre à toutes
les recommandations faites dans le secteur de l'enregistrement
sonore au Canada. L'argent que nous y consacrerons constitue un
investissement dans nos industries culturelles. Nos musées sont
bien connus. Ils représentent des éléments importants de notre
identité en tant que Canadiens.
8181
Nous devons soutenir et valoriser la culture, qui étaye l'identité
canadienne et renforce notre économie. Pour soutenir la culture de
notre pays, nous devons en soutenir l'âme.
À l'approche du prochain millénaire, nous aurions avantage à
employer tous les moyens à notre disposition pour atteindre cet
objectif. Nous allons recourir aux partenariats. Comme le secteur
culturel rapporte 30 milliards de dollars à l'économie canadienne,
cela représente près. . .
Le vice-président: Je regrette, mais le temps de la secrétaire
d'État est écoulé. Nous passons aux questions et aux observations.
[Français]
M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le
Président, j'aimerais féliciter mon collègue de Richmond-Wolfe
qui a déposé une motion, ce matin. J'aimerais en citer un extrait, qui
se lit comme suit:
Que la Chambre dénonce l'utilisation de fonds publics dissipés dans des activités
de propagande parrainées par Patrimoine Canada, tels le Bureau d'information du
Canada et l'opération Un million de drapeaux. . .
Lorsque j'étais étudiant à l'école secondaire, je me rappellerai
toujours de mes enseignants, entre autres, d'un professeur d'histoire
qui avait l'habitude de répéter que la liberté ne se quémande pas, ça
se prend. Et une autre phrase qui était célèbre dans sa bouche était
celle-ci: L'amour ne s'achète pas, il se gagne. Il faut le conserver,
travailler pour.
L'honorable députée de Vancouver-Centre pourrait-elle
m'expliquer si, dans le vaste monde, il y a d'autres pays où on tente,
par tous les moyens, d'acheter la ferveur nationaliste de ses
commettants, de son peuple?
Lorsque je rends visite à ma parenté aux États-Unis, lorsqu'on va
voir des matchs sportifs, lorsque vient le temps de chanter l'hymne
national, mes neveux, qui sont pourtant Canadiens et qui vivent aux
États-Unis depuis plusieurs années, aiment ce pays d'adoption. Ils
en sont fiers, parce que là-bas, on respecte tout le monde.
(1300)
Ce n'est pas la même chose ici, malheureusement. Dès le début
de cette union, en 1841, je le rappellerais à ma collègue de
Vancouver-Centre, lorsqu'on a réuni le Bas et le Haut-Canada, non
seulement on a fusionné les deux communautés, mais on a
également additionné les deux dettes: le Québec qui était très peu
endetté et très peu développé, avec le Haut-Canada, l'Ontario, qui
était endetté 12 fois plus, mais fortement développé en structures,
en ports de mer, en chemin de fer, en routes, on a additionné les deux
dettes et on a divisé par deux.
Dès le début, l'équité, l'égalité entre les deux peuples fondateurs,
on l'a foulée aux pieds. Les Québécois et les Québécoises ont été
presque constamment négligés dans cette fédération.
On n'a qu'à regarder le développement industriel de
l'automobile: on retrouve au Québec une seule usine de montage
d'automobiles à Sainte-Thérèse, et on en compte par dizaines en
Ontario. Comment se fait-il? C'est le fruit du hasard, vous allez me
dire? Non. La fierté pour son pays, ça ne s'achète pas à coup de
drapeaux.
J'écoutais sur les ondes Robert Gillet, qui est devenu Bob
Sweater, qui a téléphoné justement au numéro 1-800 pour obtenir
des drapeaux gratuitement. Il en avait commandé une quantité
industrielle pour pavoiser tous les chalets le long du fleuve
Saint-Laurent. Vous êtes tombés dans le panneau avec Bob Sweater.
Vous êtes devenus la risée des Québécois et des Québécoises avec
votre million de drapeaux.
Non, vous ne nous achèterez pas en donnant des drapeaux,
madame la députée de Vancouver-Centre. L'amour de sa conjointe,
ça ne s'achète pas, et l'amour pour son pays, ça ne s'achète pas.
Nous, les Québécois, notre pays c'est le Québec, et quand bien
même vous nous donneriez deux, trois ou quatre millions de
drapeaux, notre pays sera toujours le Québec.
[Traduction]
Mme Fry: Monsieur le Président, je dois répliquer encore une
fois au morceau de propagande qu'on vient de nous servir.
Pour ce qui est d'acheter la liberté, je reconnais avec le député
qu'on ne peut acheter la liberté. Il faut cependant nous demander
s'il ne faut pas considérer sur le même pied le référendum
québécois qui a coûté 63,5 millions de dollars aux Québécois, les
consultations publiques pré-référendaires qui ont coûté 5 millions
de dollars au gouvernement du Québec, l'affectation de 2 millions
de dollars par le cabinet du premier ministre au Conseil de la
souveraineté du Québec et la signature d'un contrat de 1,2 million
de dollars par le ministère des Affaires internationales avec la firme
Marketel pour une campagne de publicité. Je me demande si ces
deux ensembles de dépenses ne sont pas comparables. Cella ne
revient-il pas au même? S'agit-il en l'occurrence d'acheter la fierté,
d'acheter la liberté?
À propos du Bureau d'information du Canada, que l'on présente
comme un instrument de propagande, il faut savoir que des bureaux
similaires existent dans des pays comme la Belgique, le
Royaume-Uni, l'Allemagne, la France, les Pays-Bas et le
Danemark.
La campagne du million de drapeaux est la plus populaire jamais
montée dans l'histoire du pays. Il est intéressant d'apprendre que
des gens ont obtenu des drapeaux dans le cadre de cette campagne
pour les faire flotter sur leur chalet par plaisanterie. Je me
contenterai de dire qu'aucun pays du monde ne considère l'unifolié,
avec ses deux bandes rouges de chaque côté, notre drapeau rouge et
blanc, comme une plaisanterie. On le considère comme un fier
symbole d'un pays qui passe aux yeux du monde pour un modèle de
paix, d'humanité, de justice et de compassion.
(1305)
Ce n'est pas par plaisanterie que l'on fait flotter des drapeaux sur
sa maison, mais pour manifester sa fierté à l'égard de son pays, peu
importe ce que d'autres peuvent en penser.
M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, le
débat d'aujourd'hui est plutôt intéressant.
8182
Je pense, après y avoir bien réfléchi, que la ministre du
Patrimoine est une vraie catastrophe. La ministre se perçoit comme
une ministre de l'unité, mais elle n'arrive même pas à faire l'unité à
l'intérieur du Cabinet au sujet des dossiers de son portefeuille.
Par exemple, le ministre de la Défense nationale appuie la
position réformiste qui consiste à maintenir le financement de la
radio de la SRC, de Newsworld et de RDI et à privatiser la télévision
de la SRC et le réseau FM. Il s'oppose clairement à elle dans ce
dossier.
Le ministre de l'Industrie et son ministère sont furieux, et on le
comprend, parce que l'on a apporté des amendements à la dernière
minute au projet de loi C-32 qui modifie la Loi sur le droit d'auteur.
Cette intervention a rendu impossible l'élaboration d'une loi
sérieuse et équilibrée sur le droit d'auteur. Après avoir fait dérailler
le processus au comité, elle a proposé un salmigondis
d'amendements incohérents qui créeront un problème de taille au
lieu de résoudre le conflit.
Le ministre du Commerce international s'arrache les cheveux
lorsqu'elle fait des affirmations farfelues sur nos exportations
culturelles, qui totaliseraient 1,4 milliard de dollars par année, car
elle compromet les relations commerciales entre le Canada et les
États-Unis. Les sorties excessives et insensées de la ministre au
sujet de la culture canadienne sèment des inquiétudes au sujet des
exportations canadiennes, qui sont de un milliard par jour.
J'ai sous les yeux une lettre que le ministre des Transports a
écrite le 21 novembre. À noter que j'ai aussi des statistiques du
ministère disant que, au 18 novembre, 2 237 drapeaux avaient été
envoyés dans sa circonscription, alors que la moyenne provinciale
était de 2 500. Dans cette lettre du 21 novembre, donc, trois jours
après la publication de ces statistiques, il a pris grand soin de dire
que la livraison des drapeaux semblait avoir été retardée. En fait, il
voulait pouvoir faire l'observation suivante.
Je cite la lettre du ministre des Transports au sujet du programme
de distribution de drapeaux. Voici ce qu'il dit: «Je vous informe que,
dans ma circonscription, tous les drapeaux devant être distribués le
sont sous la signature et au moyen du privilège postal de ma
collègue, la ministre du Patrimoine canadien, qui est responsable de
ce programme, ou comme vous en conviendrez. Je ne crois pas qu'il
soit convenable que moi ou mon personnel nous en chargions
directement.» De toute évidence, le ministre des Transports tenait à
se distancier de toute la futilité qui caractérise la question dont nous
sommes saisis aujourd'hui et qui est le fait de la ministre du
Patrimoine.
Son programme de distribution de drapeaux, au coût faramineux
de 15,5 millions de dollars, appuie mon argument voulant qu'elle
soit un élément imprévisible dangereux, un désastre ambulant pour
ce ministère. Malheureusement, elle a prouvé involontairement
qu'il y a deux solitudes au Canada et ce n'est pas le faux patriotisme
qui consiste à agiter un drapeau qui comblera l'écart entre les deux.
J'ai ici les statistiques sur le nombre des drapeaux qui ont été
commandés dans chaque circonscription d'un bout à l'autre du
Canada. Il faut se demander pourquoi ces statistiques sont
présentées selon les circonscriptions par le ministère du Patrimoine
canadien. Il doit y avoir une raison. Voyons voir.
Certains ignorent peut-être que les drapeaux commandés dans les
circonscriptions des libéraux sont envoyés par l'entremise des
bureaux des députés. C'est vrai. On a utilisé les privilèges postaux
des députés. Bien sûr, ils ont ainsi une liste commode des personnes
qui ont commandé des drapeaux, liste qui devrait se révéler fort
utile au cours de la prochaine campagne électorale. Au cours d'un
échange avec moi à la Chambre, la ministre du Patrimoine a dit: «Le
drapeau n'est pas libéral, mais bien canadien.»
Voyons ce qu'il en est, nous aurons ainsi la preuve de l'hypocrisie
de sa position. Quelque 2 000 drapeaux par circonscription ont été
commandés partout au Canada, sauf au Québec. Toutefois, dans
certaines circonscriptions, les électeurs ont commandé un nombre
nettement plus élevé de drapeaux. Quel est le point commun entre
ces circonscriptions? Elles sont représentées par des députés
libéraux. À mon avis, on a demandé à ces députés de faire en sorte
qu'un certain nombre de drapeaux soient commandés pour que la
ministre atteigne son objectif d'un million de drapeaux.
(1310)
Par exemple, 8 000 drapeaux sont allés à la circonscription du
ministre des Pêches, 8 000 à l'ancienne circonscription de Brian
Tobin, 6 406 à la circonscription du ministre de la Francophonie et
8 440 à celle de Lanark-Carleton. Par contre, et cela montre à quel
point on a poussé ces députés à faire la promotion de ce programme,
la propre circonscription de la ministre du Patrimoine n'a
commandé que 2 847 drapeaux.
C'est au Québec que les nombres sont vraiment révélateurs.
Cette province représentant 25 p. 100 de la population canadienne
ne compte que pour 11 p. 100 des drapeaux commandés. Les
circonscriptions québécoises n'ont commandé, en moyenne, que
400 drapeaux. Voici le nombre de drapeaux commandés par les
circonscriptions de députés libéraux du Québec par rapport à la
moyenne de 400 drapeaux seulement par circonscription
québécoise: Hull-Aylmer, 2 944; Pierrefonds, 3 075,;
Gatineau-La Lièvre, 3 338; Gatineau, 3 000. Cela montre
clairement que les députés libéraux du Québec s'efforçaient de
distribuer autant de drapeaux canadiens que possible dans une vaine
tentative pour faire grimper les statistiques au Québec.
Combien tout cela a-t-il coûté et à quel point cela a-t-il été
planifié? La ministre a dit très clairement au départ que, compte non
tenu des dons, le programme coûterait 6 millions de dollars. Son
attaché de presse, Duncan Dee, a confirmé que son coût se situerait
entre 6 et 7 millions de dollars. Voici que la ministre elle-même
estime que ce programme coûte 15,5 millions de dollars aux
contribuables canadiens. D'après elle, elle nous a fait épargner 8
millions de dollars puisque, selon une folle conjecture orchestrée
qui a circulé l'été dernier, le programme allait coûter 23 millions de
dollars.
Bref, d'après la ministre, le programme annoncé le 14 février
1996 allait stimuler le patriotisme et renforcer l'unité canadienne et
serait financé au moyen de dons. Nous avons plutôt eu droit à un
programme qui a eu bien peu d'impact au Québec et qui a coûté à
tous les Canadiens 15,5 millions de dollars. N'oubliez pas que la
ministre avait dit, à l'origine, que le programme coûterait 6 millions
de dollars. Elle se réjouit aujourd'hui parce qu'elle a dépensé
8183
8 millions de dollars de moins que la folle conjecture qui avait été
établie; elle n'a dépensé que 15,5 millions de dollars et n'a pas
réussi à utiliser tous les fonds prévus au budget. Espérons seulement
que le premier ministre n'ait jamais l'idée de la nommer ministre
des Finances.
Ce budget comprend un autre petit bijou de contrat pour
l'ex-directeur de campagne de la ministre, aujourd'hui associé
principal à la firme Thornley Fallis, Inc., qui s'en tire assez bien.
Depuis que la bienfaitrice de Thornley a été nommée ministre de
Patrimoine Canada, il semble que celui-ci ait décroché cinq contrats
du gouvernement libéral.
La ministre prétend avoir atteint son objectif et distribué un
million de drapeaux. Comment s'y est-elle prise? Je le répète, avec
l'aide de ses collègues libéraux. J'ai reçu des appels et des lettres de
nombreux Canadiens qui n'ont jamais commandé les drapeaux
qu'ils ont reçus. Dans bien des cas, ils ont reçu deux, trois et même
quatre drapeaux. Un journaliste du quotidien Le Devoir de Montréal
a affirmé dans un de ses reportages que son bureau a reçu sept
drapeaux qu'il n'a jamais demandés ni commandés. Le journaliste
s'est dépêché à enfouir les drapeaux dans un fond de tiroir. Quel
effet ces drapeaux ont-ils produit au journal Le Devoir? Une source
anonyme du cabinet de la ministre m'a contacté en affirmant que ses
collègues et lui avaient reçu l'ordre d'inventer des noms et des
adresses afin d'expédier des drapeaux et de permettre à la ministre
d'atteindre son objectif.
Les députés ont-ils aperçu des tas de drapeaux battant au vent au
cours de la fin de semaine, ce qui aurait illustré le succès
retentissant de ce programme? Quelle est l'ampleur du succès
remporté? Des étudiants d'Halifax qui ont vu le gouvernement
supprimer 4 milliards de dollars du TCSPS, transfert qui comprend
le financement au titre de l'enseignement postsecondaire, ont
dénoncé cette dépense inutile en commandant 750 drapeaux gratuits
qu'ils ont fait flotter de leurs fenêtres en guise de protestation. C'est
la plus grande manifestation de drapeaux dont nous avons a été
témoins ce week-end.
Ce projet de la ministre est aussi insensé que le Bureau
d'information du Canada qui, lorsqu'on en a annoncé la création, ne
devait nous coûter que 20 millions de dollars. Si les mêmes
méthodes de calcul ont été utilisées, on peut supposer qu'il nous
faudra débourser bien plus à la fin du mandat du gouvernement
actuel. Qu'obtenons-nous pour cela? Pas même un drapeau gratuit.
Je rappelle à la Chambre que ce bureau n'a pas de comptes à
rendre au Parlement. Il n'est pas assujetti aux dispositions sur
l'accès à l'information, car un décret du Cabinet bloque les
demandes en ce sens. Ses employés sont considérés comme du
personnel exonéré, ce qui signifie que la ministre peut encore une
fois recruter autant de libéraux qu'elle peut dénicher et les mettre à
contribution pour servir ses intérêts sectaires. La ministre a dit que
le BIC ne ferait double emploi avec aucun autre service
gouvernemental déjà en place. Que dire toutefois de Référence
Canada qui relève du ministère de l'Industrie et de tous les autres
bureaux d'information administrés par chaque ministère? Il y a, en
outre, un ministre responsable des Affaires intergouvernementales.
Son ministère ne répond-il pas aux demandes d'information?
(1315)
La ministre a dit clairement que le bureau ne visait pas à contrer
les séparatistes du Québec. Dans son communiqué du 9 juillet, elle a
dit que les Canadiens sont fiers de leur pays, qu'ils veulent mieux se
connaître et que le bureau les aidera à mieux se comprendre
mutuellement et à renforcer le Canada.
Elle a alors nié avec beaucoup de véhémence l'idée que le bureau
vise à contrer les séparatistes. Toutefois, seulement deux mois plus
tard, la ministre a admis à un journaliste que «le gouvernement
fédéral a le devoir de répondre à la propagande faite par le
gouvernement du Québec depuis la dernière campagne
référendaire». Quand a-t-elle dit la vérité, le 9 juillet ou deux mois
plus tard, car les deux déclarations sont contradictoires?
C'est seulement au Canada que des députés ont le droit de vouloir
détruire notre beau grand pays. Certes, je partage la préoccupation
de la ministre quant à la désunion que sèment le Bloc québécois et
les autres séparatistes dans la province de Québec, mais je dois dire
qu'elle ne sait absolument pas quoi faire pour attirer l'attention des
Canadiens sur leur identité.
Ses collaborateurs ont établi un site Web, par exemple, au Bureau
d'information du Canada. Il n'est pas surprenant que les Québécois
boudent ce site dans la même proportion qu'ils ont boudé le coûteux
et mal conçu programme de distribution de drapeaux.
Je voudrais rappeler à la Chambre l'énorme fierté que nous avons
ressentie en tant que Canadiens quand nos athlètes les plus
talentueux comme Silken Lauman, Donavan Bailey, Karen
Magnussen, Sylvie Fréchette et ceux des Jeux olympiques spéciaux
tenus à Collingwood, en Ontario, sont montés sur le podium
olympique. Cela stimule-t-il pas davantage la fierté nationale que la
distribution de drapeaux aux bureaux des députés libéraux aux frais
des contribuables canadiens et au coût de 15,5 millions de dollars?
Le 30 août 1996, la ministre a affirmé qu'il y avait suffisamment
d'argent dans le budget pour couvrir les coûts du programme et
qu'elle ne supprimerait pas d'autres programmes pour trouver les
fonds nécessaires. Qu'elle dise donc cela aux athlètes amateurs dont
les subventions sont diminuées aujourd'hui par le ministère du
Patrimoine. Ces athlètes représenteront le Canada ici même et à
l'étranger. Les Canadiens patriotes ont-ils les moyens d'acheter des
drapeaux? Mais bien sûr. Les athlètes pourraient-ils utiliser ces 15,5
millions de dollars pour acheter des choses comme des chaussures
d'entraînement et de la nourriture? Je suppose que oui.
Pourquoi la ministre a-t-elle gaspillé 15,5 millions de dollars
pour les drapeaux alors que nos athlètes crèvent de faim? Dans le
cadre des compressions de 414 millions de dollars dans le budget de
la SRC, la radio de la SRC, que soutiennent une majorité de
Canadiens, a été victime d'une réduction de 30 millions de dollars.
Faisant preuve d'un incroyable cynisme la semaine dernière, la
ministre a redonné 10 millions de dollars à la radio de la SRC. La
perte nette de celle-ci est donc de 20 millions de dollars. Le
problème, c'est qu'elle est en train de gaspiller, au Bureau
d'information
8184
du Canada, le même montant qu'elle enlève maintenant à la radio de
la SRC.
En conséquence, je propose que l'on modifie la motion du Bloc
de la façon suivante.
Je propose:
Qu'on modifie la motion en remplaçant tous les mots après les mots «Patrimoine
Canada» par ce qui suit:
«comme les 20 millions de dollars alloués au Bureau d'information du Canada et
les 15,5 millions consacrés à l'opération «Un million de drapeaux», alors que des
compressions sans précédent dans l'histoire canadienne ont été imposées aux
institutions culturelles comme la radio de la SRC et le financement du sport
amateur».
Le vice-président: La motion est recevable. ne pas traduire.
Toujours indiquer en note s'il s'agit du texte officiel.
(1320)
M. Abbott: Monsieur le Président, le sujet de mon discours est
très simple et très clair: nous ne pouvons pas fabriquer
artificiellement le patriotisme.
Contrairement à l'idée des libéraux, qui croient que si quelque
chose n'est pas fait par le gouvernement ça ne vaut rien et ça ne va
nulle part, j'affirme que la culture est ce que les Canadiens font. La
culture canadienne est ce que sont les Canadiens. Nous sommes
fiers de notre pays. Nous sommes fiers de la splendeur de notre pays
et de l'abondance de ses ressources, mais nous sommes
particulièrement fiers des gens qui y habitent.
Nous n'avons pas besoin de nous faire dire que nous sommes
différents des autres. Nous n'avons pas à nous sentir inférieurs à qui
que ce soit. Les Canadiens forment le plus grand peuple de la terre.
Ils sont travaillants et francs.
Je suis extrêmement contrarié lorsque j'entends dire que nous ne
pouvons pas être Canadiens à moins que le gouvernement
n'intervienne, n'accorde les mandats, ne surveille, ne finance et ne
crée des obligations.
Qu'il s'agisse de la loi sur les droits d'auteur, des règles sur le
contenu canadien sur lesquelles elle méditait en fin de semaine
dernière pour le CRTC, de l'avenir de Radio-Canada ou d'autres
organismes semblables, ou encore de l'importation de livres au
Canada, je trouve tout à fait renversant que la ministre du
Patrimoine canadien soit tellement bornée qu'elle n'arrive pas à
voir la grandeur naturelle de notre peuple et de notre pays.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ):
Monsieur le Président, aujourd'hui, je prends la parole, non pas
avec plaisir, mais avec tristesse, parce que, dans ce beau grand pays
qui s'appelle le Canada, un pays absolument extraordinaire, on est
obligé de dénoncer l'utilisation que ce gouvernement fait des fonds
publics en les orientant vers des activités de propagande qui sont
essentiellement destinées à discréditer le peuple québécois.
Le Bureau d'information du Canada, l'opération Un million de
drapeaux, tout cela vise à dire aux Québécois: «Vous avez tort de
vous sentir un peuple, de vous sentir une nation.»
Je me permets de remercier mon collègue du Parti réformiste qui
a cru bon de préciser des montants. Ces montants, tout le monde les
connaît, mais je pense qu'on ne les redira jamais assez.
Demain, le ministre des Finances s'apprête à déposer son budget.
Les chances sont fortes que le budget du ministre des Finances soit
un budget aux couleurs de la gentillesse. Depuis 1993, depuis
l'arrivée de ce gouvernement au pouvoir, les budgets ont été durs.
On ne s'est pas gênés pour effectuer des coupures dramatiques qui
touchent effectivement les plus démunis, les plus mal pris et des
coupures qui obligent les gouvernements provinciaux à sabrer dans
les programmes de santé, dans les programmes sociaux.
La culture n'a pas échappé à ce couperet. Les institutions
culturelles dont le Canada peut être fier et dont le Québec peut, à
juste part, revendiquer avoir contribué à la valeur de ces
institutions, ces institutions se retrouvent avec des coupures
absolument incroyables, Radio-Canada, Téléfilm et l'Office
national du film.
(1325)
Ces institutions ont joué un rôle majeur dans l'expression de ma
culture. Radio-Canada, au Québec, a été un instrument pour dire
que le français était une langue riche, une langue dynamique, un
moyen original de dire qui on était.
Quand le premier ministre Trudeau est arrivé au pouvoir,
Radio-Canada le dérangeait. Il ne s'est jamais gêné pour dire que
s'il n'en tenait qu'à lui, il allait mettre la clé sous la porte. Depuis
1993, ce qu'on peut sentir, c'est que le gouvernement libéral actuel
a bien envie de se rendre au désir de l'ancien premier ministre. Les
coupures effectuées par le ministère du Patrimoine dans les
programmes culturels en sont la preuve.
Depuis 1993, il y a eu quelques ministres du Patrimoine. La
dernière, la vice-première ministre, est probablement celle qui a le
plus de panache. Elle détourne, vraiment sans aucune hésitation, les
fonds destinés à la culture, les fonds destinés à la culture avec un
grand C, vers des activités de pure propagande. Ces activités visent
à faire la promotion de l'unité canadian, de la culture canadian, du
multiculturalisme. Autrement dit, la culture au Canada n'a qu'un
visage, n'a qu'une couleur, c'est la culture canadienne.
Vous comprendrez sans peine que je m'inscris en faux contre
cette réalité parce que je prétends, et avec moi une très vaste
majorité de Québécois et de Québécoises, que ma culture est
québécoise. Elle n'est pas meilleure que la culture canadienne, elle
est différente et ce droit à la différence, nous le réclamons haut et
fort. Ce que nous comprenons dans les décisions de la ministre du
Patrimoine, c'est de vouloir effectivement nous enlever le droit
d'exprimer cette différence.
Les exemples sont nombreux. Il y en a même un qui nous est
arrivé tout récemment. On apprenait qu'il y a de nouveaux critères
de subventions pour les artistes qui voudraient recourir au ministère
des Affaires étrangères. Ce n'est plus le talent, la créativité,
l'originalité qui seront déterminants, finalement, ce qui sera
déterminant,
8185
sera la couleur du drapeau que l'on préfère. Si l'on préfère la feuille
d'érable, on aura des subventions; si on a le malheur de trouver la
fleur de lis signifiante pour ce qu'on est, on n'aura pas de
subvention.
Cela veut dire que ce qui, actuellement, est l'image de la culture à
l'extérieur du Canada, il y en aura de moins en moins parce que,
hélas, il y a beaucoup d'artistes québécois qui se sentent Québécois,
qui le disent haut et fort même si effectivement, ça peut leur faire
prendre le risque de perdre des subventions. La valeur artistique
d'un artiste nous donne l'impression d'être un peu comme au beau
temps de l'URSS, être valable en autant qu'elle prône les valeurs de
l'État unitaire, en autant qu'elle se prosterne devant les réalisations
de ce gouvernement. Il semble que le culture ce ne soit pas ça.
La culture c'est l'expression d'un peuple, de son identité, de sa
différence. Tant et aussi longtemps que le français sera vivant au
Québec, tant et aussi longtemps que le peuple québécois reconnaîtra
dans la langue française le meilleur moyen d'exprimer ce qu'il est,
hélas, on parlera du peuple québécois.
(1330)
Le gouvernement, depuis qu'il a été élu, a fait des coupures
importantes dans le domaine de la culture. Mais, ce qui est très
intéressant, c'est de lire le livre rouge-il faut dire que dans
quelques mois, il sera certainement plus que désuet-dans lequel le
Parti libéral se faisait le promoteur de la culture et dénonçait les
méchants conservateurs qui avaient osé faire des coupures sombres.
À la page 83, on lit, et je cite: «L'amputation des budgets de
Radio-Canada, du Conseil des arts du Canada, de l'Office national
du film, de Téléfilm Canada et d'autres institutions montre bien que
les conservateurs méconnaissent l'importance du développement
culturel.» Un peu plus loin: «Un gouvernement libéral favorisera la
production, la commercialisation et la distribution, pour encourager
la diffusion des livres, films et enregistrements sonores canadiens
sur le marché national. Nous prendrons des mesures pour
encourager la diffusion des oeuvres canadiennes à l'étranger. Enfin,
nous doterons les institutions culturelles nationales, comme le
Conseil des arts du Canada et Radio-Canada, d'un budget
pluriannuel stable.» Ça a pris beaucoup de temps avant qu'on arrive
à un budget pluriannuel stable. Et avant d'y arriver, on aura droit
encore à plusieurs dizaines de millions de de dollars de coupures.
Depuis 1993, les libéraux ont amputé, pour employer leurs
propres termes, du tiers le budget de Radio-Canada, soit 414
millions de dollars, et ceci a entraîné 4 000 mises à pied, dont
1 300 au réseau français. Dans la même veine, Téléfilm Canada a
vu son budget amputé de 46 millions de dollars; pour le Conseil
national des arts, c'est 12 millions de moins; pour le CNA, le Centre
national des arts, c'est 5 millions; et pour l'Office national du film,
27 millions de moins. Finalement, quand on a commencé à couper,
on a plus besoin de s'arrêter; c'est facile, on s'est fait la main.
On pouvait entendre, la semaine dernière, la ministre du
Patrimoine canadien et toujours vice-première ministre de ce pays,
promettre un financement stable pour Radio-Canada. Après plus de
trois ans de coupures, promettre un financement stable revient à dire
que Radio-Canada demeurerait, avec un budget aminci et
insuffisant, particulièrement dans le secteur français de la télévision
et de la radio, sous-financé comparativement au réseau anglophone.
Bien sûr, il se trouve que les francophones sont un peu magiciens.
Ils arrivent à faire des merveilles avec des budgets réduits.
Autrement dit, ce gouvernement fait payer la compétence des gens,
des artistes, des producteurs, en réduisant les sous. Ce sont
probablement des choses qui sont planifiées d'avance.
Il y a quand même eu des choses étonnantes. On coupe, mais on
va mettre sur pied un bureau qui s'appelle le BIC. Chez nous, Le Bic
est un magnifique petit village du Québec, sur le bord du
Saint-Laurent, avec des villes absolument extraordinaires, un
paysage de toute beauté. Alors, évidemment, appeler cela le BIC, le
Bureau d'information du Canada, cela nous dérange un peu, mais on
laissera faire.
Des choses extraordinaires sont sorties de toute cette belle
réflexion. Par exemple, on a décidé de faire l'opération Un million
de drapeaux. Mais j'ai eu l'impression, en regardant mes cartes de
Noël, cette année, que cela ne devait pas aller si bien que cela,
puisqu'on a vu des cartes de Noël où toute une famille était vêtue en
drapeau du Canada. C'est quand même assez extraordinaire!
(1335)
Ce qu'il semble, c'est qu'il y a effectivement eu des drapeaux,
alors qu'on voulait transformer le Québec en rouge et blanc, et il
semble que seulement 10 p. 100 des drapeaux se sont retrouvés au
Québec et 40 p. 100 en Ontario. Voilà: 50 p. 100 de l'opération est
dans le centre du Canada, sauf que je n'ai pas vu beaucoup de
drapeaux flotter au Québec. Dans les villages et dans les villes, je
n'en vois pas. Peut-être que je suis daltonienne.
On fait aussi autre chose. On fait des sweepstakes, la mode est
aux loteries. On fait des questionnaires Attractions Canada. Je
pense que quand on est fier de son pays, on n'a pas besoin d'avoir
des motivations de ce genre. Être fier de son pays, aimer son pays,
ça vient naturellement.
Quand on se sent tenu, à titre de gouvernement, d'investir des
sommes absolument incroyables pour forcer les gens à aimer, on
sait bien que ça ne marche pas. On ne peut pas forcer les gens à
aimer et on ne peut pas forcer les Québécois à faire semblant
d'aimer, parce que pour aimer, il faut être respecté, et on voit bien,
avec tout ce qui se passe au niveau du patrimoine canadien, que le
respect n'est certainement pas la caractéristique principale de ce
gouvernement à l'endroit du Québec.
J'ai eu la chance de lire un certain nombre des fonds fédéraux qui
ont été utilisés depuis décembre 1994, donc quelques mois avant la
campagne référendaire. Le montant total est presque de 100
millions de dollars. C'est beaucoup d'argent, 100 millions de
dollars. Je ne suis pas une spécialiste en économie, sauf que je me
rappelle qu'on demandait pour le Tokamak, une industrie de haute
technologie, une industrie importante, huit millions de dollars, et il
n'en était pas question. Pourtant, il y a eu 100 millions de dollars
destinés à la propagande avant le référendum et dans la période
immédiate après le référendum.
8186
On a dépensé plus de un million de dollars pour célébrer le 30e
anniversaire du drapeau canadien. Je me demande combien de
millions de francs ont été dépensés par la France pour souligner
l'anniversaire de leur drapeau. Il y aura lieu de faire une demande au
service de la recherche là-dessus.
Pour le 50e anniversaire de l'ONU, on a dépensé 1 843 000 $.
Pour les minutes du Patrimoine, je ne vais pas souvent au cinéma,
mais il me semble que j'ai même vu cela sur grand écran, mais ça
coûte cher sur grand écran: 2 220 000 $.
La promotion touristique auprès des Canadiens: 15 millions de
dollars. C'est extraordinaire. Les chiffres sont ici, mais même sans
lunettes je peux les lire. La campagne Un million de voix, ça chantait
fort, puisque ça a coûté 500 000 $. Et cela, c'était vraiment pour les
fédérations des communautés francophones et acadienne.
L'identité canadienne à elle seule, par le biais de subventions qui
ne sont pas identifiées à Patrimoine Canada, coûte trois millions de
dollars. On fait aussi la promotion du passeport canadien. Est-ce
que ce n'est pas assez extraordinaire de faire la promotion d'un
passeport canadien? On a de moins en moins de passeports. En
Europe, actuellement, on se promène librement, mais on fait quand
même la promotion du passeport. C'est bien connu que tous les
Canadiens et toutes les Canadiennes se promènent largement à la
grandeur du globe, alors on a quand même donné à la promotion du
passeport canadien un petit montant de 25 000 $. Vous savez, il y a
des familles monoparentales avec deux ou trois enfants qui ne
touchent pas ça dans une année.
Pour les services du gouvernement fédéral sur les services
fédéraux, on a dépensé cinq millions. L'opération Unité: 11
millions. Ça continue comme ça, 23 millions de dollars par ici,
600 000 $ par là. Le coût total est de presque 100 millions de
dollars.
Je pense que ce gouvernement doit réfléchir. Demain, ce sera le
budget. On ne sait pas vraiment ce qu'il y aura dans le budget du
ministre des Finances, sauf que je sais une chose: la culture va
sûrement continuer à avoir, pour ce pays, une connotation très
partisane. Je peux vous dire que je regrette qu'on choisisse la
propagande plutôt que le respect.
(1340)
J'espère que d'ici l'an 2000, on aura appris, de ce côté-là, à porter
sur le Québec un regard respectueux, un regard honnête, un regard
qui reconnaît la réalité.
Je pense que c'est une qualité d'être naïfs, car cela nous permet
de garder espoir. Je vous dis que je garde l'espoir, il ne faut pas
désespérer.
M. Patrick Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine,
Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention
le discours de la députée.
Je tiens à faire remarquer qu'on a voulu faire un peu le procès du
Canada, encore une fois, et de ses institutions fières et très connues
qui ont travaillé pour promouvoir et s'assurer de la présence et du
fait français, notamment au Québec, et dans l'ensemble du pays.
Ce que je trouve curieux, lorsqu'on cite des chiffres, surtout dans
le cas du Bloc québécois, qu'on soit porté à certaines exagérations.
J'aimerais bien entendre la députée nous expliquer ceci: comme elle
le sait fort bien, le Québec compose tout près de 25 p. 100 de la
population, 24,9 p. 100 plus précisément, et 22 p. 100 vont en
impôts au fédéral. Par contre, si on parle de certaines institutions
fédérales, notamment l'Office national du film, on remarque que
73,9 p. 100 du budget de l'Office national du film sont versés au
Québec.
On retrouve aussi que dans Téléfilm Canada, qui a bien servi
pour le montage de certains films québécois très connus, on
remarque que tout près de 62,9 p. 100 de ses budgets ont été versés
au Québec, dont 43 p. 100 dans des films en français. Tenez compte
que le Québec, en ce moment, représente 25 p. 100 de la population.
Quand on parle de Radio-Canada, je suis d'accord avec la
députée que, oui, on a connu des compressions. Les compressions
ne sont pas exclusives au Canada. On peut aussi parler de
Radio-Québec, on peut parler des compressions importantes auprès
des radios communautaires dans les différentes régions de la
province. On peut aussi parler des différentes compressions qu'ont
connues d'autres pays. C'est vrai que le monde médiatique connaît
des changements plutôt bouleversants à la fin de ce siècle.
Je cite les chiffres de Radio-Canada, et je conviens qu'il y a eu
des compressions. On voit que le budget était de 918 millions de
dollars et que la partie francophone touchait tout près de 40 p. 100:
donc, 367 280 000 $. Si on basait la part québécoise sur sa
population, il y aurait sûrement un manque à gagner de tout près de
140 millions de dollars.
Je trouve curieux, et je voudrais qu'elle m'explique, dans un
contexte postréférendaire pour nous et probablement
préréférendaire pour le Bloc québécois, comment nous pourrions,
nous, du Québec, retrouver ce manque à gagner, advenant
l'indépendance du Québec.
Mme Dalphond-Guiral: Monsieur le Président, le député me
demande ceci: comment est-ce qu'on pourra bien retrouver ce
manque à gagner, une fois le Québec indépendant?
Ce n'est pas par hasard, si je me fie aux chiffres de mon collègue
de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, quand il dit que 73 p. 100
du budget de l'ONF allaient au Québec, c'est bien simple, c'est
parce que c'est au Québec qu'est la créativité. Voilà.
Qui, actuellement, est la caution de la culture canadienne? C'est
le dynamisme de la culture québécoise.
Il ne faut pas s'imaginer que c'est par charité chrétienne que les
fonds ont été alloués à l'ONF ou à Téléfilm. Ce n'est pas cela. C'est
parce qu'on est tout à fait capables de faire fructifier, de façon
absolument exceptionnelle, l'argent qui est remis à nos créateurs.
Ce que je pense, c'est que le jour où les Québécois vont décider
d'être maîtres chez eux et de s'assumer, notre culture aura tous les
moyens d'être ce qu'elle est, sans être soumis à des diktats qui
viennent de gens qui prétendent avoir l'argent en main, parce qu'ils
ont oublié que l'argent dont ils disposent vient effectivement des
électeurs et des électrices, des contribuables.
8187
(1345)
Mon collègue disait qu'on était presque 25 p. 100, un peu moins,
mais à ce que je sache on paye des impôts de façon tout à fait
comparable à celle des autres dans le reste du Canada. Alors, s'il
s'inquiète de notre avenir, je peux le rassurer tout de suite, je pense
que notre avenir sera à la couleur de notre compétence, de notre
détermination et du respect que nous aurons vis-à-vis de
nous-mêmes et que nous saurons avoir vis-à-vis de nos voisins du
Canada.
[Traduction]
Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.): Monsieur le
Président, je partagerai mon temps de parole avec le député de
Haldimand-Norfolk.
Je suis heureuse de prendre la parole au sujet de la motion
présentée par l'opposition et j'en profite pour rappeler les efforts
déployés jusqu'à maintenant par le gouvernement pour appuyer
l'industrie de l'édition et les progrès accomplis au chapitre de la
réforme du droit d'auteur.
Le gouvernement et le premier ministre font énormément pour
aider la culture canadienne et la promotion du contenu culturel
canadien. En association avec les dirigeants des arts et de la culture
au Canada, la ministre du Patrimoine canadien élabore
présentement une vision cohésive qui permettra d'assurer un
soutien réel et durable à la culture au Canada. Je voudrais passer en
revue certaines de nos réalisations à ce jour.
Le gouvernement tient à assurer le développement continu de
l'industrie canadienne de l'édition. Il veut faire en sorte qu'elle
demeure, par une aide directe et par l'application de politiques
structurelles, une expression majeure de la culture canadienne.
Le poète canadien Hector Saint-Denys Garneau a dit que les
écrivains font exploser les frontières du monde. Nos livres et nos
magazines nous relient, d'abord au plus profond de nous-mêmes
puis les uns aux autres et ils nous permettent enfin de nous situer et
de donner une image du Canada au reste du monde.
Les Canadiens veulent lire des ouvrages d'auteurs canadiens et
ils le font. Une récente étude du marché a révélé que les Canadiens
lisent de plus en plus et que la plupart choisissent des auteurs
canadiens. Quatre-vingt pour cent de ces ouvrages sont publiés par
des maisons d'édition canadiennes.
Le nombre d'auteurs à succès au Canada ne se compte plus.
Beaucoup sont des talents remarquables, notamment Robertson
Davies, Michel Tremblay, W.P. Kinsella, Anne Hébert,
Marie-Claire Blais, Émile Nelligan, Margaret Atwood, Michael
Ondaatje, Gabrielle Roy et Robinson Mistry, pour n'en nommer que
quelques-uns.
Nos auteurs font une place de choix à la littérature canadienne sur
la scène internationale. Leurs ouvrages sont traduits dans des
douzaines de langues, étudiés dans une quarantaine de pays et ils ont
obtenu parmi les plus grands honneurs et récompenses. Antonine
Maillet, par exemple, s'est vu décerner le prix Goncourt, la
récompense la plus prestigieuse en littérature française. Michael
Ondaatje a obtenu le prix Booker, le plus prestigieux des prix
littéraires de la Grande-Bretagne.
Les magazines canadiens, notamment les revues d'information et
d'opinion comme L'actualité et Maclean's, les revues sur la santé
comme Santé ou ceux pour enfants comme Chickadee, sont une
autre forme d'expression majeure de la culture canadienne.
L'industrie canadienne du magazine joue un rôle déterminant dans
notre identification nationale.
Cette industrie publie au-delà de 1400 titres et emploie plus de6 000 personnes. Ces chiffres démontrent bien que nos éditeurs,
rédacteurs, directeurs artistiques et auteurs sont parmi les meilleurs
au monde. En 1996-1997, le gouvernement canadien aura accordé,
grâce à son Programme d'aide au développement de l'industrie de
l'édition, une aide financière directe de 15,8 millions de dollars à
plus de 180 maisons d'édition canadiennes. Il a en outre accordé une
aide de plus de 6 millions pour faciliter la commercialisation
d'ouvrages au Canada et pour faciliter l'exportation d'oeuvres
littéraires canadiennes.
(1350)
Le gouvernement du Canada aide le secteur de l'édition
canadienne et les ouvrages d'auteurs canadiens à connaître un
succès considérable. La part du marché national que représente les
ouvrages d'auteurs canadiens est passée de 5 p. 100 en 1970 à 25 p.
100 aujourd'hui. Ces cinq dernières années, les ventes à
l'exportation de livres canadiens ont triplé.
Notre engagement est plus fort que jamais. Pendant l'été de 1996,
le gouvernement a étudié avec les éditeurs canadiens les moyens
possibles d'améliorer la santé financière des maisons d'édition
canadiennes. Il est ressorti de cette étude une stratégie en trois
points, dont une subvention à court terme pour stabiliser l'industrie,
une étude de faisabilité concernant la mise en place d'un
programme de prêts garantis à l'intention des éditeurs et d'autres
mesures à long terme pour stabiliser le financement des éditeurs.
Récemment, la ministre du Patrimoine canadien a accordé aux
éditeurs une somme supplémentaire de 5 millions de dollars à titre
de subvention directe à ce secteur pour l'année 1996-1997.
L'industrie des périodiques a reçu une aide directe grâce à des
mesures structurelles.
Les Canadiens lisent plus de magazines canadiens que jamais. En
1961, environ 25 p. 100 des magazines qui circulaient dans ce pays
étaient canadiens. En 1992, cette proportion est passée à près de68 p. 100. Nous voulons maintenir ce genre de croissance dans les
industries culturelles essentielles du Canada. Le secteur de l'édition
des livres et des magazines au Canada joue un rôle déterminant, il
nous renseigne sur nous, sur les différents endroits au Canada, sur
les événements et sur les problèmes. Notre énorme succès dans ce
secteur au Canada et à l'étranger dépend de la robustesse des bases
des industries sur le marché national. Le gouvernement travaille
avec le monde de l'édition à renforcer ces bases. C'est le partenariat
en action au service de la culture et de l'identité canadiennes.
8188
Il y a un enjeu pertinent au secteur des publications qui a des
répercussions directes sur ce secteur, le droit d'auteur. Entre autres
initiatives, le gouvernement a lancé une réforme du droit d'auteur.
Les Canadiens attendaient depuis plusieurs années qu'on modifie la
Loi sur le droit d'auteur. Ce sont des changements importants qui
permettront de rajeunir la loi et d'aider le secteur culturel à relever
les défis de l'ère de l'information.
Le projet de loi C-32, la Loi modifiant la Loi sur le droit d'auteur,
sera bientôt débattu en troisième lecture à la Chambre. Au début des
années 80, le gouvernement libéral de l'époque avait publié un
document détaillé, le rapport Applebaum-Hébert, qui réclamait une
réforme du droit d'auteur. Au cours des années suivantes, le
gouvernement conservateur n'a rien fait à cet égard. Nous sommes
en train de remédier au problème en faisant en sorte que le projet de
loi C-32 devienne loi.
En tant que membre du Comité du patrimoine, j'ai travaillé en
étroite collaboration avec des auteurs et des éditeurs canadiens pour
que le projet de loi C-32 réponde aux besoins des deux groupes. Le
projet de loi, tel que modifié par le Comité du patrimoine, assure
vraiment un équilibre entre les intérêts des éditeurs, des auteurs et
des utilisateurs de produits assujettis à la loi sur le droit d'auteur. Le
projet de loi C-32 aidera les auteurs canadiens à obtenir un
dédommagement en cas d'utilisation non autorisée de leurs
oeuvres.
J'ai moi-même proposé un amendement qui garantira aux
intéressés l'accès à des documents non publiés gardés en archives
tout en protégeant les auteurs qui ne veulent pas que leurs écrits
soient reproduits. Le projet de loi donnera aussi aux éditeurs
canadiens jouissant d'ententes de distribution exclusives une
protection contre l'importation parallèle.
Beaucoup de libraires de Hamilton m'appellent pour exprimer
leur inquiétude au sujet des limites de l'importation parallèle. J'ai
pu leur garantir que les modifications apportées au projet de loi sur
le droit d'auteur assureraient aux libraires la possibilité de passer
des commandes spéciales en temps opportun.
Le gouvernement a écouté les Canadiens. Nous avons pris des
mesures qui nous ont permis d'aller de l'avant au sujet de projets de
loi attendus depuis longtemps, comme le C-32. Nous reconnaissons
que, s'il y a une question qui tient à coeur aux Canadiens, c'est bien
la culture canadienne. En présentant le projet de loi C-32 à la
Chambre, nous avons fait une grosse contribution à la vitalité du
secteur culturel du Canada. En protégeant le droit légitime des
créateurs canadiens, qui sont la source de notre vitalité culturelle,
nous assurons la constante vitalité du secteur culturel du canadien.
En 1993, le gouvernement libéral s'était engagé à soutenir la
culture canadienne en adoptant des mesures concrètes ainsi que des
politiques et des lois pertinentes. Nous sommes fiers de nos
réalisations et nous maintenons notre engagement de terminer ce
que nous avons commencé.
(1355)
M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, je
me demande si la députée pourrait m'aider à comprendre l'un des
très nombreux aspects du projet de loi C-32, soit les redevances sur
les supports audio vierges.
En vertu des dispositions concernant les supports audio vierges,
les gens devront payer quelques cents par banque magnétique-en
comité, il a été question de 35 ou 40c.-et la somme amassée, soit
12 millions de dollars, sera censée être répartie entre les artistes. La
députée pourrait-elle m'expliquer comment cette mesure
encouragera les artistes canadiens puisque la grande majorité des
enregistrements copiés sont des produits américains? Une petite
partie de l'argent ira aux artistes canadiens.
Cette mesure va simplement favoriser deux choses, la première
étant une bataille commerciale avec les États-Unis qui diront: «Si
vous recueillez 12 millions de dollars et que les produits copiés sont
américains, nous exigeons notre juste part des recettes». Par
conséquent, les libéraux provoquent un autre conflit commercial du
genre de celui qu'on a connu dans le cas de Sports Illustrated.
Deuxièmement, la députée pourrait-elle expliquer à la Chambre
et à tous les Canadiens comment cette mesure procurera plus de
travail aux artistes canadiens, s'il ne s'agit pas tout simplement
d'une taxe sur les bandes magnétiques comme je l'ai toujours dit?
Mme Phinney: Monsieur le Président, il est difficile de répondre
brièvement à cette question; peut-être vaudrait-il mieux y revenir
après la période des questions. Est-ce que je pourrais procéder
ainsi?
Le Président: Chère collègue, si vous désirez attendre et
répondre plus complètement après la période des questions, je le
veux bien. De cette façon, le député de Kootenay-Est recevra une
réponse et nous pourrons passer immédiatement à la période des
déclarations de députés.
______________________________________________
8188
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[
Traduction]
M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia,
Réf.): Monsieur le Président, j'ai reçu plusieurs plaintes concernant
le gonflement apparent des effectifs au pavillon de ressourcement
du Service correctionnel du Canada appelé Okimaw Ochi et situé
près de Maple Creek, en Saskatchewan.
Par exemple, une monitrice de garderie certifiée vient d'être
engagée pour s'occuper du seul enfant en bas âge résidant à
l'institution. On me dit qu'ils seront bientôt deux. Le pavillon a un
accord d'hébergement avec la réserve voisine, Nikaneet, ce qui fait
que cet enfant ne s'y trouve que la moitié du temps.
Il y a deux infirmières sur place pour 20 détenues, alors que les
agriculteurs et les ranchers des environs, qui n'ont jamais commis
de crimes et qui payent des impôts, doivent aller à 30 ou 40
8189
kilomètres de chez eux pour recevoir les services médicaux les plus
élémentaires. Est-ce juste?
Cette petite institution a quatre employées de bureau. Je ne doute
pas qu'elles aient de quoi s'occuper, mais pourquoi y a-t-il tant de
paperasse?
Mon diagnostic est que le Service correctionnel du Canada
souffrent de gonflement bureaucratique chronique.
* * *
M. Ron Fewchuk (Selkirk-Red River, Lib.): Monsieur le
Président, jeudi dernier, j'ai eu le plaisir d'assister à la remise des
prix du premier ministre pour l'excellence dans l'enseignement des
sciences, de la technologie et des mathématiques, à Ottawa.
Ce fut pour moi un honneur d'assister à la cérémonie et de voir
Denise McWilliams, de ma circonscription, recevoir ce prix, la plus
haute distinction dans le domaine de l'enseignement.
Au nom des habitants de Selkirk-Red River, je remercie Denise
McWilliams pour son ardeur au travail et pour l'excellence de son
enseignement.
Les enseignants jouent un rôle crucial dans la formation des
élèves et de leurs attitudes et dans leur préparation en vue d'une
future carrière dans l'économie mondiale qui les attend. Le dur
labeur des enseignants d'aujourd'hui est garant d'un avenir
meilleur pour les Canadiens de demain.
* * *
[
Français]
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le
Président, le ministre des Affaires intergouvernementales faisait
encore une fois cette semaine la preuve que le gouvernement fédéral
est comme la tour de Pise: il penche toujours du même bord, soit du
bord d'Alliance Québec.
Questionné sur les intentions de son gouvernement concernant
les commissions scolaires linguistiques, le ministre a fait une
charge à fond de train contre les politiques linguistiques du Québec,
accusant le gouvernement québécois de diviser les communautés
francophone et anglophone du Québec.
(1400)
Comment comprendre qu'un ministre du Québec s'en prenne
constamment au gouvernement du Québec, alors qu'il n'a jamais le
courage de dénoncer l'incurie des gouvernements provinciaux qui
refusent de donner des services en français aux francophones de leur
province?
Un tel comportement illustre clairement la complicité de ce
gouvernement à favoriser l'anglicisation des francophones en
fermant les yeux sur le fait, entre autres, que la fonction publique
fédérale est l'un des principaux outils d'anglicisation des
francophones québécois et canadiens.
[Traduction]
Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.): Monsieur le
Président, je prends la parole pour marquer la Journée du
patrimoine national.
La Journée du patrimoine, créée par Patrimoine Canada en 1973,
est une occasion pour tous les Canadiens de célébrer, découvrir et
partager notre patrimoine, si riche et si divers.
La diversité de notre pays et de sa population s'exprime de
nombreuses façons et fait de nous un cas unique dans le monde. Que
l'on soit né ici ou que l'on soit venu d'ailleurs, ensemble nous avons
construit une grande nation, un pays reconnu par les Nations Unis
comme le meilleur au monde.
Aujourd'hui, nous devrions tous profiter de l'occasion pour nous
souvenir avec fierté des contributions de tous ceux qui ont aidé à
façonner le pays, pour célébrer la diversité qui fait notre patrimoine
et pour renforcer le tissu multiculturel du Canada.
J'invite tous les députés et tous les Canadiens à célébrer avec moi
la Journée du patrimoine national.
* * *
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, les
libéraux se félicitent et espèrent des applaudissements parce que le
budget de demain ne contiendra pas de nouvelles réductions
importantes. Quelle hypocrisie!
La vérité, c'est que dans l'exercice financier qui commencera le
1er avril il y a 11,9 milliards de nouvelles réductions de dépenses
dans les ministères fédéraux, annoncées dans le budget de 1995.
Par exemple, quand le ministre de la Défense nationale a été
interviewé à l'émission de Mike Duffy, sur le réseau CTV,
dimanche dernier, il disait que le financement de la défense était
stabilisé. Belle stabilité: Le 1er avril, la défense devra vivre avec un
autre milliard de moins. Cela portera les réductions de budget au
MDN à 1,9 milliard sur trois ans, et la liste est longue.
Toutes ces coupures ne comprennent pas les réductions dans les
paiements de transfert aux provinces au titre de la santé et de
l'enseignement.
* * *
M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président,
en mettant un terme aux travaux de la commission d'enquête sur la
Somalie, le ministre de la Défense prouve une fois de plus qu'il ne
se soucie guère que l'application de la loi se fasse de façon
régulière. L'idée qu'il se fait de la justice a clairement ressorti à
l'époque où il était le ministre des Transports responsable du
honteux projet de loi C-22 visant à annuler le contrat de l'aéroport
Pearson.
8190
Certes, personne n'a contesté au gouvernement son droit
d'annuler le contrat, mais ce projet de loi aurait empêché des
citoyens canadiens d'avoir recours à un tribunal. Ceux-ci n'auraient
donc pas pu faire valoir le bien-fondé de leur contrat ou défendre
leur réputation. Or, ce droit du recours aux tribunaux n'a même pas
été refusé à Clifford Olson.
* * *
M. Murray Calder (Wellington-Grey-Dufferin-Simcoe,
Lib.): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de fierté que
j'informe la Chambre que l'Exposition du Grand Nord qui se tient à
Collingwood a reçu, lors de l'assemblée annuelle de l'Association
canadienne des foires et expositions, qui a eu lieu à Saskatoon, le
prix annuel des foires locales 1996.
En outre, Jim et Donna Fraser, de Collingwood, ont reçu le prix
du mérite industriel 1996. Jim et Donna oeuvrent à titre de
bénévoles dans le secteur des foires depuis 35 ans. Jim est directeur
adjoint et président de l'Exposition nationale canadienne et Donna
est bénévole et directrice de l'Exposition du Grand Nord.
C'est un grand honneur pour la ville de Collingwood et les
localités environnantes, ainsi que les nombreux bénévoles qui
rendent possible la tenue de l'Exposition du Grand Nord qui attire
chaque année des visiteurs de l'Ontario toute entière.
J'invite tout le monde à se ménager du temps libre pour assister à
l'Exposition du Grand Nord qui se tiendra les 26, 27 et 28 septembre
1997.
* * *
[
Français]
M. Stéphan Tremblay (Lac-Saint-Jean, BQ): Monsieur le
Président, aujourd'hui, je veux faire part de ma vive déception au
ministre du Développement des ressources humaines relativement à
l'annonce de sa nouvelle stratégie emploi-jeunesse.
Après plus de trois ans d'attente, plutôt que de présenter une
stratégie novatrice afin d'aider les jeunes à la recherche d'un
emploi, le gouvernement libéral fait encore la preuve qu'il ne
comprend rien de la dure réalité vécue par les jeunes qui vivent au
Québec et au Canada et préfère s'ingérer, une fois de plus, dans les
champs de compétence provinciale.
(1405)
Où sont les nouvelles mesures pour faire échec au taux de
chômage de 17 p. 100 qui est le lot des jeunes de 15 à 24 ans? Où
sont les mesures devant aider les jeunes non diplômés à se dénicher
un travail? Où sont les nouvelles mesures pour épauler les quelque
500 000 jeunes à la recherche d'un emploi?
Je termine en rappelant au gouvernement libéral que ce n'est pas
en organisant des spectacles médiatiques et en invitant des ministres
en mal de publicité qu'il améliorera la situation des jeunes, mais
plutôt en transférant cet argent, carrément gaspillé, vers les
provinces qui sont mieux placées pour comprendre et répondre aux
attentes de ma génération.
* * *
[
Traduction]
M. Gerry Byrne (Humber-Sainte-Barbe-Baie Verte, Lib.):
Monsieur le Président, aujourd'hui, le 17 février, c'est le Jour du
Patrimoine national, une journée pour redécouvrir et apprécier les
choses qui font du Canada un pays exceptionnel.
Terre-Neuve et le Labrador est un fier partenaire de la
Confédération canadienne. Le samedi 15 février, anniversaire de
l'inauguration du drapeau national du Canada, des gens de partout
dans la circonscription de Humber-Sainte-Barbe-Baie Verte se
sont rassemblés pour témoigner de la fierté et de l'espoir qu'ils ont
pour le Canada. Des gens ont participé à d'innombrables
célébrations communautaires pour arborer fièrement l'unifolié à
l'occasion de son 32e anniversaire.
À l'approche du nouveau millénaire, nous sommes en mesure de
réinventer notre avenir et de renforcer notre fédération au profit des
générations à venir. Un pays fort est un pays qui a confiance en
l'avenir et, en tant que Canadiens, nous avons confiance en l'avenir
qui s'ouvre devant nous.
Célébrer le Jour du Patrimoine national et l'anniversaire de
l'inauguration du drapeau national contribue à renforcer notre
avenir. Il me fait plaisir de lancer une invitation ouverte à tous les
Canadiens pour qu'ils aillent visiter notre province et explorer
l'immense patrimoine de Terre-Neuve et du Labrador au cours de
notre célébration de l'arrivée de Cabot, il y a 500 ans.
* * *
M. John O'Reilly (Victoria-Haliburton, Lib.): Monsieur le
Président, je suis très heureux de prendre la parole aujourd'hui et
d'informer la Chambre qu'un entraîneur de Lindsay, en Ontario, a
mérité une récompense.
Marian Sweetnam a récemment obtenu sa deuxième récompense
d'entraîneur féminin de l'année en Ontario, lors de la 19e cérémonie
annuelle de remise des récompenses sportives de l'Ontario, qui
s'est déroulée à Toronto. Elle a mérité cette récompense pour la
première fois en 1989, la même année où elle a été choisie
entraîneur de natation de l'année au Canada.
Le club de natation de Marian, les Lindsay Lightningbolts, a
remporté les championnats d'équipe de la 3e division l'année
dernière. Son élève ayant connu le plus de succès est sa fille, Nancy,
qui a remporté 13 championnats nationaux, tout en établissant sept
records nationaux.
Félicitations pour vos récentes réalisations, Marian.
8191
[Français]
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le
Président, l'opération
Un million de drapeaux a pris fin ce
week-end dans la sobriété la plus surprenante.
Quelles raisons ont bien pu inciter à autant de retenue une
ministre pourtant portée à l'extravagance dans ses propos? En voici
au moins trois.
La première: alors que le gouvernement fédéral impose les pires
compressions de son histoire au filet de sécurité sociale et à la
culture, cette opération est un gaspillage éhonté des fonds publics.
La deuxième: le bilan de cette opération: 10 p. 100 de drapeaux
distribués au Québec et 40 p. 100 en Ontario. C'est là une preuve
non équivoque de l'existence au Canada de deux pays, de deux
nations: le Québec et le Canada.
La troisième: l'année dernière, le premier ministre du Canada
ternissait la Journée du drapeau en prenant un manifestant à la
gorge. Cette image est restée pour chacun et chacune un symbole
inquiétant.
* * *
[
Traduction]
M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le
Président, permettez-moi de mettre les choses au clair. Les libéraux
et les conservateurs gaspillent les fonds versés dans le Régime de
pensions du Canada depuis de nombreuses années. Ils veulent
maintenant que les Canadiens moyens paient jusqu'à 1 300 $ de
plus par année pour remédier à ce gaspillage.
La plupart d'entre nous savons que le régime de pensions des
députés est le meilleur du monde. Il offre des avantages exorbitants
après seulement deux mandats. C'est plus que ce que n'importe quel
Canadien ne pourra jamais obtenir de son Régime de pensions du
Canada.
Je pose donc la question suivante: combien les libéraux, les
séparatistes et les autres députés payent-ils en cotisations
supplémentaires au régime de pensions des députés, tout comme ils
ont demandé aux autres Canadiens de le faire dans le Régime de
pensions du Canada? Rien du tout. Voilà la réponse.
Cela nous amène à penser que ce que les députés nous demandent
sans cesse de leur donner est assez bon pour eux, mais pas pour
nous. Ils pratiquent l'élitisme dans le partage de l'assiette au beurre,
un point c'est tout.
* * *
(1410)
[Français]
Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis, Lib.): Monsieur le
Président, les dirigeants de PME du Québec sont tellement emballés
par les différentes missions commerciales qu'a dirigées notre
premier ministre qu'ils en redemandent.
C'est en substance ce qui ressort d'un sondage réalisé récemment
par la maison Everest pour La Presse et la Banque nationale. Une
majorité des 301 dirigeants de PME consultés souhaitent participer
à de futures missions commerciales, et aimeraient particulièrement
qu'elles s'orientent vers l'Asie, l'Europe de l'Est et l'Amérique
centrale.
[Traduction]
Quatre-vingt-seize pour cent des répondants considéraient les
missions d'Équipe Canada importantes pour le développement
économique du pays; 94 p. 100 des petites et moyennes entreprises
jugeaient que ces missions contribuaient à améliorer l'image du
Canada à l'étranger; et 88 p. 100 prévoyaient des retombées
économiques importantes.
[Français]
Les missions d'Équipe Canada sont un succès. Les dirigeants de
PME du Québec en témoignent avec enthousiasme.
* * *
[
Traduction]
L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce, Lib.):
Monsieur le Président, j'ai été tout à fait secoué, la semaine
dernière, lorsque j'ai appris que la cour supérieure du Québec avait
arrêté le transfert de tous les vols commerciaux de Mirabel vers
Dorval.
Il y a plusieurs mois, le gouvernement et la société Aéroports de
Montréal ont décidé que l'aéroport de Dorval devait servir pour tous
les vols réguliers et celui de Mirabel pour les vols nolisés, les vols
cargos et les autres opérations diverses. On a pris cette décision
parce que de nombreuses compagnies aériennes internationales,
surtout des compagnies européennes, abandonnaient Mirabel et
utilisaient Toronto seulement. Les passagers en partance de
Montréal devaient tout d'abord se rendre à Toronto s'ils voulaient
rejoindre certaines villes européennes qui avaient toujours été
desservis à partir de Montréal.
L'aéroport de Dorval n'est qu'à 20 minutes du centre-ville de
Montréal, alors que celui de Mirabel est à au moins 45 minutes. Le
coût des taxis, les transferts, les services de navette et le temps
perdu pour se rendre à Mirabel sont autant d'inconvénients inutiles
qui rendent l'utilisation de cet aéroport non rentable. J'exhorte le
gouvernement et les autorités montréalaises à s'assurer que le
regroupement des opérations aériennes à Dorval puissent se faire le
plus rapidement possible.
* * *
M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Monsieur le
Président, tout en respectant les compétences provinciales en
matière d'éducation, conformément à l'article 92 de la Loi
constitutionnelle, le gouvernement fédéral reconnaît qu'il joue un
rôle de premier plan à l'égard des études supérieures et de la
recherche de
8192
pointe pour que le Canada ait une longueur d'avance dans les
domaines des sciences et de la technologie.
Cela signifie qu'il doit fournir l'infrastructure et l'appui
financier qui sont essentiels pour qu'il y ait des professeurs, des
chercheurs et des étudiants remarquables qui établissent et
maintiennent des normes de niveau international dans ces
domaines.
Nous sommes les premiers en Amérique du Nord dans des
domaines comme la science biomédicale, la pharmacologie et la
physique de l'état solide et des particules, et nous avons démontré
avec beaucoup de succès la corrélation et l'application de ce haut
savoir à l'égard des nouvelles industries, tant au Canada qu'à
l'étranger, ainsi qu'à l'égard de l'élite professionnelle abondante
que cela suppose.
Le leadership du gouvernement fédéral en ce qui a trait aux
études supérieures et à la recherche de pointe dans les sciences et la
technologie est la clé de la prospérité économique du Canada au
seuil du XXIe siècle.
* * *
M. Rex Crawford (Kent, Lib.): Monsieur le Président, je
félicite tous les membres de l'association du théâtre Capitol de
Chatham, dans ma circonscription. Ce théâtre historique devait être
démoli et céder la place à un terrain de stationnement.
Les gens de l'endroit se sont unis pour le sauver et ils s'efforcent
maintenant de recueillir deux millions de dollars pour le remettre en
état. Ils rêvent de transformer l'immeuble en un centre des arts
d'interprétation que présiderait Kevin McMillan, baryton de
réputation mondiale et récipiendaire d'un prix Grammy.
Je tiens aussi à dire comme je suis fier des efforts du
gouvernement fédéral. Il a fourni 216 500 $ pour créer des emplois
et aider le théâtre à devenir un formidable atout économique et
culturel pour le centre-ville, tout en préservant une partie
importante de l'histoire de Chatham. Le gouvernement fédéral
investit dans les collectivités et dans les individus. Bravo à
l'association du théâtre Capitol et à son groupe de merveilleux
bénévoles.
* * *
M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.):
Monsieur le Président, les agriculteurs canadiens s'insurgent contre
l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire du
gouvernement libéral. La Fédération canadienne de l'agriculture, la
Fédération de l'agriculture de l'Île-du-Prince-Édouard, les Ontario
Soybean Growers et la B.C. Horticultural Coalition ne sont que
quelques exemples d'organismes qui s'élèvent contre l'agence.
Les producteurs sont en colère. Parce que l'agence a accru ses
effectifs de 100 p. 100. Parce qu'il faut 11 bureaucrates à l'agence
pour enregistrer un produit au Canada. Parce que les études du
gouvernement montrent que près du tiers des pesticides
actuellement enregistrés seront retirés du marché par l'agence.
Parce que l'agence se propose de réenregistrer les 900 pesticides
agricoles qui sont maintenant sur le marché et d'appliquer le même
processus tous les trois ou cinq ans.
Une fois de plus, le gouvernement libéral fait passer la
bureaucratie avant le bon sens. L'agence a vraiment provoqué une
grande colère chez les agriculteurs.
______________________________________________
8192
QUESTIONS ORALES
(1415)
[Français]
M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le
Président, le ministre des Finances du Québec réclame du ministre
fédéral des Finances 1,9 milliard de dollars à titre de compensation
pour l'harmonisation de sa taxe de vente avec la TPS fédérale, et
cela, afin que le Québec obtienne ainsi un traitement équivalent à
celui des provinces Maritimes qui, elles, recevront près d'un
milliard en compensation pour avoir harmonisé.
Le Québec est appuyé en cela par l'Ontario, l'Alberta, la
Colombie-Britannique qui, elles aussi, trouvent injuste le
traitement accordé uniquement aux Maritimes.
À la veille de son budget, le ministre des Finances du Canada
compte-t-il corriger l'injustice dont est victime le Québec?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le
Président, on a fourni au gouvernement du Québec toutes les
informations nécessaires, les données, ainsi que la façon dont le
calcul a été fait. Comme le chef de l'opposition le sait fort bien, une
formule stipulait qu'une province qui perdait au-delà de 5 p. 100 de
ses revenus avait droit à une compensation à la suite de
l'harmonisation de la taxe de vente.
Les quatre provinces de l'Atlantique, ainsi que le Manitoba et la
Saskatchewan sont éligibles, mais le Québec, l'Ontario, l'Alberta et
la Colombie-Britannique ne le sont pas. Le Québec n'a pas perdu
d'argent; par l'harmonisation, le Québec a d'ailleurs fait de
l'argent.
M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le
Président, le ministre des Finances du Canada est considéré comme
quelqu'un de sérieux quand il parle de finances publiques, et il
faudrait qu'il le demeure, qu'il reste à la hauteur de sa réputation.
Le ministre des Finances du Canada admettra-t-il que les pertes
encourues par les Maritimes dans l'harmonisation de la TPS sont le
résultat de choix fiscaux qui, dans le passé, ont été faits par les gens
qui établissent la politique fiscale de ces provinces, permettant
aujourd'hui, par exemple, au Nouveau-Brunswick de courtiser des
entreprises du Québec en faisant valoir un niveau de taxe sur la
masse salariale bien inférieur à celui du Québec?
Est-ce que le ministre des Finances n'admet pas
qu'effectivement, si le montant de la taxe de vente est aussi élevé
dans ces provinces, c'est parce que des choix fiscaux différents ont
été faits?
8193
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Non,
monsieur le Président. D'abord, regardons la formule: par exemple,
le Manitoba et la Saskatchewan auraient été admissibles-et elles le
sont encore-mais elles ont une base de taxation très différente de
celle des provinces de l'Atlantique.
Alors non, vraiment, on a examiné la capacité financière des
provinces; c'est une formule qui s'applique, mais elle ne s'applique
pas au Québec, ni à l'Ontario, ni à l'Alberta, ni à la
Colombie-Britannique.
M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le
Président, ce qui est malheureux dans le calcul de cette
compensation, c'est qu'il a été connu de tous uniquement après que
le Québec eut réclamé le même traitement que les Maritimes. Là, le
ministre est arrivé avec une formule qu'on pourrait appeler la
formule McKenna.
Mais en refusant justice au Québec, malgré les demandes
répétées du ministre des Finances, le ministre des Finances du
Canada n'oblige-t-il pas ainsi les Québécois à subventionner
directement eux-mêmes le maraudage fait par Frank McKenna
auprès des entreprises du Québec, faisant valoir une fiscalité plus
avantageuse au Nouveau-Brunswick? Le ministre des Finances ne
nous condamne-t-il pas, nous du Québec, à subventionner ce
maraudage?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le
Président, la seule chose qui a été examinée a été les données des
autres provinces. On a demandé aux autres provinces si elles les
avaient fournies.
Mais la formule était connue d'avance. Elle est assez simple; elle
dit que si vous perdez plus de 5 p. 100 de vos revenus après
l'harmonisation, vous avez droit à une compensation. C'est très
clair. Ça ne prend pas un comptable ou un économiste pour le
calculer.
(1420)
Il n'y a pas de doute que chaque province a ses besoins. Le député
sait fort bien, lorsqu'on parle de divers traitements accordés à
d'autres provinces, que le Québec reçoit 45 p. 100 de la péréquation
au Canada. En même temps, le Québec, avec 25 ou 24 p. 100 de la
population, reçoit 31 p. 100 des transferts du fédéral. Il faut le dire,
le Québec a été traité de façon très juste.
* * *
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le
Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.
Encore ce matin, on pouvait lire dans les journaux que le ministre
des Finances, grâce à une marge de manoeuvre dégagée avec le
dépassement de ses objectifs de réduction du déficit, a l'intention,
demain, avec le dépôt de son budget, d'annoncer des mesures. . .
Des voix: Bravo!
M. Loubier: À leur place, j'attendrais avant d'applaudir, car ce
qui s'en vient n'est pas trop beau. Donc, le ministre a l'intention
d'annoncer demain des mesures contre la pauvreté des enfants et en
vue d'améliorer le système de soins de santé.
Doit-on comprendre que les mesures que le ministre des
Finances s'apprête à nous annoncer dans deux champs de
compétence provinciale ont pour but de faire oublier que c'est à
cause de ses coupures à lui, des coupures de 4,5 milliards dans les
programmes sociaux et la santé, que la pauvreté des enfants et le
système de santé se sont détériorés?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le
Président, il faut regarder ce que le gouvernement a fait depuis qu'il
a pris le pouvoir, les choses que nous avons mises en place. Par
exemple, l'année dernière, nous avons annoncé qu'on doublait le
supplément de revenu gagné pour les enfants pauvres vivant dans
des familles qui travaillent. Nous l'avons doublé, car il est passé de
500 $ à 1 000 $ par année. Cela vient du gouvernement fédéral pour
aider les familles de notre pays.
Seulement au Québec, on envoie 11 milliards de dollars par
année qui viennent du gouvernement fédéral. Lorsqu'on regarde
l'aide à l'industrie aéronautique, l'aide à l'industrie
pharmaceutique, la façon dont le fédéral travaille d'arrache-pied
pour aider les petites et moyennes entreprises au Québec, je pense
que le député devrait nous remercier.
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le
Président, la réalité, c'est que le ministre des Finances a coupé 4,5
milliards dans les programmes sociaux. Il y a 500 000 enfants
pauvres de plus au Canada depuis qu'il est à la tête du ministère des
Finances. C'est ça, la réalité.
Comment peut-il prétendre ne pas avoir d'argent à donner aux
provinces, par l'entremise des programmes sociaux déjà établis, qui
luttent contre la pauvreté, alors que demain, il nous annoncera des
mesures ponctuelles, des mesures bonbon, des mesures électorales?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le
Président, qu'est-ce que c'est la question?
Une voix: Il en a tellement dit.
M. Martin (LaSalle-Émard): On va le laisser poser sa
question.
Des voix: Oh, oh!
Le Président: C'était une question à propos des bonbons
électoraux.
M. Martin (LaSalle-Émard): Dans ce cas, monsieur le
Président, il est très facile de répondre à la question. Il n'y a pas de
bonbons électoraux de notre part, il y a seulement un excellent
gouvernement.
Des voix: Bravo!
* * *
[
Traduction]
M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le
Président, le ministre des Finances a annoncé vendredi dernier la
plus forte ponction fiscale de l'histoire canadienne, une hausse de
70 p. 100 des cotisations au RPC, c'est-à-dire une hausse des
charges sociales sans aucune hausse correspondante des prestations.
En vertu de l'ancien système, les Canadiens versaient 5,8 p. 100
de leur chèque de paye pour toucher éventuellement une pension de
8194
9 000 $. En vertu du nouveau système, ils devront maintenant
verser 9,9 p. 100 de leur chèque de paye pour toucher les mêmes
9 000 $.
Est-ce là la principale solution du gouvernement à la crise du
régime de pensions, une ponction fiscale de 10 milliards de dollars
qui pénalisera les jeunes Canadiens et tuera les emplois? Pas
étonnant que nous ayons besoin d'un nouveau départ en matière de
réforme des pensions.
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le
Président, la position des députés du Parti réformiste au sujet du
Régime de pensions du Canada est très claire. Ils veulent le faire
sauter. Ils veulent l'éliminer. Dans ces conditions, on peut
comprendre que le chef du Parti réformiste interprète
volontairement de travers ce qu'on a fait. Je me permettrai de mettre
les choses au clair.
(1425)
Pour commencer, il ne s'agit pas d'une ponction fiscale; il ne
s'agit même pas d'une taxe. Les cotisations au Régime de pensions
du Canada sont analogues aux cotisations à un régime privé de
retraite. Il s'agit d'un investissement visant à pourvoir aux futurs
besoins de retraite des Canadiens.
Si le député veut savoir ce que c'est qu'une ponction fiscale, il
n'a qu'à jeter un coup d'oeil à ce que le premier ministre de la
Colombie-Britannique a suggéré, à savoir hausser les cotisations
sans prévoir aucune valeur. On aurait pu, dans ce cas-là, parler
d'une ponction fiscale. Quant à nous, nous avons haussé les
cotisations et nous leur avons donné une valeur.
Si le chef du Parti réformiste ne veut pas me croire sur parole, il
voudra peut-être intervenir dans la campagne électorale albertaine
pour dire à Grant Mitchell et à Ralph Klein qu'ils ont été complices
d'une ponction fiscale. Qu'il aille donc dire à Ralph Klein qu'il
surtaxe les Albertains.
M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le
Président, l'hypocrisie avec laquelle le ministre a répondu constitue
une insulte non seulement envers tous les réformistes, mais aussi
envers tous les aînés du Canada.
Nous avons en l'occurrence un riche ministre des Finances,
admissible à une grasse pension de député, et que fait-il? Il récupère
chaque mois les prestations de sécurité de la vieillesse de milliers de
personnes âgées, il exploite les cotisants au RPC en leur imposant
une hausse des cotisations de 70 p. 100 et il jette en outre un regard
de convoitise sur les économies accumulées dans les REER. Et il a
ensuite le culot de venir prétendre à la Chambre qu'il se soucie des
personnes âgées.
Le ministre n'admettra-t-il pas que les ennuis du Régime de
pensions du Canada sont attribuables à la mauvaise administration
que les libéraux et les conservateurs en ont fait pendant plusieurs
décennies? Si le ministre avait été gestionnaire d'un régime privé de
retraite et l'avait aussi mal administré que le RPC l'a été, lui et ses
collègues seraient en train de fabriquer des plaques
d'immatriculation dans un pénitencier au lieu de siéger à la
Chambre.
Le Président: Chers collègues, je vous invite à être très judicieux
dans votre choix de mots, car ils donnent parfois une mauvaise
impression.
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le
Président, le gouvernement a expliqué à maintes reprises que si, au
cours de la dernière décennie, le gouvernement fédéral précédent et
les gouvernements provinciaux avaient pris le taureau par les cornes
comme l'a fait notre gouvernement, il n'aurait pas été nécessaire
d'opérer une réforme.
Tâchons de comprendre ce que le député laisse entendre. Il dit
non seulement que le gouvernement fédéral a tort, mais aussi que
ses copains Ralph Klein et Mike Harris ont tort également. Il dit que
les huit provinces qui ont eu le courage de faire ce que les deux
autres gouvernements provinciaux n'ont pas fait, de même que le
gouvernement fédéral qui a eu le courage de faire ce que les
gouvernements fédéraux précédents auraient dû faire, ont tort. Eh
bien, nous n'avons pas eu tort de prendre cette décision. Nous avons
eu raison, car nous avons sauvé le Régime de pensions du Canada.
M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le
Président, le gouvernement a vraiment deux poids, deux mesures en
ce qui a trait aux pensions.
En vertu du Régime de pensions du Canada, les Canadiens
paieront des cotisations de 9,9 p. 100 pour toucher une pension
maximale de 9 000 $ par année. En vertu du régime libéral de
pensions des députés, par contre, les cotisations sont à peu près les
mêmes, soit d'environ 9 p. 100, mais elles produiront des
prestations de retraite beaucoup plus généreuses. Pour ses
cotisations de9 p. 100, le chef des conservateurs fédéraux touchera en effet
53 000 $ par année, et pour ses cotisations de 9 p. 100, la
vice-première ministre empochera 9 000 $ par année. On est loin
des9 000 $ des Canadiens ordinaires.
Voici une question que nous allons poser dans toutes les
circonscriptions du pays: comment le gouvernement peut-il
demander aux Canadiens de payer 70 p. 100 de plus pour une maigre
pension de 9 000 $ par année alors que les députés libéraux d'en
face continueront d'avoir droit à une pension de député d'une
écoeurante générosité?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le
Président, si le gouvernement n'avait pas pris la mesure qui a été
annoncée, les cotisations seraient passées non pas à 9,9 p. 100, pour
se stabiliser ensuite à ce niveau, mais à 14 p. 100. Grâce à la mesure
que nous avons prise, les cotisations seront beaucoup moins
élevées.
(1430)
Je vais vous dire quelle question nous allons poser tout au long de
la campagne électorale. Les députés d'en face prétendent que la
hausse des cotisations de 5,8 à 9,9 p. 100 constitue une ponction
fiscale. Si le Parti réformiste mettait en oeuvre la solution qu'il
préconise, c'est-à-dire son projet de super REER doublé d'un
financement quelconque pour le Régime de pensions du Canada, les
cotisations s'en trouveraient beaucoup plus élevées. Les réformistes
ne veulent pas dire aux Canadiens que ce qu'ils préconisent
équivaut à une énorme ponction fiscale, car ils n'ont pas le courage
de leur dévoiler leurs calculs.
Le Président: Je suis convaincu qu'on ne met pas en doute le
courage de qui que ce soit à la Chambre.
8195
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le
Président, le premier ministre et tous ses ministres peuvent bien
faire les analyses les plus savantes, tenir les discours les plus
généreux à l'égard de la population, surtout envers les plus
démunis, il n'en demeure pas moins que la réalité est tout autre.
Ma question s'adresse au premier ministre. La véritable stratégie
de ce gouvernement n'est-elle pas celle qu'a révélée un haut
fonctionnaire canadien en nous informant de ce que le premier
ministre a expliqué au président français, M. Jacques Chirac? Il lui a
expliqué la stratégie, à savoir qu'au Canada c'est facile de couper
dans les services de santé car c'est le fédéral qui prend les décisions
unilatéralement, alors que ce sont les provinces qui doivent faire les
coupures et en payer le prix politique.
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur
le Président, si on regarde la situation pour le Québec, les transferts
que le gouvernement canadien a versés à la province de Québec, en
1996, dépassaient 11 milliards de dollars, exactement le même
montant que les transferts faits en 1993, lorsque nous avons formé
le gouvernement.
Dans les provinces les moins privilégiées au Canada, si les
transferts ont diminué pour les provinces dans certains
programmes, ils ont été compensés par la péréquation pour les
provinces qui n'ont pas le même niveau de revenu que les autres. La
réalité, c'est qu'au cours des trois dernières années les montants
transférés par le fédéral à la trésorerie provinciale au Québec sont
au-delà de 11 milliards et ils n'ont pas baissé sous ce niveau-là.
M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le
Président, les chiffres c'est qu'on a coupé 1,3 milliard dans les
paiements de transfert, alors qu'il y a une augmentation de la
péréquation de 40 millions. Depuis quand le premier ministre
vient-il nous dire qu'on est bien chanceux de recevoir plus
d'assurance-chômage? Il devrait peut-être se rendre compte que
c'est parce qu'il y a plus de chômage, et c'est totalement méprisant.
S'il y a plus de chômage, c'est justement à cause des politiques du
fédéral. La réalité nous prouve tout le contraire.
Je demande au premier ministre s'il va enfin comprendre qu'il ne
doit plus intervenir dans les champs de compétence provinciale, tels
que la santé, l'éducation, la formation des jeunes, mais se retirer de
ces champs, remettre l'argent aux provinces et leur permettre de
répondre aux besoins de leurs citoyens plutôt que de venir faire de la
surenchère sur la misère du monde.
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur
le Président, je pense que c'est le devoir du gouvernement canadien
de s'assurer que ceux qui sont les plus démunis au Canada reçoivent
une compensation adéquate pour essayer d'avoir un niveau de vie
adéquat.
Ce n'est pas ce gouvernement qui va s'excuser de vouloir faire ce
que toutes les provinces réunies ont demandé de faire. À la suite de
la réunion du mois de juin avec les premiers ministres provinciaux,
on a dit qu'il fallait travailler sur le problème de la pauvreté des
enfants. Il y a eu un accord de toutes les provinces, et j'espère que le
ministre des Finances sera en mesure de faire quelque chose au sujet
de la pauvreté des enfants, demain dans son budget.
* * *
[
Traduction]
M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le
Président, les cotisations au Régime de pensions du Canada
constituent des charges sociales. Elles sont fixées par le
gouvernement fédéral et les provinces, sans que les employés et les
employeurs aient voix au chapitre. Ce ne sont ni plus ni moins que
des taxes. L'augmentation de 1 300 $ des cotisations au régime de
pension du Canada que vient d'annoncer le gouvernement libéral se
traduira par une hausse considérable des charges sociales imposées
à chacun des travailleurs canadiens.
Le 3 mai 1994, le ministre des Finances avait pourtant déclaré à
la Chambre que les charges sociales étaient un cancer qui minait la
création d'emplois. Aujourd'hui, le ministre des Finances croit-il
encore que les charges sociales sont un cancer qui mine la création
d'emplois?
(1435)
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le
Président, même si le Parti réformiste veut anéantir le Régime de
pensions du Canada, ce n'est pas une raison pour déformer la nature
même des cotisations à ce régime.
Je rappelle que les cotisations aux commissions d'indemnisation
des accidentés du travail sont taxées. Il existe aussi d'autres formes
de taxes au niveau provincial, de même que les cotisations aux
régimes d'assurance-maladie et plein de choses du genre.
En général, le député est un homme juste, il sait donc fort bien
que les cotisations au Régime de pensions du Canada ressemblent
beaucoup à des cotisations à un régime de pension privé. Il s'agit
d'un investissement dans la retraite des Canadiens et ne devrait pas
être décrit autrement.
Il n'incombe pas au député d'alarmer les Canadiens ou de les
induire en erreur. Il devrait plutôt leur expliquer la situation. S'il a
une divergence d'opinion, qu'il l'exprime, mais qu'il n'interprète
pas mal la mesure que nous prenons.
M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le
Président, peu importe comment vous l'appelez, une taxe est une
taxe et le restera toujours. Cette taxe se révélera injuste et
particulièrement lourde pour les jeunes Canadiens, et ce, aux
dépens des Canadiens âgés. On ne peut pas le nier. Elle sera
coûteuse et difficile à absorber pour les jeunes Canadiens.
L'augmentation des charges sociales que devront payer les
employeurs et les employés représentera environ le paiement
mensuel
8196
combiné de la voiture et de l'hypothèque ou à peu près la moitié des
frais de scolarité d'un étudiant à l'université. Elle retranchera 10
milliards de dollars sur les chèques de paie des Canadiens chaque
année.
Combien d'emplois permanents seront perdus à cause de cette
somme de 10 milliards de dollars qui sera retirée de l'économie
chaque année?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le
Président, c'est justement le contraire. Comme les Canadiens seront
de nouveau convaincus de pouvoir compter sur le Régime de
pensions du Canada, des milliers d'emplois seront créés. De plus,
lorsque le nouveau fonds d'investissement sera établi et confié à des
gestionnaires indépendants et habilités à investir dans les
entreprises canadiennes, cela contribuera énormément à créer des
emplois au Canada.
Le député a prétendu que nous avions accordé un traitement plus
favorable à une génération qu'à une autre. Le député pense-t-il que
nous aurions dû réduire la pension de vieillesse? Pense-t-il que nous
aurions dû désindexer la pension de vieillesse? Pense-t-il que nous
aurions dû prendre des mesures discriminatoires contre les
Canadiens âgés? Que la Chambre soit assurée d'une chose, nous ne
le ferons jamais.
* * *
[
Français]
M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président,
ma question s'adresse au ministre de la Défense.
Vendredi dernier, le ministre de la Défense nationale a causé tout
un émoi en déclarant que le Somalien tué lors des événements du 4
mars 1993 fut victime d'un meurtre. Il contredisait ainsi les
conclusions du rapport de la police militaire et ajoutait de la
confusion au dossier parce qu'il parlait alors de plusieurs meurtres.
Lorsqu'il a déclaré à la presse qu'à ses yeux le Somalien tué le 4
mars 1993 fut victime d'un meurtre, et ce, parce que des soldats
canadiens lui ont tiré dans le dos, le ministre donnait-il son opinion
personnelle ou dévoilait-il une information privilégiée reçue d'un
haut gradé de l'armée?
L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et
ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président,
comme je l'ai dit vendredi dernier, il n'y a aucun doute que j'ai fait
une erreur en reliant les incidents en Somalie, et en décrivant
l'incident auquel mon honorable collègue fait référence aujourd'hui
comme étant un meurtre.
Évidemment, dans le cas du Somalien tué après torture, la
conclusion a été qu'il s'agissait d'un meurtre. Dans l'incident où on
a tiré sur deux Somaliens, un a connu la mort, je m'excuse comme je
l'ai fait vendredi dernier devant cette Chambre d'avoir fait une
erreur en reliant les deux éléments.
Je crois qu'il serait totalement inapproprié pour moi aujourd'hui,
comme cela l'était d'ailleurs vendredi dernier, de faire ce genre de
lien avant que toute la lumière ne soit faite et, surtout, que les
conclusions de la Commission d'enquête sur la Somalie soient
données à la fin du mois de juin.
M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président,
le ministre a lui-même ajouté un peu de confusion dans ce dossier
et, de toute évidence, les commissaires ne pourront pas faire la
lumière sur les événements du 4 mars, parce qu'ils n'ont plus le
temps d'entendre aucun autre témoin.
Puisque le ministre a lui-même avoué en Chambre, et il l'a
répété, que cette question avait encore besoin d'être résolue, quelle
garantie peut-il nous donner aujourd'hui que toute la lumière sera
faite et que nous saurons si le 4 mars il y a eu meurtre ou non,
comme il le prétendait lui-même vendredi, alors qu'on ne peut plus
avoir cette garantie de la Commission d'enquête sur la Somalie?
(1440)
L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et
ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président,
il n'y a aucun doute qu'il s'agit d'une question très importante.
Lorsque je fais une erreur, j'essaie d'éviter d'en commettre une
deuxième ou une troisième.
Il n'y a aucun doute qu'on doive attendre. Je ne veux pas
préjuger, ni causer de préjudice quelconque à la Commission
d'enquête, basé sur le témoignage qui a déjà été entendu ou sur des
témoignages qu'elle pourra entendre dans l'avenir. Mais ce que je
m'engage à faire envers mon honorable collègue aussi bien
qu'envers tous les députés de cette Chambre, c'est qu'une fois les
travaux de la Commission terminés, une fois les conclusions et les
recommandations soumises, évidemment, à ce moment-là, le
gouvernement sera obligé de se pencher sur toute la question afin de
voir quelle réaction serait la plus appropriée.
Parce que je me suis ingéré, vendredi, dans un secteur où je
n'aurais pas dû, je ne m'attends pas à le faire aujourd'hui.
* * *
[
Traduction]
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le
Président, il y a deux ans, le ministre des Finances a dit que les
charges sociales suppriment des emplois. Voici maintenant qu'il
affirme qu'elles créent des emplois. Nous sommes nombreux à nous
demander de quoi pouvait bien souffrir le ministre la semaine
dernière.
Il y a deux ans, les libéraux se sont voté le meilleur régime de
retraite qu'ils pouvaient se payer avec l'argent des contribuables, un
régime de retraite plaqué or. Conformément au régime, le chef
conservateur toucherait 53 000 $ par année pour un taux de
cotisation de 9,9 p. 100, et la vice-première ministre, 49 000 $ par
année. Pendant ce temps-là, les Canadiens ordinaires recevraient
9 000 $ par année pour un taux de cotisation de 9,9 p. 100.
Pour être conséquent et juste, le ministre annoncera-t-il
immédiatement une hausse de 70 p. 100 des cotisations du régime
de retraite des députés?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le
Président, je crois que je vais répondre à la question soulevée dans
le préambule à la question du député.
Si l'on y regarde de près, on verra que l'ingrédient essentiel
d'une économie prospère, c'est la confiance: la confiance qu'il y
aura des soins de santé pour les travailleurs, la confiance qu'il y aura
des prestations de la Sécurité de la vieillesse pour les travailleurs.
C'est grâce à la confiance que le gouvernement peut garder le cap et
poursuivre non pas la politique de la terre brûlée préconisée par les
8197
réformistes ni la politique de l'autruche de l'ancien gouvernement
conservateur, que reprennent à leur compte aujourd'hui les
néo-démocrates, mais une politique qui garantit aux Canadiens que
les programmes fédéraux fondamentaux seront là pour eux.
Voilà ce que nous avons fait avec le Régime de pensions du
Canada. Le député devrait comprendre cela.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le
Président, le ministre des Finances essaie d'éluder la question, qui
est pourtant une bonne question. Les Canadiens veulent savoir
pourquoi il y a deux poids deux mesures. La députée de Beaver
River a volontairement renoncé à une retraite de 1,5 million de
dollars parce qu'elle croit au gouvernement par l'exemple.
Le ministre des Finances est peut-être suffisamment à l'aise pour
que cela ne le dérange pas, mais les Canadiens ordinaires ne croient
pas qu'il devrait y avoir deux poids deux mesures entre ce que les
députés libéraux s'accordent à eux mêmes et ce qu'ils accordent aux
autres Canadiens.
Pourquoi les deux poids deux mesures?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le
Président, d'abord, si l'on examine le régime de retraite des
députés, on verra que le gouvernement a opté pour cela plutôt que
pour doubler le salaire des députés, comme le préconisait le Parti
réformiste. Le fait est que. . .
Des voix: Oh, oh!
M. Martin (LaSalle-Émard): Monsieur le Président, le député
parle de deux poids deux mesures à l'égard de la hausse des
cotisations du Régime de pensions du Canada. J'ai demandé aux
réformistes de combien ils augmenteraient les cotisations.
Je vais vous le dire, monsieur le Président, puisque les
réformistes ne le font pas. Comparé à nos 9,9 p. 100, le modèle
réformiste prévoit un taux effrayant de 13 p. 100. Voilà ce que
feraient les réformistes.
* * *
[
Français]
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ):
Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la
Défense nationale.
En fin de semaine, on apprenait que le major Michel
Prud'homme et le colonel R.G. Taylor du service militaire de
l'Ambassade du Canada à Washington avaient demandé à un
employé de l'Agence américaine de renseignement de la défense
d'espionner un diplomate du Québec en poste dans la capitale
américaine.
Le ministre de la Défense confirme-t-il que le service militaire de
l'Ambassade du Canada à Washington ait fait une telle demande à
l'Agence américaine de renseignement de la défense?
(1445)
[Traduction]
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères,
Lib.): Monsieur le Président, il n'y a aucune politique, aucune
directive ordonnant l'espionnage de quelque représentant de
gouvernement provincial que ce soit, voire de quiconque, dans
quelque ambassade que ce soit.
Cette allégation est donc sans le moindre fondement.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ):
Monsieur le Président, on a déjà entendu de telles chansons, mais on
se rappelle des granges brûlées au Québec, des listes des membres
du PQ qui ont été volées, des poseurs de bombes de la GRC et des
promotions dont ses acteurs ont été gratifiés par la suite quand on a
découvert le pot aux roses.
Est-ce que le ministre peut nous affirmer solennellement, de son
siège, que son ministère n'a jamais demandé à quelque
gouvernement que ce soit d'espionner les représentants du
gouvernement du Québec à l'étranger?
[Traduction]
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères,
Lib.): Monsieur le Président, je viens tout juste de dire très
clairement qu'il n'y a absolument aucune directive sur l'espionnage
de qui que ce soit. La personne en cause est un porte-parole du
gouvernement américain qui a prononcé un discours à une
conférence au cours duquel il a soutenu un point de vue
diamétralement opposé à la position officielle du gouvernement des
États-Unis.
Nous n'avons fait que chercher à savoir quelle était la divergence
de vues. La personne en cause a ensuite fait une affirmation. La
députée, qui ne manque ni de raison ni de jugement, devrait savoir
reconnaître une déclaration absurde quand elle en entend une.
* * *
M. David Iftody (Provencher, Lib.): Monsieur le Président, ma
question s'adresse au ministre de l'Agriculture.
Les agriculteurs de l'ouest du Canada perdent des millions de
dollars à cause du piètre rendement des compagnies ferroviaires.
Celles-ci refusent d'expédier le grain sur la côte ouest.
Le week-end dernier, j'ai rencontré, dans ma circonscription, des
agriculteurs de la région de Morris qui en ont assez d'être les otages
des compagnies ferroviaires. Ils ont besoin de wagons à grain et ils
en ont besoin dès maintenant.
Le ministre peut-il dire à ces agriculteurs ce qu'ont donné ses
rencontres du week-end dernier avec les groupes intéressés? Peut-il
donner aux agriculteurs de ma circonscription l'assurance que des
wagons leur seront fournis et que le grain commencera à être
acheminé dès aujourd'hui?
8198
L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de
l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, l'accumulation
du grain dans l'ouest du Canada est évidemment un problème grave
et coûteux.
J'ai convoqué, la semaine dernière, à Calgary, une rencontre qui
s'est révélée très constructive et à laquelle ont pris part tous ceux
qui interviennent dans la logistique du transport du grain dans
l'ouest du Canada. Les participants se sont montrés très déterminés
à trouver des solutions et à ne pas blâmer quiconque.
Nous avons établi que les six à huit prochaines semaines seront
d'une importance capitale, non seulement pour que nous
respections les objectifs d'expédition fondamentaux, mais aussi
pour que nous venions à bout des accumulations.
Les participants ont convenu d'essayer de simplifier
temporairement la collecte du grain dans les régions pour utiliser les
locomotives le plus efficacement possible et pour réduire le temps
de rotation des wagons.
Ils ont accepté diverses autres mesures afin de mieux utiliser les
locomotives, d'améliorer les activités aux terminaux et d'étudier
l'utilisation de camions pour augmenter la capacité de notre
système.
Il importe aussi de souligner. . .
Le Président: La parole est au député
d'Okanagan-Similkameen-Merritt.
* * *
M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.):
Monsieur le Président, la semaine dernière, le ministre de la
Défense nationale a déclaré que tout le monde au Canada savait
exactement ce qui s'était passé sur le terrain en Somalie.
Vendredi, nous sommes arrivés au point où le ministre a reconnu
avoir induit la Chambre en erreur et a présenté des excuses. Le
ministre ne sait pas très bien ce qui s'est produit. Il ne comprend pas
le dossier des événements de Somalie.
Ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale.
Comment les Canadiens peuvent-ils croire ses paroles? A-t-il
souvent induit les Canadiens en erreur comme il l'a fait vendredi
dernier?
L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et
ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président,
il ne fait aucun doute que, comme je l'ai dit vendredi, j'ai commis
une erreur lorsque j'ai utilisé le mot meurtre au pluriel en parlant
des événements survenus en Somalie en mars.
D'ailleurs, dès que les journalistes ont porté cette erreur à mon
attention, car elle n'a pas été relevée à la Chambre, je suis revenu.
J'ai vérifié la première transcription pour voir ce que j'avais dit
au juste. J'ai alors compris que j'avais fait une erreur. Je suis revenu
à la Chambre et, à la première occasion, je me suis corrigé.
(1450)
Je tiens à souhaiter un bon retour à la Chambre au député qui, je le
sais, vient de connaître une période difficile sur le plan de la santé.
Pour que tout soit bien clair dans mon esprit, j'aimerais que le
député m'explique pourquoi, en avril 1996, il aurait apparemment
déclaré ceci: «L'existence de problèmes a maintenant été
amplement démontrée. La commission n'a plus son utilité. L'argent
des contribuables serait mieux dépensé s'il servait à payer une
enquête criminelle.»
Quelle est aujourd'hui la position du député sur l'enquête
concernant la mission en Somalie?
M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.):
Monsieur le Président, le ministre fait preuve de beaucoup
d'humilité aujourd'hui, mais il est beaucoup trop tard pour
présenter des excuses.
Il continue d'interférer avec le travail de la commission
d'enquête. Depuis le début, son ministère a mis des bâtons dans les
roues de la commission et a refusé de fournir l'information. Les
déclarations irréfléchies du ministre compromettent maintenant le
travail des commissaires.
Le ministre comprend-il que ses gestes témoignent d'un manque
total de respect pour le déroulement régulier du processus
judiciaire?
L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et
ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président,
le processus judiciaire régulier dont parle le député a été enclenché
en mars 1995 et prolongé à trois reprises, dont la dernière fois tout
récemment, lorsque le gouvernement a demandé à la commission de
présenter son rapport le 30 juin, soit beaucoup plus tard que ce qui
avait été prévu au moment de la création de la commission
d'enquête.
Il faut admettre que le gouvernement a dû prendre une décision.
Nous avons jugé qu'il était dans l'intérêt de toutes les personnes en
cause d'aller de l'avant et de nous occuper des problèmes précis des
Forces armées canadiennes et du ministère de la Défense nationale.
Le déroulement régulier du processus judiciaire dont le député
parle avec tant de légèreté est le processus dont il disait lui-même, il
y a près d'un an, qu'il fallait y mettre fin parce que la commission
n'avait plus son utilité.
Je sais que c'est difficile, mais quand je fais une erreur, comme
vendredi dernier, je le reconnais et j'essaie de la corriger. J'exhorte
le député à faire comme moi et à admettre que, peut-être, il a fait une
erreur.
* * *
[
Français]
M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe, BQ): Monsieur le
Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires
étrangères.
Le 10 février dernier, c'est dans la discrétion la plus absolue que
le ministère des Affaires étrangères rendait publiques ses nouvelles
lignes directrices concernant le financement des arts. Cette nouvelle
8199
politique prévoit que pour obtenir du financement du ministère des
Affaires étrangères, les projets culturels qui seront soumis devront
défendre l'unité nationale.
Étant donné qu'en agissant ainsi, le ministère des Affaires
étrangères bafoue la liberté d'expression des artistes pour ne
financer que les projets culturels qui vantent le Canada, le ministre
peut-il s'engager à transférer le programme culturel des Affaires
étrangères au Conseil des arts du Canada, organisme indépendant,
libre de toute attache politique et dont le mandat est justement de
gérer le soutien aux artistes?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères,
Lib.): Monsieur le Président, les changements ont été faits pour
améliorer l'accès de différents groupes comme la jeunesse et les
peuples aborigènes. En même temps, le changement vise également
à promouvoir les intérêts et les valeurs des Canadiens à l'étranger.
En conséquence, c'est une politique importante pour promouvoir
les intérêts du Canada au pays et pour s'assurer que tous les groupes,
partout au Canada, aient accès aux programmes.
M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe, BQ): Monsieur le
Président, le ministre doit savoir que ça fait des décennies que cette
pratique s'installe pour dépolitiser les subventions et qu'on a créé à
cette fin Téléfilm Canada, le Conseil des arts du Canada.
Le ministre des Affaires étrangères ne réalise-t-il pas qu'il est en
train de faire la chasse aux sorcières, amorcée au lendemain du
référendum par le Comité du patrimoine et claironnée partout par
l'ineffable vice-première ministre et ministre du Patrimoine?
[Traduction]
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères,
Lib.): Monsieur le Président, je crois que le député a tout compris
de travers. Le but du programme, qui va dans le sens du troisième
pilier de notre politique étrangère, est de nous assurer de faire
participer le monde extérieur aux valeurs qui sont importantes pour
le Canada.
Par exemple, nous célébrons cette année l'année de l'Asie du
Pacifique. Nous tentons d'amener les Canadiens à exploiter les
débouchés énormes qui se créent actuellement dans les pays côtiers
du Pacifique en Asie. Le programme culturel consiste en partie à
établir, entre des groupes canadiens et asiatiques, des partenariats
propices au développement d'intérêts culturels communs, tant au
Canada qu'à l'étranger, et à inviter des groupes au Canada.
(1455)
Ils sont tous jugés au mérite et selon leur valeur artistique,
indépendamment de leur couleur politique. Nous voulons
simplement permettre à la culture canadienne et aux valeurs qu'elle
représente de pouvoir s'exprimer dans les pays asiatiques du
Pacifique, qui sont en pleine expansion.
* * *
M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, la
chaîne de télévision CTV a révélé que 160 500 $ avaient été alloués
l'an dernier au ministre de la Justice pour des conseils de
communication stratégique. Autrement dit, l'argent des
contribuables a servi à payer des doreurs d'image pour donner
bonne apparence au ministre de la Justice et au gouvernement dans
le scandale de l'Airbus.
Comment le ministre de la Justice peut-il justifier le fait
d'utiliser l'argent du ministère de la Justice à des fins purement
partisanes?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur
général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, s'il est une chose
sur laquelle on peut compter de la part du député de Crowfoot, c'est
de ne jamais avoir les faits exacts. Il vient encore de nous le prouver.
Conformément à la pratique usuelle, le ministère de la Justice a
lancé un appel d'offres et a adjugé un contrat à un consultant de
l'extérieur en 1995. Le contrat stipulait les tarifs habituels. Il a été
reconduit pour un an et il a été fait recours aux services prévus dans
le contrat à diverses fins législatives, en conformité avec la pratique
ordinaire.
Il est vrai qu'on a demandé conseil dans l'affaire de l'Airbus,
mais c'était là l'un des moindres aspects du contrat. En réalité, il
s'agissait d'avis du type ordinairement fourni aux ministères,
conformément aux lignes directrices et à la pratique acceptées.
M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, bien
sûr, 160 000 $, c'est peu par rapport aux 2 millions qui ont dû être
déboursés à cause de l'incompétence du ministre de la Justice dans
l'affaire de l'Airbus.
Maintenant qu'il se rend compte que cet argent n'a pas aidé à lui
donner bonne apparence, le ministre de la Justice va-t-il demander à
ses doreurs de le rembourser?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur
général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, c'est la
perception du député. Je puis seulement imaginer ce que le député
pense de sa place là-bas. Quoi qu'il en soit, je puis assurer au député
et à la Chambre que tout dans cette affaire a été fait conformément à
la pratique.
* * *
M. Jesse Flis (Parkdale-High Park, Lib.): Monsieur le
Président, ma question s'adresse au ministre de la Coopération
internationale et ministre responsable de la Francophonie.
Au cours des derniers jours, des représentants du gouvernement
du Rwanda ont apparemment affirmé qu'il était justifié, dans leur
cas, d'utiliser l'argent de l'aide extérieure pour les fins du
gouvernement. Le ministre peut-il dire à la Chambre si l'argent que
nous avons donné au Rwanda a servi à d'autres fins qu'à aider ceux
qui en ont le plus besoin?
L'hon. Don Boudria (ministre de la Coopération
internationale et ministre responsable de la Francophonie,
Lib.): Monsieur le Président, je signale à la Chambre que le
gouvernement du Rwanda ne reçoit aucun financement de l'Agence
canadienne de développement international. Toute l'aide que nous
fournissons à ce
8200
pays, comme à la plupart des pays, d'ailleurs, est versée à des
organisations non gouvernementales canadiennes ou multilatérales.
Donc, si nous ne donnons pas d'argent au gouvernement du
Rwanda, celui-ci ne peut pas le divertir à d'autres fins. S'il le fait, ce
n'est pas avec l'argent du Canada.
* * *
M. Chris Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing, NPD):
Monsieur le Président, ma question, qui s'adresse au ministre de la
Justice, porte sur les conseils stratégiques en communications qu'il
a reçus dans le cadre d'un contrat avec une entreprise médiatique
libérale bien connue. Aux termes du contrat, elle devait donner des
conseils stratégiques au ministre sur son programme législatif.
Nous savons tous que l'affaire des Airbus ne faisait pas partie de ce
dernier. Pourtant, cette entreprise a reçu 160 000 $ en vertu de ce
contrat.
Pourquoi le ministre a-t-il payé pour des conseils qui n'étaient
pas prévus au contrat? Combien a-t-il payé pour se faire dire
comment se comporter dans l'affaire des Airbus, alors qu'il
prétendait n'avoir rien à faire avec cette dernière?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur
général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, il est
remarquable de constater avec quel enthousiasme le député
interprète un contrat qu'il n'a fort probablement jamais vu et qui
renferme des dispositions dont il ne sait rien, citant des chiffres
qu'il a glanés dans d'obscurs reportages télévisés. Son
enthousiasme est remarquable.
(1500)
Le député connaît la réponse puisque sa question a déjà été posée,
beaucoup mieux d'ailleurs, et qu'on y a répondu. Les sommes
concernées ont été versées en paiement de conseils portant sur
certaines initiatives législatives et tous les services qui ont été
rendus étaient conformes à ce qui était prévu dans le contrat.
* * *
M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le
Président, j'invoque le Règlement. J'aimerais vous entendre
expliquer le genre de propos que les ministériels ont tenus durant la
période des questions.
Durant la période des questions, le ministre des Finances a
employé deux expressions différentes, toutes deux décrétées non
parlementaires selon Beauchesne.
Durant la période des questions, le ministre des Finances a
déclaré, en parlant du chef du troisième parti, qu'il «n'avait pas de
courage» et ensuite, qu'il «ne devrait pas induire les gens en
erreur».
Monsieur le Président, ces deux expressions sont non
parlementaires, comme on peut le voir aux pages 151 et 152 de
Beauchesne. Je demande au ministre de retirer. . .
Le Président: Comme vous le savez, et comme le savent tous nos
collègues, bien peu de mots sont, en soi, inacceptables à la
Chambre; tout dépend du contexte.
Je crois que vous avez dit que quelqu'un aurait employé
l'expression «n'a pas de courage» à l'égard d'un député. J'ai déjà
indiqué qu'on ne devait jamais, ici à la Chambre, mettre en doute le
courage d'un député et c'est ce dont il est question maintenant.
J'aimerais bien que les députés n'emploient jamais des mots
comme ceux-là.
En ce qui concerne l'expression «induire en erreur», j'ai écouté
attentivement ce qui a été dit. Cette expression a été prononcée des
deux côtés de la Chambre aujourd'hui. Je cherchais à bien saisir le
ton des échanges. Aucun député n'a dit «volontairement» induire en
erreur. Je vous demande de ne pas employer l'expression «induire
en erreur» car, habituellement, si elle offense un député, l'autre côté
riposte.
Je vous prie donc, chers collègues, de ne pas employer des
expressions comme celles-là, ni durant la période des questions, ni
durant les débats. Nous vivons dans une atmosphère où les émotions
sont à fleur de peau et je vous engage à choisir judicieusement vos
mots. En ce qui concerne les paroles prononcées aujourd'hui, si je
les avais jugées non parlementaires, je l'aurais dit.
Je remercie le député d'avoir soulevé cette question sous forme
de rappel au Règlement.
M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président,
j'invoque le Règlement.
C'est également au sujet de la période des questions
d'aujourd'hui. C'est au sujet d'une réponse du ministre des
Finances qui disait que le chef du Parti réformiste ne devrait pas
induire les Canadiens en erreur. Je proteste contre cette
interprétation tout à fait erronée des faits.
(1505)
Le Président: Une fois de plus, J'invite les députés à ne pas
utiliser pas d'expressions comme «induire la Chambre en erreur»,
car cela provoque immanquablement une réaction.
Je pense que le député se lance dans un débat. Il a toute liberté de
participer à tout débat à la Chambre. J'estime que son propos tient
plus du débat que d'un rappel au Règlement.
M. Silye: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.
Le Président: Est-ce pour la même raison, celle pour laquelle je
viens de prendre une décision?
M. Silye: Monsieur le Président, c'est un autre point.
8201
Dans une autre réponse à une question, le ministre des Finances a
parlé de la position réformiste à propos des pensions des députés.
Notre plan est l'abolition. . .
Le Président: Une fois de plus, je considère que cela tient du
débat.
______________________________________________
8201
AFFAIRES COURANTES
[
Français]
M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du
gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le
Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai
l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse
du gouvernement à 30 pétitions.
* * *
[
Traduction]
M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président,
j'ai l'honneur de présenter une pétition dont les signataires
exhortent le Parlement à demander au gouvernement de mettre sur
pied un programme d'infrastructures afin de résoudre les problèmes
d'infrastructure qui affligent le pays.
M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.): Monsieur le
Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition qui rappelle que
la deuxième phase de la Stratégie nationale sur le sida vient à
échéance le 31 mars 1998. Les pétitionnaires demandent que le
Parlement fasse en sorte que des fonds soient affectés au sida après
mars 1998 et que la Stratégie nationale sur le sida soit renouvelée.
J'appuie cette pétition qui vient d'électeurs de Don Valley-Ouest.
M. Jim Jordan (Leeds-Grenville, Lib.): Monsieur le
Président, je désire présenter une pétition venant de Prescott,
Brockville et des localités environnantes.
Les pétitionnaires demandent au premier ministre et au
Parlement de déclarer et de confirmer immédiatement que le
Canada est indivisible et que les frontières du Canada, ses
provinces, territoires et eaux territoriales ne peuvent être modifiés
que par un vote libre de tous les citoyens, conformément à la Charte
canadienne des droits et libertés, ou en vertu de la formule de
modification prévue dans la Constitution canadienne.
Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley,
Réf.): Monsieur le Président, j'aimerais présenter les trois pétitions
suivantes.
Les signataires de la première pétition demandent au Parlement
d'exhorter le gouvernement fédéral à travailler en collaboration
avec les provinces à l'amélioration du réseau routier national.
Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley,
Réf.): Monsieur le Président, la deuxième pétition porte sur les
nombreuses personnes qui, en plus d'être malades ou invalides, ne
touchent ni prestations d'assurance-chômage ni autres prestations
d'assurance.
Les pétitionnaires demandent au Parlement de déposer une
mesure législative qui instaurerait des prestations d'invalidité
temporaire et qui permettrait aux travailleurs canadiens souffrant
d'une maladie ou d'une blessure débilitante de recevoir des
prestations d'invalidité sous l'une des formes suivantes: 1)
prestations d'assurance-chômage pendant 15 semaines; 2)
prestations d'invalidité temporaire; et 3) prestations dans le cadre
d'un régime canadien de pension d'invalidité.
Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley,
Réf.): Monsieur le Président, la troisième pétition vient de
personnes qui réagissent à l'imposition de la taxe de vente sur les
ouvrages de lecture.
Les pétitionnaires prient le gouvernement de montrer qu'il
appuie l'enseignement et l'alphabétisation en supprimant la taxe de
vente sur les ouvrages de lecture. Ils demandent au Parlement de
prévoir un taux de TPS nul pour les livres, les revues et les journaux.
Au moment où les provinces et Ottawa songent à harmoniser leur
taxe de vente, les ouvrages de lecture doivent échapper aux taxes de
vente provinciales et à la TPS.
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président,
conformément à l'article 36 du Règlement, je désire présenter une
pétition que m'ont fait parvenir les gens de ma circonscription.
(1510)
Étant donné qu'il y a plus de 30 000 armes nucléaires sur la terre,
les pétitionnaires demandent au Parlement d'appuyer
immédiatement la conclusion, d'ici l'an 2000, d'une convention
internationale établissant un calendrier exécutoire pour l'abolition
de toutes les armes nucléaires.
M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président,
j'ai deux pétitions à présenter.
La première est signée par 982 habitants de la localité de La
Crête. Les pétitionnaires demandent au Parlement d'aménager un
meilleur bureau de poste dans la région de La Crête. Le bureau de
poste actuel est en service depuis 1972. Il était convenable à
l'époque, mais la localité grandit et l'édifice actuel ne convient plus
ni ne répond plus aux besoins des habitants de la localité. J'ai pu
jeter un coup d'oeil à l'édifice et j'approuve cette pétition.
M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président,
la seconde pétition est signée par 100 personnes de ma
circonscription. Elle exhorte tous les ordres de gouvernement à
manifester leur
8202
soutien à l'éducation et à l'alphabétisation en éliminant la taxe de
vente sur les ouvrages de lecture.
Les pétitionnaires croient que l'application de la TPS sur les
imprimés est injuste et répréhensible. L'éducation et
l'alphabétisation sont essentielles au développement de notre pays
et une taxe régressive sur les ouvrages de lectures nuit à ce
développement.
M. Robert Bertrand (Pontiac-Gatineau-Labelle, Lib.):
Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement,
je voudrais, au nom d'électeurs de Waltham et Chapleau, au
Québec, des municipalités de ma circonscription, présenter une
pétition portant sur une question sociale.
Les pétitionnaires demandent au Parlement de promulguer une
mesure législative contre la distribution, la vente et la promotion de
matériel pornographique dans les magasins de vente au détail.
M. Ronald J. Duhamel (Saint-Boniface, Lib.): Monsieur le
Président, ces pétitionnaires du Manitoba demandent au Parlement
de se joindre aux gouvernements provinciaux pour remettre en état
le réseau routier national.
M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn, Lib.): Monsieur le
Président, j'ai quatre pétitions aujourd'hui.
Dans la première, les pétitionnaires demandent au Parlement
d'appuyer l'élaboration immédiate, et la conclusion d'ici l'an 2000,
d'une convention internationale établissant un échéancier
exécutoire pour l'abolition de toutes les armes nucléaires.
M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn, Lib.): Monsieur le
Président, les deux pétitions suivantes demandent au Parlement
d'exhorter le gouvernement fédéral à collaborer avec les
gouvernements provinciaux pour remettre en état le réseau routier
national.
M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn, Lib.): Monsieur le
Président, la dernière pétition demande au Parlement de ne pas
accroître la taxe d'accise fédérale sur l'essence dans le prochain
budget fédéral.
[Français]
M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président,
des membres de l'Association des automobilistes de la région de
Québec rappellent qu'un pourcentage important du réseau routier
canadien ne répond pas aux normes.
En conséquence, les pétitionnaires demandent au Parlement
d'exercer des pressions sur le gouvernement fédéral pour que
celui-ci se joigne aux gouvernements des provinces afin de rendre
possible l'amélioration du réseau routier.
[Traduction]
M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, j'ai
une pétition qui reconnaît la contribution des chiens policiers dans
notre société.
Les pétitionnaires de l'ouest du Canada demandent que le Code
criminel soit modifié afin d'inclure une disposition sur les chiens
policiers et de prévoir des sanctions, soit sous forme d'amendes ou
de peines d'emprisonnement, à ceux qui blessent sciemment ou qui
tuent un chien policier.
* * *
M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du
gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le
Président, nous répondons aujourd'hui aux questions nos 96 et 101.
[Texte]
Question no 96-M. Strahl:
En ce qui concerne les Canadiens qui ont droit à la fois aux prestations du Régime
de pensions du Canada et à des prestations aux termes de la Loi sur la pension de
retraite des forces canadiennes, pour quel motif et dans quelles circonstances les
prestations aux termes de la LPRFC sont-elles amputées du montant des prestations
du RPC, quel est l'historique de cet usage, quelle loi habilite le gouvernement à faire
cela, quelles lois faudrait-il modifier, en utilisant quel libellé, pour mettre un terme à
cet usage et combien de Canadiens sont concernés par cette pratique; par ailleurs, en
vertu de quels pouvoirs un régime privé d'assurance-invalidité peut-il déduire le
montant de prestations du RPC en même temps que celles-ci sont déduites des
prestations versées aux termes de la LPRFC par le gouvernement, combien de
Canadiens sont concernés, cet usage a-t-il été contesté dans une cour fédérale, et
enfin, quelles lois faudrait-il modifier, en utilisant quel libellé, pour mettre un terme
à cette pratique?
L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et
ministre des Anciens combattants, Lib.): Lorsque le Régime de
pensions du Canada (RPC) a été institué, le gouvernement ne
voulait pas que l'instauration de ce nouveau régime de retraite
désavantage ses employés ou les membres des forces canadiennes
(FC) et ceux de la Gendarmerie royale du Canada (GRC).
L'introduction du RPC devait être aussi transparente que possible
pour les personnes touchées. Lorsque les employés de la fonction
publique ainsi que les membres des FC et de la GRC sont devenus
des participants dans le cadre du RPC, les primes et prestations ont
été intégrées à leurs régimes de retraite respectifs. Cette disposition
a eu pour résultat net d'offrir le même revenu de retraite pour les
mêmes primes.
En ce qui a trait aux prestations, l'intégration a été accomplie par
l'incorporation d'un alinéa, dans chacun des régimes de pension,
définissant la méthode selon laquelle les prestations versées à une
personne selon sa pension de base seraient réduites. La réduction est
opérée en se basant sur une formule de calcul de la prestation dont le
résultat est approximativement égal aux prestations accordées par le
RPC pour le service ouvrant droit à pension d'après la pension de
base de cette personne.
8203
Par conséquent, c'est le régime de retraite des militaires
lui-même, soit la Loi sur la pension de retraite des Forces
canadiennes (LPRFC), qui autorise une réduction des prestations
dans des cas précis. La LPRFC prévoit, aux termes de l'article
15(2), qu'on réduira les prestations de retraite en utilisant une
formule apparentée à celle qui établit les prestations du RPC. La
réduction de la prestation versée conformément à la LPRFC doit
être effectuée lorsque le cotisant atteint l'âge de 65 ans (âge auquel
les prestations du RPC devenaient payables à l'origine) ou lorsque
le cotisant devient admissible à une pension d'invalidité selon le
RPC ou d'après une disposition de même type d'un régime
provincial de retraite.
La décision d'intégrer le RPC aux différentes lois fédérales sur la
pension de retraite ne se bornait pas aux régimes de pension
fédéraux. À l'époque, de nombreux régimes de retraite, conçus pour
les employés du secteur privé, ont également été remaniés pour
intégrer les prestations du RPC à leurs propres prestations.
L'intégration de la LPRFC et du RPC a eu pour effet général de
répartir plus également le revenu de retraite du pensionné, résultat
qui n'aurait pas été possible si les régimes n'avaient pas été
intégrés. Dans le cadre de régimes non intégrés, plutôt que
d'accorder des prestations réduites à l'âge de 65 ans pour tenir
compte du revenu de retraite payable par le RPC, on verserait des
prestations moins élevées avant l'âge de 65 ans afin de payer une
rente viagère équilibrée. Les participants au régime de pension de la
LPRFC qui ont 65 ans ou plus, et qui sont donc touchés par la
réduction des prestations versées conformément à la LPRFC en
raison des prestations reçues au titre du RPC, sont au nombre de
30 000 environ.
Le même principe s'applique aux régimes d'assurance-invalidité
de longue durée. Les prestations accordées d'après ces régimes sont
généralement incorporées à d'autres sources de revenu comme les
régimes d'indemnisation des accidents du travail, le RPC et
d'autres régimes établis par l'employeur ou par le gouvernement et,
parfois, des régimes individuels d'invalidité. L'intégration du
revenu d'invalidité provenant de sources diverses vise à établir le
revenu d'invalidité reçu de toutes sources à un pourcentage
raisonnable du revenu avant invalidité. L'inclusion d'une
disposition relative à l'intégration des prestations permet de réduire
les coûts du régime d'assurance-invalidité pour l'employeur. Étant
donné que les prestations d'invalidité du RPC sont généralement
payables, d'après les définitions précises de l'invalidité dans le
cadre du RPC et des autres régimes, il est normal qu'une prestation
d'invalidité soit réduite du montant payable au titre du RPC.
Il est raisonnable qu'un régime comprenne des dispositions
suivant lesquelles les prestations accordées selon le régime en
question sont réduites lorsqu'une prestation est également versée
par le RPC. Comme cette pratique est considérée comme équitable,
il n'y a rien de prévu dans la loi pour empêcher qu'elle fasse partie
intégrale d'un régime de pensions particulier. Une telle mesure
législative rendrait ces régimes beaucoup plus difficiles à
administrer, car il faudrait alors équilibrer les besoins financiers du
participant sur une période de temps prolongée en fonction d'un
revenu provenant de deux ou de plusieurs sources, selon l'âge et le
degré d'invalidité.
Dans le cas des Canadiens qui deviennent invalides alors qu'ils
reçoivent à la fois une pension et un revenu d'emploi et qui, de ce
fait, pourraient subir une double réduction, le ministère de la
Défense nationale n'est pas en mesure de fournir de données à ce
sujet. Par contre, les circonstances dans lesquelles cela pourrait se
produire sont rares, et le nombre de personnes touchées, peu élevé.
Finalement, le ministère n'est au courant d'aucune contestation
judiciaire au sujet de ces pratiques. En dehors d'une modification
des lois fédérales sur la pension afin d'abolir la disposition relative
à la réduction au titre du RPC, le ministère ne connaît pas d'autre
mesure législative qui pourrait exiger que des changements soient
faits afin de supprimer cette pratique en ce qui a trait aux autres
régimes de retraite et d'invalidité.
Question no 101-M. Robinson:
Le gouvernement du Canada peut-il dire si un ministère ou un organisme du
gouvernement du Canada, y compris la Société pour l'expansion des exportations, a
accordé des prêts, des subventions ou une autre aide financière pour faciliter la vente
ou l'expédition de la raffinerie d'Ultramar Canada de Eastern Passage, en
Nouvelle-Écosse, aux raffineries Sharjah dans les Émirats arabes unis et, dans
l'affirmative, quel est le montant et quelle est la nature de cette aide financière?
M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du
gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Ultramar a
fait des démarches auprès de la Société pour l'expansion des
exportations, qui lui a offert son aide pour cette transaction à des
conditions commerciales (non concessionnelles). Les modalités
financières n'ont pas encore été arrêtées.
Les autres ministères et organismes fédéraux n'ont pas de
renseignement sur ce sujet.
[Traduction]
M. Zed: Monsieur le Président, je demande que les autres
questions restent au Feuilleton.
Le vice-président: Les autres questions restent-elles au
Feuilleton?
Des voix: D'accord.
______________________________________________
8203
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[
Traduction]
La Chambre reprend l'étude de la motion et de l'amendement.
Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.): Monsieur le
Président, pour répondre à la question, je dirai que plus de 30 pays
ont déjà une loi prévoyant un régime de copie privée ou autre chose
du genre. Je souligne que cela existe aux États-Unis, mais que,
contrairement au Canada, la loi ne s'applique qu'à des supports et
des dispositifs d'enregistrement audionumériques.
8204
Le projet de loi canadien autorise le gouvernement à élargir le
traitement réciproque à tout pays qui accorde ou qui prévoit
accorder des avantages similaires à des créateurs canadiens
d'enregistrements sonores.
Le député de Kootenay-Est, qui a travaillé très fort avec nous au
Comité du patrimoine canadien, est intervenu plus tôt aujourd'hui.
J'ai écouté son discours et, sauf erreur, il a déclaré qu'aucune
circonscription québécoise n'avait commandé plus de 400
drapeaux. Je tiens à faire une rectification. Il n'y a pas une seule
circonscription au Québec qui a commandé moins de 400 drapeaux.
(1515)
Certains ont dit aujourd'hui que le programme de distribution de
drapeaux avait été désastreux pour les magasins qui vendent des
drapeaux, des mâts, etc. Voici ce que dit un marchand de
Peterborough, M. Rick Johnson: «Mes ventes de drapeaux ont un
peu diminué, mais je vends beaucoup plus de mâts. Et puis, les
drapeaux ne durent pas indéfiniment. Lorsqu'ils seront usés, les
consommateurs sauront où venir en acheter des neufs.»
M. Warren Davis, également de Peterborough, vend lui aussi des
drapeaux. Il a dit: «Je crois que c'est une excellente idée. Je ne vois
pas comment cela pourrait nuire à mon entreprise. Les
consommateurs vont continuer à acheter des drapeaux.» Il croit que
bien des gens adorent critiquer les initiatives du gouvernement et
font de grands frais pour trouver des aspects négatifs: «Les grands
projets innovateurs comme celui-ci sont boudés par ceux qui sont
toujours contre tout. Si les gens collaboraient simplement, de bonne
foi, ils auraient une attitude plus constructive. Je crois que ce projet
va justement dans ce sens-là. En réalité, les marchands vont
constater que leur commerce prospère. Bien sûr, il y a des coûts,
mais cela n'a absolument pas nui à mon commerce.» Il ajoute:
«Cela devrait donner à des gens l'idée de hisser un drapeau. C'est
très patriotique. J'imprime des drapeaux depuis 16 ans, et je crois
que les consommateurs pensent un peu plus au drapeau cette
année.»
Une femme qui possède elle aussi un commerce de drapeaux a dit
que ses ventes étaient légèrement en baisse, mais que tout devrait se
rétablir à long terme: «Ce commerce est au fond un passe-temps
pour moi. Mais j'ai remarqué une augmentation des ventes de mâts.
Ces jours-ci, je reçois de plus en plus de demandes de
renseignements. Les consommateurs auront besoin de nouveaux
drapeaux l'an prochain. J'espère qu'ils vont continuer à en acheter.
Cela ne devrait pas nuire au commerce à long terme, mais j'espère
que ce projet ne sera pas repris chaque année.»
M. Bob Speller (Haldimand-Norfolk, Lib.): Monsieur le
Président, je suis heureux de parler de la motion présentée par les
séparatistes. Celle-ci dénonce les activités parrainées par
Patrimoine Canada, comme le Bureau d'information du Canada et
l'opération Un million de drapeaux.
Nous discutons maintenant de l'amendement présenté par les
réformistes, qui appuient la motion séparatiste. Ils proposent de
supprimer tout ce qui suit les mots «Patrimoine Canada», par
exemple, le Bureau d'information du Canada qui a coûté 20
millions de dollars, l'opération Un million de drapeaux qui a coûté
15,5 millions de dollars et les compressions sans précédent
imposées à la SRC. Nous savons évidemment qu'ils souhaitent la
suppression de la SRC. Je suis toutefois un peu stupéfait que le Parti
réformiste appuie les séparatistes.
Le week-end dernier, j'ai été heureux, comme tous les
Canadiens, j'en suis certain, de voir à la télévision Ed Mirvish
recevoir le millionième drapeau. J'ai été très fier, car il est un des
plus ardents défenseurs des industries culturelles canadiennes.
Le programme des drapeaux a été couronné de succès. La
population de Haldimand-Norfolk l'a fort bien accueilli. En
parcourant les routes, j'ai constaté que les gens étaient fiers
d'arborer le drapeau canadien. Ils sont fiers de montrer à leurs
concitoyens qu'ils aiment leur pays.
Je ne suis pas surpris que les députés bloquistes aient présenté
cette motion. Ils veulent briser notre pays, le détruire. Je suis
toutefois étonné que les réformistes les aient appuyés. Les
Canadiens, ceux de ma circonscription, par exemple, sont fiers de se
porter à la défense de leur pays. Je sais que, par cette démarche, les
séparatistes poursuivent leur idéal, mais pareille attitude de la part
du Parti réformiste m'étonne un peu. Je suis désolé que les
réformistes soient tombés dans le piège des séparatistes.
Le Parti libéral ne s'excusera pas de faire la promotion du
Canada. Les libéraux ne s'excuseront pas d'élaborer des
programmes qui visent à rassembler les Canadiens, à les
enthousiasmer et à les renseigner davantage sur leur pays. Nous
travaillons avec différents groupes et programmes et auprès des
jeunes d'un océan à l'autre pour les renseigner davantage sur leur
pays. Comment peut-on appeler cela de la propagande?
Le Parti réformiste a uni sa voix à celle du Bloc pour dire qu'il
s'agit de propagande et que le Parti libéral dépense ainsi des
millions de dollars pour faire la promotion de son programme.
Qualifie-t-on de propagande le fait que la vice-première ministre se
trouve aujourd'hui à Moncton, au Nouveau-Brunswick, pour
annoncer la création d'un nouveau programme auquel participeront
les chefs de 800 localités différentes au Canada, de 120 villes et
villages, de petites collectivités du Canada rural et de centres
urbains? Ils participeront à un programme d'échange pancanadien.
Faire voyager des Canadiens au Canada, est-ce de la propagande?
(1520)
Je sais que le député assis à côté de moi se souviendra du
programme Canada 125. Il a été un programme incroyable lancé
juste avant les dernières élections pour le 125e anniversaire du
Canada. Il a amené les Canadiens à se parler les uns aux autres et a
fait connaître leur propre pays à des jeunes Canadiens. C'est ce que
nous devrions faire en tant que parlementaires. Notre rôle consiste
en partie à permettre aux Canadiens de mieux connaître leur pays.
8205
Que dire d'une ville de l'ouest du Canada qui prévoit un
événement culturel? Est-ce de la propagande de le faire savoir aux
Québécois et de leur permettre de connaître ces villes de l'Alberta,
de la Colombie-Britannique, du Manitoba ou de la Saskatchewan?
Est-ce de la propagande? Je ne le pense pas et je ne crois pas que le
Parti libéral ou le gouvernement le pensent.
Est-il mal de promouvoir la collaboration et la compréhension
mutuelles sur les questions économiques et sociales ainsi que sur le
développement culturel des Canadiens? Je ne le crois pas. Ce n'est
pas mal. Il est important d'en apprendre davantage sur la diversité
culturelle et sur certains problèmes économiques du Canada.
Quelqu'un du centre-ville de Calgary ou de Vancouver qui n'a
jamais quitté sa ville ou sa province ne connaît peut-être pas tous les
problèmes auxquels sont confrontés les habitants d'un village de
pêcheurs isolé de Terre-Neuve, de Tuktoyaktuk ou de ma
circonscription, dans le sud-ouest de l'Ontario.
Dans ma circonscription, la pêche dans les eaux intérieures
compte parmi les plus importantes du genre au monde. Nous avons
beaucoup de choses en commun avec la population côtière de
Terre-Neuve ou de la Colombie-Britannique qui vit de la pêche.
Est-il mal pour le gouvernement du Canada de prendre des mesures
pour que ces gens se rencontrent et parlent de leurs sujets de
préoccupation communs? Je ne le pense pas. J'estime que c'est bien
qu'il en soit ainsi et que c'est là un rôle important que notre
gouvernement assume.
J'imagine qu'au Québec, c'est mal de promouvoir le Canada. Ces
députés fédéraux du Parlement semblent laisser entendre que c'est
mal de promouvoir le Canada au Québec et de montrer aux autres
Canadiens ce qu'il y a de bien au Québec et qu'il ne convient pas
que le gouvernement s'en mêle. Je ne suis pas de cet avis.
TVA et CTV sont d'importants partenaires du programme
Attractions Canada. Il serait pour le moins étonnant que le
gouvernement canadien prenne ces grands réseaux en otages, et ce,
uniquement à des fins de propagande pour plaire au Québec ou à
d'autres.
C'est faire preuve d'ironie de la part d'un député québécois que
de présenter une telle motion quand on sait que, la semaine dernière,
la ligne ouverte d'Attractions Canada, par exemple, a reçu 9 200
appels, dont 5 640, soit 61 p. 100, en provenance du Québec. Cela
fait donc beaucoup de gens du Québec qui désirent en savoir plus
sur leur pays, qui désirent en savoir plus sur ce qui se passe à
l'extérieur du Québec. Vu leur position actuelle, ce ne sont
certainement pas les députés d'en face ou les représentants du
gouvernement du Québec qui vont informer les Québécois sur ce
qui se passe dans le reste du Canada.
Si nous tenons à garder ce pays uni, si nous tenons à cheminer
main dans la main vers le prochain siècle, il nous faut nous
connaître davantage les uns les autres. Nous avons besoin d'en
savoir plus sur quelques-uns des problèmes auxquels sont
confrontés les Québécois, les Canadiens des régions rurales ou les
résidents du centre ville de Calgary. TVA et CTV participent à ce
programme et faire la promotion de ce programme fait partie
intégrante de leur mandat en tant que réseaux.
Il nous faut prendre au sérieux les défis qui attendent le Canada.
Nous devons nous nous demander, puisque nous allons entrer dans
le prochain siècle, comment nous nous allons façonner le Canada de
demain. Pour nous, parlementaires, sonnera bientôt l'heure des
élections. Si nous les remportons, c'est nous qui, au cours du
prochain millénaire, serons les premiers à prendre des décisions
concernant le Canada de demain. Le gouvernement bâtit un Canada
pour le XXIe siècle.
(1525)
L'information et la connaissance donnent aux Canadiens le
pouvoir de décider de leur propre avenir et de leur propre destin. Ce
doit être décevant pour les députés de l'opposition de savoir que les
Canadiens veulent en apprendre davantage sur leur histoire et qu'ils
veulent mieux connaître leurs institutions, leur tissu socio-culturel
et leurs réalisations. Nous avons réalisé de grandes choses. Il est
important que le gouvernement le rappelle aux Canadiens.
Il faut comprendre la diversité du Canada. Il est étrange que cette
motion vienne d'un député qui représente une province qui est aussi
diverse et unique en son genre que le Canada. Il est répréhensible de
nous reprocher d'essayer de promouvoir le Canada dans cette
province. Cela montre que nos vis-à-vis ne sont pas vraiment
attachés à leur pays. Nous devons comprendre notre dualité. Il nous
faut un pays qui reconnaît, soutient et protège nos deux langues
officielles et nos diversités. Nous devons travailler ensemble pour
accroître nos connaissances au sujet du Canada et des Canadiens.
Les députés de l'opposition doivent être déçus que nous voulions
en connaître davantage sur nos symboles et notre patrimoine. Plus
nous en connaissons sur notre patrimoine, nos cultures et notre
environnement, mieux nous pouvons comprendre les défis auxquels
nous sommes tous confrontés, ainsi que les espoirs et les rêves des
Canadiens. Il nous faut bâtir à partir de là. Nous devons avoir cette
connaissance avant d'entrer dans le prochain millénaire.
Les Canadiens partagent des valeurs humaines tout à fait
fondamentales. Nous souhaitons notamment une société
compatissante. Nous attachons de l'importance à l'équité et à
l'intégrité dans nos institutions et nos pratiques. Nous sommes
attachés à l'égalité et nous savons que nos différences peuvent nous
donner plus de force encore.
Nous avons appris. Ce que nous avons acquis sur une centaine
d'années, au cours de notre histoire, fait du Canada un des meilleurs
pays du monde, alors que des groupes très larges comme les Nations
Unies voient le Canada comme un exemple à suivre.
Je suis heureux d'avoir cette occasion d'intervenir et j'aimerais
bien disposer d'une minute de plus.
Le vice-président: Je demande au député et à tous les autres
députés de m'excuser lorsque j'oublie de leur faire signe qu'il ne
leur reste plus qu'une minute. Y a-t-il des questions ou des
observations?
8206
[Français]
M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président,
j'écoutais attentivement le collègue d'en face faire l'apologie du
Canada et des symboles qui représentent le Canada. En principe, je
n'ai rien contre le fait qu'il le fasse.
Cependant, les dépenses faites par la ministre du Patrimoine pour
faire la promotion du Canada, il faut les mettre en parallèle avec la
vie du vrai monde. Est-ce que les 1,2 million d'enfants qui vivent
sous le seuil de la pauvreté au Canada seraient heureux d'exhiber le
drapeau canadien?
Est-ce que les millions de chômeurs qu'il y a au Canada et qui
n'ont pas diminué depuis l'arrivée de ce gouvernement sont
suffisamment fiers du Canada pour exhiber le drapeau canadien?
Est-ce que les millions d'assistés sociaux qu'il y a au Canada, et
dont le nombre a augmenté depuis que ce gouvernement a fait des
coupes dans les programmes sociaux, sont d'accord pour exhiber le
drapeau canadien?
Le député nous demande si c'est mal de faire la promotion du
Canada au Québec. Ce n'est pas mal, c'est plutôt insignifiant. Si les
Québécois étaient fiers du gouvernement canadien, nous n'aurions
pas besoin de distribuer des drapeaux. Toute la question de la fierté
ne doit pas être incarnée strictement par des symboles, mais doit
d'abord l'être par des réalités.
Je termine en posant la question suivante au député: Si les
Canadiens étaient si fiers de leur pays, du Canada, comment se
fait-il qu'il faille leur donner des drapeaux pour qu'ils les exhibent?
(1530)
[Traduction]
M. Speller: Monsieur le Président, je ne m'excuserai jamais
d'être fier du drapeau canadien ni d'essayer de faire la promotion du
Canada, non seulement au Québec, mais aussi d'un océan à l'autre.
Nous avons un pays extraordinaire, comme en ont témoigné bien
des personnes dans le monde entier. Le fait d'arborer notre drapeau
ne signifie pas que nous nous préoccupons moins des autres
problèmes graves de notre pays.
Le gouvernement reconnaît, à l'instar de tous les Canadiens, qu'à
l'aube du XXIe siècle, même si nous avons progressé dans de
nombreux domaines, il y a encore bien des problèmes que nous
n'avons pas réglés. Le député en a mentionné quelques-uns. La lutte
contre la pauvreté chez les enfants et la création d'emplois sont
évidemment prioritaires pour le gouvernement du Canada, et nous
prenons des mesures à cet égard.
À moins que notre pays reste uni, que les Canadiens comprennent
l'importance de demeurer ensemble, de conjuguer leurs efforts et
d'être Canadiens, nous ne survivrons pas bien longtemps à
l'avènement du prochain siècle. Il est important d'examiner
l'ensemble du tableau et de tenir compte de la composition de notre
pays et de sa nature lorsque nous nous efforçons de régler certains
de ces problèmes fondamentaux. Il est important que nous nous
employions à résoudre certains de ces problèmes, et c'est ce que
nous avons tenté de faire.
Nous avons tenté d'utiliser le drapeau. Nous avons essayé de
montrer aux Canadiens son importance. Nous avons aussi essayé de
leur montrer leur importance mutuelle et de les renseigner
davantage sur les autres régions de leur pays. Notre pays est
immense. Du point de vue de la superficie, c'est le deuxième pays
du monde. Pour quelqu'un du centre-ville de Hagersville, d'où je
suis originaire, il est difficile d'aller au Québec. Nous nous heurtons
à des barrières linguistiques. À cet égard, les efforts déployés par le
gouvernement du Canada sont importants et devraient constituer
une priorité.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ):
Monsieur le Président, nous débattons, aujourd'hui, d'une motion
dénonçant l'utilisation des fonds publics dissipés dans les activités
de propagande par Patrimoine Canada, tels le Bureau d'information
du Canada et l'opération Un million de drapeaux, alors que des
compressions sans précédent dans l'histoire canadienne ont été
imposées aux institutions culturelles canadiennes et québécoises.
En rentrant dans mon comté, je suis allée, comme chaque
semaine, me procurer un certain nombre de revues et de magazines,
et le magazine Le Point de cette semaine titre L'unité canadienne se
crée-t-elle?. À l'intérieur, il y a un article très détaillé sur ce qui se
passe au Canada. Les membres du gouvernement auraient intérêt à
lire cet article pour comprendre ce qui se passe au Canada et ce
qu'en dit un observateur étranger. Entre autres, il parle de
Winnipeg, la place où, semble-t-il, il fait le plus froid au monde. On
parle aussi de Saint-Boniface, qui est devenu un simple quartier de
Winnipeg où, maintenant, malheureusement, 70 p. 100 de la
population parle anglais.
Il s'agit là d'un constat fait par quelqu'un qui est totalement
étranger à notre pays et qui doit en faire le portrait dans un magazine
international, décrire à ses concitoyens ce qui se passe dans un autre
pays.
Quand le Parti conservateur était au pouvoir, sous Mme
Campbell, on avait décidé de réduire considérablement le nombre
de ministres, et l'idée leur en est venue de créer un ministère qui
s'appellerait le Patrimoine canadien et d'y mettre là-dedans à peu
près tout ce qu'on pouvait trouver qui n'allait nulle part. On a
rassemblée cela d'un peu partout et on a fait le ministère du tutti
frutti.
On y a mis plein de choses, comme les sports amateurs, les parcs,
les sites et lieux historiques, le secrétariat d'État. On est également,
dans ce ministère, responsable des visites de la Reine au Canada,
comme on est responsable de choisir nos athlètes pour aller aux
olympiques, etc., en subventionnant ces activités. On fait de tout, ou
à peu près rien, mais surtout de la propagande. C'est devenu le
ministère spécialiste de la propagande.
(1535)
La création de ce ministère avait créé un problème au Parti libéral
alors qu'il était dans l'opposition. Je me rappelle, la première fois
que je suis allée au ministère du Patrimoine canadien rencontrer le
sous-ministre en titre, il m'avait dit qu'il faisait la recommandation
au nouveau gouvernement de scinder le ministère du Patrimoine
canadien, de ne pas tout mettre dedans comme on voulait le faire, et
d'enlever les communications et de laisser au patrimoine ce qui
était vraiment de nature patrimoniale. Si le ministère du Patrimoine
canadien avait eu une vraie mission pour refléter ce qu'est ce pays,
8207
on lui aurait dit: «n'oubliez pas qu'il y a dans ce pays deux peuples,
deux langues et deux cultures.»
Au contraire, on a dit non à ce gouvernement. Une fois rendu au
pouvoir, les libéraux, ont trouvé, comme toujours, le travail tout
préparé par les mandarins du régime qui sont prêts à fonctionner
quelle que soit la couleur. La seule chose qui change de façon très
visible, quand on change de gouvernement, c'est la pizza de
Radio-Canada qui est bleue ou rouge compte tenu du gouvernement
qui préside aux assises de ce pays.
Quand le gouvernement est arrivé au pouvoir, il fallait qu'il passe
à l'action et fasse adopter un projet de loi qui créait le ministère du
Patrimoine canadien. Il l'a créé exactement comme Mme Campbell
l'avait pensé, et il lui demandait de promouvoir l'identité
canadienne. À ce moment-là, nous avons essayé de faire
comprendre aux Canadiens et aux Canadiennes qu'ils devaient
prendre en compte le Québec, qu'il y avait dans ce pays deux
cultures, deux langues.
Il est vrai qu'à ce moment-là, quand nous avons fait le débat,
nous ignorions la pensée profonde du premier ministre. Mais un
jour, au hasard d'une question, le premier ministre nous a affirmé en
Chambre, je le cite: «Il y a une culture française au Canada qui est
une culture canadienne, elle se trouve en majorité au Québec, mais
je pense que la culture des Acadiens et Antonine Maillet font partie
de la culture française, et cette culture n'est pas nécessairement
québécoise. Lorsqu'on dit qu'il y a une culture canadienne, elle peut
s'exprimer en langue française, elle peut s'exprimer en langue
anglaise.» On peut retrouver la citation complète dans les Débats de
la Chambre des communes du 6 décembre 1995.
Peu de temps après le référendum, le premier ministre confirmait
que, bien qu'il soit Québécois, le petit gars de Shawinigan avait
oublié ses racines profondes et s'était assimilé à une autre culture
qui est la culture canadienne et renonçait pour toujours à sa propre
culture, la culture québécoise. Il faisait cette affirmation pour tous
ses collègues, il confirmait que, pour lui, le Québec, la société
distincte cela n'existait pas. On le verra un peu plus tard quand il
fera adopter sa motion bidon ou sa coquille vide de société distincte
qui ne veut strictement rien dire.
Donc, pour les Canadiens et les Canadiennes, la culture
québécoise n'existe pas. Mais, hier soir, en écoutant Le Point à
Radio-Canada, où on faisait un reportage sur la Saskatchewan, j'ai
compris aussi que pour beaucoup de Canadiens, la culture
canadienne n'existait pas. On nous a montré des francophones,
comme Mme Carmen Campagne. Puisqu'il y a seulement 50 000
personnes qui parlent français en Saskatchewan, elle a préféré venir
vivre au Québec pour être capable de s'épanouir, de faire fortune en
vendant ses disques, ses cassettes, ses vidéos, ses clips et tout ce
qu'elle produit d'excellente qualité pour les enfants. Il lui fallait un
marché et elle l'a trouvé au Québec, elle ne pouvait pas le trouver en
Saskatchewan.
J'ai vu également d'autres personnes anglophones mais que je
sentais beaucoup plus ukrainiennes que canadiennes. Ils ont
d'ailleurs fait ressortir toutes les beautés et la richesse de leur
culture, mais je sentais beaucoup plus qu'il y avait là des Ukrainiens
qui parlaient à une Québécoise que des Canadiens qui s'exprimaient
vraiment. J'ai senti à quel point ils avaient besoin de se rattacher à
leurs racines ukrainiennes. Je pense que la notion de
multiculturalisme que M. Trudeau a mis dans la tête des Canadiens
et des Canadiennes est probablement le plus grand obstacle à la
création de l'identité canadienne.
(1540)
Quand un premier ministre cherche, par toutes sortes de façons
de faire du Canada un pays où on peut s'identifier-je pense qu'il
mettrait fin, demain matin, au multiculturalisme au Canada, comme
cela s'est fait dans plusieurs pays, dont le Brésil-les Canadiens,
demain matin, seraient tous Canadiens et Canadiennes.
Il resterait les Québécois, qui ont déjà pris leur parti, du moins 50
p. 100 d'entre eux, qui savent déjà qu'ils appartiennent à une
culture, qu'ils forment un peuple, qu'ils ont un territoire. Il leur
manque un pays pour être capables de s'épanouir totalement, mais
on sent que la barre est à la veille d'être franchie et que nous aurons
la patience d'attendre le prochain référendum pour être capables
d'assumer totalement ce que nous sommes.
Entre-temps, on regarde ce qui se passe au Canada. On a une
sous-culture, la culture québécoise, et on a la grande culture, la
culture canadienne. Que s'est-il passé jusqu'en 1976, par exemple,
à la Société Radio-Canada? Les gens qui gouvernaient notre pays, à
ce moment-là, étaient respectueux des deux cultures, des deux
peuples, et Radio-Canada était financée également. Les mêmes
sommes d'argent étaient accordées au réseau français et au réseau
anglais.
M. Trudeau, après la surprise de l'élection de M. Lévesque, en
1976, a décidé qu'il y avait, à Radio-Canada, un nid de séparatistes.
Il a fait faire une enquête, qu'on a pratiquement qualifiée
d'inquisition, à ce moment-là, pour finalement arriver au résultat
que c'était faux, il n'y avait pas, à Radio-Canada, un nid de
séparatistes. Il y avait plutôt des gens qui faisaient un travail
honnête et qui donnaient, dans les émissions d'information, un
reflet de ce qui se passait dans la population québécoise.
En 1995, au lendemain du référendum, l'héritier de Trudeau a
pris la même attitude. Il a encore dit qu'à Radio-Canada, on avait
mal fait le travail. La Société Radio-Canada, le réseau français, a
encore été victime de coupures. Il est bien évident qu'il deviendra
de plus en plus difficile, pour les journalistes de Radio-Canada, de
continuer à faire un travail avec le professionnalisme qu'on leur
connaît, si le gouvernement met tout le temps en doute cette
excellente qualité d'émissions qu'ils produisent, parce que, ce
qu'on reflète comme étant ce qui se passe dans la société, ne plaît
pas à ce gouvernement.
Radio-Canada a donc été victime de beaucoup de coupures.
L'Office national du film a perdu 20 p. 100 de son budget. Téléfilm
s'est vu amputé d'une partie de son budget, 50 millions de dollars,
en plus des coupures qu'il a subies lui aussi, pour qu'on puisse créer
un fonds dont le siège social et les décisions se prennent maintenant
à Toronto pour produire des émissions dans le domaine télévisuel.
8208
Dans ce fonds, les câblodistributeurs fournissent 50 millions de
dollars, Téléfilm, 50 millions de dollars et Patrimoine Canada, 100
millions de dollars. Les administrateurs de ce fonds ont reçu comme
mandat de faire bien attention et de financer des émissions à saveur
canadienne, des émissions qui vantent la culture canadienne, des
projets qui pourront, par exemple, à l'avenir, éviter des films
comme Octobre.
On a très bien vu, au lendemain du référendum, comment le
Comité du patrimoine est parti à la chasse aux sorcières, comment
le président avait reçu un mandat d'essayer de voir ce qui pouvait se
passer et comment on pouvait faire la promotion d'un pays comme
le Canada.
Ce qui est assez étrange, c'est qu'aujourd'hui, on soit obligés
d'en venir à faire une campagne d'un million de drapeaux. Il n'y a
pas si longtemps, je me faisais dire par un sénateur libéral: «Je ne
vous comprends pas, au Québec; on vous a donné des timbres
bilingues, de la monnaie bilingue, un drapeau, un hymne national.»
Ça va toujours pour la monnaie et les timbres, mais c'est bien plus
M. Réal Caouette, de vénérée mémoire, avec la complicité d'un
gouvernement minoritaire dirigé, par M. Pearson, qui ont senti, à la
veille de l'Exposition universelle de 1967, qu'il était vraiment
honteux de recevoir le monde entier sans même avoir un drapeau
qui nous représentait. Alors est partie la guerre pour s'identifier un
drapeau.
(1545)
Donc le drapeau, je me demande même si les Canadiens anglais
en ont déjà voulu, puisque, 30 ans plus tard, on se sent encore
obligés de faire la promotion de ce drapeau. Il y a des limites à
penser qu'on peut imposer une chose aux gens par de la propagande.
L'hymne national: on a pris celui que nous chantions quand nous
étions jeunes, qui s'appelait Ô Canada. Paroles et musique ont été
composées par deux francophones du Québec. Les Anglais l'ont
traduit, ils ont changé des parties pour qu'il leur convienne, mais
l'hymne national ne vient pas de l'invention d'un anglophone de ce
pays; on a pris ce que deux Québécois francophones avaient rédigé,
paroles et musique.
Il y a des limites à essayer de nous faire accroire qu'on résiste à
ça. C'est vrai qu'on résiste parce que c'était à une autre époque.
Vous avez pris le nom, le drapeau, l'hymne national; on vous les
laisse, mais on est un peu désabusés de toute la propagande que vous
faites pour essayer d'imposer ces choses-là.
Mes collègues l'ont dit également: près de 100 millions ont été
dépensés en propagande, au moment où on dit qu'on n'a pas
d'argent, par exemple, pour des émissions, pour les PME, pour
développer l'emploi, pour les démunis, pour les enfants pauvres.
D'après ce que le premier ministre nous a dit, demain on nous
annoncera des cadeaux pour les enfants pauvres dans le budget. On
les a appauvris et ensuite on dit: «Nous, grâce au fédéral, on va
sauver les enfants pauvres.» Ça fait quatre ans qu'il aurait dû les
sauver, pas attendre à la veille de l'élection pour venir nous
présenter, dans un budget, des mesures pour sauver les enfants
pauvres. Sur toute la ligne jusqu'ici, c'est un échec lamentable.
Les langues officielles, ça aussi c'est un échec au Canada. La
responsabilité du Patrimoine: la majorité des crédits ont été donnés
pour les minorités anglaises du Québec ou, pour la majorité, pour
l'enseignement de l'anglais dans les autres provinces.
On nous fait l'apologie du bilinguisme mais, dans le fond, on
veut bilinguiser le Québec pour finalement l'assimiler, puisque, la
minorité anglophone du Québec n'est que de 9 p. 100 et que 54 p.
100 des fonctionnaires sont bilingues. La minorité francophone au
Nouveau-Brunswick est de 38 p. 100. Pourtant, ils n'ont que 42 p.
100 des fonctionnaires qui sont bilingues. Et la dernière nouveauté
de ce grand gouvernement économe est d'avoir créé une seule ligne
1-800 pour tous les francophones du pays qui ont un problème avec
le fonds pour les enfants.
On se rend bien compte que la loi sur le bilinguisme, dans la
fonction publique également, est un échec lamentable. Une étude a
démontré que, dans la région de Hull-Ottawa, la loi qui prescrit le
français et l'anglais comme langue de travail, nos francophones
affirment fonctionner pratiquement dans la langue anglaise; 76 p.
100 d'entre eux disent que l'anglais est la langue des réunions.
Donc, la fonction publique est également un outil d'anglicisation
des francophones.
Une dernière nouveauté: l'inforoute, ou l'invasion du fédéral à
nouveau dans les champs de compétence provinciale. En matière
d'inforoute comme en d'autres, le gouvernement fédéral entend
exercer son leadership, et ce, sans égard aux juridictions du Québec
et sans respect pour sa culture. Le contenu culturel canadien se
retrouve dans la société d'information. Partout où on a l'occasion
d'exprimer du mépris à l'égard du peuple québécois, on ne rate
aucune occasion.
Je lisais ce matin très en détail le fameux projet de la ministre
dirigé vers les écoles. Aucun citoyen ne peut entrer au Québec dans
une école sans en demander l'autorisation. Dans son document, la
ministre dit que les grandes valeurs du Canada sont la tolérance, le
respect mutuel, la compassion et l'acceptation.
(1550)
Il faut voir cela sur papier pour le croire. Plus incroyable que ça,
comme dit l'expression populaire, tu meurs. Il n'y a aucune
tolérance, on ne sent aucune tolérance à l'égard du peuple
québécois, aucune compassion à l'égard du peuple québécois,
aucun respect du peuple québécois et aucune acceptation du peuple
québécois. On parle de valeurs, mais on n'y croit pas du tout.
Que met la ministre dans son kit de propagande? Elle offre un
guide de l'enseignant. Un guide de l'enseignant non autorisé par la
ministre de l'Éducation du Québec, ce qui est inadmissible; cela ne
se fait pas au Québec. Il y a des vidéos, une cassette audio, un
CD-ROM, et on peut cocher aussi si on veut le drapeau ou non.
Combien coûte chacun de ces exemplaires? Il est adapté selon
l'âge des enfants, de quatre à sept ans. La propagande suit l'âge
chronologique et psychologique des enfants. Il y a un autre kit pour
les enfants de huit à onze ans et un autre encore pour les enfants de
douze ans et plus. On peut se le procurer en français ou en anglais.
8209
Je pense que la ministre doit revoir considérablement son
approche, si elle ne veut pas augmenter, jour après jour, le nombre
de souverainistes dans ce pays. Partie comme elle l'est, nous la
remercions très sincèrement, parce qu'elle contribue à améliorer la
cause du Québec souverain.
M. Patrick Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine,
Lib.): Monsieur le Président, c'est avec un très grand plaisir que je
me lève cet après-midi pour expliquer à nouveau, peut-être même
pour enseigner aux députés du Bloc québécois, aux souverainistes,
aux indépendantistes purs et durs qui passent la majeure partie de
leur temps à la déformer, la vraie histoire du Canada.
Les bloquistes ont intérêt à apprendre une chose: ils ne
représentent pas la majorité des Québécois. Je leur lance le défi de
tenir, au Québec, un sondage sur une vraie question et la question
serait aussi simple que la suivante: Voulez-vous devenir un pays
souverain, oui ou non? On sait tous fort bien qu'à peine 25 ou 30 p.
100 des Québécois adopteraient cette formule, c'est-à-dire de
séparer la province du pays.
Quand on cite des chiffres, on donne toutes sortes d'exemples.
Encore une fois, ce matin, j'ai posé la question à un député du Bloc
québécois, à savoir comment il se fait que l'Office national du film
dépense 73 p. 100 de son budget au Québec. Comment se fait-il que
Téléfilm Canada dépense 62 p. 100 de son budget au Québec? Et
comment il se fait qu'à Radio-Canada, 40 p. 100 du budget sont
dépensés au Québec et que le Québec ne représente que 24 ou 25 p.
100 de la population? C'est clair. Il y a des avantages concrets, des
avantages monétaires, des avantages politiques et des avantages
culturels pour que les Québécois demeurent au sein de la fédération
canadienne.
Autre question. On nous parle d'exemples, de démagogie, de
propagande. Suite à une petite recherche que j'ai effectuée ce matin,
voici des exemples de propagande. On va agir, nous aussi, à titre
d'opposition vis-à-vis la majorité du Bloc, ceux qui détiennent la
majorité des sièges au Québec. J'ai moi aussi des questions et mes
électeurs ont des questions.
La majorité des Québécois se posent la question suivante:
Pourquoi dépense-t-on tout près de quatre millions en fonds publics
pour financer les activités secrètes du Conseil de la souveraineté du
Québec? Comment se fait-il qu'on ait un numéro 1-800 au Québec
pour faire la promotion de l'indépendance du Québec? Cela a coûté
300 000 $ aux contribuables québécois. Comment se fait-il que le
spectacle présenté au Grand Théâtre de Québec lors du lancement
de la campagne référendaire ait coûté 175 000 $? J'aimerais bien
entendre la réponse de la députée de Rimouski-Témiscouata à ce
sujet.
On a aussi employé des lobbyistes, ce qui a coûté 531 000 $,
pour faire la promotion de la souveraineté à Washington. On a fait
parvenir des envois postaux, il y a eu des commissions de toutes
sortes qui nous ont coûté 2,5 millions de dollars. On a aussi dépensé
8,5 millions de dollars pour ce happening, ce sondage, cette
consultation de la population. Cela a coûté 8,5 millions de dollars.
Alors, si on parle de. . .
Mme Tremblay: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.
Je n'ai pas d'objection à écouter mon collègue, le député de
Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, mais j'aimerais, autant que
possible, qu'il ne fasse pas le procès du Québec, nous ne sommes
pas au Québec ici, nous sommes au Canada. J'aimerais qu'il parle
sur la motion à l'étude et qu'il arrête de divaguer.
(1555)
M. Gagnon: Monsieur le Président, c'est simple, il n'y a qu'une
question qui intéresse les bloquistes, c'est de faire la souveraineté.
C'est clair, on sait cela. Mais jamais on ne veut parler de la
propagande faite au Québec.
Oui, il est vrai que 20 millions de dollars ont été dépensés pour
les drapeaux, et j'en suis fier. C'est vrai que j'aurais peut-être aimé
dépenser cet argent dans d'autres secteurs. Par contre, il y a un
compte de 80 millions de dollars et le fait qu'on a joué avec la caisse
de dépôt et que 20 milliards de dollars ont été mis de côté pour
soutenir le dollar canadien advenant la souveraineté du Québec.
Je suis un Québécois et je n'ai pas de leçon à recevoir de
l'opposition sur qui je suis et sur qui je représente. Cependant, en
tant que contribuable canadien et québécois, j'ai le droit de savoir
où va cet argent à Québec. C'est à eux de passer un coup de
téléphone à leur ministre des Finances et à nous donner une réponse
ici en cette Chambre.
Mme Tremblay: Monsieur le Président, il est très difficile de
répondre à la place du gouvernement du Québec. On n'est pas au
Québec ici, on est au Canada. Alors, le député de
Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine perd son comté, il devrait
songer à se présenter au Québec. D'ailleurs, cela ferait beaucoup de
bien à M. Johnson d'avoir une bonne recrue, parce qu'il n'est pas
promu à beaucoup d'avenir au Canada dans
Bonaventure-Gaspé-Les Îles-Pabok avec le discours qu'il tient
ici.
C'est absolument aberrant de ne pas reconnaître que le
gouvernement a dépensé 100 millions de dollars en propagande. Si
au moins c'était utilisé à des fins intéressantes, pour informer. Le
BIC est supposé être un bureau d'information. La ministre m'a dit:
«Va sur Internet, tu vas voir ce qu'il y a.» C'est zéro, je ne retiens
rien sur Internet. Ce n'est pas ça qui informera le monde sur le
Canada.
Si on consacre des sommes d'argent pour informer la population,
qu'on fasse de l'information, qu'on aille sur Internet et qu'on y
mette des choses intéressantes au lieu de faire de la propagande.
C'est perdre notre temps que d'essayer de forcer le monde à aimer
un pays quand le pays n'est pas aimable. C'est ça, le problème. Il
faut que le pays soit aimable. Comment voulez-vous aimer
quelqu'un qui n'est pas aimable? Il faut que le pays soit aimable, il
faut que le pays mette vraiment ses valeurs en pratique. Il faut que le
pays soit tolérant, il faut que le pays accepte les choses: «if you can't
beat them, join them.»
Alors, venez nous chercher où on est si vous voulez nous garder
avec vous autres. Autrement, on va partir et plus vite que vous ne le
pensez, parce que là, on commence à en avoir ras le bol des discours
comme celui qu'ils nous tient.
M. Ronald J. Duhamel (Saint-Boniface, Lib.): Monsieur le
Président, je voulais poser une question et discuter un peu du
commentaire suivant qui a été fait: «C'est un pays qui n'est pas
aimable.» Ce n'est sûrement pas ce que la députée voulait nous
transmettre comme message que ce pays, le Canada, les Canadiens
8210
et les Canadiennes ne sont pas aimables. Je demande une
clarification, s'il vous plaît.
Mme Tremblay: Monsieur le Président, pour que le pays soit
aimable, il faudrait qu'on se sente aimés et non rejetés. Quand on ne
se sent pas aimés, on ne peut pas trouver la situation aimable, ni les
gens aimables. On se sent rejetés.
J'ai fait une tentative dans cette Chambre qui m'apparaissait un
pas d'union entre nos deux peuples. Mais non, on a interprété notre
geste et on a défait la loi sur Louis Riel, ce qu'on n'aurait jamais dû
faire, dans cette Chambre, si on avait eu la moindre considération
pour qui était Louis Riel, pas si on avait voté contre le Bloc
québécois.
Dans ce pays, on est toujours en train de voter contre quelque
chose; on vote contre quelqu'un. On n'est jamais capable de faire un
vrai geste d'ouverture.
J'aurais compris, ce jour-là, que ce pays était aimable, mais
maintenant, je sais qu'on nous rejette du plus profond de ce que
vous êtes.
M. Paul Mercier (Blainville-Deux-Montagnes, BQ):
Monsieur le Président, mon intervention sera brève, simplement
pour dire que pour des gens de ma génération et de mon pays-je
suis né en Europe-cette somme dépensée pour des drapeaux me
rappelle des souvenirs pénibles et des noms pénibles, comme celui
de Goebbels, en Allemagne.
(1600)
Quand un pays se défend avec des drapeaux, et j'en ai vu partout,
moi, des drapeaux, j'en ai vu des milliers. Je ne veux pas confondre
la croix gammée avec la feuille d'érable. . .
M. Gagnon: C'est la feuille d'érable qui t'a libéré.
M. Mercier: Je veux comparer, si on me laisse parler de façon
polie, s'il vous plaît, je veux comparer deux politiques. Quand on
veut promouvoir un peuple avec des milliers de drapeaux. . .
M. Gagnon: La Hollande et la Belgique, les premiers arrivés,
c'était l'armée canadienne.
M. Mercier: Qu'est-ce que cela a à voir? C'est évident que nous
sommes reconnaissants à l'égard des Canadiens. Un minimum de
bon sens pour distinguer les problèmes. Je compare deux politiques
qui ont les mêmes moyens, c'est de multiplier les drapeaux dans
tous les coins, et ce fait rappelle Goebbels. Même si les drapeaux ne
sont pas comparables, les politiques le sont.
Mme Tremblay: Monsieur le Président, je pense qu'il y a lieu de
reprendre nos sens. Il est vrai qu'on ne doit pas confondre les
questions. Cette histoire de drapeaux est très nocive pour notre
pays. J'espère que le gouvernement va réfléchir. Nous ne sommes
pas dans un pays de propagande.
Nous devons aimer le monde, nous devons être tolérants vis-à-vis
des gens, nous devons les accepter. Ça ne doit pas seulement être sur
le papier de la vice-première ministre. Ça doit être pour vrai, dans la
vie de tous les jours. Ça doit être pour tout le monde.
Je pense qu'on doit arrêter de dépenser de l'argent pour faire de la
propagande. C'est perçu comme de la propagande, c'est vécu
comme de la propagande, c'est reçu comme de la propagande, et la
propagande, ça donne ce que ça donne.
Nous sommes dans une situation, on doit en sortir. Le
gouvernement doit le comprendre, les 100 millions doivent aller
ailleurs qu'à la propagande.
[Traduction]
M. Ronald J. Duhamel (Saint-Boniface, Lib.): Monsieur le
Président, je partagerai mon temps de parole avec mon collègue de
Saskatoon-Dundurn.
[Français]
Je suis très heureux de pouvoir participer à ce débat qui,
espérons, saura enrichir la réflexion que suscite en cette Chambre la
motion présentée par le député de Richmond-Wolfe. Je me réjouis
que mon collègue de l'opposition se préoccupe de l'avenir de la
culture canadienne et qu'il nous donne l'occasion de présenter notre
vision à cet égard.
Permettez-moi, au début, de simplement rappeler à tous que
parler du Canada, promouvoir le Canada, c'est faire de même pour
le Québec, c'est reconnaître cette société distincte, la langue, la
culture et ses institutions tout à fait uniques.
Lorsqu'on se promeut, on s'enrichit, et j'aimerais qu'on puisse
regarder ce débat sous cet angle, au moins pour quelques minutes.
J'ai été frappé franchement lorsqu'on nous a dit que c'est un pays
qui n'est pas aimable. C'est faux. Les Canadiens et les Canadiennes,
évidemment, diffèrent. Ils ont des expériences différentes, mais la
grande majorité d'entre eux ont un profond respect, un amour pour
leurs concitoyens et concitoyennes du Québec. Je crois que
l'inverse est vrai aussi.
J'ai remarqué à travers les années que lorsqu'on connaît mal, on
ne comprend pas bien, et lorsqu'on connaît mal et qu'on ne
comprend pas bien, évidemment, nous ne pouvons pas apprécier. Il
est très difficile d'aimer.
[Traduction]
J'entends souvent certains de mes collègues anglophones
manquer, parfois, de générosité envers leurs collègues
francophones. Mais je dirais qu'ils ne sont qu'une minorité.
Très souvent, quand cela arrive, on s'aperçoit qu'ils connaissent
très peu le Québec. Ils connaissent très peu sa langue, sa culture, ses
institutions, son caractère distinct. L'inverse est également vrai.
Quand on connaît très peu l'autre, comment peut-on le comprendre,
l'apprécier, s'intéresser à lui?
Malheureusement, c'est un des problèmes que nous avons à
l'occasion au Canada, et ce n'est pas seulement au Québec, mais
aussi dans toutes les autres provinces et les territoires.
8211
(1605)
[Français]
Jamais le monde n'a été aussi accessible. Nous devons aux
nouvelles technologies de communication cette ouverture de plus
en plus grande sur le monde et cet accès direct à une somme infinie
de renseignements et de connaissances. Par l'entremise du Bureau
d'information du Canada, le gouvernement veut offrir aux
Canadiens et aux Canadiennes, partout à travers le pays, de
l'information exacte, précise et pertinente sur le pays, ses
institutions, ses régions et sa population. Il veut offrir parmi cette
masse de renseignements et de données qui nous sont présentés, une
perspective canadienne.
Mais cela inclut non seulement une perspective canadienne dans
l'ensemble du mot, mais une perspective qui touche le Québec, qui
touche par exemple ma communauté dans ma circonscription
franco-manitobaine. On vient d'avoir le Festival du voyageur, on a
même des artistes du Québec qui sont venus chez nous et qui ont été
accueillis avec une grande chaleur. Nous avons des artistes, des
écrivains, toutes sortes de personnes qui se rendent au Québec et qui
sont appréciés. C'est ça le monde aujourd'hui. Il y a cet échange
énorme, non seulement au Canada, mais à travers le monde.
La culture est, avant tout, un point de vue sur le monde. En ce
sens, il est important de disposer d'instruments comme par exemple
le Bureau d'information du Canada et les symboles canadiens pour
transmettre à la population, ainsi qu'aux autres pays, ce point de vue
typiquement canadien.
Lorsque nous parlons du drapeau, nous pouvons prétendre que
c'est de la propagande, mais nous pouvons aussi apprécier que c'est
un symbole puissant qui nous touche tous. C'est ça qu'on ne peut
pas comprendre quelquefois.
Avec l'avènement de l'autoroute de l'information, la diffusion du
contenu devient vitale pour l'expression culturelle. Quand je parle
de contenu sur l'inforoute, je fais évidemment allusion au contenu
canadien. Celui-ci exprime et reflète les valeurs, les idéaux et les
connaissances partagées par l'ensemble des Canadiens et des
Canadiennes.
Dans ce contexte, l'importance de la diffusion de notre
patrimoine culturel, tant sur les plans du renforcement de l'identité
nationale que de l'économie, a nécessité récemment de la part du
gouvernement canadien l'adoption de mesures importantes.
Le gouvernement a déployé de nombreux efforts pour assurer
l'accès au contenu culturel sur l'inforoute numérique. Sur la scène
internationale, il s'impose d'ailleurs comme un chef de file dans ce
domaine.
À la conférence des pays membres du G-7 sur la société de
l'information et de développement, qui a eu lieu en Afrique du Sud,
il a souligné l'importance d'offrir une pluralité de points de vue et
de langues sur l'inforoute. Dans le domaine du patrimoine, par
exemple, le gouvernement participe aux projets pilotes mis de
l'avant par le G-7 en vue de favoriser l'accès le plus démocratique
possible à la culture mondiale dans le respect des identités
nationales. Il participe notamment au projet intitulé Accès
multimédia au patrimoine culturel mondial et, par le truchement de
la Bibliothèque nationale du Canada, au projet Bibliotheca
universalis.
Au pays, le gouvernement a travaillé à la mise sur pied d'un
groupe de travail sur la numérisation qui étudiera plusieurs grandes
questions liées à la numérisation des collections culturelles et
scientifiques. Les institutions nationales à vocation patrimoniale
participent activement à l'intégration et à l'essor de nouvelles
technologies. Ils numérisent leurs collections et les rendent
accessibles au public.
Le gouvernement explorera toutes sortes d'avenues en vue
d'élaborer de nouveaux moyens de favoriser la production de
contenu canadien numérisé à caractère patrimonial. Il entend
favoriser la conservation, la distribution et l'accès de ce contenu
numérisé.
Parallèlement, le Réseau canadien d'information sur le
patrimoine appuie les efforts de ces institutions en vue de présenter
leurs collections à un plus large public. Il offre notamment un
répertoire sur Internet des musées et des sites patrimoniaux du
Canada. Jusqu'à ce jour, le Réseau a créé, au total, 22 bases de
données de références en anglais et en français, ainsi que d'autres
produits d'information disponibles sur Internet. Plus de 1,5 millions
de visiteurs ont navigué sur son site.
Voilà qui constitue une vitrine exceptionnelle sur le Canada, sa
culture, son histoire et son patrimoine. En outre, de concert avec
CultureNet et la Conférence canadienne des arts, le gouvernement
du Canada a travaillé à la création du Réseau électronique culturel
du Canada. Le Réseau sera une fenêtre ouverte sur la culture
canadienne à l'intention de la population et du monde entier.
(1610)
Le gouvernement s'est engagé à favoriser l'émergence d'une
autoroute canadienne de l'information qui offre des produits et des
services d'ici dans les deux langues officielles. Comme il a indiqué
à la Table ronde sur la culture, il y a quelques jours, il prendra tous
les moyens nécessaires pour favoriser la création d'un contenu
canadien.
Le gouvernement canadien a aussi adopté, et étudie
actuellement, un certain nombre de mesures qui visent à accroître
l'accès aux marchés traditionnels, à favoriser un plus grand
rayonnement de la culture canadienne à l'étranger, ainsi qu'à percer
les marchés spécialisés pour le secteur des arts, du patrimoine et des
industries culturelles. Parmi les initiatives mises de l'avant, le
gouvernement a organisé, en décembre dernier, une Table ronde
nationale portant sur la commercialisation à l'étranger des produits
et des services du patrimoine canadien.
De par leur mission, les musées et les institutions à vocation
culturelle et patrimoniale exercent un rôle de premier plan dans la
conservation, la mise en valeur et la diffusion même de notre
patrimoine. Les quelque 2 000 musées et autres établissements
voués au patrimoine sont des outils culturels importants non
seulement en raison de leur nombre, mais aussi de leur popularité
auprès de la population canadienne et des touristes étrangers. On
estime que 56 p. 100 de la clientèle qui fréquente nos institutions est
canadienne. On a établi également que les musées du pays avaient
accueilli, à eux seuls, plus de 55 millions de visiteurs.
8212
Par l'intermédiaire de son programme d'aide aux musées, le
gouvernement du Canada apporte un appui direct à ces institutions
afin d'élargir l'accès aux collections, de les gérer efficacement et
d'en assurer la préservation pour le bénéfice des générations
actuelles et futures.
Cet été, le gouvernement offrira à plus de 800 jeunes étudiants et
étudiantes canadiens la chance de travailler dans des établissements
voués au patrimoine comme des bibliothèques et des musées dans le
cadre du programme Jeunesse Canada au travail. Ce programme
inclura des jeunes Québécois et Québécoises. Ce programme
d'emplois d'été permettra aux jeunes non seulement de gagner de
l'argent, mais de mieux connaître leur pays, leur province, leur
territoire, leur histoire et leur culture.
Il faut veiller à ce que nos instruments de diffusion de la culture et
nos institutions patrimoniales soient au service de la population
canadienne et qu'ils proposent à celle-ci des choix typiquement
canadiens. Il faut aussi que notre propre production culturelle et
notre propre perspective sur l'information prévalent sur les réseaux
de demain.
Le gouvernement du Canada veut offrir aux Canadiens et aux
Canadiennes le plus d'occasions possibles de participer et de
contribuer à l'expression de leur identité. À l'aube du XXIe siècle,
il est indispensable que nous ayons la capacité d'exprimer le
caractère unique du Canada.
Avant de terminer, je veux parler brièvement de ma propre
province et des francophones hors Québec. Ils constituent un groupe
d'environ un million, qu'on essaie parfois d'oublier. Dans ma
circonscription, près de 20 p. 100 de la population est de langue
française. Il y a aussi un pourcentage important de gens de langue
anglaise qui ont appris le français et qui adhèrent à la culture
francophone de la province.
Il y a aussi des noyaux importants de francophones dans les
autres provinces. Dois-je rappeler aux gens qu'au
Nouveau-Brunswick un tiers de la population est de langue
française? Un million d'habitants à l'extérieur du Québec parlent
toujours le français, leur langue et leur culture leur tiennent à coeur.
Ils se rendent au Québec et s'y sentent à l'aise. Lorsque les
Québécois se rendent chez nous, ils se sentent chez eux.
Lorsque je me rends en France, je me sens à l'aise. J'ai des amis
qui l'ont fait aussi, ils se sont sentis à l'aise. Hier, j'avais des amis
de France venus au Festival du voyageur et ils se sentaient très à
l'aise chez nous. Ils avaient passé du temps à Québec et de même ils
s'étaient sentis bien accueillis. Ils se sentaient bien chez nous aussi.
N'oublions pas que nous avons des liens très importants.
(1615)
M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le
Président, on peut comprendre que le gouvernement fédéral ait la
trouille à la suite du résultat du référendum et qu'il veuille tenter, de
peine et de misère, avec les moyens du bord, avec les budgets, de
créer une forme d'appartenance canadienne dans toutes les
provinces du Canada, y compris, pour les besoins de la cause, dans
la «province» de Québec, où est concentrée la majorité des
Québécois.
Mais il ne faudrait jamais oublier, dans un premier temps, que
lorsqu'on verse un dollar dans une telle propagande, au moins 25 p.
100 proviennent des deniers publics du Québec. On devrait donc
avoir une forme d'éthique, une forme de respect en y allant avec
douceur et en tentant de ménager, en toute démocratie et respect, le
fait que ces dollars proviennent en bonne partie des Québécois, et
notamment des souverainistes.
Aussi, quand on parle de susciter un sentiment d'appartenance, il
faudrait être conscient, on l'a vu tout à l'heure, que la ligne de
démarcation est délicate entre sa volonté de développer une
appartenance et la propagande. Mme Chantal Hébert a écrit un
article, il y a à peu près un an dans La Presse, et j'aimerais entendre
la réaction du député de Saint-Boniface pour voir comment il
qualifie cela. Mme Hébert, qui n'est pas une souverainiste, à ce
qu'on sache, fait un bon travail de chroniqueuse quotidiennement
dans La Presse.
Donc, je cite Mme Hébert: «Depuis 1995, chaque ministère a pour
directive de célébrer l'anniversaire de l'unifolié. Un relevé de leurs
efforts a été compilé. On y constate par exemple que le 15 février
1995, la Société canadienne d'hypothèques et de logement a offert
un gâteau aux couleurs du drapeau à ses fonctionnaires et que sa
cantine a servi de la cuisine «canadienne». Même les espions du
gouvernement ont été mis dans le coup. Cette semaine-là, tous les
employés du Service canadien du renseignement de sécurité ont
trouvé un historique du drapeau dans leur courrier électronique. Les
directeurs de services fédéraux ont été encouragés à faire circuler
par le même biais un questionnaire sur le Canada à l'intention des
fonctionnaires sous leurs ordres. L'idée de demander aux enfants de
ces derniers de participer à des concours de dessins sur l'amour du
Canada a été évoquée. Les fonctionnaires ont été encouragés à
s'habiller en rouge et en blanc pour l'anniversaire de l'unifolié.»
On peut essayer de mousser le patriotisme canadien, mais la ligne
de démarcation entre mousser le patriotisme et la propagande vient
d'être franchie, à mon avis, et j'aimerais avoir les commentaires de
mon collègue de Saint-Boniface à cet effet.
M. Duhamel: Monsieur le Président, j'apprécie le commentaire
et la question. Je me pose une question, à savoir pourquoi est-ce
qu'ils ont tellement peur de promouvoir le Canada? Pourquoi cette
crainte? Lorsqu'on promeut le Canada, nous faisons de même pour
le Québec, le Manitoba, les autres provinces ou territoires.
Ils ne comprennent pas et ils ne veulent pas comprendre.
Lorsqu'on parle des espions qui ont travaillé, je ne sais pas ce qu'ils
ont fait exactement. Je connais Mme Hébert, et elle écrit très bien
d'ailleurs. J'ai un grand respect pour elle. Mais franchement, tous
les jours, j'écoute les bloquistes en face-et je les accepte, il y en a
même que j'aime beaucoup-qui font toutes sortes de promotions
pour le Québec, et il y a souvent des exagérations, et pas des petites.
Ça peut aller loin.
Est-ce qu'on appelle ça de la propagande? Il y en a qui
qualifieraient ça de mensonges. Pas moi. Ils font leur travail. Ils le
font du mieux qu'ils le peuvent. Ils sont en train de promouvoir leur
province, leur société distincte, leur langue, leur culture, leurs
8213
institutions tout à fait spéciales. J'applaudis, pourvu qu'ils fassent
de même pour le Canada, le pays qui est le leur aussi bien que le
mien.
[Traduction]
M. Morris Bodnar (secrétaire parlementaire du ministre de
l'Industrie, ministre de l'Agence de promotion économique du
Canada atlantique et ministre de la Diversification de
l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je
suis heureux de prendre la parole à la Chambre aujourd'hui sur la
motion de l'opposition. Les réalisations de notre gouvernement en
matière de soutien de la culture et de l'identité canadiennes sont
appréciables.
La culture du Canada s'est enrichie des contributions de nos
artistes créatifs, de nos institutions culturelles ainsi que des
manifestations individuelles et collectives de notre identité
canadienne. Notre identité s'exprime non pas par une seule voix,
mais une multitude d'entre elles qui représentent la riche diversité
de nos régions et de nos racines ethniques.
(1620)
En 1993, notre gouvernement a pris la place d'un régime
conservateur qui n'avait su saisir l'importance du développement
culturel. Le gouvernement libéral est resté fidèle à notre vision qui
consiste à créer un pays plus uni, plus fort, tout en renforçant
l'économie. Dans cette vision, nous accordons une grande
importance au besoin d'appuyer et de renforcer l'identité et la
culture canadiennes ainsi que de célébrer le patrimoine du Canada.
Le côté pratique est clair. Nous voulons renforcer l'économie et
créer plus d'emplois pour les Canadiens. C'est ce que nous faisons.
Nous sommes également en train de créer un pays plus uni et fort où
la culture et l'identité canadiennes fleurissent, où l'économie croît
et où des emplois sont créés. Laissez-moi vous donner quelques
exemples pour vous montrer à quel point tout fonctionne bien.
Le ministère du Patrimoine canadien joue un rôle actif dans la
stratégie fédérale de l'emploi. Beaucoup de choses se sont passées.
Le programme Jeunesse Canada au travail met les jeunes Canadiens
au travail et les aide à mieux comprendre le Canada.
En 1996, Jeunesse Canada au travail a permis à plus de 2000
jeunes Canadiens d'acquérir une expérience intéressante dans la
cadre d'emplois d'été. Ces jeunes ont pu travailler dans quatre
secteurs clés du patrimoine culturel et naturel varié du Canada,
nommément les parcs nationaux et sites historiques, les jeunes
autochtones des régions urbaines, les deux langues officielles et les
institutions patrimoniales.
Le programme Jeunesse Canada au travail est unique en cela
qu'il offre à de nombreux participants la possibilité de séjourner
dans d'autres régions du pays. Je suis heureux d'annoncer que le
programme reviendra l'été prochain.
Notre gouvernement est fier d'offrir à de jeunes Canadiens la
chance de rencontrer leurs concitoyens, des gens d'autres milieux et
d'autres régions du Canada.
Les jeunes Canadiens ont la passion du Canada, ce pays envers
lequel ils sont engagés, où ils se sentent chez eux et où l'avenir les
attend. Jeunesse Canada au travail aide les jeunes Canadiens à
financer leur éducation, à acquérir une expérience professionnelle
inestimable et à mieux connaître le Canada.
Cette année, le gouvernement ajoute au programme deux
nouveaux volets. Les étudiants de second cycle pourront effecteur
des stages qui leur permettront d'accroître leurs compétences et
d'améliorer leurs chances d'emploi dans l'avenir. Il est important
pour nous tous de trouver des emplois aux jeunes. La fierté et la
passion qu'ils ressentent pour le Canada nous touchent tous au plus
profond de notre être. Nous pouvons partager et célébrer notre
identité canadienne et c'est précisément ce que Jeunesse Canada au
travail aide les Canadiens à faire.
Les arts sont un autre domaine où le gouvernement s'efforce de
façonner l'identité et la culture canadiennes tout en renforçant
l'économie. Les arts ont connu une croissance rapide depuis une
décennie. Ils apportent beaucoup au Canada; nous avons un bassin
humain qui regroupe les talents nécessaires au fonctionnement de
toutes les industries culturelles et de la radiodiffusion. Ils
transparaissent dans d'autres domaines du secteur culturel comme
le patrimoine, l'architecture et la publicité.
Le secteur culturel représente en tout plus de 29 milliards de
dollars d'activités économiques, dans l'ensemble du produit
intérieur brut du Canada, et compte pour plus de 900 000 emplois.
Le gouvernement du Canada sait que, en investissant dans les arts,
on gagne à tous les coups. C'est un placement pour le Canada.
Économiquement, c'est fructueux, et c'est également favorable à
l'identité culturelle du Canada et à l'unité canadienne.
Le ministère du Patrimoine canadien est très efficace dans son
travail de soutien de la création, de la production et de la
distribution des arts au Canada. Par exemple, les arts de la scène
sont en plein essor dans notre pays. Au cours des dix dernières
années, le nombre de représentations théâtrales a augmenté de 33 p.
100. L'assistance à ces représentations est passée de 10 millions en
1985 à plus 13,5 millions de spectateurs en 1995. Les recettes
engendrées par le théâtre, essentiellement par la vente de billets, ont
augmenté de 87 p. 100, pour atteindre 187 millions de dollars.
Rien qu'en 1994, les Canadiens ont acheté plus de 13 millions de
billets pour des pièces de théâtre présentées par des troupes
professionnelles sans but lucratif de danseurs, de musiciens, de
chanteurs d'opéra et de comédiens. La plupart de ces troupes
obtiennent du financement du ministère du Patrimoine canadien,
par l'entremise du Conseil des arts du Canada.
Le festival de théâtre de Stratford reçoit près 790 000 $ du
Conseil des arts. En retour, il génère 25 millions de dollars d'impôts
et 100 millions en retombées économiques.
(1625)
Le programme d'emplois pour les jeunes Canadiens et l'appui à
la création, à la production et à la distribution des créations
artistiques au Canada sont deux des moyens employés par le
gouvernement pour consolider le pays.
8214
Notre engagement est clair. Nous continuerons d'agir en chefs de
file dans la promotion de l'excellence de nos artistes et du succès de
nos institutions et de nos industries culturelles. Nous continuerons
d'agir en chefs de file en encourageant tous les Canadiens à
contribuer à la réalité canadienne, y compris nos jeunes, à qui nous
passerons le flambeau et qui devront créer le Canada de demain.
Il reste beaucoup à faire, mais notre engagement demeure le
même. Il est essentiel pour assurer la vigueur et la prospérité du
Canada, pour demain et pour les jours à venir.
[Français]
M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, je
rappellerai à mon collègue d'en face qu'il est passé très très loin de
la motion du Bloc québécois. Il n'a pas retenu cette motion, il nous a
dressé un portrait qui n'est pas conforme à la motion. La motion
présentée ce matin par mon collègue est celle-ci:
Que cette Chambre dénonce l'utilisation de fonds publics dissipés dans des
activités de propagande parrainées par Patrimoine Canada, tels le Bureau
d'information du Canada et l'opération Un million de drapeaux, alors que des
compressions sans précédent dans l'histoire canadienne ont été imposées aux
institutions culturelles canadiennes et québécoises.
C'est cela question. C'est de cette motion qu'on doit débattre
aujourd'hui. Comme preuve de ce gaspillage éhonté, c'est 98
millions de dollars qui appartiennent aux Canadiens et aux
Canadiennes, aux Québécois et aux Québécoises qui ont été
dépensés dans le seul but de faire de la propagande.
C'est donc un jour triste pour le Canada, aujourd'hui le 17
février, Jour du drapeau canadien. Il est triste de voir qu'une somme
aussi élevée soit dépensée, alors qu'on s'aperçoit chaque jour que le
taux de chômage ne cesse d'augmenter dans ce pays, que le nombre
d'emplois diminue continuellement, que de plus en plus de gens
sont en chômage et que plus d'un million d'enfants vivent
actuellement sous le seuil de la pauvreté.
Ce montant de 98 millions n'aurait-il pas pu servir autrement et
être utilisé à meilleur escient, que de servir à des causes comme
celle-ci? Je vous donne des exemples: souligner le 30e anniversaire
du drapeau canadien: 1,1 million de dollars; des panneaux
publicitaires, dont 300 sur les 600 sont au Québec; d'autres
émissions, Reflet du patrimoine, Minutes du Patrimoine, 2,2
millions de dollars dépensés inutilement.
Ma question est la suivante: Est-ce que ces sommes d'argent
n'auraient pas pu servir à sortir des enfants de la pauvreté? Pourquoi
ne pas avoir choisi ce moyen plutôt que de faire de la propagande
pour le Canada?
[Traduction]
M. Bodnar: Monsieur le Président, il est très intéressant
d'entendre le député parler de dépenser de l'argent pour des
drapeaux, du fait que nous devrions être fiers de notre pays et que
nous devrions veiller à garder ce pays uni-ce pays dont il a entendu
dire, je crois, qu'il est celui où il fait le meilleur vivre. Mais le
député néglige de mentionner tout l'argent gaspillé pour le dernier
référendum au Québec, tout l'argent gaspillé pour les affiches
imprimées au Québec. Pourquoi n'avoir pas investi cet argent dans
l'économie du Québec pour venir en aide aux enfants de la
province?
Le député dit que le chômage augmente. Ce n'est pas vrai. Le
chômage a baissé, pas autant que nous le voudrions-nous essayons
de le réduire et nous le ferons-mais il n'a pas augmenté comme il
l'a dit.
(1630)
Il est très regrettable d'entendre un député qualifier le Jour du
drapeau de triste journée pour le Canada. Il est très regrettable
d'entendre un député dire une chose pareille à la Chambre
démocratiquement élue du Canada. Une telle attitude est
incompréhensible. Un pays fort signifie des emplois pour tous, y
compris les jeunes.
M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.):
Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt le député de
Saskatoon-Dundurn parler des programmes financés par le
ministère du Patrimoine. Venant moi aussi de Saskatchewan, je sais
que le résident moyen de Saskatoon ou de la Saskatchewan rurale
n'est guère impressionné par les programmes et les projets financés
par Patrimoine Canada. Il y a quelques rares choses qui ont besoin
d'être financées, comme la lutte contre la discrimination raciale,
etc.
Le gouvernement provincial a retiré des fonds à la santé et où le
gouvernement fédéral a emboîté le pas, retirant des milliards à la
santé. Comment le député peut-il défendre le financement de
Patrimoine Canada pour des choses dont la priorité est loin derrière
la santé? Ce n'est certainement pas bien reçu en Saskatchewan.
M. Bodnar: Monsieur le Président, il est intéressant que le
député mentionne que les citoyens ordinaires de Saskatoon
n'appuient pas ce que fait Patrimoine Canada. Il ne doit pas
parcourir les mêmes rues que moi.
Le député critique ce qu'il appelle les compressions de dépenses.
C'est intéressant de constater que le budget du Parti réformiste
présente aussi des compressions. Par exemple, dans l'enseignement
postsecondaire, la santé, le Régime d'assistance publique du
Canada et la péréquation. Les compresssions seront de 35 p. 100
dans la péréquation, de 34 p. 100 dans le Régime d'assistance
publique du Canada.
Les réformistes critiquent ce qui a été fait pour remettre de
l'ordre dans les finances du pays. Eux, ils auraient coupés dans le vif
et détruit le système, mais tout d'un coup, maintenant que les
élections sont presque là, ce sont eux les sauveurs. Il y a trois ans,
lorsque les élections étaient loin, ils étaient prêts à détruire le
système.
Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le
Président, permettez-moi tout d'abord de dire que ces déclarations
sont tout à fait fausses.
Nous affirmons qu'il faut redresser la situation financière au
Canada. Les compressions libérales dépassent nettement celles que
nous avons proposées dans le budget des contribuables. Les libé-
8215
raux ont vraiment sabré dans les programmes. Leurs coupes
sombres frappent durement les gens dans tout le pays.
Lorsqu'on se penche sur les soins de santé en particulier, pour
résumer les déclarations du député, on s'aperçoit que le
gouvernement a sabré davantage dans le domaine de la santé que
n'importe quel réformiste ne songerait jamais à le faire. Au-dessus
de la porte de tous les hôpitaux qui ont fermé au Canada, on devrait
mettre une affiche sur laquelle on dirait: «Vous devez la fermeture
de cet hôpital au gouvernement libéral du Canada.»
C'est probablement, en partie, l'acrimonie qu'on constate qui a
donné lieu au débat d'aujourd'hui. Je ne peux partager les
sentiments des députés bloquistes sur notre drapeau, mais je peux
certes comprendre leur déception face au statu quo, face à la
situation de notre pays. En fait, c'est également la raison pour
laquelle je siège ici, parce que je ne peux me satisfaire du statu quo.
En face, nous avons un gouvernement qui prône le statu quo.
Qu'il s'agisse des libéraux ou des conservateurs, cela ne fait pas de
différence. Cela a certes été prouvé aujourd'hui par Guy St-Julien,
l'ancien député d'Abitibi, un ancien conservateur qui avait
l'habitude de s'en prendre à l'opposition à partir des banquettes
d'en face. Il va maintenant se présenter comme candidat libéral aux
élections fédérales. Quelle est la différence entre un libéral fédéral
et un conservateur? Je ne pense pas qu'il y en ait. Ce sont
simplement deux côtés de la même médaille.
L'autre choix qu'on nous propose, c'est la séparation, l'idée
prônée par le Bloc québécois. Même si à deux reprises, dans le cadre
d'un référendum provincial, les Québécois ont rejeté cette idée, les
bloquistes sont encore ici pour la défendre avec force.
Le débat d'aujourd'hui est, en fait, le deuxième round du débat
sur le drapeau. J'étais une adolescente lorsque ce débat a eu lieu à la
Chambre dans les années 60. C'était un processus très difficile à
regarder. Il a fallu six mois pour régler cette question parce que le
gouvernement de l'époque était loin d'appliquer la clôture aussi
facilement que le gouvernement actuel.
(1635)
M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine): Je n'étais
même pas encore né.
Mme Grey: Cela explique beaucoup de choses également. Quoi
qu'il en soit, le débat sur le drapeau a été l'un des plus acrimonieux
qu'on n'ait jamais vu à la Chambre.
Nous avons adopté le drapeau canadien en 1965 et l'unifolié est
l'un de nos symboles dont nous sommes les plus fiers dans le monde
entier. Je suis heureuse d'appartenir à une société dont le drapeau
suscite beaucoup d'attachement non seulement au Canada, mais
également sur la scène internationale. Mon drapeau est très
important.
Je suis furieuse de voir qu'un groupe de gens à la Chambre des
communes veulent quitter le pays. Ce sont des séparatistes
convaincus. Ils essaient de cacher cela en se donnant toutes sortes
de beaux noms, mais le fait demeure qu'ils veulent se retirer du
Canada. Et ils appellent notre drapeau de la propagande. Ils l'ont dit
à plusieurs reprises aujourd'hui et il est regrettable que dans ce
contexte, on ne puisse pas juger cela non parlementaire, car je pense
certes que c'est le cas. Il est honteux que des députés traitent notre
drapeau de propagande.
Malheureusement, la ministre du Patrimoine canadien a essayé
d'offrir ce programme de drapeaux gratuits. Il s'agit d'un geste
symbolique qui, en période de vaches grasses, serait fortement
apprécié. Si nous avions un beau surplus budgétaire, ce serait un très
beau projet. Cependant, nous avons une dette de 600 milliards de
dollars. Le gouvernement dépense chaque jour 70 millions de
dollars de plus qu'il ne perçoit. Il sabre dans les soins de santé. Il a
réduit les paiements de transfert aux provinces de façon incroyable,
soit 7 milliards de dollars au titre du transfert canadien en matière
de santé et de progrmmes sociaux.
Néanmoins, cette ministre exerce tellement de pouvoir qu'elle
peut se présenter devant le Cabinet et exiger que 20, 30 ou 100
millions de dollars soient affectés à ces projets spéciaux. Voilà
probablement le coeur de la question. Il ne s'agit pas de savoir si,
oui ou non, il faut rendre hommage à notre drapeau ou avoir un
programme du drapeau. Elle avait déclaré initialement que ce
programme serait financé par des dons faits pour des Canadiens
dans tout le pays et qu'il coûterait 6 millions de dollars. Vous
connaissez la suite. Il y a bien eu des dons mais ils ont été cueillis
dans les poches des contribuables canadiens sans qu'ils aient quoi
que ce soit à dire sur l'utilisation de cet argent. Voilà un autre
exemple des programmes mi-volontaires mi-involontaires auxquels
les contribuables canadiens sont sans cesse appelés à contribuer.
L'idée était excellente: promouvoir le patriotisme et l'unité
canadienne. La cause était noble et l'objectif, louable, mais là
encore, le coût du programme était exorbitant et la ministre n'avait
aucune idée de la provenance des fonds nécessaires. Elle a joué des
coudes et a obtenu des résultats au sein du Cabinet. Elle a menacé le
ministre des Finances jusqu'à ce qu'il exauce son voeu pour avoir
enfin la paix. On donnera un peu d'argent à la ministre du
Patrimoine canadien pour qu'elle se tienne tranquille. C'est
malheureux qu'il en soit ainsi quand tant d'autres priorités ont dû
être abandonnées et pourtant la ministre a obtenu ce qu'elle voulait.
Une autre chose me tracasse. Ce n'est pas seulement le coût du
programme, mais c'est aussi l'idée que je me fais d'un programme
en faveur de l'unité nationale. Qu'en est-il au juste? Le fait de
distribuer gratuitement des drapeaux va-t-il résoudre notre
problème touchant l'unité nationale?
Nous sommes en effet confrontés à une crise, à savoir que les
députés formant la loyale opposition de Sa Majesté sont des
séparatistes. Ils ne veulent rien savoir ni de la Chambre ni de Sa
Majesté. Ils ont été très clairs à ce sujet. Est-ce à cela que se résume
la réponse du gouvernement? Est-ce tout, cher collègue? Voici un
drapeau gratuit. C'est notre nouveau programme d'unité nationale.
C'est tragique et à peine un peu plus d'an après le référendum, qui a
failli nous jeter dans le précipice. Le premier ministre déclare:
«Nous avons gagné le référendum.»
On dirait qu'il s'agit de la coupe Stanley. Nous avons gagné. J'ai
des nouvelles pour lui, pour sa voisine de banquette, la
vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, pour
tous les gens d'en face et pour tous les téléspectateurs.
Malheureusement, le référendum n'avait rien d'une finale pour la
coupe Stanley. On peut s'attendre à une partie supplémentaire,
parce que Lucien Bouchard est aux commandes. Les députés ne
savent que trop bien que, pendant trois ans et demi, il a été mon
voisin de banquette dans la dernière rangée de la Chambre. Même si
je rejette avec véhémence
8216
sa politique et si je suis Canadienne jusqu'à la moëlle, j'ai compris à
quel point cet homme est un stratège hors pair. Je sais aussi que, s'il
ne tient qu'à lui, il y aura un autre référendum au Québec, et que,
celui-là, il n'entend pas le perdre.
(1640)
Le gouvernement doit sûrement avoir mieux à offrir à ceux
d'entre nous qui sommes de fervents Canadiens fédéralistes. Il y a
sûrement mieux qu'un drapeau canadien.
La ministre m'a déjà critiquée à la Chambre, au cours de la
période des questions, en disant que des électeurs de Beaver River
avaient commandé un drapeau, comme si elle venait de faire une
découverte terrible ou fantastique. Les électeurs de Beaver River
aussi sont de fiers et fervents Canadiens, et un grand nombre d'entre
eux ont commandé un drapeau. Ils n'ont pas honte d'agiter le
drapeau canadien. Quand on leur en a offert, ils ont été nombreux à
en demander. Que s'est-il passé? Dans chaque enveloppe, on leur a
fait parvenir trois, quatre ou cinq drapeaux. Mais qu'est-ce qui se
passe dans ce bureau où l'on ne sait même pas compter jusqu'à un?
C'est triste.
Il doit y avoir mieux qu'un drapeau gratuit pour promouvoir
l'unité nationale. La question exige plus de sérieux.
Notre plan 20 sur 20 s'attaquait bien à ce problème. Nous avons
dit que les Québécois avaient des raisons de s'inquiéter. Nous
sommes d'avis qu'il faut redonner aux provinces les compétences
qui étaient les leurs au début.
Nous voyons tant de dédoublements et une soif de pouvoir
tellement incroyable de la part du gouvernement fédéral. Lorsqu'il
a le pouvoir voulu pour organiser et gérer tout, il ne peut tout
simplement plus s'en départir. Le gouvernement fédéral doit
conserver des pouvoirs dans certains domaines comme la défense,
les affaires étrangères, la politique monétaire, la réglementation des
institutions financières, le droit pénal, la simplification des normes
nationales, la péréquation, le commerce international et le
commerce intérieur. Ce sont là des domaines où il devrait exceller et
où il excelle.
Il est faux de dire qu'il faut procéder à une décentralisation et
que, à la suite de celle-ci, le gouvernement fédéral n'aura plus de
pouvoirs. Les provinces doivent toutefois conserver les secteurs de
compétences qui, à l'origine, avaient été prévus à leur intention. À
mon avis, de nombreux Québécois s'en réjouiraient.
En contrepartie des 20 raisons pour lesquelles on peut souhaiter
demeurer au Canada, il y a 20 réalités liées au coût d'une sécession
ou d'une séparation, appelez cela comme vous voulez, et elles ne
sont guère plaisantes à envisager. À mon avis, il vaudrait mieux y
réfléchir à deux fois avant d'opter pour la séparation.
Lorsque des députés séparatistes qui sont assis près de moi à la
Chambre me disent qu'en arborant mon drapeau je fais de la
propagande, je trouve cela vraiment inquiétant. Je leur lance un défi
et je leur dis: lorsque vous critiquez mon drapeau ou la Fête du
Canada, c'est moi que vous critiquez car je suis née le 1er juillet
1952 et que personne n'a le droit de dénigrer mon drapeau, la Fête
du Canada ou celle du Dominion, comme j'aime encore l'appeler.
[Français]
M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, la
prochaine fois que le 1er juillet se présentera dans le calendrier, je
saurai que, non seulement c'est la fête du Canada, mais aussi la fête
de notre honorable collègue.
J'aimerais souligner à notre honorable collègue que ce qui est en
cause ici, ce n'est pas que le drapeau, en soi, est de la propagande.
J'ai le plus grand respect pour les drapeaux des nations, j'ai le plus
grand respect pour le drapeau canadien, et je suis sûr que tous mes
collègues à la Chambre et ceux du Bloc ont également ce respect.
Mais c'est l'usage que l'on a fait de ce drapeau. On l'a utilisé pour
des fins que nous jugeons de propagande. Ce n'est pas le drapeau, ce
sont les fins, c'est l'intention qui est derrière.
Je demanderais à ma collègue du Parti réformiste si elle ne trouve
pas odieux que cette année, lors du Jour du drapeau, aucune
cérémonie ne l'ait commémoré, alors que l'année dernière, une
simple petite cérémonie ait eu lieu. Est-ce que ce n'est pas, d'une
certaine façon, réduire le rôle que ce drapeau représente pour le
Canada?
(1645)
J'aime le drapeau du Québec, mais je comprends également que
les Canadiens aiment leur drapeau, c'est légitime et c'est
respectable. Mais lorsque le gouvernement en face de nous n'est pas
capable, le Jour du drapeau, de le souligner avec autant de ferveur
qu'il dénonce nos interventions, alors, je me pose un certain nombre
de questions. Ce que nous dénonçons, c'est l'usage que ce
gouvernement fait du drapeau canadien. N'êtes-vous pas d'accord,
chère collègue?
[Traduction]
Mme Grey: Monsieur le Président, je pense avoir dit assez
clairement que j'ai des reproches à faire au gouvernement au sujet
du programme de distribution de drapeaux non seulement parce que
nous n'avons pas d'argent pour cela, mais aussi parce que les
libéraux croient que c'est leur seule plan de protection de l'unité
nationale.
Le député dit qu'il respecte le drapeau, et je l'en remercie. Il dit
qu'il aime son drapeau, le fleurdelisé, le drapeau du Québec. Moi
aussi, j'aime le drapeau provincial de l'Alberta. Mais je suis
d'abord et avant tout un citoyen canadien. Je vénère d'abord le
drapeau canadien et ensuite les drapeaux provinciaux, dont celui de
l'Alberta.
Il a dit qu'il n'y avait pas eu une grande cérémonie le jour du
drapeau. Est-ce que cela a quelque chose à voir avec ce qui s'est
passé l'an dernier à l'occasion du jour du drapeau? Les députés s'en
souviennent sûrement. Ce n'est pas tant des célébrations comme
telles dont je me souviens, mais du comportement du premier
ministre qui s'en est pris à un manifestant pendant les cérémonies.
Quel geste disgracieux, quelle honte pour un chef national!
8217
Il n'a pas suivi les agents de la GRC, qui célébraient le drapeau et
qui protégeaient le premier ministre ce jour-là. Il voulait jouer au
héros et prendre un bain de foule. Quand un manifestant lui a bloqué
le chemin, le premier ministre a perdu les pédales. Il l'a empoigné et
l'a projeté au sol. Est-ce cela qu'il faut célébrer quand on pense à
notre drapeau? Est-ce à cela que pensent les autres pays quand ils
regardent notre drapeau? Est-ce ainsi que se comportent les
Canadiens? Je ne pense pas.
Je voudrais remercier le député de ce qu'il a dit à propos du
drapeau. Je ne crois pas avoir entendu cela plus tôt quand la députée
de Rimouski-Témiscouata a dit qu'il était difficile d'aimer un
pays qui n'est pas aimable. C'est honteux. Il est tout à fait honteux
que quelqu'un lance cela au cours d'un échange énergique entre
deux Québécois. Elle a dit: «Venez nous chercher où on est, si vous
voulez nous garder avec vous autres.» Depuis des générations, le
reste du Canada va chercher les Québécois.
Le Québec fait partie de la famille. Il y a des jours où nous ne
sommes pas heureux de faire partie de notre famille. Je le sais. Nous
étions quatre filles à la maison et, à l'adolescence, il arrivait souvent
que nous souhaitions avoir une autre famille et je suis sûre que c'est
normal. Mais l'amour familial n'est conditionnel. Les gens font
partie d'une famille et la vie familiale n'est pas conditionnelle.
Le drapeau est à nous. Et même s'il y a des jours ou des années
complètes où les membres du camp séparatiste veulent quitter la
maison, ils font partie de la famille. Je crois qu'il est honteux de
dire: «Il est difficile d'aimer un pays qui n'est pas aimable» et
«venez nous chercher où on est, si vous voulez nous garder avec
vous autres». Vous êtes avec nous. Nous vous aimons. S'il vous
plaît, restez.
M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, je
voudrais féliciter la députée de Beaver River d'avoir exprimé
rationnellement un excellent point de vue sur toute cette question.
La motion dont nous sommes saisis aujourd'hui et qui est une
motion bloquiste accusant le gouvernement de gaspiller de l'argent
à faire de la propagande est un peu hypocrite et témoigne d'une
certaine étroitesse d'esprit. Je voudrais le signaler.
Le reste de la motion dit que, au lieu de consacrer de l'argent à
des drapeaux gratuits et au Bureau d'information du Canada, on
devrait plutôt, en fonction des compressions imposées aux
institutions culturelles, consacrer davantage d'argent aux soins de
santé, à l'éducation, etc.
Je voudrais signaler aux bloquistes que leur ancien chef sans peur
qui siégeait à la Chambre, le même Lucien Bouchard qui dirige
maintenant le Québec, va, dans son prochain budget et dans les
budgets qui suivront, sabrer dans les soins de santé et l'éducation. Il
devra effectuer des compressions et éliminer le gaspillage dans ces
domaines, car c'est là qu'on peut réaliser des économies et c'est sur
ces domaines, même en ce qui concerne l'assistance sociale et
d'autres programmes sociaux, qu'il devra se pencher.
(1650)
Ce parti, qui prétend pouvoir satisfaire tout le monde, devra faire
face à la réalité du pouvoir. Les gouvernements sont là pour
percevoir les deniers publics et les réinvestir dans le pays, dans
l'infra-structure naturelle et dans l'infrastructure humaine. Ce sont
ceux qui savent le mieux le faire qui devraient diriger le pays.
Depuis 30 ans, nous avons des politiciens qui administrent mal
les finances publiques. C'est tellement vrai qu'ils ont dû emprunter
près de 600 milliards de dollars pour payer les programmes qu'ils
voulaient offrir aux Canadiens. Ils ont refusé de vivre selon leurs
moyens.
La triste réalité pour tout le monde, peu importe le parti politique
auquel les gens appartiennent, c'est que nous sommes en pleine
période d'austérité. Nous sommes forcés d'équilibrer les budgets et
nous ne pouvons plus gaspiller les deniers publics.
En ce qui concerne cette motion qui s'attaque au ministère du
Patrimoine canadien, nous devons nous demander en quoi consiste
son objectif. Pourquoi avons-nous un ministère du Patrimoine
canadien? Il est là pour promouvoir le Canada. Il lui incombe
d'investir dans le Canada pour que nous puissions être fiers de
nous-mêmes et de notre pays.
Permettez-moi de vérifier le budget du ministère à l'heure
actuelle. Selon les Comptes publics, le programme Identité
canadienne coûte un demi-milliard de dollars. Nous consacrons
plus de 300 millions de dollars à Parcs Canada. Nous affectons
1,171 milliard de dollars à la SRC. Nous allouons 95 millions de
dollars au conseil qui est chargé de faire la promotion des arts et des
artistes canadiens. Nous versons 190 millions de dollars à Téléfilm
Canada et à l'Office national du film réunis. Nous allouons 91
millions de dollars aux musées du patrimoine, de la civilisation, des
sciences et de la technologie. Nous consacrons même 4,45 millions
de dollars à la protection des champs de bataille au Québec. Nous
affectons 23 millions de dollars à la radio, à la télévision et aux
télécommunications canadiennes, sans oublier le montant
supplémentaire de 10 millions de dollars accordé cette année, vu
que le gouvernement libéral entend maintenant assurer un
financement stable à la SRC pour les cinq prochaines années. Nous
consacrons 19,6 millions de dollars au Centre national des Arts qui
est à deux pas d'ici.
Nous allouons 98 millions de dollars à la Commission de la
Capitale nationale, le quatrième palier de gouvernement qui siège
dans la région d'Ottawa-Hull. J'ai du mal à concevoir la chose.
Qu'avons-nous besoin de quatre paliers de gouvernement dans la
ville d'Ottawa? Il y a en effet le gouvernement fédéral, le
gouvernement provincial, le gouvernement municipal et, comme si
ce n'était pas suffisant, la Commission de la Capitale nationale.
Personne ne distribue de contraventions par ici, car on est un peu
hésitant. Et si on vous colle une contravention, on ne vous oblige
pas à l'acquitter parce qu'on ignore de quelle administration cela
relève. S'il y a une ville qui a besoin d'un nettoyage, c'est bien
Ottawa. Toronto est une mégalopole. Qu'avons-nous besoin d'une
autre mégalopole? Pourquoi ne pas rassembler tous ces gens de la
8218
Commission de la Capitale nationale et leur signifier leur congé?
Pourquoi ne pas nous contenter d'une simple ville que nous serions
fiers d'appeler la capitale du Canada?
De l'autre côté de la rivière, Hull, Aylmer et Gatineau songent à
s'amalgamer pour ne former qu'une seule et même ville. Voilà une
excellente idée qui ferait réaliser bien des économies. Et par-dessus
le marché, nous aurions moins de politiciens, ce qui serait à
l'avantage et de la Chambre et du Canada tout entier.
Le Musée national du Canada, la Bibliothèque nationale du
Canada et les Archives nationales du Canada coûtent encore 129
millions de dollars. Cela fait 2,9 milliards, près de 3 milliards de
dollars, inscrits dans les comptes publics, que nous dépensons par le
truchement de Patrimoine Canada pour promouvoir l'identité
canadienne. C'est-à-dire pour promouvoir l'infrastructure humaine
canadienne et pour communiquer l'information sur le Canada grâce
aux moyens de télécommunications.
N'est-ce pas assez? Ne devrions-nous pas maintenant être fiers
d'être Canadiens? Ne devrions-nous pas, grâce à ces 3 milliards de
dollars, être capables de montrer partout au Canada, partout dans les
dix provinces, que nous sommes unis et que nous formons un
ensemble? Non, ce n'est pas possible.
Le gouvernement actuel dépense follement dans l'espoir de
régler tous les problèmes, de ceux des Indiens à ceux des
séparatistes et à ceux des exploitants de pétrole et de gaz naturel. Il
pense que l'argent suffit à régler les problèmes. Il ne sait pas faire ce
qui est vraiment important pour les Canadiens. Il ne sait pas leur
insuffler de la fierté et les rendre fiers d'être Canadiens. On trouve
dans le secteur privé de meilleurs messages publicitaires sur la
fierté d'être Canadiens que ceux qui nous viennent du
gouvernement.
Il faut commencer à promouvoir la qualité de Canadiens. Il y a
une chose que le gouvernement pourrait faire, mais qu'il n'a pas le
courage de faire-je sais qu'il s'agit d'un terme parlementaire et
que je peux l'utiliser puisqu'il a été utilisé pendant la période des
questions. Le gouvernement et son premier ministre n'en ont pas le
courage, mais ils en ont le pouvoir. La ministre du Patrimoine n'a
pas le courage-bien qu'elle en ait le pouvoir-de faire une chose
concernant le questionnaire du recensement. Une petite chose toute
simple qui ferait taire les séparatistes. Une petite chose toute simple
qui nous rassemblerait tous d'un océan à l'autre, c'est-à-dire nous
permettre d'inscrire sur le questionnaire de recensement la mention
Canadien, plutôt que Canadien-Hongrois comme je pourrais avoir à
l'indiquer, plutôt que Canadien-Français, ou Canadien-Anglais, ou
Canadien-Ukrainien, ou Canadien-Allemand, ou
Canadien-Polonais, mais tout simplement Canadien. Pourquoi ne le
faisons-nous pas? Comment se fait-il que le gouvernement, avec
tout le pouvoir qu'il a, soit trop paresseux et trop stupide pour faire
quelque chose d'aussi simple et plein de bon sens?
(1655)
Nous sommes tous, d'abord et avant tout, des Canadiens, pas des
Canadiens-Français ou des Canadiens-Anglais ou des Canadiens du
Québec. Nous pouvons être fiers de la région d'où nous venons,
nous pouvons être fiers de nos traits culturels distinctifs et de nos
différences, mais nous sommes des Canadiens. Pourquoi ne pas
inscrire simplement la mention Canadien? Qu'y a-t-il de mal à cela?
Combien cela coûterait-il? Très, très peu, mais le gouvernement ne
veut pas le faire.
J'ai dit que Patrimoine Canada dépense près de 3 milliards de
dollars pour promouvoir le Canada et l'identité canadienne. Que
dire du bilinguisme? Les séparatistes qui siègent ici disent que nous
ne leur donnons pas assez. Le commissaire aux langues officielles
soutient que nous dépensons au moins 600 millions de dollars, mais
c'est ridicule. Nous savons que le bilinguisme coûte beaucoup plus
cher. Il correspond probablement davantage à 5 p. 100 des dépenses
brutes du gouvernement, qui se chiffrent à environ 120 milliards de
dollars.
On peut donc dire sans crainte de se tromper que nous dépensons
beaucoup pour le bilinguisme, pour tout publier dans les deux
langues et pour promouvoir le français hors du Québec et l'anglais
au Québec, ce que les séparatistes ne veulent pas. Les séparatistes
croient en la démocratie, en la liberté et au respect. On peut séparer
le Québec du Canada, mais on ne peut rien séparer du Québec. On
peut protéger la langue tant qu'il s'agit du français, mais pas
l'anglais. C'est de l'hypocrisie. Le coût du bilinguisme contribue à
la promotion du canadianisme, et c'est une autre dépense qu'il faut
absorber.
La chose principale que je veux dire, c'est que ce gouvernement
n'a pas assez fait. Il a dépensé 3 milliards de dollars à Patrimoine
Canada. Il a dépensé entre 600 millions et 6 milliards de dollars
pour appliquer le bilinguisme officiel.
Pour conclure, je dirai qu'il est impossible d'imposer l'unité
nationale à coup de lois. Ce programme de distribution de drapeaux
a été une catastrophe. Où se trouvait le premier ministre samedi? Où
se trouvait le dirigeant de notre pays? Où était sa fierté? N'y avait-il
aucun manifestant à étouffer cette semaine, personne à empoigner?
Où se trouvait-il? Les journaux disent qu'il est allé faire ses courses.
Oui, bien sûr. Pourquoi n'était-il pas fier de ce que sa ministre
faisait?
Nous ne pouvons pas imposer l'unité nationale au moyen de lois.
Peu m'importe ce que nous pouvons essayer de faire, il est
impossible de contenter un parti séparatiste. Ces gens-là sont
persuadés qu'ils se débrouilleraient mieux seuls. Là-dessus, ils se
trompent. Ce qu'il faut, c'est faire davantage pour les Canadiens au
Québec. Pourquoi le gouvernement, qui a beaucoup de ministres
bilingues, ne va-t-il pas au Québec et n'en fait-il pas plus pour les
Canadiens au Québec, plus pour les anglophones et plus pour les
francophones qui veulent rester au Canada? Hisser un drapeau ne
suffit pas. C'est un échec. C'est un geste vide de sens.
Je voudrais que le Canada se ressaisisse et reste uni. Un bon début
consisterait à avoir des formulaires de recensement permettant de
déclarer qu'on est d'origine canadienne. Tous ceux qui sont nés ici,
peu importe dans quelle province, sont des Canadiens.
M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, la
ministre du Patrimoine a encore fait aujourd'hui une de ces
annonces dont elle a le secret. Cette fois-ci, elle met sur pied un
programme destiné aux écoles.
Je reconnais, à la suite de mes collègues de Beaver River et de
Calgary, que nous sommes des Canadiens fiers de l'être et que ces
symboles, ces drapeaux, ces blasons et toute cette documentation
sur les provinces revêtent une très grande importance pour le
8219
Canada. J'applaudis au motif qui anime la ministre en ce qui
concerne la distribution de cette trousse.
Néanmoins, je me demande si ma collègue voudrait apporter des
commentaires à ce sujet. Dans notre société apparemment sans
papier, je trouve plutôt intéressant de tenir compte du fait que toute
l'information en provenance d'Industrie Canada est transmise sur
Internet. La plupart des écoles canadiennes, tous niveaux
confondus, ont sans doute maintenant accès au World Wide Web,
l'Internet.
(1700)
Les élèves peuvent, via l'Internet, retrouver tous ces éléments
graphiques, drapeaux, armoiries, blasons et drapeaux des provinces,
ainsi que toutes les données dont les enseignants pourraient se servir
pour informer davantage nos enfants sur le Canada. Or, bien qu'elle
soit gratuite, cette trousse que la ministre est en train de concocter se
trouve à contenir par hasard un CD-ROM et un vidéo. Certes, ces
documents fourniront d'autres renseignements supplémentaires.
Je me demande si la députée est également d'avis qu'il est
probable que, une fois de plus, notre ministre du Patrimoine
s'apprête à transmettre aux élèves et aux enseignants du Canada sa
vision bien à elle de ce qu'est le Canada, au lieu de se contenter de
communiquer ces renseignements, laissant à la population, aux
enseignants et aux élèves, le soin de se faire une opinion et de faire
eux-mêmes les recherches qui s'imposent.
M. Silye: Monsieur le Président, je voudrais remercier mon
collègue de sa question. Chose certaine, ses observations étaient
justes. Son analyse de la façon dont nous pouvons promouvoir le
Canada et diffuser de l'information à un moindre coût est très
valide, et je suis tout à fait d'accord avec lui.
C'est clair dans tout ce programme de drapeaux gratuits. Un
drapeau est censé être un symbole et, si on est fier de son pays,
pourquoi devrait-on obtenir un drapeau gratuit? Pourquoi ne
dépenserait-on pas 15 $ pour en acheter un? On peut quand même
être fier de le faire. Je pense que c'est une chose que nous aurions pu
réaliser dans le cadre du Jour du drapeau et promouvoir.
L'idée était bonne, mais il est inadmissible de dire que cela va
coûter 6 millions de dollars, alors qu'il en coûte 17 millions de
dollars, puis de lancer un autre programme sur la façon de
promouvoir le Canada sans en connaître le coût. Ce dernier pourrait
dépasser le budget de la ministre, même si un budget de 3 milliards
de dollars est excellent, et on peut certes y trouver de l'argent caché
à quelques endroits.
Elle a parlé de 6 millions de dollars, mais le coût total, en fin de
compte, a été de 17,7 millions de dollars, 2,2 millions de dollars
venant du secteur privé, de sociétés et de particuliers, sous forme de
dons. C'est un coût net de 11,7 millions de dollars pour le
gouvernement. C'est un dépassement de budget de 195 p. 100. Il est
évident que la ministre ne fait pas de différence entre un million de
dollars, 100 millions de dollars ou 50 millions de dollars.
Dans le cadre de la promotion non réussie du Canada, comment
se fait-il que, même s'il y avait un numéro 1-800 pour le Québec et
un autre pour le reste du Canada, les Québécois n'ont réclamé que
11 p. 100 des drapeaux, comparativement à 89 p. 100 pour les autres
Canadiens? Comment expliquer qu'on ne puisse réveiller les
Québécois? Pour quelles raisons ne peut-on réveiller les Québécois
qui veulent demeurer au Canada et les amener à rester au Caada?
Une partie de ce programme de sensibilisation, grâce à des
CD-ROMS et des ordinateurs, devrait mettre les choses au point et
exposer la vérité.
Pendant quatre ans, dans les écoles secondaires du Québec, on a
enseigné aux étudiants que, en ce qui concerne la contribution aux
paiements de péréquation, les Québécois payaient plus qu'ils ne
recevaient, alors que c'était exactement le contraire. Ils recevaient
davantage de nos 8,5 milliards de dollars de paiements de
péréquation. Le Québec en reçoit plus de la moitié. On a dénaturé
les faits et le gouvernement a laissé faire. C'est ce à quoi je
m'oppose. Le gouvernement fédéral a le pouvoir et les
connaissances, et il ne leur reste plus qu'à prendre des décisions.
Cela ne nous coûte rien de réparer ce qui n'est pas brisé. Il n'est pas
très coûteux d'être fiers d'être Canadiens.
[Français]
Le vice-président: Conformément à l'article 38 du Règlement,
je dois faire connaître à la Chambre la question que nous aborderons
lors de l'ajournement ce soir: l'honorable député de Frontenac,
L'industrie de l'amiante.
Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis, Lib.): Monsieur le
Président, je partage mon temps avec le député de
Pontiac-Gatineau-Labelle. Je suis heureuse de pouvoir prendre
la parole au sujet de la question soulevée par mon collègue de
l'opposition, le député de Richmond-Wolfe et d'avoir la chance de
régler quelques faits qui ont été mentionnés par le Bloc québécois.
[Traduction]
L'expression «c'est le poêle qui se moque du chaudron» pourrait
très bien s'appliquer dans ce cas-ci, selon moi. J'ai écouté les
observations des députés de l'opposition qui jugent qu'il est
criminel de reconnaître qu'on est fier d'être Canadien et Québécois.
En tant que Québécoise, je suis vraiment insultée par les
accusations qu'on lance aujourd'hui.
Dans le cadre de ses efforts de promotion de l'identité
canadienne, le gouvernement fédéral joue un rôle essentiel dans la
définition de l'avenir de notre pays. Nous sommes déterminés à
renforcer l'attachement des Canadiens à leur pays et les liens qui les
unissent d'un océan à l'autre. C'est pourquoi nous avons multiplié,
pour les citoyens canadiens, les occasions de s'informer au sujet de
leur pays et de communiquer entre eux et avec le reste de la planète.
(1705)
Par le dialogue et la compréhension, nous avons réussi à bâtir une
société dotée d'une grande diversité culturelle et de deux langues
officielles, une société ouverte sur le reste du monde et tournée vers
l'avenir.
8220
Que ce soit par le truchement du Bureau d'information du Canada
ou grâce au programme d'un million de drapeaux, le gouvernement
est heureux de faire connaître la richesse et la diversité du Canada,
tant chez nous qu'à l'étranger.
[Français]
S'il y a un sujet sur lequel le Bloc québécois est fort mal avisé de
critiquer notre gouvernement, c'est bien sur la question de la
propagande gouvernementale.
Le Bloc québécois et son frère, le Parti québécois, sont passés
maîtres dans l'art de la propagande politique. Pour ces deux
formations politiques, tout est propice à la promotion de leur projet
séparatiste. Nous pourrions donner quelques exemples où le
gouvernement péquiste du Québec et leurs partenaires
souverainistes se sont servis des fonds publics afin de mousser leur
option séparatiste. Ce gouvernement et ses partenaires ont dépensé
de grosses sommes pour promouvoir leur option séparatiste et tenter
d'obtenir un vote favorable lors du dernier référendum. Tous ces
fonds, toutes ces dépenses, tout cet argent gaspillé, tout cela a été
pris dans les poches des contribuables québécois.
Pour le PQ et le Bloc, la propagande n'a pas de prix et n'a pas
d'âge, que ce soit en produisant de nouveaux manuels d'histoire ou
en remplaçant les cahiers d'exercice des élèves par des cahiers de
propagande, que ce soit par l'envoi de dépliants aux personnes
âgées et aux assistés sociaux, de cartes postales dans toutes les
résidences du Québec, de communiqués et de documentation dans
les écoles, de matériel à l'intention des corporations
professionnelles, que ce soit en multipliant les tournées régionales,
les sommets, les consultations de toutes sortes, pour ces deux partis
séparatistes, la fin justifie les moyens.
Par contre, lorsque le gouvernement canadien décide de répondre
et de corriger les inexactitudes véhiculées par les séparatistes, alors
là, ils crient à la propagande et au mauvais usage des fonds publics.
Lorsque le gouvernement canadien décide à son tour de stimuler la
fierté nationale de ses habitants, les péquistes et les bloquistes crient
à la propagande et au mauvais usage des fonds publics.
Le Bloc refuse d'accepter que la très grande majorité des
Québécois aiment le Canada et qu'ils sont heureux de voir que le
gouvernement canadien se décide enfin à faire la promotion du
Canada.
[Traduction]
Aux yeux des députés du Bloc, il est impensable que des
Québécois souhaitent encore être considérés comme des Canadiens.
Que dois-je dire alors aux 518 électeurs de ma circonscription qui
ont demandé un drapeau afin de pouvoir afficher leur fierté à l'égard
de leur pays?
Nous avons reçu des appels en grand nombre de la part de
personnes qui voulaient recevoir le drapeau canadien. Les gens sont
encore fiers de déployer le drapeau canadien, dans la
circonscription de Saint-Denis et partout ailleurs dans la province
de Québec.
[Français]
Je vais citer quelques exemples de dépenses de propagande
souverainiste et, comme je l'ai dit, la liste n'est pas exhaustive. Tout
d'abord, pour ce qui a trait à l'utilisation de fonds publics, le Bloc
québécois serait avisé d'aller voir un peu ce qui s'est passé au
Québec au cours des deux derniers référendums.
En 1980, c'est toute la machine gouvernementale qui avait été
mise à la disposition de «la cause». Le coût des sondages atteignait
des millions de dollars, alors que la situation économique aurait dû
commander une plus grande prudence dans la gestion des finances
publiques.
En 1995, on se sert toujours de la machine gouvernementale au
grand complet, encore une fois pour «la cause». Mais quand il s'agit
des souverainistes, on réussit à trouver toutes les raisons légitimes
pour faire accepter de tels comportements à toute la population.
Dans cette motion, on fait état de coupures budgétaires sans
précédent dans l'histoire canadienne en ce qui a trait aux
institutions culturelles. Sur le plan de la culture, jamais le
gouvernement du Canada n'a osé se servir des artistes à des fins
politiques, comme l'a fait le Parti québécois lors des deux derniers
référendums.
Le gouvernement du Canada apporte un soutien aux artistes sans
arrière-pensée, sans demande d'allégeance à une quelconque
doctrine. Le gouvernement canadien maintient, depuis au moins
une trentaine d'années, des institutions culturelles et des
programmes de soutien et d'aide à tous les artistes canadiens et
canadiennes désireux de faire valoir leurs talents dans toutes les
activités artistiques et culturelles.
(1710)
Au Québec, ce n'est pas le Parti québécois qui a institué la loi
reconnaissant enfin le statut de l'artiste, mais bien un gouvernement
libéral. Le Bloc québécois ferait bien de faire un sérieux examen de
conscience avant de porter des accusations de la nature de celles
d'aujourd'hui.
Je veux citer M. Lucien Bouchard alors qu'il disait en 1994: «Je
respecterais le drapeau de n'importe quel pays, et encore plus celui
du pays qui m'appartient, le drapeau de mes ancêtres pour des
centaines d'années-il me doit de respecter cela.» Nous avons
beaucoup de citations de M. Bouchard alors qu'il était à la Chambre
des communes du Canada.
Je veux vous donner comme exemple mon histoire personnelle.
[Traduction]
Mes parents sont venus de Grèce. Je vis ici depuis plus de 37 ans.
Mes parents ont choisi le Canada. Ce pays a été bon pour eux et ils
adorent le Canada. Ils sont fiers d'être Canadiens. Je suis fière
d'être une Canadienne. Dans quel autre pays une personne venant
d'un milieu modeste comme le mien pourrait-elle avoir la chance de
servir ses concitoyens dans le cadre d'une institution aussi respectée
que celle que nous appelons la Chambre des communes?
Je crois, comme la majorité des Canadiens d'origine hellénique
et des Canadiens d'autres origines ethniques, et les deux sont
compatibles quoi qu'en pensent mes collègues du Parti réformiste,
que le drapeau est un symbole qui nous unit. C'est un symbole qui
témoigne de la grandeur de ce pays. Chaque année, je célèbre la Fête
du Canada dans ma circonscription. Plus de 1 000 Canadiens de
toutes origines, y compris des Canadiens français, participent à cet
événement. Nous célébrons alors notre drapeau et notre pays.
8221
Je continuerai d'organiser ces fêtes tous les 1er juillet. Tel est mon
engagement à l'égard de mes électeurs. Je continuerai de hisser le
drapeau, de montrer à quel point je suis fière d'être une Canadienne,
à quel point je suis fière de ce symbole internationalement respecté.
Lorsque je voyage, quel que soit le pays où je me trouve, les gens
parlent de la grandeur du Canada. Ils ont appris à reconnaître notre
drapeau.
Nous continuerons à vivre dans une société où chacun tolère et
respecte d'autres opinions, mais il existe un point sur lequel nous
n'accepterons jamais de compromis: le drapeau canadien, les
symboles qui nous unissent et le fait que nous sommes et
demeurerons toujours fiers d'être des Canadiens.
[Français]
M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, je
viens d'écouter notre distinguée collègue de la région de Montréal
qui nous a exposé la situation de son père, alors qu'il arrivait au pays
en provenance de la Grèce, il y a 37 ans, et combien sa famille
apprécie vivre au Canada. Je respecte les sentiments dont elle a fait
état devant cette Chambre.
Cependant, j'aimerais lui poser la question suivante: elle vit au
Québec, elle a été élevée au Québec, elle parle français et anglais,
pourrait-elle nous expliquer comment elle voit la culture
québécoise, comment elle voit la culture canadienne, et quelle
distinction fait-elle entre les deux?
Mme Bakopanos: Monsieur le Président, je crois qu'il faut plus
d'une minute pour répondre à la question de mon collègue, si je dois
expliquer ma fierté d'être québécoise ou ma fierté d'appartenir à
une culture qui est distincte, pour utiliser le mot, que j'accepte
d'ailleurs.
Je suis fière d'être québécoise mais je trouve que les deux
cultures sont compatibles. Il n'y a pas de différence entre être
québécoise et canadienne, pour moi c'est la même chose. Je peux
être québécoise et je suis fière d'être québécoise, j'ai vécu toute ma
vie au Québec et j'espère continuer d'habiter dans la province de
Québec pour le reste de ma vie, comme députée et comme citoyenne
canadienne.
M. de Savoye: Mais la culture?
Mme Bakopanos: La culture, pour moi, c'est ça la beauté du
Canada. La beauté du Canada, c'est que nous possédons deux
cultures et que nous pouvons nous enrichir à la fois de la culture
québécoise et de la culture canadienne.
(1715)
Ce que je trouve un peu drôle, c'est que les collègues du Bloc ne
peuvent apprécier la culture québécoise et la culture canadienne et
quand même être fiers d'être Québécois et Canadiens.
M. Benoît Serré (Timiskaming-French River, Lib.):
Monsieur le Président, j'aimerais appuyer ma collègue de
Saint-Denis quand elle disait, en anglais: «the pot calling the kettle
black». Comment les députés du Bloc peuvent-ils se lever en cette
Chambre et, sans rire, utiliser des mots comme «dénoncer
l'utilisation des fonds publics»?
Ils s'opposent à ce qu'on dépense 15 millions de dollars pour
promouvoir l'unité, la tolérance d'un si beau pays, quand ils
viennent de dépenser 60 millions pour un référendum qui est
divisible, qui nuit à l'économie du Québec. Parlons de double
standard.
Je trouve cela époustouflant. J'ai des amis des Premières Nations
et ils utiliseraient probablement le terme «langue fourchue». D'un
côté, on dépense des millions. Le mouvement séparatiste, que le
Bloc appuie, s'est infiltré dans nos écoles, dans Radio-Canada. On a
dépensé des millions. En ce moment, le gouvernement du Québec
dépense des millions de dollars des institutions fédérales pour
promouvoir son option indépendantiste.
Alors moi, je suis fier d'être Canadien, je suis fier de mon
drapeau canadien. Je me suis promené, ces dernières années, dans
plusieurs pays du monde et le symbole que représente le drapeau du
Canada est reconnu. Il n'est pas reconnu parce qu'il a une belle
feuille d'érable et qu'il est rouge, quoi que je n'haïsse pas la couleur
rouge malgré tout, mais c'est le drapeau le plus reconnu au monde
pour ce qu'il représente: le meilleur pays du monde où la tolérance
existe. Et c'est cette tolérance, cette unité qu'on veut maintenir au
Canada, comme au Québec, parce que le Québec fait encore partie
du Canada.
J'ai mes sources au Québec aussi. Mes ancêtres sont arrivés à
Québec en 1634 et en 1658 respectivement. La culture francophone
que j'ai n'est pas une culture québécoise, ce n'est pas une culture
franco-ontarienne, c'est une culture canadienne. Quand on parle de
culture canadienne, on parle aussi bien de la culture anglophone,
francophone et de celle de tous les autres groupes ethniques de ce
pays.
Mme Bakopanos: Monsieur le Président, j'aimerais remercier
mon collègue pour ses commentaires. J'aimerais lui dire que j'ai
fait référence, dans mon discours, aux dépenses du gouvernement
péquiste concernant la propagande gouvernementale. Je ne veux pas
répéter ce que j'ai déjà dit.
Je crois que nous sommes tous au courant de ce que sont les
dépenses des fonds publics à des fins vraiment partisanes. Je crois
qu'on en a eu beaucoup d'exemples lors du dernier référendum.
Espérons que les collègues du Bloc vont réfléchir quand même et je
vais réitérer ce que j'ai dit, que je suis fière d'être Québécoise et
Canadienne. Je suis fière d'être les deux.
M. Robert Bertrand (Pontiac-Gatineau-Labelle, Lib.):
Monsieur le Président, en réponse à la motion du député de
Richmond-Wolfe, j'aimerais d'abord préciser que le
gouvernement du Canada prend toute une série de moyens pour
promouvoir l'identité canadienne.
La mise sur pied du Bureau d'information du Canada et le
lancement de la campagne Un million de drapeaux ne sont que deux
mesures parmi une multitude d'autres mesures adoptées par le
gouvernement en vue de permettre aux Canadiens et aux
Canadiennes d'afficher leur fierté et leur sentiment d'appartenance
au Canada.
La culture est l'ensemble des signes grâce auxquels on se
reconnaît comme appartenant à un groupe, à une société, à un pays.
La culture n'est pas une abstraction en marge du réel, mais bien un
lien
8222
vital qui nous unit les uns aux autres. On peut donc dire qu'elle se
situe au coeur de l'identité canadienne.
Neuvième industrie en importance au Canada, le secteur culturel
totalise 670 000 emplois et crée des revenus de 16 milliards de
dollars par année. Ainsi, en faisant la promotion de nos industries
culturelles, nous atteignons un double objectif: contribuer à l'essor
de l'identité canadienne et au développement économique du
Canada.
À l'instar de tous les autres secteurs de la société, le secteur
culturel a dû faire sa part et trouver des solutions novatrices pour
faire face aux défis que pose la situation économique actuelle.
(1720)
Même en période de compressions, le présent gouvernement a
pris des mesures directes et indirectes pour renforcer les assises du
secteur culturel et favoriser l'essor de la culture.
Je pense entre autres à la création du Fonds de télévision et de
câblodistribution pour la distribution d'émissions canadiennes,
annoncée en septembre dernier. La télévision est un véhicule
privilégié de l'expression culturelle et occupe une place
prépondérante dans nos vies. En effet, aucun autre médium n'est
aussi présent dans notre quotidien et ne monopolise autant de nos
heures de loisirs que la télévision.
Pour les francophones, surtout ceux et celles qui habitent à
l'extérieur du Québec, la télévision permet d'avoir un accès direct à
la culture française d'ici et de rester branchés sur ce qui se passe
dans la communauté et dans la francophonie canadienne en général.
La télévision est un moyen de véhiculer les valeurs et les réalités
propres aux francophones, voire d'étendre le rayonnement de la
langue française. Pour les francophones en situation minoritaire,
l'accès à une programmation de langue française est, dans certains
cas, une question de survie.
Malgré la nécessité d'un contenu canadien d'expression
française sur nos ondes, il faut savoir que seulement 30 p. 100 des
dramatiques télévisuelles de langue française présentées ici sont
produites au pays. De plus, on estime qu'environ la moitié de la
programmation destinée aux enfants du Québec est produite à
l'étranger.
Il nous faut accroître notre capacité de communiquer notre point
de vue sur le monde aux autres Canadiens et Canadiennes et à
l'étranger, et ce, dans les deux langues officielles. Il nous faut
diffuser davantage d'émissions de télévision qui sont réalisées par
des Canadiens, qui traitent des Canadiens et qui s'adressent aux
Canadiens et au monde entier. Dans un univers télévisuel
multicanaux, c'est aussi une question de survie. Sans une
programmation canadienne de qualité pour faire face à la
concurrence, la présence canadienne sur nos ondes ira en diminuant.
Il est essentiel que les Canadiens et les Canadiennes aient la
possibilité de regarder des émissions qui leur plaisent et qui
reflètent leur réalité. C'est dans cette perspective que le
gouvernement du Canada a annoncé la création du Fonds de
télévision et de câblodistribution pour la production d'émissions
canadiennes qui totalise 200 millions de dollars par année. On
prévoit que ce fonds entraînera des retombées de 650 millions de
dollars en investissements et quelque 10 000 nouveaux emplois. À
ce nouveau fonds s'ajoute le financement stable que le
gouvernement garantira à la Société Radio-Canada, conformément
à l'annonce rendue publique il y a quelques jours.
Ces deux mesures contribueront directement à stimuler
l'industrie de la télédiffusion au Canada. Elles se traduiront par de
nouvelles dramatiques, de nouvelles émissions de variétés, de
nouvelles émissions pour enfants, de nouveaux documentaires et de
nouvelles émissions culturelles.
Nous avons pris des engagements en matière de culture et nous
continuons de mettre en oeuvre des mesures qui assurent son
rayonnement. Celles-ci démontrent sans équivoque notre
engagement à appuyer toutes les facettes du secteur des arts et de la
culture, qui constitue la pierre d'angle de notre identité collective.
Que nous soyons francophones ou anglophones, que nous
venions de Gaspé ou de Vancouver, nous avons tous en commun le
même désir, les mêmes objectifs: que notre culture reflète ce que
nous sommes. Les mesures gouvernementales d'appui à la culture
contribuent directement à la vitalité des deux grandes communautés
linguistiques de ce pays.
Monsieur le Président, chers collègues, il existe plusieurs façons
de favoriser l'essor de l'identité canadienne. Le gouvernement du
Canada n'a peut-être pas toutes les réponses, mais, même en
période de restrictions financières, il adopte des mesures
essentielles pour renforcer notre identité et affirmer notre présence
dans le concert des nations, car c'est l'avenir de notre pays qui est en
jeu.
(1725)
M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président,
c'est avec intérêt que j'ai écouté le discours de mon collègue.
Cependant, je dois avouer qu'il a fait fi de plusieurs faits et
événements. Dans ce dossier, il nous a caché certains chiffres.
Il n'a pas fait allusion au fait que son gouvernement coupe 20
millions de dollars dans la radio française de Radio-Canada ni que
son gouvernement a coupé également 7,5 millions au Centre
canadien de fusion magnétique de Varennes. Par contre, ce
gouvernement trouve 23 millions pour les drapeaux de sa ministre
du Patrimoine. Il a trouvé également 550 000 $ pour célébrer le 50e
anniversaire de la citoyenneté et du passeport canadien. Je pourrais
citer d'autres chiffres dans d'autres domaines où on a oublié
d'énumérer les moyens qu'on prenait pour faire de la propagande.
D'abord, nous avons, au Canada et au Québec, des créateurs et
des créatrices artistiques. Actuellement, selon des directives
émanant du ministère du Patrimoine, les gens qui veulent faire
affaires avec le Canada dans ce domaine doivent le faire, non pas à
partir de leur talent artistique dans tous les domaines de la vie
artistique, mais en plus, ils doivent faire la promotion de l'unité
canadienne à partir de leurs oeuvres.
Leur talent est évalué sur la base de leurs capacités à défendre
l'unité canadienne. Je pose la question suivante à mon collègue:
Est-ce que cette politique de se servir des artistes de façon à faire la
promotion de l'unité canadienne est un bon moyen d'arriver à ses
fins?
M. Bertrand: Monsieur le Président, j'aimerais premièrement
remercier mon collègue de sa question. C'est vrai, dans le contexte
actuel, qu'il y a des compressions à faire.
J'aimerais rappeler à mon collègue que Télé-Québec, la
corporation qui a remplacé Radio-Québec, a vu son financement
coupé de près de 50 p. 100.
8223
Par contre, nous, du gouvernement, ce n'est pas le genre de
coupures qu'on a faites à Radio-Canada. On a fait des coupures,
mais les coupures qu'on a faites avaient pour but d'assurer la survie
et le bien-être financier de la Société Radio-Canada. Je ne suis pas
d'accord pour dire que nous ne voulons pas sauvegarder nos
institutions culturelles.
Quand je vois ce que le gouvernement du Québec, le
gouvernement de M. Bouchard, a fait, en coupant d'énormes
montants dans les budgets de leurs institutions culturelles, une
coupure de 50 p. 100, je me dis qu'il y a quelque chose qui ne
marche plus dans le système.
M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président,
d'entrée de jeu, je vous demanderais de vérifier si nous avons le
consentement unanime pour que cette motion fasse l'objet d'un
vote.
Le président suppléant (M. Milliken): Avons-nous le
consentement unanime de la Chambre?
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. Milliken): Nous n'avons pas le
consentement unanime.
(1730)
M. de Savoye: Vous m'en voyez désolé, monsieur le Président,
mais il me fallait vérifier l'intérêt que mes collègues libéraux
portaient à la question.
Légalement, je suis Canadien; constitutionnellement, je suis
Canadien. Mais dans mon coeur, je suis Québécois. C'est là le
noeud de toute cette question. Combien d'argent, combien de
drapeaux Patrimoine Canada devra-t-il distribuer pour changer mon
sentiment profond?
J'ai voyagé dans plusieurs pays du monde; j'ai voyagé dans le
reste du Canada. Quand je suis ailleurs qu'au Québec, je vois la
différence de culture, je vois la différence de valeurs, je vois la
différence de références et de balises. Quand je suis hors du Québec,
je sais que je ne suis pas chez moi au sens profond du terme.
Bien sûr, quand je me promène au Canada, je suis légalement
dans ce pays que la Constitution me donne, mais on y parle anglais,
on y pense en anglais. Les valeurs sont d'excellentes valeurs, mais
différentes dans leur forme et dans leur fond de celles que je
retrouve au Québec.
La culture, il est une culture canadienne-anglaise, et elle est
différente de cette des Américains. Je le sais pour avoir été des deux
côtés de la frontière, mais cette culture n'est pas celle que je
retrouve au Québec. Pour tout vous dire, je serais bien embêté de
vous nommer des vedettes du cinéma, de la chanson, des arts de
scène, et que sais-je, canadiennes-anglaises. Je n'aurais pas la
même difficulté pour des vedettes québécoises. Pourquoi? Parce
que j'écoute la radio qui vient du Québec, et elle me présente les
artistes de chez nous et de la francophonie; parce que je lis en
français, et parce que je m'imbibe de ce milieu dans lequel j'ai été
élevé et éduqué et qui est le Québec.
Quand je suis de ce côté-ci de la frontière québécoise, je retrouve
un milieu certes sympathique, avec des gens avec lesquels je peux
développer des amitiés, mais qui ne sont pas de ma culture. Ce sont
des gens qui ont leur culture bien à eux, et ça me fait plaisir
d'échanger, de connaître et d'apprécier leur culture, mais ce n'est
pas la mienne. Combien d'argent Mme la ministre du Patrimoine
devra-t-elle dépenser pour m'amener à adopter une nouvelle
culture?
Vous l'avez compris, le Canada n'a pas assez d'argent pour
changer cette culture qui est profondément enracinée en moi. Et si
c'est vrai pour moi, c'est aussi vrai pour des millions de
Québécoises et de Québécois. Aucune somme d'argent n'arrivera à
transformer ce peuple et à l'assimiler dans un autre peuple. C'est
pour ça que l'oeuvre de Mme la ministre du Patrimoine est voué à
l'échec et qu'en réalité c'est un gaspillage de fonds publics.
Ce que je dis, c'est mon cas et celui de millions de Québécoises et
de Québécois, ce n'est pas le cas de toutes les Québécoises et de tous
les Québécois. Tantôt, nous avions ici la députée de Saint-Denis qui
exprimait une opinion contraire: elle se sent à l'aise dans cette
culture canadienne-anglaise.
(1735)
Soit, c'est son sentiment à elle et je ne peux le lui reprocher. Mais
l'inverse est aussi vrai. On ne peut pas me reprocher mon sentiment
à moi, on ne peut pas reprocher aux millions de Québécoises et de
Québécois qui partagent ce sentiment le fait qu'ils le possèdent.
De ce côté de la frontière, la culture est différente et, par
conséquent, les attitudes sont différentes. Il y a une semaine
aujourd'hui, j'avais l'occasion d'assister, à l'édifice Lester B.
Pearson, au ministère des Affaires étrangères, à une présentation,
par un panel de spécialistes américains, relative aux orientations du
deuxième mandat du président américain, M. Clinton.
Le maître de cérémonie, fonctionnaire bien sûr du ministère des
Affaires étrangères, a ouvert la séance et il l'a fait en anglais, et en
anglais exclusivement. Pourtant, à l'inscription, l'accueil était
bilingue. Les documents qui nous ont été remis étaient bilingues, et
sur place, nous avions la traduction en sept ou huit langues. Bien
sûr, le français était une de ces langues.
Cette rencontre a duré tout l'avant-midi et un peu plus. Nous
avions une période de questions réservée aux personnes de
l'assistance. J'ai été le seul à me lever, à aller au micro et à
interroger en français nos invités américains, qui avaient la
traduction bien sûr. Mieux, dans cette salle, il y avait 75, 100
personnes, des Canadiennes et des Canadiens, et j'ai été le seul à
interroger ces brillants panelistes sur les orientations politiques du
deuxième mandat deM. Clinton eu égard aux questions culturelles concernant le Canada.
Vous comprenez ici qu'on a des contentieux importants. Nous
pouvons mentionner, par exemple, Sports Illustrated. Nous
pouvons également mentionner le contentieux qui oppose le
ministre de l'Industrie avec Télésat Canada vis-à-vis de la FCC
américaine pour l'acquisition de deux satellites américains à des
fins de retransmission de télévision par ces satellites.
8224
J'ai été le seul à soulever cette question culturelle importante
pour l'ensemble du Canada, j'ai été le seul à le faire, et je l'ai fait en
français. J'étais dans un autre pays que le mien.
Vous comprendrez que lorsque je me promène à travers le
Canada, les différences sont suffisantes pour que je sente le
dépaysement que le voyageur ressent lorsqu'il voyage à l'étranger.
Bien sûr, j'utilise la même devise, la monnaie canadienne. Bien sûr,
je n'ai pas besoin de passeport, mais je ne suis pas parmi ceux qui
partagent mes valeurs, qui partagent mes sentiments, qui partagent
ma nationalité.
Il y a un peu plus d'un siècle, Calixa Lavallée et Adolphe
Routhier composaient musique et paroles du Ô Canada, en français.
Ces paroles faisaient référence à l'histoire de ses ancêtres
francophones. Ce n'est que plus tard, et après, que cet hymne fut
traduit en anglais, et sa traduction n'est pas une représentation des
concepts et des sentiments que l'on retrouve dans l'original, mais
elle est une transposition qui reflète les valeurs et les sentiments des
descendants britanniques.
(1740)
Ce faisant, il y a déjà 150 ans, se constituaient deux Canada, dont
l'un s'appelle aujourd'hui le Québec. Combien d'argent la ministre
du Patrimoine canadien devra-t-elle dépenser pour changer cette
réalité qui persiste et qui perdure depuis près de 400 ans, 400 ans
dont les 150 premières années ont été francophones? La ministre du
Patrimoine canadien a investi beaucoup d'argent pour influencer
mon coeur.
Lors du 30e anniversaire du drapeau canadien, 300 des 600
panneaux publicitaires étaient situés au Québec, les 300 autres
étaient répandus dans le reste du Canada. En ce sens, nous étions
déjà très distincts.
On a dépensé 1,1 million dans Reflet du patrimoine que l'on
appelle les Minutes du patrimoine, conçu par la fondation Charles
Bronfman, 2,2 millions ont été versés. Dans l'identité canadienne,
on parle de 3 millions de plus; dans l'Opération unité, accordée au
Conseil privé pour la campagne référendaire: 11 millions de dollars;
le Conseil pour l'unité canadienne a bénéficié de 8,4 millions et le
Bureau d'information du Canada, financé par Patrimoine Canada de
19,5 millions. L'opération Un million de drapeaux a coûté 23
millions de dollars; l'Opération unité: 5 millions; Attractions
Canada, que l'on voit actuellement sur le réseau TVA et sur le
réseau CTV: 1,5 million. Si l'on additionne tout cela, ça représente
100 millions de dollars. Et je vous le dis, après 100 millions de
dollars, la ministre du Patrimoine canadien n'a pas réussi à
influencer et à fléchir d'un iota les sentiments qui font que je suis
Québécois.
Monsieur le Président, vous me permettrez de dire que je
considère que le ministère du Patrimoine canadien utilise toutes ses
ressources pour nier la spécificité du Québec et en faire une région
canadienne comme une autre. Vous aurez compris qu'après 100
millions de dollars, la ministre n'y a toujours pas réussi.
Sur le plan linguistique, le gouvernement camoufle l'échec de sa
politique canadienne. Tous les ténors fédéralistes nient
l'assimilation des francophones hors Québec. Dieu merci il en reste,
Dieu merci ils se prennent en main et Dieu merci, le Québec les
appuiera et les soutiendra toujours. Mais la réalité est qu'ils étaient
beaucoup plus nombreux il y a 10, 20 et 100 ans.
L'objectif de la politique linguistique canadienne n'est plus de
préserver et de promouvoir la dualité linguistique mais, me
semble-t-il, de faire du Canada et de ses citoyens, un pays bilingue
chez les francophones, et qu'éventuellement ceci conduise à la
disparition de ces francophones devient secondaire.
Le ministère du Patrimoine canadien est responsable des dossiers
de la culture et des communications; il est responsable des langues
officielles, des parcs nationaux et monuments historiques et des
sports. L'intention du législateur au moment de créer ce ministère
était de réunir sous un seul toit tous ces secteurs chargés de
promouvoir cette identité canadienne à laquelle je ne m'identifie
pas, et à laquelle je ne pourrai jamais m'identifier.
(1745)
Voici quatre exemples qui témoignent de l'état d'esprit d'Ottawa
à l'égard de la culture québécoise, culture qui, pour le
gouvernement fédéral, ne semble pas exister. D'abord, l'adoption
de la Loi constituant le ministère du Patrimoine canadien qui
prévoit que le ministère du Patrimoine a pour fonctions d'instaurer,
de recommander, de coordonner et de mettre en oeuvre les objectifs,
opérations et programmes nationaux en matière d'identité, de
valeurs, de développement culturel et de patrimoine canadien.
De part et d'autre, les valeurs en place sont excellentes et
respectables, mais elles sont différentes et, par conséquent, méritent
d'être traitées de façon respectueusement différentes,
respectueusement distinctes et selon des mécanismes qui leur sont
propres et qui relèvent des peuples qui possèdent ces valeurs.
Au lendemain du référendum, le Comité permanent du
patrimoine canadien a tenu des travaux en vue de favoriser la
promotion de l'unité et de l'identité canadiennes. Le comité a invité
les grandes institutions culturelles canadiennes à témoigner de leurs
activités qui visent la promotion de l'unité canadienne et a demandé
aux citoyens de faire des suggestions d'activités à tenir pour
renforcer cette identité et cette unité canadiennes.
La fusion entre ces deux cultures ne peut pas être autre chose
qu'une chimère. La culture québécoise est foncièrement distincte de
la culture du reste du Canada. Et peut-être même dans le reste du
Canada existe-t-il plusieurs cultures, toutes aussi distinctes les unes
que les autres, si on tient en compte les peuples autochtones.
Un troisième exemple: la directrice du Musée des beaux-arts
d'Ottawa, Mme Shirley Thomson, a fait un exposé devant le comité
sans faire une seule référence à l'art visuel québécois. Croyez-le ou
non, M. John Harvard, qui présidait ce comité et qui est un unilingue
anglais, l'a félicitée pour n'en avoir point parlé.
Mon quatrième et dernier point est le suivant. Le directeur
général du Conseil des arts du Canada, Roch Carrier, s'est fait
rabrouer par des membres du comité parce que le Conseil a versé un
octroi à Mme Marie Laberge, une artiste souverainiste qui a coécrit
l'avant-propos du projet de loi sur la souveraineté.
8225
Tout cela pour dire qu'en matière de culture et de valeurs, il est
impossible, et l'histoire le démontre avec des populations toutes
petites et tout infimes sur toute la planète, il est impossible de
transformer les valeurs qui nous animent, d'assimiler une
population et surtout pas une population comme celle du Québec,
qui a maintenant une histoire de 400 ans et qui se développe à un
rythme qui ne cesse de croître de jour en jour.
Monsieur le Président, je vous remercie de votre bonne attention,
et j'espère que les paroles dont je viens de faire état permettront à
mes collègues de cette Chambre de comprendre l'inutile effort que
la ministre du Patrimoine est en train de faire avec les deniers
publics.
M. Patrick Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine,
Lib.): Monsieur le Président, je partagerai mon temps avec le
député de Timiskaming-French River.
J'ai écouté avec beaucoup d'attention les propos tenus par
l'honorable député qui sont parfois, à mon avis, des anecdotes,
certaines expériences personnelles.
(1750)
J'aimerais bien que le député nous dise quelles sont ces valeurs.
Il nous parle de valeurs québécoises, de valeurs canadiennes. Les
valeurs canadiennes sont des valeurs universelles, des valeurs de
tolérance, de partage, des valeurs d'équité entre Canadiens. Je crois
que c'est ce qui a fait la force du pays depuis ces longues années.
J'en conviens, le Canada est toute une expérience. Le député d'en
face conviendra avec moi, comme la majorité des citoyens de la
planète, que le Canada est quand même un succès. J'en conviens, le
programme du ministère des Affaires culturelles nous a coûté près
de 20 millions de dollars.
J'aimerais bien que le député nous explique les coûts
dramatiques de la séparation du Québec avec le Canada, les
divisions que cela engendrerait. Aujourd'hui les barrières tombent,
on cherche à s'unifier, à échanger entre nous à tous points de vue
non seulement au plan commercial, mais aussi sur le plan des
valeurs. Ces valeurs canadiennes, on les vit tous les jours.
Quand on entend les commentateurs internationaux nous dire:
«Vous savez on aurait bien aimé ça vivre l'expérience canadienne.»
Regardez le niveau de vie que nous avons, nos réussites
économiques, nos réussites font beaucoup de jaloux.
Il est malheureux d'entendre des gens abaisser les valeurs
canadiennes et le Canada. Quand on compare le Canada aux autres
pays, c'est un succès. Les Nations Unies l'ont dit à plusieurs
reprises. On peut retourner jusqu'à sir Wilfrid Laurier qui nous
disait, il y a un peu plus de 100 ans, que la pensée dominante de sa
vie était de réconcilier les éléments différents qui composent ce
Canada extraordinaire. C'est l'union de ces forces différentes qui en
fait le Canada tel qu'on le connaît aujourd'hui.
J'espère que le député d'en face pourra tenir compte du fait que
ces valeurs canadiennes sont universelles et qu'elles ont servi non
seulement l'ensemble du pays, mais en particulier les Québécois.
M. de Savoye: Monsieur le Président, je n'ai jamais abaissé, et je
veux que cela soit très clair, les valeurs canadiennes. Elles sont
respectables, mais ce sont les valeurs du reste du Canada. Le
Québec a ses propres valeurs culturelles et chaque population a ses
propres valeurs. Il n'existe pas de valeurs avec un grand V qui soient
universelles. Même les Français ont des valeurs différentes de
celles des Québécois. Ce n'est pas parce que nous partageons une
même langue que nous partageons nécessairement les mêmes
valeurs.
Les Américains parlent anglais, les Canadiens anglais parlent
anglais. Ont-ils exactement les mêmes valeurs? Non, il y a des
différences. Il y a également des ressemblances. J'en suis. Il y a des
valeurs qui transcendent. Lorsqu'on parle de tolérance, oui c'est
une valeur que nous partageons, j'en suis.
Mais lorsque nous regardons nos fondements culturels, notre
façon de voir les choses et que j'en discute avec des collègues
anglophones, il arrive que, selon leur bagage culturel, ils apprécient
certaines valeurs d'une manière différente de la mienne. C'est
normal et naturel et je respecte cette différence.
Ce que je demande, c'est que la ministre du Patrimoine la
respecte également et cesse de s'entêter à dépenser des dizaines de
millions de dollars pour aplanir ces différences. Nos richesses
personnelles, respectives y perdraient au change. Nous devons
conserver ces différences. Nous devons demeurer ce que nous
sommes. Nous devons établir un nouveau mode de collaboration et
de partenariat. Donc des souverainetés qui travaillent en partageant
certaines responsabilités, il me semble que c'est une façon moderne
de régler cette façon de faire qui ne fonctionne plus.
(1755)
Tout à l'heure, le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine
indiquait combien le Canada était un pays prospère. Admettez avec
moi que oui, le Canada, pendant un temps, nous a semblé être un
pays prospère, mais c'est parce qu'on empruntait à tour de bras et on
est rendu à hauteur de près de 600 milliards de dollars de dettes.
N'importe quel pays au monde, s'il avait eu le mauvais jugement de
s'endetter de pareille façon, serait le meilleur pays au monde où
vivre.
Actuellement, dans tous nos comtés, et je suis convaincu que le
député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine a aussi cette
situation dans son comté, il y a des gens qui ont de la difficulté à
manger trois fois par jour. Il y a des enfants qui vont à l'école sans se
nourrir. Le pays que l'on appelle le Canada n'est pas le meilleur
pays au monde pour ces gens. C'est une aberration que l'on se
retrouve dans ces circonstances.
Pendant ce temps, une centaine de millions de dollars ont été
dépensés pour essayer d'avaler la culture québécoise. C'est à la fois
une perte de temps, une perte d'argent et, surtout, une dépense qui
n'est pas faite au bon endroit, là où ça permettrait d'aider les gens
qui sont davantage en difficulté à améliorer leur sort.
Je crois que j'en ai assez dit. Le député de
Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine abondera certainement dans
mon sens, qu'il y a des gens dans son comté qui auraient besoin de
cet argent.
8226
M. Paul Mercier (Blainville-Deux-Montagnes, BQ):
Monsieur le Président, je voudrais signaler à mon collègue de
Portneuf que c'est avec raison qu'il dit que la prospérité actuelle du
Canada est fondée en grande partie sur des emprunts qui ont été faits
et que nous avons de la difficulté à rembourser.
Je voudrais lui faire remarquer, ainsi qu'à mon collègue de
Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, que cette prospérité est le fait
du travail des Canadiens et des Canadiennes, des Québécois et des
Québécoises, mais n'est pas lié au régime confédéral. Il ne faut pas
chercher dans la prospérité du Canada un argument pour le régime
fédéral, alors que nous savons tous qu'il y a sur la terre des régimes
qui sont fédéraux et qui ne sont pas des pays prospères. Je n'ai qu'à
citer la Russie ou l'ancienne Yougoslavie.
Il n'y a pas de lien de cause à effet entre le régime de ce pays et la
prospérité qu'il connaît. C'est son travail, c'est le travail des gens
qui a fait cette prospérité. Alors, qu'on cesse de se gargariser avec
cette prospérité pour dire qu'elle est un argument en faveur du
fédéralisme.
Si on coupe un gâteau en deux, les deux parties sont aussi bonnes
après qu'avant d'avoir coupé le gâteau. Si on coupe le Canada en
deux, est-ce que c'est pour ça que le Québec, d'une part, et le reste
du Canada, d'autre part, seront moins prospères? Eh bien, non.
Coupons le gâteau en deux, que chacun prenne sa part, qu'on reste
bons amis et qu'on cesse de nous gargariser sur les qualités du
gâteau avant qu'il ne soit partagé. Elles demeureront après le
partage.
M. Benoît Serré (Timiskaming-French River, Lib.):
Monsieur le Président, le député de Portneuf parlait tout à l'heure de
perte de temps et d'argent. Je pense que la plus grosse perte de
temps et d'argent, pour les Québécois, c'est d'avoir élu les quelque
50 députés du Bloc québécois.
Ils sont assis à la Chambre des communes depuis environ trois
ans et demi. J'ai fait des petits calculs très rapides et je considère
qu'ils ont dépensé, collectivement, dans les trois dernières années,
en salaires, budgets de comtés, transport, quelque 100 millions de
dollars, et tout ça, pour une propagande purement séparatiste.
La seule motion que je pourrais appuyer, aujourd'hui, dans cette
Chambre serait la suivante: «Que la Chambre dénonce l'utilisation
de fonds publics dissipés dans des activités de propagande purement
séparatistes par le Bloc québécois.»
M. de Savoye: Monsieur le Président, quel que soit le montant
que nous coûtons au Trésor public, nous coûtons exactement, par
député, le même montant que n'importe quel autre député dans cette
Chambre.
Cependant, l'argent qui me paie, qui fait fonctionner mon bureau,
vient de mes électeurs et de mes électrices, qui m'ont élu avec 54 p.
100 des voix. La démocratie, c'est ça. Et si mon collègue d'en face
n'est pas capable de respecter que 53 députés du Bloc aient été
démocratiquement élus, selon les règles de ce Parlement et de ce
Canada auquel nous appartenons légalement et
constitutionnellement, et qui régissent de la même manière la façon
dont il a été élu, s'il y a deux poids, deux mesures, lui ayant le droit
de siéger parce que les règles sont bonnes pour lui mais que les
règles ne sont pas bonnes pour nous et que nous n'avons pas le droit
de siéger, alors qu'il le dise et qu'il assume que le Québec va être
bien mieux de former son propre pays.
(1800)
De toute façon, c'est ce que nous voulons. Nous le demandons,
nous attendons que vous nous l'accordiez, et si vous ne voulez pas
nous l'accorder alors, par voie de référendum, la population, elle,
l'exigera.
M. Benoît Serré (Timiskaming-French River, Lib.):
Monsieur le Président, oui, j'ai été élu moi aussi par 60 p. 100 de
mes électeurs pour servir le Canada dans cette Chambre. C'est ce
que j'ai l'intention de faire.
Je tiens à prendre la parole en cette Chambre aujourd'hui pour
rétablir les faits. Je veux témoigner des mesures exceptionnelles qui
ont été prises dernièrement afin d'aider les francophones de ce pays
à s'épanouir au plan culturel. Il est vrai que le secteur des arts et de
la culture au Canada, que ce soit du côté francophone ou
anglophone, a subi des compressions. Vous le savez mieux que
personne: la situation économique dans laquelle nous nous trouvons
exige que le gouvernement coupe dans ses dépenses. Il n'a pas
d'autre choix. C'est le cas pour le Canada et c'est le cas pour tous les
autres pays du monde, y compris le Québec, ça s'en vient, qui se
trouve présentement confronté à de nouveaux enjeux
internationaux.
Tous les secteurs de la société, y compris le secteur culturel,
doivent examiner la situation et faire leur part. Il y va de la
prospérité du Canada. Mais entendons-nous bien: il est hors de
question que le développement économique de notre pays se fasse
au détriment de notre culture et de notre identité collective.
Le gouvernement du Canada n'a surtout pas l'intention de
fragiliser indûment un secteur aussi important que la culture qui
contribue, à lui seul, 30 milliards de dollars à l'économie
canadienne et qui représente quelque 900 000 emplois directs. Et
cela, encore moins à cette époque d'ouverture des marchés et des
frontières où la vitalité culturelle d'un pays est un gage de réussite et
d'avenir.
Les francophones participent à cette richesse culturelle qui fait
l'originalité et le succès du Canada. Le quart de la population au
pays parle, chante, écrit et vit en français, y compris nous, dans le
nord de l'Ontario. Depuis le début de notre histoire, les
francophones constituent une force agissante qui contribue à l'essor
de ce pays, tant au plan culturel que social et économique.
Dans ce contexte, l'engagement du gouvernement à l'égard des
communautés francophones en situation minoritaire prend tout son
sens. Le gouvernement veut aider ces communautés à relever les
défis que posent leur situation pour qu'elles puissent continuer à
participer à l'évolution du Canada et au renforcement de leur
identité culturelle.
Les francophones hors Québec avaient exprimé dernièrement
leurs préoccupations quant aux mesures de réduction budgétaire
imposées à la Société Radio-Canada. Ils craignaient que ces
coupures aient des répercussions défavorables sur la
programmation régionale.
8227
On sait l'importance pour ces communautés d'avoir accès à des
émissions de langue française qui reflètent leurs valeurs, qui
présentent leur point de vue sur le monde et qui lui permettent de
communiquer entre elles. Pour les plus isolées, c'est tout
simplement une question de survie.
Conscients de cette réalité, la SRC et le gouvernement ont pris les
décisions qui s'imposaient. En janvier dernier, la Société
Radio-Canada a annoncé une série de mesures qui visent à réduire
l'impact de ces coupures sur la programmation de langue française
à l'extérieur du Québec.
Premièrement, les quatre stations de télévision de l'Ouest
concéderont le bulletin de nouvelles Ce soir. De plus, les stations
régionales continueront de produire des émissions pour enfants, des
émissions d'information et des émissions spéciales qui portent sur
les événements importants pour les communautés.
Deuxièmement, la SRC mettra à la disposition des producteurs
indépendants et des groupes communautaires de la communauté
acadienne des Maritimes un car de reportage télé pour couvrir des
événements culturels et communautaires. Elle fournira également
une ligne de crédit de 500 000 $.
Troisièmement, une somme de 500 000 $ sera allouée aux
stations de radio hors Québec les plus touchées, c'est-à-dire celles
de Vancouver, d'Edmonton, de Regina et de Windsor, afin
d'enrichir le contenu des émissions locales.
(1805)
Je rappelle, pour mémoire, que les autres stations de radio qui
desservent les communautés francophones en situation minoritaire
ont été moins touchées par les compressions que la moyenne des
radios de Radio-Canada au pays.
Dans un communiqué de presse qu'elle a émis le 30 janvier
dernier, la Fédération des communautés francophones et acadienne,
organisme national qui regroupe les associations francophones de
neuf provinces et de deux territoires, a applaudi les efforts de la
Société Radio-Canada: «Ce réaménagement, écrit-elle, démontre
que Radio-Canada est de plus en plus sensible aux besoins des
communautés des différentes provinces, ainsi qu'au mandat qu'elle
doit remplir auprès d'elles.»
Dans la foulée de ces mesures, le gouvernement du Canada a
également pris deux décisions majeures qui aideront la Société
Radio-Canada à s'acquitter de ce mandat. Le gouvernement a
annoncé qu'il accorderait un financement annuel additionnel de 10
millions de dollars aux services français et anglais de radio de la
Société Radio-Canada.
Selon M. Marcel Pépin, vice-président de la radio française de la
SRC, «cette somme permettra à la radio de mieux remplir ses
missions prioritaires, à savoir le soutien au talent, le maintien d'un
réseau d'information fortement ancré dans les régions et le reflet
adéquat des voix régionales aux réseaux AM et FM.»
Une bonne nouvelle en attire une autre. À compter du 1er avril
1998, le gouvernement garantira un financement stable à
Radio-Canada pour les cinq prochaines années, conformément à
une annonce rendue publique, il y a moins d'une semaine.
À ces mesures s'ajoute la création d'un nouveau fonds de
télévision et de câblodistribution pour la production d'émissions
canadiennes qui totalise 200 millions de dollars par année et auquel
la SRC a maintenant accès.
Inutile de préciser que ces nouvelles ont été accueillies avec
beaucoup de joie par les communautés francophones de ce pays. La
vitalité culturelle du Canada passe inévitablement par
l'épanouissement culturel de sa francophonie. Les Canadiens et les
Canadiennes d'expression française ont façonné l'histoire de ce
pays et ils prêtent un visage singulier et une voie particulière au
Canada. C'est pourquoi, en dépit des restrictions financières
auxquelles il est confronté, le gouvernement est intervenu afin de
renforcer les assises culturelles des communautés francophones
hors Québec.
Toucher à la culture d'un pays, c'est toucher à son âme. À
l'approche d'un nouveau millénaire, nous prenons de plus en plus
conscience de la nécessité de fortifier par tous les moyens l'âme de
ce pays. Toutes ces mesures et celles que le gouvernement entend
prendre pour sauvegarder la culture canadienne pavent la voie du
Canada de demain.
M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le
Président, j'aimerais poser une question à mon distingué collègue,
député du nord de l'Ontario.
Dans ce pays, on retrouve deux peuples fondateurs, un peu
comme dans un couple. L'amour, ça ne s'achète pas. Je me
souviens, le 27 octobre 1995, où les gens de ce parti ont dépensé une
somme colossale pour témoigner un grand geste d'amour soudain
envers le peuple québécois. Par dizaines de milliers, on a dépêché à
Place Canada, au centre-ville de Montréal, des Ontariens, des gens
du Nouveau-Brunswick, même des compagnies aériennes ont été
mises à contribution. Il fallait témoigner subitement notre amour.
Douze mois plus tard, on a fait une tentative pour témoigner le
même genre d'amour, mais cette fois-là, les compagnies aériennes
et le Parti libéral du Canada ne furent pas mis à contribution.
Résultat: à peine 225 personnes se sont déplacées pour témoigner
leur amour envers le peuple québécois.
(1810)
Est-ce que c'était l'amour d'un jour ou l'amour de toujours? Le
peuple québécois ne se laissera pas acheter par des drapeaux, par de
l'information biaisée, par de l'information qui ressemble à de la
propagande qu'on pouvait entendre à la radio en Europe pendant
une certaine époque.
Je dois rendre hommage à mon distingué collègue, le député de
Richmond-Wolfe pour sa motion. J'aimerais vous lire la partie qui
m'intéresse. Comme mon distingué collègue le disait si bien tout à
l'heure, le gouvernement doit couper dans ses dépenses. On coupe
partout, sauf dans la propagande.
Le député de Richmond-Wolfe a écrit:
8228
Que la Chambre dénonce l'utilisation de fonds publics dissipés dans des activités de
propagande parrainées par Patrimoine Canada, tels le Bureau d'information du Canada
et l'opération Un million de drapeaux. . .
En terminant, j'aimerais que le député m'explique comment il se
fait que votre gouvernement soit tombé dans le panneau avec Robert
Gillet? Il était en onde à Québec à sa station de radio, il a composé le
fameux numéro 1-800-DRAPEAU et là, il parlait comme si c'était
Bob Sweater. Il a commandé des milliers de drapeaux, voulant
pavoiser tous les chalets le long du fleuve Saint-Laurent sur les deux
rives, de Québec à la Gaspésie. Et on a effectivement envoyé des
milliers de drapeaux.
Il fallait bien les donner, ces fameux drapeaux, parce que le
chiffre magique était un million et nous sommes 30 millions. Donc,
un citoyen sur 30 devait recevoir son drapeau. Robert Gillet, dit Bob
Sweater, en a reçu plusieurs milliers. Vous êtes devenus la risée des
Québécois et des Québécoises, messieurs.
Nous sommes en pleine période de coupures budgétaires.
Essayez donc d'expliquer à ce gouvernement qu'il dilapide
présentement des fonds publics à de la propagande qui est basse,
répugnante et qui frise le ridicule.
M. Serré: Monsieur le Président, oui en effet, j'étais un de ceux
qui se sont rendus à Montréal en 1995, et je l'ai fait avec fierté et je
le referais demain. J'y suis allé après aussi. Ça n'a pas été l'histoire
d'un soir, l'amour d'un soir, comme vous dites. Je ne crois pas en
l'amour d'un soir, d'ailleurs.
Je suis retourné dans la belle ville de Québec. Je dois vous dire
que j'y retourne chaque fois avec la même fierté que lorsque je vais
dans les Rocheuses, à Vancouver, avec la même fierté que lorsque je
visite les Maritimes. Tous les étés, je vais passer une semaine
là-bas, je vais visiter mes frères, mes cousins acadiens. On s'est
rencontré là d'ailleurs, monsieur le député.
Je voudrais simplement dire ceci. Nous sommes allés à Montréal
pas seulement pour dire au Québec qu'on l'aimait. Nous sommes
allés à Montréal pour défaire la désinformation véhiculée par le
Parti québécois et le Bloc québécois. Je suis allé à Jonquière,
justement près du comté de M. Bouchard. J'ai demandé à 200
citoyens combien il y avait de francophones en Ontario: 5 000,
10 000 ou 50 000?
Quand j'ai dit 50 000, ils ont dit: «Jamais de la vie, pas plus que
10 000.» C'est ce qu'ils avaient appris à l'école, par la propagande
séparatiste. Quand je leur ai dit que nous étions 600 000
francophones en Ontario, qu'il y avait 400 000 anglophones qui
avaient appris le français, ils ne me croyaient pas. Nous sommes un
million à parler français en Ontario et ils ne savent même pas qu'on
existe et ils veulent prendre une décision instruite sur l'avenir de ce
pays. C'est cela le problème du Canada, il y a peut-être un manque
de communication.
(1815)
D'un côté, les Québécois sont mal informés par des médias
souvent séparatistes, mais qui travaillent avec l'argent du fédéral.
C'est pour ça qu'il est très important que nous, du gouvernement
fédéral, nous assurions que les Québécois, de même que tous les
Canadiens, aient la fierté de leur drapeau, aient l'information
nécessaire pour que quand il y aura un autre référendum, si jamais il
y en a un, les Québécois puissent voter avec toute l'information en
main. Cette fois-ci, vous allez vous faire battre à plate couture.
M. Chrétien (Frontenac): Avec ta propagande.
M. Serré: J'aime autant faire de la propagande avec les deniers
publics pour promouvoir la fierté de ce pays-et j'en suis fier-que
faire de la propagande avec des deniers publics pour promouvoir la
séparation et le manque d'emplois.
Tantôt, notre collègue de Portneuf disait qu'il y a encore des
enfants pauvres qui souffraient. D'accord, c'est vrai. C'est vrai au
Québec et à l'extérieur du Québec. Mais c'est peut-être plus vrai au
Québec maintenant à cause de votre option indépendantiste qui
empêche la création d'emplois et la relance de l'économie
québécoise comme dans le reste du Canada.
M. Patrick Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine,
Lib.): Monsieur le Président, je désire féliciter mon collègue pour
son discours passionné. Il démontre énormément de conviction
pour la francophonie canadienne et, bien entendu, pour le maintien
du Québec au sein de la fédération canadienne.
Cependant, on doit souligner que ce débat souverainiste,
indépendantiste, fait mal au Québec, dérange les gens, dérange les
investisseurs. Nous devons nous assurer que les gens connaissent
pleinement les coûts de l'indépendance.
On parlait des jeunes sans emploi dans ma circonscription, des
problèmes économiques fort sérieux qui existent, c'est vrai. Je dois
vous dire que si on n'a pas l'occasion de répondre aux attentes de
notre population c'est dû en grande partie à l'instabilité politique
qui est propagée et moussée par le Parti québécois, et bien entendu
par le Bloc québécois ici à Ottawa.
M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président,
quand j'entends parler d'instabilité politique, que cela nuit à
l'économie, que dire de ces missions d'Équipe Canada qui s'en vont
dans des pays où les droits de la personne ne sont pas respectés? Que
dire de ces missions qui vont dans des pays où les régimes politiques
non seulement frisent la non-démocratie, mais qui, dans certains
cas, sont totalitaires? On exagère drôlement.
On dira les choses telles qu'elles sont. Le fédéralisme a un prix
que le Québec paie depuis près de 150 ans. Le fédéralisme a un prix
qui est rendu inacceptable, et la souveraineté est une solution
préconisée par le Québec et qui offre et demande au reste du Canada
de mettre en place un nouveau cadre de fonctionnement qu'on
appelle le partenariat. Ce cadre est particulièrement bien articulé,
tout à fait négociable et ferait en sorte que cette prétendue instabilité
politique tomberait.
C'est à deux que cette question d'instabilité se fait actuellement.
Tant et aussi longtemps que le problème ne sera pas réglé, mais qu'il
sera entretenu par nos amis les fédéralistes, ce problème perdurera.
La seule façon de le régler, c'est par la voie du partenariat où le
Québec trouve sa souveraineté, assume ses responsabilités, et que le
Canada en fait autant. À ce moment, on se dirigera vers la solution
8229
des problèmes du XXIe siècle, plutôt que de continuer à vivre dans
ceux que nous a légués le XIXe.
[Traduction]
M. Serré: Monsieur le Président, le député de Frontenac parlait
tout à l'heure d'un amour d'un jour.
Mme Picard: On parle tous français ici. Ceux qui t'écoutent
parlent français et comprennent le français.
M. Serré: C'est mon droit, madame, de parler anglais ou français
dans ce pays et, en ce moment, je préfère m'adresser à la Chambre
en anglais. Je vous demanderais d'avoir la décence d'accepter cela.
(1820)
Le député de Frontenac a parlé d'un amour d'un seul jour. Je crois
que le député de Portneuf préconise une séparation ou un divorce
parce que la famille est dysfonctionnelle. Mais il dit ensuite qu'il
souhaite un rapprochement, une nouvelle union. Il souhaite
divorcer, mais veut continuer de recevoir une pension alimentaire
du Canada et entretenir une relation privilégiée. Je pense qu'il ne
peut gagner sur tous les tableaux.
[Français]
M. Patrick Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine,
Lib.): Monsieur le Président, je crois qu'il ne reste que très peu de
temps ici, en cette Chambre, mais je peux vous assurer que le
Québec fera partie, pour longtemps, de la fédération canadienne
parce que je sens un renouveau.
Des voix: Oh, oh!
M. Gagnon: Je sens un renouveau au Québec. Je sens un vouloir
d'une nouvelle génération. Pas cette ancienne génération et ces
passéistes, une nouvelle génération qui a saisi l'occasion de
voyager, de découvrir, d'échanger, de trouver de nouveaux moyens
de communication, de trouver de nouveaux moyens de créer des
emplois, de s'ouvrir à toutes sortes d'horizons souvent inexploités.
Comme vous le savez, ce grand projet canadien répond aux vrais
besoins de la population. Quand je vois, aux Îles-de-la-Madeleine,
Lucien Bouchard venir dans mon comté pour annoncer un petit
200 000 $ pour un projet qu'on voulait créer chez moi. Nous, on
investit 1,5 million de dollars pour remettre des travailleurs sur les
bancs d'école, pour préparer des cours, pour préparer cette nouvelle
génération de travailleurs. C'est ça, le voeu d'un gouvernement
fédéral; c'est ça, le voeu de la population, c'est de remettre les gens
au travail.
Je les vois ici, je les entend nous parler des télécommunications,
de l'autoroute de l'information, mais, dans mon comté c'est là
qu'on retrouve le comté le plus branché au Québec. Plus de huit
villages sont branchés sur Internet mais, malheureusement, ce n'est
pas le cas dans l'ensemble du Québec, parce que c'est grâce aux
programmes fédéraux, au gouvernement canadien qui a permis à
ces nouveaux centres communautaires d'être branchés et de créer
des emplois durables, je l'espère, dans ma circonscription.
Malheureusement, dans le domaine des communications, il y a
toujours un retard.
M. de Savoye: Monsieur le Président, j'interviens sur un rappel
au Règlement. J'admets que notre collègue, avec sa verve
habituelle, déclame très bien son chapitre, mais je pense qu'il ne
parle pas de la motion et que, par conséquent, il est hors d'ordre.
Le président suppléant (M. Milliken): Je suis certain que
l'honorable député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine parlera
bientôt de la motion et certainement, ses remarques sont peut-être
comme celles des autres pendant le débat cet après-midi.
M. Gagnon Monsieur le Président, c'est pour exposer, en quelle
sorte, ses valeurs. Et une des grandes valeurs de cette fédération
canadienne, c'est de s'occuper des moins nantis. C'est aussi de dire
la vérité, et souvent de dénoncer l'iniquité, l'injustice qu'on connaît
souvent des députés de l'autre côté et de la part du gouvernement du
Québec.
C'est vrai, je parle parfois un peu comme un type en opposition,
mais qu'est-ce qui nous préoccupe avant toute chose, ce n'est pas la
propagande, ce ne sont pas les drapeaux, c'est de remettre les gens
au travail. Et je crois que nous devons l'enseigner aux Québécois,
nous devons démentir l'opposition une fois pour toutes, en disant
qu'il y a des coûts très. . .
[Traduction]
M. de Savoye: Monsieur le Président, je vais maintenant
m'exprimer en anglais. Le député de
Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine me comprendra peut-être
mieux ainsi. Je comprends ce qu'il dit, mais, de toute évidence, il
n'a pas saisi lorsque vous lui avez demandé de finalement parler de
la motion.
[Français]
Le président suppléant (M. Milliken): Comme je l'ai dit plus
tôt, le débat, aujourd'hui, a été assez général, du moins au cours de
la période où j'occupais le fauteuil.
Je suis certain que l'honorable député qui fait des remarques
concernant l'unité de notre pays, qui est vraiment le sujet du débat et
qui a été traité pendant la plupart du temps où j'ai occupé le fauteuil
aujourd'hui, que ces remarques portent sur le même sujet et qu'il
abordera directement le sujet de la motion bientôt.
M. Gagnon: Monsieur le Président, il faut croire que le député de
l'opposition n'a rien compris, parce que les Québécois ont dit non à
deux reprises, je tiens à le souligner.
(1825)
Je crois que nous devons nous assurer que les Québécois et que
l'ensemble des Canadiens comprennent un peu mieux le
fonctionnement de la fédération canadienne. Ce n'est pas un
système parfait, c'est vrai, mais je crois qu'il est de notre devoir
d'expliquer à la population le fonctionnement de cette fédération,
d'encourager les échanges entre Canadiens.
8230
Je ne crois pas qu'on doive ériger des barrières. Je ne crois pas
qu'on doive isoler le Québec du reste du Canada ou encore des
grands courants internationaux. Je crois qu'on est obligés, parfois,
de verser les montants nécessaires. Oui, parfois, ça ne fait pas
l'affaire des autres, ça fait l'affaire de certaines personnes, mais je
crois que le but ultime est de s'assurer pour les Québécois, que les
souverainistes ne dominent pas le débat sans contre-arguments.
Je crois qu'en démontrant les millions qui ont été dépensés par le
gouvernement du Québec dans des exercices extraordinaires, dont
le fameux quatre millions au Conseil de la souveraineté, que j'ai
mentionné souvent, le 300 000 $ pour 1-800-INDEPENDANCE,
ou encore les 8,5 millions de dollars en commissions
indépendantistes et les commissions de souveraineté juste avant le
référendum.
Cette opposition, qui est censée être l'opposition loyale envers le
Canada, ne l'est pas. Ce n'est pas le cas. Ces gens ont passé la
majeure partie de leur temps à démanteler la fédération canadienne,
et je crois que les chiffres qui sont souvent avancés par l'opposition
et les propos avancés par l'opposition devront, je l'espère, être mis à
leur place grâce, bien entendu, à une explication claire et nette
auprès de la population des bienfaits de la fédération canadienne.
Je ne connais aucun gouvernement, notamment l'Angleterre,
l'Allemagne, la France, qui ne fera pas tout en son pouvoir pour
maintenir l'unité de son pays. Je crois que nous avons démontré une
tolérance exemplaire. Nous ne sommes pas des propagandistes.
Nous sommes des gens qui désirent partager une information
correcte. Nous voulons un débat équilibré. Je crois que c'est le but
du ministère des Affaires culturelles, je crois que c'est le but de ce
gouvernement, avant toute chose de s'assurer que la vérité soit
entendue. C'est pour cela que nous sommes ici en cette Chambre,
entre députés, et ça nous permet de débattre d'une question de fond.
On parle de l'unifolié, on parle des couleurs canadiennes, on parle
de l'histoire canadienne.
Je veux parler d'avenir, d'emplois, et comme vous le savez, cet
avenir se trouve au sein de la fédération canadienne et non pas à
l'extérieur, comme le prétend l'opposition.
M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le
Président, mon distingué collègue. . .
M. Serré: Monsieur le Président, je pense qu'on est en train de
discuter sur mon temps de parole et il y a déjà eu deux interventions.
Je n'ai pas eu la chance de répondre au député.
Le président suppléant (M. Milliken): Comme je l'ai indiqué,
il reste maintenant deux minutes pour les questions et
commentaires après le discours. Si on veut, une minute, mais c'est
normal, comme on sait, après un discours, d'aller à un parti de
l'opposition pour une question et commentaire. C'est à cause de
cela que j'ai reconnu l'honorable député de Frontenac et il a la
parole.
M. Chrétien (Frontenac): Monsieur le Président, merci
beaucoup de jouer au roi Salomon. C'est très bien: une minute à moi
et une minute au député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine.
Lorsque j'ai rencontré les électeurs du député de
Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, à trois reprises, aux Îles, les
gens sont chaleureux, et certains d'entre eux me disaient: «C'est
drôle, toi tu viens nous voir et notre député, on ne le voit jamais.»
M. Gagnon: Monsieur le Président, sur un rappel au Règlement.
Ce ne sont que des allégations et je peux vous assurer que je suis là
tous les mois et je ne crois pas que ce soit la place de ce député de
parler des dossiers d'importance chez moi. Donc, je peux vous
assurer que je suis de service et je crois que mes électeurs en seront
les juges.
Je peux vous assurer qu'avec des cas comme le Irving Whale,
avec le 1,5 million de dollars qu'on investit aux îles de la
Madeleine, avec le nouveau traversier qui s'en vient, le député de
Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine travaille très fort pour le
bien-être, le mieux-être de ses électeurs.
Le président suppléant (M. Milliken): Nous en sommes
maintenant à la fin du débat. Comme il est 18 h 30, il est de mon
devoir de faire savoir à la Chambre que les délibérations relatives à
la motion sont terminées.
______________________________________________
8230
MOTION D'AJOURNEMENT
[
Français]
L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité
de l'article 38 du Règlement.
M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le
Président, lundi dernier, j'interrogeais le premier ministre sur
l'impact de sa visite en France, les 22 et 23 janvier derniers.
Ma première question, pourtant très simple, demandait au
premier ministre de faire état en cette Chambre des résultats de son
intervention en faveur de l'utilisation sécuritaire de l'amiante
auprès de son homologue, M. Alain Juppé. En guise de réponse, le
premier ministre se contentait de souligner des faits connus de tous,
à savoir l'annonce, en conférence de presse, du refus de la France de
reconsidérer sa position sur la question de l'amiante.
En question complémentaire, suite à la réponse fournie par le
premier ministre, et que je trouvais nettement insuffisante, j'ai
demandé que l'on explique simplement l'entêtement du
gouvernement libéral à ne pas recourir à l'arbitrage devant l'OMC.
Dès le mois de décembre dernier, je soulevais cette alternative au
ministre du Commerce international et au premier ministre. Près de
trois mois plus tard, on commence à étudier la question plus
sérieusement. J'aurais aimé que le premier ministre, en dépit de son
incapacité à gérer adéquatement cette crise qui dépasse largement la
dimension commerciale, puisse donner une seule bonne nouvelle à
la population de l'amiante. Bien au contraire, le premier ministre
semble se désintéresser complètement de la question et ne se limite
qu'à des interprétations évasives de notre réalité régionale.
8231
J'aimerais connaître les raisons profondes qui motivent le
gouvernement libéral à refuser de prendre les grands moyens afin
d'obliger la France à respecter ses engagements pris devant l'OMC
et l'OTI. La France viole un engagement commercial important sur
la base d'un simple rapport, dont le biais scientifique semble
foncièrement fondé.
En effet, en janvier dernier, la Société royale du Canada rendait
publique son analyse du rapport de l'INSERM qui démontrait
clairement que les postulats de base des spécialistes français ne
correspondaient plus à la réalité actuelle en ce qui concerne les
méthodes de manipulation de l'amiante et ses aspects sécuritaires.
Le gouvernement libéral épuise inconsciemment les recours
s'offrant à lui afin de préserver plus de 2 000 emplois dans un
secteur aussi important de notre économie. Quelles sont les
motivations profondes du Cabinet qui pourraient expliquer cette
hésitation chronique dans l'élaboration d'une stratégie d'action
concrète face au gouvernement français?
Le Canada avait osé braver les États-Unis dans les années 1980
sur les mêmes questions. Aujourd'hui, on refuse d'engager le
processus qui pourrait permettre à l'industrie de l'amiante d'obtenir
plusieurs dérogations face à la décision du gouvernement français.
Le Bloc québécois réclame depuis le début de cette crise une
intervention structurée de la part du gouvernement libéral. Nous en
attendons encore les bases. Le gouvernement, et en particulier le
premier ministre et son ministre du Commerce international, se
contente de répéter que des négociations sont en cours. La
population de la région de l'amiante est inquiète et ne saurait se
satisfaire des hésitations auxquelles se livre le gouvernement.
Je demande solennellement au gouvernement d'engager le plus
vite possible une procédure de contestation du bannissement de
l'amiante par la France devant l'Organisation mondiale du
commerce.
Si les mines d'amiante étaient situées ailleurs qu'au Québec,
aurait-on agi avec autant de vigueur que le gouvernement a agi, et
agit présentement, pour défendre les intérêts de Sherritt à Cuba
concernant le bannissement par la loi Helms-Burton?
[Traduction]
M. Morris Bodnar (secrétaire parlementaire du ministre de
l'Industrie, ministre de l'Agence de promotion économique du
Canada atlantique et ministre de la Diversification de
l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, lors
de sa visite à Paris, les 22 et 23 janvier, le premier ministre a discuté
avec son homologue et avec le président de la France des
préoccupations suscitées au Canada par l'interdiction de l'amiante
dans ce pays.
Au cours du même voyage, le ministre de l'Industrie a remis aux
autorités françaises un exemplaire du rapport de la Société royale.
Cette étude, commandée par le gouvernement du Canada, soulève
des doutes importants sur le rapport de l'Institut national de la santé
et de la recherche médicale, invoqué par les autorités françaises
pour justifier l'interdiction de l'amiante. Le premier ministre Juppé
a accepté de soumettre le rapport de la Société royale à ses
spécialistes.
Le gouvernement fédéral rencontre régulièrement le
gouvernement du Québec, l'industrie et les syndicats pour mettre au
point une démarche commune en réaction à l'interdiction de
l'amiante par la France et aux répercussions possibles sur les autres
marchés. Tout cela est conforme au plan d'action concertée convenu
par toutes les parties le 24 juillet 1996.
Le gouvernement fédéral a discuté de cette importante affaire
aux plus hauts niveaux du gouvernement de la France. Je prévois
que toutes les parties intéressées continueront à jouer leur rôle
respectif dans ce dossier commun.
Par exemple, grâce à cette action concertée, notre mission a
facilité le voyage que fait actuellement le ministre des Affaires
internationales du Québec en Allemagne, en Belgique et au
Royaume-Uni, pour y rencontrer les autorités compétentes en
matière d'amiante, ainsi que ses prochains voyages au Sénégal et en
Côte d'Ivoire.
La ministre canadienne des Ressources naturelles écrit aussi à
son homologue québécois au sujet d'un protocole d'entente avec
l'industrie concernant l'utilisation responsable de l'amiante.
Nous revendiquons également nos droits en tant que membre de
l'Organisation du commerce mondial de contester l'interdiction de
la France. Tout d'abord, le 27 janvier, nous avons officiellement
demandé au gouvernement français de justifier l'interdiction aux
termes des obstacles techniques à l'accord commercial. La réponse
de la France nous aidera à évaluer l'interdiction qui frappe
l'amiante, compte tenu des obligations de la France au sein de
l'OCM.
En attendant cette réponse, il serait prématuré maintenant de
discuter des autres options dont le Canada dispose en vertu de
l'OCM. Quand tous les renseignements pertinents auront été réunis
sur ce dossier, avec l'aide du gouvernement québécois, de
l'industrie et des syndicats, le ministre du Commerce international
décidera de la marche à suivre.
En attendant, il serait irresponsable de discuter publiquement
d'une stratégie sur les mesures que prendra l'OCM, car cela
pourrait nuire à l'industrie de l'amiante et aux emplois qui en
dépendent dans la région.
Le président suppléant (M. Milliken): La motion
d'ajournement étant adoptée d'office, la Chambre s'ajourne à 10
heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 18 h 38.)