TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 24 avril 1997
Projet de loi C-438. Adoption des motions portant présentation et première lecture 10143
Adoption de la motion 10144
Mme Dalphond-Guiral 10144
M. White (Fraser Valley-Ouest) 10146
M. White (Fraser Valley-Ouest) 10146
M. White (Fraser Valley-Ouest) 10146
Projet de loi C-72. Étape du rapport 10148
Motions nos 1 et 17 10148
M. Chrétien (Frontenac) 10150
Report du vote sur la motion no 1 10156
Suspension de la séance à 11 h 51 10157
Reprise de la séance à 11 h 58 10157
Projet de loi C-65. Étape du rapport 10157
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais) 10157
Motions nos 1 et 63 10157
Motions nos 3, 25, 27, 56, 59 et 101 10158
Motions nos 4, 58, 62, 90, 98 et 102 10158
Motions nos 6, 7, 11, 19, 54, 66 et 87 10158
Motions nos 50, 57, 60, 65, 82 à 85 et 89 10159
Motions nos 86, 88, 91 à 97, 99, 100 et 103à 109 10160
M. Chrétien (Frontenac) 10165
Adoption de la motion 10172
Projet de loi C-65. Reprise de l'étude à l'étape du rapport et groupe no 1 10172
M. Tremblay (Lac-Saint-Jean) 10175
M. Bernier (Beauce) 10176
Mme Gagnon (Québec) 10177
M. Harper (Simcoe-Centre) 10178
M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 10181
M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 10182
M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 10182
M. Tremblay (Lac-Saint-Jean) 10182
M. Tremblay (Lac-Saint-Jean) 10182
M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 10183
M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 10183
M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 10185
M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 10185
M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 10188
Projet de loi C-65. Reprise de l'étude à l'étape du rapport 10189
M. Tremblay (Lac-Saint-Jean) 10189
M. LeBlanc (Cap-Breton Highlands-Canso) 10190
Adoption de la motion 10191
Projet de loi C-65. Reprise de l'étude à l'étape du rapport ainsi que de l'étude du groupe no 1 10191
Demande et report réputés des votes 10191
Motions nos 2, 16, 21, 24, 26, 34, 35, 44, 49, 55et 64 10191
Motions nos 17, 45, 74 et 81 10192
M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead) 10202
M. Speaker (Lethbridge) 10203
M. Leroux (Richmond-Wolfe) 10204
10141
CHAMBRE DES COMMUNES
Le jeudi 24 avril 1997
La séance est ouverte à 10 heures.
_______________
Prière
_______________
AFFAIRES COURANTES
[
Traduction]
M. John Richardson (secrétaire parlementaire du ministre de
la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.):
Monsieur le Président, conformément au paragraphe 32(2) du
Règlement, je suis heureux de présenter, dans les deux langues
officielles, le rapport annuel du commissaire du Centre de la
sécurité des télécommunications pour 1996-1997.
* * *
[
Français]
M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du
gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le
Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai
l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse
du gouvernement à neuf pétitions.
* * *
[
Traduction]
M. Andrew Telegdi (Waterloo, Lib.): Monsieur le Président,
j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le
treizième rapport du Comité permanent de la justice et des affaires
juridiques.
C'est avec fierté que je présente ce rapport. Les lois sont le
fondement de toute société démocratique. En tant que société
démocratique, nous recherchons la justice.
C'est quelque chose que j'apprécie particulièrement compte tenu
du fait que je suis arrivé au Canada en tant que réfugié venant d'un
pays qui n'avait pas un système judiciaire juste.
Le rapport, intitulé «Le renouvellement du système de justice
pour les jeunes», recommande des modifications à la Loi sur les
jeunes contrevenants. Le Comité de la justice a produit ce rapport
après avoir parcouru le pays et après avoir entendu les opinions de
représentants de toutes les couches de la société canadienne.
(1010)
L'une des principales questions examinées dans ce rapport est le
fait que nous incarcérons beaucoup trop de jeunes d'un bout à
l'autre du pays. En fait, nous incarcérons 10 fois plus de jeunes que
dans les pays d'Europe et 15 fois plus de jeunes qu'en Australie et
en Nouvelle-Zélande. En étudiant l'information à notre disposition,
j'ai été stupéfait d'apprendre que nous incarcérons deux fois plus de
jeunes qu'aux États-Unis.
Il faut faire certains ajustements de l'autre côté également. Nous
devons répondre aux besoins de la collectivité et faire participer
cette dernière à l'administration de la justice. La quatrième
recommandation traite spécifiquement de cette question. Elle dit
qu'il devrait y avoir des conseils communautaires sur le crime et la
justice, que la collectivité devrait participer au processus.
Je suis fier de présenter ce rapport au nom du Comité de la
justice.
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ):
Monsieur le Président, je vous signale que le Bloc québécois a
produit un rapport dissident, et ce, pour une bonne raison. Après
avoir fait le tour du Canada, comme le député l'a dit, et après avoir
investi des dizaines milliers de dollars dans cette étude, les libéraux
ont donné l'impression, à un moment donné, après avoir vu ce qui se
faisait au niveau des jeunes contrevenants au Québec, qu'ils iraient
dans le sens proposé depuis au moins les années 1960, au Québec, et
dans le sens des revendications que le Bloc québécois faisait,
revendications qui représentaient le voeu de tous les Québécois.
Au lieu de cela, à la dernière minute, les libéraux ont préféré
mettre dans ce rapport des voeux pieux et faire des
recommandations à saveur électoraliste pour tenter de satisfaire une
partie de l'électorat du Canada anglais. Je trouve inadmissible, au
moins à un égard, que le gouvernement ait décidé de plier au niveau
de l'âge minimum des jeunes, en abaissant l'âge à 10 et 11 ans, avec
la recommandation du procureur général. C'est au gouvernement
qu'incombe la responsabilité d'établir des normes, une loi qui sera
applicable partout à travers le Canada. S'il ne veut pas le faire, qu'il
se retire de ce champ de juridiction et qu'il le remette au Québec ou
aux autres provinces, comme on le désire.
Mais tant et aussi longtemps que la Constitution sera là, tant et
aussi longtemps qu'il y aura des règles qui existent, le
gouvernement doit se faire le gardien d'une législation sur les
jeunes contrevenants qui soit applicable et identique d'un bout à
l'autre du pays.
10142
J'ouvre une parenthèse. Certains libéraux m'ont dit que j'étais un
braillard parce que je faisais des recommandations dans le sens des
revendications historiques du Québec dans ce dossier. C'est
également pour cela que j'ai décidé de déposer un rapport
minoritaire, car le gouvernement ne voulait rien entendre.
Au sujet de l'âge, je pense qu'on ne devait pas réduire l'âge,
même avec le consentement des procureurs généraux des provinces.
Au Québec, les procureurs généraux ne consentiront pas à abaisser
l'âge, c'est-à-dire de criminaliser des jeunes de 10 et 11 ans. Mais
dans l'Ouest canadien, par exemple, c'est une toute autre chose. Et
je pense que c'était carrément inacceptable.
En ce qui concerne la répartition des coûts, il y a une réclamation
du Québec qui traîne sur le bureau du ministre de la Justice depuis
des mois, voire des années, un coût de 77 millions de dollars parce
que nous, au Québec, appliquons correctement la Loi sur les jeunes
contrevenants. J'invite le gouvernement, avant de faire des
recommandations comme celles qu'on retrouve dans le rapport
majoritaire, à payer ses dettes et ses comptes au Québec et à faire un
chèque de 77 millions de dollars. Mais on pourra y revenir au cours
de la campagne électorale.
Troisièmement, il y a l'ingérence du fédéral dans plusieurs
domaines qui ne regardent pas le fédéral. Ce n'est pas à lui de dire
quoi faire avec l'argent qu'il verse aux provinces pour
l'administration de la justice. L'administration de la justice regarde
les provinces, et le Québec dans ce cas-ci.
Je comprends que les députés du Canada anglais n'aiment pas
entendre ce que j'ai à dire, mais je le fais en toute connaissance de
cause et avec la satisfaction du devoir accompli.
M. Eugène Bellemare (Carleton-Gloucester, Lib.): Monsieur
le Président, à titre de vice-président du Comité permanent des
opérations gouvernementales, j'ai l'honneur de présenter, dans les
deux langues officielles, le troisième rapport du Comité permanent
des opérations gouvernementales au sujet des initiatives de
renouveau dans la fonction publique.
(1015)
[Traduction]
Le comité a suivi de près le processus de renouvellement de la
fonction publique et a fait un certain nombre de recommandations
visant à assurer le soutien nécessaire au renouvellement et à la
relève du personnel, améliorer l'obligation de rendre des comptes et
la transparence et mettre en oeuvre d'autres mesures clés pour que
la fonction publique puisse continuer de servir les Canadiens avec
fierté et efficience.
Je suis moi-même fier de servir ma circonscription et d'avoir
souvent défendu les intérêts des fonctionnaires à la Chambre. Je
salue notre fonction publique.
[Français]
Conformément à l'article 109 du Règlement, nous demandons
une réponse globale du gouvernement.
M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président,
une opinion dissidente sur le renouvellement de la fonction
publique est annexée au rapport du Comité permanent des
opérations gouvernementales.
Le rapport de la majorité libérale souligne judicieusement le
besoin de renouvellement de la fonction publique, notamment
lorsqu'elle constate que 70 p. 100 de tous les cadres de la fonction
publique seront admissibles à la retraite au cours des huit
prochaines années. Seulement 1 p. 100 des effectifs avait moins de
25 ans en 1996, comparativement à 15 p. 100 en 1976.
Les libéraux auraient pu poursuivre dans la même veine et
rappeler que, pendant leur mandat, le gouvernement a durement
sabré dans la fonction publique au cours des trois dernières années.
Il n'a pas eu la compétence de se soucier de la transmission de
connaissances et de la conservation de la mémoire collective au sein
des ministères. Ce triste constat n'est en grande partie que le résultat
de mauvaises décisions stratégiques des libéraux au cours de leur
mandat qui, heureusement, s'achève.
Quant à la question de la sous-représentation des jeunes au sein
de la fonction publique, on note, là encore, l'incompétence et le
manque de vision des différents gouvernements fédéraux qui se sont
succédé, du premier gouvernement de Pierre Elliott Trudeau à celui
du premier ministre actuel. Les jeunes fonctionnaires sont à peu
près absents aujourd'hui du système fédéral. Les libéraux
ressentent, à quelques heures du déclenchement des élections, un
soudain besoin d'agir.
Les jeunes de l'Outaouais en ont sans aucun doute payé les frais.
Des trois années et demie d'indifférence libérale, ils ont maintenant
de la difficulté à croire ce même gouvernement qui s'intéresse
soudainement à eux. À l'arrivée au pouvoir des libéraux, en octobre
1993, le taux de chômage des jeunes de moins de 25 ans se situait à
20,6 p. 100 dans l'Outaouais; aujourd'hui, ce taux a grimpé à 21,6 p.
100. Le rapport libéral tient à excuser le traitement réservé aux
jeunes par les coupures difficiles qu'a dû effectuer le gouvernement
fédéral.
Le gouvernement estime que d'ici à 1998-1999, l'examen des
programmes aura eu pour effet de réduire les dépenses des
programmes et la taille de l'administration fédérale de 22 p. 100. On
estime par ailleurs qu'à compter de 1999, le gouvernement
économisera plus de trois milliards de dollars par année en frais
salariaux. Ce que le rapport libéral a oublié de souligner, c'est que,
pendant ce temps, les provinces, à cause du Transfert social, ont dû
couper plus de25 p. 100 de leurs effectifs, et ce, dans les domaines de la santé, de
l'éducation et de l'aide sociale.
10143
[Traduction]
M. David Walker (Winnipeg-Nord-Centre, Lib.): Monsieur le
Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues
officielles, le cinquième rapport du Comité permanent de
l'industrie concernant son étude de l'article 14 de la loi de 1992
modifiant la Loi sur les brevets, chapitre 2, Lois du Canada, 1993.
Je remercie par la même occasion les membres du comité, pour le
dur labeur qu'ils ont accompli, ainsi que les nombreux témoins qui
ont comparu.
(1020)
Je saisis également l'occasion pour remercier, au nom de tous les
présidents de comité, les employés du service des publications de la
Chambre des communes, qui ont travaillé de longues heures pour
assurer la publication des rapports.
[Français]
Mme Albina Guarnieri (Mississauga-Est, Lib.): Monsieur le
Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues
officielles, le troisième rapport du Comité mixte permanent des
langues officielles au sujet de l'application de la Loi sur les langues
officielles dans la région de la Capitale nationale.
Conformément à l'article 109 du Règlement, nous demandons
une réponse globale du gouvernement.
M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, le
rapport déposé par la présidente du Comité mixte permanent sur les
officielles ne fait pas mention, hélas, du taux d'anglicisation
considérable des francophones de la ville d'Ottawa. Ce dernier est
passé, en l'espace d'une vingtaine d'années, de 17 p. 100 à 28 p.
100.
C'est pour cela qu'à la lumière de ces statistiques, le Bloc
québécois a produit un rapport dissident et dénonce en même temps
le fait que le Comité a tenté de noyer le poisson, c'est-à-dire le fait
que la Capitale du Canada, Ottawa, est en train de s'angliciser et
d'angliciser les francophones à un rythme effréné. Ce rapport,
hélas, se penche davantage sur la région de la Capitale nationale,
englobant de ce fait l'Outaouais. Les recommandations que contient
ce rapport auraient malheureusement pour effet, et c'est ma
conclusion, d'angliciser l'Outaouais francophone.
Voilà pourquoi le Bloc québécois dépose ce rapport minoritaire.
[Traduction]
Mme Bonnie Hickey (St. John's-Est, Lib.): Monsieur le
Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues
officielles, le neuvième rapport du Comité permanent de la santé.
Conformément à l'ordre de renvoi du 21 mars 1997, le comité a
approuvé le projet de réglementation du tabac, avec des
amendements.
[Français]
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ) demande la
permission de déposer le projet de loi C-438, Loi modifiant la Loi
sur les sociétés d'assurances.
-Monsieur le Président, il me fait plaisir de déposer ce projet de
loi, appuyé par mon collègue de Portneuf. Ce projet de loi vise
essentiellement une chose, soit éliminer la discrimination dont sont
victimes les sociétés d'assurances québécoises à charte provinciale,
discrimination qui fait en sorte que les sociétés à charte provinciale
ne peuvent acquérir de blocs d'assurances de sociétés d'assurances
à charte fédérale pour pouvoir bénéficier de la rationalisation de
l'industrie et affronter la concurrence domestique et internationale.
C'est véritablement un cas de discrimination contre le Québec
puisqu'il y a à peine deux semaines, deux sociétés torontoises, dont
une filiale britannique et une filiale allemande, ont pu transiger
entre elles pour 12 milliards de blocs d'assurances sans que le
fédéral ne lève le petit doigt ou ne dise quoi que ce soit.
Une société d'assurances québécoise, L'Entraide Compagnie
d'assurances, puisqu'on parle d'un cas particulier, à cause de ce
gouvernement, à cause de l'inertie du ministre des Finances et à
cause du manque de volonté politique lorsqu'il est question de la
défense des intérêts du Québec, a manqué une transaction de 1,3
million de polices d'assurances, ce qui aurait permis à cette société
de tirer son épingle du jeu face aux quatre majors de Toronto.
Nous déplorons la décision du ministre des Finances qui fait en
sorte que quatre compagnies d'assurances torontoises vont dominer
le marché canadien et une partie du marché nord-américain, alors
que les sociétés québécoises manquent le bateau à cause du ministre
des Finances et à cause du Parti libéral du Canada. On va s'en
rappeler au cours de la campagne électorale.
(La motion est réputée adoptée, le projet de loi est lu pour la
première fois et imprimé.)
(1025)
Mme Tremblay: Monsieur le Président, je vous demanderais de
consulter la Chambre pour voir si on peut obtenir le consentement
unanime afin de suspendre nos travaux, le temps d'en venir à une
entente avec le gouvernement sur une motion qu'il a l'intention de
déposer.
Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime de la
Chambre pour suspendre nos travaux pour quelques instants?
[Traduction]
M. Zed: Monsieur le Président, mon intervention concerne le
même rappel au Règlement. Nous serions disposés à suspendre la
séance une fois parvenus à l'étude des initiatives ministérielles.
Nous pourrions alors entamer les discussions. Je serais peut-être
disposé à procéder de la sorte dans ce cas, mais nous refusons
cependant notre consentement unanime au sujet de ce rappel au
Règlement.
10144
[Français]
Le vice-président: Il est clair qu'il n'y a pas de consentement
unanime de la Chambre. Nous poursuivons nos travaux.
* * *
[
Traduction]
L'hon. Fred Mifflin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.):
Monsieur le Président, conformément au paragraphe 56(1) du
Règlement, je propose:
Que, le vendredi 25 avril 1997, jusqu'à ce que les députés reviennent d'une
cérémonie conférant la sanction royale à tout projet de loi, la Chambre ne s'ajourne
pour quelque raison que ce soit sauf en vertu d'une motion présentée par un ministre
de la Couronne, sous réserve que, si aucune cérémonie du genre n'a eu lieu à l'heure
ordinaire de l'ajournement, la séance soit suspendue jusqu'à l'appel de la présidence
et puisse être convoquée de nouveau à la seule fin d'accorder la sanction royale à
certains projets de loi, après quoi la Chambre s'ajournera jusqu'au prochain jour de
séance.
[
Français]
Le vice-président: Que tous les députés qui s'opposent à la
motion veuillent bien se lever.
Et moins de 25 députés s'étant levés:
Le vice-président: Même avec les députés qui viennent de se
joindre à nous, il n'y a pas 25 députés, si mes calculs sont bons. Par
conséquent, je déclare la motion adoptée.
(La motion est adoptée.)
* * *
Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ):
Monsieur le Président, c'est avec émotion et confiance que je
dépose aujourd'hui devant la Chambre une pétition endossée par
plus de 37 000 signataires du Québec.
(1030)
L'objet de cette pétition ne laisse personne indifférent
puisqu'elle se réfère aux abus sexuels dont sont victimes les
enfants. Les pétitionnaires demandent au Parlement, entre autres,
de revoir et d'évaluer les traitements offerts aux abuseurs durant
leur incarcération et de s'assurer que des mesures de soutien soient
accessibles aux enfants victimes d'agressions sexuelles et à leur
famille.
La violence exercée à l'endroit des enfants est sans aucun doute
un indicateur signifiant de la santé d'une société. Nous devons nous
doter de tous les instruments requis pour aider adéquatement les
victimes et leur famille et favoriser la réhabilitation des personnes
coupables d'abus sexuels envers les enfants. Le défi est à la mesure
du problème. Je crois que ce Parlement peut contribuer, par des
décisions éclairées, à diminuer la violence et à en réduire les lourdes
conséquences.
[Traduction]
M. Bill Graham (Rosedale, Lib.): Monsieur le Président, je suis
heureux de prendre la parole aujourd'hui à la Chambre pour
présenter une pétition concernant la Stratégie nationale sur le sida,
au nom de centaines d'électeurs inquiets de ma circonscription.
La Stratégie nationale sur le sida est une entreprise fondamentale
qui coordonne les efforts du Canada pour financer des programmes
de sensibilisation et de prévention relativement au VIH et au sida, la
recherche sur le VIH et le sida et les soins aux personnes atteintes du
sida.
Mes électeurs demandent donc au Parlement de garantir qu'on ne
mettra pas fin à la Stratégie nationale sur le sida en mars 1998 et
qu'on continuera à financer ces programmes très importants.
M. Clifford Lincoln (Lachine-Lac-Saint-Louis, Lib.):
Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition
signée par un bon nombre d'électeurs de ma circonscription et des
régions avoisinantes.
La pétition prient humblement le premier ministre et le
Parlement du Canada de déclarer et de confirmer immédiatement:
premièrement, que le Canada est indivisible; deuxièmement, que
les frontières du Canada, de ses provinces, de ses territoires et de ses
eaux territoriales ne peuvent être modifiées que par a) un vote libre
de tous les citoyens canadiens tel que garanti par la Charte
canadienne des droits et libertés, ou b) la formule de modification
telle qu'énoncée dans la Constitution canadienne.
M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur
le Président, j'ai un certain nombre de pétitions qui m'ont été
envoyées par des électeurs de la circonscription de
Kootenay-Ouest-Revelstoke et du nouveau secteur de
Kootenay-Ouest-Okanagan.
Les pétitionnaires affirment que la durabilité du Régime de
pensions du Canada les inquiète, que les jeunes sont forcés de payer
des cotisations plus élevées pour des pensions plus petites et que la
hausse récente de 10 milliards de dollars des cotisations réduit le
salaire net des travailleurs. Comme on ne peut démontrer de façon
satisfaisante que des hausses constantes des cotisations du Régime
de pensions du Canada accompagnées de réductions constantes des
prestations assureront l'avenir du RPC, vos pétitionnaires prient
humblement le Parlement d'adopter une loi qui prévoie la réduction
progressive du RPC, tout en protégeant la pension des personnes qui
en sont déjà bénéficiaires, et exige que les Canadiens contribuent au
REER de leur choix.
M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur
le Président, j'ai aussi deux pétitions à présenter de la part de mes
électeurs sur le même sujet.
Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait
que les personnes âgées ont grandement contribué au
développement politique et économique et à la prospérité du pays
au XXe
10145
siècle. Ces citoyens ont par ailleurs protégé la tradition
démocratique et les libertés individuelles en participant à deux
guerres et à toute une série d'opérations de maintien de la paix dans
le monde.
Les pétitionnaires demandent donc au Parlement de reconnaître
ces accomplissements et ces sacrifices en n'apportant aux régimes
d'assurance-maladie ou de pensions aucun changement qui aurait
pour effet de réduire les prestations pour les personnes âgées qui ont
un revenu limité ou fixe.
M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur
le Président, j'ai une autre pétition. La TPS est la première taxe
fédérale dans l'histoire du Canada à s'appliquer à la Bible et aux
autres publications. Les pétionnaires demandent instamment au
Parlement d'éliminer la taxe sur les livres, les magazines et les
journaux. Ils demandent au premier ministre de tenir la promesse de
son parti d'éliminer la taxe de vente fédérale sur les publications et
les imprimés.
M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur
le Président, dans la dernière pétition que j'ai l'honneur de
présenter, les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le
fait qu'en octobre 1996, la délégation allemande auprès du Comité
du Codex sur la nutrition et les aliments pour usages diététiques, de
l'Organisation mondiale de la santé, a proposé une résolution. Nous
savons en quoi cette résolution consiste et je ne reviendrai donc pas
dessus. Les pétitionnaires font remarquer que, si elles sont
acceptées, ces mesures entraîneront une réforme radicale de la
législation.
(1035)
Les pétitionnaires demandent de faire vigoureusement pression
sur la communauté internationale afin qu'elle s'oppose aux mesures
de réglementation des suppléments alimentaires, conformément à
la décision de notre pays de voter contre ces propositions en octobre
dernier.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le
Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai deux
pétitions à présenter au nom de plusieurs personnes de ma
circonscription de Medicine Hat.
Les pétitionnaires demandent au Parlement d'adopter une
mesure législative permettant la création d'un registre des
pédophiles.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le
Président, la seconde pétition vient de Canadiens d'un peu partout.
Les pétitionnaires demandent au Parlement d'adopter une
mesure législative mettant fin au RPC tout en protégeant la pension
que reçoivent actuellement les personnes âgées, et rendant
obligatoire pour tous les Canadiens la contribution à un REER de
leur choix.
M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe, Réf.): Monsieur
le Président, j'ai le devoir et l'honneur de prendre la parole à la
Chambre, conformément à l'article 36 du Règlement, pour
présenter trois pétitions dûment certifiées par le greffier des
pétitions.
J'ai l'honneur de présenter la première pétition au nom de 75
habitants de cette magnifique province qu'est la
Colombie-Britannique, qui demandent au Parlement d'exonérer les
livres, les revues et les journaux de la TPS.
M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe, Réf.): Monsieur
le Président, la deuxième pétition est présentée au nom de 27
habitants de la Colombie-Britannique qui demandent au Parlement
d'exhorter le gouvernement fédéral à collaborer avec les provinces
afin que les travaux de réfection du réseau routier national puissent
commencer.
M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe, Réf.): Monsieur
le Président, la dernière pétition est présentée au nom de 38
Canadiens de l'Ouest qui demandent au Parlement de ne pas
augmenter la taxe d'accise fédérale sur l'essence.
M. Rex Crawford (Kent, Lib.): Monsieur le Président, j'ai
l'honneur d'intervenir à nouveau pour présenter les pétitions
suivantes, conformément à l'article 36 du Règlement.
Dans la première pétition qui provient de résidents de London et
des environs, les pétitionnaires déclarent que le Canada a été fondé
sur des principes qui reconnaissent l'importante du mariage et de la
famille pour notre société. Les pétitionnaires demandent à la
Chambre des communes de promulguer une loi qui modifiera la loi
existante afin de définir le mariage comme une union volontaire, et
pour la vie, entre un homme et une femme, à l'exclusion de tous les
autres.»
Cette pétition a été signée par des habitants de London et de la
région avoisinante.
M. Rex Crawford (Kent, Lib.): Monsieur le Président, dans la
deuxième pétition, les pétitionnaires désirons attirer l'attention de
la Chambre sur le fait que 38 p. 100 du réseau routier national n'est
pas conforme aux normes et que le Mexique et les États-Unis
assurent la réfection et l'amélioration de leurs réseaux routiers. La
politique concernant le réseau routier national a révélé que la
création d'emplois, le développement économique, l'unité
nationale, la possibilité de sauver des vies et de prévenir des
blessures, la réduction de l'engorgement des routes, la diminution
du coût d'utilisation des véhicules et l'amélioration de notre
compétitivité internationale sont des avantages du projet de
programme national d'entretien de notre réseau routier.
Par conséquent, les pétitionnaires prient le Parlement de
demander au gouvernement fédéral de se joindre aux
gouvernements provinciaux pour assurer la réfection et
l'amélioration de notre réseau routier national.
M. Jim Peterson (Willowdale, Lib.): Monsieur le Président,
j'ai deux pétitions à présenter. La première provient de résidents de
North York et elle avait été présentée au ministre du Commerce
international. Puisque les ministres ne peuvent déposer des
pétitions, il m'a demandé de le faire en son nom. La pétition est
aussi signée par des résidents de Willowdale.
Les pétitionnaires demandent que les sommes perçues en impôts
et taxes soient réservées à des fins non militaires.
10146
M. Jim Peterson (Willowdale, Lib.): Monsieur le Président, la
deuxième pétition vient de résidents de la région de Burlington. Au
nom de la députée de Burlington, je désire présenter cette pétition
réclamant que la pension des citoyens du troisième âge soit
protégée.
[Français]
M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président,
j'aimerais déposer deux pétitions. La première pétition est signée
par 915 citoyens et porte sur le retrait préventif de femmes qui
oeuvrent dans les secteurs de juridiction fédérale.
Le Code canadien du travail n'offre pas une protection suffisante
aux travailleuses enceintes ou qui allaitent. Les mouvements
syndicaux, particulièrement la FTQ, le CTC et l'Alliance de la
Fonction publique, revendiquent une solution à ce problème depuis
longtemps. Il est temps que la société prenne ses responsabilités
dans ce domaine.
M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, la
deuxième pétition a été signée par de nombreuses personnes,
majoritairement par des Québécois d'origine colombienne.
Les pétitionnaires demandent au gouvernement fédéral
d'entamer les négociations avec la Colombie en vue de la signature
d'une entente de sécurité sociale. Plusieurs milliers de Colombiens
sont venus au Canada et au Québec et ils voudraient être protégés
dans le domaine de la sécurité sociale quand ils ont travaillé en
Colombie et au Canada.
(1040)
[Traduction]
M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Monsieur le
Président, je suis heureux de présenter des pétitions venant
d'électeurs de Cariboo-Chilcotin.
La première pétition est signée par 259 habitants de Williams
Lake et d'autres parties de Colombie-Britannique. Les
pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait que le
droit de Clifford Olson à une demande de libération conditionnelle
anticipée oblige les familles et les amis des victimes à revivre une
fois de plus l'horreur de la perte d'un être cher.
Mes électeurs demandent au Parlement de prendre des mesures
qui ne permettraient pas qu'un individu comme Clifford Olson,
coupable de multiples assassinats, puisse utiliser la disposition de la
lueur d'espoir pour demander une libération anticipée.
M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Monsieur le
Président, les deux pétitions suivantes contiennent un total de 338
signatures d'habitants de Williams Lake et d'autres endroits. Les
pétitionnaires estiment que la TPS sur les imprimés est injuste et
répréhensible, car l'alphabétisme et l'éducation sont cruciaux pour
le développement du pays.
Les pétitionnaires demandent au Parlement d'éliminer la TPS sur
les livres, les revues et les journaux. Ils demandent au premier
ministre de tenir la promesse maintes fois répétée de son parti et
d'éliminer la taxe de vente fédérale sur les imprimés.
M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le
Président, en plus des pétitions précédentes, j'en ai une autre
portant plus de 7 000 signatures qui attire l'attention de la Chambre
sur ce qui suit:
Le 12 novembre 1996, en Colombie-Britannique, l'honorable
juge Harry Boyle a condamné Darren Adam Ursel à une peine
d'emprisonnement de deux ans moins un jour qu'il devait purger
dans la collectivité aux termes de l'article 742 du Code criminel. M.
Ursel a été condamné pour une agression sexuelle très violente.
Ainsi, les pétitionnaires demandent que le Parlement s'assure
que les dispositions de l'article 742 du Code criminel ne
s'appliquent pas aux personnes reconnues coupables d'agression
sexuelle ou de violence physique.
M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le
Président, j'ai également deux autres pétitions qui demandent ce qui
suit à la Chambre:
En juin 1996, le premier ministre du Canada a annoncé qu'il
favoriserait une dérivation du gaz de l'île de Sable vers la ville de
Québec. Il est inacceptable que le premier ministre décide de la
destination du gaz naturel de la Nouvelle-Écosse sans consulter la
population de la province. Par conséquent, les habitants de la
Nouvelle-Écosse ont le droit de décider eux-mêmes où ira le gaz
naturel de l'île de Sable et ils demandent donc au gouvernement
fédéral de cesser de se mêler de la question.
M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le
Président, j'ai une dernière pétition exhortant le Parlement à
supprimer la TPS sur les livres, les revues et les journaux. Les
pétitionnaires demandent que le premier ministre respecte la
promesse que son parti a réitérée de supprimer la taxe de vente
fédérale sur les imprimés.
M. Larry McCormick (Hastings-Frontenac-Lennox and
Addington, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de
présenter une pétition au nom des membres de l'Association des
amis du canal Rideau et d'habitants du grand Kingston et du comté
de Frontenac qui sont très inquiets des dommages causés à la
propriété dans le canton de Pittsburgh où une grosse entreprise de
construction, sans détenir ni permis ni licence, mène ses activités
sur des terrains qui appartiennent au canal Rideau, aux dépens des
contribuables.
Les pétitionnaires demandent respectueusement que le
Parlement du Canada invite les autorités à prendre les mesures qui
s'imposent.
Mme Anna Terrana (Vancouver-Est, Lib.): Monsieur le
Président, j'ai deux séries de pétitions portant la signature
d'habitants de Vancouver-Est et du Lower Mainland et qui ont trait
aux taux
10147
d'intérêt élevés exigés sur les cartes de crédit par les détaillants et
les banques.
Les pétitionnaires demandent au Parlement d'adopter le projet de
loi C-351, proposé par le député de Davenport, qui limiterait le taux
d'intérêt exigé sur les cartes de crédit des consommateurs.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président,
j'ai trois pétitions émanant de ma circonscription,
Mississauga-Sud, et appuyée par des centaines de Canadiens d'un
peu partout au pays.
Dans la première, les pétitionnaires veulent attirer l'attention de
la Chambre sur le fait que nos policiers et nos pompiers risquent
quotidiennement leur vie pour offrir les services d'urgence dont
tous les Canadiens ont besoin. Ils précisent également que, dans
bien des cas, les familles des pompiers ou des policiers tués dans
l'exercice de leurs fonctions se retrouvent sans moyens financiers
suffisants pour s'acquitter de leurs obligations.
Les pétitionnaires exhortent donc le Parlement à établir un fonds
d'indemnisation des agents de la sécurité publique, qui recevrait des
dons et des legs destinés aux familles de policiers et de pompiers
tués dans l'exercice de leurs fonctions.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président,
dans la deuxième pétition, les pétitionnaires font remarquer à la
Chambre que le fait de gérer une maison et d'éduquer des enfants
d'âge préscolaire représente une profession honorable qui n'est pas
reconnue à sa juste valeur dans notre société.
Les pétitionnaires prient donc le Parlement d'adopter des
initiatives en vue d'éliminer la discrimination dans le régime fiscal
à l'endroit des familles où un parent décide de rester à la maison
pour s'occuper d'un enfant d'âge préscolaire, ou d'une personne
âgée, handicapée ou atteinte d'une maladie chronique.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président,
la dernière pétition a trait à l'étiquetage des boissons alcoolisées.
Les pétitionnaires désirent attirer l'attention de la Chambre sur le
fait que la consommation de boissons alcoolisées peut entraîner des
problèmes de santé ou diminuer les capacités d'une personne. Ils
insistent sur le fait qu'il est possible de prévenir totalement le
syndrome d'alcoolisme foetal ainsi que d'autres malformations
congénitales liées à l'alcool en évitant de consommer de l'alcool
pendant la grossesse. Les pétitionnaires demandent donc au
Parlement d'adopter une mesure législative visant à rendre
obligatoire l'apposition sur les contenants de boissons alcoolisées
d'étiquettes mettant en garde les futures mères et autres
consommateurs contre les risques associés à la consommation
d'alcool.
(1045)
M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le
Président, j'ai plusieurs pétitions que je suis heureux de déposer au
nom d'électeurs de ma région.
La première traite d'une question qui préoccupe de plus en plus
les habitants de ma région, soit la liberté de choix dans le domaine
des soins de santé.
Ils ne veulent pas que le gouvernement s'ingère dans leur choix
de suppléments alimentaires et d'aliments utilisés à des fins de
santé particulières. Ils voudraient s'assurer que des aliments ne
soient pas reclassés comme étant des drogues.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le
Président, la deuxième pétition contient 50 signatures de personnes
qui sont toujours très bouleversées par la fermeture de la BFC
Chilliwack, dans ma circonscription, et par le fait qu'il n'y a plus
aucune base des forces terrestres en Colombie-Britannique.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le
Président, la troisième pétition porte sur les balades en voiture
volée. Le taux de balades en voiture volée ou de vol de voitures dans
ma circonscription a augmenté de 80 p. 100 au cours des deux
dernières années.
Cette situation soulève une vive préoccupation à Chilliwack et à
Abbotsford. Un autre groupe de 230 personnes demande au
Parlement de modifier le Code criminel pour accroître les peines
minimale et maximale en cas d'infraction de balade dans une
voiture volée et pour imposer une peine financière, notamment aux
parents de jeunes délinquants.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le
Président, ma dernière pétition porte 572 signatures, ce qui signifie
que, au total, 33 500 personnes, surtout des électeurs de ma région,
ont signé les pétitions que j'ai déposées.
Ils s'inquiètent à propos des prédateurs sexuels. Leur inquiétude
est inspirée par l'affaire concernant Bobby Oatway. Les Canadiens
sont très inquiets et ils craignent que les crimes impliquant des
lésions corporelles et des infractions sexuelles contre des enfants ne
soient pas traités avec le sérieux nécessaire.
Les pétitionnaires exhortent le gouvernement à prendre un train
de mesures, dont la notification des collectivités, la prise
d'empreintes digitales, le prélèvement d'échantillons d'ADN,
l'inaccessibilité totale au pardon et la recherche d'une solution pour
interdire à tout délinquant sexuel de travailler auprès d'enfants dans
quelque collectivité que ce soit.
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président,
conformément à l'article 36 du Règlement, je voudrais présenter
une pétition que m'a remise une électrice, Mme Kim Dunlop, qui
s'inquiète sérieusement de la sécurité des porte-bébés.
La pétition est signée par 334 électeurs de ma circonscription de
Saint John, au Nouveau-Brunswick. Les pétitionnaires attirent
l'attention de la Chambre sur le fait que les porte-bébés, par
exemple le modèle sac à dos, à sangles et ventral, ne sont pas
réglementés par le gouvernement du Canada.
10148
Les pétitionnaires prient le Parlement d'insister pour que le
gouvernement réglemente les porte-bébés afin de garantir la
sécurité des enfants.
* * *
M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du
gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le
Président, nous répondons aujourd'hui à la question no 66.
[Texte]
Question no 66-M. Speaker (Lethbridge):
Le gouvernement du Canada peut-il préciser quels ministres ont acheté, à même
leur budget de bureau, des exemplaires des ouvrages «On the Take» de Stevie
Cameron et «Above the Law» de Paul Palango et combien d'exemplaires chaque
ministre a-t-il achetés?
M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du
gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): On
m'informe comme suit:
On the Take: bureau du ministre des
Affaires indiennes et du Nord canadien: 1; cabinet du leader du
gouvernement au Sénat: 1; et bureau du Solliciteur général: 1.
Above the Law: aucune copie du livre n'a été achetée.
Les autres ministres n'ont aucune information sur cette question.
* * *
[
Traduction]
M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du
gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le
Président, si la question no 74 pouvait être transformée en ordre de
dépôt de document, ce document serait déposé immédiatement.
Le vice-président: Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
[Texte]
Question no 74-M. Robinson:
Quels fonds, subventions et garanties d'emprunt le gouvernement fédéral a-t-il
offerts dans la circonscription de Burnaby-Kingsway depuis le début de la
législature jusqu'à aujourd'hui, y compris dans le Budget de 1996-1997, et chaque
fois quel est, le cas échéant, a) le ministère ou l'organisme central responsable, b) le
programme en vertu duquel la somme a été versée, c) le nom des bénéficiaires s'il
s'agissait de groupes ou d'organismes, d) le montant du versement et e) le
pourcentage du financement de programme couvert par la somme versée?
(Le document est déposé.)
[Traduction]
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président,
j'invoque le Règlement. Conformément à l'article 39 du
Règlement, j'ai fait inscrire la question no 108 au Feuilleton le 3
mars, il y a de cela 53 jours. Comme le permet le Règlement, j'ai
demandé qu'on me fournisse la réponse dans un délai de 45 jours.
D'après ce que je crois comprendre, le gouvernement tâche
réellement de respecter ce délai de 45 jours à l'égard de toutes les
questions inscrites au Feuilleton.
Le secrétaire parlementaire peut-il me dire si je recevrai une
réponse aujourd'hui? Sinon, quand la recevrai-je, étant donné que la
Chambre sera probablement prorogée très bientôt?
M. Zed: Monsieur le Président, la question dont parle la députée
est très vaste. Je comprends qu'elle souhaite recevoir bientôt la
réponse, mais elle vise un certain nombre de ministères. Comme sa
question concerne tous les ministères et organismes du
gouvernement, la préparation de la réponse exige beaucoup de
temps.
Je demande que les autres questions restent au Feuilleton.
Le vice-président: Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
______________________________________________
10148
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
(1050)
[Traduction]
La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-72, Loi modifiant
la Loi sur la Commission canadienne du blé et d'autres lois en
conséquence, dont le comité a fait rapport avec des propositions
d'amendement.
Le vice-président: Il y a 20 motions d'amendement inscrites au
Feuilleton pour l'étape du rapport du projet de loi C-72. Les
motions seront groupées aux fins du débat de la manière suivante.
Groupe no 1: Les motions nos 1 et 17.
[Français]
Groupe no 2: Les motions nos 2 à 10 et la motion no 19.
[Traduction]
Groupe no 3: Les motions nos 11 à 14. Groupe no 4: La motion no
15.
[Français]
Groupe no 5: La motion no 16.
[Traduction]
Groupe no 6: La motion no 18.
[Français]
Groupe no 7: La motion no 20.
[Traduction]
Les députés peuvent consulter les modalités de vote sur les
motions de chacun des groupes au bureau de la Chambre. La
présidence rappellera ces modalités à la Chambre au moment du
vote.
Le débat porte maintenant sur les motions nos 1 et 17.
M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.)
propose:
10149
Motion no 1
Que le projet de loi C-72 soit modifié par suppression de l'article 2.
Motion no 17
Que le projet de loi C-72 soit modifié par suppression de l'article 10.
-Monsieur le Président, nous en sommes à l'étape du rapport du
projet de loi C-72. Il est clairement impossible de l'adopter. Même
si le premier ministre se dégonfle à la dernière minute et ne
déclenche pas des élections, il sera très difficile d'adopter ce projet
de loi.
Je voudrais rappeler brièvement l'historique du projet de loi
C-72. Après les élections d'octobre 1993, les opinions étaient
partagées dans les Prairies quant à la façon de commercialiser le blé
et l'orge. Le ministre a beaucoup tardé à agir. Enfin, en 1995, il a
mis sur pied le groupe sur la commercialisation du grain de l'Ouest
qui, au milieu de 1996, a remis son rapport sur les modifications
proposées à la Commission canadienne du blé.
Le ministre n'était pas content du rapport, qui recommandait une
plus ample consultation et une campagne de lettres. Ce n'est qu'en
décembre 1996, plus de trois ans après avoir été élu, que le ministre
a déposé un projet de loi à la Chambre.
La première lecture a eu lieu en décembre 1996, mais le projet de
loi n'a été renvoyé au comité qu'à la fin de février ou au début de
mars. Il y a eu des audiences en coup de vent dans les Prairies et,
dans la troisième semaine de mars, le gouvernement n'a accordé
que trois jours pour l'étude détaillée du projet de loi.
Enfin, en ce jour qui est sans doute l'avant-dernier avant la
prorogation de la Chambre, nous voici à l'étape du rapport. Il reste
encore l'étape de la troisième lecture et celle du Sénat. Il est clair
que la Chambre devrait siéger encore plusieurs semaines si l'on
voulait que le projet de loi C-72 ait la moindre de chance d'être
adopté.
Qu'une chose soit bien claire: le projet de loi n'est qu'un piètre
rafistolage d'une Commission canadienne du blé qui est
terriblement dépassée. En le rédigeant, les libéraux n'ont tenu
aucun compte des conseils du secteur agricole. Ils ont refusé de
discuter honnêtement des excellents amendements proposés au
comité par les réformistes. Ce sont des amendements qui
recueillaient l'appui de nombreuses associations agricoles et de la
majorité des agriculteurs des Prairies.
Les libéraux n'ont laissé d'autre choix aux réformistes que de
s'opposer au projet de loi. Nous ne voulons pas l'adopter parce que
nous ne voulons pas décevoir encore plus les agriculteurs qui ont été
si souvent trahis par les gouvernements libéraux et conservateurs.
Nous nous opposons au projet de loi, et nous voterons contre,
mais ce n'est pas pour cette raison qu'il ne sera pas adopté au cours
de la 35e législature. La vraie raison pour laquelle cette mesure va
mourir au Feuilleton, c'est que les libéraux et le ministre de
l'Agriculture savent pertinemment que c'est un projet de loi de
troisième ordre. Ils ont peur de l'adopter et que les agriculteurs ne
constatent à quel point il est minable.
Les libéraux auraient pu faire adopter le projet de loi C-72 s'ils
l'avaient vraiment voulu. Je suis plutôt estomaqué que le ministre
de l'Agriculture ait déclaré publiquement que l'opposition a retardé
l'adoption du projet de loi C-72. Nous savons fort bien que, avec la
majorité qu'ils détiennent au Parlement, les libéraux peuvent faire
adopter tout ce qui leur chante. Ce sont les libéraux qui dressent le
menu législatif. Ils inscrivent les mesures d'initiative ministérielle
à l'ordre du jour. Ils ont recours à l'attribution du temps de même
qu'à la clôture beaucoup trop souvent. En accusant l'opposition
d'avoir retardé l'adoption du projet de loi C-72, le ministre dépasse
tout ce que l'on peut imaginer de sottises et de mensonges. Il
bascule dans le désespoir et l'insolite, qu'il pousse à l'extrême.
(1055)
Voyons ce que prévoit le projet de loi, même s'il ne sera pas
adopté. À l'article 2, on dit que le projet de loi s'appliquera dans
toutes les provinces. Nous avons demandé aux ministres de
l'Agriculture du Manitoba et de l'Alberta s'ils avaient été consultés
au sujet de l'article 2, dont nous débattons dans le cadre de l'étude
de ce groupe d'amendements proposés au projet de loi C-72. Les
deux ministres ont affirmé que jamais les provinces n'ont été
consultées à propos de l'article 2.
L'article 10 et d'autres dispositions du projet de loi donnent au
ministre pleine emprise sur la commission. De toutes les
discussions tenues dans les provinces des Prairies, il est ressorti que
la commission devait rendre des comptes aux agriculteurs et être
davantage dirigée par ceux-ci. Le projet de loi ne tient aucunement
compte de ces recommandations. Je crois même que le projet de loi
C-72 donne au ministre encore plus d'emprise sur la Commission
canadienne du blé qu'il n'en a actuellement.
Les gestes et les paroles du ministre sont clairs. Il dit qu'il ne fait
pas confiance aux agriculteurs des provinces des Prairies pour gérer
leur propre Commission canadienne du blé. Par conséquent,
examinons les pouvoirs auxquels le ministre s'agrippe. Le ministre
choisira le directeur général ou le président du conseil, en passant
par-dessus la tête des administrateurs, même si certains d'entre eux
sont élus par les agriculteurs. Le ministre nommera le directeur
général au conseil d'administration, lui donnant ainsi le droit de
vote, ce qui placera le directeur général dans une grave situation de
conflit d'intérêts.
Maintes fois, des groupes d'agriculteurs nous ont fait savoir que
le directeur général de la commission devrait être choisi par la
commission et devrait rendre des comptes à la commission, que
c'est elle qui devrait l'engager, qu'elle devrait fixer son salaire et
qu'elle devrait mettre fin à son emploi si elle le jugeait utile.
Le ministre a le pouvoir de nommer tous les membres du conseil
d'administration intérimaire et de dire à ce dernier comment choisir
leurs successeurs. Ce n'est pas de la démocratie. C'est l'arrogance
libérale à son meilleur. Ce serait une bonne planque.
Le ministre et les personnes qu'il nomme jettent tous les plans
d'un conseil partiellement élu. Cela me rappelle les pensions bien
grasses que les députés libéraux se sont prévues. S'ils définissent
les règles, s'ils prennent les décisions, les agriculteurs n'ont plus
qu'à attendre patiemment de voir quel genre de commission sortira
de tout cela, quels en seront les administrateurs, et quelles règles,
lignes directrices et règlements seront mis en place pour l'élection
et la nomination des futurs administrateurs de la commission.
10150
Ce qui est encore plus troublant, c'est que le ministre peut
congédier les administrateurs et les employés qui, à son avis, ne
servent pas les intérêts supérieurs de la société. Dans ce cas, les
agriculteurs qui payent pour la commission sont laissés pour
compte. Il semble étrange que les employés puissent être congédiés
dans l'intérêt supérieur de la société plutôt que des agriculteurs. Il
s'ensuit que les agriculteurs ont les mains liées. Ils ne sont pas en
mesure de vraiment apporter ou de faire apporter à la commission
les changements qu'ils estiment utiles.
Le ministre refuse d'agréer à la demande des agriculteurs de
passer seulement s'ils le veulent par la commission, même pour
l'orge. Il y a un consensus. Maints sondages ont montré que la
majorité des producteurs d'orge des Prairies veulent une
Commission canadienne du blé à participation volontaire et cela,
même pour le blé organique. Beaucoup de producteurs de cultures
organiques et leurs associations estiment que la Commission
canadienne du blé n'est pas le meilleur office de commercialisation
qui soit pour les produits organiques.
Le ministre est allé à l'encontre de la recommandation de son
propre groupe spécial sur la commercialisation du grain de l'Ouest
en niant la capacité de la commission de devenir, même le
moindrement, un office volontaire de commercialisation des
produits dont la mise en marché est mieux assurée par d'autres
avenues que par la Commission canadienne du blé.
Ce faisant, le ministre a défié le souhait des agriculteurs et les
résultats de son propre sondage Angus Reid qui révélaient que les
producteurs d'orge réclamaient majoritairement une Commission
canadienne du blé volontaire. En outre, le ministre va autoriser la
Commission canadienne du blé à faire des achats au comptant dans
un environnement monolithique où les éleveurs de bétail peuvent
être ruinés par des prix artificiels des aliments pour animaux et des
représailles internationales pour pratiques commerciales déloyales.
C'est ce qu'on nous a dit lorsque nous avons parcouru les Prairies.
Le ministre n'a rien fait pour régler ce problème dans les
amendements au projet de loi que le gouvernement a présentés au
comité.
(1100)
Le gouvernement est disposé à assujettir d'autres cultures au
monopole. Cette mesure ne serait pas très bien acceptée par les
agriculteurs. En fait, s'il y a actuellement quelques agriculteurs qui
vendent leurs produits de l'autre côté de la frontière et si des
produits agricoles comme le colza étaient désormais assujettis au
monopole de la Commission canadienne du blé, je crois qu'il y
aurait une guerre civile dans les Prairies et non pas seulement
quelques agriculteurs qui envoient des camions chargés de leurs
produits de l'autre côté de la frontière, aux États-Unis, en guise de
protestation.
De toute évidence, le ministre ne comprend pas les besoins ni les
souhaits de la majorité des producteurs des Prairies.
Le ministre agit comme le capitaine du Titanic, avec tellement
d'arrogance qu'il file à toute vapeur, aveuglément, en direction des
glaciers. En ce qui concerne le tarif du nid-de-Corbeau, ses
réalisations sont pitoyables. En matière de transport du grain, elles
sont catastrophiques. Par rapport à la Commission canadienne du
blé, elles sont lamentables et dangereuses. Il est responsable de
l'absence de prise de mesures depuis trois ans et demi. Il est
responsable de la dissension qui existe dans les Prairies au sujet de
la Commission canadienne du blé. Il est responsable de ce ramassis
d'erreurs qu'est le projet de loi C-72.
Les réformistes ont préconisé des modifications constructives à
la Commission canadienne du blé. L'avenir que nous envisageons
pour la commission donnerait à celle-ci une bonne chance non
seulement de s'en tirer, mais aussi de devenir un organisme de
commercialisation de première classe, administré par des
agriculteurs et dont les activités auraient de fortes chances d'être
couronnées de succès au cours du XXIe siècle.
Durant la prochaine campagne électorale, nos opposants seront
les libéraux et les néo-démocrates qui laisseront entendre que le
Parti réformiste veut éliminer la commission. C'est faux, tout
comme leurs allégations selon lesquelles nous porterions atteinte à
l'assurance-maladie et aux pensions des aînés. Dans notre
document intitulé Nouveau départ, nous avons démontré que leurs
allégations concernant l'assurance-maladie, les soins de santé et les
pensions des aînés sont fausses. Leurs affirmations au sujet de la
Commission canadienne du blé sont également fausses.
Les mesures que nous proposons sont les seules qui rétabliront la
paix dans un milieu agricole extrêmement divisé. Ce sont les seules
mesures qui garantiront la rentabilité future de la commission, dans
un climat où les agriculteurs voudront commercialiser leurs
produits par l'entremise de la commission, au lieu d'être obligés de
le faire, comme le proposent les députés d'en face.
Le projet de loi à l'étude ne peut être adopté à la Chambre des
communes. C'est une question sur laquelle chaque parti devrait
faire connaître sa position, et je remercie la Chambre de m'en avoir
donné l'occasion.
[Français]
M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le
Président, c'est avec un vif intérêt que j'interviens sur le projet de
loi C-72 modifiant en profondeur la Loi régissant la Commission
canadienne du blé, communément appelée la CCB.
Il faut bien situer ce projet de loi dans le contexte actuel.
Cependant, il faudrait faire un léger retour. Lorsque le
gouvernement a créé la Commission canadienne du blé, le Canada,
comme tous les pays de ce monde, vivait une grave crise
économique. Il faut se situer autour des années 1930, il y a plus de
65 ans, lorsque le gouvernement canadien a créé la Commission
canadienne du blé, durant la grande famine où les hommes et les
femmes devaient travailler souvent uniquement pour se nourrir.
Plusieurs crevaient de faim. C'est ce qu'on a appelé la grande
dépression.
Les agriculteurs de l'Ouest avaient beaucoup de difficulté à
joindre les deux bouts. Ils restaient souvent collés avec leur récolte,
ne pouvant la vendre à un juste prix. Le gouvernement, en bon père
de famille, a créé la Commission canadienne du blé avec le droit, le
monopole. Toutes les céréales devaient passer par la Commission
canadienne du blé.
Donc, à l'époque, la création et la présence de la Commission
canadienne du blé étaient justifiées, tout comme je crois que sa
présence serait justifiée aujourd'hui, sauf que le gouvernement, au
fil des ans, a perdu contact avec la base, et encore davantage celui
qui a la gouverne du pays présentement. Le Parti libéral est coupé
littéralement de la base. On dirait qu'il n'a d'oreille que pour les
financiers, que pour ceux qui contribuent à sa caisse électorale.
10151
Effectivement, les agriculteurs de l'Ouest sont forts mécontents.
J'écoutais mon collègue du Parti réformiste qui disait: «Vous voulez
la guerre dans l'Ouest, vous allez l'avoir avec les producteurs
céréaliers tellement ils sont mécontents.»
(1105)
Je crois bien qu'il a exagéré. Il n'y aura pas de guerre, peut-être
une guerre verbale, bien sûr, mais cela ne frappera pas tellement
fort. Je peux vous dire que de tous les amendements, et de toutes les
discussions que nous avons tenues lors des échanges au Comité
permanent de l'agriculture, rares sont ceux qui ont été retenus.
Pourtant, nous avions des motions fort intéressantes, mais les
libéraux, à l'exception d'une seule, après avoir consulté «Dieu le
père», c'est-à-dire le ministre lui-même, sont revenus, 48 heures
plus tard, pour adopter la motion visant que 10 agriculteurs soient
élus, et là, on a inclus dans la loi le chiffre 10.
Il y a 60 ans, la Loi sur la Commission canadienne du blé était
justifiée et à propos. Je crois qu'elle l'est encore aujourd'hui, mais
il faudrait que le gouvernement se réveille, apporte quelques
modifications-un bon nombre de motions sont présentées-et en
accepte quelques-unes.
Il faut rappeler également que la Commission canadienne du blé
exerce un monopole, dans le sens qu'un producteur céréalier qui
demeure à la frontière des États-Unis n'aurait pas le droit, comme il
ne l'avait pas antérieurement d'ailleurs, de vendre sa récolte ou une
partie de sa récolte à un prix supérieur à ses voisins américains.
La Commission canadienne du blé s'engage à acheter l'orge et le
blé de tout producteur céréalier enregistré et évidemment, son jeu,
je dis bien son jeu, entre guillemets, est de trouver le prix le plus
élevé possible, soit à l'intérieur ou à l'extérieur du pays, pour la
revente de ce blé et de cette orge.
Tout le blé et l'orge destinés à la consommation humaine doivent
être transigés par la Commission canadienne du blé. Même au
Québec, si vous avez besoin d'une quantité de farine, de blé pour la
consommation humaine, non pas pour l'alimentation du bétail, il
faut passer par la CCB, la Commission canadienne du blé.
Le conseil d'administration sera formé de 15 membres. Là, il y a
déjà un avantage. Avant, c'était quatre ou cinq, il y en avait tout le
temps un ou deux qu'il fallait renommer. Mais souvent, on a vu la
Commission canadienne du blé être dirigée par trois personnes.
Maintenant, il y en aura 15, dont 10-et cela, c'est un acquis de
l'opposition, du Bloc québécois, appuyé en ce sens par le Parti
réformiste. Nos amis libéraux ne voulaient pas l'inclure dans la loi,
donc, après 48 heures de réflexion, après avoir consulté «Dieu le
père», ce dernier a dit: «Oui, ça gronde tellement dans l'Ouest qu'on
va leur donner le chiffre 10.»
Je préférais le chiffre 12, bien sûr, et le Parti réformiste préférait
également 12, mais le Parti libéral voulait se garder la possibilité de
récompenser les «patroneux», parce que les cinq autres postes à
combler seront nommés par le gouverneur en conseil. J'ai posé une
question aux hauts fonctionnaires, ce qui a déplu, bien sûr, au
secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture, en lui
demandant: «Peut-on connaître le salaire des personnes qui siègent
présentement à la Commission canadienne du blé?» J'invite tous
mes collègues à la Chambre à bien écouter.
Monsieur le Président, c'est peut-être votre salaire, soi dit en
passant, mais savez-vous que le président de la Commission
canadienne du blé gagne pas mal plus cher que vous, et il n'a pas à
subir le test de l'électorat? Son salaire peut varier entre 115 000 $ et
144 000 $. Je vous promets, et vous pouvez le vérifier, ce n'est pas
un bleu qui est là, c'est un rouge. Son adjoint a un salaire entre
110 000 $ et 129 000 $ et les commissaires reçoivent entre
110 000 $ et 129 000 $ eux aussi. Si bien que c'est souvent un
endroit privilégié pour placer un député de qui on veut obtenir le
comté, ce qui se fera, d'ailleurs, dans les quelques semaines et
quelques jours qui vont suivre, lorsque le premier ministre
déclenchera les élections, dimanche.
(1110)
Peut-être qu'un jour, le député de Malpèque siègera sur une de
ces commissions, à 144 000 $ par année, sans test de l'électorat,
parce qu'il sait très bien qu'à l'Île-du-Prince-Édouard, le vent
souffle et, semble-t-il que le vent conservateur, à
l'Île-du-Prince-Édouard, souffle très fort. Il serait peut-être
intéressé à s'accrocher à un emploi comme celui-là.
Le secrétaire parlementaire sourit; je sais qu'il a déjà pointé ces
nominations, mais c'est ça, le patronage. C'est dans ce sens que
nous, du Bloc québécois, avons toujours dénoncé, avec vigueur
d'ailleurs, les fameuses nominations.
Dans ma circonscription, savez-vous qui siège à titre de
présidente du conseil d'arbitrage à l'assurance-emploi?
Des voix: Non.
M. Chrétien (Frontenac): La soeur de la candidate libérale dans
Frontenac-Mégantic.
Des voix: Ah, ah!
M. Chrétien (Frontenac): C'est une belle jeune fille qui a été
nommée récemment par les bons offices de ce gouvernement.
Lorsqu'on dit qu'on cherche la compétence, il faut la mettre, elle
aussi, entre guillemets, car la condition sine qua non, c'est que la
personne doit être libérale.
Un autre point qui cloche dans la réforme de la Commission
canadienne du blé, c'est qu'on y inclut toutes les provinces. Le
député de Malpèque a appuyé cela, sachant très bien qu'à
l'Île-du-Prince-Édouard, il ne se cultive pas beaucoup de blé et
d'orge, mais plutôt des patates. Lorsque j'ai demandé au secrétaire
parlementaire s'il prenait l'engagement que le quart des membres
de la Commission canadienne du blé seraient des Québécois ou des
Québécoises, il m'a répondu: «Mais non, vous ne produisez presque
pas de blé ou d'orge, au Québec.» Pourquoi vous nous embarquez à
l'intérieur de cette Commission, alors, puisqu'en principe, il n'y
aurait que trois provinces et une petite partie de la
Colombie-Britannique-mettez-en trois et demie, si vous
voulez-où on cultive le blé et l'orge avec intérêt et en quantité
industrielle?
Nous avons présenté des amendements, et je terminerai sur ces
points, fort positifs pour améliorer la Loi sur la Commission cana-
10152
dienne du blé, et pour donner, non pas satisfaction aux politiciens
libéraux, mais aux producteurs céréaliers de l'Ouest. On a
finalement accepté d'inclure le chiffre 10 qui représente le nombre
de représentants élus, soit dit en passant. Mais je rappelle que le
président-directeur général, celui qui détiendra le vrai pouvoir à la
Commission canadienne du blé, sera nommé par le gouvernement,
et ça, je ne le prends pas.
L'opposition officielle votera contre le projet de loi C-72 dans
son ensemble, bien qu'il appuie le premier groupe de motions
présentées par le Parti réformiste.
[Traduction]
M. Jerry Pickard (secrétaire parlementaire du ministre de
l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le
Président, je trouve que le débat déraille quelque peu. Au lieu
d'entendre parler de la valeur du projet de loi, des consultations qui
se sont tenues ou des efforts qui ont été déployés pour veiller à ce
que toutes les personnes concernées aient leur mot à dire, je
n'entends que des attaques à profusion. Peut-être est-ce à cause des
élections qui approchent.
J'ai entendu le député réformiste proposer, il y a quelques
instants, un nouveau départ. À leur arrivée à la Chambre des
communes, les députés réformistes ont dit qu'ils allaient travailler
d'une façon raisonnable, présenter leurs points de vue et débattre
des questions en fonction de leur valeur. Toutefois, c'est bien la
dernière chose qu'ils ont faite, semble-t-il, depuis un an. C'était
triste à voir quand ils ont lancé des attaques et utilisé des arguments
afin, peut-être, d'en tirer des avantages politiques. La réalité, c'est
que l'on se préoccupait gravement de l'administration et de la régie
de la Commission canadienne du blé et que des changements
devaient être apportés à la loi régissant la commission.
Il ne fait pas de doute que nous avons tenu des audiences d'un
bout à l'autre des Prairies pour nous assurer que les centaines de
personnes et d'organismes concernés puissent faire valoir leur point
de vue afin que nous ayons une bonne idée des changements à
apporter à la loi. Le ministre a alors décidé de structurer les
recommandations, d'écouter les intéressés et de leur donner
l'occasion de répondre de nouveau. La prochaine étape du
processus consistait à présenter les recommandations du groupe
d'étude au public pour que celui-ci puisse faire des commentaires.
(1115)
Tout cela prend du temps, et c'est pourquoi le ministre n'a pas
précipité les choses. Il a pris le temps d'examiner attentivement les
sujets de préoccupation qui lui avaient été signalés et d'élaborer une
série d'excellentes mesures. De cette façon, l'examen de la
structure de la commission du blé s'est fait de façon appropriée, en
tenant compte des recommandations que les intéressés avaient
formulées. Ces mesures ont été structurées et réunies dans un projet
de loi que le Comité de l'agriculture est allé présenter dans les
Prairies pour entendre les préoccupations des agriculteurs de
l'Alberta, notamment de Peace Valley, de la Saskatchewan, du
Manitoba et que de tous les grands organismes à Ottawa. Il a fait un
excellent travail de consultation en écoutant les récriminations des
groupes intéressés.
Le gouvernement a proposé plusieurs amendements, à ce
moment-là, pour tenir compte de toutes les questions soulevées par
les gens et les grands organismes. Toutes le questions ont été
traitées. Très franchement, mettre sept à douze mois à écouter les
revendications des gens et à les transposer dans un projet de loi n'est
pas une mince affaire. J'ai été très déçu de voir l'opposition attaquer
en comité les fonctionnaires qui avaient pourtant fait un travail
rigoureux. S'est-elle attaquée à la valeur même des propositions?
Non. C'est tout simplement que l'opposition n'aimait pas le projet
de loi.
Je suis convaincu que, peu importe ce que l'on aurait pu proposer,
le Parti réformiste s'y serait opposé de toute manière. C'était leur
position dès le départ. Même si certaines idées très valables ont été
mises de l'avant, les réformistes n'ont jamais voulu admettre qu'il y
avait quelque chose de positif. La petite politique pratiquée en
l'occurrence n'est pas ce qu'il faut retenir du processus.
Cependant, nous étudions deux propositions d'amendement. La
première élimine la mention que la Loi sur la Commission
canadienne du blé lie Sa Majesté du chef du Canada ou d'une
province. Cette disposition a été incluse pour plus de clarté étant
donné que, selon l'interprétation juridique de la loi, celle-ci lie déjà
les provinces. Il demeure important que tous les participants de
l'industrie sachent que la loi lie les provinces. De cette façon, on
peut assurer le maintien des méthodes de vente qu'a toujours suivies
la Commission canadienne du blé. C'est la raison pour laquelle
cette disposition a été incluse. La supprimer irait carrément à
l'encontre de la nature même du projet de loi. Par conséquent, nous
ne pouvons pas appuyer des changements à cette disposition.
Le paragraphe 18(1) de la Loi sur la Commission canadienne du
blé dit actuellement ceci:
Le gouverneur en conseil peut, par décret, donner des instructions à la
Commission sur la manière d'exercer ses activités et ses attributions.
On propose les modifications suivantes à l'article 18 de la loi:
(1.1) Les administrateurs veillent à la mise en oeuvre des instructions données à la
Commission, mais ils ne peuvent être tenus pour responsables des conséquences qui
en découlent si, ce faisant, ils observent l'article 3.93.
(1.2) La Commission est, lorsqu'elle observe les instructions qu'elle reçoit,
présumée agir au mieux de ses intérêts.
(1120)
Le pouvoir de donner des instructions existe déjà dans la Loi sur
la Commission canadienne du blé. Ce projet de loi n'affaiblit pas les
pouvoirs déjà conférés à la Commission canadienne du blé par le
Parlement. C'est pourquoi il faut maintenir le pouvoir du
gouvernement de donner des instructions à la Commission
canadienne du blé. Ce pouvoir n'a été utilisé que très rarement, et il
n'y a aucune raison de croire qu'il sera utilisé plus souvent à
l'avenir.
10153
Les dispositions de l'article 10 du projet de loi visent simplement
à garantir que de telles instructions seront observées, le cas échéant,
et que les dirigeants, administrateurs et employés ne seront pas
tenus responsables des conséquences pouvant découler de
l'exécution des instructions données à la Commission par le
gouvernement. Aux termes de l'alinéa 3.93(1)a) du projet de loi, les
dirigeants, administrateurs et employés doivent agir avec intégrité
et de bonne foi au mieux des intérêts de la Commission. L'article 10
précise que, en observant les instructions du gouvernement, les
administrateurs agissent au mieux des intérêts de la Commission.
Nous devons nous assurer que les gens qui travaillent pour une
société de ce genre sont protégés du point de vue juridique tant
qu'ils agissent de bonne foi et respectent la loi. Nous ne pouvons pas
appuyer les amendements proposés par le Parti réformiste à ce
moment-ci.
M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, je
parlerai aujourd'hui du projet de loi C-72, à l'étape de la deuxième
lecture, que les libéraux ont déposé et qui vise à modifier la
Commission canadienne du blé.
Je suis franchement étonné que ce projet de loi se soit rendu
jusqu'à la Chambre. Cela n'aurait jamais dû être. Ce projet de loi
n'aura pas les résultats escomptés par les agriculteurs de l'Ouest et
il n'apportera pas davantage les changements que le gouvernement
libéral avait envisagé d'apporter à la Commission.
Il est apparu clairement à l'étape de l'étude en comité et tout au
long de l'étude article par article que ce projet de loi est une très
mauvaise mesure législative. La Chambre n'aurait jamais dû en être
saisie, et je suis déçu qu'elle l'ait été. Le projet de loi ne fait pas du
tout, entre autres, ce qu'avait recommandé le groupe qui a examiné
la Commission canadienne du blé et est allé un peu partout dans
l'Ouest. Le groupe avait recommandé que la Commission rende des
comptes aux agriculteurs.
À première vue, le projet de loi oblige la Commission, dans une
certaines mesure, à rendre des comptes, mais bien peu. Il est évident
que le gouvernement et les personnes qu'il nommera au sein de la
Commission en auront le contrôle.
Les amendements que nous, réformistes, avons proposés auraient
donné des résultats si le gouvernement ne les avait pas rejetés. Ils
auraient contribué, dans une certaine mesure du moins, à remédier à
certains problèmes. Il faut cependant reconnaître que ce projet de
loi est lui-même irrécupérable.
Ce projet de loi ne fera évidemment pas l'objet d'un vote à la
Chambre, et c'est très bien ainsi. Il sera rejeté. Peu importe que le
prochain gouvernement soit dirigé par M. Preston Manning, parM. Chrétien ou par quelqu'un d'autre, nous devrons reprendre le
travail. Je me rends compte que j'ai désigné certains députés par
leur nom, mais je m'abstiendrai de le faire.
Cette mesure législative ne fait pas ce que veulent les
agriculteurs. Une étude menée par le gouvernement de la
Saskatchewan montre que 56 p. 100 des agriculteurs veulent avoir
le choix de commercialiser leurs produits par l'entremise de la
commission ou directement, d'eux-mêmes ou par l'intermédiaire
d'une société céréalière, aux États-Unis ou dans d'autres pays.
Cette mesure ne donne pas suite aux résultats de l'étude.
(1125)
La mesure ne correspond pas non plus aux résultats du plébiscite
réalisé en Alberta, qui a montré que 66 p. 100 des agriculteurs de
cette province veulent un double système de commercialisation,
comme on l'appelle communément, c'est-à-dire le choix de
commercialiser leurs produits par l'intermédiaire de la Commission
du blé, d'une société céréalière ou de toute autre manière.
C'est ce que le groupe de consultation mis sur pied par le
gouvernement a recommandé. Le groupe avait recommandé que
l'orge soit vendue librement et que les agriculteurs aient le choix de
la vendre par l'intermédiaire de la Commission ou sur le marché
libre, au Canada ou à l'étranger. Le gouvernement n'a pas donné
suite aux recommandations de son propre groupe de consultation.
Un sondage réalisé dans ma circonscription, Végréville, par
TeleResearch Inc., a révélé qu'environ 85 p. 100 des agriculteurs
interrogés par cette maison de sondage sérieuse-et j'avais déposé
son rapport au comité afin que le gouvernement puisse en prendre
connaissance-sont favorables à un système qui leur laisse le choix,
à la commercialisation double, soit par l'intermédiaire de la
Commission ou de leur propre initiative, dans le cas de l'orge. Dans
le cas du blé, la proportion était un peu moins élevée, mais pas de
beaucoup. Dans la circonscription de Beaver River, un pourcentage
encore plus élevé d'agriculteurs voulaient avoir le choix et ne
voulaient pas d'un monopole.
Ce projet de loi ne répondra pas aux voeux des agriculteurs de
Végréville, ma circonscription, ni des agriculteurs de Beaver River,
la circonscription de Deb Grey.
Le vice-président: Une fois de plus, le député ne respecte pas les
usages de la Chambre. Aurait-il l'obligeance de ne pas désigner les
députés par leur nom, mais par leur circonscription.
M. Benoit: Monsieur le Président, je m'en excuse. Je ne sais pas
ce que j'ai aujourd'hui à citer des noms. Voici trois ans et demi que
je suis à la Chambre et je n'ai jamais cité un nom. C'est
probablement le dernier jour de séance de la Chambre et voilà que je
commence à citer des noms. Peut-être est-ce à cause de
l'imminence de la campagne électorale.
Si quelqu'un doit s'excuser, c'est au gouvernement libéral de le
faire pour avoir prétendu que cette mesure législative répond aux
souhaits des agriculteurs. Les députés ont examiné les
amendements dont nous sommes saisis aujourd'hui; ils ne vont pas
améliorer le projet de loi ou le rendre plus acceptable.
La plupart des agriculteurs veulent une Commission canadienne
du blé qui leur rende des comptes. Et ce, que les agriculteurs soient
en faveur du monopole de la Commission du blé, comme ils le sont
majoritairement, ou qu'ils soient en faveur d'un double système de
commercialisation qui permette aux agriculteurs de passer ou non
par la Commission. Dans un cas comme dans l'autre, ce qu'ils
10154
veulent, c'est une Commission qui leur rende des comptes. Or, cette
mesure législative ne fait pas ça.
Le projet de loi prévoit un conseil d'administration partiellement
élu. En comité, le Bloc a proposé que 12 sur 15 administrateurs du
conseil soit élus. Les libéraux sont revenus avec un chiffre de 10 et
c'est ce chiffre qui figure dans le projet de loi. Nous avons un
conseil d'administration dont 10 membres-ce qui est du moins une
majorité-sont élus. Quelle différence cela fait-il, s'ils n'ont pas le
pouvoir d'apporter les changements qui devraient être apportés à la
Commission? On leur accorde un pouvoir très limité. Le
gouvernement garde la haute main sur la Commission en vertu de
cette mesure législative. Les membres du conseil d'administration
n'ont pratiquement aucun pouvoir pour ce qui est de changer la
nature de la Commission et de donner aux agriculteurs le choix
quant à la façon dont ils veulent commercialiser leur grain.
Le gouvernement empêche la chose en partie parce que le
président du conseil et le président sont désignés. Le gouvernement
peut garder le contrôle en partie grâce à ces désignations, mais aussi
grâce à un mécanisme de sélection qui permet d'empêcher tout
changement auquel la Commission canadienne des grains s'oppose
pour une raison quelconque.
(1130)
Même si la majorité du conseil d'administration appuie ces
changements, si la Commission canadienne des grains, qui relève
du ministre, décide qu'il ne devrait pas y avoir de changements, il
n'y en aura pas. De toute évidence, ces changements ne sont pas ce
que les agriculteurs veulent, et c'est ce que nous constaterons
pendant la campagne électorale.
Je pense que l'on s'en rendra très bien compte à ce moment-là.
Ce n'est pas ce que veulent les agriculteurs. Le gouvernement
libéral entendra ce message bien plus clairement qu'il ne l'a fait
jusqu'à présent, lors de la campagne électorale.
Parmi les autres points sur lesquels nous avons travaillé au
comité, citons l'absolution en matière de responsabilité que la
mesure donne à la gestion de la Commission et même aux
employés.
Si j'étais employé de la Commission canadienne du blé, pas un
des commissaires, pas un des membres nommés du conseil
d'administration, pas le président de ce conseil nommé également,
ni le président nommé aussi, non, si j'étais un simple employé-et
il y a de nombreuses personnes compétentes qui travaillent pour la
Commission-, je serais inquiet de cette mesure législative. Les
avis juridiques qu'on nous a donnés ne sont pas clairs. Il semble que
cette mesure pourrait facilement être interprétée comme pouvant
rendre les employés responsables d'erreurs faites par les membres
du conseil d'administration ou les gestionnaires de la Commission.
Cette mesure législative n'aurait jamais dû être présentée à la
Chambre. Je suis au moins heureux qu'elle ne sera jamais mise aux
voix, parce que, franchement, elle ne le mérite pas.
M. Wayne Easter (Malpèque, Lib.): Monsieur le Président, le
représentant du Parti réformiste tente de m'accuser de ne pas être un
agriculteur de l'Ouest. Je dois admettre que je ne suis pas un
agriculteur de l'Ouest.
J'ai longtemps côtoyé les agriculteurs de l'Ouest et je suis
parfaitement en mesure de parler de cette merveilleuse institution
que l'on appelle la Commission canadienne du blé. J'aimerais
relever certains points du député de Végréville. Il prétend que les
producteurs n'exercent aucun contrôle et que les agriculteurs n'ont
pas de choix. Bien au contraire, ils ont le choix et c'est justement le
but du présent projet de loi. Celui-ci deviendra une loi habilitante,
qui donnera plus de choix aux producteurs et plus de souplesse à la
Commission.
Une voix: Vous ne l'avez pas lu.
M. Easter: Le député affirme que je ne l'ai pas lu. Je lui citerai
une passage du projet de loi qui montre bien que le conseil
d'administration exerce un contrôle très serré sur la Commission
canadienne du blé. Le paragraphe 3.9(2) précise que «le président
est le premier dirigeant de la commission; à ce titre, il assure, au
nom du conseil, la direction et la gestion des activités et des affaires
courantes de celle-ci. Sous réserve des résolutions du conseil, il est
investi à cet effet des pouvoirs qui ne sont pas expressément
réservés au conseil ou au président de celui-ci par la présente loi ou
les règlements administratifs de la Commission».
Ce paragraphe explique clairement quel pouvoir exerce le conseil
sur le premier dirigeant et le président de la Commission. C'est un
projet de loi habilitante que présente le gouvernement et je suis fier
de dire, en ma qualité de membre du Comité de l'agriculture, que
nous avons consulté les producteurs et apporté des changements en
fonction de leurs commentaires.
Ce projet de loi fait suite à tout un exercice de consultation et de
prise en considération des opinions exprimées. Le projet de loi C-72
propose de modifier la Commission canadienne du blé et de lui
donner les outils nécessaires afin qu'elle devienne une meilleure
institution de commercialisation pour les producteurs céréaliers de
l'Ouest.
(1135)
Étant donné que j'ai été président du Syndicat national des
cultivateurs, j'ai toujours eu des opinions bien arrêtées au sujet de la
Commission canadienne du blé. J'ai eu l'occasion de l'étudier et de
me rendre à ses bureaux. J'ai écouté les producteurs au cours des
vingt dernières années. Ils m'ont fait savoir qu'ils appuyaient cette
institution de commercialisation.
La Commission canadienne du blé fonctionne bien; elle
maximise les profits des producteurs sur le marché international.
Elle a instauré un système qui permet aux agriculteurs de
concurrencer les produits des autres pays sur le marché
international au lieu de se faire concurrence entre eux. Le travail de
la Commission repose sur les trois piliers suivants: le guichet
unique, la mise en commun des bénéfices et les garanties du
gouvernement.
Je demande aux députés réformistes d'écouter attentivement ce
que je vais dire. Je sais qu'ils ne veulent pas entendre parler des
bonnes choses et des bons arguments que propose notre
gouvernement. Je vais citer les propos de Robert Carlson, du
National Farmers Union, aux États-Unis, lorsqu'il a comparu
devant le Comité de l'agriculture de la Chambre des représentants.
Se plaignant de ce qu'il n'y avait pas chez eux d'organisme de
commercialisation de ce calibre, il a dit: «Du point de vue de
l'agriculteur qui veut jouer le jeu de la concurrence, nous n'avons
pas, aux États-Unis, de véhicule comparable à la Commission
canadienne du blé qui donne aux producteurs le pouvoir de
commercialiser leur grain
10155
sur le marché international. En gros, nous nous contentons de
vendre notre récolte à l'entreprise locale de stockage de grains qui
nous offre le meilleur prix et ensuite nous ne nous y intéressons
plus.
«Le commerce d'exportation est dominé par un petit nombre de
grosses compagnies qui cherchent à acheter à bas prix et à vendre
cher pour accroître les revenus de leurs propriétaires qui ne sont
généralement pas les mêmes personnes que celles qui ont produit
les céréales dont elles font le commerce.
«Le but déclaré des partisans du libre-échange dans le secteur
agricole est de faire le commerce de céréales, sans frontières
nationales, sans subventions internes, sans quotas ni droits de
douane, et sans mécanismes permettant de fixer un prix commun
tels que les ECE. Ce serait un monde formidable pour les négociants
en grain, mais un monde bien triste pour les producteurs qui
deviendraient économiquement très vulnérables.»
Selon lui, il arrive souvent que les producteurs de différents pays
«s'attaquent les uns aux autres au nom du libre-change» quand ils
pensent que les autres bénéficient d'un avantage qu'ils n'ont pas. En
guise de conclusion, il a dit: «Si nous détruisons les diverses
institutions que les agriculteurs de divers pays ont édifié pour
survivre économiquement, il ne restera rien d'autre que des
agriculteurs exposés aux éléments au milieu des ruines des
structures qui, jadis, leur donnaient du pouvoir et les protégeaient
contre les géants qui dominent le marché.»
M. Carlson a tout dit. Il a parlé de la Commission canadienne du
blé, cette structure qui donne du pouvoir aux producteurs. En tant
que gouvernement, nous sommes à la recherche des instruments qui
donneront plus de souplesse à la Commission. Je suis convaincu que
l'approche proposée, en ce qui a trait aux membres du conseil
d'administration, est la meilleure, puisqu'elle nous permet de
nommer des personnes pour leur compétence en matière de
commercialisation. J'ai cependant cédé sur ce point après que les
producteurs m'aient dit qu'ils voulaient élire à la commission une
majorité de producteurs afin de pouvoir gérer leurs propres affaires
grâce à cette mesure habilitante. Nous avons cédé, et dix
producteurs seront élus à la commission.
Il est évident, à regarder cette mesure législative, que nous avons
écouté les producteurs et que nous avons accédé à leurs désirs. Je
recommande aux réformistes qui s'en prennent constamment à la
commission de lire ce document, à savoir le rapport annuel de la
Commission canadienne du blé, qui, publication après publication,
explique clairement comment la Commission canadienne du blé
fournit tous les renseignements voulus. Aucun courtier en grains
international ne fournit ce genre de renseignements. Il indique où se
situent les marchés. Il publie les prix définitifs payés et montre
clairement que, si on la compare aux autres organismes de
commercialisation existant dans le monde, la Commission
canadienne du blé est parfaitement en mesure de maximiser les prix
et les revenus que les producteurs tirent du marché.
(1140)
Il s'agit, par cette mesure législative, de faire en sorte que la
Commission canadienne du blé soit en mesure de poursuivre sa
mission au siècle prochain, en conférant, grâce à une loi habilitante,
plus de pouvoirs aux producteurs afin qu'ils puissent déterminer
leur destinée avec l'assurance et l'appui du gouvernement canadien
qui entend seconder leurs efforts en vue de bâtir le genre
d'économie et de prospérité que les producteurs peuvent apporter à
ce grand pays.
M. Allan Kerpan (Moose Jaw-Lake Centre, Réf.): Monsieur
le Président, je suis heureux de voir qu'il y a des agriculteurs de
l'autre côté de la Chambre. Il n'y a pas très longtemps, il y a eu un
débat sur l'agriculture à la Chambre et il y avait de notre côté
quelque 15 agriculteurs. Chez nos vis-à-vis, on retrouvait quelque
15 à 18 avocats.
C'est une partie du problème qui se pose. Les avocats, les
bureaucrates et les politiques disent toujours aux agriculteurs ce qui
est bon pour eux, plutôt que ce soit le contraire. C'est à la base du
problème.
Je voudrais aborder une observation que le secrétaire
parlementaire a faite. Il a déclaré que les députés réformistes ne
voteraient probablement pas en faveur de ce projet de loi, peu
importe son contenu. Lorsque j'ai entendu parler pour la première
fois de certaines des modifications en ce qui concerne les
administrateurs élus, j'ai envisagé très sérieusement d'appuyer le
projet de loi. J'ai fait un sondage dans ma circonscription qui
montrait très clairement que la majorité des agriculteurs
souhaitaient continuer de traiter avec le monopole qu'est la
Commission canadienne du blé.
Je suis heureux d'être membre d'un parti dans lequel je peux
voter selon les souhaits de mes électeurs sans craindre d'en subir les
conséquences. J'ai songé à voter en faveur du projet de loi C-72
jusqu'à ce que je commence à examiner ses dispositions. À ce
moment-là, j'ai changé d'idée.
Je suis heureux de savoir qu'on n'adoptera pas ce projet de loi au
cours de la 35e législature. C'est une bonne chose. J'ai parlé à
beaucoup de gens et aucun des deux côtés n'est heureux. Les
partisans d'un double système de commercialisation pensent que le
projet de loi ne va vraiment pas assez loin. Par contre, le
Saskatchewan Wheat Pool, le SNC et d'autres groupes pensent qu'il
va trop loin.
Il est évident que la question est loin d'être réglée. Il faut en
parler et la réexaminer au cours de la 36e législature.
Le problème dans le secteur de l'agriculture ne se limite pas à la
Commission canadienne du blé. Il y a beaucoup d'autres questions
qu'on doit régler pour rendre l'agriculture viable au cours du siècle
prochain. C'est le cas, par exemple, de la question des transports.
Nous pourrions penser à ce qui s'est passé l'hiver dernier alors
que le grain était paralysé dans l'ouest du pays. Le ministre a fait
très peu pour résoudre ces problèmes. C'est un autre cas où le
ministre n'a absolument pas assumé ses responsabilités.
Le député libéral de Souris-Moose Mountain a présenté un
projet de loi d'initiative parlementaire qui donnerait davantage de
responsabilités aux chemins de fer. C'est une bonne chose. J'aime
cette façon de penser.
L'autre problème réside dans le fait que le gouvernement n'a pas
mis en place un système dans le cadre duquel on pénaliserait les
chemins de fer qui ne transportent pas le grain comme ils sont
censés le faire et qui les récompenserait lorsqu'ils s'acquittent bien
de leurs tâches. C'est un problème auquel il faut s'attaquer.
10156
J'appuie le député de Souris-Moose Mountain. Bien entendu,
lorsque ces choses se produisent, le gouvernement nous accuse de
rechercher la confrontation et de critiquer toutes les mesures
législatives présentées.
Je voudrais parler de la consultation un instant. Je trouve
intéressant que le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire
ait formé un comité chargé de parcourir le pays pour consulter les
agriculteurs et écouter les associations agricoles. Le ministre n'a
pas apprécié le rapport qu'il lui a présenté. Il n'a pas donné suite aux
recommandations de son comité.
(1145)
Cela me rappelle un grand nombre d'autres comités qui ont été
créés au cours de la législature actuelle et de législatures
antérieures. Certains membres bien pensants parcourent le pays,
écoutent les gens et font des recommandations, mais le
gouvernement de l'heure n'y donne aucune suite. On dépense des
millions de dollars pour toutes sortes de rapports qui finissent sur
les tablettes. J'estime qu'il s'agit là d'un grave problème.
Les agriculteurs de la circonscription de Moose Jaw-Lake
Centre seront d'accord avec moi pour dire que la première
modification à apporter à la commission du blé serait l'élection de
tous les membres du conseil d'administration. Les gens
conviennent que cela serait amplement suffisant pour l'instant.
D'autres modifications pourraient être apportées plus tard, mais,
avec celle-ci, nous aurons du moins une certaine emprise sur les
administrateurs. Ils seront tenus de nous rendre des comptes. S'ils
ne respectent pas les désirs de la majorité que nous formons, ils
seront remplacés. Cette façon de faire se rapproche beaucoup de
celle qui existe à la Chambre. C'est le bon côté de notre système.
Si, le 2 juin, les Canadiens ne sont pas en accord avec les
politiques du gouvernement, ils le remplaceront.
M. Benoit: C'est une hypothèse merveilleuse.
M. Kerpan: Assurément. Le député de Végréville sourit et a
toutes les raisons de le faire.
C'est une bonne chose que ce projet de loi ne soit pas adopté cette
semaine. Nous présumons tous que des élections seront déclenchées
ce week-end. C'est bien aussi. Pour ceux d'entre nous qui
reviendront à la Chambre pour la 36e législature, il sera primordial
que, en tant que Parlement, et non seulement en tant que
gouvernement et opposition, nous collaborions pour résoudre les
questions qui existent dans l'ouest ainsi que partout ailleurs au
Canada.
Au cours des trois dernières années et demie, le ministre de
l'Agriculture a très peu agi à l'égard des questions importantes.
Peut-être y aura-t-il un nouveau ministre de l'Agriculture au cours
de la 36e législature. Peut-être viendra-t-il d'un autre parti.
Je crois fermement qu'il y a de l'espoir pour l'agriculture dans
notre pays et qu'elle connaîtra un brillant avenir, mais il faudra agir
à partir de la base.
[Français]
Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le vice-président: La mise aux voix porte sur la motion no 1.
Plaît-il à la chambre d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
Des voix: Non.
Le vice-président: Que tous ceux qui appuient la motion
veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le vice-président: Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien
dire non.
Des voix: Non.
Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le vice-président: Le vote par appel nominal sur la motion est
différé. Le résultat du vote s'appliquera aussi à la motion no 17.
[Traduction]
M. Strahl: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il y
aurait peut-être consentement unanime pour que l'on décide que la
motion no 2 a été proposée et appuyée.
Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime pour autoriser
un député présent à la Chambre à proposer et appuyer la motion?
Des voix: Non.
[Français]
Le vice-président: J'ai demandé le consentement unanime de la
Chambre pour que quelqu'un d'autre présente la motion.
[Traduction]
Le député de Fraser Valley-Est a demandé le consentement
unanime, mais il a été refusé. La motion no 2 n'est donc pas à
l'étude. Il en va de même pour la motion no 3.
M. Strahl: Monsieur le Président, je crois que, du côté du
gouvernement, on a accepté d'étudier un autre projet de loi à ce
moment-ci. Nous devions débattre du projet de loi C-65 et c'est
pourquoi mon collègue de Kindersley-Lloydminster n'est pas à la
Chambre. Je pensais que c'était entendu.
(1150)
Si nous poursuivons le débat sur ce projet de loi, je demanderai
de nouveau le consentement unanime pour que la motion inscrite au
nom du député de Kindersley-Lloydminster puisse être proposée
et appuyée à ce moment-ci.
Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime pour autoriser
quelqu'un d'autre à proposer la motion?
Des voix: D'accord.
Une voix: Non.
10157
M. Keyes: Monsieur le Président, je me demande si nous
pouvons obtenir le consensus unanime pour suspendre les travaux
pendant cinq minutes, afin de clarifier cette question et d'accélérer
le rythme par la suite.
[Français]
Le vice-président: A-t-on le consentement unanime de la
Chambre pour suspendre la séance pendant cinq minutes?
Des voix: D'accord.
(La séance est suspendue à 11 h 51.)
_______________
[Traduction]
La séance reprend à 11 h 58.
M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du
gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): J'invoque le
Règlement, madame la Présidente. Je crois que vous constaterez
qu'il y a consentement unanime pour ajourner le débat sur le projet
de loi C-72 et pour aborder l'étude du projet de loi C-65.
Je pense que le député invoque le Règlement à juste titre, car il
s'agit d'une motion à l'étape du rapport qui porte sur le projet de loi
C-72.
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Avant de
passer à un autre recours au Règlement, je rappelle que le député a
demandé le consentement unanime. Y a-t-il consentement
unanime?
Des voix: D'accord.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Madame la
Présidente, j'ai deux rappels au Règlement.
À cause de problèmes de communication entre les partis, j'ai
demandé le consentement unanime pour que la motion inscrite au
Feuilleton au nom du député de Kindersley-Lloydminster puisse
être proposée et appuyée même si le député n'était pas présent. Le
consentement unanime a été refusé. Par conséquent, la motion a été
rayée du Feuilleton.
Nous ne discutons plus de ce projet de loi, mais je me demande si
nous pouvons obtenir le consentement unanime pour que la motion
puisse rester au Feuilleton jusqu'à ce que nous débattions ce projet
de loi ultérieurement.
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Y a-t-il
consentement unanime?
Des voix: D'accord.
M. Strahl: Madame la Présidente, je dois demander le
consentement unanime pour que tous les amendements au projet de
loi C-65 inscrits au nom de divers députés soient considérés comme
ayant été proposés et appuyés globalement, que les députés se
trouvent à la Chambre ou non. Un grand nombre de députés vont
parler de différentes motions.
(1200)
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Y a-t-il
consentement unanime?
Des voix: D'accord.
* * *
La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-65, Loi concernant
la protection des espèces en péril au Canada, dont le comité a fait
rapport avec des propositions d'amendement.
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Voici la
décision sur le regroupement des motions à l'étape du rapport du
projet de loi C-65, Loi concernant la protection des espèces en péril
au Canada.
Il y a 115 motions d'amendement inscrites au Feuilleton à l'étape
du rapport du projet de loi C-65.
Les motions nos 29, 39 et 114 sont inscrites uniquement au nom
du député de Nunatsiaq, qui vient de remettre sa démission. Elles ne
peuvent donc pas être mises à l'étude.
Les autres motions seront regroupées aux fins du débat de la
manière suivante.
Le premier groupe comprend les motions nos 1, 3, 4, 6, 7, 11, 19,
25, 27, 50, 54, 56 à 60, 62, 63, 65, 66 et 82 à 109.
[Français]
Groupe no 2: Les motions nos 2, 15, 16, 17, 21, 24, 26, 34, 35, 44,
45, 49, 55, 64, 74 et 81.
[Traduction]
Le groupe no 3 est constitué des motions nos 5, 8, 9, 10, 12, 13,
14, 18, 20, 22, 23, 31, 32, 46, 47, 51, 52, 61, 67, 68, 69, 70, 75, 79,
80, 110, 111 et 115.
[Français]
Groupe no 4: Les motions no 28, 29, 30, 33, 53, 71, 72, 76, 77, 78
et 112.
[Traduction]
Le groupe no 5 comprend les motions nos 36 à 43, 48, 73, 113 et
114.
On peut consulter les modalités du vote sur les motions de chaque
groupe au bureau de la Chambre. La présidence les rappellera aux
députés au moment du vote.
Je mets maintenant en délibération les motions nos 1, 3, 4, 6, 7,
11, 19, 25, 27, 50, 54, 56, 57, 58, 59, 60, 62, 63, 65, 66, 82, 83, 84,
85, 86, 87, 88, 89, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 99, 100, 101,
102, 103, 104, 105, 106, 107, 108 et 109.
M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD)
propose:
10158
Motion no 1
Que le projet de loi C-65, au préambule, soit modifié par substitution, à la ligne
28, page 1, de ce qui suit:
«retarder la prise de mesures pour»
Motion no 63
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié par adjonction, après la ligne
43, page 22, de ce qui suit:
«h.1) une indication et une estimation de l'impact sur les communautés installées
sur le territoire où l'on retrouve l'espèce, sur les travailleurs qui s'y trouvent et sur
les usagers du territoire;»
M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby, Réf.)
propose:
Motion no 3
Que le projet de loi C-65, dans le préambule, soit modifié par adjonction, après la
ligne 3, page 2, de ce qui suit:
«la conservation se trouvera améliorée en raison de la sensibilisation du public
chez lequel les considérations socio-économiques sont réunies à une éthique de
l'environnement afin de réaliser un développement durable;»
Motion no 25
Que le projet de loi C-65, à l'article 8, soit modifié par adjonction, après la ligne
11, page 9, de ce qui suit:
«(1.1) Il demeure entendu que pour l'application du paragraphe (1), les «coûts»
s'entendent des coûts supportés par une personne ou un organisme en raison d'une
perte commerciale découlant de la mise en oeuvre d'un programme ou d'une mesure
relatif à des activités de conservation des espèces sauvages touchant des biens-fonds
dont la personne ou l'organisme est propriétaire.»
Motion no 27
Que le projet de loi C-65, à l'article 8, soit modifié par substitution, à la ligne 25,
page 9, de ce qui suit:
«ou de la mesure et celles concernant la notification écrite à donner aux personnes
qui seront directement touchées par le programme ou la mesure.»
Motion no 56
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié par substitution, aux lignes 40
et 41, page 21, de ce qui suit:
«l'espèce est réalisable au point de vue technique, biologique et
socio-économique. Il donne avis de ses»
Motion no 59
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié par substitution, aux lignes 1
à 3, page 22, de ce qui suit:
«(5) Si le rétablissement de l'espèce est réalisable au point de vue technique,
biologique et socio-économique, le plan de rétablissement doit traiter des»
Motion no 101
Que le projet de loi C-65, à l'article 69, soit modifié par substitution, à la ligne 23,
page 36, de ce qui suit:
«dées dans le cadre du paragraphe 60(3). Au moment d'accorder un redressement
en vertu du présent article, il tient compte des facteurs scientifiques et socio-
économiques.»
L'hon. Sergio Marchi (ministre de l'Environnement, Lib.)
propose:
Motion no 4
Que le projet de loi C-65, au préambule, soit modifié par substitution, aux lignes 6
et 7, page 2, de ce qui suit:
«et appuyés; les intérêts-notamment socio-économiques-des communautés
doivent être pris en compte lors du développement et de la»
Motion no 58
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié :
a) par substitution, à la ligne 40, page 21, de ce qui suit:
«l'espèce est réalisable au point de vue techni-»
b) par substitution, à la ligne 2, page 22, de ce qui suit:
«réalisable au point de vue technique et biologi-»
c) par substitution, à la ligne 15, page 23, de ce qui suit:
«de l'espèce est irréalisable au point de vue»
Motion no 62
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié :
a) par substitution, à la ligne 22, page 22, de ce qui suit:
«succès, notamment sur le plan socio-économique, de chacune des activités de
recher-»
b) par substitution, à la ligne 40, page 22, de ce qui suit:
«cle 7 ou 8 en vue de promouvoir des actions volontaires ou des efforts»
c) par adjonction, après la ligne 43, page 22, de ce qui suit:
«h.1) une indication des terres faisant partie de l'habitat de l'espèce qui, pour
l'application de l'alinéa 110.1(1)d) de la Loi de l'impôt sur le revenu, sont
désignées comme fonds de terre sensible sur le plan écologique et dont le don
peut constituer une déduction fiscale;»
Motion no 90
Que le projet de loi C-65, à l'article 60, soit modifié par substitution, dans la
version anglaise, à la ligne 12, page 34, de ce qui suit :
«(b) caused or will cause significant harm to an individ-»
Motion no 98
Que le projet de loi C-65, à l'article 67, soit modifié par adjonction, après la ligne
10, page 36, de ce qui suit:
«(1.1) Dans toute action en protection, est réputée avoir exercé toute la diligence
voulue la personne qui se livre légalement à une activité dont elle n'a aucune raison
de croire qu'elle est susceptible de toucher l'individu, à l'habitat essentiel ou à la
résidence en question.»
Motion no 102
Que le projet de loi C-65, à l'article 69, soit modifié par substitution, à la ligne 23,
page 36, de ce qui suit:
«dées dans le cadre du paragraphe 60(3). Il tient alors compte des facteurs
scientifiques et socio-économiques.»
M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.) propose:
Motion no 6
Que le projet de loi C-65, dans le préambule, soit modifié par adjonction, après la
ligne 19, page 2, de ce qui suit:
«les mesures prises en vertu de la présente loi doivent l'être en fonction des
conséquences sociales et économiques qu'elles ont sur les groupes touchés;»
10159
Motion no 7
Que le projet de loi C-65, dans le préambule, soit modifié par adjonction, après la
ligne 19, page 2, de ce qui suit:
«le ministre compétent suspend l'application des dispositions de la présente loi
relatives aux plans de rétablissement et d'aménagement s'il est démontré au
ministre compétent que des mesures visant à protéger certaines espèces sauvages
sont prises par des propriétaires de biens-fonds ou par toute autre parties
intéressées ou que de telles mesures seront prises par ces parties dans un délai
raisonnable, la suspension de l'application de certaines dispositions de la présente
loi a pour but de renforcer la coopération entre les différentes paties intéressées,»
Motion no 11
Que le projet de loi C- 65, à l'article 2, soit modifié par adjonction, après la ligne
36, page 4, de ce qui suit:
«propriétaire d'un fonds de terre» Comprend toute personne qui loue un fonds de
terre du gouvernement fédéral.»
Motion no 19
Que le projet de loi C-65 soit modifié par adjonction, après la ligne 10, page 7, de
ce qui suit:
«3.3 Par dérogation à toute autre disposition de la présente loi, ne s'applique pas à
un propriétaire d'un fonds de terre toute disposition de la présente loi-à l'exception
des articles 31 à 33-ou toute disposition d'un règlement ou d'un arrêté d'urgence
pris en vertu de la présente loi qui aurait pour effet d'entraîner pour celui-ci une
dépense d'argent ou une perte financière quelconque.»
Motion no 54
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié par substitution, aux lignes 33
à 37, page 21, de ce qui suit:
«(3) Lorsque le ministre compétent reçoit, dans les douze mois suivant
l'inscription de l'espèce comme espèce menacée, en voie de disparition ou disparue
du pays, une requête signée par la majorité des propriétaires de fonds de terre visés à
l'alinéa 39b) lui demandant de tenir une ou plusieurs audiences publiques
concernant l'élaboration du plan de redressement, le ministre doit :
a) tenir au moins une audience publique à cet effet au lieu et dans le mois indiqués
dans la requête;
b) aviser les signataires de la requête de la date et du lieu de l'audience publique.
(3.1) Le plan de rétablissement est établi :
a) dans un délai de trois mois suivant la fin de la dernière audience publique tenue
en vertu du paragraphe (3);
b) à défaut d'audience publique tenue en vertu du paragraphe (3), dans l'année
suivant l'inscription de l'espèce comme espèce menacée, en voie de disparition
ou disparue du pays.»
Motion no 66
Que le projet de loi C-65, à l'article 39, soit modifié par substitution, aux lignes 17
à 20, page 23, de ce qui suit:
«39. Le plan de rétablissement est élaboré en consultation avec:
a) toute personne que le ministre compétent croit directement touchée ou
intéressée;
b) tout propriétaire d'un fonds de terre directement touché qui a indiqué par écrit
au ministre compétent son désir d'être consulté à cet égard.»
Motion no 87
Que le projet de loi C-65 soit modifié par adjonction, après la ligne 23, page 33,
de ce qui suit:
«59.1 Le ministre, par arrêté, suspend, pour une durée déterminée, l'application
des dispositions de la présente loi relatives aux plans de rétablissement et
d'aménagement ou certaines de celles-ci, s'il est démontré au ministre que des
mesures visant à protéger une espèce inscrite comme espèce menacée, en voie de
disparition ou disparue du pays sont prises par des propriétaires de biens-fonds ou
par toutes autres parties intéressées ou que de telles mesures seront prises par ces
parties dans un délai raisonnable.»
M. Darrel Stinson (Okanagan-Shuswap, Réf.) propose:
Motion no 50
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié:
a) par adjonction, après la ligne 10, page 21, de ce qui suit:
«(1.1) Le ministre compétent tient au moins une séance publique dans la région
visée par le plan de rétablissement afin d'entendre les observations des personnes
intéressées à collaborer à l'élaboration du plan de redressement.
(1.2) Le ministre compétent fait publier dans la Gazette du Canada et dans un
quotidien ou un hebdomadaire de circulation générale dans la région visée par le
plan de rétablissement, au moins soixante jours avant le début de toute audience
publique tenue par le ministre dans ladite région en vertu du paragraphe (1.1), un
avis comportant les éléments suivants :
a) la mention que le ministre compétent doit élaborer un plan de redressement et
tenir une audience publique à cet égard;
b) la date, l'heure et le lieu de l'audience;
c) la mention que toute personne intéressée à collaborer à l'élaboration d'un tel
plan doit transmettre au ministre compétent, sous forme électronique ou autre, au
moins trois jours ouvrables avant le tenue de l'audience publique, un avis
indiquant son nom et son adresse et le fait qu'elle est touchée ou intéressée.
b) par adjonction, après la ligne 26, page 21, de ce qui suit:
d.1) toute autre personne ou organisation qui transmet au ministre compétent,
sous forme électronique ou autre, au moins trois jours ouvrables avant le début de
l'audience visée au paragraphe (1.1) un avis indiquant son nom et son adresse et
le fait qu'elle est touchée ou intéressée.»
Motion no 57
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié par substitution, aux lignes 40
et 41, page 21, de ce qui suit:
«l'espèce est possible au point de vue technique, socio- économique et
biologique.»
Motion no 60
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié par substitution, aux lignes 2
et 3, page 22, de ce qui suit:
«possible au point de vue technique, socio-économique et biologique, le plan de
rétablissement doit traiter des»
Motion no 65
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié par substitution, aux lignes 11
à 16, page 23, de ce qui suit:
«(7) Le plan de rétablissement peut comporter des mesures limitées à
l'interdiction des activités qui influent directement sur les individus de l'espèce ou
leur résidence si le rétablissement de l'espèce est impossible au point de vue
technique, socio-économique ou biologique.»
10160
Motion no 82
Que le projet de loi C-65, à l'article 51, soit modifié par substitution, aux lignes 32
et 33, page 28, de ce qui suit:
«paragraphe (3), procéder, durant les heures nomrales d'affaires, à la visite de tout
lieu, s'il a des motifs raisonnables et probables de croire que s'y»
Motion no 83
Que le projet de loi C-65, à l'article 51, soit modifié par substitution, à la ligne 17,
page 29, de ce qui suit:
«l'autorisation écrite et attestée par témoins du propriétaire ou du locataire du
local»
Motion no 84
Que le projet de loi C-65, à l'article 52, soit modifié par substitution, aux lignes 38
et 39, page 29, et aux lignes 1 à 3, page 30, de ce qui suit:
«matière de perquisition et de saisie à l'égard d'un bâtiment seulement s'il a
l'autorisation écrite et attestée par témoins du propriétaire ou du locataire de ce
bâtiment.»
Motion no 85
Que le projet de loi C-65, à l'article 57, soit modifié par substitution, aux lignes 1
et 2, page 32, de ce qui suit:
«57. (1) Le ministre compétent accuse réception de la demande et en fait parvenir
une copie par courrier recommandé à chaque personne à qui la demande impute la
perpétration de l'infraction, dans les vingt jours»
Motion no 89
Que le projet de loi C-65, à l'article 60, soit modifié par substitution, aux lignes 27
à 36, page 33, et aux lignes 1 à 3, page 34, de ce qui suit:
«a) le ministre compétent n'a pas rempli les obligations que la présente loi lui
impose;»
b) il existe des motifs raisonnables et probables de croire qu'il y a collusion entre
le ministre compétent et une personne à laquelle une infraction à la présente loi est
imputée.»
M. Mike Scott (Skeena, Réf.) propose:
Motion no 86
Que le projet de loi C-65, à l'article 59, soit modifié par substitution, aux linges 14
à 17, page 33, de ce qui suit:
«copie du rapport envoyée à ces dernières doit mentionner les nom et adresse de
l'auteur de la demande.»
Motion no 88
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 60.
Motion no 91
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 61.
Motion no 92
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 62.
Motion no 93
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 63.
Motion no 94
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 64.
Motion no 95
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 65.
Motion no 96
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 66.
Motion no 97
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 67.
Motion no 99
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 68.
Motion no 100
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 69.
Motion no 103
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 70.
Motion no 104
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 71.
Motion no 105
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 72.
Motion no 106
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 73.
Motion no 107
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 74.
Motion no 108
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 75.
Motion no 109
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 76.
(1205)
M. Gar Knutson (Elgin-Norfolk, Lib.): Madame la
Présidente, nous faisons aujourd'hui un pas important en procédant
à l'étude du premier projet de loi fédérale jamais présenté pour la
protection des espèces en voie de disparition.
Il s'agit d'une mesure importante. Le gouvernement croit que
prévenir la disparition d'espèces est un objet honorable, car cela
assurera que nos enfants et nos petits-enfants reçoivent en héritage
un pays aussi riche en espèces sauvages que celui que nous
connaissons aujourd'hui.
De plus, en prévenant la disparition d'espèces animales, nous
veillons également à conserver un environnement sain pour
nous-mêmes. Il peut parfois paraître sans rapport que l'ours grizzly
ou la pie-grièche migratrice disparaissent, mais ces phénomènes
peuvent en eux-mêmes devenir des indicateurs des dommages que
nous causons et qui touchent les êtres humains et l'ensemble de la
planète.
Certains ont dit que le projet de loi va trop loin et qu'il accorde
une valeur trop élevée à la nature. Le gouvernement n'est pas
d'accord. D'autres disent qu'il ne va pas assez loin pour pourvoir
aux besoins des espèces en voie de disparition. Là encore, le
gouvernement n'est pas d'accord. Le projet de loi tâche d'établir un
équilibre entre les divers intérêts sur la planète. Le gouvernement
du Canada croit que nous sommes parvenus à un juste équilibre.
10161
La mesure à l'étude est fondée sur la prémisse que l'on peut
concilier les besoins de l'économie et ceux de l'environnement, que
l'on peut protéger les espèces en voie de disparition et conserver
quand même les emplois et une économie saine et florissante. Cela
traduit l'engagement du gouvernement envers le développement
durable.
Le projet de loi reconnaît aussi que la nature subit bien des
influences. Les hommes et les emplois font aussi partie de
l'équation. La perte d'emplois susciterait du ressentiment et de la
méfiance. Il nous faut agir avec le consentement de la population si
nous voulons qu'elle accepte des lois protégeant l'environnement.
Cette mesure législative comporte cinq grands volets.
Premièrement, le projet de loi créé un groupe indépendant de
spécialistes, de scientifiques, chargés de faire le point sur la
situation des espèces en péril au Canada.
Le projet de loi tente de retrancher toutes les considérations
politiques du processus de détermination des espèces menacées. Il
convient de noter que le gouvernement se fondera sur des données
scientifiques, et non des considérations politiques, des ouï-dire ou
des opinions mal informées, pour déterminer quelles espèces sont
menacées, quelles espèces ont besoin de protection et ce que nous
pouvons faire pour les protéger.
Ce groupe indépendant et autonome de spécialistes s'appellera le
Comité sur la situation des espèces en péril au Canada ou le
COSEPAC. Ses travaux seront fondés sur vingt années
d'expérience, ce qui devrait donner une certaine capacité juridique à
l'organisation.
Le COSEPAC fera des recommandations au gouvernement, qui
dressera une liste des espèces devant être protégées
immédiatement. Le comité comptera sur la compétence de ses
membres ainsi que les connaissances traditionnelles des
autochtones canadiens pour évaluer et déterminer les espèces à
inscrire sur sa liste.
Chaque année, la liste officielle des espèces en péril au Canada
sera publiée. En fait, la liste a été diffusée la semaine dernière. Le
tableau qu'elle brosse prouve à quel point cette mesure législative
est nécessaire. Le COSEPAC nous a appris que le nombre d'espèces
en péril au Canada a considérablement augmenté au cours de la
dernière année, passant de 276 à 291. Quinze espèces ont été
ajoutées à cette liste en l'espace d'une année seulement. Nous ne
pouvons plus tolérer cet état de choses.
Si la Loi sur la protection des espèces en péril au Canada avait été
en vigueur lorsque a paru la liste du COSEPAC, on aurait pu s'en
inspirer pour exiger des plans de rétablissement pour toutes les
espèces considérées comme menacées ou en voie de disparition.
Ces plans de rétablissement auraient été mis en oeuvre en temps
opportun. Tous les intéressés, y compris les propriétaires terriens,
les entreprises, les particuliers et le gouvernement, auraient
participé au développement et à la mise en oeuvre des plans. Sans
cette mesure législative, l'avenir de ces espèces est en suspens.
Ensuite, le projet de loi reconnaît qu'aucun gouvernement ne
peut à lui seul s'occuper de toutes les espèces en voie de disparition.
Les poissons nagent et les oiseaux volent sans se préoccuper des
frontières politiques. C'est pourquoi des partenariats s'imposent et
pourquoi il importait beaucoup que tous les gouvernements
s'entendent sur un accord national pour la protection des espèces en
péril, à Charlottetown, au début d'octobre 1996.
En octobre, les gouvernements fédéral et provinciaux se sont
engagés à adopter des mesures législatives complémentaires et à
établir des programmes pour la protection des espèces en voie de
disparition. L'accord prend appui sur la législation qui existe déjà
dans quatre provinces, à savoir: le Nouveau-Brunswick, le
Manitoba, l'Ontario et le Québec.
En outre, le projet de loi établit un conseil de ministres comme
mécanisme de collaboration entre les gouvernements fédéral,
provinciaux et territoriaux dans le but d'empêcher que des espèces
disparaissent par suite de l'activité humaine.
Avec ce projet de loi, le gouvernement fédéral fait sa part. La
mesure législative respecte les rôles traditionnels et
constitutionnels que chacun des gouvernements joue dans la
protection et la conservation de la faune. De nouvelles dispositions
reconnaissent de façon plus claire les pouvoirs provinciaux et
territoriaux dans la gestion des espèces animales en voie de
disparition.
(1210)
Troisièmement, les espèces fauniques qui traversent les
frontières internationales sont mieux protégées. Le projet de loi
reconnaît l'importance de travailler en collaboration avec d'autres
pays pour assurer la conservation des espèces en voie de disparition.
Lors des audiences de notre comité, nous avons appris que le
grizzli se déplace du nord du Manitoba jusqu'au sud de l'Alberta et
de la Colombie-Britannique. Il est protégé aux États-Unis, mais au
Canada, il ne le serait que dans le parc national Banff. Le projet de
loi à l'étude aidera à résoudre des problèmes comme celui-là. Il
nous permettra aussi de prendre des mesures immédiates pour
protéger des espèces fauniques exposées à un danger imminent
lorsqu'elles traversent nos frontières.
Ce mois-ci, le ministre de l'Environnement a signé une
entente-cadre de coopération avec le département américain de
l'Intérieur, pour assurer la protection et le rétablissement des
espèces fauniques en péril. Cette entente permet de mettre à profit
les excellentes relations que nous entretenons avec les États-Unis,
pour la gestion des espèces fauniques qui traversent les frontières.
Ensemble, nos deux pays assurent la gestion de plusieurs espèces
d'oiseaux migrateurs et autres. Le programme de rétablissement de
la grue blanche d'Amérique, qui a été couronné de succès, est
reconnu dans le monde entier comme un exemple parfait de
coopération et de partenariat entre deux pays poursuivant un
objectif commun.
Les autorités de nos deux pays ont accepté d'échanger de
l'information, de travailler ensemble à l'élaboration de plans de
rétablissement et d'instaurer un partenariat entre tous les paliers de
gouvernement, le secteur privé et la population, pour la
conservation des espèces fauniques et des écosystèmes dont elles
dépendent. Un plan de travail sera présenté au ministre de
l'Environnement et au secrétaire de l'Intérieur, en décembre
prochain.
10162
Le projet de loi mise sur les efforts déployés volontairement par
une vaste gamme de Canadiens, dont bon nombre ont appuyé le
ministre de l'Environnement lorsqu'il a déposé le projet de loi en
octobre dernier. Le gouvernement du Canada sait qu'il est
nécessaire et avantageux de travailler ensemble, au nom de nos
semblables. C'est une excellente nouvelle. Lorsqu'il y va de la
protection d'un oiseau qui couve ses oeufs sur un rocher, les
Canadiens ne veulent pas de chamaillerie politique au sujet du
secteur de compétence dont relève le rocher. Ils veulent que nous
nous assurions que l'oiseau puisse vivre et voler librement. La
nature doit avoir préséance sur nos querelles de compétence.
Quatrièmement, le projet de loi permettra à la population de
participer davantage à notre projet, celui de mieux protéger les
espèces. Les Canadiens peuvent participer à toutes les étapes du
processus, en proposant des espèces à inclure sur la liste, en
élaborant et en mettant en oeuvre des plans de rétablissement et en
participant à l'application de la loi.
Toute l'information sur le travail effectué en application de la loi
sera disponible grâce à l'établissement d'un registre public. Ce
projet de loi permettra à tous les Canadiens de juger si les espèces
sont protégées de la disparition et si les préoccupations
économiques et sociales liées aux ressources, aux usagers et aux
collectivités sont traitées de manière équitable.
Parmi les partenaires essentiels à l'effort national, on compte les
provinces, les territoires, les propriétaires de terres privées, les
agriculteurs, l'industrie, les milieux environnementaux et
scientifiques, les peuples autochtones et les particuliers. Tous ont
une importante contribution à apporter. Sont particulièrement
importants les peuples autochtones dont la gérance des terres a
toujours compris la protection de la faune.
Le gouvernement du Canada reconnaît l'importance de
l'importante contribution que les agriculteurs, les éleveurs et les
propriétaires fonciers ont apporté à la protection des espèces
menacées de disparition au Canada. L'opération relative à la
chouette des terriers dans les Prairies est un des nombreux exemples
qui montrent de quelle manière le secteur agricole a collaboré avec
les pouvoirs publics et les groupes environnementaux pour protéger
les espèces menacées d'extinction. La Loi sur la protection des
espèces en péril au Canada favorise justement la conclusion de ce
genre de partenariat.
Les particuliers pourront demander la tenue d'une enquête et
auront accès aux tribunaux pour intenter une action en protection
s'ils estiment que les mesures ne sont pas adéquatement appliquées.
Ils pourront intenter des poursuites au civil pour forcer le
gouvernement à remplir ses obligations. Ainsi, le gouvernement
sera forcé de rendre des comptes. Aux États-Unis, quand le
gouvernement ne remplit pas ses obligations environnementales,
les citoyens interviennent pour le forcer à le faire. Toutefois, si nos
pouvoirs publics font leur travail, les citoyens n'auront pas à les
poursuivre.
J'admets que cette disposition du projet de loi a été critiquée
parce qu'elle nous approche trop du modèle américain. Aux
États-Unis, d'aucuns ont dit que le droit du public de poursuivre le
gouvernement pour des questions environnementales a freiné le
développement, entre autres choses. Cependant, comparer le projet
de loi dont nous sommes saisis à la loi américaine, c'est un peu
comme comparer des pommes et des oranges.
Des mesures de sauvegarde contre les demandes futiles ou
vexatoires ont été prévues dans le projet de loi. Avant d'intenter une
action, l'intéressé doit demander au gouvernement d'ouvrir une
enquête et prouver ensuite devant le tribunal que le gouvernement a
agi d'une manière déraisonnable. Cette disposition constitue une
bonne protection contre les demandes futiles.
Enfin, le projet de loi est l'aboutissement de consultations qui ont
duré plus de deux ans et demi. Des réunions publiques ont été tenues
d'un océan à l'autre. Des documents de discussion ont été publiés et
un groupe de travail environnemental et industriel a passé près d'un
an à l'élaboration de propositions clés, dont 80 p. 100 se reflètent
dans ce projet de loi. Nous avons entendu les représentants des
secteurs de la pêche et des forêts et avons tenu compte de leurs
préoccupations. En outre, 94 p. 100 des Canadiens appuient le
projet de loi. Le gouvernement a reçu près de 80 000 lettres et
pétitions sur le sujet. La participation du public a été et demeure un
des éléments clés de la mesure législative.
(1215)
Le projet de loi prévoit un examen dans trois ans pour permettre
au gouvernement du Canada d'évaluer les premiers progrès et
d'apporter les modifications nécessaires à la loi.
Avec les amendements proposés aujourd'hui, nous voulons que
la protection des espèces menacées au Canada soit juste, équitable
et équilibrée. Pendant que le gouvernement surveillera les menaces
possibles à la faune et prendra les mesures correctives nécessaires,
les Canadiens, de leur côté, surveilleront le gouvernement. Ils ne le
laisseront pas, pas plus que l'industrie, revenir en arrière, et ils ont
bien raison. Ils tiendront tous les législateurs responsables de leurs
actes. Pour les générations futures, nous devons faire en sorte que la
faune qui existe au Canada au XXe siècle soit encore là au XXIe
siècle et au-delà.
La semaine dernière seulement, des experts nous ont dit que le
monarque, un papillon connu de tous les enfants canadiens, était en
danger. La Chambre ne pouvait recevoir message plus clair. Nous
avons besoin du projet de loi et nous en avons besoin dès
maintenant.
Le gouvernement du Canada tient à protéger efficacement les
espèces menacées dans notre pays. J'exhorte tous les députés à
appuyer le projet de loi.
[Français]
M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Madame la Présidente, il me fait
plaisir de prendre la parole sur le projet de loi C-65, mais vous
noterez que je prends la parole en remplacement de ma collègue de
Laurentides, parce que le projet de loi devait être adopté hier et ma
collègue de Laurentides a dû se rendre dans son comté pour régler
certaines choses aujourd'hui.
10163
Je suis content qu'on ait obtenu le consentement unanime pour
que les propositions d'amendement qui sont enregistrées au nom de
la députée de Laurentides soient bel et bien enregistrées à son nom,
puisque c'est elle qui a fait tout le travail, et c'est un excellent
travail.
J'en reviens maintenant aux propos sur le projet de loi C-65.
Voilà que nous revenons à la Chambre pour l'étude à l'étape du
rapport du projet de loi C-65, Loi concernant la protection des
espèces en péril au Canada.
Ce projet de loi est l'aboutissement d'une promesse des libéraux
dans leur fameux livre rouge, un livre rouge présenté depuis
maintenant près de trois ans et demi. Il a fallu tout ce temps aux
libéraux pour pondre ce projet de loi, alors que la vice-première
ministre en faisait, dès son élection, un cheval de bataille.
Aujourd'hui, les libéraux ramènent ce projet de loi uniquement pour
démontrer qu'ils portent un certain intérêt aux espèces et, par
ricochet, à l'environnement. Pourquoi? Parce que le bilan des
libéraux en matière d'environnement est fort mince, pour ne pas
dire inexistant. Ils doivent déposer quelque chose sur la table, à la
dernière minute, pour bien paraître avant le déclenchement des
élections.
Les libéraux, qui avaient promis mer et monde en
environnement, tombent aujourd'hui bêtement dans des
manoeuvres électoralistes. Dans tous les dossiers
environnementaux, notamment dans celui sur la réduction des gaz à
effet de serre, les libéraux ont marqué le pas. De la vice-première
ministre au ministre actuel, les libéraux ont été incapables de livrer
la marchandise. Tous les groupes environnementaux sont d'accord
sur la piètre performance des gens d'en face en environnement.
De l'autre côté de la Chambre, on parle, on tient de beaux
discours, on a même dit à plusieurs reprises, sur des tribunes
internationales, que le Canada jouait un rôle de leader mondial en
environnement. Quelle farce. Quelle mascarade de la part des
libéraux.
Le plus grand rôle qu'ils ont tenu est sans conteste celui de
motormouth, qu'on pourrait traduire en français par «gros parleur,
petit faiseur». Voilà leur bilan: rien que des paroles et des paroles,
qui n'ont eu aucun effet bénéfique pour l'environnement. Si leur
bilan est chétif, il faut certainement regarder-et je vois la
Présidente sourire-du côté de l'influence des ministres seniors,
des ministres ayant du poids au sein du Cabinet. Ainsi, il apparaît
clairement que les ministres associés aux affaires, à l'économie et à
la finance sont ceux qui mènent au sein du Cabinet et qui,
conséquemment, relèguent aux oubliettes le ministre de
l'Environnement et toute cette question.
Il est aussi important de regarder l'influence des lobbies en cette
matière. Là aussi, il est clair que les groupes environnementaux et
les écologistes ne feront pas le poids devant le monde des affaires et
de l'industrie. Malheureusement, les ministres influents du Cabinet
sont directement branchés sur ces lobbies de l'industrie et des
affaires. Ces ministres leur accordent toute leur attention, toutes
leurs oreilles.
Je voyais récemment un reportage sur l'importante question de la
réduction des gaz à effet de serre. Ottawa a formé un groupe
diversifié afin qu'il lui soumette des propositions pour diminuer ces
gaz.
(1220)
Ce groupe de travail, dont plusieurs groupes environnementaux
faisaient partie, s'est littéralement fait fermer les portes de plusieurs
avenues de réduction, particulièrement les avenues proposant des
mesures contraignantes et une possible taxe sur le carbone. Ces
propositions furent totalement mises à l'écart à la suite des
pressions de l'industrie regroupées dans un important lobby nommé
Friday Group. On n'entendit plus parler que de mesures volontaires
et la taxe sur le carbone disparut.
Pendant ce temps, on voyait le premier ministre lui-même sur des
tribunes albertaines en compagnie de la ministre des Ressources
naturelles de cette province et des hauts dirigeants de l'industrie.
Suivi le pacte fiscal de près de six milliards de dollars accordés à
cette même industrie.
En regardant ce reportage, on comprend bien maintenant
pourquoi le Canada ne peut atteindre ses objectifs de réduction et
ainsi remplir ses engagements pris lors du Sommet de Rio.
Le projet de loi C-65 émane d'une proposition législative de
l'ex-ministre publiée en août 1995. À partir de ce moment, un
groupe de travail fut formé, incluant des associations ayant des
intérêts divergents-des écologistes, des industries-autour d'une
même table, pour une rare fois. Un travail très important fut réalisé
par ce groupe et un rapport fut remis au ministre. Par ailleurs, un
accord fut signé à Charlottetown entre le ministre fédéral et les
ministres provinciaux et territoriaux concernant la protection des
espèces. Cet accord national fut signé en octobre 1996.
Enfin, le ministre déposait, à la Chambre, son projet de loi, le 31
octobre 1996. C'est à ce moment que commença la saga du projet de
loi C-65, un long cheminement marqué principalement par le
mécontentement de tous et par l'improvisation et l'incompétence
du ministre et de la secrétaire parlementaire.
Dès le dépôt du projet de loi, les environnementalistes et les
groupes sont venus dire au gouvernement que le projet de loi C-65
était nettement insuffisant et le qualifiaient de très petit pas pour la
protection des espèces. Les groupes ont immédiatement entrepris
leur démarche de pression auprès du ministre afin de modifier le
projet pour le rendre plus conforme à leur vision. Les groupes
voulaient que le fédéral se donne tous les pouvoirs sur les espèces,
de même que sur les habitats, peu importe les juridictions de
territoire ou leur propriété.
Les groupes environnementaux ont cette vision que le
gouvernement fédéral doit être le protecteur national et que, de ce
statut, le fédéral doit faire fi des autres juridictions. Selon mon
opinion, les groupes devraient quelque peu changer leur vision sur
cette question, car le fédéral est loin de recevoir la note de passage
en matière d'environnement.
De plus, les coupures au sein du ministère dénotent le peu
d'importance qu'accordent les libéraux à l'environnement. De par
son éloignement du terrain des vaches, permettez-moi l'expression,
le fédéral ne constitue certes pas le palier idéal. Il n'est pas plus apte
non plus à protéger et à conserver l'environnement.
Vous devinerez que pour nous, députés du Québec, il est difficile
d'acheter la vision nationale de ces groupes. Nous avons, au Qué-
10164
bec, des lois et des règlements en environnement qui sont tout à fait
convenables, et ce, depuis 1989. Certains de nos règlements et
certaines de nos lois furent même pris en exemple par le fédéral.
Alors, pour nous, tout ce qui signifie empiétement, ingérence et
dédoublement est inacceptable.
En plus des groupes environnementaux insatisfaits, l'industrie
ajoutait également son mécontentement. Dans le domaine des
mines, des forêts et de l'agriculture, les intervenants dénonçaient
vigoureusement le projet de loi.
À cette voix, ajoutons celle des autochtones qui disaient que leurs
compétences et leurs connaissances n'étaient pas reconnues par le
projet de loi. Enfin, les provinces et les territoires unissaient leurs
voix dans une lettre adressée au ministre afin de dénoncer le
non-respect du principe de l'accord national, de même que
l'ingérence du fédéral dans leur champ de compétence. Ce n'est pas
juste le Québec qui l'a demandé.
À la suite de ce mécontentement généralisé, le comité a entrepris
l'étude article par article. Une centaine d'amendements furent
déposés par des députés de tous les partis. Les amendements du
Bloc québécois visaient principalement le respect des juridictions.
Nous voulions que les provinces puissent gérer et contrôler leurs
espèces sur leur territoire.
(1225)
Malheureusement, tous nos amendements furent défaits par la
majorité libérale du comité. Menée par la secrétaire parlementaire
qui, elle aussi, a cette vision nationale et cette vision canadienne de
l'environnement, la majorité libérale a rejeté nos suggestions,
préférant se rabattre sur des accords d'équivalence et des ententes
avec les provinces pour gérer les espèces, mais toujours avec le
fédéral qui tient le gros bout du bâton.
Pour nous, c'est inacceptable. Bien que la liste des espèces du
Québec soit, à ce moment-ci, assez restreinte, le Québec possède la
législation pour s'occuper efficacement de cette question.
D'ailleurs, le ministre du Québec, qui a vivement dénoncé le projet,
mentionnait que l'accord national devait permettre au fédéral et aux
provinces de s'entendre sur des espèces à protéger, point à la ligne.
C'était ça, l'accord.
Dès que le fédéral commence à jouer dans les habitats, les
habitats essentiels, les résidences, il commence à pénétrer sur des
territoires qui ne sont pas de sa juridiction. Enfin, les amendements
que nous soumet aujourd'hui le ministre ne corrigent d'aucune
façon la question des empiétements. Les députés du Bloc québécois
seront contre ces amendements, contre le projet de loi, entendu que
nos amendements seront, comme d'habitude, rejetés par les
libéraux.
Je croyais que l'entente de Charlottetown visait à permettre une
collaboration entre les provinces et le fédéral. On voit qu'encore
une fois, le fédéral, à la veille des élections, est en train d'empiéter
sur les juridictions québécoises, et ce n'est pas de cette façon qu'on
va régler le dilemme.
[Traduction]
M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia,
Réf.): Madame la Présidente, le projet de loi C-65 est un exemple
flagrant des préjugés qu'a le gouvernement libéral contre les gens
qui vivent de la terre. Il les considère tous comme des êtres
irréfléchis, irresponsables et insensibles que le gouvernement
tout-puissant doit empêcher de détruire l'environnement,
d'exterminer toute forme de vie animale ou végétale et, en plus de
cela, de tirer sur leurs voisins déplaisants avant le petit-déjeuner
avec leurs armes à feu non enregistrées.
Le projet de loi C-65 écarte la collaboration en faveur de la
coercition de la part de l'élite urbaine, qui se croit moralement et
intellectuellement supérieure aux agriculteurs, aux éleveurs et aux
propriétaires de terrains boisés. Au lieu de consulter les habitants
des régions rurales et de collaborer avec eux, le gouvernement a
choisi de les menacer avec des amendes et des peines
d'emprisonnement.
Les nombreux amendements proposés montrent à quel point ce
projet de loi est imparfait. J'attire l'attention de la Chambre sur la
motion no 86. Cette motion concerne l'alinéa 59(3)b), qui interdit
au gouvernement de divulguer le nom du plaignant dans une action
relative à l'environnement.
C'est si scandaleux que j'ai d'abord cru qu'il s'agissait d'une
erreur d'impression. Cela ressemble tout à fait aux propositions
faites par les provinces concernant l'établissement de lignes
téléphoniques pour dénoncer les fraudeurs de l'aide sociale. Dans
une société civile, il est fondamental que les accusateurs ne puissent
pas garder l'anonymat, sauf dans les cas où la divulgation de leur
identité pourrait mettre leur vie en danger. Je ne crois pas qu'un
agriculteur accusé d'avoir tué un renard véloce engagerait un tueur
pour éliminer son accusateur. Le droit d'un accusé de faire face à ses
accusateurs est un principe de justice fondamental. Même les
meurtriers ont ce droit.
Si on garantit l'anonymat, rien n'empêchera une personne, que
ce soit un environnementaliste ou un voisin mécontent, de déposer
une plainte vexatoire. Une personne qui dénoncerait sournoisement
une autre personne qui pourrait fort bien ne pas avoir enfreint cette
loi ne s'exposerait à aucune pénalité, à aucun sacrifice économique
ni même à aucune marque de désapprobation de la part de la
collectivité. Je ne comprends pas comment cette disposition a pu
échapper au comité.
(1230)
Les motions nos 88, 91 à 100 et 104 à 109 visent à éliminer les
articles 60 à 76 du projet de loi. Ce sont les articles qui donnent aux
simples citoyens le droit d'intenter des poursuites au civil s'ils
croient que le Service canadien de la faute fait preuve de laxisme
dans l'exécution de ses fonctions.
Lorsque l'État présente un projet de loi visant à protéger ce qu'il
estime être l'intérêt supérieur de la société, il doit prévoir dans ce
projet de loi toutes les mesures nécessaires pour en assurer
l'efficacité et non pas déléguer des pouvoirs à des individus qui
peuvent très bien avoir leurs visées personnelles.
10165
Nous n'avons pas besoin d'un gouvernement de style procédurier
comme aux États-Unis. Ces articles ouvrent la porte au harcèlement
des propriétaires terriens par des groupes écologistes radicaux. Il est
déraisonnable et injuste de s'attendre à ce que des agriculteurs, des
grands éleveurs et des propriétaires de boisés, dont beaucoup
doivent se débattre pour assurer leur subsistance, se défendent
contre de riches groupes de protection de l'environnement, dont
beaucoup reçoivent des fonds du gouvernement.
Parmi les articles visés, j'attire particulièrement votre attention
sur l'article 65, qui permet à des tiers d'intervenir dans une action,
tenez-vous bien, «pour assurer une représentation appropriée et
équitable de tous les intérêts privés et publics en cause». Rien que
ça! Cette disposition a été formulée par un gouvernement qui n'a
discuté de la documentation qui a servi à la préparation du projet de
loi que dans des villes.
Voici ce que disait Nancy Greene Raine de ces petites
consultations à la libérale: «Il y a tout lieu de s'attrister quand des
mesures législatives peuvent être rédigées sans que les personnes
touchées aient leur mot à dire.»
Je voudrais revenir un peu en arrière et parler de l'article 52. Cet
article autorise les perquisitions sans mandat. Cela me paraît
familier. Je serais presque porté à croire que cet article a été rédigé
par le ministre de la Justice, dont le dédain bien connu pour les
procédures équitables et les droits individuels est illustré par les
dispositions très semblables du projet de loi C-68. Le ministre et le
gouvernement n'aiment peut-être tout simplement pas les habitants
des régions rurales. Peut-être aussi les libéraux sont-ils en plein
délire autocratique.
L'un des pires éléments du projet de loi C-65, c'est qu'il n'existe
aucune disposition claire sur l'indemnisation du propriétaire terrien
qui perdrait une partie ou la totalité de ses moyens de
subsistance-par exemple à cause de l'obligation d'enclore des
points d'eau-en raison d'une action intentée par le gouvernement
ou par de simples citoyens au nom d'une espèce menacée. Cela
aussi est caractéristique de l'attitude du gouvernement envers les
citoyens ordinaires.
Si un gouvernement encourage les Canadiens à dénoncer leurs
voisins ou à intenter des poursuites judiciaires contre eux au nom de
l'intérêt supérieur, ce même gouvernement devrait, en toute équité,
prévoir des mesures qui permettent aux personnes visées par des
poursuites de recouvrer tous leurs frais juridiques lorsqu'ils sont
innocentés d'une accusation d'infraction à la loi.
L'absence de dispositions permettant de traiter équitablement ces
personnes pourrait, en fin de compte, mettre en danger les espèces
animales que le projet de loi vise précisément à protéger. La
Chambre doit savoir qu'aux États-Unis, des sociétés immobilières
font déjà paraître de la publicité qui atteste de l'absence d'espèces
menacées sur des terres à vendre. Comment peuvent-elles en être
aussi sures? Pourquoi tiennent-elles à ce que ces terres n'abritent
aucune espèce menacée? Peut-être quelqu'un est-il intervenu en
catimini pour faire en sorte qu'il ne reste aucune espèce menacée
sur ces terrains. Si la société immobilière a pris la peine d'attester
de l'absence d'espèces menacées sur ces terrains, c'est peut-être
parce que personne ne voudrait les acheter sachant qu'il s'y trouve,
par exemple, des rats-kangourous.
À cause de cela, les Américains ont aujourd'hui fortement
l'impression que leur loi de protection de l'environnement, vieille
de 21 ans, n'a profité qu'à une espèce de prédateurs, à savoir les
avocats, mais pas aux espèces menacées.
(1235)
En janvier, le député de Davenport aurait déclaré ce qui suit: «Si
nous voulons que la population accepte ce genre de réglementation,
nous devons y aller en douceur au début.» Voilà qui en dit long.
L'inquiétant dans tout cela n'est pas tellement le côté sournois des
propos du député, mais le fait qu'il croit probablement sincèrement
que le projet de loi C-65 représente vraiment une approche
raisonnable et pondérée.
Je voudrais prendre les quelques instants qu'il me reste pour citer
quelques extraits de mémoires présentés au comité permanent par
l'association canadienne des éleveurs de bovins. Ce passage est très
révélateur: «Le projet de loi dont le comité est saisi équivaut à une
approche à l'américaine de la protection des espèces menacées. Il
repose principalement sur la réglementation et la coercition et
contient très peu de dispositions qui encouragent la coopération et le
partenariat volontaires. Selon nous, la loi dans sa forme actuelle
créera un conflit entre les propriétaires fonciers et les groupes de
conservation et elle nuira à la survie de la faune sur les terres
privées.»
Plus loin dans le même mémoire, on peut lire ce qui suit: «Ce
projet de loi empiète sur les droits des Canadiens, en particulier sur
leur droit de posséder des biens et d'en jouir. Nous croyons que
l'érosion du droit à la propriété est nuisible pour la faune et les
espèces menacées. Par ailleurs, la manière dont le gouvernement a
protégé jusqu'ici les espèces qui relèvent directement de son
autorité et qui ne se trouvent pas sur des terres privées, notamment
la morue de l'Atlantique et le saumon du Pacifique, n'inspire guère
confiance quant à sa capacité de maintenir et de mettre en oeuvre
des mesures de protection à long terme.
[Français]
M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Madame la
Présidente, le gouvernement joue un jeu enfantin, présentement, à
quelques heures du déclenchement des élections.
Il amène à la Chambre des projets de loi qui, il le sait très bien,
vont mourir au Feuilleton lors du déclenchement des élections,
prévu pour dimanche après-midi à Shawinigan.
Il y a à peine quelques minutes, nous discutions d'un projet de
loi, semble-t-il très attendu des producteurs céréaliers de l'Ouest, le
projet de loi C-72, promis avec le nez de Pinocchio qu'il serait
adopté en cette Chambre lors de la 35e législature, et qui va mourir
au Feuilleton.
Quelques heures plus tard, pour se donner une belle jambe, le
ministre de l'Environnement présente le projet de loi C-65 qui, à
première vue, semble louable. Mais lorsqu'on regarde les points
l'un après l'autre, on s'aperçoit que, encore une fois, le
gouvernement fait fausse route.
Je vous lis le titre de la loi et vous allez comprendre que c'est très
louable: Loi concernant la protection des espèces en péril au
Canada. Est-ce que vous êtes contre cela? Bien sûr que non, et moi
non plus. Mais lorsqu'on regarde le projet de loi C-65, article par
article,
10166
on se rend bien compte que le ministre de l'Environnement fait
fausse route, et je vous dis pourquoi.
Tout d'abord, je vous donne un exemple. Le gouvernement a
établi des actions dites positives envers certaines espèces en voie de
disparition. Écoutez bien, je vous donne l'exemple de la morue.
Il y a à peine trois ans, le ministre des Pêches de ce
gouvernement, prévoyant que la morue, dans le golfe et sur la côte
atlantique, était en voie de disparition, a pris une action positive:
interdiction de pêcher la morue. Exactement ce qu'il fallait faire.
Cependant, quelques années plus tard, à la veille du
déclenchement des élections, les morues se sont multipliées par un
chiffre effarant. La longueur des morues est telle qu'on ne peut
même plus les mettre dans notre assiette tellement elles ont profité.
Donc, à quelques jours des élections, le ministre des Pêches autorise
la pêche à la morue. Ça, c'est intelligent. Pour se gagner des votes,
c'est intelligent, mais pour l'environnement, pour les morues qui
sont en voie de disparition, ce n'est par vargeux.
(1240)
Je vais vous donner un autre exemple. Le faucon pèlerin est
l'oiseau le plus rapide au monde. Lorsqu'on regarde des films
d'époque ou de l'Antiquité, on voit le faucon pèlerin dressé pour
aller attaquer un adversaire par un geste du propriétaire, et c'est très
bien. Il est en voie de disparition ici. Ce n'est pas parce qu'on défait
ses nids ou qu'on le tue-le problème est beaucoup plus profond
que cela-c'est à cause de l'environnement, des gaz que nous
rejetons dans l'atmosphère, des métaux lourds, notamment le
mercure. Le résultat est que la maman pond des oeufs, et l'écail
étant ultra mince, lorsque vient le temps d'incuber les oeufs, les
parents les écrasent. C'est dû à un problème de pollution.
Qu'a fait la vice-première ministre pendant les 18 mois au cours
desquels elle occupait la fonction de ministre de l'Environnement?
Rien dans ce domaine. Que fait le nouveau ministre de
l'Environnement, toujours bien vêtu, dans ce dossier? Rien. Là, il
voudrait protéger les espèces en voie de disparition. Mais ce qu'il a
oublié, c'est qu'il a été devancé par quatre provinces, le Québec,
l'Ontario, le Manitoba et le Nouveau-Brunswick, qui ont déjà leurs
propres règles, leurs propres lois pour protéger les espèces en péril.
Maintenant, il voudrait faire des chevauchements, dédoubler les
ministères, dédoubler les réglementations et dire ensuite que cela va
coûter moins cher. Ça, c'est intelligent.
En 1989, l'Agence de protection fut créée au Québec, non pas par
un parti souverainiste, mais par Robert Bourassa lui-même qui
faisait partie de la même équipe que les libéraux. Voyez-vous, on va
dédoubler encore. Le Québec, l'Ontario, le Manitoba et le
Nouveau-Brunswick représentent au moins 60 p. 100 du territoire
canadien. C'est encore une fois non intelligent de la part du ministre
de l'Environnement.
Ce qui est pire, c'est que le gouvernement fédéral va s'approprier
des domaines qui ne relèvent pas de sa compétence. Ce n'est pas
rare que le fédéral, avec ses gros sabots, arrive dans le champ des
provinces et disent: «Ôtez-vous de là, c'est moi qui arrive». Par
exemple, il va s'occuper des espèces transfrontalières.
Je vous donne un exemple. C'est un animal qui peut changer de
province ou de pays. Prenons l'exemple des lièvres. Le territoire
d'un lièvre, c'est connu si vous étudiez le mode de vie des lièvres,
n'est guère plus d'un kilomètre carré. Cependant, si votre lièvre est
près de la frontière américaine, il ne pourrait pas arriver de temps en
temps qu'il traverse la frontière sans visa? Oui. Je prends l'exemple
du lièvre, parce que le territoire du lièvre est très petit.
Prenons maintenant le cas d'un loup. Le territoire d'un loup, d'un
coyote, est 100 fois plus grand, donc 100 kilomètres carrés. Alors,
un loup est appelé à voisiner le côté américain, le côté québécois et
le côté ontarien. Donc, il deviendrait une espèce qui pourrait être
incluse dans les espèces transfrontalières. Or, c'est inadmissible,
puisque ce n'est pas un oiseau migrateur comme le canard.
J'ouvre une parenthèse pour le bénéfice de ceux qui nous
écoutent à la maison. Vous savez que si vous allez à la chasse,
l'automne, à la perdrix, au lièvre, à l'ours noir ou au chevreuil, vous
devez avoir un permis du Québec. Mais si vous désirez aller à la
chasse au canard ou à l'oie blanche, il faut se présenter au bureau de
poste-au bureau de poste, c'est intelligent encore-et acheter un
permis dit fédéral pour les oiseaux migrateurs. Je conviens que les
oiseaux migrateurs doivent être gérés, en tout cas dans notre
système actuel, par le fédéral. Mais le lièvre, le renard, le loup,
l'ours noir et le chevreuil relèvent des provinces.
(1245)
Un autre point qui me chicote touche les fameuses nominations.
Vous le savez, et je vous vois encore sourire, je suis allergique au
patronage et aux fameuses nominations faites, soit par le
gouverneur en conseil ou encore, comme on le dit si bien dans le
projet de loi C-65, sur recommandation de notre bon ministre de
l'Environnnement qui ne connaît pas grand-chose pour sauver
justement les espèces en voie de disparition. Il n'écoute que ses
fonctionnaires. C'est lui qui aura la charge de nommer les neuf
membres qui siégeront sur ce fameux comité.
Bien sûr, ils seront rémunérés-rien ne se crée et rien ne se
perd-après avoir été nommés pour récompense politique, comme
ça s'est produit dans ma circonscription: la présidente du conseil
d'arbitrage à la Commission d'assurance-emploi-vous savez de
qui il s'agit, je crois l'avoir dit hier-est la petite soeur de la
candidate libérale dans le comté de Frontenac-Mégantic. Elle est
peut-être compétente, mais elle est d'abord et avant tout libérale.
Auparavant, il y avait un président qu'on a dû remplacer par
quelqu'un d'autre pour une raison majeure. Mais on n'a pas tenu de
concours, et on a dû procéder de la même façon dans votre
circonscription, pour nommer le directeur du scrutin des prochaines
élections qui seront annoncées dimanche pour le 2 juin prochain.
C'est encore une fois scandaleux qu'on se serve de nominations
dites partisanes pour protéger les espèces en voie de disparition.
Ici, dans le projet de loi C-65, on parle également de terres
domaniales. Je respecterais que le ministre de l'Environnement dise
«sur mes terres au Canada». Par exemple, dans le parc de la
Mauricie ou dans le parc Forillon en Gaspésie, qu'on dise qu'on ne
tuera pas l'orignal ou la perdrix sur ces terres, d'accord; mais si
10167
l'orignal ou la perdrix sort de ces terres, eh bien, écoutez, ce
gouvernement fédéral n'a pas acheté le pays.
Sur ma ferme, chez nous, il y a des chevreuils qui y viennent, et
pendant la saison de la chasse, l'ami du directeur de scrutin de ma
circonscription vient chasser le chevreuil chez nous. Alors, quand le
chevreuil traverse de l'autre côté de la rue, il n'est plus sur ma terre,
et je ne peux pas dire au chasseur: «Va le tuer, il est là-bas», mais
plutôt: «Tu as le droit de chasser, mais chez nous seulement.»
Alors, que le gouvernement fédéral se mêle de ses affaires, qu'il
protège les animaux en voie de disparition, oui, mais qu'il regarde
d'abord où est le bobo pour après essayer de guérir le problème.
[Traduction]
M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, je
suis heureux d'intervenir à l'étape du rapport du projet de loi C-65
sur le groupe d'amendements no 1.
Les amendements du groupe no 1 portent sur trois points de
préoccupation majeurs. Premièrement, l'approche choisie pour
protéger les espèces en voie de disparition privilégie l'application
de sanctions plutôt que la coopération.
Deuxièmement, l'indemnisation. On ne prévoit aucune forme
d'indemnisation acceptable.
Troisièmement, la possibilité de perquisition et saisie. Le projet
de loi donne le droit à quiconque d'intenter une action contre une
personne qui, à son avis, a causé une atteinte à une espèce en voie de
disparition.
Ces amendements portent sur ces trois points. Plusieurs ont été
proposés par moi-même, d'autres par le député de Swift
Current-Maple Creek-Assiniboia, notre porte-parole pour
l'environnement, le député de New Westminster-Burnaby, le
député de Skeena, et d'autres députés réformistes.
(1250)
Plusieurs amendements dans ce groupe viennent du
gouvernement, ce qui montre que ce projet de loi n'a pas été bien
pensé. C'est une chose que nous avons constatée lorsque nous avons
examiné le projet de loi et les amendements proposés par d'autres
députés. Ce groupe d'amendements porte sur les trois grands sujets
de préoccupation de cette mesure législative.
Pour commencer, je voudrais dire quelques mots au sujet du
projet de loi C-65, Loi sur la protection des espèces en péril. Je ne
crois pas que qui que ce soit trouve à redire quant à l'intention de ce
projet de loi. Le gouvernement a présenté cette mesure législative
dans le souci de protéger les espèces menacées de disparition-un
souci que nous partageons tous.
Toutefois, quand on examine le projet de loi de façon réaliste et
qu'on y pense bien, s'il devait être adopté, même avec les
amendements que nous examinons aujourd'hui, les risques seraient
probablement plus grands pour les espèces en voie de disparition
que s'il n'y avait pas de loi. Je m'explique.
Imaginons qu'un agriculteur, un éleveur, un travailleur forestier
ou le propriétaire d'une terre à vocation commerciale à la périphérie
d'une ville trouve sur sa terre une espèce en voie de disparition ou
un habitat où pourraient vivre des individus d'une espèce en voie de
disparition qui inscrite sur la liste.
Par exemple, il se peut qu'on trouve sur leur propriété une espèce
menacée ou un habitat qui pourrait accueillir une espèce menacée.
La personne visée sait que la loi en vigueur est sévère et qu'elle ne
pourra pas simplement faire preuve de coopération pour la
protection de cette espèce. Elle risque une amende de 1 million de
dollars ou même plus, et on pourrait la forcer à assumer les frais de
cour si des poursuites étaient intentées contre elle.
On pourrait forcer cette personne à clôturer une portion de sa
terre pour la protection de cette espèce, à ses frais et sans
indemnisation. Un dénonciateur anonyme, peut-être un voisin avec
qui elle a eu maille à partir, pourrait la dénoncer aux autorités sans
qu'elle sache jamais de qui il s'agit. De l'avis des députés, que
fera-t-elle à la perspective de devoir assumer de tels coûts, amendes
et procédures?
Dans bien des cas, des gens dans cette situation croiront qu'il n'y
a pas de chances à prendre, même s'ils préféreraient contribuer à
protéger cette espèce. Faire vivre leur famille est plus important que
protéger l'habitat d'une espèce en péril. Dans bien des cas, je pense
qu'ils détruiraient l'habitat et peut-être même l'espèce.
Ce n'est pas ce que je veux et je suis sûr que ce n'est pas ce que
veut le gouvernement. Toutefois, c'est exactement ce que ferait
probablement la mesure législative, si elle était adoptée. C'est
inacceptable et nous devons faire quelque chose pour empêcher
cela.
Certains des amendements que les réformistes ont proposés
aideraient considérablement s'ils étaient adoptés. Les amendements
que je propose portent sur la question de l'approche coopérative.
Plusieurs de mes amendements proposent que si le propriétaire ou
l'utilisateur d'une propriété qui abrite une espèce en péril ou a un
habitat pour une espèce en péril peut démontrer qu'il protégera
volontairement l'espèce, en collaboration avec d'autres personnes
intéressées, on éviterait d'avoir recours aux parties punitives du
projet de loi, qui sont d'ailleurs l'essentiel de celui-ci. Cela
donnerait une certaine protection contre le gouvernement qui a eu la
main passablement lourde avec ce projet de loi.
(1255)
J'ai présenté des amendements dans le domaine de
l'indemnisation, tout comme le député de New
Westminster-Burnaby. Ces amendements feraient que le
propriétaire ou l'utilisateur d'un terrain n'aurait à supporter
entièrement les frais encourus.
Le projet de loi contient des mesures inhabituelles et
inacceptables en matière de perquisition et de saisie. Il permet
également à un accusateur anonyme de dénoncer un voisin. Les
députés de Swift
10168
Current-Maple Creek-Assiniboia, de Skeena et d'autres ont
proposé des amendements qui aideraient dans ces domaines.
La mesure législative n'a pas été mûrement réfléchie. Son
intention est bonne, mais pas sa réalisation. Le mieux à faire serait
de l'annuler. Le parti qui formera le gouvernement après les
élections pourra alors s'attaquer à la question de manière plus
efficace. C'est ce qui arrivera si c'est le Parti réformiste qui forme le
prochain gouvernement. J'espère que les libéraux feront de même
s'ils reviennent au pouvoir.
Il y a plus de 100 amendements qui ne résoudront pas
convenablement toutes les questions qu'il faut régler.
Au nom de tous ceux qui dépendent de la terre pour gagner leur
vie-qu'il s'agisse d'agriculteurs, d'éleveurs, d'exploitants
forestiers ou miniers, ou encore de gens qui ont des propriétés
commerciales aux abords des villes-et qui pourraient se trouver
dépouillés par la mesure proposée, je dis reléguons ce projet de loi
aux oubliettes. Si la majorité tient à l'adopter, alors qu'elle accepte
au moins les amendements que nous avons proposés. Au moins ils
réduiraient les conséquences fâcheuses de la mesure.
[Français]
M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Madame la Présidente, il
me fait plaisir de prendre quelques minutes pour intervenir sur le
projet de loi C-65, quoique tout le monde dans cette Chambre sache
évidemment que ce que nous sommes en train de faire, c'est de
garder la Chambre occupée.
On s'attend à ce que les élections soient déclenchées
incessamment, et aujourd'hui, hier, avant-hier et depuis une
semaine, le gouvernement tente par tous les moyens possibles de
gagner du temps, de faire passer le temps. Donc, aujourd'hui, il
nous présente ce projet de loi qui, on le sait très bien, ne dépassera
pas l'enceinte de cette Chambre. Jamais ce projet de loi n'aura
l'occasion d'être sanctionné et d'être mis en vigueur.
Quoiqu'il contienne un mécanisme d'inscription sur la liste des
espèces désignées, de même qu'un processus pour veiller au
rétablissement des espèces en péril, ce projet de loi contient plus de
cent articles qui devraient être revus complètement, retournés à la
table à dessin, parce qu'il ne répond nullement aux attentes des gens
consultés.
Le comité a consulté beaucoup d'organismes. Par contre, on n'a
pas tenu compte de ces consultations. Ce sont des consultations
bidon qui ont été tenues. Les revendications, les observations des
organismes n'ont pas été prises en compte. Ce n'est pas la première
fois que ce gouvernement agit de la sorte. On l'a vu d'ailleurs avec
d'autres projets de loi où, pour lui, la consultation n'est qu'une
forme, soit pour dépenser de l'argent ou faire dépenser de l'énergie
à des gens. Cela coûte très cher en temps. Est-ce qu'on tient compte
de ces opinions-là? Absolument pas.
(1300)
Ce projet de loi devrait être révisé entièrement pour d'autres
raisons également. Ce n'est pas seulement une question de
consultation. Ce projet de loi ne respecte pas une autre belle
promesse faite par ce gouvernement et surtout par ce premier
ministre qui, dans le discours du Trône du 27 février 1996, disait, et
je cite: «Le gouvernement fédéral proposera aux provinces une
formule de partenariat considérablement améliorée dans des
domaines, tels que la gestion de l'environnement et l'habitat des
poissons d'eau douce.»
Ce que fait le gouvernement, c'est précisément le contraire des
propos du premier ministre. Au lieu d'intégrer les instances
provinciales dans le processus de désignation et de rétablissement
des espèces menacées ou en voie de disparition, ce gouvernement
les exclut. C'est encore une belle promesse non tenue.
Le projet de loi C-65 ne fait absolument rien en ce sens, pire, les
agissements du ministre libéral de l'Environnement sont des plus
douteux. Il convoque d'abord une rencontre des ministre
provinciaux de l'Environnement pour leur soutirer un accord de
principe sur la protection des espèces menacées. À peine quatre
semaines plus tard, il dépose son projet de loi qui, à bien des égards,
va complètement à l'encontre de l'accord de principe qu'il avait
obtenu à ce moment-là.
Je vais vous citer les paroles du ministre de l'Environnement du
Québec, même s'il a participé à ces rencontres, même s'il a signé
l'accord. Dans un communiqué, il disait: «Nous ne pouvions rester
indifférents au fait que cet accord ouvre la porte au chevauchement
entre l'éventuelle législation fédérale et la loi déjà en vigueur
depuis 1989 au Québec, une loi qui fonctionne bien et qui donne de
très bon résultats. Nous risquons de vivre de nouvelles lourdeurs
administratives plutôt que de consacrer nos énergies à ce qui nous
tient réellement à coeur, le sort des espèces menacées.» Voilà ce
qu'écrivait le ministre québécois de l'Environnement au ministre
fédéral de l'Environnement.
En cours de route, les événements lui ont donné raison, on n'a
qu'à voir le projet de loi actuel. Il multiplie continuellement les
chevauchements. Ce que le Québec reproche principalement à ce
projet de loi, c'est que le fédéral change complètement, à tout bout
de champ, les règles du jeu en établissant plus que le territoire sur
lequel se trouve une espèce. Cela a aussi aussi son importance aux
fins de déterminer la juridiction applicable. Il tente même de
s'arroger plus de pouvoirs en élargissant la portée de la définition de
«territoire fédéral».
Le projet de loi lie les gouvernements fédéral et provincial, alors
que plusieurs provinces s'opposent à ce projet de loi. Encore une
fois, le fédéral veut imposer sa juridiction, alors qu'il avait plutôt
promis une harmonisation. Donc, ce projet de loi menace
directement les compétences de juridiction provinciale sous
prétexte de vouloir rencontrer les exigences de la Convention
internationale sur la biodiversité. Le gouvernement libéral tente de
s'ingérer dans le champ de compétence des provinces.
(1305)
Ce gouvernement multiplie les chevauchements. Dans tous les
domaines, notamment dans le développement régional, il y a une
grande incursion du fédéral. On passe par-dessus la tête des
provinces, on négocie directement avec les municipalités et les
organis-
10169
mes, qu'ils soient communautaires, humanitaires ou touristiques.
On se fout de la compétence des provinces.
Ce projet de loi est également inquiétant, puisqu'il prévoit la
possibilité, pour le fédéral, de négocier, et je le répète, directement
avec les administrations municipales. Cela donne au ministre le
pouvoir de s'ingérer en matière d'environnement puisque la mise en
oeuvre, et je dis bien la mise en oeuvre, de mesures et de
programmes reliés à des activités de conservation des espèces
sauvages peut couvrir un vaste éventail d'activités, sans
nécessairement respecter les pouvoirs constitutionnels.
Plus particulièrement, le ministre pourra outrepasser les
gouvernements provinciaux en négociant encore une fois
directement avec les municipalités. D'ailleurs, le Bloc québécois a
déposé à cet effet plusieurs amendements qui consistent à impliquer
davantage les instances provinciales. Par contre, la majorité libérale
a ignoré ces amendements.
J'aimerais également vous entretenir du pouvoir discrétionnaire
que ce projet de loi accorde au ministre. En effet, le ministre de
l'Environnement devient le maître d'oeuvre de l'application de ce
projet de loi. Il a la possibilité de décider des nominations au
Comité sur la situation des espèces en péril au Canada. Il a l'autorité
de décider de l'inscription d'espèces. Il a l'autorité de mettre en
oeuvre le plan de redressement ou de ne pas le faire. Donc, toutes les
décisions lui appartiennent.
En ce qui concerne le Comité sur la situation des espèces en péril
au Canada, le ministre verra lui-même à sa composition. On sait
qu'il sera composé de neuf membres et que le ministre aura la
latitude de nommer qui il veut. C'est, encore une fois, une structure
où ce gouvernement pourra récompenser des amis du régime, ceux
qui remplissent les caisses électorales du Parti libéral, ou encore
peut-être, réconforter des candidats libéraux défaits aux élections.
[Traduction]
M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Madame la
Présidente, c'est avec plaisir que je participe au débat sur le projet
de loi C-65 et sur les amendements. Avant d'offrir une analyse
critique de ce projet de loi, je tiens à dire que le Parti réformiste et
moi-même sommes catégoriquement en faveur de la protection
responsable des espèces en péril. Cependant, nous n'appuyons pas
le projet de loi C-65 dans sa forme actuelle. Quand je parle du projet
de loi, je parle également des amendements qui s'en viennent.
Avant d'expliquer pourquoi nous prenons cette position,
permettez-moi de dire à la Chambre que cette mesure législative a
déclenché un tollé général, tant dans ma circonscription qu'ailleurs
au Canada.
(1310)
Je veux citer M. Roy Staveley, vice-président directeur par
intérim de la B.C. Hydro: «J'aimerais maintenant aborder la
question de la participation publique. B.C. Hydro convient que les
Canadiens devraient avoir la possibilité de mettre en commun leurs
connaissances et de participer aux efforts de protection et de
rétablissement des espèces en danger. La façon la plus efficace de
procéder est de s'en tenir à un processus ouvert et transparent. Nous
trouvons que la Loi concernant la protection des espèces en péril au
Canada devrait renfermer davantage de dispositions prévoyant la
consultation des parties en cause, du début jusqu'à la fin du
processus, c'est-à-dire de l'inscription d'une espèce sur la liste à
l'élaboration et à la mise en oeuvre du plan de rétablissement de
cette dernière.
«La meilleure façon de protéger les espèces en danger est de
collaborer avec les intervenants clés. Cependant, selon sa
formulation actuelle, le projet de loi entraîne un chevauchement des
pouvoirs de réglementation fédéraux, provinciaux et territoriaux, ce
qui n'est conforme ni à la tendance à l'harmonisation et à l'action
intergouvernementale en matière de protection environnementale ni
à l'accord national et ce qui entraînera sans doute des conflits de
compétences, des dédoublements, des difficultés d'exécution et
d'administration, ainsi que de la confusion dans la population et une
répartition inefficace des ressources déjà rares.»
J'aime bien comment l'honorable Stephen Kakfwi, ministre des
terres et des ressources renouvelables du gouvernement des
Territoires du Nord-Ouest, résume la situation: «Le problème
fondamental du projet de loi déposé au Parlement, c'est qu'il n'est
pas conforme à l'esprit et à l'objectif du travail remarquable
accompli par tous les paliers de gouvernement, dont le
gouvernement fédéral, en vue d'adopter une approche nationale
coopérative pour défendre les intérêts des espèces menacées de
disparition. L'ironie, c'est que les meilleures intentions ont été
affirmées, mais que ce projet de loi détruira peu à peu les meilleurs
plans.»
Le tollé s'est aussi manifesté à l'échelle locale, dans
Cariboo-Chilcotin. Permettez-moi de lire à la Chambre certaines
lettres que j'ai reçues. Un résident de Williams Lake affirme: «Ce
projet de loi apaisera bien peu nos inquiétudes quant aux espèces
menacées, mais il déclenchera une guerre judiciaire et ouvrira la
porte aux groupes qui se moquent de son impact socio-économique
ou du tort qu'il pourrait causer aux moyens de subsistance des
travailleurs forestiers, des agriculteurs, des éleveurs, des mineurs et
des autres travailleurs. Les tribunaux et les avocats feront choux
gras de ce projet de loi.»
Le conseil municipal de Quesnel a adopté une résolution pour
exprimer son opposition au projet de loi C-65 parce qu'il ne fait pas
obligation de tenir compte des répercussions socio-économiques et
communautaires, d'offrir une solution de rechange aux travailleurs
touchés dans les communautés et qu'il ne garantit aucunement que
les travailleurs, les collectivités et les autres parties intéressées
participeront à l'élaboration du plan de redressement.
Le conseil du village de Clinton a déclaré que le projet de loi
C-65 suscitait des préoccupations majeures pour les grandes
industries de la Colombie-Britannique, surtout dans les secteurs des
forêts et des mines. Ces deux secteurs sont le nerf de l'économie de
la Colombie-Britannique et ils seront durement touchés par la mise
en oeuvre du projet de loi C-65. Le conseil est d'avis qu'Ottawa
devrait écouter.
Je ne peux qu'abonder dans le même sens que le conseil. Ottawa
devrait écouter ce que les Canadiens pensent du projet de loi C-65.
Les citoyens et les municipalités que je viens juste de citer ont des
préoccupations légitimes et ils ont raison de s'inquiéter. Ils savent
que le projet de loi C-65 est une mauvaise mesure législative et ils
10170
souhaitent que le gouvernement écoute ce qu'ils ont à dire et
réagisse à leurs préoccupations.
Un certain nombre des raisons pour lesquelles le projet de loi
C-65 est une mauvaise mesure législative ont déjà été invoquées
dans les déclarations que je viens de lire, mais j'aimerais insister sur
certaines d'entre elles. C'est pour ces raisons que le Parti réformiste
ne saurait accepter le projet de loi dans sa forme actuelle.
Premièrement, le Comité sur la situation des espèces en péril au
Canada, qui comprendrait neuf membres, tous nommés par le
ministre, déterminera les espèces en péril, l'étendue du danger et
l'habitat à considérer comme essentiel, puis conseillera le ministre
sur les mesures à prendre pour la récupération de certaines espèces.
(1315)
Rien ne garantit que les parties intéressées participeront à
l'élaboration du plan de redressement. Il s'ensuit que les
propriétaires de terres privées pourraient être forcés de prendre des
dispositions particulières à l'égard de certaines espèces en péril.
C'est ainsi qu'un éleveur pourrait devoir séparer par une clôture une
partie de ses terres afin de protéger une espèce en péril faisant son
nid au sol contre les animaux qui paissent dans les environs.
Malheureusement, le projet de loi C-65 n'offre aucune
indemnisation à l'éleveur pour l'utilisation de son matériel, pour
son temps, pour le fait qu'il doive laisser dormir une terre
productive ou encore pour la diminution de la valeur de sa propriété.
À ce propos, permettez-moi d'exposer à la Chambre une
situation qui s'est produite en Ontario il y a environ cinq ans.
Mme Strumillo-Orleanowicz possédait une propriété non bâtie de
100 acres près de Smiths Falls, en Ontario. Pour monter une affaire,
elle avait projeté de se départir d'un terrain constructible.
Malheureusement, la ministre des Ressources naturelles lui a refusé
sa permission. Pourquoi? Le voisin de Mme Strumillo-Orleanowicz
possédait à côté de sa propriété des terrains habités par la
pie-grièche migratrice, une espèce en voie de disparition. Pour aider
à protéger cet oiseau, la province a désigné 123,5 acres en tant
qu'habitat essentiel de cette pie. Ainsi, Mme Strumillo-Orleanowicz
ne pouvait céder ses terrains ni les exploiter pour réaliser des
profits. Les créanciers ont saisi la propriété et elle a tout perdu. Le
gouvernement ne l'a pas indemnisée.
La deuxième lacune du projet de loi C-65, c'est qu'il menace les
droits et le gagne-pain de propriétaires de terrains responsables en
élargissant les droits des groupes militants de s'adresser aux
tribunaux pour empêcher la mise en valeur des ressources. Chose
intéressante, ceux qui dénoncent un voisin peuvent demeurer
complètement anonymes et ainsi, l'accusé ne peut confronter
l'accusateur.
Par exemple, aux termes de l'article 60 de la loi, un bureaucrate
ou un militant écologiste peut poursuivre un travailleur forestier, un
éleveur, un propriétaire de terrain ou une entreprise qui, selon lui. a
causé une atteinte importante à une espèce en voie de disparition ou
à son habitat. Il se peut donc que les tribunaux soient inondés de
poursuites contre des propriétaires de terrains.
Comment ces propriétaires vont-ils faire face à la possibilité
d'être poursuivis devant les tribunaux? Leur réaction sera négative
et ce sont les espèces en voie de disparition qui seront les perdantes
en fin de compte. Ainsi, selon des éleveurs de bétail qui ont
témoigné devant le comité de l'environnement, les propriétaires de
terrains devront envisager sérieusement des façons d'éviter d'être
exposés à des poursuites et de perdre des revenus à la suite des
restrictions imposées en ce qui concerne l'utilisation de leurs
terrains. La solution la plus évidente et la moins coûteuse consistera
à éliminer tout habitat faunique sur leur terrain et, plus
particulièrement, tout habitat qui attire des espèces qu'on pourrait
considérer à un moment donné comme menacées ou en voie de
disparition. Tout semble indiquer que la législation américaine sur
les espèces en voie de disparition a déjà eu cet effet non désiré dans
certaines régions des États-Unis.
La troisième lacune du projet de loi C-65 réside dans le fait qu'il
foule aux pieds des principes fondamentaux de justice. Par
exemple, aux termes du projet de loi, les autorités peuvent saisir des
biens privés sans dédommagement, si on considère que la propriété
en question est un habitat essentiel pour une espèce en voie de
disparition.
De plus, le projet de loi C-65 donne la possibilité aux
bureaucrates de procéder à des perquisitions et de saisir des biens
privés sans mandat, si les circonstances l'exigent. C'est une
disposition très inquiétante alors que le gouvernement est prêt à
faire fi des droits et privilèges historiques des gens pour imposer
son propre point de vue sur la façon dont les choses devraient se
passer. Cette disposition est tout à fait inacceptable pour les
Canadiens.
Le Parti réformiste a soumis 42 amendements au projet de loi
C-65. Aux termes de ces amendements, le ministre devrait
examiner les répercussions socio-économiques avant de
recommander que des mesures ne soient prises. Nous voudrions
qu'on prévoie un dédommagement, qu'on s'engage à préserver les
espèces en voie de disparition et qu'on obtienne la coopération de
tous les intéressés.
(1320)
[Français]
M. Maurice Godin (Châteauguay, BQ): Madame la Présidente,
il me fait plaisir de prendre la parole sur le projet de loi C-65, Loi
sur la protection des espèces en péril au Canada.
Quoiqu'il existait quelques lois fédérales qui permettaient au
gouvernement fédéral d'intervenir en faveur de la protection de ces
espèces, aucune législation fédérale directement vouée à la
protection des espèces menacées n'était cependant en vigueur. Ce
n'était pas le cas, pourtant, pour la province de Québec qui avait,
elle, sa propre loi depuis 1989, ainsi que dans d'autres provinces
comme l'Ontario, le Manitoba et le Nouveau-Brunswick.
On avait mis en place un organisme, en 1978, qui regroupait
certains organismes, comme des agences gouvernementales, des
provinces, certains territoires, quatre organismes fédéraux et trois
organismes de conservation nationaux.
Or, avant que ce projet de loi ne soit présenté, le ministre de
l'Environnement a réuni, à Charlottetown, ses homologues des
provinces en vue d'élaborer ce projet de loi. On dit souvent qu'il y a
eu un accord de principe. Mais quatre semaines plus tard, cet accord
10171
de principe a été obtenu sans qu'on ait déposé le projet de loi ou les
textes comme tels et l'on sait que cela différait énormément.
Le ministre du Québec, David Cliche, disait, le 26 novembre
1996, et je le cite: «Le ministre fédéral vient de déposer à la
Chambre des communes un projet de loi qui inquiète énormément la
province de Québec. Je tiens à le mettre en contexte parce que ceci
témoigne de la difficulté des relations fédérales-provinciales. C'est
ainsi que récemment, je défendais les intérêts du Québec et je
représentais le Québec au niveau de l'environnement et de la faune
à Charlottetown. Nous nous étions entendus, nous avions même
signé un accord à cet effet-comme je le disais tout à l'heure-que
si le fédéral déposait une législation visant la protection des espèces
menacées de juridiction fédérale, ceci devrait se faire dans le
respect des juridictions provinciales, notamment des juridictions
territoriales.»
Je cite toujours M. Cliche: «Nous pensions avoir convenu avec
Ottawa du principe suivant, qui est simple pourtant, et je pense que
c'est là tout le problème de ce projet de loi: si nous convenons
qu'une espèce est menacée, il est du ressort de celui qui a juridiction
sur le territoire et l'habitat de cet animal de faire en sorte qu'il soit
protégé, afin que l'animal soit bien protégé dans son habitat
naturel.»
Or, on est devant un projet de loi, encore une fois, duquel, en
résumé, je pourrais dire ceci: le gouvernement fédéral tente de
s'octroyer une juridiction provinciale, tout simplement pour
raffermir son option centralisatrice et dominatrice par la
justification de la Convention sur la biodiversité. On s'aperçoit que
tel n'est pas le cas. On tente de limiter, d'établir une loi qui ne
respecte pas ce qui existe déjà dans les provinces. Encore une fois,
dans un autre domaine, nous allons nous retrouver avec deux lois
qui vont tout simplement nous apporter des problèmes quant à
l'application.
(1325)
Quels sont les problèmes majeurs qu'on retrouve présentement?
Il y en a quatre. Le premier: on dit que le projet de loi C-65 menace
directement la compétence des juridictions provinciales. C'est le
fond du problème de cette loi. On vient tout simplement dans une
juridiction qui appartient aux provinces et on tente, par ce projet de
loi, de dicter à la province ce qu'elle devrait faire dorénavant.
En effet, sous prétexte de vouloir rencontrer les exigences de la
Convention internationale sur la biodiversité, comme je l'ai dit il y a
un instant, le gouvernement libéral tente de s'ingérer dans les
champs de compétence provinciale. C'est le premier problème
rencontré avec cette loi.
Le deuxième problème: le projet de loi C-65 ne respecte pas le
partage des pouvoirs prévu dans la Constitution-j'en parlerai dans
quelques instants-et l'interprétation qui en a toujours été faite,
notamment parce qu'il repose sur une lecture beaucoup plus large
de la définition de son territoire, et parce qu'il ne respecte pas la
responsabilité constitutionnelle conjointe qu'il partage avec les
provinces sur certaines espèces.
Le troisième problème majeur: le projet de loi C-65 octroie au
ministre de l'Environnement un large pouvoir discrétionnaire,
notamment celui de décider de la nomination des membres du
COSEPAC. On sait que le COSEPAC est justement le comité qu'on
avait mis en place en 1978, mais le travail de cet organisme était
bénévole. Selon ce projet de loi, les membres de cet organisme
seront payés et ils seront choisis par le ministre.
Finalement, le quatrième gros problème: le projet de loi C-65, au
lieu d'intégrer les instances provinciales dans le processus de
désignation de rétablissement des espèces menacées et en voie de
disparition, les en exclut. Cette attitude est en complète
contradiction avec les prétentions des libéraux, plus
particulièrement des déclarations du ministre de l'Environnement
et du premier ministre, lors du discours du Trône, qui tenaient un
discours d'harmonisation et de partenariat.
On s'aperçoit, si on regarde la Constitution, comme on peut s'en
douter, que la protection des espèces et de leur habitat n'est pas
prévue dans le partage des compétences en vertu de la Loi
constitutionnelle de 1867. Ce n'est pas clair, ce n'est pas bien
défini.
Cependant, en vertu de cette loi, les provinces ont juridiction sur
l'administration des terres publiques appartenant à la province,
qu'on retrouve à l'article 92 concernant la propriété et les droits
civils, et sur toutes les matières d'une nature purement locale ou
privée. Ces pouvoirs sont suffisamment larges pour permettre aux
provinces de légiférer sur la faune et la flore, tant sur les terres
publiques provinciales que sur les propriétés privées.
En un mot, on s'aperçoit que dans la Loi constitutionnelle de
1867, les responsabilités ne sont pas parfaitement définies.
Cependant, on voit que les provinces ont autant de juridiction au
niveau du territoire que le fédéral. Aujourd'hui, on dépose une loi
qui élimine pratiquement complètement la responsabilité
provinciale, pour établir, une fois pour toutes, comme on l'a vu dans
tant d'autres lois, la responsabilité fédérale. En somme, c'est un
problème de dédoublement et de gaspillage.
(1330)
Je termine en répétant, comme je l'ai dit il y a quelques instants,
que les membres de ce fameux comité, en place depuis 1978, qui
travaillaient bénévolement, seront dorénavant payés, ce qui devient
une dépense additionnelle. De plus, ils seront choisis par le
ministre.
* * *
[
Traduction]
M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du
gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la
Présidente, une consultation a eu lieu entre les partis au sujet d'une
motion que je voudrais présenter. Je propose:
Que la Chambre accepte de séparer la Partie III actuelle du Budget des dépenses en
deux nouveaux documents, un rapport sur les plans et les priorités et un rapport de ren-
10172
dement, que tous les ministères et organismes devront soumettre, à titre de projet
pilote pour l'exercice 1997-1998, à l'examen des comités compétents:
1. dans le cas du rapport sur le rendement des ministères, à l'automne pour
coïncider avec le Rapport du président sur l'examen;
2. dans le cas des Rapports sur les plans et les priorités, y compris les données
financières détaillées établies en fonction de la structure des crédits en vigueur, au
plus tard le dernier jour de séance précédant le 31 mars, pour renvoi aux comités
et rapport à la Chambre conformément au paragraphe 81(4) du Règlement.
Pour l'information de la Chambre, je crois qu'il y a eu des
consultations avec le député réformiste de St-Albert et le député
bloquiste de Saint-Hyacinthe-Bagot. J'ai l'autorisation signée.
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Le
député a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour
présenter sa motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
* * *
La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-65, Loi
concernant la protection des espèces en péril au Canada, dont le
comité a fait rapport (avec des propositions d'amendement); et des
motions nos 1, 3, 4, 6, 7, 9, 11, 25, 27, 50, 54, 56 à 60, 62, 63, 65, 66
et 82 à 109.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Madame la
Présidente, je suis heureux de traiter de la Loi sur la protection des
espèces en péril au Canada.
En Colombie-Britannique, plus que dans toute autre province
peut-être, les lois sur la protection de l'environnement, des espèces
en péril et de toutes les autres espèces, notamment des ours,
abondent dans le programme politique. Cette question est
amplement traitée dans nos documents. Nous avons des rédacteurs
pour les questions environnementales. En Colombie-Britannique,
une foule de gens se préoccupent de l'environnement. C'est
peut-être à cause de l'habitat de notre océan, des rivières, du
saumon, ou je ne sais quoi, mais peut-être aussi de l'air salin. Quoi
qu'il en soit, les gens se soucient de l'environnement.
M. Morrison: Les libéraux sont-ils en péril là-bas?
M. Strahl: Ils craignent peut-être que les libéraux soient une
espèce en péril. Juste parce que nous sommes à la veille d'élections,
nous ne pouvons pas le présumer. Je sais avec certitude que les
conservateurs le sont, mais ne nous lançons pas dans des questions
de forme.
Je voudrais mentionner deux ou trois préoccupations qu'ont les
gens à l'égard des lois sur l'environnement. La vaste majorité des
habitants de la Colombie-Britannique estiment que l'information
publique et la sensibilisation en matière d'environnement arrivent
presque en tête de la liste de leurs préoccupations sur le plan
politique. Qui sait pourquoi?
Ma circonscription reçoit 60 ou 70 pouces de pluie chaque année.
Toutes les activités, allant de la manutention du fumier sur les
fermes laitières à la construction des chemins d'exploitation
forestière dans les montagnes des environs, suscitent de graves
préoccupations environnementales du fait que l'eau risque toujours
d'emporter une route jusque dans le champ d'un agriculteur. Ces
problèmes préoccupent les politiciens et inquiètent vraiment les
gens de ma région.
D'un autre côté, certains craignent qu'une mesure législative
comme celle dont nous sommes saisis n'empiète tellement sur leurs
activités économiques et ne les restreigne qu'ils ont l'impression de
ne jamais pouvoir se lancer dans une activité nouvelle sans être
rappelés à l'ordre par le gouvernement ou critiqués pour avoir
apparemment nui à l'environnement. En poussant à l'extrême, il
suffirait que la population concentrée dans la vallée du bas Fraser
respire pour constituer une menace pour l'environnement, mais il
faut composer avec cela le mieux possible.
(1335)
Tel qu'il est proposé, le projet de loi ne représente pas la
meilleure solution au problème des espèces en péril au Canada. Il
est trop interventionniste. Il ne tient pas compte de l'activité
économique terrestres qui ne présente pas de ans risques, que ce soit
l'agriculture, l'élevage ou l'exploitation forestière.
Je voudrais citer un exemple. Avant d'être député, j'étais
entrepreneur en exploitation forestière. J'ai passé toute ma vie dans
la forêt, proche de l'environnement. Il y a une dizaine d'années, le
problème de la chouette tachetée, par définition une espèce en péril,
a causé tout un émoi dans la vallée du bas Fraser. À ceux qui
l'ignorent, je précise que le territoire généralement attribué à la
chouette tachetée s'étend sur toutes les forêts humides côtières du
nord-ouest du Pacifique, aux États-Unis et jusqu'à quelques
centaines de milles en Colombie-Britannique.
Les Américains, qui ont des lois sur la protection des espèces en
péril semblables aux nôtres, ont jugé le problème de la chouette
tachetée tellement grave dans ces forêts qu'ils en ont interdit
l'accès. Ils ont mis un frein à l'exploitation forestière. Les villes
dont c'était la principale activité sont devenues des villes fantômes.
Des dizaines de milliers de travailleurs ont perdu leur emploi. Seule
la chouette tachetée était heureuse. Les pertes économiques ont
totalisé des milliards de dollars.
La peur entourant la chouette tachetée s'est répandue vers le
nord, jusqu'en Colombie-Britannique où on a vu apparaître des
patrouilles de protection de la chouette tachetée. On a engagé pour
l'été des étudiants d'universités, surtout des diplômés en biologie.
Deux par deux, ils se rendaient tard le soir, question de ne pas
perturber l'environnement, dans les forêts que nous exploitions et
ils stationnaient leurs camionnettes de camping. Ils faisaient jouer
des enregistrements de hululements de chouettes tachetées. S'ils
croyaient entendre une autre chouette tachetée répondre au loin,
s'ils pouvaient entendre un hululement dans les environs, ils
faisaient une marque sur leur carte pour indiquer qu'il y avait une
autre chouette tachetée quelque part, tout près. Même s'ils ne
l'avaient pas vue, ils savaient qu'elle existait. S'ils avaient entendu
une chouette hululer dans la nuit, ils en concluaient qu'il fallait faire
cesser d'abattre des arbres dans tout le bassin hydrographique. Qui
sait s'il y avait vraiment ou non des chouettes tachetées dans le
secteur? Personne ne les avait jamais vues, mais il y en avait
peut-être.
10173
Pour montrer à quel point tout cela devenait ridicule, leurs cartes
indiquaient non seulement que l'habitat de la chouette tachetée
s'étendait sur plusieurs centaines de milles à l'intérieur de la
Colombie-Britannique, mais aussi que ces oiseaux établissaient
leurs nids dans des secteurs situés entre 2 500 et 3 500 pieds
d'altitude. C'est ce qui convient le mieux pour l'exploitation
forestière. J'ai fait une bonne partie de ma carrière d'exploitant
forestier à ces niveaux d'altitude, et jusqu'à 4 500 pieds.
C'est vraiment l'heure des confidences. Un jour, nous
construisions un chemin dans une vallée où personne n'avait jamais
vu de chouettes tachetées ni entendu dire qu'il s'en trouvait.
Personne ne savait vraiment de quoi cet oiseau avait l'air. Nous
avons trouvé par hasard un nid dans un arbre et, parole d'honneur,
c'était un nid de chouette tachetée. Un tel animal existait donc, et il
nichait dans cet arbre. Nous avons donc cessé d'abattre des arbres et
interrompu la construction du chemin. Nous sommes descendus
voir les environnementalistes au bureau du Service des forêts pour
leur dire que nous avions vu une chouette tachetée. Nous étions allés
au sommet de la montagne et nous avions vu une chouette tachetée.
Ils étaient pas mal excités. Cependant, après avoir consulté leurs
cartes, ils nous ont dit: «Vous construisez un chemin à 4 000 pieds.
Cela ne correspond pas à l'habitat des chouettes tachetées, car elles
ne nichent pas au-dessus de 3 500 pieds. Il ne peut donc pas s'agir
d'une chouette tachetée.» Nous leur avons soutenu qu'il s'agissait
bien d'une chouette tachetée, que nous l'avions vue et qu'ils
devaient venir le constater. Ils ont vérifié de nouveau sur leur carte
et nous ont répondu: «Non, l'habitat de la chouette tachetée que
nous avons établi ne va pas plus haut que 3 500 pieds d'altitude; il
est donc impossible que votre oiseau soit une chouette tachetée.
Vous pouvez faire passer votre chemin sur l'emplacement de
l'arbre.» Nous avons refusé de le faire. Nous avons réussi à
contourner l'arbre et avons épargné la chouette tachetée. Voilà qui
montre bien à quel point il peut être ridicule parfois de demander à
une société industrielle moderne de prendre les chouettes tachetées
en considération. On en trouve une, et parce que l'oiseau ne
correspond pas à certains critères imaginaires des
environnementalistes, ces derniers ne s'en préoccupent pas.
(1340)
Un autre site où vivait une chouette tachetée se trouve dans un
secteur d'exploitation forestière où j'ai passé ma jeunesse avec mes
parents. Des universitaires sont venus examiner l'oiseau qui avait
bâti son nid juste à côté du principal chemin forestier par où
passaient de 40 à 50 chargements de billes de bois tous les jours. Les
universitaires vont au pied de ce gros arbre et observent aux
jumelles cette chouette tachetée qui se tire très bien d'affaire dans
une zone où il se fait de l'exploitation forestière depuis 40 ans.
Ce projet de loi ne devrait pas être adopté tel quel parce qu'il a
trop d'imperfections. En Colombie-Britannique, il se fait des dégâts
indescriptibles. On se permet de tracer à coup de millions des routes
qui traversent des vallées entières. L'entreprise que nous avons
engagée a construit les routes, après quoi on est venu voir s'il y avait
des chouettes tachetées. Une fois la route aménagée et les travaux
terminés, on nous dit: «Je pense que j'ai entendu le hululement
d'une chouette tachetée. Pas question d'exploitation forestière dans
cette vallée.» Impossible de faire des affaires avec une mentalité
comme celle-là.
Je me rappelle leur avoir dit: «S'il existe une espèce en péril,
qu'on nous le dise, et nous allons nous débrouiller en conséquence,
mais il ne faut pas imposer des règles arbitraires qui font en sorte
que, après avoir dépensé beaucoup d'argent, nous ne pouvons
obtenir aucune compensation. Il faut prévoir une indemnisation
raisonnable dans le projet de loi pour que les agriculteurs, les
éleveurs et les forestiers puissent faire leur travail tout en
protégeant l'environnement.
Je ne crois pas que le projet de loi remplisse cette condition. C'est
pourquoi il faut l'amender. Nous sommes heureux que le projet de
loi ne puisse pas être adopté au cours de cette session-ci.
[Français]
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Madame la Présidente,
il me fait plaisir de prendre la parole au sujet du projet de loi C-65.
Je pense que je résumerais bien ma pensée en disant, et cela a été
repris par plusieurs de mes collègues également, que c'est une
intrusion majeure du gouvernement fédéral, encore une fois, dans le
champ de juridiction des provinces, et notamment du Québec.
D'ailleurs, je me suis référé à deux extraits de lettres que le
ministre de l'Environnement du Québec a fait parvenir ici, à son
honorable collègue de la Chambre des communes, dont une se
rapporte à la définition des interprétations. Je cite le ministre
provincial, M. Cliche, qui dit: «Ainsi, le gouvernement fédéral se
définit, aux fins de la loi, un territoire domanial qui ne correspond
nullement à la réalité. Il n'a jamais été compris jusqu'à maintenant
que la gestion des pêches ou de la navigation sur les eaux intérieures
et les eaux côtières signifiait que le gouvernement fédéral avait
compétence sur l'ensemble des écosystèmes aquatiques, de même
que sur le fond, le sous-sol et l'espace aérien de ces eaux.»
Voici un autre extrait de la même lettre qui, lui, se rapporte aux
mesures de protection des espèces inscrites, et je cite le ministre de
nouveau: «En outre, il paraît incongru, aux fins de la loi, d'assimiler
les déplacements migratoires des espèces d'un pays à l'autre, ou
leur répartition géographique de part et d'autre d'une frontière, de
l'importation et de l'exportation des biens et services. En
introduisant une nouvelle notion, celle d'espèces transfrontalières,
le gouvernement fédéral pourrait s'attribuer une juridiction étendue
sur la grande majorité des espèces d'une province.»
Il m'apparaît évident que le gouvernement du Québec ne voit pas
d'un bon oeil ce projet de loi, pas plus que le Bloc québécois parce
que, comme je viens de le dire, c'est encore une intrusion dans un
domaine de compétence qui n'appartient pas au gouvernement
fédéral. Mais comme toujours, le gouvernement fédéral essaie de
trouver une brèche pour s'ingérer. À notre avis, ce projet de loi se
trouve dans cette catégorie, c'est-à-dire celle de s'ingérer dans les
compétences des provinces.
(1345)
Ce n'est pas uniquement le peuple québécois qui trouve que le
projet de loi n'est pas très bon, il y en a d'autres, tels les peuples
autochtones. J'ai eu le plaisir de lire le mémoire présenté par les
peuples autochtones. Comme toujours, là aussi, les peuples
autochtones considèrent que le projet de loi se penche très peu sur
leurs besoins et qu'ils sont pas mal ignorés.
Finalement, j'ai pris connaissance de la façon dont les peuples
autochtones considèrent la question des espèces menacées, parce
que c'est peut-être le peuple canadien qui a provoqué l'ensemble du
désastre. Leur philosophie, qu'on découvre en écoutant les discours
10174
des aînés autochtones et des générations qui les suivent, est qu'ils
considèrent la terre comme leur mère. Ils considèrent que les
oiseaux, les plantes et les animaux sont leurs frères et leurs soeurs.
Ils considèrent que les eaux et tous les cours d'eau sont un peu le
système sanguin de la mère terre.
On s'aperçoit qu'ils ont une grande philosophie de respect de la
nature et de la flore et de la faune. Ils considèrent que ce projet de loi
ne les respecte pas dans leur culture et dans leur approche de
l'environnement.
J'ai constaté que ce sont les pratiques de développement
économique qui deviennent insoutenables pour les écosystèmes, et
c'est ce qui met en péril les espèces. Ce ne sont pas les autochtones,
ce ne sont pas les campeurs, ce ne sont pas les gens qui respectent la
nature qui mettent en péril les espèces. Ce ne sont pas les gens qui
respectent la nature qui mettent en danger les espèces menacées, ce
sont beaucoup plus les façons et les pratiques de faire le
développement économique.
J'ai vu des choses absolument terribles lors de mes nombreux
voyages chez les autochtones, entre autres, dans des coins de pays
où ces gens sont en train de revendiquer des territoires. J'ai
constaté, par exemple, que dans les territoires des Nisga'a, des
Chilcotin et des Carrier-Sekani, les coupes à blanc font un ravage
terrible. Je pense que c'est là l'explication principale de la
disparition d'espèces, soit la coupe à blanc.
Mon collègue du Parti réformiste tournait tantôt en ridicule le fait
qu'on pourrait préserver un coin de forêt, parce qu'on a entendu un
hibou crier. Je pense qu'il faudrait peut-être adopter une juste
mesure entre les deux. Mais le fait de faire une coupe à blanc n'est
rien pour préserver les espèces en voie de disparition.
C'est la même chose du côté des mines, un autre domaine de
développement économique dont les nations autochtones sont
victimes. Je pense, entre autres aux Dénés, dans les Territoires du
Nord-Ouest, dans le Nunavut, qui sont maintenant un peu tassés, du
côté des mines de diamant. Lorsqu'on procède à l'exploration
minière, on met en danger la nature, la faune et la flore. Les espèces
en voie de disparition sont également menacées par ce type
d'exploitation.
C'est la même chose du côté de Voisey's Bay, où sont les Innu. Ils
contestent les forages qui ont présentement lieu dans la région où on
retrouve probablement une des mines les plus riches au monde.
Encore une fois, on passe à côté des autochtones, on envahit le
territoire revendiqué par les autochtones et on va piller les
ressources naturelles qui s'y trouvent. Une fois les ressources
naturelles pillées, une fois les forêts coupées, une fois les mines
épuisées, on se retourne du côté des autochtones et on leur dit:
«Maintenant, on est prêts à examiner vos revendications
territoriales.» Ces exploitations minières, ces coupes à blanc ont des
impacts majeurs sur les espèces en voie de disparition.
Je pourrais parler du projet hydroélectrique du Northern Flood
Agreement au Manitoba au sujet duquel les Cris de cette province
sont victimes. On a eu la possibilité, cette semaine, d'adopter les
projets de loi C-39 et C-40 pour compenser les autochtones. Mais
l'envahissement par le réseau hydroélectrique d'un bassin d'eau
extraordinaire, dix fois plus grand que ce dont ils avaient besoin,
fait en sorte que des groupes et des espèces seront certainement
menacés par ce développement économique sans contrôle.
Je peux parler aussi des pêches intensives dans la région où se
trouvent les Micmacs de la côte est, qu'on appelle d'ailleurs les
peuples de l'aurore. Ils se retrouvent aujourd'hui devant des stocks
de poisson presque dépourvus. Ils n'ont presque plus les moyens de
pêcher, et pourtant, cela fait partie de leurs traditions.
Ce sont tous des exemples où les nations autochtones sont
laissées pour compte, alors qu'elles sont préoccupées, non
seulement par la nature, mais aussi forcément, par les espèces en
voie de disparition. Ces nations ne s'attribuent pas la responsabilité
de ces disparitions.
(1350)
D'ailleurs, je me suis employé à regarder, dans certaines
communautés autochtones, leur grand respect pour l'ensemble des
espèces, et particulièrement pour les espèces menacées. Par
exemple, sur la réserve de la première nation de l'Île Walpole, il y a
37 variétés qui sont actuellement sur la liste des espèces en voie de
disparition. Ces 37 variétés se sont regroupées, d'une façon
intuitive et instinctive, à un endroit où elles sont le moins menacées,
c'est-à-dire sur une réserve autochtone.
Un autre exemple que je peux mentionner, c'est Akwesasne. Ces
autochtones ont investi de l'argent pour acheter une île pour
protéger le grand héron bleu. Alors, on voit que les autochtones sont
préoccupés par cette question et c'est dommage que, dans le projet
de loi, on ne parle que brièvement, de temps à autre, dans les 19
premières pages du projet de loi, des nations autochtones, mais à la
fin du projet de loi, on n'en parle plus du tout.
Donc, on reconnaît là le discours du gouvernement fédéral qui est
souvent un discours fictif, rempli d'écrans de fumée, dans lequel on
dit qu'il faut s'occuper des autochtones, parce que c'est important.
Mais plus ça va, moins on s'en occupe et on ne tient pas compte du
tout de leurs revendications et de leur importance dans un tel projet
de loi.
Le Québec est à la recherche d'autonomie. Chaque fois qu'on
envahit un de nos champs de juridiction, nous, on s'y oppose. C'est
la même chose pour les autochtones. Ils sont très possessifs de leur
autonomie gouvernementale. Ce type de projet de loi revient à leur
dire: «Nous, on va faire des tests et maintenant, le gouvernement
fédéral se mêle des espèces en voie de disparition. On va s'en mêler.
On n'a pas besoin de vous, on s'en occupe.» Il y a donc des
accrochages majeurs avec les autochtones à ce sujet, ils s'y
opposent fortement.
Je trouve que le gouvernement a un lien fiduciaire avec les
autochtones qui, encore une fois, se fragilise avec un projet de loi de
ce type. Donc, encore une fois et comme ça arrive très souvent, le
Québec et les autochtones se retrouvent du même côté dans ce
débat, c'est-à-dire qu'ils ont d'énormes réserves vis-à-vis du projet
de loi C-65. Des amendements ont été demandés, mais ils n'ont pas
été acceptés. Donc, avec ce projet de loi, on adoptera des choses qui
amèneront le gouvernement fédéral à s'ingérer dans la compétence
du Québec, et les communautés autochtones, elles, seront ignorées.
Donc, pour toutes ces raisons, le Bloc québécois ne peut appuyer
un tel projet de loi, parce qu'on est jaloux, contents et heureux
d'avoir certaines juridictions et on ne veut pas être envahis par le
gouvernement fédéral. Les nations autochtones sont dans la même
barque, la même chaloupe, le même canot que nous. Elles ne
veulent pas non plus voir le gouvernement fédéral leur passer
10175
par-dessus la tête et imposer un projet de loi dans lequel il n'y a
aucun partage.
C'est à peu près ce que j'avais à dire. Pour ces raisons, le Bloc
québécois s'opposera naturellement au projet de loi C-65.
M. Stéphan Tremblay (Lac-Saint-Jean, BQ): Madame la
Présidente, vous constaterez que ce n'est pas sans émotion que je
prends la parole aujourd'hui sur un projet de loi portant sur les
espèces en voie de disparition.
Comme société et comme collectivité, il faut prendre conscience
de l'importance de notre écosystème. Il faut comprendre également
que les humains ne sont qu'une partie intégrante de la biodiversité
et que l'équilibre entre la faune, la flore et les humains est très
important.
Statistiquement, on s'aperçoit qu'il y a de nombreuses espèces en
voie de disparition. De nombreuses espèces sont disparues et, à ma
grande crainte, de nombreuses disparaîtront encore. Cela me
concerne grandement, puisque, dans 40 ans, attaquer la faune et la
flore et tous ces animaux en voie de disparition aura un effet sur
notre vie, bien que, bien souvent, on n'en connaisse pas toutes les
espèces.
Au rythme actuel, 50 espèces par jour disparaissent dans le
monde. Cinquante espèces, c'est énorme. Si on regarde le temps que
cela a pris pour nous conduire au point où nous en sommes, on
pourrait conclure que la fin du monde arriverait dans quelques
milliers d'années, ce qui est très rapide.
(1355)
Donc, nous ne sensibiliserons jamais suffisamment la
communauté internationale à l'importance de la flore.
Mais revenons à la politique et à ce projet de loi qui traite de
l'importance de protéger nos espèces en voie de disparition. Oui,
c'est important, mais il faut s'y prendre de la bonne façon, et au
Québec, on s'est pris d'une certaine manière.
Mais encore aujourd'hui, j'ai l'impression de traiter du même
sujet que d'habitude, c'est-à-dire l'ingérence du fédéral dans les
champs de juridiction du Québec.
On se souviendra que l'ex-ministre de l'Environnement avait
multiplié les groupes de travail et de consultation afin d'élaborer un
projet de loi qui ferait du gouvernement fédéral un chef de file en la
matière. Au printemps 1995, un projet de loi a été présenté par la
ministre. Celui-ci a soulevé un tollé ainsi que des critiques,
principalement chez les environnementalistes. L'un des principaux
reproches formulés à l'endroit du projet de la ministre s'en prenait à
l'application de la loi qui était restreinte aux seuls territoires
fédéraux.
Ces groupes de pression environnementalistes ont fait valoir que
seulement quatre provinces disposent d'une loi sur les espèces
menacées et que, pour cette raison, le fédéral devrait absolument
légiférer à la grandeur du Canada. À noter que le Québec a une loi
sur les espèces menacées depuis 1989, ainsi que l'Ontario, le
Manitoba et le Nouveau-Brunswick.
Un an plus tard, l'actuel ministre de l'Environnement rencontrait
les ministres provinciaux responsables de la Faune dans l'espoir de
s'entendre sur un accord de principe visant à harmoniser les
politiques de protection et de conservation de la faune. La rencontre
a eu lieu à Charlottetown, le 2 octobre 1996. M. Cliche, le ministre
de l'Environnement et de la Faune du Québec, même s'il a signé un
accord de principe, a émis un communiqué de presse indépendant
où il déclarait: «Nous ne pouvons rester indifférent au fait que cet
accord ouvre la porte aux chevauchements entre l'éventuelle
législation fédérale et la loi déjà en vigueur depuis 1989 au Québec,
une loi qui fonctionne bien et qui donne déjà des résultats.»
Le Président: Cher collègue, vous disposerez encore d'environ
sept minutes, si vous voulez continuer, après la période des
questions orales.
Puisqu'il est presque 14 heures, nous allons passer aux
déclarations de députés.
______________________________________________
10175
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[
Traduction]
M. Harold Culbert (Carleton-Charlotte, Lib.): Monsieur le
Président, les Canadiens de l'Atlantique ont à coeur la protection
des espèces en voie de disparition. Tout en reconnaissant qu'il est
louable d'empêcher la disparition de ces espèces, ils veulent avoir
l'assurance que le projet de loi sur les espèces en péril n'aura pas
d'effet préjudiciable sur leurs activités aquicoles ou halieutiques
traditionnelles.
À mon avis, le projet de loi sur les espèces en péril établit un juste
équilibre entre les deux objectifs. Il est la preuve qu'on peut
concilier les besoins économiques et écologiques.
Le gouvernement a prouvé qu'il est possible de protéger les
espèces en péril tout en maintenant des emplois stables de même
qu'une économie saine et en pleine expansion.
Après deux ans et demi pendant lesquels nous avons fait des
consultations et de multiples ajouts et changements, le projet de loi
sur les espèces en péril est une mesure juste, équitable et équilibrée.
Je félicite le ministre de l'Environnement et celui des Pêches et des
Océans d'avoir démontré que travailler ensemble à la poursuite
d'objectifs communs est toujours un gage de succès.
* * *
M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président,
c'est probablement ma dernière déclaration de la 35e législature.
J'en profiterai donc pour parler aux agriculteurs des réalisations du
gouvernement dans les dossiers clés qui les concernent. La réalité
est plus éloquente que les beaux discours.
Les céréaliculteurs ont eu droit à la suppression du tarif du
nid-de-Corbeau. Les avantages de cela? Le grain est acheminé
encore plus lentement qu'auparavant, et les agriculteurs paient deux
fois plus cher.
10176
Les éleveurs de bétail, qui ne demandaient rien au gouvernement,
et, bien entendu, les agriculteurs de l'Ouest, de l'Ontario, du
Québec et du Canada atlantique ont droit, quant à eux, au projet de
loi C-65, celui sur la protection des espèces en péril. Cette initiative
ministérielle pourrait leur occasionner des coûts faramineux et
prévoit des amendes jusqu'à concurrence d'un million de dollars.
Les producteurs laitiers, dont bon nombre ont appuyé le
gouvernement actuel, pourraient être obligés de produire en-deçà
du coût de production, pendant six mois, à cause d'un cafouillage
dans les dates d'entrée en vigueur des réductions concernant les
subventions.
J'exhorte tous les agriculteurs à voir au-delà des beaux discours,
le jour du scrutin, et à voter à la lumière des orientations et des
mesures proposées par chaque parti. Si les agriculteurs font cela, je
doute que les libéraux recueillent beaucoup de votes des
agriculteurs.
* * *
[
Français]
M. Gilles Bernier (Beauce, Ind.): Monsieur le Président, je
terminerai, en juin, mes activités en tant que député de Beauce au
Parlement du Canada. Au cours de ces trois mandats, j'ai épousé
avec conviction toutes les causes que me confiaient mes
concitoyens de la Beauce. J'ai travaillé dans la sérénité mais avec
vigueur et conviction.
(1400)
Je désire remercier les membres de mon personnel et ma famille
qui m'ont admirablement bien secondé. Je crois avoir été, au
Parlement du Canada et ailleurs, un représentant digne des
Beaucerons et Beauceronnes. J'ai tenté d'être conséquent avec mes
prises de position et crédible dans mes actions. Comme député, j'ai
fait de mon mieux en voulant toujours demeurer visible, disponible
et accessible. Être député de Beauce pendant 13 ans fut une
expérience trépidante, mouvementée, mais combien valorisante et
exaltante.
Je conserverai donc un excellent souvenir de mon séjour de 13
ans au Parlement, de tous ces collègues que j'ai côtoyés, le greffier
et son équipe et les fonctionnaires de la Colline.
À vous, monsieur le Président, j'offre mes meilleurs voeux de
succès et de bonne santé. Je vous remercie pour ce que vous avez
fait pour nous tous.
Vive la Beauce, le Québec et le Canada. Que le Seigneur vous et
nous protège.
* * *
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président,
l'automne dernier, j'ai eu le plaisir de visiter la montagne sacrée de
Castle Mountain en Alberta, lieu sacré pour la nation des Siksika.
Le Bloc québécois s'offusque du traitement fait aux Siksika dans
ce dossier. En effet, cette montagne est sur le point d'être classée
site historique. Le problème, c'est que cette montagne est située à
l'intérieur du Parc national de Banff, que la nation des Siksika
s'oppose à ce projet et que le ministre des Affaires indiennes et du
Nord canadien a clairement pris position en indiquant qu'il était
prêt à leur restituer cette montagne à titre de terre de réserve.
Il est dommage que la ministre du Patrimoine canadien fasse
toujours la sourde oreille à la revendication de ces autochtones.
Nous considérons qu'il s'agit d'une tache supplémentaire au dossier
déjà spolié du gouvernement à l'égard des autochtones.
* * *
[
Traduction]
Mme Anna Terrana (Vancouver-Est, Lib.): Monsieur le
Président, le quartier général du régiment de la
Colombie-Britannique, qui porte le nom de Duke of Connaught's
Own Regiment, est établi dans la circonscription de Vancouver-Est
que je représente. Le manège militaire, qui est plus que centenaire, a
été déclaré monument historique par la municipalité et la province
et abrite un musée spectaculaire. Le régiment est très fier de
compter dans ses rangs plusieurs militaires ayant reçu la Croix de
Victoria et d'avoir participé aux deux guerres mondiales.
À l'heure actuelle, les membres de ce régiment participent à des
missions de rétablissement de la paix et de maintien de la paix et
s'occupent de la formation des réservistes et des cadets. Plus de 100
cadets se réunissent chaque semaine, échappant ainsi à l'attrait des
rues souvent dangereuses du centre-ville de Vancouver.
La semaine dernière, j'ai eu l'honneur de participer au banquet
de St-Julien, où j'ai rencontré des gens très fiers qui ont beaucoup
donné à leur pays. J'ai rencontré notamment le colonel honoraire du
régiment, John Toogood, qui prenait sa retraite après 59 ans de
service dans l'armée.
Au nom de tous mes collègues, je voudrais féliciter le Duke of
Connaught's Own Regiment pour le travail qu'il accomplit et le
colonel Toogood pour la brillante carrière qu'il a connue. Je les
salue.
* * *
M. Brent St. Denis (Algoma, Lib.): Monsieur le Président, en
1914, à White River, dans la nouvelle circonscription
d'Algoma-Manitoulin, en Ontario, un ourson noir fut acquis d'un
trappeur par M. Goulbourn. L'ourson fut baptisé Winnie et fut
finalement confié au zoo de Londres, en Angleterre, où il inspira le
personnage bien-aimé de l'ours Winnie.
Le lien entre White River et l'ours Winnie n'est pas très connu.
Heureusement, cela est sur le point de changer. Quinze élèves
studieux de 8e année de l'école St. Basil's, à White River, vont
bientôt partir pour l'Angleterre où ils visiteront le zoo de Londres
afin de faire mieux connaître les origines réelles du très célèbre
ourson et où ils feront aussi du tourisme.
10177
Les habitants de White River sont derrière les étudiants et
appuient leurs ambitieux efforts de collecte de fonds pour financer
ce voyage.
Je rends hommage aux élèves et aux organisateurs de cette
excursion pour leur détermination à promouvoir l'histoire de leur
localité. Je leur souhaite un voyage très sûr, agréable et instructif.
Enfin, j'invite tous les députés à visiter la très belle localité de
White River, en Ontario, et à découvrir eux-mêmes l'endroit où
l'histoire de l'ours Winnie a vraiment débuté.
* * *
Mme Rose-Marie Ur (Lambton-Middlesex, Lib.): Monsieur
le Président, au nom de la communauté canadienne portugaise de la
circonscription de Lambton-Middlesex, je voudrais profiter de
l'occasion qui m'est offerte pour remercier la ministre de la
Citoyenneté et de l'Immigration, qui a annoncé à la Chambre, le 21
avril, qu'à compter du 1er mai 1997 les citoyens du Portugal
n'auront plus à demander un visa de visiteur pour venir au Canada.
Je sais que nombre de Canadiens portugais de ma circonscription et
du reste du pays se réjouiront de cette nouvelle, qui simplifiera
sûrement les arrangements à prendre quand leurs amis et parents
leur rendent visite au Canada.
Au fil des ans, la communauté canadienne portugaise a apporté
une énorme contribution au développement socio-économique de
ma circonscription, Lambton-Middlesex, comme à celui de
l'ensemble du Canada. Nul doute que cette mesure favorisera les
relations entre nos deux pays.
Je tiens à remercier encore une fois la ministre de la Citoyenneté
et de l'Immigration.
* * *
(1405)
[Français]
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le
Président, la guerre civile en Algérie n'en finit plus de faire
d'innocentes victimes. En effet, on compte déjà plus de 60 000
morts parmi la population depuis le début de cette guerre, il y a cinq
ans.
Mardi dernier, 95 habitants d'un petit village au sud d'Alger ont
été massacrés par un groupe armé se réclamant de l'islamisme
radical. Malheureusement, cet acte de barbarie n'était pas le
dernier, puisqu'on apprend, aujourd'hui, que pendant la nuit de
mardi à mercredi, 42 autres villageois, dont 17 femmes et trois
bébés de moins d'un an, ont été égorgés dans un village situé à une
centaine de kilomètres au sud d'Alger.
Peu importe la cause défendue, il n'existe pas de mots assez forts
pour exprimer le dégoût que suscitent en nous de tels actes de
cruauté.
* * *
[
Traduction]
M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.):
Monsieur le Président, au début de 1996, le ministre des Affaires
indiennes a institué un conseil de bande intérimaire à la réserve du
lac Barrière ainsi qu'une équipe de médiation dirigée par le juge
Paul, qui a récemment démissionné de ses fonctions en attendant la
fin d'une enquête de la GRC.
Faisant volte-face, le ministre a rétabli dans leurs fonctions, la
semaine dernière, les dirigeants de la bande qu'il avait écartés en
1996. Il a ensuite qualifié la réserve du lac Barrière de réserve la
plus dysfonctionnelle du Canada. Entre- temps, on tente toujours,
dans le cadre d'une vérification judiciaire au lac Barrière, de
déterminer à quoi ont servi des fonds perdus de 20 millions de
dollars; en outre, des accusations d'agressions sexuelles planent
toujours sur la réserve.
Le ministre a de nouveau appuyé les anciens dirigeants en dépit
des problèmes qui ont surgi dans la réserve pendant que ces derniers
étaient en poste. Le ministre a abandonné la population de cette
réserve, ce qui démoralise complètement ceux qui veulent que
cessent les agressions, les dépenses injustifiées et la pauvreté dans
la réserve.
Je prie donc le ministre de faire ce qui doit être fait pour la
réserve et non pas ce qui est commode pour lui.
* * *
[
Français]
Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président,
nous soulignons aujourd'hui le 82e anniversaire de ce triste
événement que fut le génocide du peuple arménien.
Les députés du Bloc québécois croient fermement que ce crime
contre la personne ne doit pas sombrer dans l'oubli et l'indifférence.
Année après année, nous tenons à marquer ce triste anniversaire. La
reconnaissance du génocide arménien fut d'ailleurs l'objet d'une
motion présentée par mon collègue d'Ahuntsic, le 23 avril 1996.
Malheureusement, les députés libéraux ne semblaient pas vouloir
faire preuve de transparence dans ce dossier puisqu'ils ont réussi à
diluer la motion et à y faire enlever la notion de génocide.
L'exécution et la déportation par l'Empire ottoman de près de
deux millions d'Arméniens, de 1915 à 1923, constituent le premier
grand génocide de ce siècle. Cette journée de commémoration des
victimes du génocide arménien nous rappelle l'importance de
combattre l'impunité dont font preuve, encore aujourd'hui, certains
gouvernements.
10178
[Traduction]
M. Jim Peterson (Willowdale, Lib.): Monsieur le Président,
aujourd'hui, je suis fier d'unir ma voix à toutes celles qui s'élèvent
dans le monde entier pour souligner le 82e anniversaire du génocide
arménien.
La communauté internationale reconnaît qu'un million et demi
d'Arméniens ont été massacrés en 1915. Pourtant, ce massacre n'est
pas reconnu comme un génocide. Les Nations Unies définissent le
génocide comme la destruction physique directe d'un groupe racial
ou national par un autre groupe.
On peut se demander quand justice sera finalement rendue à la
lumière des faits historiques.
Plusieurs générations d'Arméniens du monde entier n'auront de
cesse d'obtenir que justice soit rendue, et toute personne de bonne
volonté le souhaite également.
* * *
Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Monsieur le
Président, le numéro de cette semaine de la revue
Time présente le
Canada comme le nouveau super-héros du commerce mondial. Le
capitaine Export représenté en page couverture ne peut être que le
premier ministre Jean Chrétien, le Canadien qui a conçu et réalisé le
plus. . .
Le Président: Veuillez ne pas utiliser nos noms à la Chambre.
Mme Torsney: Monsieur le Président, comme les députés le
savent, le Canada est maintenant le pays dont les activités
commerciales sont les plus intensives, parmi les pays du G-7. Un
emploi sur trois a trait aux exportations de produits et de services.
Dans le secteur de la fabrication seulement, 60 p. 100 de la
production est exportée. Un spécialiste canadien des activités
d'exportation a décrit ce revirement comme étant le changement le
plus radical de l'histoire du Canada et l'un des plus importants
depuis la Seconde Guerre mondiale.
(1410)
Nous le comprenons bien à Burlington, en Ontario. Notre
économie joue un rôle de premier plan dans le développement de
ces nouvelles conditions économiques innovatrices. Que ce soit
dans le domaine de l'environnement, de l'eau, de la robotique ou
des technologies de l'information, le monde des affaires de
Burlington est concurrentiel sur le marché mondial.
Je suis fière d'avoir contribué à la réussite de Zenon, CRS,
Geomatics et beaucoup d'autres entreprises de Burlington, ainsi
qu'à la création d'emplois dans notre collectivité.
* * *
M. Sarkis Assadourian (Don Valley-Nord, Lib.): Monsieur le
Président, il y a 82 ans aujourd'hui, soit le 24 avril 1915, les leaders
intellectuels et religieux de la communauté arménienne de
Constantinople étaient tirés de leur lit, emprisonnés, puis torturés et
éliminés.
Tous les Arméniens qui étaient dans l'armée turque furent
massacrés. Dans les villes et les villages, tous les hommes de plus
de 15 ans furent assemblés, enchaînés, conduits à pied vers des lieux
inhabités et assassinés. Après quelques jours, les femmes et les
enfants, ainsi que les quelques hommes qui restaient furent conduits
en marche forcée de l'Anatolie au désert de Syrie, où ils furent
abandonnés à leur triste sort. En chemin, ils étaient fréquemment
attaqués par des bandes de Turcs.
Ces atrocités ont ainsi coûté la vie à 1,5 million d'Arméniens.
Nous ne devons pas oublier ce crime contre l'humanité perpétré par
les autorités turques en 1915.
Je prie mes collègues députés de rendre hommage aux victimes
du génocide arménien. Si le massacre de 1,5 million d'Arméniens
n'est pas un génocide, je ne sais pas ce que ce mot signifie.
* * *
M. Vic Althouse (Mackenzie, NPD): Monsieur le Président, le
gouvernement laisse l'impression qu'il est du côté des producteurs
lorsqu'il parle du besoin d'une gestion de l'offre pour les produits
laitiers.
Récemment, le ministre de l'agriculture avait accepté un
calendrier d'élimination graduelle de la subvention à la
consommation, mais il déclare maintenant aux producteurs de lait
que le montant de 12 millions de dollars qui avait été convenu pour
retarder l'augmentation du prix du lait à la consommation ne pourra
pas être versé car «il n'a pas pu convaincre ses collègues du
Cabinet». Nous pourrions blâmer le ministre. Une fois de plus il n'a
pu tenir un engagement pris à l'égard des agriculteurs. Mais le
problème n'est-il pas plus grand que le ministre lui-même?
Ce sont les libéraux qui devaient protéger la gestion de l'offre,
mais ils ne l'ont pas fait lorsqu'ils ont signé l'ALENA. Ce sont les
libéraux qui devaient conserver la Commission canadienne du blé,
mais ils ont négocié sa disparition lors des entretiens sur
l'Organisation mondiale du commerce. Ce sont les libéraux qui
devaient maintenir le tarif du Nid-de-Corbeau qu'ils ont éliminé 18
mois après avoir pris le pouvoir.
Il est vrai que le ministre a un grave défaut: sa parole ne signifie
rien. Mais, que voulez-vous, c'est seulement un libéral.
* * *
M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, à
quelques heures du déclenchement des élections, j'aimerais profiter
de cette occasion pour dire combien je suis reconnaissant d'avoir eu
le privilège de servir dans cette 35e législature et pour remercier
plusieurs personnes.
Tout d'abord, merci à vous monsieur le Président et à vos
substituts. Je tiens à vous dire combien votre patience et votre
compréhension ont été d'un grand secours pour un député débutant
comme moi. Merci à mon chef et à mes collègues réformistes et
tous mes voeux à tous ceux qui se représentent aux prochaines
élections. Merci à mon personnel qui m'a si bien servi.
10179
J'ai toujours bénéficié de l'amour, de la compréhension et de
l'appui de ma famille, mais je l'ai appréciée encore davantage
pendant mon mandat à la Chambre. À mon épouse Rosemary, à ma
fille Sandra, à mon fils Brian, à mon gendre Bradd, et à mes
petits-enfants Jessica et Nicholas, merci pour votre amour et votre
compréhension.
À la veille de mon départ, j'espère avoir contribué un peu à
améliorer le Canada pour les générations à venir. Même si nous
avons chacun des moyens différents pour y parvenir, nous
partageons tous le même objectif. À tous ceux qui auront le
privilège de servir dans la prochaine législature, j'offre tous mes
voeux les plus sincères.
* * *
[
Français]
M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, ce
qu'on apprend ce matin dans
Le Soleil au sujet du ministre fédéral
des Finances est plus inquiétant que ce qu'on aurait pu imaginer de
pire. Ce journal révèle, relativement à la fiducie qui gère les actifs
du ministre, que celle-ci a créé pas moins de sept filiales à la
Barbade, pour un total de 13 filiales dans ces paradis fiscaux.
Le Bloc québécois a maintes fois interpellé le ministre des
Finances pour qu'il mette un terme à l'utilisation croissante des
paradis fiscaux. On lui a même présenté des recommandations qui
auraient permis de limiter l'attrait de ces paradis fiscaux.
C'est avec tristesse que le Bloc québécois constate que le grand
argentier libéral est beaucoup plus rapide à couper des milliards
dans les programmes sociaux et à piger dans la caisse
d'assurance-chômage qu'à bloquer des échappatoires fiscales dont
il bénéficie lui-même largement.
Voilà un ministre des Finances qui dit: «Faites ce que je dis, ne
faites pas ce que je fais.»
* * *
(1415)
[Traduction]
M. Leonard Hopkins (Renfrew-Nipissing-Pembroke,
Lib.): Monsieur le Président, je désirais devenir député depuis l'âge
de 14 ans. J'ai réalisé mon rêve le 8 novembre 1965, lorsque les
électeurs de Renfrew-Nord m'ont élu pour la première fois député à
la Chambre des communes.
Je remercie mon épouse et ma famille pour tout ce qu'ils ont fait
pour moi au fil des ans. Aujourd'hui, je tiens à remercier tous ceux
que j'ai représentés pendant neuf législatures, depuis le
gouvernement de Lester B. Pearson jusqu'à celui d'aujourd'hui.
J'ai connu sept premiers ministres en près de 32 ans de carrière à
titre de député. Je suis très reconnaissant à mes électeurs et à tous
ceux qui ont travaillé avec acharnement en mon nom.
J'adore la vie publique car c'est une vocation bien plus qu'une
profession. J'aime mon pays parce que c'est une institution
précieuse, un lieu où il fait bon vivre. Je tiens à remercier tous ceux
qui, au cours des ans, sont devenus des amis.
Dans la vie, ce n'est pas tellement ce que l'on fait, mais bien ce
que l'on vise qui compte. Tant que je vivrai, mon objectif sera
toujours de travailler en faveur d'un Canada uni.
Le Président: Je vais vous appeler Lenny pour la première fois,
mais je sais que je parle au nom de tous nos collègues en vous
disant, après 32 ans de services rendus à votre pays, que nous
sommes fiers de vous, que vous avez oeuvré pour le plus grand bien
de notre pays et que nous vous remercions.
* * *
Mme Beryl Gaffney (Nepean, Lib.): Monsieur le Président,
moi aussi j'interviens à la Chambre aujourd'hui avec un profond
sentiment de fierté mêlée de regret et d'anticipation, car d'ici peu
mon rôle de députée de Nepean va prendre fin.
Je considère comme un privilège le fait d'avoir représenté la
population de Nepean à la Chambre depuis 1988. C'est envers les
électeurs de Nepean que je me suis sentie la plus comptable. Ils ont
toujours constitué ma principale priorité en tant que députée.
Je considère comme un privilège le fait d'avoir pu contribuer à
faire avancer à la Chambre les dossiers touchant les femmes, les
enfants et la santé, entre autres. Je crois avoir réussi à faire entendre
les droits et les libertés individuels. Je considère comme un
privilège ma participation à un gouvernement qui lui aussi poursuit
ces idéaux.
C'est précisément ce pour quoi je suis triste à la pensée de devoir
quitter le siège de notre démocratie. Je vous fais mes adieux, chers
collègues des deux côtés de la Chambre. Ce fut un honneur d'être au
service du Parlement en votre compagnie. Bien que nos points de
vue aient pu différer, j'ai toujours respecté votre dévouement envers
vos électeurs et aux éléments de la démocratie.
Enfin, à mes électeurs, aux membres du caucus libéral, surtout le
premier ministre, et aux députés de l'autre côté de la Chambre, je
dis merci du fond du coeur. Ce fut le plus grand honneur de ma vie
que de servir le pays en ma qualité de députée de Nepean.
* * *
M. Allan Kerpan (Moose Jaw-Lake Centre, Réf.): Monsieur
le Président, depuis trois ans et demi, j'ai l'honneur de représenter
les formidables gens de ma région. J'aurai eu le plaisir d'être le
dernier député de Moose Jaw-Lake Centre.
Je tiens à remercier tous les habitants de ma circonscription pour
leur appui, leurs pensées et leur participation. Je ne l'oublierai
jamais.
10180
Dès que les élections seront déclenchées, je centrerai mon
attention sur la nouvelle circonscription de Blackstrap. J'ai hâte
d'affronter le député libéral qui représente actuellement la
circonscription de Saskatoon-Dundurn dans ce que j'appelle une
épreuve de force pour Saskatoon.
Il va sans dire que le gouvernement actuel a beaucoup de comptes
à rendre en Saskatchewan. Son inaction face à une multitude de
dossiers et son approche maladroite à l'égard de nombreux autres,
nous allons certainement en parler aux électeurs dans la quarantaine
de jours qui viennent. Le temps de régler les comptes est arrivé.
Tous les quatre ans, au Canada, nous avons la chance d'évaluer le
rendement de nos politiciens et nous devons le faire. L'heure a
sonné. Tout est en place. L'épreuve de force doit commencer.
______________________________________________
10180
QUESTIONS ORALES
(1420)
[Français]
M. Gilles Duceppe (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le
Président, j'ai toujours pensé que, dans un régime parlementaire,
c'était l'opposition qui avait un cabinet fantôme, pas le parti au
pouvoir.
Plus sérieusement, hier, le vérificateur général en avait long à
dire sur la façon dont le gouvernement trafique ses états financiers,
mais les libéraux n'ont pas voulu l'entendre. Ils ont préféré ne pas
l'entendre. On comprend qu'à l'approche des élections, le
gouvernement veuille escamoter toute déclaration qui ferait la
lumière sur la gestion libérale des deniers publics. Comme on le dit
si bien sur la Colline: «Quand ça devient tough, les libéraux vont se
cacher.»
En faisant échouer une rencontre avec le vérificateur général sur
les pratiques comptables du gouvernement, qu'est-ce que les
libéraux cherchent à cacher, à camoufler? Qu'est-ce que les libéraux
cherchent à cacher, quand on voit que le vérificateur général leur a
dit hier que leurs pratiques comptables étaient douteuses?
[Traduction]
L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions
financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, le
gouvernement n'a rien à cacher au vérificateur général. Le
vérificateur général a examiné nos livres et a clairement déclaré que
tout était en ordre. Le député devrait savoir que le vérificateur
général n'a formulé aucune réserve au sujet des comptes publics.
[Français]
M. Gilles Duceppe (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le
Président, c'est surprenant, une telle déclaration, quand on sait que
les libéraux n'ont pas voulu l'entendre hier. C'est un peu
surprenant, car, ce que leur aurait dit le vérificateur général, s'il en
avait eu la chance, c'est, et je le cite: «Je crains que la crédibilité des
états financiers du gouvernement et du budget soient remis en
question.» C'est assez clair.
Les libéraux ont fait la même chose l'an dernier. Ils récidivent
avec une pratique comptable douteuse qui consiste à manipuler les
chiffres, de manière à jouer avec le déficit, pour redorer leur image
juste à la veille des élections. C'est ce qu'ils essaient de faire.
En récidivant, en faisant fi continuellement des
recommandations du vérificateur général, devons-nous conclure
que le gouvernement a maintenant pris l'habitude de manipuler les
chiffres selon son bon plaisir, au mépris des principes comptables
élémentaires?
[Traduction]
L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions
financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, j'invite
de nouveau le député à lire les déclarations du vérificateur général.
Il devrait les consulter.
Le vérificateur général a livré une opinion bien précise au sujet
de sa vérification des comptes du gouvernement.
[Français]
M. Gilles Duceppe (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le
Président, j'ai lu la version française, j'ai lu la version anglaise, on y
disait la même chose. On aurait pu en débattre avec notre honorable
collègue, s'il avait daigné se présenter au Comité des comptes
publics, hier, ce qu'il n'a pas fait.
Les libéraux vont solliciter un autre mandat en disant qu'ils ont
bien géré nos taxes et nos impôts, alors que le vérificateur général,
lui, dit qu'au contraire, les libéraux manipulent les chiffres pour
embellir leurs états financiers, en ajoutant au déficit des années
passées des dépenses qui ne se réaliseront qu'après les élections.
Prenons l'exemple de la Fondation canadienne pour
l'innovation; c'est 800 millions que l'on camoufle cette année, que
l'on cache. Quelle confiance et quelle crédibilité peut-on accorder
au gouvernement, lorsque ce dernier traite de façon totalement
désinvolte, totalement irresponsable, les remarques du vérificateur
général?
[Traduction]
L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions
financières internationales), Lib.): Monsieur le Président,
permettez-moi de rappeler au député que notre gouvernement
n'engage pas de dépenses aujourd'hui qu'il n'aura qu'à payer
demain. Il crée plutôt un fonds de réserve et l'argent versé dans le
fonds d'innovation sera remboursé sous peu. Nous avons pris cet
engagement en toute connaissance de cause lorsque nous avons
décidé d'agir ainsi.
Notre gouvernement n'a pas suivi l'exemple des gouvernements
qui l'ont précédé et qui nous ont légué un déficit non pas de 32
milliards de dollars, mais bien de 42 milliards de dollars, comme
nous l'avons découvert quelques années plus tard. Nous ne prenons
pas d'engagements en pensant ne payer que plus tard. Les
engagements que nous prenons aujourd'hui, nous les reconnaissons.
Le
10181
vérificateur général a bien précisé que nos livres étaient en ordre
l'an dernier.
(1425)
J'aimerais citer comme exemple au député l'immeuble où il
siège. Quand cette dépense a-t-elle été engagée? Elle a été inscrite
aux budgets de 1917 et de 1918, au moment où a été construit
l'immeuble que nous utilisons depuis 80 ans. Nous faisons la même
chose avec le fonds d'innovation. Nous le créons. Nous avons pris
cet engagement. Le fonds existe et il sera utilisé au cours des
prochaines années.
* * *
[
Français]
M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies, BQ):
Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des
Finances.
À la sortie d'une séance du Comité permanent des comptes
publics qui devait se tenir hier en fin d'après-midi, le vérificateur
général a qualifié de décision politique la formule d'harmonisation
de la TPS qui a donné un milliard de dollars, on le sait, aux
Maritimes. Cela correspond exactement littéralement à ce que nous
disons de cette formule depuis qu'elle a été annoncée. Si nous
appliquons intégralement la formule McKenna au Québec, Ottawa
doit au Québec deux milliards de dollars, réclamés par le
gouvernement québécois, tel que démontré noir sur blanc dans le
dernier budget du Québec.
Pourquoi le gouvernement s'acharne-t-il à ne pas vouloir traiter
le Québec sur le même pied que les Maritimes?
[Traduction]
L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions
financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, nous
traitons le gouvernement du Québec sur le même pied exactement
que toutes les autres provinces en appliquant ces règles. Si le
gouvernement québécois avait perdu des recettes à cause de
l'harmonisation de la TPS et de la TVQ, nous l'aurions indemnisé.
Ses recettes n'ont pas baissé.
Comme je l'ai dit hier à la Chambre, les comptes du
gouvernement du Québec montrent clairement que ses recettes sont
passées de 5,1 milliards de dollars à 5,4 milliards, puis à 6 milliards
de dollars. Elles ont augmenté chaque année depuis
l'harmonisation. Ce programme n'a pas du tout fait perdre de
recettes au Québec, comme le révèlent les comptes de la province.
[Français]
M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies, BQ):
Monsieur le Président, Frank McKenna était au Château
Champlain, à Montréal, à midi et demi aujourd'hui, sans doute pour
vanter les mérites de sa province au plan fiscal et ainsi nous voler
nos entreprises et nos emplois.
Est-ce que le gouvernement trouve normal que le premier
ministre d'une province se serve d'une partie de l'argent des
Québécois pour venir marauder les entreprises québécoises, dont
Montréal a cruellement besoin pour contrer la pauvreté?
[Traduction]
L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions
financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, le
député devrait adresser sa question au premier ministre de la
province dont il parle. Ce n'est pas des politiques du gouvernement
du Canada qu'il se plaint, mais de celles du Nouveau-Brunswick.
S'il trouve quelque chose à redire aux politiques provinciales, je lui
suggère de soulever le problème auprès des assemblées
provinciales.
* * *
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le
Président, haïssez-vous autant que moi recevoir du courrier
importun? J'en ai reçu ce matin des libéraux. Hier, ils ne voulaient
pas répondre à nos questions, mais je crois qu'ils essaient de nous
donner des indices de ce qu'ils prévoient pour les élections qui s'en
viennent.
Par exemple, sur la couverture de leur dépliant préélectoral, il y a
la photo de six jeunes enfants. Je me demande si cela signifie que le
gouvernement prévoit annoncer à nouveau son programme national
de garderies, celui que les libéraux avaient promis lors de la
dernière campagne électorale, mais qui n'a jamais vu le jour.
Peut-être ces enfants sont-ils parmi les centaines de milliers
d'enfants de ces familles à revenu moyen que le gouvernement a
transformées en familles à faible revenu. Peut-être sont-ils là pour
représenter les 20 000 $ de dette que porte chaque homme, femme
et enfant du Canada en raison des dépenses excessives des libéraux
et des conservateurs.
Dans tout cela, qu'est-ce que le gouvernement prévoit inclure
dans sa plate-forme électorale? Quels programmes les libéraux
promettront-ils aux Canadiens pendant la prochaine campagne
électorale?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères,
Lib.): Monsieur le Président, comme nous l'avons constaté au
cours des ans, la manie des réformistes de faire des lectures
sélectives n'a pas permis au député de prendre connaissance de ce
qui est probablement l'une des plus importantes mesures à avoir été
mise en oeuvre pour les enfants depuis une décennie, à savoir
l'annonce d'un investissement majeur dans une prestation pour
enfant qui garantira à chaque enfant d'une famille à faible revenu
une prestation du gouvernement du Canada.
Cette prestation assurera un revenu en liquide pour les enfants
pauvres du Canada. Leurs parents toucheront un revenu et pourront
donc faire les meilleurs choix au sujet de leur instruction, de leur
alimentation et ainsi de suite. C'est la manière libérale de faire les
choses: permettre aux parents de choisir comment ils peuvent le
mieux aider leurs enfants. C'est là le véritable enjeu.
10182
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le
Président, selon les chiffres du gouvernement lui-même, plus d'un
million d'enfants canadiens vivent dans la pauvreté. Le programme
national de garderies que le gouvernement avait promis n'existe
pas.
Je parcours la liste des réalisations du gouvernement libéral pour
voir où il est dit que les libéraux ont tenu leur promesse sur la TPS,
mais, étrangement, je ne trouve rien. Je cherche le paragraphe sur
l'unité nationale, mais je ne le trouve pas. Se pourrait-il que ce soit
parce que le gouvernement est passé à 50 000 voix de perdre le
pays?
(1430)
Et la santé? Il parle de 300 millions de dollars consacrés à un
nouveau programme de santé, mais pour une raison ou une autre, il
ne précise pas qu'il a diminué le budget de la santé de 7,5 milliards
de dollars.
Le gouvernement essaiera-t-il de tromper encore les Canadiens
comme il l'a fait en 1993, ou manque-t-il quelques pages à mon
dépliant?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères,
Lib.): Monsieur le Président, je trouve tout à fait étrange que le
député, qui semble passer au microscope la documentation du
gouvernement, oublie complètement celle de son propre parti.
Le dernier prétendu budget des réformistes aurait complètement
dévasté le régime de pensions des Canadiens. Il aurait réduit les
prestations aux personnes handicapées, aux enfants et aux familles à
faible revenu. Il aurait complètement refait les structures sociales
de manière à accorder des allégements fiscaux aux contribuables à
revenu élevé et à augmenter les impôts des gagne-petit.
Je conseille au député de modifier ses habitudes de lecture.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le
Président, il reste que le Parti réformiste est le seul qui ait un plan
pour sauver le régime de pensions du Canada.
Le président du comité, qui est un député libéral de Winnipeg, a
déclaré que, dans 15 ans, le Régime de pensions du Canada
connaîtra de graves difficultés en raison de la mesure prise par le
gouvernement. Comment les députés libéraux ont-ils pu consolider
les assises du régime de pensions des députés sans se préoccuper
des pensions des simples citoyens?
Le gouvernement ne peut pas nier ce qu'il a fait. Voyez la
promesse sur la TPS, celle sur les garderies et celle sur l'ALENA. Il
y a eu 37 hausses d'impôt. Le pays n'a jamais connu un tel taux de
chômage depuis la crise des années 1930. Voyez les scandales de
Somalie, des Airbus, de la commission Krever et de Pearson.
Pourquoi les Canadiens devraient-il accorder leur confiance à un
gouvernement qui a fait montre d'une telle incurie et a joué un
double jeu?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères,
Lib.): Monsieur le Président, je suis très fier d'avoir servi au sein
d'un gouvernement qui, premièrement, a pu restaurer la confiance
des Canadiens envers leur gouvernement. C'est quelque chose que
le Parti réformiste, même dans ses rêves les plus fous, ne peut pas
imaginer faire.
Deuxièmement, nous avons réduit le taux de chômage, qui était à
un niveau très élevé en 1993. Nous avons créé plus de 750 000
emplois.
Nous avons abaissé les taux d'intérêt à un niveau jamais vu en 30
ans.
Nous avons restructuré le gouvernement et remis de l'ordre dans
les finances du Canada, ce qui nous donne un élan pour aborder le
prochain siècle.
Nous agissons avec pragmatisme et réalisme, sans nous laisser
emporter par une idéologie et des discours ronflants, comme cela
semble être la marque de commerce du député.
* * *
[
Français]
M. Stéphan Tremblay (Lac-Saint-Jean, BQ): Monsieur le
Président, ma question s'adresse au ministre des Transports.
Malgré l'aide du fédéral, les déboires des Lignes aériennes
Canadien International se poursuivent. Si Canadien International ne
trouve pas un acheteur pour Inter-Canadien, Canadien International
fermera ses portes au Québec dans moins de cinq semaines,
entraînant la perte de 500 emplois.
Qu'entend faire le gouvernement fédéral devant cette fermeture
potentielle, lui qui, encore au cours des derniers mois, a accepté de
retarder la balance du paiement de 120 millions de dollars octroyés
à Canadien par le fédéral en 1992, et qui a donné à Canadien, en
février dernier, une réduction de taxes sur l'essence de 20 millions
de dollars par année pour les quatre prochaines années?
[Traduction]
L'hon. David Anderson (ministre des Transports, Lib.):
Monsieur le Président, la situation relative à la filiale régionale de
Canadien International est assez simple. La société a proposé de
vendre la filiale. C'est arrivé il y a quelques jours à peine. Si je ne
m'abuse, il s'écoulera une période de 16 semaines avant que le
gouvernement ait à intervenir.
À l'heure actuelle, c'est simplement une entreprise privée qui
met en vente une autre entreprise ayant été fréquemment vendue. En
fait, cette entreprise s'est déjà appelée Québec Air. Elle a été
souvent achetée par d'autres sociétés.
Il semble que ce soit une pratique normale au sein de l'industrie
aérienne qu'une société change de main. À l'heure actuelle, rien ne
force le gouvernement à intervenir.
[Français]
M. Stéphan Tremblay (Lac-Saint-Jean, BQ): Monsieur le
Président, doit-on comprendre des propos du ministre que les
contribuables québécois ne sont bons qu'à payer des dizaines de
millions de dollars que le fédéral donne à Canadien, et qu'ils n'ont
pas un
10183
mot à dire quand cette même compagnie ferme boutique au Québec
deux mois plus tard?
(1435)
[Traduction]
L'hon. David Anderson (ministre des Transports, Lib.):
Monsieur le Président, comme je l'ai dit au député, il s'agit en
l'occurrence d'une entreprise privée canadienne qui en met une
autre en vente. Ce n'est pas une question de deniers publics.
Le député semble croire que Canadien International appartient au
gouvernement fédéral. Il n'en est rien. Canadien International est
une entreprise privée.
* * *
M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le
Président, il semble que le premier ministre soit sur le point de
déclencher des élections. Jusqu'à maintenant, nous ignorons les
questions qui seront en jeu durant la campagne. Les libéraux n'ont
pas de nouvelles idées ni de programme.
C'est un peu comme l'annonce de flocons de maïs. Je pense que
le slogan des libéraux va être: Essayez-nous à nouveau pour la
première fois. Ils vont voir si les gens se laissent prendre. Je doute
que les gens acceptent des augmentations d'impôts de 24 milliards
de dollars depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement, un
accroissement de 110 milliards de dollars de notre dette nationale
qui était déjà de 500 et quelque milliards et le fait qu'il y ait 1,4
million de chômeurs. Avec un bilan économique aussi honteux, je
me demande sur quoi les libéraux vont faire campagne.
Les ministériels ne devraient pas demander humblement aux
Canadiens de les réélire, mais plutôt leur présenter humblement
leurs excuses. Quelle raison le gouvernement pourrait-il invoquer
pour déclencher des élections fédérales à ce stade-ci?
Une voix: Nous voulons nous débarrasser du Parti réformiste.
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères,
Lib.): Monsieur le Président, si le député essaie d'utiliser la
métaphore d'une boîte de céréales qu'il a le temps de lire,
contrairement à son honorable collègue, ce dont je me réjouis, je
crois qu'on devrait parler dans le cas des réformistes d'une céréale
qui a perdu de son croquant.
Monsieur le Président, je ne veux pas attaquer ainsi les
réformistes.
C'est le député qui semble s'agiter au sujet des élections. C'est
son parti qui s'est empressé de présenter son programme. C'est son
chef qui fait campagne dans tout le pays. Ce sont les réformistes qui
présentent des excuses à leurs électeurs.
Nous sommes ici pour gouverner. Nous voulons veiller à ce que
notre pays soit entre de bonnes mains et le demeure. Lorsque des
élections seront déclenchées, nous nous attendons à ce que les
Canadiens nous reportent au pouvoir.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le
Président, il se peut que les libéraux croient qu'il suffit de faire des
cadeaux régulièrement aux gens pour obtenir des votes. Je ne suis
pas certain que les Canadiens se laisseront prendre.
Je peux imaginer le moment où les libéraux annonceront leur
programme. Ils feront jouer l'indicatif musical de Mission
impossible au moment où on viendra présenter le rejeton du livre
rouge, et ils essaieront une fois de plus de nous faire croire que cette
fois-ci, leurs promesses c'est pour de vrai.
Je me demande si les libéraux vont essayer de défendre les
actions de certains de leurs ministres, même si lorsque leurs députés
de l'arrière-ban au franc-parler font part de leur opinion, on les
expulse du parti? Vont-ils défendre cela? Vont-ils parler du régime
de pension très généreux des députés? Vont-ils parler de l'enquête
sur la Somalie? Va-t-il être question de l'entente sur l'aéroport
Pearson ou peut-être de l'affaire Airbus? Ils parleront peut-être de
libre-échange. Je pense qu'il sera plutôt question d'un financement
stable, à long terme, pour la Société Radio-Canada.
C'est une comédie digne de Air Farce. Je suis persuadé que les
libéraux ne peuvent faire campagne là-dessus. Dans leurs
documents de propagande, les libéraux affirment que les Canadiens
sont en bonnes mains. Mon oeil. Pourquoi les Canadiens
voteraient-ils pour quatre autres années de plus de ce genre de
gouvernement?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères,
Lib.): Monsieur le Président, le député parle de ce qu'il voit chez
les ministériels. S'il regardait autour de lui, il s'apercevrait que cela
ressemble à la retraite de Moscou. On n'a jamais vu un groupe de
gens aussi débraillés, complètement battus, qui battent retraite en
laissant derrière eux toutes sortes de députés qui ont démissionné ou
qui ont été expulsés.
Les députés réformistes jetés dehors par le chef de ce parti
forment maintenant un nouveau parti appelé «les indépendants».
J'espère qu'à un moment donné au cours de la période des
questions les réformistes pourront, alors que leurs jours à la
Chambre tirent à leur fin, poser des questions sérieuses sur les
problèmes de l'heure, sur les grandes questions ayant des
répercussions sur la politique publique, plutôt que de s'en tenir
simplement à leur petit programme.
* * *
(1440)
[Français]
M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, ma
question s'adresse au ministre du Développement des ressources
humaines.
Le 31 mars dernier, le gouvernement fédéral cessait de financer
le programme de transport quotidien des travailleurs agricoles au
Québec. Donc, cette année, le gouvernement du Québec assumera
seul la charge financière de ce programme, qui sera réduit de 40 p.
100, c'est-à-dire 330 000 $, à cause du retrait du gouvernement
fédéral.
10184
Compte tenu que ce programme fournit un moyen de transport
indispensable et correspondant à près de 150 000 jours-personnes
par année au Québec, et qu'il a fait ses preuves, qu'attend le
ministre pour introduire à nouveau le financement fédéral dans ce
programme?
[Traduction]
M. Robert D. Nault (secrétaire parlementaire du ministre du
Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le
Président, il est toujours intéressant d'entendre les députés d'en
face parler de champ de compétence.
Il s'agit justement d'un secteur de compétence provinciale. Le
gouvernement du Québec et les députés d'en face nous ont demandé
de nous retirer des secteurs de compétence provinciale, et c'est ce
que nous faisons.
[Français]
M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, pour
l'information de mon collègue d'en face, il s'agissait d'une entente
fédérale-provinciale et non d'une tutelle fédérale vis-à-vis du
gouvernement provincial. Et quand il y a entente, on est d'accord
pour faire des affaires ensemble.
La participation financière du gouvernement fédéral à ce
programme avait déjà été diminuée de 50 p. 100 à 40 p. 100 et puis,
maintenant, c'est rien du tout.
Le ministre est-il conscient que son refus de maintenir sa part de
financement à ce programme affectera surtout les petits producteurs
agricoles dans le recrutement de leur main-d'oeuvre et des milliers
de travailleurs saisonniers à faible revenu?
[Traduction]
M. Robert D. Nault (secrétaire parlementaire du ministre du
Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le
Président, nous en sommes parfaitement conscients. Voilà pourquoi
le ministère du Développement des ressources humaines a dit au
gouvernement provincial et à l'ensemble du secteur agricole qu'il
est très intéressé à examiner des propositions prévoyant de
nouvelles façons de faire.
Lorsque nous serons saisis de propositions en ce sens, nous les
examinerons de même que les solutions pour les mettre en oeuvre
d'une façon différente de ce que nous faisions par le passé, puisqu'il
s'agit d'un secteur de compétence provinciale et que le parti d'en
face est contre toute ingérence dans pareil secteur.
* * *
M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur
le Président, le premier ministre, le nouveau roi des nominations
politiques, ne cesse de dire qu'il ne nomme que de bons
libéraux-quel oxymoron!-à tous les postes politiques qu'il
comble.
Si tous les amis du Parti libéral qui occupent des postes politiques
sont si bons, pourquoi les contribuables canadiens doivent-ils payer
50 000 $ pour envoyer le président de VIA Rail suivre un cours de
huit semaines à Harvard?
L'hon. David Anderson (ministre des Transports, Lib.):
Monsieur le Président, VIA Rail est une société d'État dont je suis
responsable devant la Chambre. Je n'ai cependant pas la
responsabilité d'approuver chacune des décisions prises par VIA
Rail. Le député a fait une affirmation qui est peut-être exacte. Je ne
le sais pas. Je suis prêt à me renseigner à ce sujet et à lui
communiquer le résultat de mes démarches.
Je lui dirai cependant qu'un parti qui a toujours appuyé le secteur
privé et le concept selon lequel le gouvernement ne devrait pas
intervenir directement dans les entreprises commerciales devrait y
penser deux fois avant d'encourager les ministres à exercer un
contrôle constant sur les sociétés d'État ou les société privées.
M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur
le Président, ce que j'encourage le ministre à faire, c'est privatiser
VIA Rail.
Comme VIA Rail reçoit 600 000 $ par jour en subventions, la
somme de 50 000 $ peut peut-être sembler minime pour le premier
ministre, son ministre des Finances ou le ministre des Transports.
Or, cela représente un programme d'études de quatre ans pour un
étudiant canadien qui n'a pas les moyens de fréquenter l'université
parce que le gouvernement libéral a réduit de 40 p. 100 les fonds
affectés à l'éducation.
Est-ce que le premier ministre ou n'importe qui d'autre pourrait
expliquer pourquoi un ami du Parti libéral obtient 50 000 $ pour
aller suivre un cours de huit semaines dans une université
prestigieuse des États-Unis pendant que des milliers d'étudiants
canadiens n'ont pas les moyens de fréquenter l'université à cause
des réductions faites par le gouvernement fédéral?
L'hon. David Anderson (ministre des Transports, Lib.):
Monsieur le Président, lorsque j'ai répondu à la première question,
j'ai dit que, en tant que ministre responsable de faire rapport à la
Chambre sur VIA Rail, je n'avais pas à approuver chaque dépense
de 50 000 $ ou plus faite par la société, et le premier ministre non
plus.
(1445)
Il s'agit ici d'une société d'État qui fonctionne de façon
indépendante du gouvernement et dont le rapport annuel est déposé
à la Chambre par mon intermédiaire. Nous n'examinons pas chaque
décision avant qu'elle ne soit prise.
Je répéterai, pour la gouverne du député, ce que j'ai accepté de
faire. Je demanderai des détails à VIA Rail concernant l'affirmation
faite par le député pour vérifier si elle est exacte. La plupart des
affirmations faites par son parti sont inexactes. Si ce que le député a
dit est exact, je lui communiquerai tous les détails afin de voir si
cette dépense est justifiée ou non.
Je ne peux pas répondre de toutes les décisions de 50 000 $ prises
par une société qui, le député l'admet lui-même, reçoit au moins
600 000 $ par jour de l'État.
10185
[Français]
M. Benoît Sauvageau (Terrebonne, BQ): Monsieur le
Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires
étrangères.
Le ministre des Affaires étrangères nous répondait, lundi en cette
Chambre, qu'il avait l'intention de communiquer avec son
homologue égyptien d'ici une journée ou deux, afin de voir au
rapatriement d'urgence de l'aînée de la famille Robitaille,
gravement malade.
Le ministre peut-il nous dire quelles sont les conclusions de ses
discussions avec son homologue égyptien en vue de ramener les
enfants de la famille Robitaille, toujours retenus en Égypte?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères,
Lib.): Monsieur le Président, malheureusement, il a été impossible
d'arranger une conversation pour le moment. J'ai une lettre signée
qui s'adresse directement au ministre égyptien des Affaires
étrangères. Je continuerai d'essayer de le contacter directement,
personnellement, pour lui faire part du grand souci du
gouvernement du Canada.
M. Benoît Sauvageau (Terrebonne, BQ): Monsieur le
Président, on en conclut donc que la discussion n'a pas encore eu
lieu.
Je rappelle au ministre que l'Égypte est signataire de la
Convention relative aux droits de l'enfant de l'ONU. Donc,
l'Égypte a des obligations qu'elle doit remplir.
Le ministre des Affaires étrangères peut-il nous dire s'il va
invoquer la Convention relative aux droits de l'enfant auprès de son
homologue égyptien pour le convaincre de ramener au Canada
l'aînée de la famille Robitaille qui est gravement malade?
[Traduction]
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères,
Lib.): Monsieur le Président, les responsabilités aux termes de la
convention définissent certainement notre mandat, mais elles ne
sont pas obligatoires du point de vue juridique. Voilà le problème.
D'ici un jour ou deux, nous mettrons un terme à nos négociations
avec le gouvernement égyptien concernant un nouvel accord
consulaire, ce qui accroîtrait considérablement notre capacité de
faire des démarches au nom des enfants Robitaille.
Je comprends les frustrations. Je les ressens aussi, mais nous
devons essayer de régler cette affaire en ayant recours aux tribunes
internationales. Je tiendrai le député au courant de ce qui se passe à
chacune des étapes du processus.
* * *
[
Français]
M. Mauril Bélanger (Ottawa-Vanier, Lib.): Monsieur le
Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires
intergouvernementales.
Depuis plusieurs semaines, la communauté de l'Est ontarien
communique de diverses façons son objection la plus complète à
l'idée de fermer l'hôpital Montfort.
Étant donné le rôle que le gouvernement fédéral s'est mandaté de
jouer dans la défense des droits des minorités linguistiques partout
au Canada, le ministre pourrait-il communiquer à cette Chambre la
position du gouvernement au sujet de la fermeture de l'hôpital
Montfort?
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine
pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales,
Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement est d'avis que les
minorités linguistiques, partout au Canada, devraient avoir droit
non seulement aux services de base dans leur langue, mais aussi le
droit de contrôler le plus grand nombre d'institutions essentielles à
toute communauté, comme les écoles, les collèges, les hôpitaux, les
coopératives.
Ainsi que d'autres collègues, j'ai moi-même fait connaître ma
position au gouvernement de l'Ontario concernant la fermeture
proposée de l'hôpital Montfort, et ce, dès le premier jour. En tant
que ministre des Affaires intergouvernementales, je vais continuer
de demander à ce que le gouvernement de l'Ontario tienne compte
des sérieuses répercussions que pourrait engendrer la fermeture de
l'unique hôpital francophone d'Ottawa pour la communauté
franco-ontarienne.
Le premier ministre Harris a agi en grand Canadien quand il a
accordé aux Franco-Ontariens le contrôle de leurs institutions
scolaires. Il est à espérer que les mêmes principes le guideront dans
le cas de Montfort, le seul hôpital universitaire francophone en
Ontario.
* * *
(1450)
[Traduction]
M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, en
1992 un jeune de 17 ans a été reconnu coupable par un tribunal pour
adulte du meurtre d'un homme, père de quatre enfants. Il a été
condamné à la prison à vie, sans possibilité de libération
conditionnelle avant 25 ans.
Grâce au ministre de la Justice et au projet de loi C-41, ce jeune
contrevenant pourra obtenir sa libération conditionnelle après avoir
purgé seulement dix ans de prison. Voilà comment les libéraux
durcissent le ton envers les criminels.
Le ministre de la Justice peut-il me dire à quoi sert de traduire des
jeunes meurtriers devant un tribunal pour adulte si les peines qu'on
y impose ne s'appliquent pas à eux.
M. Gordon Kirkby (secrétaire parlementaire du ministre de
la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le
Président, je remercie le député de sa question.
Mon collègue sait que le tribunal d'appel a récemment rendu une
décision et comme cette décision pourrait encore faire l'objet d'un
appel, je ne puis me permettre de faire des observations à ce sujet.
10186
Les mesures prises par le ministre et le gouvernement parlent
d'elles-mêmes. Plus que tout autre dans l'histoire de notre pays, le
Parlement actuel a légiféré pour rendre le Code criminel, la Loi sur
les jeunes contrevenants et la Loi sur le système correctionnel et la
mise en liberté sous condition plus efficaces et pour aider les
victimes. Nous avons toutes les raisons d'en être très fiers.
M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président,
comment le secrétaire parlementaire ose-t-il affirmer que le
gouvernement durcit le ton envers les criminels alors qu'il apporte à
la loi des modifications qui font en sorte que les conséquences pour
un jeune contrevenant seront les mêmes, peu importe qu'il soit
traduit devant un tribunal pour adulte ou devant un tribunal pour
jeunes? Ça ne tient pas debout.
Monsieur le Président, je voudrais poser une question
complémentaire. Le jeune meurtrier de 17 ans a été condamné en
1992, deux ans avant l'adoption du projet de loi C-41. Il bénéficiera
donc de cette mesure à titre rétroactif. Le ministre de la Justice avait
pourtant déclaré que le projet de loi C-45 ne pourrait pas s'appliquer
à Clifford Olson en raison du principe de rétroactivité.
Pourquoi le principe de rétroactivité s'applique-t-il aux
meurtriers seulement lorsque c'est en leur faveur?
M. Gordon Kirkby (secrétaire parlementaire du ministre de
la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le
Président, comme je le disais, le gouvernement a pris de multiples
mesures pour améliorer l'efficacité de la législation pénale, des
mesures beaucoup plus efficaces et conformes au droit que tout ce
que les réformistes ont pu proposer dans leur programme de
répression de la criminalité.
Nous avons travaillé avec les provinces, les groupes de victimes,
les organisations policières, de nombreux autres groupes et
particuliers à la grandeur du Canada pour améliorer la législation
pénale. Quand ils parlent de loi pénale, les réformistes me font
penser à des parents qui regardent fièrement leur fils marcher avec
10 000 autres soldats et qui remarquent qu'il est le seul à avoir le
bon pas.
* * *
[
Français]
M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, ma
question s'adresse à la ministre de la Citoyenneté et de
l'Immigration.
Le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration refuse
d'accorder un visa de visiteur à Vedran Smailovic, célèbre
violoncelliste mondialement connu de Sarajevo. Les autorités de
l'immigration refusent le visa à M. Smailovic sous prétexte qu'il
n'aurait pas de raisons suffisantes pour venir au Canada, alors qu'il
y est invité par un journaliste pour collaborer à un livre pour enfants.
Pourquoi Immigration Canada refuse-t-il l'entrée au pays à
l'homme de paix qu'est Vedran Smailovic?
L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de
l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, si le député de
Bourassa n'a pas encore compris la législation concernant
l'immgration depuis 1993, nous avons ici un grave problème. Il sait
très bien qu'étant donné la Loi sur la protection des renseignements
personnels, il n'est nullement permis de discuter d'un cas en public.
M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, la
ministre a des pouvoirs discrétionnaires dans ce domaine. Mais ce
n'est pas le seul problème. Les citoyens canadiens et québécois vont
juger sévèrement ce gouvernement à cause de sa politique
discriminatoire en matière de visa.
M. Smailovic a visité plusieurs pays sans jamais y demander
asile. Il a également pris l'engagement de ne pas le demander une
fois rendu au Canada. La ministre s'engage-t-elle à réviser sa
position et à accorder le visa d'entrée à M. Smailovic?
L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de
l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, je
vais rappeler les faits au député de Bourassa. La ministre n'a aucun
pouvoir discrétionnaire pour livrer publiquement des
renseignements personnels. Alors, il n'est pas question que je
discute publiquement de ce cas.
* * *
(1455)
[Traduction]
M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Réf.): Monsieur le Président,
le ministre de l'Agriculture saura que, dans un rare esprit de
coopération, les producteurs laitiers, les transformateurs de
produits laitiers et le gouvernement se sont entendus pour rajuster le
prix du lait une fois par an, le 1er février. Ainsi, pendant six mois, les
producteurs laitiers produiront du lait à un coût inférieur au coût de
production.
Quelle raison peut-il avoir d'annoncer l'élimination progressive
de la subvention à la production laitière à partir du 1er août plutôt
qu'à partir du 1er février 1998?
L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de
l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, la mesure dont
parle le député se trouve dans le budget de 1996. Étant donné que le
budget est du domaine public et a fait l'objet de discussions, les
producteurs laitiers et les transformateurs de produits laitiers ont
argué, avec logique, qu'il serait plus commode et plus rentable de
réduire la subvention au début de février, non pas le 1er janvier, mais
le 1er février, plutôt que le 1er août comme cela a été la tradition
pendant des années.
Le gouvernement examine actuellement cette recommandation
de la part des producteurs laitiers et des transformateurs de produits
laitiers et, dès que nous serons en mesure de confirmer les
arrangements appropriés, nous les rendrons publics.
10187
Si j'en juge par la teneur et le ton de la question du député, je me
réjouis de voir qu'il est en faveur de la gestion de l'offre.
M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Réf.): Monsieur le Président,
de toute évidence, le ministre n'a pas très bien saisi la teneur et le
ton de ma question.
Je suis sûr qu'il sait déjà que les producteurs ont accepté de
renoncer à une augmentation de 2,1 p. 100 du prix du lait, ce qui
représente une économie de 40 millions de dollars pour les
consommateurs. Il ne s'agit pas d'être en faveur de la gestion de
l'offre, mais de respecter ses engagements.
Le ministre va-t-il accepter de le faire aujourd'hui? De nombreux
producteurs laitiers aimeraient bien qu'il respecte ses engagements.
L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de
l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, les arrangements
en ce qui concerne l'élimination progressive de la subvention à la
production laitière sur un certain nombre d'années comportent des
éléments extrêmement techniques. Ce n'est pas une chose que l'on
gribouille au dos d'une enveloppe.
Par conséquent, j'ai eu de longs entretiens avec les représentants
de l'industrie laitière. Je dois avoir une nouvelle rencontre avec Les
producteurs laitiers du Canada plus tard cet après-midi. L'esprit est
à la coopération et l'on essaie de trouver un mécanisme qui
permettra d'atteindre l'objectif que les producteurs laitiers et les
transformateurs de produits laitiers ont en tête.
J'ajouterai que je suis désolé d'apprendre que le député n'est pas
en faveur de la gestion de l'offre.
* * *
L'hon. Sheila Finestone (Mont-Royal, Lib.): Monsieur le
Président, j'ai toujours pensé que la formation de la main-d'oeuvre
devait être conçue pour répondre à des besoins précis, plus près de la
réalité régionale, au Québec, car la réalité à Chicoutimi est bien
différente de ce qu'elle est à Montréal, Sherbrooke ou Gaspé.
Je suis heureuse que le gouvernement ait signé un accord avec le
gouvernement du Québec, car cela favorisera des mesures et des
programmes dynamiques de création d'emplois qui aideront les
chômeurs à réintégrer le marché du travail.
Ma question s'adresse au ministre du Développement des
ressources humaines. J'ai besoin d'une précision sur l'admissibilité
des anglophones à ces programmes et sur la pertinence de ces
programmes dans leur cas. Comment seront-ils protégés et
qu'a-t-on prévu pour leur en assurer l'accessibilité dans les
dispositions de l'accord Québec-Canada et en vertu de la nouvelle
politique de gestion?
M. Robert D. Nault (secrétaire parlementaire du ministre du
Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le
Président, je suis très honoré et très fier de prendre la parole ici
aujourd'hui pour faire savoir à la députée que le gouvernement et le
Parti libéral continuent de défendre inlassablement les droits des
minorités linguistiques au Canada.
Jusqu'à maintenant, les cinq accords que nous avons conclus
avec des provinces concernant le marché du travail comportent des
dispositions qui protègent les droits des minorités linguistiques de
ces provinces.
Nous avons conclu le même accord avec le Québec qu'avec les
autres provinces. Ces droits seront protégés. Les Québécois de
langue anglaise pourront obtenir, en anglais, les mêmes services qui
sont assurés en français aux francophones des autres provinces.
* * *
(1500)
M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona, NPD): Monsieur le
Président, ma question s'adresse au ministre de la Santé. Il sait, j'en
suis sûr, que le comité chargé d'examiner le projet de loi C-91 a fait
rapport et qu'il approuvé l'acceptation par le Canada d'une
protection de 20 ans pour les brevets.
Étant donné que le ministre de la Santé a maintes fois déclaré lors
des législatures antérieures qu'une protection de 20 ans n'était pas
souhaitable, je voudrais lui demander ce qu'il est prêt à faire pour
remédier à la situation. N'est-il pas déçu du rapport du comité? Si le
gouvernement n'est pas prêt à condamner les conclusions du
comité, le ministre est-il prêt à dire que finalement, clairement,
absolument et vraiment les libéraux sont revenus sur la promesse
qu'ils ont faite à la population canadienne en ce qui concerne le
projet de loi C-91?
L'hon. David Dingwall (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur
le Président, ne voulant pas endosser le préambule du député, je me
contenterai de dire que le gouvernement vient seulement de
recevoir copie du rapport sur le projet de loi C-91. Les ministres
auront l'occasion de l'examiner ultérieurement.
Quoi qu'en dise le député, le ministre de l'Industrie et moi avons
exposé le point de vue du gouvernement en ce qui concerne les
brevets de 20 ans et, en particulier, nos obligations internationales.
Je pense que le pays et les divers groupes actifs dans le domaine de
la santé connaissent la situation. C'est certainement vrai aussi pour
les gouvernements provinciaux, même si, pour des raisons
politiques, ils sont prêts à argumenter.
* * *
[
Français]
M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans,
BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de
l'Environnement.
Le Service canadien de la faune vient d'annoncer, à Montmagny,
qu'il refusait l'émission de permis d'effarouchement et d'abattage
des oies blanches pour 1997, ce qu'il avait pourtant autorisé l'an
dernier à la satisfaction de tous.
10188
Pourquoi le ministre persiste-t-il à refuser l'émission de permis
d'abattage, puisqu'il s'est avéré que cette méthode diminue
considérablement les dommages chez les producteurs agricoles, et
ce, sans mettre l'espèce en danger?
[Traduction]
L'hon. Sergio Marchi (ministre de l'Environnement, Lib.):
Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.
Aux termes de la convention sur les oiseaux migrateurs, il serait
tout simplement illégal de chasser les oies puisque le Congrès
américain n'a toujours pas ratifié les modifications à cette dernière.
Nous avons annoncé, il y a quelques jours, que nous avions
autorisé l'abattage d'un certain nombre d'oiseaux l'an dernier, mais
que le programme n'avait pas été un succès. Il avait été convenu
qu'on les laisserait par terre pour faire peur aux autres. Ce qui est
arrivé c'est qu'on ne les a pas laissés et que ça n'a pas fait peur aux
autres.
Cette année, nous avons fait quelques ajustements. Trois champs
attireront les oies qui migrent du sud vers le nord, dans l'espoir
qu'elles ne ravageront pas les autres champs comme elles l'ont fait
dans le passé.
Cette solution bénéficie de l'appui des intéressés. Un consensus
très net s'est dégagé de la table ronde. Il est évident que nous devons
écouter les intérêts locaux et essayer cette méthode car le système
auquel on a eu recours l'an dernier n'a pas fonctionné aussi bien
qu'on l'aurait espéré. Ensuite, bien sûr, à la fin de la période de
migration, nous évaluerons la situation en prévision de l'année
prochaine.
* * *
Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le
Président, en octobre 1993, lorsque le présent gouvernement est
arrivé au pouvoir en promettant des emplois, des emplois et encore
des emplois, 144 000 Canadiens de l'Atlantique étaient en
chômage.
À la fin du mois dernier, trois ans et demi plus tard, 173 000
Canadiens de l'Atlantique étaient en chômage selon les données de
Statistique Canada. Cela représente une augmentation de 29 000,
soit 20 p. 100.
Comment le premier ministre peut-il expliquer ce bilan
déplorable aux chômeurs de l'Atlantique?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères,
Lib.): Monsieur le Président, tout ce que l'on peut dire c'est que
notre pays a encore une tâche énorme à accomplir sur le plan des
possibilités d'emploi pour les Canadiens.
(1505)
La meilleure façon d'y parvenir est d'assurer la vigueur
économique du pays. Nous l'avons démontré; il suffit de voir que la
croissance actuelle se chiffre à 3,5 p. 100 par année, selon nos
prévisions, que les taux d'intérêt sont maintenant très bas et que
nous avons restructuré le gouvernement de telle sorte qu'on peut
concentrer nos efforts sur les secteurs offrant le plus de possibilités
de croissance.
En fait, le gouvernement précédent nous a laissé en héritage une
situation absolument catastrophique. Nous avons hérité d'un
problème considérable et de grande envergure. Nous avons travaillé
avec acharnement pour l'atténuer et je crois que les Canadiens sont
à la veille de profiter de la restructuration et de la modernisation.
Nous avons tout simplement besoin d'un autre mandat de quatre ans
pour parachever la tâche.
* * *
[
Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ):
Monsieur le Président, je ne prendrai pas de chance.
Au cas où Aline Chrétien aurait décidé de demander à son mari de
faire le grand ménage du printemps au 24 Sussex au lieu de
déclencher des élections, je ne prendrai pas de chance, je vais
demander au leader parlementaire adjoint du gouvernement à la
Chambre de nous dire quel sera le menu législatif pour la semaine
prochaine.
[Traduction]
M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du
gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le
Président, notre menu pour le mois d'avril nous a été donné de façon
générale dans la déclaration hebdomadaire du 20 mars et, au cours
des quelques jours qui restent au calendrier d'avril, nous
poursuivrons ces travaux avec détermination après avoir consulté
en suivant la filière habituelle.
Il est juste de dire que ce processus a très bien fonctionné. Il
convient de remercier les députés d'en face ainsi que ceux de ce
côté-ci de la Chambre pour le degré élevé de coopération qui nous a
valu de venir à bout de ce menu extrêmement chargé.
Je tiens à souligner le rôle constructif de tous les députés,
notamment les députés du Parti réformiste et du Bloc québécois
ainsi que le député de Lethbridge qui nous a montré que l'on peut
très bien exprimer son opposition sans nécessairement faire de
l'obstruction.
Plus important encore peut-être, le député de Lethbridge a fait la
preuve que l'on peut être un adversaire efficace sans être considéré
pour autant comme une ennemi personnel. Il a su apporter dignité et
maturité aux délibérations de la Chambre, et nous devrions tous
prendre exemple sur sa conduite.
[Français]
M. Sauvageau: Monsieur le Président, je viens tout juste de
recevoir une pétition du greffier des pétitions. Je sais que c'est
probablement le dernier moment où je pourrai la déposer.
Malheureusement, cette pétition n'est pas tout à fait conforme aux
exigences de la Chambre.
Je demande le consentement unanime de la Chambre pour
pouvoir quand même déposer cette pétition à la Chambre.
Le vice-président: Le député de Terrebonne a-t-il le
consentement de la Chambre?
10189
Des voix: D'accord.
______________________________________________
10189
AFFAIRES COURANTES
[
Français]
M. Benoît Sauvageau (Terrebonne, BQ): Monsieur le
Président, cette pétition a été remplie par Mme Suzie Robitaille,
dans le cas de ses cinq enfants qui sont retenus en Egypte. Cette
pétition a été signée par 2 423 personnes.
______________________________________________
10189
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[
Français]
La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-65, Loi
concernant la protection des espèces en péril au Canada, ainsi que
des motions du groupe no 1.
Le vice-président: Il reste encore sept minutes au député de
Lac-Saint-Jean.
M. Stéphan Tremblay (Lac-Saint-Jean, BQ): Monsieur le
Président, c'est probablement mon dernier discours lors de cette 35e
législature. Ce fut un mandat très court, une courte année,
comparativement à tous mes autres collègues.
J'aimerais en profiter pour remercier mes électeurs du comté
fédéral de Lac-Saint-Jean. Je les remercie, comme lors de mon
premier discours, de m'avoir fait confiance. Ce n'était pas évident,
cela a donné lieu à certains débats. Les gens se demandaient s'ils
devaient faire confiance à quelqu'un qui n'avait aucune expérience
en politique. Est-ce que ce serait dramatique, pour le comté de
Lac-Saint-Jean, d'être représenté par une personne sans
expérience?
Après un an, je suis heureux de leur dire qu'on peut faire
confiance à la jeunesse, on peut faire confiance à la non-expérience.
Je pense que ça s'est très bien passé, et que le chemin n'a pas été
trop difficile, cette année.
(1510)
J'ai eu le temps de développer des projets dans mon comté, dont
l'opération Maillage qui a pour but d'unir des gens de diverses
compétences. Ce ne sera probablement pas annoncé pendant les
élections, mais ce le sera après, à ma grande joie, car nous aurons
réussi à développer un nouveau concept à Alma. Les gens qui ont
une idée d'affaire, un potentiel entrepreneurial, ou qui voudraient
avoir un partenaire d'affaires pourront se réunir et faire des
maillages de compétences. On pense que cela pourra faire émerger
les petites entreprises qui créeront de l'emploi.
Deuxièmement, on se souviendra de la soirée du 29 décembre où,
comme élu, et face à un problème, j'ai convoqué toute la population
en leur disant: «Vous devez être présents, pas seulement pour payer
vos taxes et pour voter une fois tous les quatre ans, mais également
pour apporter vos solutions.»
On dit souvent qu'il y a plus d'idées dans deux têtes que dans une.
J'ai fait confiance à la population. Elle a apporté des solutions, une
dizaine d'orientations sur lesquelles on travaille depuis le mois de
janvier dernier. On a présenté des choses concrètes. Donc, je suis
très heureux de ce qui a pu se passer dans mon comté.
Finalement, il m'a fait grand plaisir de travailler avec mes
collègues du Bloc québécois. J'espère que je pourrai continuer à
travailler avec eux lors d'un prochain mandat. Nous l'espérons bien
et c'est fort probable, car nous mettrons, dans cette campagne,
énormément de détermination.
Parfois les gens me demandent: «Est-ce que ça te tente de
retourner en élection après seulement un an?» Je pense que c'est la
plus belle chose qui puisse arriver à un élu que de retourner en
campagne, un an seulement après avoir été élu. Lorsqu'on fait une
première campagne, on n'est pas trop au courant de la façon dont
cela fonctionne, de la machine, de tout le fonctionnement de cette
structure. Après un an, je retourne auprès de la population et je serai
en mesure de parler vraiment de ce qui se passe à la Chambre des
communes.
Pour mon dernier discours de cette 35e législature, je tenais à
ouvrir cette petite parenthèse. En fin de compte, c'est une très belle
expérience que j'ai pu vivre et j'espère que je pourrai continuer à le
faire dans les prochaines années.
Revenons à nos moutons et parlons du projet de loi C-65. J'avais
entamé mon débat avant la période des questions orales et j'ai dû
m'arrêter par manque de temps. J'en étais rendu aux commentaires
généraux, les raisons pour lesquelles nous étions plus ou moins
d'accord, ou pas du tout d'accord avec le projet de loi.
Le projet de loi C-65 menace directement des compétences de
juridiction provinciale. En effet, sous prétexte de vouloir rencontrer
les exigences de la Convention internationale sur la biodiversité, le
gouvernement libéral tente de s'ingérer dans les champs de
compétence des provinces.
Il n'y a pas de surprise, c'est la même redondance habituelle. Il y
a des expertises qui sont développées dans les provinces,
notamment au Québec, où on a déjà une loi pour la protection de la
biodiversité, qui a été adoptée en 1989 d'ailleurs. On avait une
expertise dans la province, on connaît le domaine, ça va très bien.
Mais là, le fédéral vient s'ingérer dans ces juridictions. Je vous ferai
remarquer que c'est d'ailleurs inscrit dans la Constitution, mais que
voulez-vous, il faut qu'il se donne un certain prestige. Il faut donner
un certain prestige à cette institution fédérale.
Enfin, je ne peux pas l'expliquer, peut-être que nos collègues
d'en face pourront expliquer quel est le but de cette ingérence, mais
je ne le comprends pas.
En outre, le projet de loi C-65 ne respecte pas le partage des
pouvoirs prévus dans la Constitution et l'interprétation qui en a
toujours été faite, notamment parce qu'il repose sur une lecture
beaucoup plus large de la définition de son territoire et parce qu'il
ne respecte pas la responsabilité constitutionnelle conjointe qu'il
10190
partage avec les provinces sur certaines espèces. Cela rejoint donc
ce que j'ai dit précédemment.
(1515)
Troisièmement, le projet de loi C-65 octroie au ministre de
l'Environnement un large pouvoir discrétionnaire, notamment de
décider de la nomination des membres du COSEPAC, de décider de
l'inscription d'espèces par ailleurs désignées menacées ou en voie
de disparition par le COSEPAC, de mettre en oeuvre ou non les
plans de rétablissement.
Encore là, c'est le même problème quand on parle d'ingérence
dans les juridictions, on dit que le ministre aura un large pouvoir
discrétionnaire, notamment de décider les nominations du
COSEPAC. Cela me fait penser à bien des projets de loi. Lorsqu'on
a à former un comité ou quoi que ce soit, c'est toujours le ministre
qui a le droit de nommer ses petits amis. J'écoutais mon collègue, le
député de Frontenac, qui a parlé sur ce sujet tout à l'heure. Cette
situation est dommage parce que la petite famille libérale restera
très cloîtrée, ce n'est pas vraiment ouvert au public, on nomme nos
copains, nos amis, ceux envers qui on a des dettes.
Je pourrais parler longtemps parce que j'en ai gros sur le coeur.
On n'a qu'à penser à tous les candidats libéraux qui se sont fait
battre aux dernières élections de 1993, je pense que 40 d'entre eux
travaillent aujourd'hui dans la fonction publique canadienne, tout
simplement parce qu'avec de bons contacts, ils ont rendu service au
parti et on les récompense. Belle démocratie!
C'est tout le temps que j'ai alors je vous souhaite une très bonne
élection, monsieur le Président. J'espère qu'on se reverra au mois
de septembre prochain.
Le vice-président: C'est trop aimable à mon collègue. La parole
est maintenant au député de Mégantic-Compton-Stanstead pour
un recours au Règlement.
M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead, BQ):
Monsieur le Président, je voudrais que vous vérifiez s'il y a le
quorum.
Le vice-président: Il n'y a pas de quorum. Convoquez les
députés.
(1520)
[Traduction]
Après le compte:
Le Président: Il y a quorum. Débat.
M. Francis G. LeBlanc (secrétaire parlementaire du ministre
des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le
Règlement. Vous constaterez, je crois, qu'il y a consentement pour
que:
Après le débat sur chacun des groupes, toutes les motions à l'étape du rapport du
projet de loi C-65 soient considérées comme ayant été mises aux voix, le vote inscrit
ayant été demandé et différé d'office.
Le Président: Aidez-moi à comprendre. Ce matin, il y a eu
consentement unanime pour que toutes les motions soient
considérées comme ayant été proposées et appuyées. Est-ce que le
député propose bien d'ajouter autre chose? Est-ce que quelque
chose m'a échappé? Elles ont été proposées et appuyées.
M. LeBlanc (Cap-Breton Highlands-Canso): Monsieur le
Président, vous allez devoir être patient. Je suis les instructions qui
m'ont été données. Il est proposé que, après le débat sur chacun des
groupes, toutes les motions à l'étape du rapport du projet de loi C-65
soient considérées comme ayant été mises aux voies, le vote inscrit
ayant été demandé et différé d'office.
Le Président: Je comprends. La Chambre consent-elle à ce que
la motion soit présentée?
[Français]
M. Laurin: Monsieur le Président, je voudrais poser une
question. On sera peut-être d'accord avec le dépôt de la motion,
dépendemment du contenu. Mais dans le contenu, il me semble que
mon honorable collègue a demandé que les motions soient réputées
avoir été présentées et la mise aux voix reportée.
Si ce vote est reporté, à quand le sera-t-il? Si c'est reporté à plus
tard aujourd'hui, c'est une chose, mais si c'est reporté à lundi
prochain, c'est une tout autre chose. Je voudrais qu'on précise à
quand le vote sera reporté et nous verrons si nous pouvons donner
notre consentement.
Le Président: En réponse à votre question, mon collègue,
d'habitude, toutes les mises aux voix sont reportées à la fin du
débat. Si cela a lieu aujourd'hui, ça va, et si cela a lieu une autre fois,
c'est correct aussi. Mais d'habitude, c'est à la fin du débat. Est-ce
que cela répond à votre question?
(1525)
M. Laurin: Monsieur le Président, si c'est ça, il me semble que
la motion de mon collègue est inutile. Il propose que le vote soit
reporté. À la fin du débat, nous allons demander qu'il soit reporté.
Alors, est-ce que cette motion a encore une utilité?
Le Président: Mon cher collègue, ce n'est au Président de dire
quand le débat va se terminer, c'est à la Chambre de décider.
M. Laurin: On pourrait poser la question à mon collègue.
Le Président: Nous allons donc soumettre la question à notre
collègue et nous verrons s'il a une réponse.
[Traduction]
M. Keyes: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Je
voudrais tout juste préciser à la Chambre et notamment aux députés
bloquistes que nous essayons de procéder exactement de la même
manière que pour d'autres projets de loi, comme le C-44, afin
d'accélérer le débat, mais en regroupant les amendements pour que
nous puissions nous prononcer à la fin seulement au lieu de le faire
au fur et à mesure sur chacun d'eux. Nous accélérons ainsi le débat
pour que tous aient l'occasion d'intervenir. Les amendements sont
regroupés pour que nous puissions nous prononcer sur l'ensemble à
la fin du débat.
10191
Le Président: J'ai une question à poser au député de Cap-Breton
Highlands-Canso. Est-ce que vous voulez préciser le moment? Je
crois que c'est là le problème. Si vous pouviez donner cette
précision, nous pourrions élucider la question.
M. LeBlanc (Cap-Breton Highlands-Canso): Monsieur le
Président, je crois que le vote sera reporté à la prochaine séance.
Est-ce que cela semble logique?
[Français]
Le Président: À la prochaine séance de la Chambre.
M. Laurin: Si la motion de mon collègue signifie qu'il veut
reporter les mises aux voix à la prochaine séance, nous donnons
notre consentement.
[Traduction]
Le Président: Le député est-il autorisé à proposer la motion?
[Français]
M. Bernier (Gaspé): Pour que ce soit encore plus clair, je
comprends qu'il faut voter, et le vote final, c'est correct, on peut le
différer, mais je veux bien comprendre la motion du député de
Cap-Breton Highlands-Canso.
Il y a cinq groupes de motion. Est-ce que cela veut dire que les
votes qui doivent être pris à la fin du groupe 1, du groupe 2, du
groupe 3, du groupe 4 et du groupe 5 n'auront lieu qu'à la fin? Donc,
il ne sera pas nécessaire que cinq députés se lèvent pour demander
ce vote.
M. Laurin: C'est ça. Ils vont tous être reportés à lundi.
[Traduction]
M. Keyes: Oui, monsieur le Président, le député a tout à fait
raison. Nous allons reporter tous les votes à la fin de la journée. La
présidence fera alors sonner le timbre et le vote sera différé à lundi.
Le Président: Le député est-il autorisé à proposer la motion?
Des voix: D'accord.
Le Président: Vous saisissez les termes de la motion.
Acceptez-vous les termes de la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
Le Président: Avant la reprise du débat, je dois donner la parole
au député de Thunder Bay-Atikokan, qui soulève la question de
privilège.
* * *
M. Stan Dromisky (Thunder Bay-Atikokan, Lib.): Monsieur
le Président, hier, le 23 avril, le député de Vancouver-Nord a fait une
déclaration à la Chambre, pendant la période de questions, et a
mentionné un bulletin parlementaire que j'avais publié.
(1530)
Première rectification: il ne s'agissait pas d'un bulletin
parlementaire, mais d'un dix-pour-cent. Cependant, il y a un
mystère qui plane. J'exige qu'on tente de l'élucider.
Ces dix-pour-cent se trouvaient uniquement à deux endroits, hier,
sur la colline. L'un d'eux était dans mon bureau et l'autre, dans des
boîtes au bureau de poste situé au premier étage de l'édifice de
l'Ouest.
Ce n'est peut-être qu'une coïncidence que le député de
Vancouver-Nord ait un bureau situé juste à côté du bureau de poste
et qu'il ait, d'une façon ou d'une autre, obtenu un exemplaire de
cette publication.
Le Président: Je ne voudrais pas ralentir les travaux de la
Chambre pour des questions de forme, mais le député m'a-t-il avisé
au préalable qu'il soulèverait la question de privilège?
M. Dromisky: Oui, je vous ai transmis une note, monsieur le
Président.
Le Président: Il semble y avoir ici un mystère. Voici ce que je
propose: je vais faire de mon mieux pour l'élucider. Je tâcherai
d'obtenir les renseignements et de les communiquer à la Chambre.
Cela convient-il au député?
M. Dromisky: Cela me convient, monsieur le Président.
* * *
[
Traduction]
La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-65, Loi
concernant la protection des espèces en péril au Canada, dont le
comité a fait rapport avec des propositions d'amendement, ainsi que
des motions nos 1, 3, 4, 6, 7, 11, 19, 25, 27, 50, 54, 56 à 60, 62, 63,
65, 66 et 82 à 109.
(Les votes sont réputés demandés et reportés.)
[Français]
Le Président: Il faut toujours prendre une question de privilège
avant toute autre chose. C'est pour cela que je l'ai fait.
Nous reprenons le débat.
[Traduction]
Conformément à un accord conclu plus tôt, toutes les motions du
groupe no 2 sont réputées avoir été proposées et appuyées.
Mme Monique Guay (Laurentides, BQ) propose:
10192
Motion no 2
Que le projet de loi C-65, à l'article Préambule, soit modifié par substitution, aux
lignes 32 et 33, page 1, de ce qui suit:
«les divers ordres de gouvernement et qu'en vertu de l'Accord national pour la
protection des espèces en péril, la concertation est essentielle en vue d'établir»
Motion no 16
Que le projet de loi C-65, à l'article 3.1, soit modifié par substitution, aux lignes 1
à 14, page 6, de ce qui suit:
«3.1 Si le ministre provincial signifie au ministre que le gouvernement de la
province ne veut pas qu'une disposition de la loi ou des règlements pris sous son
empire s'applique dans la province à l'égard des espèces sauvages et de leur habitat
pour autant que les individus de ces espèces se trouvent dans cette province sur un
territoire ne faisant pas partie du territoire domanial, cette disposition ou les
règlements, selon le cas, ne s'applique pas à ces espèces et à leur habitat jusqu'à ce
que le ministre provincial consente à leur application à ces espèces et à leur habitat.»
Motion no 21
Que le projet de loi C-65, à l'article 5, soit modifié par substitution, dans la
version française, aux lignes 28 et 29, page 7, de ce qui suit:
«disparition des espèces sauvages et à per-»
Motion no 24
Que le projet de loi C-65, à l'article 7, soit modifié par adjonction, après la ligne
31, page 8, de ce qui suit:
«(3) Par dérogation au paragraphe (2), le ministre compétent ne peut conclure
d'accord en vertu de ce paragraphe avec une organisation ou une personne dans une
province à moins que le ministre n'avise le ministre provincial de cette province de
l'intention du ministre compétent de conclure un accord avec cette organisation ou
cette personne et que le ministre provincial de cette province n'informe le ministre
compétent que le gouvernement de la province ne s'oppose pas à ce que le ministre
compétent conclue un tel accord avec cette organisation ou cette personne.»
Motion no 26
Que le projet de loi C-65, à l'article 8, soit modifié par adjonction, après la ligne
11, page 9, de ce qui suit:
«(1.1) Par dérogation au paragraphe (1), le ministre compétent ne peut conclure
d'accord en vertu de ce paragraphe avec une organisation ou une personne dans une
province à moins que le ministre n'avise le ministre provincial de cette province de
l'intention du ministre compétent de conclure un accord avec cette organisation ou
cette personne et que le ministre provincial de cette province n'informe le ministre
compétent que le gouvernement de la province ne s'oppose pas à ce que le ministre
compétent conclue un tel accord avec cette organisation ou cette personne.»
Motion no 34
Que le projet de loi C-65, à l'article 20, soit modifié par substitution, à la ligne 16,
page 13, de ce qui suit:
«(2) Sur recommandation du COSEPAC et avec l'agrément du Conseil, le»
Motion no 35
Que le projet de loi C-65, à l'article 26, soit modifié par substitution, à la ligne 1,
page 15, de ce qui suit:
«26.1 Sur l'avis du COSEPAC et avec l'agrément du Conseil, le ministre»
Motion no 44
Que le projet de loi C-65, à l'article 33, soit modifié par adjonction, après la ligne
29, page 16, de ce qui suit:
«(1.1) Si le ministre provincial signifie au ministre que le gouvernement de la
province ne veut pas que le paragraphe (1) s'applique dans la province à l'égard
d'une espèce faunique pour autant que les individus de l'espèce se trouvent dans
cette province sur un territoire ne faisant pas partie du territoire domanial, ce
paragraphe ne s'applique pas à cette espèce jusqu'à ce que le ministre provincial
consente à l'application de ce paragraphe à cette espèce.»
Motion no 49
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié (a) par substitution, à la ligne
1, page 21, de ce qui suit:
«38.(1) Avec l'aide du Conseil, le ministre compétent élabore un»
(b) par substitution, à la ligne 10, page 21, de ce qui suit:
«par eux avec l'aide du Conseil.»
Motion no 55
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié par substitution, à la ligne 38,
page 21, de ce qui suit:
«(4) Sur l'avis du COSEPAC et avec l'aide du Conseil, le ministre»
Motion no 64
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié par substitution, à la ligne 1,
page 23, de ce qui suit:
«(6) Avec l'aide du Conseil, le ministre compétent fixe la teneur du»
M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD)
propose:
Motion no 15
Que le projet de loi C-65, à l'article 3, soit modifié par substitution, aux lignes 40
à 43, page 5, de ce qui suit:
«leur habitat.»
L'hon. Sergio Marchi (ministre de l'Environnement, Lib.)
propose:
Motion no 17
Que le projet de loi C-65, à l'article 3.1, soit modifié:
a) par substitution, à la ligne 3, page 6, de ce qui suit:
«règlements pris au titre des articles 42 ou 45.1 ne sont»
b) par substitution, aux lignes 6 et 7, page 6, de ce qui suit:
«cette espèce et l'habitat de celle-ci se retrouvent sur le territoire domanial. Cette
restriction au territoire domanial ne s'appli-»
c) par substitution, à la ligne 10, page 6, de ce qui suit:
«visés aux alinéas 3a) ou b) ou à l'article 33;»
Motion no 45
Que le projet de loi C-65, à l'article 33, soit modifié:
a) par substitution, à la ligne 38, page 16, de ce qui suit:
«équivalentes à l'égard de l'espèce en cause. Le décret n'affecte en rien
l'application du paragraphe (1) dans le territoire domanial.»
b) par substitution, à la ligne 1, page 17, de ce qui suit:
«(4) Dès lors, toute personne peut, dans les»
10193
Motion no 74
Que le projet de loi C-65, à l'article 46, soit modifié par substitution, aux lignes 19 à
23, page 25, de ce qui suit:
«touchant une espèce inscrite, ses résidences ou toute autre partie de son habitat
essentiel.»
Motion no 81
Que le projet de loi C-65, à l'article 49, soit modifié par substitution, à la ligne 14,
page 27, de ce qui suit:
«projet mis en oeuvre à l'extérieur du Canada, de son plateau continental et de sa
zone économique exclusive,»
M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Monsieur le
Président, je suis heureux de participer au débat sur la deuxième
série d'amendements.
La plupart des Canadiens approuvent l'objet du projet de loi dont
nous sommes saisis, c'est-à-dire la protection des espèces en péril.
Cependant, dans sa forme actuelle, le projet de loi cause de
nombreux problèmes aux propriétaires fonciers, aux usagers et à
ceux qui s'intéressent vraiment aux espèces en péril, parce qu'il
s'en prend non seulement aux propriétaires fonciers, aux usagers et
à ceux qui s'intéressent à la nature, mais aussi aux espèces qui sont
déjà menacées.
De toute évidence, ce projet de loi n'a pas été pensé avec
beaucoup d'attention. Permettez-moi d'abord de lire une brève
déclaration de M. Jack Munro, président de la Forest Alliance of
British Columbia. Il a déclaré: «Tout d'abord, le projet de loi
n'accorde pas du tout assez d'attention aux effets sociaux et
économiques. Je ne dis pas que la protection des espèces en péril ne
mérite pas qu'on paie un certain prix, mais je dis que nous devrions
évaluer ce prix et être certains de trouver un moyen juste de décider
qui doit le payer. Tout ce qui est prévu à cet égard dans le projet de
loi est l'article 38, qui fait état de la nécessité d'évaluer les coûts et
les avantages des activités de recherche et de gestion. L'on peut
supposer que cela englobe les coûts sociaux et économiques, tels les
emplois perdus si la récolte du bois n'est plus autorisée dans une
région donnée. Mais lorsqu'il s'agit de quelque chose d'aussi
critique que les emplois et le genre de vie des gens, nous ne devrions
pas avoir à présumer quoi que ce soit. Le gouvernement devrait être
tenu de faire beaucoup plus qu'une simple évaluation générale des
coûts et des avantages.»
(1535)
À mon avis, le grand reproche qu'on peut faire à propos du projet
de loi, c'est le manque de réflexion qu'on y a consacrée. Le ministre
de l'Environnement n'a malheureusement pas réfléchi à ce que le
projet de loi C-65 coûtera à l'ensemble des propriétaires fonciers et
des contribuables. Quand on lui a demandé, lors d'une séance du
comité en février, quel coût il serait prêt à imposer à un particulier
ou à une société, le ministre de l'Environnement a répondu qu'il
n'avait pas réfléchi à ce seuil.
Il n'est pas étonnant que les Canadiens s'inquiètent des
répercussions que cette mesure aura sur leur vie. Le ministre
responsable du projet de loi C-65 n'a même pas pris leurs besoins en
considération. Il n'a même pas pris le temps d'examiner en détail la
possibilité que cette mesure puisse avoir des répercussions
négatives sur la vie des Canadiens de même que sur l'économie du
pays. Ce genre de vision étroite est caractéristique du gouvernement
actuel qui tend à légiférer pour le bien d'un groupe d'intérêts après
l'autre, sans tenir compte de l'ensemble des Canadiens et de leurs
besoins, des bienfaits qu'ils méritent et de la jouissance à laquelle
ils ont droit.
Les projets de loi que le gouvernement présente pour répondre
aux souhaits de tant de groupes d'intérêts ont une caractéristique qui
m'inquiète beaucoup. Je m'inquiète en effet de cette attitude
générale que l'on voit inscrite dans les projets de loi, consistant à
dépouiller la Chambre et le Parlement de la responsabilité à l'égard
de beaucoup de questions pour la confier au Cabinet en laissant de
plus en plus de discrétion aux ministres et en les soustrayant à
l'obligation de rendre des comptes au Parlement, aux représentants
élus du peuple.
Je viens d'exposer plusieurs lacunes que je constate dans le projet
de loi C-65, sur les espèces sauvages en péril. Voilà pourquoi les
députés réformistes ne peuvent appuyer le projet de loi, même s'ils
sont favorables à la protection de ces espèces en voie de disparition.
Le projet de loi a besoin d'être amendé. Il faut qu'il le soit pour
obtenir l'appui des Canadiens. Il faut le réécrire entièrement. Il doit
dépasser les intérêts des groupes d'intérêts et leurs programmes
d'action.
Voilà pourquoi le Parti réformiste a proposé à la Chambre 42
propositions d'amendement au projet de loi C-65. Ces
amendements exigeraient du ministre qu'il prenne en considération
les répercussions sociales et économiques que pourrait avoir une
mesure pour la protection des espèces en voie de disparition avant
de la prendre. Le gouvernement devrait assurer une juste
indemnisation aux propriétaires fonciers et aux utilisateurs. Il
devrait s'assurer la coopération de tous les intéressés, et il devrait
surtout s'engager à protéger les espèces en péril. Cela n'a
certainement pas été inscrit dans le projet de loi.
(1540)
Les propriétaires fonciers et les utilisateurs, qui gagnent leur vie
en exploitant ces terres, se sentent menacés. S'ils devaient
apprendre que leur propriété pourrait être amputée de certains
secteurs où l'on voudrait protéger des espèces en péril et que leur
revenu s'en trouverait réduit, comment réagiraient-ils? Les éleveurs
et les propriétaires fonciers ont déjà déclaré qu'ils laboureraient
alors leurs terres, qu'ils détruiraient tout, ce qui aurait pour effet de
dissiper toute menace.
Ce n'est pas le but que nous visons. Nous cherchons une façon
légitime et juste de protéger les espèces en péril au Canada.
J'encourage la Chambre à apporter au projet de loi C-65 les
amendements constructifs, justes et objectifs que propose le Parti
réformiste.
Je rappelle brièvement que nous visons trois objectifs. Nous
pourrions les appeler les trois engagements à prendre pour les
espèces en péril. Premièrement, il faudrait obtenir l'engagement de
tout le monde de protéger les espèces menacées. Deuxièmement, il
faudrait s'engager à indemniser de façon juste ceux qui subiront une
10194
perte ou un préjudice quelconque en raison de la protection des
espèces en péril. Troisièmement, il faudrait qu'il y ait collaboration.
Il faudrait donc prendre un engagement, accepter de collaborer et
indemniser les gens touchés. Si ces trois engagements étaient pris,
si ces objectifs étaient inscrits dans le projet de loi, le Parti
réformiste n'aurait aucun mal à appuyer la mesure législative.
Je rappelle à la Chambre que le Parti réformiste appuie la
protection responsable des espèces en péril, mais n'appuie pas le
projet de loi C-65 sous sa forme actuelle. Le projet de loi doit être
complètement révisé. Par conséquent, si le gouvernement refuse
d'adopter les 42 amendements proposés par les réformistes, je
voterai contre le projet de loi C-65.
M. Gar Knutson (Elgin-Norfolk, Lib.): Monsieur le
Président, j'ai suivi attentivement les observations des partis
d'opposition et je tiens à dire quelques mots au sujet du premier
groupe d'amendements.
Les députés réformistes ont fait valoir deux points
fondamentaux. D'abord, ils estiment que cette mesure législative
est similaire à celle qui a été adoptée aux États-Unis et que nous
risquons d'avoir des émeutes aussi graves que celles qu'il y a eues
dans les localités forestières des États-Unis à cause du hibou. Je
tiens à signaler que cette mesure législative n'a absolument rien à
voir avec celle qui a été adoptée aux États-Unis. Elle ressemble
davantage en fait à celle qui est en vigueur en Ontario et dans
d'autres provinces, où il n'y a pas eu de perturbations importantes.
On n'a pas vraiment empiété sur les droits des propriétaires terriens.
Les députés réformistes devraient cesser de répandre toute cette
désinformation au sujet du projet de loi. Ils devraient le lire tel qu'il
est, faire leurs recherches et comprendre que nous ne sommes pas
ici aux États-Unis où les lois s'appliquent très différemment.
Ensuite, ils parlent d'indemnisation. S'ils connaissaient le
moindrement la loi canadienne, ils sauraient que le droit d'être
indemnisé lorsqu'un pouvoir public supprime un droit privé est bien
fondé en loi et qu'on aurait droit à une indemnisation, que ce projet
de loi le prévoie ou pas. C'est un principe bien établi en common
law.
De façon générale, la protection des espèces ne peut être assurée
que grâce à la collaboration et au partenariat étant donné qu'aucun
gouvernement ne peut s'occuper à lui seul de toutes les espèces en
voie de disparition. Le béluga, la grue blanche d'Amérique et le
grand-duc d'Amérique ne connaissent pas de frontière politique.
Nous ne réussirons à protéger les espèces en péril que grâce à un
partenariat avec les provinces, les territoires, les municipalités, les
propriétaires terriens, les agriculteurs, les écologistes et les
scientifiques, les autochtones et les Canadiens en général.
L'approche coopérative a été maintes fois couronnée de succès. Le
faucon pèlerin, par exemple, a niché l'an dernier à Toronto pour la
première fois en plus de 40 ans. Il revient grâce au travail acharné de
centaines, voire de milliers de personnes de tous les ordres de
gouvernement et de localités de tout le Canada.
(1545)
Des biologistes de Timber West Forests et de MacMillan Bloedel
collaborent avec des gouvernements provinciaux pour déménager la
marmotte de l'île de Vancouver vers la toundra alpine nitinate. La
poignée de marmottes qui vivent dans le bassin hydrographique de
la Nanaïmo constitue toute la population mondiale de cette espèce.
On s'efforce donc de réimplanter l'espèce dans une région qu'elle a
peut-être déjà occupée. Ce ne sont là que quelques-uns des
nombreux exemples de ce qu'on fait et de ce qu'on peut faire en
collaboration.
Dans le contexte canadien, il faut commencer par comprendre
que la protection des espèces relève de diverses compétences. Il ne
s'agit pas d'un secteur de compétence exclusivement provinciale ou
fédérale. Tous les paliers de gouvernement savent qu'il est
nécessaire et avantageux de travailler ensemble, dans l'intérêt de la
nature. Les provinces et les territoires coopèrent depuis longtemps
pour protéger les espèces en péril. Pour que les efforts de
rétablissement des espèces soient couronnés de succès, il faudra que
tous les paliers de gouvernement poursuivent leur coopération.
À Charlottetown, l'an dernier, il y a eu une entente de principe au
sujet de l'Accord national sur la protection des espèces en péril. Cet
accord reconnaît l'importance capitale de la coopération et de la
collaboration pour la conservation et la protection des espèces en
péril. La conservation des espèces est essentielle si l'on veut
préserver la biodiversité du Canada.
Les gouvernements doivent agir comme des chefs de file en
fournissant de l'information valable et en adoptant des mesures de
conservation et de protection judicieuses. Il est essentiel que les
gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux adoptent des
mesures législatives et des programmes complémentaires pour
régler efficacement les problèmes de conservation des espèces. Le
dernier aspect, mais non le moindre, c'est la participation
indispensable des Canadiens.
En vertu de cet accord, les gouvernements ont convenu
d'élaborer des mesures législatives et des programmes
complémentaires pour protéger efficacement les espèces en péril
partout au Canada. Cet accord reconnaît le Comité sur le statut des
espèces menacées de disparition au Canada comme conseiller
indépendant, relativement aux espèces en péril à l'échelle nationale.
Enfin, l'accord établit, au niveau ministériel, un conseil pour la
conservation des espèces en péril au Canada. Ce conseil établira les
orientations nécessaires et déploiera les efforts voulus pour que
l'accord soit couronné de succès.
Quatre provinces, le Manitoba, le Québec, le
Nouveau-Brunswick et l'Ontario, ont adopté une loi sur la
protection des espèces en péril. La Nouvelle-Écosse vient de
déposer un projet de loi à cet égard, et le ciel ne nous est pas tombé
sur la tête. D'autres provinces et territoires ont des programmes qui
visent spécifiquement la protection des espèces en péril.
10195
En présentant le projet de loi C-65, le gouvernement remplit son
obligation dans le cadre de l'accord national sur la protection des
espèces en péril. Ce projet de loi répond à nos obligations
internationales aux termes de la convention sur la diversité
biologique.
Dans la même veine, le ministre de l'Environnement vient de
signer, au nom du gouvernement, une entente cadre de coopération
et de protection des espèces en péril tant au Canada qu'aux
États-Unis.
L'entente cadre de coopération favorisera la formation de
partenariats avec tous les ordres de gouvernement des deux pays
ainsi que le secteur privé en matière de protection des espèces en
péril. Les deux organismes élaboreront un plan de travail et une liste
initiale d'espèces prioritaires communs d'ici décembre 1997. Je
félicite tant le gouvernement du Canada que celui des États-Unis
d'avoir conclu une telle entente historique.
Reconnaissant la nature continentale des espèces menacées de
disparition et de leur habitat, le Canada et les États-Unis ont
également l'intention d'inviter le Mexique à adhérer à l'entente.
Cette collaboration transfrontalière est très importante. Par
exemple, le papillon monarque, qui a été ajouté à notre liste
d'espèces en péril la semaine dernière seulement, est toujours
menacé dans son habitat d'hiver au Mexique. Le monarque amorce
sa migration à partir de deux points en Ontario: l'un d'eux est Long
Point, dans ma circonscription, d'où il amorce sa migration vers le
Mexique, où il est menacé par des insecticides et d'autres dangers.
Ce n'est qu'en collaborant étroitement que l'Ontario et le Mexique
réussiront à bien protéger le papillon monarque.
Le projet de loi C-65 reflète l'importance du rôle de chef de file
que joue le gouvernement fédéral dans la protection et le
rétablissement de nos espèces transfrontalières internationales en
péril. Le gouvernement fédéral s'assurera que ces espèces reçoivent
une protection immédiate après leur inscription sur la liste et
dirigera les efforts visant leur rétablissement, au Canada et dans les
pays partenaires.
Ce projet de loi est vraiment un exemple de coopération. Il ne
remplace pas les mesures provinciales, il les complète. Il ne
remplace pas les cadres de travail provinciaux, il les complète.
Le projet de loi respecte le rôle que chacun des gouvernements a
toujours assumé, par tradition et selon la Constitution, dans la
protection et la conservation des espèces sauvages. Les nouvelles
dispositions proposées reconnaissent officiellement les
compétences des provinces et des territoires en ce qui a trait à la
gestion des espèces en voie de disparition.
En fait, dans une lettre aux gouvernements provinciaux, le
gouvernement fédéral a fait part de sa volonté de négocier un accord
d'équivalence pour la protection des espèces transfrontières
internationales et de l'intérêt qu'il porte à ce dossier. Le projet de loi
reconnaît que la protection de l'habitat est un élément fondamental
de la protection des espèces.
(1550)
Nous avons de gros défis qui nous attendent. La superficie de nos
habitats marécageux a été réduite de 70 p. 100 à 80 p. 100 dans
certaines régions du Canada. Ailleurs, ce sont 85 p. 100 à 90 p. 100
des arbres des vieilles forêts qui ont été abattus. La superficie des
prairies à hautes herbes a été réduite de 99 p. 100 depuis le début de
la colonisation. Moins nous avons d'habitats naturels, plus il
importe de protéger ce qu'il en reste.
En vertu de ce projet de loi, quand une espèce est inscrite sur la
liste, tout ce qui peut nuire à son lieu de résidence, que ce soit une
tanière, un nid ou un terrier sera interdit. Le projet de loi va au-delà
de la protection du lieu même occupé par une espèce. Les plans de
rétablissement doivent prévoir toutes les formes de menace à la
survie des espèces, y compris ce qui peut nuire à des habitats
critiques.
Nous comptons sur les scientifiques pour nous dire qu'est-ce qui
constitue un habitat critique et quelles sont les mesures à prendre
pour le protéger. Nous avons le devoir, envers les générations
futures, de faire en sorte que les espèces sauvages qui existent au
Canada au XXe siècle soient toujours là au XXIe siècle et pour les
siècles des siècles.
Nous avons là un projet de loi important. Je crois que c'est un
objectif honorable que d'empêcher l'extinction des espèces. C'est
un objectif qui garantit que nos enfants et nos petits-enfants
hériteront d'un pays à la flore et à la faune aussi riches que
maintenant. Je demande à tous les députés d'appuyer ce projet de
loi.
[Français]
M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le Président, il me fait
plaisir de prendre la parole sur le groupe de motions no 2 du projet
de loi C-65.
Le Bloc québécois a déposé des motions dans ce groupe no 2.
J'aimerais tout d'abord attirer l'attention des députés et de la
population qui nous écoute. Je vois des députés d'en face qui me
font des gestes alors je réponds de la main moi aussi.
Le Bloc a déposé plusieurs motions faisant partie de ce groupe no
2, soit la motion no 2, la motion no 16 qui concerne l'article 3, la
motion no 21 qui concerne l'article 5, les motions nos 24 et 26 qui
concernent les articles 7 et 8, la motion no 44 qui concerne l'article
33, ainsi que les motions nos 49, 55, 64 et 68.
Principalement, ces motions ont pour but de répéter au
gouvernement et d'inscrire dans la loi le principe voulant qu'il
devait y avoir concertation entre les provinces et le fédéral plutôt
qu'une suprématie de pouvoir, telle que celle que semble se donner
le ministre de l'Environnement dans l'actuel projet de loi C-65.
Je rappellerai d'emblée que lorsque l'actuel ministre de
l'Environnement a voulu donner naissance au projet de loi C-65, il
avait d'abord-«donner naissance» sont peut-être de bien grands
mots. Je vois certains de mes confrères qui se retournent, mais on ne
sait jamais de quelle façon le ministre de l'Environnement, lui, voit
la chose. Je continuerai dans la même veine. Lorsque le ministre a
voulu former l'embryon du projet de loi C-65, ce fut d'abord par une
10196
rencontre des ministres provinciaux et du ministre fédéral qui a eu
lieu au mois de septembre 1996.
Ladite rencontre a débouché sur une entente de principe, un
accord dit national.
M. Bellehumeur: Il a accouché.
M. Bernier (Gaspé): On me signale que le ministre,
accompagné de ses confrères a accouché, effectivement, si on veut
parler toujours dans la même veine.
Je reprends donc le fil de mes idées en laissant aller celles de mes
collègues. Cela a donné naissance au projet de loi C-65. On parlait
d'un accord national dans lequel on s'entendait sur un mécanisme
pour établir la liste des espèces dites menacées au Canada.
Les ministres de l'Environnement des autres provinces sont un
peu tombés sur le derrière-excusez l'expression-lorsqu'ils ont
vu le ministre, à la fin d'octobre 1996, donc à peine 30 jours après
l'accord dit national avec ses homologues provinciaux, accoucher
d'un projet de loi.
(1555)
Trente jours plus tard, il accouche d'un projet de loi qui lui
permet, à lui, d'encadrer et d'indiquer la façon dont on dressera la
liste des espèces, et quelles mesures on mettra de l'avant pour
s'assurer que les espèces soient protégées.
Dans ce contexte de l'environnement, soit la protection des
espèces menacées, tout le monde est pour la vertu. Le Bloc
québécois est d'accord pour protéger les espèces menacées et le
ministre québécois de l'Environnement est d'accord là-dessus, lui
aussi. Cependant, c'est la façon dont le ministre s'y prend.
Au Québec, nous avons déjà une loi qui permet de protéger les
espèces menacées et des règlements qui nous donnent les moyens de
les protéger. Comment se fait-il qu'à Ottawa, l'actuel ministre de
l'Environnement arrive et se donne une suprématie de pouvoirs afin
d'intervenir sur nos territoires? On était prêts à travailler en
concertation avec lui. Comment se fait-il qu'il veuille passer
par-dessus la tête des provinces? C'est là que le bât blesse.
Permettez-moi de rapporter quelques petites citations. Le projet
de loi C-65 a pris naissance parce que le Canada souhaite-et je
pense que le Québec, comme futur pays, va le souhaiter lui
aussi-être en conformité avec la Convention internationale sur la
biodiversité de l'ONU, signée en 1992. Cette Convention prévoit
que «le signataire formule ou maintient en vigueur les dispositions
législatives et autres dispositions réglementaires nécessaires pour
protéger les espèces et les populations menacées». Il s'agit de
l'article 8k) de la Convention.
Est-ce que le Canada avait besoin du projet de loi C-65 à la
grandeur du territoire, alors que quatre provinces ont déjà des
dispositions et une loi protégeant leur environnement et les espèces
menacées? Elles ont déjà des règlements pour prévoir et voir à la
protection de ces espèces. Je pense que c'est, encore une fois, pour
Ottawa, chercher la confrontation avec les provinces, qui, elles, ne
désirent pas voir quelqu'un venir jouer dans leur jardin.
Les libéraux, dans leur livre rouge, avaient dit: «Nous souhaitons
une société qui protège à long terme la santé et la diversité de toutes
les espèces qui peuplent notre planète.» Jusque-là, ça peut aller
encore, parce que, déjà au Québec et dans d'autres provinces, tels
l'Ontario, le Manitoba et le Nouveau-Brunswick, des législations
existaient. Ils n'avaient qu'à encourager leurs homologues des
provinces qui n'avaient pas encore de telles législations à le faire,
ou, à tout le moins, soustraire les provinces qui avaient déjà prévu
une disposition. Mais là, ce n'est pas le cas. Vous comprendrez que
le Bloc québécois ne peut accepter que le ministre actuel de
l'Environnement veuille se donner de tels pouvoirs.
J'aimerais citer, pour être bien sûr qu'on se comprenne lorsque je
dis qu'on représente les intérêts des Québécois, le ministre de
l'Environnement du Québec, M. Cliche. Il avait signé lui-même
ledit accord prévoyant la façon d'établir la liste des espèces
menacées, mais c'était une entente de principe dans laquelle les
gens s'entendaient pour dire qu'ils étaient d'accord avec ça. Mais
chacun, après avoir établi la liste, s'organisait pour faire respecter la
loi chez eux.
Alors, M. Cliche disait, le 2 octobre 1996: «Nous ne pouvons
rester indifférents au fait que cet accord ouvre la porte aux
chevauchements entre l'éventuelle législation fédérale et la loi déjà
en vigueur depuis 1989-on parle de la loi québécoise-une loi qui
fonctionne bien et qui donne déjà des résultats. Nous risquons de
vivre de nouvelles lourdeurs administratives plutôt que de
consacrer nos énergies à ce qui nous tient réellement à coeur,
c'est-à-dire le sort des espèces menacées.» On voit très bien, autant
le Bloc québécois que le Parti québécois qui forme le gouvernement
du Québec à l'heure actuelle, que tout le monde cherche à protéger
le sort des espèces menacées.
Cependant, on n'est pas d'accord avec les moyens que se donne
le ministre dans l'actuel projet de loi C-65. S'il voulait que ce projet
de loi soit acceptable, tant par les provinces que par le Bloc
québécois, pourquoi n'a-t-il pas accepté les amendements que nous
avons déposés au comité et pourquoi n'accepteront-ils pas les
amendements que nous déposons aujourd'hui encore, à l'étape du
rapport?
(1600)
Je rappelle que les amendements que l'on dépose n'ont pour but
que de s'assurer, parce qu'il y a une disposition légale qui fait en
sorte que ce n'est pas formel, et comme il y a vice de procédure, le
fédéral essaie de s'ingérer, de prendre un peu plus de territoire au
niveau de la juridiction de l'environnement, et cela ne fait pas
l'affaire du Québec, de l'Ontario, du Manitoba et du
Nouveau-Brunswick. Ils ont déjà de telles législations.
Somme toute, le projet de loi C-65 octroie des pouvoirs
extrêmement larges au fédéral en matière de protection des espèces.
Ce qui est d'autant plus choquant, c'est que ce projet de loi a été
fabriqué 30 jours après qu'on ait conclu un accord entre les
provinces. Ce volte-face a fait réagir plus d'un ministre provincial.
Encore une fois, pour un ministre qui prônait une harmonisation
lors de la rencontre de Charlottetown, le ministre actuel de
l'Environnement a accouché d'une loi englobante un peu trop
écrasante par rapport aux juridictions des autres provinces. Nous
demandons
10197
aux collègues d'en face de comprendre le bon sens et de bien vouloir
voter pour les propositions du Bloc québécois.
[Traduction]
Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le
Président, nous examinons aujourd'hui le projet de loi C-65, qui
vise à mettre en place des mesures pour protéger les espèces en
péril.
Le Canada jouit d'un environnement naturel extrêmement riche,
l'un des plus riches au monde, et nous en sommes très fiers.
L'environnement joue un rôle important dans la qualité de la vie au
Canada. C'est un legs merveilleux que nous devons préserver et
protéger pour nos enfants.
Le cinquième principe fondamental du Parti réformiste est le
suivant: «Nous croyons que l'identité canadienne et la vision de
notre avenir devraient découler et s'inspirer d'une nouvelle
reconnaissance de notre pays et de l'importance suprême du fait que
notre bien-être, de même que l'exploration, le développement, le
renouvellement et la conservation de nos ressources naturelles et de
notre environnement physique font partie de notre culture.» En
outre, la politique réformiste prévoit un certain nombre de mesures
dans le domaine de la réforme de l'environnement, dont le
développement durable, une action concertée, le contrôle de la
pollution et un zonage respectueux de l'environnement.
Étant donné le rôle essentiel que les écologistes, les travailleurs
forestiers, les agriculteurs, les éleveurs et beaucoup d'autres
citoyens jouent dans la protection des espèces en péril, nos
législateurs et la législation doivent tenir compte de tout un tas de
besoins et d'intérêts et trouver un juste milieu.
Le projet de loi C-65 donne au ministre le pouvoir de prendre des
arrêtés d'urgence visant la protection d'une espèce sauvage. Quand
cela a pour conséquence de restreindre les activités
socio-économiques dans une région, les pertes et les coûts ou les
charges financières correspondant doivent être justement répartis.
Beaucoup d'utilisateurs de terres veulent que l'on tienne compte
de leurs droits et de leurs préoccupations lorsque sont mises en
oeuvre des mesures visant à protéger notre habitat naturel. Cela
inclut la dépréciation de la propriété, la réduction des possibilités de
loisirs et la réduction des terres disponibles à des fins d'activités
économiques. Je ne suis pas persuadée que le projet de loi C-65 soit
adéquat sur cette question importante. Il faut trouver des façons de
dédommager comme il se doit les citoyens qui perdent leurs droits
d'utilisation de terrains. Cela va exiger des consultations étroites
avec les intéressés de toutes les régions.
Il est très intéressant de remarquer, comme d'autres députés l'ont
signalé, qu'on a élaboré un accord cadre avec certaines des
provinces au sujet de la protection des espèces en voie de
disparition. En fait, c'est un accord que les gouvernements
provinciaux, territoriaux et fédéral ont conclu il y a environ sept
mois, et nous voilà maintenant saisis d'une mesure, le projet de loi
C-65, qui va tout à fait à l'encontre de cet accord cadre conclu entre
tous les ordres de gouvernement.
(1605)
Nous devons demander comment, en tant que législateurs
fédéraux, nous pouvons maintenir la confiance des gens, notre
crédibilité et la collaboration au sein de la fédération si nous
concluons un accord cadre et si, sept mois plus tard, nous essayons
d'adopter un projet de loi qui viole cet accord et en fait
complètement fi.
J'ai en main deux lettres de ministres de l'Environnement qui, de
la façon la plus polie possible, nous font part de la colère et des
craintes des gouvernements provinciaux face à cette action
répugnante de la part du gouvernement fédéral et du ministre
fédéral de l'Environnement.
Dans une lettre du 24 janvier 1997 que M. Graham, le ministre de
l'Environnement du Nouveau-Brunswick, dit ce qui suit à son
homologue fédéral:
On m'a demandé, au nom des ministres provinciaux et territoriaux responsables
de la faune, de vous faire part de nos observations au sujet du projet de loi C-65.
Il parle ensuite des efforts concertés que tous les ordres de
gouvernement ont déployés au cours des 25 dernières années pour
préserver et protéger les espèces en voie de disparition et, en fait,
toutes les espèces au Canada. Il ajoute:
Grâce à des efforts acharnés et une coopération continue au cours des deux
dernières années entre les organismes provinciaux, territoriaux et fédéraux
responsables de la faune, on a pu élaborer un cadre national pour la conservation des
espèces en péril au Canada. Il s'agissait d'une réalisation marquante étant donné la
complexité biologique et politique d'un pays aussi grand et diversifié que le nôtre en
ce qui concerne les espèces et le type de terres. On a officialisé l'appui politique pour
ce cadre et un engagement clair en ce qui concerne la conservation des espèces en
péril au Canada lorsque tous les ministres responsables de la faune au Canada ont
souscrit à l'Accord national sur la protection des espèces en péril à l'occasion d'une
réunion tenue à Charlottetown, à l'Île-du-Prince-Édouard, le 2 octobre 1996.
On ajoute dans la lettre que le projet de loi C-65 viole l'esprit et la
lettre de cet accord. On précise exactement les dispositions qui
posent un problème. Si des députés veulent prendre connaissance de
cette lettre, je serais heureuse de la déposer à la Chambre.
Nous estimons que l'Accord national et le Cadre national illustrent les résultats
que l'on peut attendre quand on travaille en collaboration. Cette occasion, nous ne
devrions pas la laisser échapper sous prétexte que nous ne pouvons ou ne voulons
pas collaborer entre nous à la résolution de nos différends. Nous croyons savoir que
le comité permanent terminera son examen début février. De toute évidence, il est
urgent de régler ces problèmes.
Malheureusement, les préoccupations qui ont été exprimées si
clairement et dûment portées à l'attention du ministre de
l'Environnement et des membres du Comité de l'environnement
sont restées sans réponse.
J'ai une lettre en date du 26 mars 1997 du ministre de la
Protection de l'environnement de l'Alberta. Le ministre dit ceci:
Je vous écris pour vous exprimer l'inquiétude grandissante que m'inspire le projet
de loi C-65, Loi concernant la protection des espèces en péril au Canada. Tous les
ministres provinciaux et territoriaux qui s'occupent de la faune au Canada ont
formulé plusieurs réserves sérieuses à l'égard du projet de loi. L'honorable Alan
Graham a récemment écrit à l'honorable Sergio Marchi lui-même, au nom de mes
collègues et de moi-même, pour lui faire part de ces préoccupations.
10198
La lettre du ministre est celle dont je viens tout juste de citer des
extraits.
Le Comité permanent de l'environnement et du développement durable a terminé
ses délibérations et, malheureusement, la plupart des inquiétudes soulevées n'ont pas
trouvé réponse.
Le ministre a réclamé une réponse aux principaux problèmes et
aux grandes préoccupations qu'ont soulevés les gouvernements
provinciaux et territoriaux. Le ministre souligne la nécessité d'une
approche axée sur la collaboration et l'harmonie avec les
organismes provinciaux et territoriaux qui s'occupent de la faune et
inscrite dans une entreprise collective visant à modifier cette
mesure législative. Malheureusement, cette fois-ci encore, ces
accords et les discussions auxquels ils ont donné lieu, de même que
leurs résultats, sont, dans une large mesure, laissés-pour-compte
dans cette mesure législative.
(1610)
Voici le moment d'offrir une vue d'ensemble à partir de tous ces
éléments. Nous constatons deux approches différentes au niveau
fédéral lorsqu'il s'agit de régler des problèmes qui touchent le
Canada et les Canadiens. La protection des espèces en péril dont il
est question ici n'est qu'un exemple parmi tant d'autres de ces deux
approches.
L'approche ancienne, celle que pratique malheureusement le
gouvernement libéral, consiste à adopter une attitude paternaliste,
centralisatrice, qui revient à cantonner le processus décisionnel à
Ottawa. Il importe peu que les autres parties intéressées aient des
préoccupations. Peu importe même si des ententes claires sont
simplement écartées du revers de la main. On a l'impression que le
gouvernement fédéral et ses ministères peuvent tout simplement
faire abstraction des désirs d'autres paliers de gouvernement, voire
des ententes auxquelles ils sont parvenus après des discussions, et
mettre son propre cadre en place.
Il y a une meilleure façon de faire. Le Parti réformiste estime que
le gouvernement fédéral doit concentrer ses efforts sur dix secteurs
précis qui lui incombent et, pour les autres, collaborer avec les
provinces et leur permettre d'organiser leurs affaires afin qu'elles
tiennent compte des possibilités et des besoins propres à leurs
secteurs. Les documents que j'ai présentés montrent très clairement
que cette façon de faire fonctionne bien.
J'exhorte le gouvernement fédéral à respecter la compétence et la
participation des provinces et des territoires et à retirer ce projet de
loi.
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ):
Madame la Présidente, il me fait plaisir de prendre la parole sur ce
projet de loi qui touche, de près ou de loin, ma circonscription
électorale.
Ce projet de loi peut, à première vue, toucher ma circonscription
électorale, puisque Berthier-Montcalm est situé entre Montréal et
Trois-Rivières. Ce comté compte toutes les îles de Sorel et de
Berthier où, tous les ans, beaucoup d'oiseaux migrateurs, certains
en voie de disparition, viennent passer quelques jours ou quelques
semaines. Ensuite, ils partent pour d'autres lieux.
Malheureusement, bien qu'il touche les espèces en voie de
disparition, je dois dire que je ne suis pas favorable à ce projet de
loi. Non pas parce que le sujet n'est pas important, non pas parce
qu'on ne touche pas des éléments essentiels, mais tout simplement
parce que je crois que le projet de loi C-65 ne respecte pas les
juridictions provinciales.
Ce n'est pas d'hier que le gouvernement fédéral tente
d'intervenir dans ce champ de juridiction, sans doute dans le souci
de respecter le livre rouge, les promesses électorales de 1993. Cela
vous rappellera sans doute des souvenirs, madame la Présidente,
quand le ministre disait: «Nous souhaitons une société qui protège à
long terme la santé et la diversité de toutes les espèces qui peuplent
notre planète.»
Je suis persuadé que vous vous souvenez de cette phrase du livre
rouge. Je ne sais pas si c'est à partir de cet engagement qui n'était
pas trop clair quant aux espèces en voie de disparition-on peut
interpréter cela de toutes sortes de façons-mais de toute façon,
dans le livre rouge, il y avait des éléments beaucoup plus clairs pour
lesquels le gouvernement n'a pas respecté sa promesse. Je l'aurais
invité à ne pas respecter celle-ci, compte tenu des juridictions des
provinces. Mais le gouvernement a décidé plus d'une fois de vouloir
légiférer dans ce domaine.
(1615)
Vous vous souviendrez que c'est au printemps 1995 que la
cheftaine des cerfs-volants et des drapeaux, l'actuelle
vice-première ministre, qui était à l'époque ministre de
l'Environnement, avait déposé un projet de loi qui allait dans le
même sens que le projet de loi à l'étude aujourd'hui.
À l'époque, cela a fait un tel tollé dans le monde de
l'environnement, dans les provinces également et pour toutes les
personnes qui devaient appliquer cette loi qu'un an plus tard, à la
suite d'un changement de ministre au ministère de
l'Environnement, l'actuel ministre a décidé de convoquer tous les
ministres de l'Environnement des provinces à une rencontre pour
tenter d'en arriver à un accord.
Effectivement, le 2 octobre 1996, à Charlottetown, le fameux
Charlottetown qu'on voit souvent dans l'histoire du Canada, on a eu
une entente, un accord de principe. Cependant, quand on compare
ce qui se reflète dans le projet de loi C-65 et le prétendu accord de
principe qu'on avait eu le 2 octobre 1996, ce n'est pas la même
chose.
Peut-être que dans ce pays, on ne parle pas la même langue ou on
ne comprend pas les mêmes choses. Pourtant, un oiseau c'est un
oiseau et une baleine c'est une baleine, mais on ne comprend pas les
mêmes éléments lorsqu'il s'agit de mettre l'accord en vigueur sur
papier, sous forme d'un projet de loi.
C'est tellement vrai que dans la même année, le 2 décembre
1996, le ministre de l'Environnement du Québec, M. David Cliche,
a écrit à l'actuel ministre de l'Environnement du Canada pour lui
dire qu'effectivement, il y avait une dysfonction entre l'entente de
principe qu'il avait signée et le projet de loi. Je ne vous lirai pas
toute la lettre, parce que je sais que le ministre l'a entre les mains,
mais pour les gens qui nous écoutent et des nombreux députés
libéraux qui sont devant moi et qui m'écoutent attentivement, je
vais quand même leur lire quelques passages de la lettre deM. David Cliche.
Ce passage dit: «Il n'a jamais été accepté non plus que la
conclusion d'un traité par le Canada modifiait la répartition des
compétences et attribuait au gouvernement fédéral la compétence
exclusive
10199
pour mettre en oeuvre l'objet du traité.» L'objet du traité c'est
toujours les animaux en voie de disparition.
Il ajoute un peu plus loin: «Au nom de la conservation des
espèces en péril, le projet de loi veut, en fait, réécrire ou
réinterpréter la Constitution canadienne et la répartition des
responsabilités qu'elle accorde à chaque ordre de gouvernement.»
C'est un ministre de l'Assemblée nationale du Québec qui écrit au
ministre fédéral de l'Environnement pour lui dire: «Écoutez, entre
ce sur quoi on s'est entendu et ce qu'il y a dans loi, il y a plusieurs
différences dont, entre autres, une différence notable au niveau des
juridictions.»
Il dit un peu plus loin: «Ainsi, le gouvernement fédéral se définit
aux fins de la présente loi comme étant un territoire domanial qui ne
correspond nullement à la réalité. Il n'a jamais été compris jusqu'à
maintenant que la gestion des pêches et la navigation sur les eaux
intérieures et les eaux côtières signifiait que le gouvernement
fédéral avait compétence sur l'ensemble des écosystèmes
aquatiques de même que sur le fond, le sous-sol et l'espace aérien de
ces eaux.»
Vous comprendrez qu'en légiférant dans ce domaine, le
gouvernement fédéral en a profité pour en mettre plus que ce qui
était demandé et tenter, encore une fois, de contrecarrer certaines
visions du Québec, même sur des questions qui sont, je pense,
franchement neutres, sur des questions à propos desquelles on
pourrait facilement s'entendre, si les gens voulaient véritablement
respecter les ententes de principe intervenues et la Constitution
canadienne. Le minimum, ce n'est pas trop demander, mais à ce
stade, il semble être extrêmement difficile d'avoir une entente sur
ces éléments.
Sur le projet de loi C-65, le Bloc québécois sera fidèle à son
mandat de défendre les intérêts du Québec et ceux de la véritable
législature au Québec qui est l'Assemblée nationale car je pense que
c'est là que tous les Québécois et toutes les Québécoises se
retrouvent. Il est tout naturel pour nous d'avoir présenté des
modifications et des amendements au projet de loi pour refléter ces
choses.
(1620)
Une des motions a pour but d'obliger les paliers de
gouvernement à se concerter. Je comprends qu'un oiseau migrateur
qui atterrit dans le comté de Berthier-Montcalm peut partir et
atterrir plus loin dans le comté de Beauséjour. Je peux le
comprendre et je pense que cela demande de la concertation entre
les différents paliers de gouvernement.
Plus loin, dans les motions nos 16, 24 et 26, ce sont vraiment des
modifications voulant que la législature provinciale ait la primauté.
Pourquoi? Tout simplement pour respecter la Constitution
canadienne. Qu'on ne vienne pas nous reprocher à nous, des
bloquistes, des souverainistes, des nationalistes, tout ce qui finit en
«iste» si vous voulez, de ne pas vouloir respecter, en cette Chambre,
la Constitution canadienne, la Constitution que les libéraux d'en
face ont signée en 1982, la Constitution dont les libéraux fêtaient le
15e anniversaire, il n'y a pas si longtemps. Nous, on ne le fêtait pas,
pour d'autres raisons.
Mais je pense que c'était le minimum que de vouloir respecter la
Constitution où chaque palier de gouvernement a des
responsabilités, à l'heure actuelle. Mais non, ça semble être
difficile.
Je vais vous lire la motion no 24 pour qu'on comprenne que ce
qu'on demande, finalement, ce n'est pas sorcier. La voici:
(3) Par dérogation au paragraphe (2), le ministre compétent ne peut conclure
d'accord en vertu de ce paragraphe avec une organisation ou une personne dans une
province à moins que le ministre n'avise le ministre provincial de cette province de
l'intention du ministre compétent de conclure un accord avec cette organisation ou
cette personne et que le ministre provincial de cette province n'informe le ministre
compétent que le gouvernement de la province ne s'oppose pas à ce que le ministre
compétent conclue un tel accord avec cette organisation ou cette personne.»
C'est très clair. Finalement, on dit: si vous voulez faire des
ententes, passer des contrats avec des organismes qui, par exemple,
sont au Québec, il faudrait tout simplement informer le ministre de
l'Environnement du Québec.
Madame la Présidente, j'aurais pu parler tout l'après-midi sur ces
éléments importants, mais vous m'indiquez que mon temps de
parole est écoulé. Est-ce que c'est exact? Est-ce que je pourrais
avoir le consentement unanime de la Chambre pour terminer? J'en
ai à peu près pour cinq ou dix minutes, si la Chambre y consent. Je
pourrais peut-être compléter mon argument sur ces éléments.
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Est-ce
que nous avons le consentement unanime de la Chambre?
Des voix: D'accord.
M. Bellehumeur: Madame la Présidente, je savais que ce que je
disais était tellement intéressant que j'obtiendrais facilement le
consentement unanime de cette Chambre. J'en remercie mes
collègues, entre autres, le député de Beauséjour qui sourit, et qui, un
peu plus, et il m'applaudissait.
M. Robichaud: On se retient, on se retient.
M. Bellehumeur: Vous vous retenez, n'est-ce pas?
Je disais qu'avec la motion no 24 qu'on présentait, somme toute,
c'était très clair que le gouvernement du Québec avait son mot à dire
sur toutes sortes d'ententes que le gouvernement fédéral pouvait
adopter relativement au projet de loi sur les espèces en voie de
disparition.
Il y a une autre motion qui est extrêmement importante et qui va
dans le même sens. Je comprends que la Présidence ait regroupé les
motions nos 2, 16, 21, 24, 26, 34, 35, 44, 49, 55 et 64 du Bloc
québécois, parce que ce sont des motions qui reviennent au même.
C'est la logique que nous présentons dans les amendements, pour
véritablement indiquer que ce sont les législatures provinciales qui
ont le dernier mot sur des ententes conclues au sujet des espèces en
voie de disparition.
J'en profite pour souligner l'excellent travail de la députée de
Laurentides qui a examiné cette question avec un sérieux peu
commun. Je pense qu'elle a eu une écoute extrêmement attentive de
la problématique. Elle a pris beaucoup d'initiative dans le dossier.
Elle a pris le temps de consulter ses collègues de l'Assemblée
nationale pour avoir une position très claire, pour véritablement
représenter, de façon importante, les intérêts supérieurs du Québec.
10200
(1625)
Ce sont toujours des intérêts suprêmes quand on défend les
intérêts du Québec parce que ça nous touche profondément, ça nous
touche au coeur. On est ici pour ça. Au lendemain des élections,
nous serons encore ici pour défendre les intérêts du Québec, et plus
que jamais, par les temps qui vont courir, après les élections.
Cela étant dit, la motion no 44 dit:
«(1.1) Si le ministre provincial signifie au ministre que le gouvernement de la
province ne veut pas que le paragraphe (1) s'applique dans la province à l'égard
d'une espèce faunique pour autant que les individus de l'espèce se trouvent dans
cette province ou sur un territoire ne faisant pas partie du territoire domanial, ce
paragraphe ne s'applique pas à cette espèce [. . .]»
Donc, encore là, la modification qu'on propose vise à permettre
au gouvernement provincial d'exclure des espèces que le
gouvernement fédéral voudrait peut-être protéger, mais que, lui,
pour toutes sortes de raisons, ne voudrait pas, ou vice-versa. Toutes
les motions qu'on a présentées vont véritablement dans ce sens-là,
c'est-à-dire qu'elles veulent permettre de façon très claire d'établir
de façon évidente la juridiction des provinces dans ce domaine qui,
de toute façon, est de juridiction provinciale. Cependant, le fédéral
veut légiférer dans ce domaine. On va lui permettre de le faire avec
des modifications extrêmement importantes, pour mettre des
balises de façon très claire, afin d'avoir une bonne entente.
Au lendemain de la souveraineté, le Québec voudra avoir des
ententes avec le fédéral et les autres provinces. Je pense qu'on est
capables de le démontrer présentement avec un projet de loi comme
celui que nous avons devant nous à l'étude.
Je finirai ainsi, parce que je ne veux pas non plus abuser des
bonnes choses en ce jeudi. Je finirai avec une citation du ministre de
l'Environnement du Québec, David Cliche, qui a mis en perspective
le projet de loi C-65 dans un exemple concret. Un projet de loi, qui
semble banal à première vue, avec lequel tout le monde devrait être
d'accord pour protéger les petits moineaux, peut avoir, dans son
application, des effets extrêmement importants pour l'économie du
Québec même.
Le 26 novembre 1996, M. David Cliche a dit ce qui suit: «Avec le
projet de loi C-65, le fédéral, en prétextant la protection du canard
arlequin-c'est un exemple comme tant d'autres-pourrait
intervenir directement dans notre politique énergétique en disant
que pour la protection du canard arlequin, le ministre des
Ressources naturelles pourrait faire en sorte qu'une rivière soit
exclue du développement hydroélectrique et de son utilisation
rationnelle. C'est un exemple flagrant d'intervention fédérale dans
nos juridictions. C'est une intervention inconcevable, irrecevable et
inacceptable de la juridiction canadienne dans nos juridictions.»
Vous voyez, c'est un projet de loi ordinaire sur lequel tout le
monde s'entend. Il faut protéger les petits moineaux qui sont en voie
de disparition, ainsi que les baleines, etc. Cependant, le
gouvernement pourrait utiliser cette arme pour intervenir dans des
champs de juridiction encore plus provinciale et même freiner une
certaine partie de l'économie québécoise, comme dans l'exemple
que j'ai donné, dans tout le domaine de l'hydroélectricité.
Je vais finir, ce ne sera pas tellement long. Il dit également: «Le
ministre fédéral-je ne nommerai pas le nom parce qu'il le
nomme-vient de déposer en Chambre des communes un projet de
loi inquiétant pour le Québec. Je tiens à mettre en contexte, parce
que ceci témoigne des difficiles relations fédérales-provinciales.
C'est ainsi que récemment, je défendais les intérêts du Québec et je
représentais le Québec au niveau de l'environnement et de la faune
à Charlottetown. Nous nous étions entendus. Nous avions même
signé un accord écrit à cet effet, que si le fédéral déposait une
législation visant la protection des espèces menacées de juridiction
fédérale, ceci devait se faire dans le respect des juridictions
provinciales, notamment des juridictions territoriales. Nous
pensions avoir convenu avec Ottawa le principe suivant, qui est
simple: si nous convenons qu'une espèce est menacée, il est du
ressort de la juridiction qui a la juridiction sur le territoire et
l'habitat de cet animal de faire en sorte que son habitat soit protégé
et de faire ainsi en sorte que l'animal soit protégé.»
Le ministre poursuivait: «Ce que le Québec reproche
principalement à ce projet de loi, c'est que le fédéral change
complètement les règles du jeu en n'établissant plus que le territoire
sur lequel se trouve une espèce a lui aussi son importance aux fins
de déterminer la juridiction applicable. Au contraire, il tente même
de s'arroger plus de pouvoir en élargissant la portée de la définition
de «territoire fédéral».»
J'aurais pu citer le ministre de façon beaucoup plus large, mais ce
court extrait nous permet de très bien voir qu'il y a un problème. On
voit surtout que le Bloc québécois est utile en cette Chambre pour
faire le lien entre ce qui se passe à Québec et ce qui se passe à
Ottawa. Encore une fois, le Bloc québécois est ici pour défendre les
intérêts du Québec. On le fait très bien et on le fera encore au
lendemain des élections.
Sur ce, je vous remercie de votre bonne collaboration et de votre
écoute accompagnée d'un sourire tout au long de mon discours. Je
crois qu'il s'agit d'un sourire approbateur et je vous en remercie.
[Traduction]
M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Madame la Présidente, je
suis heureux d'intervenir au sujet du groupe no 2 d'amendements au
projet de loi C-65.
Je doute que les amendements de ce groupe fassent beaucoup
pour corriger ce projet de loi qui comporte clairement des lacunes.
Je voudrais présenter quelques questions que j'ai reçues à cet égard
d'agriculteurs et d'éleveurs de mon coin de pays et de l'extérieur de
l'Alberta. J'ai regroupé ces questions, qui doivent être posées avant
que le projet de loi ne soit adopté.
Je me reporterai à des lettres, dont une du ministre de la
Protection de l'environnement de l'Alberta, Ty Lund.
10201
Qu'est-ce que le projet de loi C-65? C'est la nouvelle mesure
législative sur les espèces en péril que le gouvernement présente.
C'est une tentative, que je crois très sincère, pour protéger les
espèces en péril. Au fil de mon exposé, je ferai des commentaires
sur ce qui risque de se produire si jamais cette mesure, même
amendée, est adoptée.
Comment cette mesure est-elle apparue? D'où vient-elle et
pourquoi? Le travail de base du projet de loi C-65 a été effectué par
le gouvernement Mulroney à la conférence de Rio. En 1992, le
Canada a signé un accord mondial où il acceptait notamment de
protéger les espèces en péril. Le Canada a convenu de mettre en
place une loi qui assurerait cette protection. Cette mesure permet
donc au gouvernement du Canada de tenir son engagement.
Cependant, au cours du processus, plusieurs facteurs ont fait
qu'aujourd'hui, le projet de loi n'est vraiment pas acceptable pour
de nombreux Canadiens. Certains facteurs ont été cités par les
bloquistes qui sont d'avis que le gouvernement actuel n'a vraiment
pas tenu compte des souhaits exprimés au Québec. C'était
également l'avis du ministre de la Protection de l'environnement de
l'Alberta, Ty Lund.
Voici d'ailleurs un extrait de la lettre qu'il m'a envoyée
concernant le projet de loi: «Je vous écris pour vous exprimer
l'inquiétude croissante que j'éprouve à l'égard du projet de loi C-65
qui est proposé, Loi sur la protection des espèces en péril au Canada.
Les ministres provinciaux et territoriaux chargés de la faune au
Canada ont tous relevé plusieurs lacunes importantes dans cette
mesure.»
L'hon. Alan Graham a écrit récemment au ministre de
l'Environnement, au nom de mes collègues et de moi-même, pour
attirer son attention sur ces préoccupations. J'ai une copie de cette
lettre. Ma collègue de Calgary en a parlé tout à l'heure.
(1635)
Le Comité permanent de l'environnement et du développement
durable a terminé ses travaux. Malheureusement, la majorité des
problèmes soulevés n'ont pas été réglés.
Les amendements que le gouvernement fédéral a déposés le21 mars 1997 ne règle pas les problèmes, et nous sommes encore
saisis d'un projet de loi qui mine l'approche nationale préconisée
dans l'accord national pour la protection des espèces en péril.
Le ministre de l'Alberta a expliqué très clairement ce qui se
produit. Les amendements dont nous discutons ne répondent pas
aux questions et préoccupations soulevées par le ministre de
l'Environnement.
Le ministre de l'Environnement ajoute que l'Alberta est
déterminée à jouer son rôle, celui dont il est fait état dans
l'entente-cadre nationale pour la conservation des espèces en péril.
Le ministre compte respecter les engagements qu'il a pris dans cet
accord, au nom de la population de l'Alberta.
Il ajoute que, à son avis, l'approche qui est fondée sur les
programmes de coopération et les mesures législatives
complémentaires et qui est proposée dans l'entente-cadre est le seul
moyen d'assurer la conservation des espèces en péril. De plus, il
estime que l'idée de coopération n'a pas été respectée lors de
l'élaboration du projet de loi. Il faut s'en inquiéter. Les bloquistes
ont dit que cela les préoccupait. Le ministre du
Nouveau-Brunswick, qui a écrit au nom de tous ses homologues au
ministre fédéral de l'Environnement, a dit clairement qu'ils sont
mécontents du processus et du projet de loi. Le ministre de l'Alberta
a abondé dans le même sens.
Le gouvernement a adopté une approche maladroite. En tant que
gouvernement fédéral, c'est lui qui décide comment tout doit
fonctionner, peu importe ce que les provinces peuvent en penser.
Voilà encore une preuve de cette approche. Je comprends la colère
des députés bloquistes. Nous, de l'Alberta, sommes tout aussi
furieux.
Les Canadiens de l'Ouest se sont déjà révoltés contre la façon de
faire des gouvernements libéraux et conservateurs précédents. C'est
pour cette raison que des députés réformistes sont ici aujourd'hui.
Nous nous attendons à ce que les provinces aient leur mot à dire
dans un plus grand nombre de secteurs. Nous refusons que le
gouvernement fédéral adopte cette approche interventionniste
maladroite, comme il l'a fait à l'égard de nombreuses mesures
législatives, dont le projet de loi C-65.
Que reprochent au projet de loi C-65 les électeurs de ma
circonscription et d'ailleurs? Bien des choses, dont certaines que
j'ai expliquées ce matin.
Les Canadiens veulent protéger les espèces en péril dans un
contexte de coopération. Cette coopération a permis, dans le passé,
de protéger très efficacement certaines espèces. Par exemple, elle a
bien fonctionné pour la chouette des terriers. L'organisme Canards
Illimités Canada a beaucoup fait pour reconstituer la population de
canards.
Ce fut une initiative coopérative. Il n'a pas fallu de loi sévère. Il
n'y a pas fallu menacer d'imposer des amendes. Dans ce projet de
loi, les amendes s'élèvent jusqu'à un million de dollars. Des
amendes peuvent être imposées à un propriétaire foncier ou à un
utilisateur de terres. L'approche coopérative n'a pas nécessité
l'adoption d'une loi obligeant un propriétaire foncier à clôturer, à
ses frais, ce qui semble être l'habitat d'une espèce en voie de
disparition. L'organisme Canards Illimités Canada n'a pas eu
besoin d'une loi pour obtenir des résultats et il n'a pas fallu une loi
non plus pour que l'initiative relative à la chouette des terriers soit
couronnée de succès, à l'instar d'autres initiatives semblables. Ces
gens-là ont adopté l'approche coopérative. L'approche
interventionniste, musclée ne convient pas. C'est une des raisons
pour lesquelles les gens se plaignent au sujet de ce projet de loi.
Une autre raison a trait au fait que le projet de loi ne prévoit guère
d'indemnisation.
(1640)
Cela ne convient pas du tout. Je le répète, un propriétaire foncier
ou quiconque utilise des terres pourrait être forcé de clôturer, à ses
frais, un secteur pour protéger une espèce en péril. La personne en
cause perdrait alors la capacité productive de ses terres sans
indemnisation. Autrement dit, elle serait forcée de renoncer à
l'usage de
10202
ce secteur. Elle ne pourrait pas utiliser cette portion de terre sans
être indemnisée.
Quel genre de pays est celui qui empêche quelqu'un d'utiliser ses
propres terres, qui l'empêche d'en tirer les fruits, sans
compensation? C'est inacceptable. C'est une autre mesure contre
laquelle les gens à qui j'en ai parlé sont révoltés.
De plus, le projet de loi prévoit que n'importe qui peut porter
plainte de façon anonyme. N'importe qui peut porter plainte de
façon tout à fait anonyme et intenter une action contre un
propriétaire foncier ou un utilisateur de terres.
Même celui qui commet un crime aussi violent qu'un meurtre a
le droit de faire face à la personne qui l'accuse devant le tribunal et
de savoir de qui il s'agit. Or, dans ce projet de loi, des Canadiens
sont privés de ce droit. Cela ne convient absolument pas, et c'est une
autre mesure contre laquelle les Canadiens sont révoltés.
Par ailleurs, il y a les dispositions de perquisition, qui sont très
semblables à celles du projet de loi C-68, le projet de loi sur le
contrôle des armes à feu, qui est inacceptable et qui met vraiment de
côté certaines des procédures judiciaires fondamentales de notre
système de justice, mais qui ne figurent pas dans ce projet de loi.
Cet ensemble de modifications du groupe 2 ne feront rien pour
régler les problèmes de façon significative.
La meilleure chose que les libéraux puissent faire avec ce projet
de loi, c'est le laisser mourir. Toutefois, ils devraient en tirer des
enseignements. Si les libéraux forment de nouveau le
gouvernement après les élections, ils pourront présenter un autre
projet de loi. Si, par contre, c'est le Parti réformiste qui forme le
gouvernement, nous allons présenter un projet de loi qui adoptera
une approche bien différente de l'approche musclée du
gouvernement.
[Français]
M. Maurice Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead, BQ):
Madame la Présidente, je vois mon collègue de Beauséjour qui a
l'air à supputer sur mes chances de me retrouver ici, en cette
Chambre, après la prochaine élection, je voudrais qu'il dorme en
paix, je sais qu'il va nous quitter bientôt pour occuper d'autres
fonctions dans le futur dont on ne connaît pas encore la teneur et je
lui souhaite la meilleure des chances. J'ai l'impression qu'on
connaîtra bientôt un nouveau sénateur Robichaud dans l'autre
Chambre.
Cela étant dit, je suis très heureux d'intervenir sur le projet de loi
C-65 qui nous parle des espèces menacées. Il s'agit d'un projet de
loi très sérieux qui intervient dans des champs de juridiction
provinciale, et j'y reviendrai.
Je trouve que le hasard fait particulièrement bien les choses de
parler d'espèces menacées au moment où nous allons dans quelques
heures nous retrouver en élections. Le parallèle que je veux faire,
c'est que, quand on regarde l'absence de ce gouvernement par les
temps qui courent, on n'a qu'à assister à la période des questions
orales pour constater à quel point les ministres sont occupés à autre
chose qu'à répondre aux questions de l'opposition.
(1645)
Quand on regarde l'improvisation dont fait preuve ce
gouvernement, comme mon collègue du Parti réformiste vient de le
dire, puisqu'il annonçait que le Parti réformiste allait former le
prochain gouvernement, je voudrais entonner le même refrain et
dire que le gouvernement libéral qui est devant nous est certes une
espèce menacée par les temps qui courent.
Nos concitoyens et concitoyennes de tout le Canada,
particulièrement du Québec, sont à même de constater qu'il faut
nous débarrasser de ce gouvernement. En fait, je dirais que la
principale menace qui existe n'est pas que ce gouvernement
disparaisse, mais bien qu'il revienne pour un autre mandat,
puisqu'on constate, je l'ai mentionné tout à l'heure, que la
préoccupation première de ce gouvernement, par les temps qui
courent, est d'annoncer des bonnes nouvelles que l'opposition
officielle a exigées tout au cours du mandat.
Cette semaine, l'entente sur la main-d'oeuvre a été annoncée par
le ministre du Développement des ressources humaines, après32 ans de négociations, dois-je le mentionner. Si ce n'est pas un
record en ce qui concerne la durée des négociations, c'est certes une
bonne moyenne. À ce rythme, il n'y aura pas grands collègues en
cette Chambre qui assisteront au résultat de la prochaine
négociation qui devrait porter, je ne sais trop sur quoi, peut-être sur
les espèces menacées. Au rythme où on négocie, l'avenir de ce
gouvernement fédéral, de cette institution, est menacé.
Pensons maintenant à l'attitude du ministre des Affaires
intergouvernementales vis-à-vis de la demande du gouvernement
du Québec concernant l'adoption d'une modification à la
Constitution pour établir des commissions scolaires linguistiques;
on voit tout le mépris affiché par ce gouvernement à la veille des
élections.
Quand ce n'est pas pour remettre à plus tard une décision qu'on
voudrait voir prise maintenant, comme celle au sujet des
commissions scolaires linguistiques, on annonce, avant même
qu'un projet de loi ne soit sanctionné-et je fais référence à la Loi
sur le tabac-que des amendements seront apportés. Le premier
ministre a réussi ce tour de force incroyable d'annoncer, avant
même que le projet de loi C-71, la Loi sur le tabac, soit sanctionné,
qu'on allait l'amender au cours de l'automne prochain. Il faut
vraiment le faire. Si le ridicule tuait, on constaterait, de toute
évidence, qu'on n'a plus de premier ministre.
Cela étant dit, je voudrais revenir pendant quelques minutes sur
le projet de loi C-65 pour démontrer que ce projet de loi est dans la
plus pure tradition de l'action de ce gouvernement. Lors de leurs
discours, les représentants du gouvernement et le premier ministre,
qu'on voit ici à l'occasion à la période des questions orales, nous
rebattent les oreilles avec le fait que leur gouvernement, au cours
des dernières années, a été celui qui a fait preuve de la plus grande
ouverture concernant la décentralisation de notre fédération.
Eh bien, chaque fois que ce gouvernement dépose un projet de
loi, il nous prouve le contraire. Dans ma région, on a une expression
pour décrire cela, on dit que le premier ministre parle des deux côtés
de la bouche, puisque, d'une part, on dit qu'on est le gouvernement
le plus ouvert à la décentralisation mais que, d'autre part, quand on
dépose un projet de loi, et c'est le cas du projet de loi C-65, on prend
10203
des mesures pour centraliser davantage. Ce qu'on dénonce en tant
qu'opposition officielle, c'est le fait que ce projet de loi touche
précisément à une juridiction provinciale. Le Québec, dans le
domaine de la protection des espèces menacées, comme dans une
foule d'autres domaines, a déjà pris ses responsabilités.
(1650)
Depuis 1989, il existe un projet de loi qui concerne les espèces
menacées. Il existe un consensus au Québec où tous les intervenants
se sont réunis et ont demandé à leur gouvernement, le
gouvernement du Québec, d'intervenir en la matière, ce qui a été
fait et qui répond aux aspirations et aux demandes de la population
du Québec.
Cela a été la même chose en Ontario, au Manitoba, et dans la
province dont vous êtes originaire et dont vous êtes fière, avec
raison, madame la Présidente, le Nouveau-Brunswick, qui a légiféré
concernant les espèces menacées.
Or, le gouvernement fédéral, comme c'est la coutume, a décidé
de mettre de côté cette volonté qu'ont les provinces de se prendre en
main, cette volonté qu'ont les provinces de vouloir régler leurs
propres problèmes en se parlant entre elles, en faisant en sorte que
leurs lois respectives puissent avoir le même impact d'un côté ou de
l'autre de leurs frontières provinciales. Eh bien non, le
gouvernement fédéral, avec ses gros sabots, intervient, décide qu'il
va exclure les provinces de ce champ de juridiction et décide que
lui-même va imposer ses propres points de vue, ses propres
décisions.
Voilà l'essentiel de ce qu'on retrouve dans ce projet de loi. Voilà
pourquoi l'opposition officielle va, dans ce dossier comme dans
tous les dossiers où on veut remettre en question les compétences du
Québec, où on veut remettre en question les intérêts du Québec-et
je sais, madame la Présidente, que vous êtes fière de l'opposition
officielle-dans ce sens-là l'opposition officielle va prendre ses
responsabilités et va défendre les intérêts des Québécois et des
Québécoises. Elle va s'opposer à ce projet de loi et fera en sorte que
ce projet de loi meure au Feuilleton pour qu'on n'en parle plus, non
seulement durant la prochaine campagne électorale, mais plus
jamais.
Vous me permettrez également de souligner le fait que le
gouvernement, en intervenant dans ce champ de juridiction, crée
plus de problèmes qu'il ne veut en régler, comme c'est son
habitude. C'eut été beaucoup plus productif et efficace, si le
gouvernement fédéral avait tout simplement demandé aux
provinces de s'entendre entre elles en la matière, avait d'abord
constaté qu'un bon bout de chemin avait été fait dans ce sens,
puisque, je le rappelle, des lois existent en Ontario, au Manitoba, au
Nouveau-Brunswick, et bien sûr au Québec depuis 1989.
L'application de ces lois, nécessairement, tient compte des besoins
de la population.
Madame la Présidente, vous m'indiquez que mon temps est échu.
Respectueux des règles de cette Chambre comme je le suis, je vais
obtempérer à vos ordres et cesser de ce pas mon intervention.
[Traduction]
M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Madame la Présidente, je
suis heureux d'intervenir dans le débat sur le deuxième groupement
de propositions d'amendement au projet de loi C-65, qui porte sur la
nécessité de protéger les habitats des espèces en péril au Canada.
Le projet de loi vise à instaurer une loi nationale équilibrée. Il
préconise également une forme de fédéralisme coopératif où les
gouvernements provinciaux, les administrations municipales et les
organismes locaux travailleraient de concert avec le gouvernement
national et avec les autres pays du continent où passent les routes
migratoires des oiseaux, notamment les autres pays d'Amérique du
Nord et certains pays d'Amérique du Sud.
S'il y a une cause juste et noble, c'est bien, à mon avis, celle de la
protection par tous les moyens possibles, des espèces en péril. C'est
le but visé ici. Cependant, nous devons aussi tenir compte des
personnes touchées, c'est-à-dire des propriétaires de terrains, qu'il
s'agisse des particuliers ou des gouvernements fédéral et
provinciaux. De plus, il faut conclure des ententes de coopération
avec les pays voisins.
(1655)
J'ai examiné cette mesure et certains des amendements portant
sur les habitats. L'autre jour, j'ai vu une émission sur ce projet de loi
à la télévision. L'homme qui prenait la défense de toutes les espèces
en péril a fait un commentaire qui mérite d'être rapporté. Il a dit que
le projet de loi garantissait la protection des oiseaux lorsqu'ils se
posaient dans un parc national, sur des immeubles fédéraux ou ici,
sur la colline du Parlement. J'ai pensé que c'était peut-être vraiment
comme cela.
Après cela, j'ai reçu une lettre du ministre de l'Environnement,
comme d'autres membres de cette assemblée, dans laquelle il
résumait les préoccupations des provinces, expliquant que le projet
de loi C-65, que nous étudions aujourd'hui, ne touchait pas
seulement les terres fédérales, les parcs nationaux, les immeubles
fédéraux d'un bout à l'autre du pays et la colline du Parlement. Il
reconnaissait que cette mesure législative créait un chevauchement
avec la compétence et les responsabilités des provinces. C'est une
erreur grave de la part du ministre fédéral.
Le 25 septembre 1996, le ministre fédéral a signé, avec les
provinces, un accord intitulé «Accord national pour la protection
des espèces en péril». Cet accord a été signé avec l'idée que les
provinces seraient capables d'assumer les principales
responsabilités dans ce domaine et seraient indépendantes du
gouvernement fédéral, ce dernier s'abstenant de rédiger des lois qui
réduirait leur autonomie ou leurs responsabilités. Toutes les
provinces étaient d'accord.
Elles ont accepté de participer au Conseil canadien de
conservation des espèces en péril afin de coordonner leurs activités
et résoudre les questions de protection des espèces en péril au
Canada.
Elles ont accepté de reconnaître le Comité sur le statut des
espèces en péril au Canada comme étant une source indépendante
d'avis sur le statut des espèces en péril au niveau national et
d'établir une législation et des programmes complémentaires qui
assureront la protection efficace des espèces en péril partout au
Canada.
L'accord énumère ensuite une longue liste de choses précises que
les provinces s'engagent à faire. Elles acceptent de transmettre tout
litige qui surviendrait dans le cadre de l'accord au Conseil canadien
de conservation des espèces en péril.
10204
Les provinces ont accepté de faire tout cela, pensant que le
ministre fédéral de l'Environnement rédigerait une mesure
législative afin de faciliter ce genre de collaboration. Ce n'est pas ce
qui s'est passé.
Par la suite, comme l'ont rappelé mes collègues de Végréville et
de Calgary-Nord, nous avons reçu des lettres du ministre de
l'Environnement nous informant que le gouvernement fédéral
n'avait pas tenu ses engagements et qu'il avait rédigé un projet de
loi qui aura pour effet de doublonner ou de multiplier les mesures
réglementaires visant à protéger les espèces menacées au Canada.
C'est inacceptable.
Les provinces ont maintenant acquis la maturité qui leur permet
d'exercer des responsabilités pareilles et c'est pourquoi nous
devrions décentraliser et leur céder ces responsabilités. S'il est
nécessaire d'avoir une loi générale uniquement pour faciliter la
coordination ou pour combler certains trous, le projet de loi serait
alors acceptable.
(1700)
Comme le fait remarquer très clairement le président des
ministres provinciaux et ministre d'une des provinces atlantiques,
le projet de loi C-65 n'est pas le produit d'un fédéralisme
coopératif, même avec les modifications contenues dans les
groupes un à quatre et les amendements proposés par le
gouvernement pour régler la question. Le fédéralisme coopératif
n'est tout simplement pas au rendez-vous dans ce projet de loi. Le
ministre, le gouvernement et le caucus libéral n'ont pas compris ce
que voulaient les provinces.
Récemment, un projet de loi semblable visait à favoriser la
coopération entre le ministre fédéral de l'Environnement et ses
homologues provinciaux. Il concernait un éventail de futurs
programmes et ouvrages sur les rivières en Alberta et à la grandeur
du Canada.
La province de l'Alberta voulait construire un barrage sur l'une
de ses rivières. Nous avons effectué des études et tenu des audiences
qui ont duré près de 20 ans. Il a finalement été décidé de construire
un barrage sur la rivière Oldman dans la région des trois rivières.
Alors que la décision avait été prise et que les travaux avaient déjà
débuté, le gouvernement conservateur fédéral a trouvé une loi qui
l'autorisait à intervenir et à entamer une nouvelle série d'audiences.
Cela a coûté beaucoup de temps et d'argent. Heureusement, le
gouvernement de la province a pu s'en sortir et poursuivre la
construction du barrage, qui sera une source précieuse de revenus
pour la province pendant de nombreuses années à venir.
En définitive, le gouvernement fédéral a utilisé des lois qui font
double emploi aux lois provinciales et cela n'a fait que compliquer
et retarder le projet; la province de l'Alberta a dû dépenser
beaucoup d'argent pour répondre aux intervenants et les travaux de
construction ont accusé des retards. Nous avons compris et nous
avons modifié le projet de loi.
Le gouvernement fédéral a réussi à rédiger une loi qui évitait les
recoupements et les doubles emplois. Nous pensions que la
Chambre des communes avait appris quelque chose, mais je
suppose que non. Avec le projet de loi C-65, le gouvernement
fédéral a rédigé une loi qui empiète sur les droits et les
responsabilités des provinces. Je ne sais pas si ce sont les
fonctionnaires qui sont coupables ou d'autres. Nous croyions que le
gouvernement aurait appris sa leçon et qu'il ne le ferait plus.
Je fais probablement ma dernière intervention sur ce projet de
loi, et je recommande donc au gouvernement de revoir sa position.
S'il veut vraiment collaborer avec les provinces, comme il le dit
clairement dans ce document d'appoint qu'il a distribué à tous les
parlementaires, il devrait faire marche arrière et concevoir une sorte
de loi générale qui facilite le travail des provinces. Il n'y aurait donc
plus de recoupements ou d'intervention qui nuisent à l'autonomie
des régions.
Comment ce genre de choses peut-il fonctionner pour les
agriculteurs touchés? Il y a une chose qui préoccupe beaucoup mes
électeurs, c'est l'absence d'indemnisation pour la présence d'une
espèce en voie de disparition sur leurs terres. Le gouvernement
promet seulement qu'on reconnaîtra la contribution d'une personne
ayant fourni une partie de ses terres à des fins de conservation. Ce
sera un don de terres critiques pour la protection de
l'environnement, et une forme de partenariat.
Je conclus en demandant pourquoi un propriétaire terrien devrait
assumer entièrement le coût de ce don. La protection des espèces en
voie de disparition, c'est la responsabilité de tous les Canadiens.
[Français]
M. Leroux (Richmond-Wolfe): Monsieur le Président, je vous
demande de vérifier le quorum.
[Traduction]
Le président suppléant (M. Regan): Le député demande-t-il
s'il y a Quorum? Convoquez les députés.
(1710)
Après le compte:
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Il y a
quorum.
(1715)
[Français]
M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe, BQ): Madame la
Présidente, je prends la parole dans le cadre de ce projet de loi C-65.
D'entrée de jeu, je voudrais quand même souligner qu'avec ce
projet de loi on a là une démonstration de l'approche
gouvernementale pour l'ensemble de sa législation. Depuis que
nous sommes ici, l'opposition officielle, le Bloc québécois, a
accumulé une expérience solide au niveau parlementaire. Nous
sommes maintenant expérimentés. Nous avons le résultat de trois
ans et demi de sessions parlementaires. Nous avons maintenant,
comme nouveau bagage, la capacité d'analyser, sur des bases
réelles, ce que le gouvernement libéral du Canada fait de sa
législation à l'égard du respect même des conditions et des
impératifs de la Constitution, et aussi, quelle est sa préoccupation, à
travers la législation, du respect des champs de compétence des
provinces.
Depuis qu'il a été élu, ce gouvernement libéral a présenté en cette
Chambre plusieurs lois dans lesquelles il venait constamment jouer
dans les compétences des provinces, faire fi des champs de
compétence et des ententes fédérales-provinciales. De surcroît,
dans la
10205
législation, et on l'a vu, j'ai été à même de participer à plusieurs
débats sur la refonte du ministère de l'Industrie, de la réorganisation
du Bureau fédéral de développement régional, de la Banque
fédérale de développement, la Banque fédérale du Canada
maintenant, on a vu ce gouvernement utiliser chaque occasion,
chaque projet de loi pour faire en sorte de se donner lui-même plus
de pouvoir, soit à son ministère, soit à son ministre, pour ainsi
arriver encore davantage, sans passer par des discussions
fédérales-provinciales, se donner donc des pouvoirs accrus dans des
champs reconnus de compétence provinciale.
Aujourd'hui, vous comprendrez qu'avec l'expérience législative
que l'on a, l'opposition officielle sait maintenant comment freiner
ce gouvernement dans ses envolées et ses démarches qui visent
strictement à diminuer le pouvoir des provinces et à ne pas
respecter, par ses propres démarches, les champs de compétence des
provinces.
Qu'est-ce qui arrive ici sur cette table aujourd'hui? Le projet de
loi C-65 concernant la protection des espèces en péril au Canada.
J'aurais quatre observations générales avant d'entrer et de situer le
projet de loi.
Premièrement, à la lecture du projet de loi, on constate que le
champ de juridiction des provinces, les compétences des provinces
en cette matière sont complètement niées et bafouées, comme
d'habitude.
Je reviendrai tantôt dans des déclarations du livre rouge et du
ministre, d'abord de la vice-première ministre qui était ministre du
Patrimoine, puis maintenant le ministre Marchi, je reviendrai
démontrer, par leurs propres déclarations, des contradictions
profondes. D'abord, dans ce gouvernement qui dit toujours vouloir
collaborer, établir des partenariats avec les provinces, lorsque les
projets de loi arrivent, ils sont complètement à l'inverse. Il
s'approprie le pouvoir. Il se donne des pouvoirs spéciaux, au
détriment de ses propres partenaires qu'il dit vouloir respecter.
Deuxièmement, on ne respecte pas le partage des pouvoirs dans
le projet de loi. Partager le pouvoir dans des champs de compétence
provinciale, ça a toujours été un boulet pour le gouvernement
fédéral.
(1720)
Même s'il essaie de convaincre, comme il l'a toujours fait, les
Québécoises et les Québécois de sa volonté d'avoir un partenariat
avec eux, il inscrit toujours, dans ses projets de loi, des pouvoirs
accrus et confirme aussi à ses ministres des pouvoirs accrus.
On voit très clairement par les dispositions du projet de loi que le
ministre lui-même se donne un large pouvoir discrétionnaire. Ce
gouvernement, qui dit toujours vouloir en venir à un partenariat
avec les autres, se donne, dans ses propres mécanismes, à travers
son ministère et son ministre, des pouvoirs discrétionnaires très
larges. On l'a vu, d'ailleurs, après les discussions pour procéder à
l'entente interprovinciale sur le commerce, ajouter au projet de loi
en cette Chambre des éléments qui n'avaient même pas été
mentionnés dans la discussion entre les ministres responsables.
Mais il est comme ainsi, ce gouvernement. Tout le monde le
connaît. Tout le monde connaît le gouvernement libéral fédéral,
particulièrement au Québec, dans la démonstration qu'il a faite, ces
30 dernières années, de toujours dire une chose et de faire le
contraire lorsqu'il arrivait au pouvoir.
On dit, dans ce projet de loi, que le ministre pourra nommer les
membres du COSEPAC. Je définirai tantôt le COSEPAC, cet
organisme de protection des espèces. Il les nomme lui-même, seul.
Il se donne ce pouvoir. C'est ce gouvernement qui partage tout,
mais, en bout de ligne, on retrouve toujours le petit article qui dit «je
nommerai, comme ministre, tous ceux qui feront partie de cet
organisme». Dans les discussions entre les ministres et les
provinces, on dit toujours: «Nous sommes de bonne foi, nous ferons
en sorte que la représentation soit égale pour tout le monde, que la
représentation vienne de chaque partie du pays», et on s'assure que
tout le monde y soit.
Mais qu'est-ce qui arrive? On dépose un projet de loi et dans le
projet de loi, le ministre se permet lui-même de nommer le monde
en dehors d'une entente avec ses partenaires. Est-ce que c'est ça, le
respect des partenaires? Est-ce que c'est ça, dire aux gens, «on vous
respecte»? On dit, lors des discussions et des négociations, qu'on va
s'entendre avec les membres des comités. Enfin arrive le projet de
loi et qu'y trouve-t-on? On y dit que le ministre nommera lui-même
les membres.
M. Robichaud: En respectant tous les gens. Peut-être que les
bloquistes ne sont pas nommés, mais cela ne veut pas dire qu'on
reste. . .
M. Leroux (Richmond-Wolfe): Il décidera de ses propres
pouvoirs. J'entends mon collègue libéral réagir, évidemment, parce
que ça fait mal lorsqu'on dit la vérité. Mon collègue de
Mégantic-Compton-Stanstead saluait tantôt notre collègue qui
sera probablement nommé sénateur un de ces quatre matins. Les
libéraux en ont besoin pour prendre le pouvoir au Sénat et assurer le
processus. Ils ont besoin de gens serviables et dévoués, et
probablement que notre collègue, cet Acadien fort joyeux et très
coloré, sera un des futurs sénateurs, et je le salue d'ailleurs.
Non seulement le ministre décidera lui-même des gens qu'il
nommera, mais en plus, que trouve-t-on dans le projet de loi sur les
espèces menacées ou en voie de disparition? Il s'accorde même le
pouvoir de décider quelle espèce sera désignée menacée ou en voie
de disparition. Ce n'est pas à peu près. Il y a là-dedans des provinces
et des organismes à travers le Canada qui s'occupent de cela depuis
fort longtemps, depuis 1978, mais j'y reviendrai. Et le ministre
propose cette première législation fédérale qui n'existait pas
auparavant.
Il y a une législation provinciale, on le sait, au Québec, en
Ontario, au Nouveau-Brunswick et au Manitoba. Mais pour une
première fois, le gouvernement fédéral vient mettre ses gros sabots
dans ce secteur d'activité qui appartient déjà, en termes de
compétences, aux provinces. Qu'est-ce qu'il fait? Il vient se donner
non seulement une loi, mais accorde le pouvoir au ministre
lui-même, en dehors de tout le monde, de décider quelles seront les
espèces menacées ou en voie de disparition.
10206
(1725)
Il va également se donner le pouvoir de décider si oui ou non il va
mettre en oeuvre les plans de rétablissement lorsqu'on aura reconnu
des espèces, il va lui-même se donner le vote.
Madame la Présidente, vous me dites que j'ai déjà fini alors que
je croyais avoir 20 minutes pour parler. Puis-je avoir le
consentement unanime de la Chambre pour finir mon exposé? Si
j'ai le consentement unanime, je voudrais continuer mon discours.
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Est-ce
que l'honorable député a le consentement unanime pour
poursuivre? Je ferais remarquer à la Chambre qu'il reste seulement
cinq minutes.
M. Leroux (Richmond-Wolfe): En cinq minutes, je pourrais
finir mon exposé.
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais):
Avons-nous le consentement unanime?
Des voix: Non.
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Nous
n'avons pas le consentement unanime.
M. Leroux (Richmond-Wolfe): La démocratie a parlé de
l'autre bord; elle s'appelle non, la démocratie de l'autre bord.
M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead): Cheap!
M. Leroux (Richmond-Wolfe): C'est la société du non, la
société de la négation.
[Traduction]
M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Madame
la Présidente, j'ai pensé qu'il serait bon de dire quelques mots à
propos de la Loi sur les espèces en péril. Je suis tenté de faire
certaines allusions aux députés de l'autre côté, compte tenu des
élections qui approchent. Je pourrais m'étendre indéfiniment sur le
sujet, et nous nous amuserions bien.
Ce projet de loi est très sérieux. C'est toujours difficile quand les
émotions sont en cause. Nous voulons protéger les animaux, la
faune et les diverses espèces en péril. Nous ne voulons pas qu'il leur
soit fait du mal, nous ne voulons voir aucune espèce éradiquée, pas
même les députés de l'autre côté. Nous devons en conserver
quelques-uns. Je ne résister à la tentation.
Un projet de loi comme celui-ci pose des problèmes. Le
gouvernement a peut-être voulu faire quelque chose de très
significatif et de très valable pour protéger les espèces en péril,
mais, qu'il ait été mal conçu ou que, pour une raison quelconque, on
ait voulu lui donner cette forme, ce projet de loi pose des problèmes.
Les gens dans les collectivités, dans les milieux d'affaires, dans les
différentes organisations, dans les associations sportives ont des
réserves à l'égard du projet de loi.
Dans les différents comités auxquels j'ai siégé, j'ai remarqué une
très mauvaise tendance dans le cas de beaucoup d'autres mesures
législatives proposées par le gouvernement. C'est un style de
gouvernement qui m'a incité à faire partie du gouvernement dans
l'espoir de voir à certaines réformes. Il y a des réunions de comité
faites pour examiner les mesures législatives à ce niveau et pour
recueillir les avis des gens qui disent ce qui leur plaît et ce qui ne
leur plaît pas, et ce qu'ils veulent voir inclus. Or, le gouvernement
n'est pas prêt à les écouter.
J'ai participé à une ou deux études faites par un comité qui ont
suscité des réactions fantastiques de la part du public, les électeurs,
les contribuables de ce pays, et, pour une raison que j'ignore, le
gouvernement n'en a pas tenu compte. Je ne comprends pas
pourquoi le gouvernement dépense les sommes qu'ils consacre aux
consultations publiques s'il n'est pas prêt à écouter ce qu'on lui dit.
Des industriels, des éleveurs, des agriculteurs, des personnes qui
vont dans les bois pour leurs loisirs et qui pensent que même elles
risquent d'avoir des problèmes, nous ont fait part de leurs
préoccupations.
Nous avons proposé de nombreux amendements. Nous voulions
pouvoir l'appuyer, mais nous ne pouvons pas le faire sous sa forme
actuelle. Nous nous trouvons devant un véritable dilemme car le
gouvernement a dit qu'il prenait ces mesures pour protéger les
espèces en péril, par conséquent quiconque vote contre ce projet de
loi refuse de protéger les espèces en péril. Ce n'est pas vrai.
Au fond de leur coeur, les députés le savent. C'est peut-être un
peu difficile pour eux de l'admettre à la veille des élections, mais ils
le comprennent. J'espère que lorsque nous reviendrons après les
élections que, quelle que soit la composition de la Chambre, nous
pourrons travailler un peu mieux ensemble. J'espère que le
gouvernement, quel que soit le parti qui formera le gouvernement,
proposera des mesures législatives et écoutera ce que le public en
dira. J'espère qu'il écoutera les arguments de l'opposition et ceux
qu'avancera le public. Toutefois, cela ne voudra pas dire qu'il les
acceptera automatiquement. Parfois, bien sûr, l'opinion publique
est divisée en plus de deux factions. Il faut prendre ces choses en
considération.
(1730)
On a proposé beaucoup de bons amendements à ce projet de loi,
mais ils ont été rejetés du revers de la main. C'est malheureux. Si le
gouvernement avait modifié le projet de loi tel que proposé, on
l'aurait appuyé. Ce projet de loi aurait pu franchir rapidement toutes
les étapes à la Chambre, même à la veille des élections.
J'espère que lorsque nous reviendrons après les élections, les
députés d'en face auront appris à collaborer, peut-être avec
l'opposition ou en tant qu'opposition. J'attends cela avec
impatience.
______________________________________________
10206
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[
Traduction]
M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.) propose: Que le projet de
loi C-375, Loi modifiant la Loi de mise en oeuvre de l'Accord sur le
10207
commerce intérieur, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un
comité.
-Madame la Présidente, je suis heureux de parler du projet de
loi C-375, qui permettrait de mener à bien l'accord sur le commerce
intérieur.
Cet accord a été signé en 1994. À cette époque, la mesure
législative fixait plusieurs dates butoirs. À peu près toutes ces dates
sont déjà passées et aucune entente n'est intervenue. De toute
évidence, il existe un problème et il faut le régler. Il faut absolument
parachever cet accord.
J'aimerais expliquer quel sera l'effet de ce projet de loi. Voici
d'abord un bref rappel des événements qui ont mené à la signature
de l'accord sur le commerce intérieur et de la loi de mise en oeuvre,
que le projet de loi C-375 modifierait pour permettre le
parachèvement de l'accord sur le commerce intérieur.
En examinant les événements, on constate que le Comité sur le
commerce intérieur regroupe les ministres du Commerce du palier
fédéral, des provinces et des territoires. Comme je l'ai déjà dit, en
1994, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont
signé l'accord sur le commerce intérieur; celui-ci stipule que tous
les gouvernements s'engagent à collaborer afin de faire tomber les
obstacles au commerce intérieur. Voilà le principe de base de
l'accord sur le commerce intérieur: les obstacles au libre échange
entre les provinces seront abolis.
Nous habitons un pays qui a signé des accords de libre-échange
avec les États-Unis et le Mexique. La circulation des produits se fait
assez librement entre les pays, mais le libre échange entre les
provinces se heurte à certains obstacles. C'est tout à fait
inacceptable.
À l'heure actuelle, la formule d'entente du comité, que ce soit
pour parachever le processus ou pour établir les mécanismes de
règlement des différends, est l'unanimité. Autrement dit, l'accord
sur le commerce intérieur stipule que le consensus est requis.
Cependant, il ne définit pas exactement ce qu'il faut entendre par
consensus. La façon dont le comité a choisi d'interpréter le
consensus revient en fait au consentement unanime. La plupart des
domaines de cet accord commercial intérieur restent incomplets
après presque trois ans car, pour les compléter, il faut le
consentement unanime du gouvernement fédéral et des
représentants de toutes les provinces et de tous les territoires.
(1735)
Quand avons-nous eu accord unanime sur un accord comme
celui-là, un consentement qui, dans certain cas, peut causer
certaines difficultés chez certains groupes dans certaines provinces,
même si les provinces et territoires ont admis que parachever
l'accord commercial intérieur améliorerait la situation de tout le
monde dans toutes les provinces.
Unanimement, les gouvernements en cause ont convenu que le
parachèvement de l'accord améliorerait les choses, mais cela ne
s'est pas produit.
De toute évidence, la formule du consentement unanime ne
fonctionnera pas. Mon projet de loi d'initiative parlementaire, le
projet de loi C-375, modifie la formule et met en place la politique
réformiste dans ce domaine. Au lieu d'exiger le consentement
unanime, il suffirait du consentement des deux tiers des provinces et
territoires ayant au moins 50 p. 100 de la population.
Alors, lorsque les provinces négocieraient le règlement dans un
des domaines encore incomplets, il n'y aurait plus la tâche
impossible de parvenir au consentement unanime, il suffirait de
rassembler une majorité de provinces et de territoires ayant une
majorité de la population. Si l'on adoptait cette formule, nous
parviendrions sans doute à compléter l'accord sur le commerce
intérieur dans tous les domaines. Comme je vais le démontrer par la
suite, beaucoup de spécialistes sont d'accord avec cela.
Je voudrais vous lire la politique du Parti réformiste sur cette
question. Elle dit que pour sortir de l'impasse qui a empêché le
parachèvement de l'accord sur le commerce intérieur et
l'élimination des barrières commerciales internes, le Parti
réformiste propose de modifier la formule d'approbation du comité
sur le commerce intérieur utilisée pour approuver les articles de
l'accord sur le commerce intérieur et le mécanisme de règlement
des différends, en remplaçant le consentement unanime par ce qui
suit. Premièrement, il faut conserver la formule actuelle
d'unanimité pendant encore huit mois pour sortir de l'impasse
actuelle, afin de parachever l'accord sur le commerce intérieur. On
laisserait la formule de consentement unanime encore un moment,
mais huit mois, pas plus.
Deuxièmement, si des dispositions de l'accord sur le commerce
intérieur restent non réglées après huit mois, alors la formule de
ratification à l'unanimité sera remplacée par une formule de
ratification à laquelle adhèrent au moins les deux tiers des provinces
et territoires représentant au moins 50 p. 100 de la population
canadienne.
Troisièmement, si des dispositions de l'accord ne sont pas
arrêtées dans l'année qui suit la mise en oeuvre de la formule deux
tiers/50 p. 100, le gouvernement fédéral aura recours
unilatéralement à ses pouvoirs constitutionnels pour faire ratifier
l'accord sur le commerce intérieur.
Le changement proposé dans mon projet de loi d'initiative
parlementaire se traduira par la ratification de l'accord sur le
commerce intérieur dans tous les secteurs. Son impact sera
considérable.
Je vais toucher un mot de son impact éventuel. Je citerai plusieurs
experts en la matière et divers groupes qui ont trouvé l'idée
tellement importante qu'ils lui ont consacré de solides documents
étayant les effets qu'aurait, selon eux, l'élimination des barrières
commerciales sur les Canadiens.
La Chambre de commerce du Canada, il y a environ un an, a
publié un document important qui concluait qu'une augmentation
d'à peine 10 p. 100 des échanges commerciales entre les provinces
générerait 200 000 nouveaux emplois au Canada.
10208
(1740)
On sait que le gouvernement fédéral a violé sa promesse de
création d'emplois. La taux de chômage s'est maintenu au-dessus
de 9 p. 100 pendant tant de mois que les gens ne savent plus où il se
situe. Il n'a jamais été aussi élevé depuis la grande crise de 1929.
Alors que le taux de chômage dépassait les 9 p. 100, le
gouvernement n'a rien fait pour que l'accord soit ratifié. Je sais que
le ministre de l'Industrie aimerait bien voir l'accord ratifié. Je crois
qu'il le désire sincèrement. Il est difficile de comprendre pourquoi
la ratification n'a pas eu lieu, alors que l'accord a été signé il y a
presque trois ans.
À mon avis, le création de 200 000 emplois serait un incitatif
suffisant pour décider le gouvernement à faire le nécessaire pour
que l'accord soit ratifié. Cependant, cela ne s'est pas produit. La
Chambre de commerce du Canada est déçue.
L'Institut Fraser a rédigé un document important sur la question.
On y dit notamment que les barrières commerciales entre les
provinces coûtent aux familles canadiennes 3 500 $ par année. Là
encore, il est très difficile de comprendre pourquoi le gouvernement
ne déploie pas d'énormes efforts pour supprimer ces barrières.
Comme nous le savons, depuis son arrivée au pouvoir, en 1993, le
revenu du foyer canadien moyen a baissé de 3 000 $. Si on avait mis
en oeuvre cet accord en 1994, une fois signé par les provinces, au
lieu de subir une perte, les familles canadiennes auraient profité
d'une augmentation de leur revenu grâce à la suppression de ces
barrières.
Il est difficile de comprendre pourquoi le gouvernement n'a pas
pris cette question plus au sérieux.
D'autres comités de réflexion et groupes qui ont étudié la
question ont établi que ces barrières au commerce interprovincial
coûtent aux entreprises canadiennes et aux Canadiens entre 6
milliards de dollars et 10 milliards de dollars par année. Cela
représente beaucoup d'argent à cause d'un problème qui ne devrait
pas exister et qui est tout à fait insensé.
Nous pouvons pourtant compter sur l'accord signé en 1994. Il est
évident que cette formule ne fonctionne pas. Cependant, après trois
ans, on n'a rien fait pour remédier à la situation.
Après avoir parlé à des représentants de diverses provinces, je
sais que de nombreuses provinces entendent bien mener cet accord à
terme. Il est vrai que la plupart des provinces s'inquiètent de
certains domaines, car elles peuvent être perdantes, en chiffres nets,
dans un domaine en particulier de l'économie. Cependant, toutes les
provinces reconnaissent que, dans l'ensemble, les Canadiens
profiteraient de la suppression de ces barrières. Il y avait peut-être
des perdants dans chaque province, mais les montants perdus
seraient plutôt petits comparativement aux gains nets pour chaque
province.
Qu'ont dit les libéraux à ce sujet? On peut voir ce qui est écrit
dans le livre rouge. Dans les deux discours du Trône, on a affirmé
qu'il était important de supprimer les barrières au commerce
interprovincial. Le rapport prébudgétaire de 1996 du Comité des
finances comprenait une partie portant sur la suppression de ces
barrières, dans laquelle on reconnaissait leurs répercussions sur
l'économie et sur l'emploi et on prônait leur élimination. Pourtant,
qu'a-t-on fait à ce sujet? Il est clair qu'on n'a pas pris suffisamment
de mesures. Ces barrières demeurent.
Le ministre de l'Industrie a présenté le projet de loi C-88, Loi
portant mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur. La
Chambre a adopté le projet de loi en troisième lecture en juin 1996.
(1745)
J'ignore comment on peut expliquer le délai entre la conclusion
de l'accord en 1994 et l'adoption de la loi de mise en oeuvre en
1996. Cela donne à penser que le gouvernement n'était pas sérieux
lorsqu'il a pris les engagements en question dans son livre rouge et
dans le discours du Trône. Il est clair qu'il y a une contradiction
dans le cas présent. Je ne peux expliquer cela. Cependant, c'est le
signe d'un énorme échec de la part du ministre de l'Industrie.
Si je me présentais contre le ministre de l'Industrie dans sa
circonscription d'Ottawa, je parlerais alors des obstacles au libre
mouvement de la main-d'oeuvre vers le Québec. Les travailleurs
québécois peuvent beaucoup plus facilement venir travailler en
Ontario que l'inverse. Ce mouvement se fait pratiquement dans un
seul sens. Je parlerais à tous les électeurs possibles du ministre de
cette situation et des échecs du ministre dans ce domaine.
Il en a parlé, a signé l'accord en 1994 et, enfin, en 1996, a réussi à
faire adopter l'accord de mise en oeuvre, mais depuis, l'accord
n'avance plus. Plusieurs délais se sont écoulés, des délais qui
étaient censés mener à l'aboutissement de l'accord, mais cela ne
s'est pas produit. Je ne sais pas pourquoi, mais si j'étais dans la
circonscription du ministre, je soulèverais cette question.
Pourquoi ces obstacles au commerce interprovincial sont-ils si
nuisibles? Pourquoi coûtent-ils on ne sait combien d'emplois? C'est
déjà quelque chose que 200 000 emplois seraient créés si le
commerce augmentait de 10 p. 100. Il y a plusieurs raisons à cela.
Imaginons seulement qu'on soit dirigeant d'une entreprise au
Canada. Je me suis entretenu avec plusieurs PDG de sociétés au
Canada qui veulent faire affaire avec des gens et des entreprises
d'autres provinces. Cependant, ils constatent qu'il y a entre les
provinces et les territoires des obstacles qui empêchent le libre
commerce.
En fait, ils disent qu'ils ont un accès beaucoup plus libre à des
entreprises et des gens aux États-Unis qu'à ceux d'autres provinces.
Les dirigeants de certaines entreprises en vue, de pointe dans
certains cas, m'ont dit qu'ils devraient aller s'installer aux
États-Unis, car, s'ils exerçaient leurs activités là-bas, ils auraient
librement accès à toutes les provinces, ce qui leur est impossible
s'ils se trouvent dans une province. N'est-ce pas absurde? C'est
cependant ce qui se passe.
Je me suis également entretenu avec des propriétaires
d'entreprise qui se sont établis aux États-Unis. Ils ont tout
simplement abandonné la partie. Ils voulaient commercer avec tout
le Canada, mais le système actuel comportait trop d'obstacles. En
s'installant aux États-Unis, ils peuvent commercer beaucoup plus
facilement, à un moindre coût, et librement, avec tous les États.
Voilà le genre de
10209
situation absurde que créent ces obstacles. Nous perdons des
emplois à cause de cela.
Ces obstacles ont également un effet extrêmement négatif sur les
petites entreprises qui veulent prendre de l'expansion en
commerçant avec d'autres pays. Il y a des sociétés de ce genre dans
ma circonscription. Un exemple frappant est celui de la société
Universal Industries qui fabrique des réservoirs, à Lloydminster.
Ses dirigeants se sont plaints qu'il était trop difficile de faire des
affaires en Saskatchewan. Lloydminster est une ville frontalière. La
société effectue donc ses activités dans une ville qui chevauche la
frontière entre l'Alberta et la Saskatchewan. Pour faire des affaires
en Saskatchewan, la société doit faire face à tellement de
tracasseries administratives que ses activités en souffrent. Son
exploitation serait beaucoup plus rentable si l'entreprise était aux
États-Unis, d'où elle aurait facilement accès à toutes les provinces
canadiennes.
Nous devons éliminer les obstacles au commerce intérieur. Les
Canadiens ne peuvent plus se permettre de perdre des emplois. Ils
ne peuvent plus sacrifier de six à dix milliards de dollars par an à
cause de ces obstacles. Ils ne peuvent plus se permettre de perdre
annuellement 3 500 $ de leur revenu familial. Ce revenu
additionnel remplacerait les 3 000 $ que chaque famille perd
chaque année à cause des politiques libérales. À lui seul, ce projet de
loi ferait beaucoup pour éliminer les obstacles et produire des
avantages sous forme d'emplois, de revenus additionnels, de
salaires nets plus élevés et d'activités commerciales plus
florissantes, de sorte que le Canada serait mieux en mesure de
soutenir la concurrence dans les autres pays.
(1750)
Ces avantages sont impossibles parce que le gouvernement
actuel ne fait rien. J'ai pris la mesure qui s'imposait. Si jamais mon
projet de loi d'initiative parlementaire était adopté, il ferait
beaucoup pour éliminer les obstacles au commerce intérieur.
M. John Richardson (secrétaire parlementaire du ministre de
la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.):
Monsieur le Président, je vous remercie de me donner l'occasion de
parler du projet de loi C-375, Loi modifiant la Loi de mise en oeuvre
de l'Accord sur le commerce intérieur. Je tiens à remercier le député
du travail qu'il a consacré à la préparation de son exposé en faveur
de cette mesure.
Le projet de loi reflète des préoccupations et des intentions
louables que partagent sans doute tous les parlementaires. La
plupart d'entre nous, ici à la Chambre, sommes très sensibilités à
l'importance du commerce pour le Canada. Chacun d'entre nous
représente des électeurs qui, d'une façon ou d'une autre, participent
aux activités commerciales, qu'il s'agisse des affaires, des banques,
du commerce de détail, de l'agriculture, de la construction ou
quelque autre forme d'échange de biens, de services, de capitaux ou
de main-d'oeuvre. Le Canada est une nation commerçante.
Le commerce, l'exploitation efficiente de nos ressources
naturelles et l'utilisation efficace de nos aptitudes et compétences
innées nous ont permis de grandir et de prospérer en tant
qu'individus et en tant que nation. Nous exerçons nos activités
commerciales autant à l'échelle internationale que sur notre propre
territoire.
À l'échelle internationale, nous évoluons dans un marché
mondial de plus en plus stimulant, appelé à s'ouvrir de plus en plus
et à devenir aussi dynamique qu'exigeant. Nous avons profité de
l'ouverture de ce marché et de l'occasion qu'elle nous donne de
vendre nos produits et de tirer le meilleur de nous-mêmes et de ce
que nous avons, et nous continuerons de le faire.
Sur le plan intérieur, nous avons le bonheur d'évoluer dans une
union économique extrêmement cohérente et bien intégrée.
L'ouverture, la liberté et l'efficience relatives de notre marché
intérieur nous ont bien servis, lorsque l'on compare notre marché
aux marchés internationaux de bien d'autres parties du monde.
Notre commerce intérieur se chiffre à plus de 300 milliards de
dollars par année et représente 1,9 million d'emplois.
Dans bon nombre, sinon dans la plupart des secteurs d'activités
économiques, notre marché intérieur a permis la mise en valeur de
nos compétences et l'acquisition d'expertise, d'expérience et d'un
certain avantage sur nos concurrents. Ainsi, les Canadiens, leurs
entreprises et leurs industries ont pu se doter de solides assises pour
devenir des concurrents redoutables et efficaces sur les marchés
étrangers et prévenir l'entrée des étrangers et des fournisseurs
étrangers sur notre propre marché.
Cela dit, il est bien évident que notre marché intérieur n'est pas
parfait. Dans le passé, les entreprises, industries et associations
professionnelles de notre pays ont mentionné de nombreux
exemples d'entreprises, de sociétés ou de particuliers incapables
d'investir dans certaines parties du pays, ou d'y fournir des biens ou
des services.
Bien des travailleurs ont constaté que leur capacité de travailler
n'importe où au pays est réduite par le refus de certaines autorités
locales de reconnaître leurs compétences ou leur expérience. Ce
genre de problème n'est pas inhabituel lorsque la compétence sur le
commerce, les échanges et les questions économiques est partagée
par divers ordres de gouvernement.
C'est pourquoi les autorités fédérales, provinciales et
territoriales ont négocié en 1994 l'Accord sur le commerce
intérieur. Cet accord a montré à quel point les divers gouvernements
au Canada voulaient régler les problèmes de conflits, de
chevauchements et de double emploi de leurs mesures sans
s'engager dans des discussions sur leurs pouvoirs constitutionnels
respectifs ou ayant une incidence sur ces pouvoirs. L'accord porte
au fond sur la manière dont les gouvernements ont convenu
d'exercer leurs pouvoirs respectifs, qui ne sont en rien modifiés.
Comme le ministre de l'Industrie l'a souligné en 1994, l'Accord
sur le commerce intérieur découlait d'un consensus. Il importe de
ne pas oublier, dans l'étude du projet de loi, que l'Accord sur le
commerce intérieur avait pour fondement une adhésion volontaire
de la part de chacun des gouvernements qui l'ont signé. Voilà la
grande raison des lacunes de l'accord, et c'est peut-être pourquoi il
n'a pas su répondre aux attentes de bien des gens depuis son entrée
en vigueur, en juillet 1995.
10210
Depuis un an, ces lacunes ont été analysées et décrites de façon
très détaillée. Le député qui a proposé le projet de loi à l'étude a
commenté de façon détaillée plusieurs de ces lacunes à maintes
occasions. Ce qu'il a dit n'était pas dépourvu de fondement.
Nombre de ses critiques sont reprises par des instances aussi
respectables que respectées.
(1755)
Lors de leur témoignage devant un comité de la Chambre au sujet
de la Loi de mise en oeuvre de l'Accord de commerce intérieur, les
représentants de la Chambre de commerce du Canada, de
l'Association des manufacturiers canadiens et de l'Association des
comptables généraux agréés, entre autres, ont cerné les secteurs qui
posaient problème: le processus décisionnel; la méthode de
règlement des différends; les exceptions et exemptions; le fait qu'on
relègue la résolution des problèmes à des négociations futures;
l'impossibilité de respecter les échéances établies pour ces
négociations.
Le projet de loi à l'étude vise à corriger au moins l'un de ces
problèmes, le processus décisionnel. Malheureusement, les
modifications proposées ne sauraient y parvenir. À vrai dire, aucune
mesure prise isolément par la Chambre ne peut modifier l'accord.
On peut donc se demander pourquoi le gouvernement a présenté
la Loi de mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur l'an
dernier et l'a adopté. Il y a à cette question une réponse brève: la loi
adoptée par la Chambre était nécessaire pour donner au
gouvernement les outils dont il avait besoin pour s'acquitter de ses
responsabilités, obligations et engagements en vertu de l'accord.
Le problème fondamental du projet de loi qui nous est soumis,
c'est qu'il ne reconnaît pas ce fait tout simple. Le texte législatif ne
pouvait faire en sorte que l'accord lie l'une ou l'autre des autres
parties, et il ne prétendait pas le faire. Les provinces et les territoires
sont liés à l'Accord sur le commerce intérieur de leur propre gré et
par leur signature au bas de l'accord. Ce n'est pas, comme ce projet
de loi propose de le faire, en modifiant la Loi de mise en oeuvre de
l'Accord sur le commerce intérieur qu'on pourrait modifier la façon
dont fonctionne cet accord.
Ce projet de loi n'est pas approprié parce qu'il ne reconnaît pas
que l'Accord sur le commerce intérieur résulte d'un consensus et
n'est pas uniquement une créature du gouvernement fédéral. Par
ailleurs, la modification proposée est impossible à appliquer parce
qu'elle repose sur une analyse simpliste et sur des hypothèses
confuses au sujet des pouvoirs constitutionnels. Elle mélange
imprudemment des pommes et des oranges lorsqu'elle conjugue
l'exercice de pouvoirs constitutionnels fédéraux avec des
propositions qui sont négociées avec les provinces dans le contexte
de l'Accord sur le commerce intérieur.
Bon nombre, sinon la plupart, des sujets abordés dans l'accord
sont dans des secteurs dont la compétence est partagée avec les
provinces. Certains secteurs sont, de par la Constitution,
exclusivement de compétence provinciale. En vertu de ce projet de
loi, lorsque les provinces négocient une proposition, mais qu'une ou
plusieurs d'entre elles ne sont pas d'accord, le gouvernement
fédéral imposerait à toutes l'opinion de la majorité.
Si la question qui fait l'objet des négociations était
manifestement de compétence provinciale, ou même qu'elle était
seulement susceptible de l'être, la capacité du gouvernement
d'imposer une solution serait au mieux sujette à contestation devant
les tribunaux. Plutôt que d'être une façon de contourner une
impasse, cette modification débouchera plus probablement sur
d'interminables débats juridiques. Ce projet de loi pourrait aggraver
les choses, même si l'intention du député qui le propose est
honorable.
Même si la suspension de facultés essentielles permettait le genre
de mesure envisagée par cette modification et que ce soit
défendable légalement, ce n'est pas nécessaire. Conformément aux
articles 91 et 121 de la Loi constitutionnelle, le gouvernement a déjà
le pouvoir de réglementer lorsqu'il considère que c'est souhaitable
et pratique de le faire. Non seulement la modification est inutile,
mais elle aurait l'effet pervers de restreindre la capacité du
gouvernement d'agir dans l'intérêt national en limitant doublement
ses pouvoirs.
D'abord, la modification conditionne l'exercice de ce pouvoir à
l'aval de la majorité des provinces. Le bilan du gouvernement pour
ce qui concerne la consultation des parties intéressées avant d'agir
est éloquent. Toutefois, conditionner notre capacité d'agir dans des
domaines relevant de notre compétence à l'aval de la majorité des
provinces comme le prévoit ce projet de loi constitue une contrainte
déraisonnable et inutile.
Ensuite, la modification réduirait aussi la capacité d'agir du
gouvernement dans les cas où les articles 91 et 121 de la
Constitution seraient invoqués. Compte tenu de l'intention du projet
de loi, le lien spécifique limiterait encore plus dans la pratique la
portée envisagée pour l'action du gouvernement. Il est difficile de
déterminer si le lien est intentionnel ou accidentel. Cela révèle
certes une rédaction médiocre.
Il y a clairement plusieurs raisons qui font que ce projet de loi ne
mérite pas l'appui de la Chambre. D'abord et avant tout, il n'est pas
viable. Il est inopportun. Il est inutile. Il est mal conçu et mal rédigé.
Toutefois son intention est honorable.
(1800)
Il y a une autre raison pour laquelle le projet de loi laisse à
désirer. Il est coercitif et porte à la division alors que la
collaboration est nécessaire pour obtenir des résultats pratiques
pour les travailleurs et les entreprises.
Bref, ce projet de loi vise à modifier l'article 9 de la Loi de mise
en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur, qui donne au
gouvernement le pouvoir de rendre des ordonnances conformément
aux méthodes de règlement des différends prévues dans l'Accord
sur le commerce intérieur. Il vise à corriger de façon unilatérale une
importante lacune de l'ACI en appliquant à toutes les provinces
toute mesure visée par la négociation de l'ACI sur laquelle les
provinces ne peuvent pas s'entendre, mais pour laquelle il y a un
appui majoritaire, à savoir des deux tiers des provinces représentant
50 p. 100 de la population.
10211
Le projet de loi reflète mal la nature de l'ACI et la portée réelle
d'une décision unilatérale conformément aux pouvoirs
constitutionnels fédéraux. Des ressources personnelles et
financières nouvelles seraient probablement nécessaires pour
mettre en vigueur tout règlement dans le cadre de l'accord.
[Français]
M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président,
il me fait plaisir de vous voir dans ce fauteuil. À mon tour de
m'exprimer sur le projet de loi C-375, Loi modifiant la Loi de mise
en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur.
L'essence de ce projet de loi est de faire en sorte que des
modifications puissent se faire, même si elles n'ont pas reçu l'aval
de toutes les provinces, en ayant un système où au moins les deux
tiers des provinces représentant 50 p. 100 de la population seraient
suffisants pour apporter ces modifications.
C'est un peu spécial de voir que, d'un côté, on dit qu'il faut
remettre une loi qui favorise le commerce entre les provinces, donc
quelque chose qui devrait être avantageux pour les provinces, et
qu'on veuille ici, à Ottawa, adopter un projet de loi pour contraindre
les provinces, contre leur volonté, en leur imposant du commerce
interprovincial. Quelque chose ne fonctionne pas. Évidemment, on
sent derrière tout ça toujours une même logique qu'Ottawa a ce
monopole de la vérité: «Nous savons ce qui est bon pour vous, on
veut votre bien, on s'en occupe et on va vous le chercher.»
Plus que ça, ce n'est pas seulement dans ce domaine qu'on
évoque cette formule. On sait très bien que, quand on parle de sept
provinces et de 50 p. 100 de la population, en voyant la façon dont
les consensus se dessinent au Canada, c'est souvent le Québec qui
se retrouve à part et c'est souvent le Québec qui se fait avoir.
Je suis surpris de voir ce projet de loi parrainé par un député
réformiste. Il faut se rappeler qu'il y a trois ans et demi, quand nous
sommes arrivés ici, je m'en souviens, on avait même eu l'occasion
de rencontrer ces députés lors d'un déjeuner pour apprendre à
connaître un peu plus les positions respectives de chacun, ces
gens-là nous avaient dit qu'ils étaient pour la décentralisation.
Je pense qu'ils s'apprêtent à répéter le même message lors de la
prochaine campagne électorale, mais ce n'est pas très cohérent avec
ce qu'il y a là-dedans où on dit: «Oui, il faut décentraliser le Canada,
donner davantage de pouvoir aux provinces, etc. Ce sont les
provinces qui sont en mesure de déterminer ce qui est bon pour leur
avenir.»
Parmi les tout derniers projets de loi des affaires émanant des
députés, on voit qu'un député de ce même parti vient dire: «Non,
finalement, on change de cap et on est d'accord avec les libéraux.»
Ce n'est pas croyable de voir comme Ottawa peut changer des
individus en quelques années. Il faut croire que c'est une dynamique
propre à tout ce qui entoure l'appareil fédéral. Pour nous, c'est une
tendance très centralisatrice et sans considération pour les
provinces. On parle encore une fois de mettre en oeuvre des
dispositions pour favoriser le commerce intérieur.
On sait tous aujourd'hui que, dans le monde politique,
économique et dans la société en général, les gens savent qu'on est à
l'heure de l'ouverture des frontières, et de favoriser la libre
circulation des biens et des services, des capitaux ou des personnes.
Quand c'est bon pour le secteur d'activité économique, les gens
s'entendent entre eux et libéralisent le commerce.
Donc, pourquoi le ferait-on contre la volonté de certains?
Pourquoi à un moment donné dirait-on: «Non, là, certaines
provinces ne sont pas d'accord, mais on va quand même leur
imposer cette décision parce qu'à Ottawa on a décidé que c'était
bon»?
Comment le fédéral pourrait-il décider que c'est bon et une
province décider que ce n'est pas bon? Qui fait en sorte qu'il a plus
de légitimé pour dire que c'est bon ou que ce n'est pas bon?
C'est effectivement revenir à ce paternalisme politique qui existe
à Ottawa, à cette suprématie que certains veulent donner à ce
Parlement sur les provinces.
(1805)
Ce projet de loi est difficilement acceptable. Je suis sûr que cette
volonté de centralisation qu'on voit souvent s'exprimer ici, va faire
partie des enjeux dont on va discuter de façon évidente dans les
prochaines semaines, et qui va déborder du commerce intérieur.
Je viens d'une région du Québec, le Témiscamingue, en Abitibi,
une magnifique région et je vous invite à y venir si vous en avez la
chance. Dans les régions, les gens souhaitent de plus en plus qu'on
décentralise, et pas seulement vers les provinces. Pour nous, quand
on parle de décentralisation en Abitibi-Témiscamingue, on pense à
l'Abitibi-Témiscamingue. Ce n'est pas nécessairement une
décentralisation seulement vers les provinces.
On sait, entre autres, que tous les organismes de développement
régional fédéral sont devenus des agences de propagande politique.
Ils disent être là pour aider les entreprises, etc., à être plus
compétitives au niveau commercial. Dans les faits, les provinces
ont des structures comme celles-là. Ce qu'on essaie de faire dans les
régions, c'est d'avoir nos propres outils. On veut contrôler ces
outils de développement économique pour qu'ils soient gérés par
nos gens, par nos entreprises, là où sont nos besoins.
Il y a des régions, au Québec et au Canada, qui sont spécialisées
dans certains domaines. Dans l'agriculture, c'est très variable.
Certaines provinces sont nettement meilleures dans le domaine
laitier, dans le domaine de la production de la volaille ou des oeufs,
pour d'autres provinces, ce sera le domaine du boeuf, et même des
régions à l'intérieur de ces provinces.
Il faut donc que les pouvoirs soient beaucoup plus près des
citoyens. On a des unités et des territoires naturels d'appartenance
qui se sont dessinés au fil des ans. C'est là qu'on doit remettre le
vrai pouvoir. Ils sont près des gens. C'est normal que des politiques
nationales se décident dans des parlements. Nous souhaitons que ça
se fasse au Parlement de Québec, évidemment. Tout le monde sait
que nous sommes des souverainistes et pour nous, le Parlement
10212
national devrait être celui de Québec, mais la décentralisation
devrait se faire pour que ce soient nos régions qui gèrent.
On a donc une mesure qui viendrait en sens contraire. Elle
signifierait ceci: «Finalement, non. À Ottawa, on va décider du
commerce pour les provinces, et si on doit mettre en oeuvre des
dispositions qui vont favoriser le commerce.» Parce qu'on sait qu'il
y a des différends importants parfois; pensons à la construction ou
aux achats gouvernementaux.
Il y a d'ailleurs un débat au Québec, à l'heure actuelle, entourant
ce projet de loi, sur les producteurs laitiers qui contestent des
dispositions sur la coloration de la margarine, entre autres, et du
beurre. Il y a tout un débat là-dessus. À un moment donné, on a des
autorités dans les provinces qui, elles aussi, répondent des électeurs,
et qui sont sous pression de la part de ces gens-là.
Je ne comprends pas que des gens qui sont profondément
fédéralistes et qui se disent décentralisateurs veuillent pousser pour
faire en sorte que ce soit ici que cela se décide. On devrait laisser
cela aux provinces. Quand c'est de l'intérêt des provinces, ils
peuvent faire des ententes de commerce bilatérales. Ils peuvent
aussi s'entendre entre eux. Lorsque tout cela est fait, là, on met en
oeuvre ces opérations, mais pas les leur imposer, pas plus dans le
domaine économique que dans le domaine constitutionnel.
Cette formule du 7-50 qui fait en sorte qu'on impose à d'autres
n'est certainement pas un modèle pour bâtir et développer un pays.
C'est d'ailleurs ce qui va arriver dans les prochaines années, nous
ramener à cette situation qui existe d'ailleurs depuis longtemps, le
Québec et le Canada seront deux entités différentes, mais cette
volonté d'avoir imposé des choses sans la volonté d'un des deux
peuples fondateurs aura mené le Canada à un échec politique
majeur.
Donc, je ne vous recommande pas du tout d'envisager cette voie,
ne serait-ce que pour l'avenir du Canada à l'intérieur de ses propres
provinces. S'il est évident que c'est rentable et souhaitable pour tout
le monde, les gens vont s'entendre à ce moment-là.
En conclusion, je veux simplement mentionner aussi que c'est
important de comprendre la dynamique commerciale au Canada,
qui est beaucoup plus maintenant Nord-Sud que Est-Ouest. Donc, le
commerce se développe davantage vers le Sud maintenant et je sais
que certains sont nostalgiques, ils souhaitent le rendre Est-Ouest, et
ils voudront peut-être même l'imposer jusqu'à un certain point.
C'est peut-être ça aussi la volonté derrière tout cela. On sait tous
d'ailleurs que la voie naturelle du commerce maintenant se
développe beaucoup plus entre le Nord et le Sud.
(1810)
Je conclus en disant que je suis très déçu de voir un député du
Parti réformiste avoir fait un aussi grand virage depuis son arrivée
ici, c'est un virage à 180 degrés. J'ai hâte de voir ces députés
expliquer en prochaine campagne électorale qu'ils sont en faveur de
la décentralisation alors que l'objectif de ce projet de loi est
exactement le contraire.
[Traduction]
M. Strahl: Monsieur le Président, je me demande si vous
pourriez nous dire s'il convient, pendant que vous occupez ce
fauteuil, de vous adresser ainsi la parole étant donné votre nom de
famille?
Le président suppléant (M. Speaker (Lethbridge, Réf.)): Je
dirai simplement au député que je l'invite à s'en tenir aux usages de
la Chambre.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le
Président, c'est un plaisir de vous voir occuper le fauteuil
aujourd'hui. C'est un honneur temporaire, mais je dois dire qu'il
vous sied bien.
Je veux prendre quelques minutes pour parler de cette initiative
parlementaire présentée par le député de Végréville. Il a résumé,
dans une mesure bien claire, l'essentiel de la position du Parti
réformiste sur les obstacles au commerce intérieur.
Ce projet de loi n'aura pas force de loi parce et nous n'aurons pas
l'occasion de nous prononcer à son sujet. Mais il est important, car
il explique ce que notre parti ferait s'il était porté au pouvoir, ou
peut-être devrais-je dire ce qu'il fera lorsqu'il sera porté au pouvoir.
À notre avis, il y a dix secteurs où le gouvernement fédéral doit
maintenir et renforcer ses pouvoirs pour être un gouvernement
national fort. L'un d'eaux est la capacité d'éliminer les barrières
commerciales internes.
Le gouvernement fédéral doit intervenir dans dix secteurs
fondamentaux. Pour former un pays, il faut un gouvernement
fédéral qui soit fort. Le gouvernement fédéral doit, entre autres
choses, pouvoir réglementer le commerce international ou conclure
des accords commerciaux internationaux. Parmi ses autres secteurs
de compétence, mentionnons la défense nationale, les douanes, le
système de justice, etc. Certains sont évidents, mais souvent, les
gens ne pensent pas à l'élimination des obstacles au commerce
intérieur. Si nous ne pouvons pas avoir de marché commun dans
notre pays, comment notre pays peut-il rester uni? Les liens
économiques aideront à le garder uni.
Le gouvernement libéral nous a notamment déçus parce qu'il n'a
pas réussi à conclure d'accord de commerce intérieur. Il y a pourtant
une entente-cadre et elle semble excellente. Lorsque le
gouvernement a proposé cet accord sur le commerce intérieur, en
1994, nous étions tous très enthousiastes. Nous avons l'avons
appuyé. Nous nous sommes réjouis que le gouvernement fasse ce
que nous avons toujours préconisé. Depuis le début, le Parti
réformiste a adopté une position ferme à ce sujet; il n'est jamais
revenu sur sa position. Le gouvernement doit disposer de solides
pouvoirs pour éliminer les obstacles au commerce intérieur.
Qu'en est-il des obstacles? On constate que tous ceux qui sont
mineurs sont éliminés d'entrée de jeu. Il est facile de parler de
quelques aspects de l'accord commercial, mais lorsqu'il est
question de sujets délicats, de points qui achoppent entre les
provinces, on constate que rien n'est signé. Il y a des pages laissées
en blanc pour les questions touchant l'énergie. Il y en a aussi pour
les questions agricoles, un autre secteur litigieux. Il y a des pages en
blanc lorsqu'il est question des municipalités et des établissements
10213
d'enseignement. Il y a des pages en blanc lorsqu'il est question du
secteur des ressources naturelles.
Il doit y avoir une zone de libre-échange entre les provinces, mais
le gouvernement fédéral permet le maintien de ces obstacles au
commerce. À quel prix? Au prix d'un niveau de vie moins élevé et
de moins d'échanges commerciaux entre les provinces. C'est
paradoxal, mais dans ma région, il est parfois plus facile de faire du
commerce du Nord au Sud, jusqu'au Mexique, que d'avoir un
libre-échange entre les provinces. Quelle triste situation.
Faut-il se surprendre que le gouvernement fédéral compte
presque uniquement sur les marchés d'exportation pour la création
d'emplois? C'est ce que je fais aussi. J'adore les marchés
d'exportation. Ils offrent d'excellentes possibilités aux entreprises
qui exportent. Mais cela représente un danger. Toute la création
d'emplois, par exemple, s'est faite dans le secteur des exportations.
Les entreprises produisant pour le marché intérieur n'ont pas créé
d'emplois.
(1815)
Que faut-il en conclure? Qu'arrivera-t-il s'il y a un
ralentissement de l'économie mondiale? Cela peut arriver et cela
arrivera. C'est inévitable qu'une chose pareille se produise de
temps en temps. Le pays deviendrait totalement dépendant du
commerce international. Si le pays avait encore des barrières
commerciales intérieures, s'il n'avait pas développé une solide
économie nationale et si son économie était uniquement axée sur les
exportations, il serait durement frappé en cas de ralentissement de
l'économie mondiale. C'est pourquoi le gouvernement devrait
accepter la proposition du député de Végréville, sur ce que nous
devons appliquer, étape par étape, à titre de politique commerciale
nationale.
Il faudrait lui donner une autre occasion et lui demander
d'écouter. Il faudrait dire à toutes les provinces que nous allons
créer une zone économique et commerciale nationale libre de toutes
entraves. Elles ont donné leur accord. Elles ont une entente-cadre
après s'être querellées pendant trois ans, ce qui ne suffit pas. Il
faudrait leur accorder encore quelques mois pour qu'elles
s'entendent. Elles devraient penser maintenant au Canada plutôt
qu'à leurs propres intérêts. Elles devraient aller de l'avant et signer
l'entente.
La deuxième proposition consisterait à modifier la formule de
ratification, qui exige maintenant l'unanimité, ce qui est très
difficile à obtenir quand chacune protège ses intérêts, en adoptant
une formule en vertu de laquelle il suffirait des deux tiers des
provinces et des territoires représentant au moins 50 p. 100 de la
population canadienne pour faire adopter les dispositions sur
lesquelles tous ne s'entendent pas.
Pourquoi est-ce si important? J'ai parlé de la création d'emplois.
Le député de Végréville a parlé du coût de quelque 3 500 $ par
famille qu'entraînent les barrières commerciales et l'incapacité des
provinces de commercer librement entre elles. Cela amène le
gouvernement à prendre de mauvaises décisions de gestion.
Autrefois, une brasserie devait s'établir dans toutes les provinces
parce que le commerce interprovincial de la bière n'était pas
permis. Les brasseurs jugeaient qu'il était préférable d'avoir une
entreprise et un siège social dans chaque province, parce que cela
les aidait à avoir des emplois, des subventions et de l'influence dans
le monde des affaires. Les choses ne devraient pas se passer ainsi au
Canada.
Nous devrions dire que le Canada est une zone de libre-échange.
La main-d'oeuvre devrait pouvoir se déplacer librement pour
trouver les meilleurs emplois. Les frontières provinciales ne
comptent pas dans le cas de la propriété intellectuelle. Nous avons
des normes qui font du Canada un pays uni. Nous devrions faire en
sorte qu'il n'y ait plus de barrières au commerce de l'énergie, qui est
un produit important dans le commerce intérieur canadien. Au
moment où nous nous apprêtons à nous intégrer à un réseau
énergétique nord-américain, dont toutes les provinces et tous les
États américains font partie, aucune province ne devrait s'opposer à
une autre en essayant de vendre son énergie à un tarif inférieur.
Les choses ne devraient pas être comme cela. Le commerce de
l'énergie devrait être libre au Canada. Dans un réseau énergétique
international, il est inutile de se quereller entre nous. Nous devrions
travailler ensemble parce que nous sommes tout petit dans un
monde de grands. Nous devrions travailler pour protéger notre
secteur agricole. Je trouve incroyable qu'il n'y ait pas de
libre-échange interprovincial dans le domaine agricole, qui est un
de nos secteurs les plus valables.
Je me souviens, au début de la législature, d'avoir demandé aux
bloquistes ce qui, à leur avis, se passerait si le Québec se séparait.
Qu'arrivera-t-il à l'industrie laitière québécoise, un des secteurs de
l'agriculture les plus importants pour le Québec? Des accords
nationaux permettent le commerce des produits laitiers d'un océan à
l'autre. Les Québécois avaient intérêt à signer les accords dans le
domaine agricole. S'ils pensent qu'ils obtiendront mieux en se
séparant du Canada, ils font erreur. Les producteurs laitiers de ma
région pensent que si le Québec ne fait plus partie du paysage
national, les Québécois ne doivent plus pouvoir vendre de lait
industriel au Canada.
(1820)
J'espère que les députés bloquistes diront la vérité aux
agriculteurs québécois lors de la prochaine campagne électorale
fédérale. Ils sont bien mieux en restant au sein du Canada et en
essayant de négocier un meilleur accord avec toutes les provinces
que de partir seuls pour constater un jour qu'ils ne peuvent plus
vendre de beurre en Colombie-Britannique parce que cette province
produit son propre beurre et que le beurre québécois ne peut plus
entrer au Canada.
Ce que je veux dire, c'est que, règle générale, il est préférable
pour les agriculteurs et les gens du domaine énergétique de faire
partie d'un système national fort et d'avoir un gouvernement
national fort qui protège leurs droits sur la scène internationale et de
pouvoir commercer librement à l'intérieur d'un vaste «bloc»
comme le Canada. J'espère que les bloquistes m'écoutent et diront
cela aux agriculteurs québécois.
En gros, c'est important parce que c'est là une des dix grandes
raisons pour lesquelles le Parti réformiste affirme que nous devons
avoir un gouvernement national fort. Nous ne pouvons pas affaiblir
le gouvernement fédéral en lui retirant le pouvoir de réglementer le
marché intérieur pour le déléguer aux provinces. Ce pouvoir doit
demeurer entre les mains du Parlement.
10214
Nous renforcerons le pouvoir d'abolir les barrières commerciales
intérieures. Nous utiliserons notre droit constitutionnel de le faire.
Le gouvernement fédéral doit recourir à une certaine contrainte
pour obtenir un accord. Les provinces doivent savoir qu'un
gouvernement réformiste prendra les mesures pour que le marché
économique intérieur canadien soit maintenu.
Mme Jean Augustine (Etobicoke-Lakeshore, Lib.):
Monsieur le Président, je suis heureuse d'avoir l'occasion de parler
du projet d'initiative parlementaire C-375.
Il arrive à point nommé pour nous rappeler l'importance du
commerce pour le Canada, non seulement le commerce
international, mais aussi le commerce intérieur. Depuis ses débuts,
le Canada a toujours été un pays commerçant. Le commerce est le
principe vital de notre pays. Le bien-être de tous les Canadiens
dépend de notre capacité de créer un environnement commercial
concurrentiel, tant à l'échelle internationale que nationale, et d'en
profiter.
C'est pourquoi, en 1993 et 1994, les gouvernements fédéral et
provinciaux ont négocié l'accord sur le commerce intérieur dont le
but était d'encadrer les efforts permanents de coopération que
consentiraient les gouvernements afin d'ouvrir le marché intérieur.
Il crée un ensemble de règles et un programme de travail visant à
garantir la libre circulation des biens, des services, des personnes et
des capitaux et, plus généralement, il gouverne le commerce et sert
à régler les différends commerciaux entre les provinces et les
territoires.
L'accord sur le commerce intérieur est entré en vigueur le 1er
juillet 1995. Ce n'est un secret pour personne qu'il présente
quelques problèmes. Pour commencer, le gouvernement reconnaît
que l'accord n'était qu'une première étape. En conséquence, nous
avons constamment cherché à amener les autres gouvernements à
accepter un instrument plus efficace pour la croissance
économique.
Le ministre de l'Industrie a, à toutes les réunions du Comité du
commerce intérieur, pressé ses collègues provinciaux de faire en
sorte que le travail prévu par l'accord soit fait dans les délais prévus.
Il a, à maintes reprises, mis les autres parties au défi d'envisager
sérieusement des moyens d'améliorer la portée de l'accord et la
façon dont il fonctionne.
Des études et des rapports récents de la part d'associations
d'entreprises, comme la Chambre de commerce, et d'autres
observateurs ont fait ressortir plusieurs lacunes de l'accord. On n'a
pas hésité à parler du peu d'empressement de divers gouvernements
provinciaux à respecter l'esprit et la lettre de leurs engagements.
Pour la plupart des observateurs, le processus de prise de décisions
prévu dans l'accord, c'est-à-dire la nécessité d'en arriver à un
consensus, est un obstacle majeur à la réalisation de progrès.
Le projet de loi essaie de régler ce problème. L'objectif est
compréhensible. Malheureusement, le projet de loi lui-même n'est
ni réaliste ni pratique.
Comme la plupart des députés s'en rappellent, l'année dernière,
nous avons examiné et adopté la Loi de mise en oeuvre de l'Accord
sur le commerce intérieur, que ce projet de loi a pour objectif de
modifier.
Le gouvernement a présenté cette mesure en 1995, car nous
étions fermement décidés à réaliser les objectifs de l'accord et nous
le sommes toujours. Il s'agissait de donner au gouvernement fédéral
la possibilité de respecter ses obligations aux termes de l'Accord
sur le commerce intérieur. Cette mesure était nécessaire pour
donner au gouvernement le pouvoir nécessaire et des outils précis
pour agir à l'intérieur des domaines où il a directement compétence.
Cependant, il est très important de comprendre que notre Loi de
mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur et l'Accord
sur le commerce intérieur lui-même sont deux mesures tout à fait
différentes et distinctes.
(1825)
La première est une mesure législative qui est l'oeuvre d'un
gouvernement et applicable dans le champ de ses pouvoirs et
compétences. L'autre consiste en un accord réalisé collectivement
sur la façon dont tous les gouvernements qui sont parties prenantes
exerceront leurs pouvoirs respectifs dans leurs champs de
compétence.
L'Accord sur le commerce intérieur est le fruit d'un difficile
processus de négociation entre le gouvernement fédéral, les
provinces et les territoires en 1993-1994. Mais le succès a été à la
mesure de l'effort, un accord consensuel que tous les
gouvernements ont accepté et signé.
Les pouvoirs que confère l'Accord sur le commerce intérieur ne
découlent d'aucune loi fédérale. Plutôt, l'Accord sur le commerce
intérieur tire son pouvoir surtout des engagements et des obligations
que tous les gouvernements ont acceptés en le signant. C'est un
élément fondamental que le projet de loi dont nous sommes saisis
ne reconnaît pas.
En termes simples, aucune partie à l'Accord sur le commerce
intérieur ne peut, de son propre chef, modifier cet accord. C'est
précisément ce que le projet de loi tente de faire et c'est pourquoi il
est mauvais.
Ce projet de loi est donc inacceptable pour deux raisons.
Premièrement, il ne peut permettre d'atteindre le but qu'il vise.
Deuxièmement, il va directement à l'encontre du principe
fondamental de la négociation de l'accord.
Le secteur commercial canadien est en droit de s'attendre que
l'Accord sur le commerce intérieur s'attaque efficacement aux
barrières et aux obstacles qui nuisent au commerce intérieur. Il est
en droit d'attendre que l'accord s'attaque aussi aux tracasseries et
aux coûts additionnels qu'entraînent les exigences réglementaires
conflictuelles qui se chevauchent et font double emploi. S'attaquer
pour de bon aux problèmes du commerce intérieur n'est pas une
mince affaire.
Il est facile de lire l'alinéa 91(a) et l'article 121 de la Constitution
et de conclure que le gouvernement fédéral doit prendre des
mesures énergiques et catégoriques. Facile, mais simpliste et, au
bout du compte, inefficace.
10215
C'est simpliste parce que l'action unilatérale du gouvernement
fédéral ne peut régler certains problèmes qui relèvent de la
compétence exclusive des province, comme la mobilité de la
main-d'oeuvre ou les dépenses des gouvernements locaux aux fins
de subventions et diverses mesures incitatives. Finalement, c'est
inefficace parce qu'on ne reconnaît pas comment le Canada
fonctionne le mieux.
Un changement durable, pratique et efficace est possible quand il
est fondé sur l'acceptation et la collaboration entre les
gouvernements, et non sur le juridisme et la coercition.
Tous les gouvernements au Canada doivent collaborer pour que
l'économie nationale soit solide et efficace, afin que nous ayons de
nouveaux produits, des services, des emplois et des possibilités de
croissance. À cette fin, il est important de faire pression sur tous les
gouvernements pour que l'Accord sur le commerce intérieur
fonctionne mieux.
L'accord appartient à toutes les parties. Sa mise en oeuvre est la
responsabilité de toutes les parties, et non pas seulement du
gouvernement fédéral.
Je ne peux appuyer le projet de loi dont nous sommes saisis pour
les raisons que je viens d'expliquer, mais j'espère que les autres
gouvernements saisiront quand même le message qu'il comporte.
Nous poursuivrons certainement nos efforts pour tenter de coopérer
et de travailler en collaboration avec les autres, afin de renforcer et
d'améliorer l'Accord sur le commerce intérieur. Nous espérons que
les autres travailleront avec nous.
Le projet de loi à l'étude n'est pas acceptable. Il est inopportun et
inutile. Il sème la discorde et est mal rédigé. À titre de députée, je ne
puis appuyer cette initiative parlementaire.
M. Benoit: Madame la Présidente, il reste quelques minutes à
l'heure réservée à l'étude des initiatives parlementaires. Avec le
consentement unanime de la Chambre, je voudrais faire quelques
remarques récapitulatives.
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): La
Chambre y consent-elle?
Des voix: D'accord.
M. Benoit: Madame la Présidente, je voudrais qu'il soit clair que
cela est conforme à ce que les députés réformistes disent depuis le
début, à savoir que nous croyons en la décentralisation dans de
nombreux secteurs. Nous en avons parlé au fil des ans.
Un député du Bloc québécois a laissé entendre dans son discours
que nous changions d'orientation. Ce n'est pas vrai.
Depuis la mise sur pied du parti en 1987, notre chef et d'autres
ont dit qu'il y a des domaines où nous devons renforcer le rôle du
gouvernement fédéral. Le député de Fraser Valley-Est en a nommé
quelques-uns. L'un d'eux est certainement la libéralisation des
échanges entre les provinces.
Les députés ministériels qui ont parlé reconnaissent qu'il faut
libéraliser les échanges, mais, curieusement, ils disent qu'il n'est
pas nécessaire de prendre des mesures particulières pour que cela
arrive. Ils estiment que cela arrivera tout seul. Je ne suis pas de cet
avis. J'estime aussi que la Constitution canadienne permet au
gouvernement fédéral de jouer un plus grand rôle.
[Français]
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): La
période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est
maintenant expirée et l'ordre est rayé du Feuilleton.
Comme il est 18 h 30, la Chambre s'ajourne jusqu'à demain, à10 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 18 h 31.)