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le 24 novembre 1999

Discours prononcé au Centre Canadien de Gestion discussion informelle

Prononcé par Guylaine Saucier

L'un des plus grands plaisirs que procure la solution d'un casse-tête ou d'un problème est souvent le moment de lucidité que nous vivons juste avant que les morceaux tombent en place. C'est alors que ce qui nous paraissait impossible est non seulement possible mais à portée de la main. Des morceaux qui nous semblaient jusque là disparates s'imbriquent d'un coup et produisent une image ou une solution simple et complète.

Il y a tout lieu de croire que Radio-Canada se rapproche d'un pareil moment et ce, plus vite que nous l'aurions cru. Après des années de tumulte et d'incertitude, nous sommes sur le point d'aborder un pan nouveau de notre histoire singulièrement riche en créativité.

Voici certains des signes qui motivent mon optimisme :

Tant les observateurs que les employés ont applaudi la nomination de notre nouveau président-directeur général, Robert Rabinovitch. M. Rabinovitch est entré en fonction officiellement la semaine dernière et je puis vous dire qu'il a déjà commencé à s'impliquer activement dans les différents dossiers.

Grâce à la stratégie que nous avons adoptée, notre efficience, notre capacité de réponse et notre force atteignent de nouveaux sommets.

Le gouvernement ayant renouvelé récemment son engagement envers un financement stable, nous sommes farouchement déterminés à offrir des produits de grande valeur aux Canadiens, peu importe où ils habitent et comment ils veulent accéder à nos services.

À l'issue d'une série sans précédent d'examens de notre mandat et de notre rendement, le rôle pluridimensionnel de Radio-Canada s'est défini plus clairement que jamais — aux yeux du public auquel nous appartenons, du gouvernement dont provient notre financement et des composantes mêmes de la Société.

Finalement, il ne nous manque aucun élément pour assumer le leadership auquel nous sommes naturellement aptes et que commande le contexte informationnel planétaire qui a transformé notre monde. Voilà que la survie de la culture canadienne, raison d'être de Radio-Canada, est devenue un thème prioritaire des débats publics, lesquels ne feront que gagner en intensité à mesure que la concurrence se resserre et que la technologie multiplie les choix offerts aux Canadiens.

Forts de notre bouquet de services de télévision, de radio et de nouveaux médias, dont le contenu et la qualité proprement canadiens n'ont pas leurs pareils, nous sommes en mesure de poursuivre notre rôle d'historiens de la riche diversité et de la profondeur culturelle de ce pays, par des moyens de calibre mondial.

Il y a peu de temps, pareil enthousiasme aurait pu sembler mal à propos.

Depuis le début de mon mandat à la Société, cette dernière a subi sans trêve une offensive constituée de compressions budgétaires, de révisions de mandat et de transformations marquées de la politique gouvernementale.

À l'instar de bien des Canadiens, je n'utilise pas aisément la terminologie de la guerre. Mais il est difficile de décrire par un autre discours la situation à laquelle nous avons survécu. Comment peut-on réduire son budget de 30% et supprimer 3,000 postes en trois ans sans se sentir assiégé?

Par bonheur, cette époque est terminée, et nous nous tournons maintenant vers l'aventure et les enjeux que nous réserve le siècle nouveau.

Nous ne sommes pas seuls à croire en notre avenir ou à nous enorgueillir, à raison, de nos réalisations.

J'en veux pour preuve les enquêtes d'opinion publique dont les résultats n'ont cesse de nous répéter que les Canadiens souhaitent obtenir plus de services comme ceux que leur offre Radio-Canada et non pas moins. À témoin, même la Société s'attendait à subir un manque à gagner en 1997, première année où la Télévision anglaise proposait une grille exclusivement canadienne. Or les pertes attendues ne se sont pas matérialisées — en grande partie du fait que les Canadiens ont adopté la programmation que nous leur offrions.

À preuve également les nombreux prix attribués à notre programmation télévisuelle et radiophonique, dont les plus récents sont les 41 Gemini, sur un total possible de 75, décernés plus tôt ce mois-ci aux émissions de la Télévision anglaise de Radio-Canada, et les 38 Gémeaux décernés en septembre aux émissions diffusées par notre Télévision française.

Mais ce sont peut-être les innombrables témoignages offerts par les Canadiens eux-mêmes qui sont les plus gratifiants.

Radio-Canada a toujours suscité l'émotion publique, et c'est là sa fonction. Notre financement est constitué aux trois quarts près de deniers publics. Les Canadiens sont en droit de savoir que nous faisons bon usage de l'argent durement gagné qu'ils versent au fisc. Ils sont également pleinement en droit de savoir avec certitude que leurs voix continueront de se faire entendre à travers le tintamarre planétaire grandissant qui transforme quotidiennement l'industrie des communications.

Les Canadiens ont eu récemment de nombreuses occasions de se prononcer sur Radio-Canada, ce qu'ils firent en nombres records. Au fil des ans, Radio-Canada, à elle seule, a donné lieu à une véritable industrie artisanale composée de commissions royales, de groupes de travail et de groupes d'études typiquement canadiens, dont la mission consistait à se pencher sur notre mandat et notre rendement.

Au printemps dernier, le CRTC a reçu des mémoires provenant de plus de 4,500 personnes et des présentations orales faites par quelque 100 groupes et particuliers à l'occasion d'un marathon d'audiences publiques tenues dans le cadre d'un examen exhaustif des 32 licences distinctes de services radiophoniques et télévisuels dont la Société est titulaire.

Le Comité permanent du patrimoine canadien, qui a adressé récemment ses recommandations au Parlement, au terme d'une étude de deux ans sur le rôle changeant du gouvernement fédéral à l'appui de la culture canadienne, n'a pas manqué d'examiner à la loupe la réalité de Radio-Canada.

Évidemment, la Société examine ses propres activités et en rend compte de façon continue. Elle divulgue intégralement ses dépenses et ses sources de recettes dans ses rapports annuels. Nos débats publics, notre ombudsman à temps plein, nos lignes téléphoniques à l'usage du public et nos sites Web interactifs sont autant de moyens de communication largement utilisés par la population pour faire connaître ses frustrations, louanger Radio-Canada ou lui faire part de ses conseils.

À n'en point douter, aucun autre service de nouvelles, que dis-je, aucune autre Société d'état, n'est constamment sous la loupe du public. Imaginez la situation si tous les ministères et organismes étaient soumis à des épreuves aussi rigoureuses.

Cela ne signifie pas que Radio-Canada recule devant l'idée que ses moindres faits et gestes soient étudiés au microscope — bien au contraire, elle s'en nourrit.

Au cours des deux dernières années, le public nous a fait comprendre que nous visions en plein dans le mille.

Examinons, à l'appui de ce que j'avance, certains commentaires offerts par des personnes qui ont comparu devant le Comité permanent du patrimoine canadien:

Une immigrante était reconnaissante envers les services radiophoniques de Radio-Canada de lui avoir fourni une abondance de renseignements sur son pays d'adoption, qui lui ont permis de réussir aisément son examen de citoyenneté. Il n'est pas rare que nos services radiophoniques soient ainsi félicités, réunissant comme ils le font des nouvelles et des informations régionales et une programmation pancanadienne offerte dans tous les coins du pays.

Un artiste a souligné le rôle utile joué par Radio-Canada en faveur du développement et du soutien des artistes du théâtre, des musiciens et des écrivains, dont les œuvres se perdraient par ailleurs dans le flot des importations commerciales. Les cinq années de compressions qu'a traversées la Société, de dire cet artiste, ont «profondément marqué» une communauté culturelle contrainte de se battre pour obtenir une part des fonds de démarrage de productions artistiques, qui se font de plus en plus rares.

Un ancien résidant de Toronto qui s'est réinstallé dans le Nord-Ouest de l'Ontario a fait savoir que Radio-Canada constituait un moyen de communication crucial entre les collectivités isolées et le monde extérieur. Voilà qui décrit l'essentiel des obligations de la Société envers les Canadiens. Pour mener à bien le rôle que nous confère la politique gouvernementale, nous devons veiller à ce que chaque citoyen du pays puisse accéder à un contenu canadien de qualité, particulièrement en cette ère d'Internet.

Les propos de ces personnes font écho aux sentiments d'innombrables Canadiens qui situent Radio-Canada au cœur même de l'expression culturelle au Canada. À cet égard, il convient de citer le rapport du Comité du patrimoine canadien, paru plus tôt cette année: «La teneur des témoignages semble indiquer au Comité que Radio-Canada est perçu par les Canadiens comme faisant partie intégrante du tissu de ce pays.»

Fait incontestable, la sauvegarde du tissu culturel canadien — et le rôle capital de Radio-Canada à l'appui de cet objectif — est à nouveau au premier rang des préoccupations politiques et personnelles. Quiconque a l'usage d'une radio, d'une télévision ou d'un ordinateur ne peut qu'être sensible aux menaces déclenchées par les technologies de l'information et des communications qui ont pratiquement éradiqué les frontières naturelles.

Nous vivons dans un monde où il suffit du déclic d'une souris pour virer 100 millions de dollars d'un compte en banque à un second se trouvant à l'autre l'extrémité de la planète. Un monde où le «choix» est un mot courant à consonance singulièrement américaine. Où l'expression «la rapidité avant tout» — étrangère au discours des arts et de la culture — est le mot d'ordre de l'économie planétaire.

Comme le déclarait le premier ministre Jean Chrétien dans sa réponse au Discours du trône le 13 octobre, le succès qu'obtiendra le Canada dans cette ère nouvelle ne dépend pas que de la compétitivité de ses entreprises. Il ne dépend pas seulement non plus de notre capacité à protéger les ressources sociales et naturelles qui déterminent notre identité.

De plus en plus, la confiance que nous possédons en tant que Canadiens nous viendra de nos artistes et de nos écrivains — les membres d'une communauté culturelle dont la vulnérabilité n'a d'égale que la vitalité, et dont les besoins sont à la dimension de sa capacité de nous enrichir. Depuis plus de 60 ans, ces gens ont trouvé un milieu à leur image à Radio-Canada.

De plus en plus, nous attendrons de nos journalistes et commentateurs qu'ils nous fassent connaître des réalités canadiennes, articulées dans un registre proprement canadien et témoignant de nos valeurs et de nos aspirations. Voilà un autre exemple de ce que Radio-Canada fait de mieux.

Nous produisons des émissions qui ne seraient jamais produites par le secteur privé — des émissions qui nous amènent à mieux comprendre notre patrimoine.

Je vous invite à examiner notre feuille de route. Radio-Canada est le seul radiodiffuseur capable d'exercer une activité de production et de distribution à l'échelle nationale. Le seul qui offre des services en anglais, en français et dans huit langues autochtones. Le seul qui possède une solide présence internationale, qui ouvre au monde une fenêtre sur le Canada, et qui donne aux Canadiens à l'étranger un contact avec leur pays.

Les émissions d'informations et de divertissement hors pair que proposent la Radio anglaise et la Radio française laissent loin derrière elles les produits médiocres de la concurrence commerciale. Nos chaînes spécialisées, Newsworld et le RDI, ont porté la programmation de nouvelles et d'informations offerte 24 heures sur 24 à de nouveaux sommets de popularité et de succès commercial, ouvrant la voie à un éventail de projets novateurs que la Société se prépare à lancer.

En outre, dans le monde réel et bouillant des nouveaux médias, Radio-Canada a non seulement perfectionné ses services de pointe mais elle a aussi, en quelques années, fait d'Internet une réalité virtuelle canadienne.

Radio-Canada, solidement implantée dans le paysage culturel canadien, a la vision et les ressources pour aller plus loin encore.

Le mois dernier, le premier ministre insistait sur la nécessité d'appuyer et de promouvoir le talent canadien, invoquant l'«occasion sans précédent» à mettre à profit pour garantir à nos artistes créateurs des modes d'expression nouveaux et accessibles.

Radio-Canada a bien saisi le propos du premier ministre.

Voilà précisément pourquoi nous avons opté pour la mise en valeur de nos ressources nouveaux médias, tandis que les autres acteurs de l'industrie de la radiodiffusion éternisaient le débat sur les mérites et la viabilité d'Internet. Notre audace nous a donné les moyens de proposer des services tels que Galaxie, le premier service audio payant qui offre, depuis 1997, 30 canaux de musique sans publicité diffusés par voie de satellite et de câble.

Voilà également pourquoi nous avons joué un rôle proactif depuis 1990 en faveur du développement de la radiodiffusion numérique, qui améliore par une marge incommensurable la qualité du service radio et prépare le terrain à un éventail de nouveaux services de données.

Voilà également pourquoi nous nous efforçons de fournir aux Canadiens des repères familiers qui chevauchent les limites régionales et jettent des ponts entre les collectivités et les cultures. Seule Radio-Canada oserait produire une œuvre telle Le Canada: Une histoire populaire, série historique d'envergure, en français et en anglais, qui raconte en 30 heures l'épanouissement d'une nation. Seule Radio-Canada se chargerait d'enrichir notre patrimoine linguistique en offrant des émissions coproduites et diffusées simultanément dans les deux langues officielles.

L'une des raisons d'être du radiodiffuseur public canadien est de procurer une vitrine électronique aux artistes du pays.

Cela explique l'énergie que nous déployons à mettre sur pied le Réseau des Arts (RDA), chaîne spécialisée consacrée exclusivement aux arts et à la culture de langue française.

Nous avons été heureux d'apprendre, la semaine dernière, que le rapport remis au Gouvernement par le CRTC, à la suite de notre demande de révision de sa décision concernant le refus du projet, était favorable à la création d'une chaîne francophone de télévision consacrée aux arts. Avec nos partenaires actuels, La Sept ARTE et BCE Media, nous réviserons donc le projet de Réseau des arts, nous explorerons de nouveaux partenariats et nous déposerons notre nouvelle demande au CRTC à la date fixée.

Radio-Canada croit que les sept millions de Canadiens d'expression française doivent avoir accès à un service comparable par la qualité et la diversité à celui dont profitent les publics de langue anglaise. En l'absence d'un tel service, des membres essentiels de notre communauté artistique canadiens sont privés d'une tribune canadienne et internationale, sans compter des moyens de célébrer et de renforcer leur langue et leur culture dans un média dominé par l'anglais et la culture américaine.

Des personnes et des organisations bien en vue ont souscrit à ce point de vue. Ils nous ont incités, l'été dernier, à proposer un processus de réexamen, à la lueur des dispositions clés de la Loi sur la radiodiffusion qui prescrivent l'augmentation du nombre d'émissions des catégories sous-représentées dans le système de radiodiffusion de langue française.

J'aime croire que ce genre d'intervention est emblématique du regain de confiance que connaît la Société, qui a passé tant d'années à douter de son rôle et à pratiquer le déni.

C'est cette confiance qui nous a motivés à concevoir un projet comme le RDA avec La Sept ARTE, qui est l'organisme public français participant au consortium franco-allemand ARTE — sachant que le projet servait les intérêts du Canada et reconnaissant l'avantage qu'offrent les partenariats stratégiques.

Cette confiance est née lorsque nous avons réussi à canadianiser les grilles de la télévision aux heures de grande écoute, malgré des compressions budgétaires dévastatrices. Et nous en avons fait preuve en proposant une programmation radio, télévision et nouveaux médias qui a fait école.

Comme vous le savez bien, la gestion des risques et la prise de risques finissent par se croiser. Le bon gouvernement d'une entreprise publique a toujours nécessité un équilibre délicat. Les responsables ne sont pas uniquement soumis à un simple bilan. Il importe de fournir des services de grande valeur aux actionnaires, soit, dans les circonstances, la population du Canada. Il faut préserver religieusement la confiance des gens qui dépendent de soi — qu'il s'agisse, au sens du journalisme, de recueillir des données exactes ou, au sens de la création artistique, de capter des moments éphémères.

Or, dans le contexte concurrentiel actuel, on ne peut faire du surplace ni s'en tenir à ce que l'on réussit bien. Lorsque la télévision était à ses balbutiements, la critique en prédisait l'échec en invoquant que les familles ne seraient pas disposées à s'asseoir devant l'écran pendant très longtemps. Imaginez la suite si l'industrie avait ajouté foi à ces paroles.

Si vous dominez un secteur, comme le fait Radio-Canada, vous devez être disposé à prendre des risques, qu'ils soient pondérés ou réalistes. Bref, vous devez être prêt à vous engager sur un territoire où d'autres ne veulent ou ne peuvent s'aventurer.

Pour cette raison, je suis persuadée que Radio-Canada est sur le point de vivre ce moment gratifiant où les morceaux tombent en place comme par magie. Cela dit, la magie n'a rien à voir avec le parcours que nous avons suivi. Nous sommes là parce que nous avons travaillé d'arrache-pied, et nous continuerons de le faire.

Par ailleurs, ce que nous voyons et entendons est effectivement affaire de magie. La merveille tient au récit de l'aventure d'un pays dynamique et sans cesse changeant. Ce que Radio-Canada réussit le mieux, c'est le raconter, avec art. Et, en fin de compte, ce récit représente un risque qui vaut largement la peine.

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