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le 24 avril 2003

CBC/Radio-Canada et le financement de la production télévisuelle au pays

Discours prononcé à l'Association des producteurs de film et de télévsion du Québec (APFTQ)
Daniel Gourd, Vice-président principal, Télévision française

Bonjour,

Je vous remercie de me donner l'occasion de vous adresser la parole aujourd'hui. Initialement, cette rencontre devait me permettre de poursuivre et creuser un peu plus les paramètres et les conditions de réussite du nouveau positionnement de notre télévision, du rôle que vous pourriez jouer en appui de cette démarche… dans la foulée de la rencontre que nous avons eue la semaine dernière à la Maison de Radio-Canada.

Le lourd contexte actuel et les événements qui entourent les récentes décisions du Programme de diffusion du Fonds canadien de télévision m'amènent à vous parler de ce qui agite notre industrie et suscite un climat d'incertitude et d'angoisse rarement égalé au cours des années.

Je ne m'adresse pas à vous en ma seule qualité de vice-président de la télévision française de Radio-Canada mais aussi comme quelqu'un qui siège depuis maintenant quatre ans au CA du Fonds à titre de représentant des quatre réseaux de télévision de Radio-Canada et qui est membre de l'exécutif du Fonds depuis quatre ans, d'abord à titre de trésorier et actuellement comme vice-président.

Il est troublant de constater jusqu'à quel point notre industrie est fragile et comment il est devenu difficile pour nous tous, producteurs et diffuseurs (et tous les autres groupes de métiers et de talents qui dépendent de nos succès), de planifier, de prévoir.

En fait, vous les producteurs vivez d'une année à l'autre dans l'angoisse de voir vos projets échouer dans le grand jeu du financement, dont les règles se modifient ou se transforment en profondeur chaque année. Un échec a des conséquences parfois dramatiques pour les petits producteurs (la majorité d'entre vous) qui travaillez sur quelques projets à la fois.

Quant à nous les diffuseurs, nous ne savons jamais d'une année à l'autre, quelles sont les émissions qui composeront le haut relief de nos grilles, les émissions les plus stratégiques de notre programmation et, partant, les investissements que nous devrons consentir et la planification annuelle globale que nous devons faire.

La réduction importante du financement en provenance du Fonds canadien cette année est un révélateur puissant de cette fragilité, de cette instabilité, et nous amènent tous à remettre en question les règles d'un jeu qui paraît de plus en plus dur et cruel.

Certains cherchent à pointer du doigt des coupables éventuels que l'on pourra immoler sur la place publique, des boucs émissaires de notre désarroi. La télévision publique nationale est souvent identifiée comme tel par nos collègues du privé qui, en passant, appartiennent tous à des consortiums beaucoup plus gros que nous, tout au moins aussi gros et qu'on ne peut pas tout à fait décrire comme des pauvres ou des misérables, des démunis ou des sans voix.

Ces mêmes groupes d'intérêt suggèrent comme solution immédiate à la crise, une injection de fonds destinée aux émissions les plus populaires de leurs chaînes et qui n'ont pas obtenu de financement en vertu des critères qui ont été entérinés à l'UNANIMITé.

Cette suggestion pose des problèmes à mon avis insurmontables car elle n'inclut pas tous les autres laissés pour compte du système : les producteurs régionaux du Québec mais aussi ceux des régions hors Québec qui n'ont rien eu, les grands événements culturels tels le Festival de Jazz de Montréal, Montréal en lumières, le Festival d'été de Québec, le Festival de Lanaudière, les Francofolies de Montréal parmi d'autres, qui ne trouveront pas d'échos sur les écrans de télévision, la programmation jeunesse à notre antenne, etc…

En vertu de quels critères devrons-nous attribuer ces sommes supplémentaires? Est-ce la popularité des émissions non retenues ou le taux de succès limité de certains diffuseurs qui doivent être les seuls facteurs? J'y vois là un arbitraire incompatible avec les règles de droit d'un organisme sérieux qui administre des fonds publics importants et qui doit conserver sa réputation d'intégrité et de non-partialité.

Que ferons-nous aussi des écarts importants et des anomalies évidentes que l'on retrouve du côté anglais et qui pourraient entraîner aussi des corrections importantes?

Que ferons-nous enfin de tous ces producteurs qui ont joué les règles actuelles comme tout le monde et dont les projets se sont classés assez bien pour être les suivants sur la liste? Ils s'attendent normalement à être les prochains à recevoir le financement nécessaire en vertu des règles actuelles? Pourquoi accepteraient-ils de renoncer à leur avenir sans dire un mot? Ils seront certainement en position légitime et légale de réclamer leurs droits.

Toutes ces raisons font que nous ne pouvons changer les règles du jeu en cours d'exercice, même si nous reconnaissons tous qu'elles ne fonctionnent pas comme prévues. Les problèmes que nous allons créer vont dépasser largement les problèmes que nous voulons régler.

Tous ceux qui me connaissent et connaissent mon action au Fonds canadien savent que j'ai toujours milité pour un seul Fonds, basé sur une coalition du public et du privé, avec les mêmes règles du jeu pour tous, une seule administration pour les deux programmes, du moins une cohésion plus grande entre les deux.

Aujourd'hui, je ne suis plus certain que cela est compatible avec l'évolution de notre industrie.

Le service public national et le secteur privé, surtout depuis le nouveau positionnement du secteur français, ne s'en vont pas du tout dans la même direction et poursuivent des objectifs de plus en plus divergents.

Nos collègues du privé veulent du Fonds qui finance des heures de plus en plus nombreuses à des coûts de plus en plus bas avec des objectifs d'écoute de plus en plus élevés.

Le service public national veut davantage explorer, prendre des risques, poursuivre la production de produits de grand impact à des coûts à l'heure plus élevés et que l'on peut produire en moins grand nombre (mais aussi de la production faite en région), parfois au détriment de plus grands auditoires. Cela se confirme dans tous les genres.

Il ne s'agit pas de poser un jugement de valeur sur ces priorités mais de se demander si un organisme, un même système peut tous les servir adéquatement.

Ajoutons à cela l'insécurité et le climat d'incertitude qui reviennent chaque année à cause des règles qui changent et des délais tardifs des décisions qui laissent toute l'industrie en suspens. Prenons en compte aussi les frais d'administration du Fonds qui sont sans cesse grandissants et que nous avons de plus en plus de peine à contenir. Ces frais dépassent les 15 millions cette année.

Il est devenu urgent de trouver un modèle plus simple, qui permet aux objectifs de service public national, des télévisions éducatives et du secteur privé d'être atteints sans que l'un ne se sente dévalorisé par rapport aux autres ou sans que l'incompatibilité de ces objectifs en paralyse l'organisme.

Il nous faut trouver un modèle qui permet une plus grande « prévisibilité » (pardonnez-moi l'anglicisme) des décisions et une capacité de planifier à plus long terme pour les diffuseurs et les producteurs. Un modèle qui génère de la stabilité dans l'industrie et non pas de l'incertitude.

Un modèle qui amène moins d'argent dans l'administration des Fonds et d'avantage dans les productions et sur les écrans de télévision. Un modèle enfin qui laisse aux diffuseurs, privés ou publics, conventionnels ou spécialisés, le soin et la responsabilité de décider ce qu'ils vont diffuser à leur antenne.

Notre entreprise se sent une responsabilité vis à vis de la production indépendante, non seulement parce que nous sommes votre plus important partenaire en terme du nombre de projets, le nombre d'heures produites annuellement et l'argent investi dans les productions, avec ou sans le Fonds canadien de télévision, mais aussi parce que nous nous sentons une responsabilité envers notre industrie qui produit une des plus belles télévisions au monde, une des plus riches et des plus variées, si on tient compte de la petitesse de notre marché.

Nous sommes fiers d'appartenir à cette industrie qui a su créer un star system unique et incomparable dans les milieux culturels minoritaires et qui a su si bien le protéger et le bonifier. Une industrie dont la créativité est remarquable et où les auteurs, les réalisateurs, les producteurs, les artistes, les artisans et les techniciens de qualité foisonnent, sont légion.

La télévision a été, est et sera encore longtemps le principal outil de développement, le principal instrument culturel de notre collectivité, de notre nation, de notre pays, qu'il parle le français ou l'anglais. La télévision est le principal diffuseur de la culture. La télévision n'est donc pas un luxe, elle n'est pas un caprice.

Au-delà de nos différences, au-delà de nos divergences, nous avons la responsabilité collective de travailler ensemble à trouver des solutions qui tiennent compte des intérêts et des différences de chacun et qui nous permettent d'envisager l'avenir avec plus de sérénité. Un nouveau modèle de financement simple, durable et générateur de stabilité, générateur d'avenir est l'un de ces moyens.

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