Évaluation de la stratégie pour
l'environnement Arctique
Rapport Final
Direction générale de l'évaluation
et de la vérification interne
Ministère des Affaires indiennes
et du Nord canadien
Octobre 1996
Résumé
Historique
La SEA est une initiative fédérale d'une durée de six ans lancée en avril 1991 par le gouvernement
fédéral dans le but de préserver et d'améliorer l'intégrité, la santé, la biodiversité et la productivité
de l'écosystème de l'Arctique pour la jouissance des générations actuelles et futures. Le budget
global de 100 millions $ consacré à l'initiative pour une période de cinq ans devant prendre fin
en 1995 a été réduit et réaménagé sur une période de six ans devant prendre fin en 1996-1997.
Sur l'ensemble du budget, le MAINC assurait la gestion de 91,3 millions $. La Stratégie
comportait quatre volets d'intervention spécifiques ainsi qu'un volet de communications. Les
quatre volets sont respectivement les volets Action sur les contaminants, Action sur les déchets,
Action sur l'eau et Action sur l'intégration de l'environnement et de l'économie. La SEA a été mise
en oeuvre avec la collaboration de cinq partenaires autochtones et des ministères fédéraux des
Pêches, de l'Environnement et de la Santé, ainsi qu'avec plusieurs ministères des gouvernements
du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest. Les partenaires autochtones sont le Conseil des
Indiens du Yukon, la Nation dénée, la Nation métisse des Territoires du Nord-Ouest, l'Inuit
Tapirisat du Canada (ITC) et la Conférence circumpolaire inuit (CCI).
La SEA appuie en outre les efforts de coopération internationale du Canada dans les domaines de
la recherche et de la surveillance environnementale dans le cadre de la Stratégie de protection de
l'environnement arctique (SPEA), une initiative importante visant à coordonner les actions
environnementales dans huit nations circumpolaires, à savoir le Canada, le Danemark
(Groënland), la Finlande, l'Islande, la Norvège, la Russie, la Suède et les États-Unis. La SPEA
deviendra une composante du Conseil de l'Arctique dont la création est proposée.
Objet de l'évaluation
Le MAINC s'est engagé à soumettre au Conseil du Trésor une évaluation des résultats de la SEA
et des options pour l'avenir à cet égard. L'évaluation porte sur la pertinence, les résultats et
l'efficacité de la SEA et dégage les leçons apprises à la faveur de cette initiative, et elle vise à
fournir des renseignements à jour de nature à aider la haute direction à planifier ses activités de
programmes futures et à établir des priorités. Le présent document constitue le rapport final sur
les constatations issues de l'évaluation et sur les résultats de l'ensemble de la Stratégie, les
annexes B à E faisant état des résultats plus détaillés des quatre volets.
Méthode d'évaluation et questions à l'examen
L'évaluation a été dirigée par un agent principal d'évaluation du MAINC, avec le concours d'un
Comité consultatif comprenant des représentants de trois des partenaires autochtones, des
bureaux régionaux du MAINC dans les territoires et du programme de la SEA à l'administration
centrale. Le Comité a élaboré une méthode d'évaluation tout à fait particulière afin d'améliorer
l'accès à l'information et de promouvoir le transfert de compétences en mettant en liaison des
firmes du Sud et du Nord avec des consultants issus des communautés autochtones. Les
constatations de l'évaluation sont fondées sur des renseignements obtenus à plusieurs sources, et
plus précisément sur les examens menés dans la capitale nationale, au Yukon et dans les
Territoires du Nord-Ouest, sur une analyse documentaire et sur des opinions d'experts, sur des
entrevues menées avec des chefs de projet des différents volets de la SEA, avec des représentants
des communautés, sur l'évaluation des partenaires autochtones, sur les réponses données au guide
d'auto-évaluation et sur des études de cas menées dans trois collectivités.
Cinq questions devant faire l'objet de l'évaluation ont été approuvées et intégrées au mandat
(annexe A) en juin 1995, à savoir :
- Quel est l'état de la mise en oeuvre de la stratégie et de ses volets d'application et dans
quelle mesure la mise en application a-t-elle été efficace?
- Dans quelle mesure la Stratégie pour l'environnement arctique et ses volets d'application
ont-ils atteint les objectifs fixés?
- La Stratégie et ses volets d'application sont-ils toujours pertinents?
- Quelles améliorations ou solutions de rechange y aurait-il lieu d'apporter à la Stratégie
et à ses volets d'application?
- Quelles leçons peut-on tirer de la Stratégie et de ses volets d'application en ce qui
concerne les meilleures pratiques et l'établissement de partenariats entre les
intervenants?
Constatations de l'évaluation
État de la mise en application : De manière générale, l'évaluation des niveaux de contaminants
présents chez les espèces de poissons et d'animaux a été menée. Peu de choses ont été faites pour
ce qui est d'évaluer les répercussions sur la santé humaine, et en cela la situation reflète l'état de la
science à l'échelle internationale. La petite taille des populations concernées et l'interaction
d'autres facteurs comme la consommation de tabac constituent des contraintes additionnelles à
l'évaluation des répercussions pour la santé humaine. Des progrès importants ont été signalés dans
les travaux préparatoires à l'adoption de mesures de contrôle internationales, et le Canada mérite
d'être félicité pour avoir pris l'initiative de travaux visant à adopter des mesures pour prévenir la
pénétration de polluants organiques rémanents (POR) dans l'environnement de l'Arctique.
L'évaluation a permis de constater que le Canada s'est taillé une place de chef de file à l'échelle
internationale par ses travaux dans le volet Action sur les contaminants.
L'élimination des déchets a commencé et tous les éléments du plan de travail à cet égard ont été
mis en application. Comme prévu, l'effort à consentir devra se poursuivre après l'expiration de la
Stratégie. On estime que les lieux de décharge présentant le plus de dangers ont été répertoriés et
évalués. La SEA a permis de bien mesurer la gravité de la situation pour ce qui est des déchets
dans les territoires du Nord et les efforts du Ministère ont surtout visé l'élimination des déchets
dangereux connus qui se trouvent encore dans les sites, de façon à permettre au Ministère de
s'acquitter de ses responsabilités en matière de santé, de sécurité et en matière juridique. On
estime que 20 % du volume des matières dangereuses connues sont encore en cours d'élimination.
L'élimination des déchets présents dans de nombreuses communautés du Nord s'est faite à l'aide
de fonds de la SEA. L'évaluation a permis de constater qu'une large part des travaux d'élimination
ont été menés pendant les premières années de la Stratégie. En raison de contraintes liées aux
budgets et à l'emplacement même des sites, seulement 2 des 21 sites abandonnés le long de la
ligne DEW (réseau d'alerte avancé) ont été nettoyés.
Le Réseau de surveillance de la qualité de l'eau de la SEA finance actuellement 81 stations de
surveillance de la qualité de l'eau qui, pour la plupart, n'existaient pas avant l'adoption de la SEA.
De nombreuses études sur la qualité de l'eau sont en cours dans des régions spécifiques et la
plupart se sont déroulées comme prévu et se poursuivent, lorsque des problèmes touchant la
qualité de l'eau se posent dans les collectivités. En raison des réductions budgétaires et de
l'accroissement des coûts, l'expansion du réseau de surveillance de la qualité de l'eau a connu un
ralentissement. Des études hydrométriques visant des régions spécifiques ont été financées à l'aide
d'une petite partie du budget des eaux de la SEA et ont dû être menées avec l'aide soutenue
d'organisations extérieures. Le Laboratoire d'analyse des eaux du Yukon n'a pas été établi, par
contre celui des T. N.-O. aurait bénéficié des améliorations prévues au plan. Le laboratoire des
T. N.-O. est actuellement utilisé par les deux territoires.
Le volet Action sur l'intégration de l'environnement et de l'économie comporte trois aspects : le
Programme de gestion des ressources communautaires (PGRC), le Programme d'action
environnementale et le Réseau d'information du Nord (RIN). Dans le cas de plus de la moitié des
projets du PGRC qui ont été échantillonnés aux fins de l'évaluation, des plans étaient censés avoir
été établis, mais pas nécessairement sous forme écrite, et des résultats positifs sont encore
attendus de l'exercice. L'évaluation a permis de constater que l'on se félicite des efforts de
renforcement des capacités déployés à la faveur de projets relevant du PGRC et on y voit un
résultat important. Certaines communautés ont entrepris dans le cadre du PGRC, des projets qui
devraient déboucher sur des stratégies de conservation et sur des politiques de gestion des
ressources, tandis que d'autres collectivités ont utilisé les fonds provenant du PGRC pour mener
des projets environnementaux à l'échelle locale, sans se donner de plans exhaustifs en la matière.
De façon générale, les PEA (Programmes d'action environnementale) comportaient une campagne
de sensibilisation à court terme et des centaines de programmes du genre ont été menés à terme.
Le Réseau d'information du Nord a été mis sur pied et on s'attend à ce qu'il soit de plus en plus
utilisé à mesure que les collectivités auront accès à Internet.
Efficacité de la mise en application : L'évaluation a révélé que la structure des volets de la
Stratégie était généralement acceptable et qu'une meilleure coordination entre les volets serait
profitable. Les participants à chacun des volets ont dit souhaiter être informés des activités ayant
cours dans les autres volets.
Nous avons constaté que l'efficacité organisationnelle au sein du volet Action sur les contaminants
était très bonne. Le Comité des contaminants du Yukon a été jugé plus efficace que son
homologue des Territoires du Nord-Ouest, en raison des ateliers qui ont permis d'associer
davantage les intervenants à l'action du comité. Les partenaires autochtones ont amélioré
l'efficacité des efforts déployés en identifiant des façons efficaces de communiquer avec les
collectivités. L'efficacité organisationnelle des activités du volet Action sur les déchets au Yukon a
également été très bonne. Dans les T. N.-O., l'insistance sur le respect des obligations légales n'a
pas permis de gérer avec autant de souplesse qu'on l'aurait souhaité, si bien que l'on s'est moins
préoccupé de planification spécifique et d'établir des priorités et que les partenaires autochtones
n'ont pas participé autant au processus décisionnel. Dans l'ensemble, l'organisation au sein du
volet Action sur l'eau s'est révélée efficace, encore que la coordination et la communication
interministérielles avec les autres volets pourraient être améliorées. L'évaluation a permis de
constater que le volet Action sur l'intégration de l'environnement et de l'économie était efficace
dans les deux régions. On constate en outre que l'absence de personnel spécifiquement affecté au
volet nuit à l'efficacité de la pénétration de la Stratégie dans les communautés du Yukon.
Atteinte des objectifs : Dans l'ensemble, la SEA a été perçue comme étant l'une des plus grandes
réalisations du gouvernement fédéral à ce jour au nord du 60e parallèle. La SEA compte de
nombreux succès à son actif, en dépit des compressions budgétaires du gouvernement. Le Canada
devance largement tous les autres pays en ce qui concerne les questions environnementales dans le
Nord, et la situation à cet égard est directement attribuable aux activités menées dans le cadre de
la SEA. Les objectifs généraux sont considérés comme concrets et la SEA est perçue comme
contribuant de manière décisive à la réalisation de tous ses objectifs fixés, bien que certains de ces
objectifs soient poursuivis à longue échéance. La SEA a contribué à mieux sensibiliser le Nord
tout entier aux questions environnementales et les efforts dans ce sens devraient faire en sorte
d'assurer la santé et la protection des écosystèmes de l'Arctique. On relève des gains importants
du côté de la sensibilisation des collectivités et de la planification environnementale. Les
partenariats et la participation des collectivités ont contribué à améliorer le processus décisionnel,
en associant divers intervenants à l'action menée. Les travaux sur les contaminants ont permis de
grandes réalisations à l'échelle internationale.
Pertinence : Les renseignements recueillis montrent que la raison d'être de la SEA demeure tout
aussi pertinente aujourd'hui que le jour où elle a été lancée. À presque toutes les sources où ils
sont puisés, les résultats indiquent que les objectifs en ce qui concerne les contaminants
demeurent pertinents. La plupart des observateurs s'entendent pour dire que la science doit
progresser pour qu'on en vienne à mieux comprendre les effets des contaminants présents dans la
chaîne alimentaire sur la santé humaine. Un consensus évident se dégage en faveur du maintien du
volet Action sur les déchets. Les objectifs du volet ont cependant évolué au fil du temps, en raison
des contraintes budgétaires. Les initiatives stratégiques récentes menées dans le but de mieux
cibler encore les activités dans le domaine des déchets devraient permettre d'en arriver à une
approche mieux orientée, qui ciblera en priorité les sites à haut risque. Les objectifs du volet
Action sur l'eau sont considérés comme étant encore pertinents. On insiste non seulement sur la
nécessité de maintenir le réseau de surveillance de la quantité de l'eau, mais en particulier sur
l'importance qu'il faut accorder aux aspects de la qualité de l'eau du programme, aspects qui
s'articulent avec les activités sur les contaminants et, à la limite, avec les activités touchant la santé
humaine et la sécurité. Les objectifs en matière d'environnement et d'économie sont jugés
appropriés, mais on concède que ces objectifs ne devraient pas prendre le pas sur les questions
touchant la santé humaine et l'environnement.
Une large part des renseignements détenus fait ressortir les aspects bénéfiques des liens entre le
programme relatif à la qualité de l'eau et les projets touchant les contaminants, les déchets et
certains projets du PGRC. De leur côté, les représentants autochtones ont dit considérer la SEA
comme un exemple de la démarche holistique qu'ils réclament depuis longtemps. La SEA est
considérée comme un modèle prometteur dont on devrait s'inspirer dans les programmes futurs et
pour la prestation des programmes dans le Nord.
Les participants à l'évaluation ont indiqué avoir des inquiétudes quant aux conséquences que
pourrait avoir la disparition prochaine de la SEA. Des représentants régionaux ont indiqué que le
niveau d'activité auquel on assisterait sans le financement de la SEA pourrait être inférieur au
niveau d'activité nécessaire pour assurer l'intégrité des écosystèmes de l'Arctique.
Meilleures pratiques et leçons apprises : Les participants à l'évaluation ont exprimé des points de
vue clairs et complémentaires quant à l'objectif des partenariats formés dans le cadre de la SEA.
Dans leur évaluation, les partenaires autochtones parlent de «synergies des partenariats». Les
représentants des collectivités et des organisations autochtones ont dit de l'initiative qu'elle
constituait un partenariat réel et significatif et de nombreux participants du gouvernement comme
de l'extérieur ont dit que la SEA avait, dans le Nord, grandement accru la crédibilité du MAINC
en particulier, et du gouvernement fédéral dans son ensemble. Tous les intervenants ont dit
considérer les résultats des partenariats comme la preuve que le succès n'est pas possible sans la
participation entière de tous les paliers de gouvernement et des habitants du Nord au processus
décisionnel. C'est par les partenariats noués dans le cadre de la SEA que les programmes prennent
toute leur pertinence et qu'il est possible de centrer l'action à la fois sur les préoccupations des
collectivités et sur les questions scientifiques. Certaines personnes voient dans les partenariats un
moyen de responsabiliser les organismes décisionnels et de recueillir une information équilibrée à
l'appui de décisions qui se veulent éclairées. Les partenariats qui se nouent aujourd'hui permettent
d'acquérir les compétences nécessaires pour prendre la relève lorsque le MAINC aura quitté la
scène.
Le renforcement des capacités, la qualité du travail scientifique et la création du Centre for
Nutrition and the Environment of Indigenous Peoples (CINE) sont aussi des éléments considérés
comme étant des forces, au même titre que la grande visibilité dont jouit la SEA, de même que la
mesure dans laquelle les travaux menés dans le cadre de la SEA contribuent à la SPEA et à faire
du Canada un chef de file. (Dans le domaine de l'environnement arctique.)
L'évaluation a toutefois permis de relever des aspects au sujet desquels il serait possible
d'améliorer la coordination entre les volets de même que la responsabilisation.
Résumé des recommandations
Les pages 46 à 49 du rapport renferment l'exposé des constatations et des conclusions issues de
l'analyse exposée dans les annexes relatives aux volets, accompagné des recommandations qui
suivent :
1: Le MAINC devrait prendre les mesures nécessaires pour maintenir les priorités de
travail et poursuivre les partenariats entrepris dans le cadre de la Stratégie pour
l'environnement arctique;
2: Pour la suite des travaux entrepris dans le cadre de la SEA, il y aurait lieu de réviser
la formule adoptée, de manière à en arriver à une meilleure efficacité encore par la
consolidation des aspects des volets de recherche qui se recoupent et par la
rationalisation des structures d'administration et des comités;
3: Pour que le MAINC puisse continuer à s'acquitter de ses responsabilités
réglementaires et le Ministre de ses responsabilités redditionnelles, il conviendrait de
tenir à jour le répertoire des sites de déchets et de le vérifier périodiquement pour en
assurer l'exactitude;
4: La communication des découvertes scientifiques et des renseignements en matière de
santé aux collectivités autochtones du Nord devrait se faire dans le respect de la
collectivité et s'exprimer dans un langage clair et simple;
5: Si la SEA devait être reconduite, il faudrait s'efforcer d'établir un régime de mesure
du rendement fondé sur les résultats et prévoir des systèmes de collecte de données
et de mise en oeuvre pour les besoins de la gestion et dans une optique de
responsabilisation;
6: Le MAINC devrait continuer à appuyer une démarche coordonnée au pays en ce
qui concerne les questions environnementales du Nord afin d'assurer au Canada
une présence forte et crédible à l'échelle internationale;
7: L'esprit de partenariat démontré à la faveur de la SEA devrait former la pierre
angulaire de la contribution du Canada aux efforts internationaux visant à
améliorer l'environnement circumpolaire.
Évaluation de la stratégie pour l'environnement Arctique (PDF 421 Ko) en format PDF.
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