Au cours des réunions en petits groupes, les représentants de tous les secteurs ont exprimé le besoin d'en savoir davantage sur la façon dont les différentes composantes de l'environnement réagissent au changement climatique. Bien qu'il soit frustrant de ne pas savoir exactement et avec certitude comment notre climat évoluera dans un avenir rapproché, notre compréhension de la sensibilité de l'environnement au changement climatique s'accroît. À cet égard, la combinaison des connaissances autochtones et des études scientifiques nous est de plus en plus utile pour mieux comprendre de quelle façon certaines espèces de gibier s'insèrent dans les écosystèmes et quelle est la sensibilité de ceux-ci au changement climatique. Les organismes qui fournissent des services, des installations et des opérations vulnérables au changement climatique, sont eux aussi intéressés à mieux comprendre de quelle façon le terrain et l'eau réagiront à la variabilité du climat.

Il est fondamental de permettre aux personnes ayant besoin d'information ou de conseils d'avoir accès aux sources de données, aux analyses et aux interprétations, pour favoriser l'adaptation au changement climatique. De plus, les participants à la réunion attachent une importance cruciale à l'expérience, aux pratiques et aux connaissances locales pour la recherche approfondie sur le changement climatique et ses impacts sur l'environnement. Il existe déjà des organisations (collèges, initiatives de recherche et de surveillance) qui traitent ces objectifs à l'échelle locale ou régionale. Le programme du Collège du Yukon intitulé «Northern Climate Exchange (Échange sur le climat du Nord)» est actuellement l'activité la plus résolument tournée vers la promotion de la sensibilisation au changement climatique et de la communication à cet égard; son mandat englobe tout le Nord. Dans le cadre de ce programme, on a évalué l'état de la sensibilisation au changement climatique ainsi que la connaissance des effets de ce changement à l'intérieur des trois territoires. Par nécessité, on a dû limiter d'autres tâches, comme la consultation communautaire, au Yukon seulement. Cependant, ce programme sert de modèle pour la mise en place d'un service de coordination des communications et de la recherche sur les impacts du changement climatique et l'adaptation dans tout le Nord.

L'intérêt qu'engendrent les impacts du changement climatique se divise en deux grandes catégories selon la facilité à comprendre l'ampleur de ces impacts :

1. La réponse des écosystèmes et les effets du changement climatique sur les espèces de gibier, les fourrages et les pêches. L'intérêt porté à ce secteur trouve racine principalement au sein des organisations autochtones, des communautés, du monde universitaire et des services de recherche gouvernementaux. En fait, c'est dans cette catégorie que les connaissances autochtones contribuent le plus à la formulation de questions de recherche et d'observations sur le comportement, la distribution ou la condition des composantes de l'environnement. L'intérêt porté aux écosystèmes se génère facilement puisque la dépendance des écosystèmes au climat est évidente; une meilleure compréhension des écosystèmes fait partie des mandats de recherche du gouvernement, et il existe également une économie de subsistance qui repose sur le bien-être de ceux-ci. Cependant, il est difficile de déterminer la sensibilité des espèces animales et végétales au climat, car chacune des espèces d'animaux, de végétaux et de poissons dépend d'autres facteurs environnementaux sensibles au climat tels que la formation des sols, l'humidité, la compétition entre espèces et les feux de forêt. Là où les intérêts autochtones sont en jeu, il est essentiel d'interpréter les objectifs et les résultats de recherche en termes non spécialisés.

2. Comportement des infrastructures et impacts sur l'industrie. L'intérêt porté à cette catégorie varie principalement en raison de la difficulté qu'il y a à déterminer l'ampleur des efforts d'adaptation en raison de l'incertitude associée aux projections climatiques. Les organisations des secteurs privé et public, qui doivent assurer la prestation des services de transport, se rendent très bien compte des impacts du changement climatique. Habituellement, l'infrastructure des transports répond directement à un changement climatique, parce que la glace, que ce soit celle des lacs ou des rivières ou encore celle présente dans le sol, assure une fondation stable. Les prévisions d'un réchauffement climatique ont été prises en considération dans la conception des fondations mais elles sont basées uniquement sur les tendances observées à ce jour, et non sur l'anticipation des conséquences des gaz à effet de serre. Une approche proactive avec l'industrie pourrait s'avérer nécessaire, d'une part parce qu'on est peu familiarisé avec la recherche actuelle sur le changement climatique, et d'autre part, en raison de la réticence à assumer les coûts de l'adaptation sans avoir une idée claire des chances d'en retirer un avantage.

La promotion de la recherche sur les impacts et l'adaptation dans le Nord

La plupart des agglomérations du Nord sont de petites communautés qui dépendent en très grande partie d'une économie de subsistance. Par conséquent, ces communautés seraient probablement intéressées à contribuer aux décisions concernant la façon d'effectuer les recherches sur les écosystèmes et d'en appliquer les résultats. Les travaux publics et l'entretien des infrastructures servent également une petite population et, en général, se composent de responsabilités quotidiennes et annuelles. L'industrie et les services de travaux publics savent bien que le changement climatique constitue un facteur perturbateur, et ils ont eu à vivre avec les impacts récents des saisons plus chaudes que la normale. Bien que les projections du climat soient trop incertaines pour être pleinement prises en considération dans les futures activités, ces secteurs voient la recherche d'un bon oeil, dans la mesure où ils peuvent s'attendre à des résultats économiques avantageux. Donc, la recherche sur les impacts du changement climatique et l'adaptation exige une approche proactive afin d'encourager les communautés et les fournisseurs de services à participer.

Il n'existe pas encore d'entité officiellement parrainée pour mettre en oeuvre les recommandations du document sur les options qu'a publié le Groupe de la science, des impacts et de l'adaptation, qui relève du Secrétariat national du changement climatique (c.-à-d., un noeud nordique du Réseau canadien de recherches sur les impacts et l'adaptation). Le programme Northern Climate Exchange du Collège du Yukon, à Whitehorse, constitue la seule initiative créée dans le Nord à ce jour qui fait la promotion de la sensibilisation et de l'adaptation au changement climatique dans tout l'Arctique canadien (bien que, dans le but de maintenir des objectifs réalistes en raison du personnel restreint, le programme concentre ses efforts au Yukon). Actuellement, les responsables du programme évaluent l'état des connaissances concernant la sensibilité des secteurs au changement climatique. Ils sollicitent également le point de vue de communautés choisies du Yukon au sujet des besoins en information sur le changement climatique. Le programme servirait de point de dépôt et d'accès pour les observations, les données et les résultats de la recherche sur le climat et le changement climatique. Il jouerait également un rôle consultatif; le personnel répondrait aux demandes d'information reçues ou les référerait à d'autres sources.

Dans l'état actuel des choses, les fonds consentis à un centre ou un noeud doté d'un budget de recherche, seraient probablement modestes. Aussi, si l'on veut stimuler l'intérêt pour le changement climatique, il faudra des stratégies visant à augmenter l'efficacité d'un centre d'information. Mais d'abord et avant tout, une approche proactive sera nécessaire, comme celle adoptée par le programme Northern Climate Exchange. Une autre condition sine qua non au succès de cette entreprise, sera d'amener les personnes intéressées (c.-à-d., les personnes-ressources de tous les secteurs touchés par le changement climatique) à collaborer à titre de sources ou d'utilisateurs de l'information.

Les stratégies différeront probablement selon qu'elles favorisent la compréhension des écosystèmes ou l'adaptabilité des infrastructures. Des recherches visant à comprendre comment les espèces individuelles de la faune et de la flore ou les écosystèmes répondent à la variabilité climatique s'effectuent déjà, et sur une vaste échelle. L'Initiative des écosystèmes nordiques, le Réseau d'évaluation et de surveillance écologiques, le Mackenzie Valley Cumulative Impacts and Monitoring Program, l'Arctic Borderlands Ecological Knowledge Society et les programmes des collèges nordiques, qui s'intéressent notamment au changement climatique, sont tous des programmes qui effectuent ou favorisent les recherches, et qui en diffusent les résultats. L'interprétation et la diffusion de ces résultats pourrait être une fonction importante du centre d'information. La construction et l'entretien des infrastructures constituent la responsabilité des organismes des secteurs privé et public. Dans ces deux secteurs, on se penche sur la variabilité climatique au besoin, et on est bien au courant des impacts de ce phénomène. Cependant, l'industrie et le gouvernement exigeront l'un et l'autre une indication claire des avantages potentiels avant d'ajouter des politiques qui risquent d'entraîner des dépenses pour des résultats incertains. Dans le cas des infrastructures, l'adaptation au changement climatique pourrait consister aussi à élaborer et à encourager des pratiques visant à réduire les impacts du problème plutôt qu'à l'éliminer. Un centre d'information pourrait jouer un rôle important dans la communication des résultats des recherches et dans l'établissement de liaisons entre les groupes de recherches universitaires ou gouvernementaux et les organismes publics ou privés responsables de la prestation des services.