Bien que des relations de croisement n'aient pu être établies en chacun des emplacements visités d'après les critères décrits à la section Méthodes, une séquence d'écoulements régionaux de la glace a été déterminée pour la reconstitution de l'histoire glaciaire. Au moins cinq écoulements régionaux de glace distincts sont inscrits dans la région de Kivalliq et décrits ci-après du plus ancien (1) au plus récent (5).

1. Sud-ouest
   L'écoulement le plus ancien s'est effectué en direction du sud-ouest et a couvert toute la région. D'après des travaux effectués à l'extérieur de la région d'étude, cet écoulement s'est avancé à l'ouest au moins jusqu'à la rivière Dubawnt et est présent au nord jusqu'à la rivière Back et dans la région de la carte Laughland Lake (56K).
2. Sud
   Un écoulement régional vers le sud a succédé à l'écoulement vers le sud-ouest. Des indications de cet épisode, comme la présence de blocs erratiques de Dubawnt au Manitoba, ont été relevées dans le cadre de recherches antérieures. L'ampleur de cet écoulement au nord de la région d'étude n'est pas connue.
3. Est-sud-est
   Avant les écoulements glaciaires associés à la ligne de partage des glaces du Keewatin, un écoulement régional vers l'est-sud-est depuis une ligne de partage des glaces située à l'ouest de la région d'étude a couvert toute la région. Des études stratigraphiques (composition et fabrique) dans plusieurs sections démontrent la présence de multiples unités distinctes de till au sud de Baker Lake dont une unité à la base indiquant un écoulement ancien vers l'est-sud-est.
4. Nord-nord-ouest
   Des indications d'un écoulement vers le nord-nord-ouest ont été découvertes dans la partie ouest de la région d'étude (feuillets Thirty Mile et Ferguson), jusqu'au lac Kaminuriak à l'est. Des blocs erratiques de dolomie protérozoïque (Groupe d'Hurwitz) retrouvés dans la ceinture de roches vertes du lac Yathkyed constituent une indication d'un transport glaciaire associé depuis le lac Imikula. Cet écoulement vers le nord, opposé à l'écoulement dominant vers le SE, est important parce qu'il implique qu'il existait un ancien centre de dispersion glaciaire au sud-est de la ligne de partage des glaces du Keewatin, peut-être dans la région du lac Kaminak.
5. Ligne de partage glaciaire du Keewatin (et ancestrale)
   Le dernier épisode régional a été un écoulement vers le SE depuis une ligne de partage des glaces située au nord et à l'ouest de la ligne de partage des glace du Keewatin au sens strict. À mesure que la ligne de partage migrait vers sa dernière position, l'écoulement s'est inversé pour se faire vers l'ONO du côté NO de la ligne de partage. Les déviations finales de l'écoulement par rapport au SE dans d'autres parties de la région sont reliées à la forme arquée de la ligne de partage: l'écoulement dominant le plus récent s'effectuait davantage vers le sud dans les parties nord des régions des cartes MacQuoid Lake et Gibson Lake, et davantage vers l'est dans la région de la carte Ferguson Lake. D'autres parts, il y a couramment une convergence tardive de l'écoulement vers les eskers dans des corridors d'une largeur de 3 à 4 km de part et d'autre des crêtes des eskers.

CONCLUSIONS:

La cartographie systématique des marques d'écoulement glaciaire sur le substratum rocheux dans la région de Kivalliq au Nunavut a fourni de nouvelles preuves de la mobilité des centres d'écoulement glaciaire au Wisconsinien. L'histoire des écoulements glaciaires successifs, telle que révélée par les stries entrecroisées et d'autres indications d'écoulements multiples, remet en question l'hypothèse voulant que la ligne de partage des glaces du Keewatin ait été une entité persistante relativement statique de l'Inlandsis laurentidien dans la région centrale du Keewatin. On a trouvé des indications de l'existence d'au mois 4 écoulements glaciaires distincts d'importance régionale antérieurs aux écoulements associés à la dégradation ultime de l'Inlandsis laurentidien.

A ce jour, ces travaux constituent l'étude la plus exhaustive et détaillée du genre dans le Secteur du Keewatin de l'Inlandsis laurentidien. Ils s'inspirent de connaissances acquises au cours des deux dernières décennies révélant que les formes laissées par l'érosion témoignent d'un intervalle prolongé de l'histoire glaciaire. Non seulement ont-ils permis de mieux définir des écoulements glaciaires déduits par d'autres chercheurs dans la partie continentale de l'Arctique, mais en outre ils ont mis au jour des indications d'écoulements jusqu'à maintenant insoupçonnés.