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Les volcans du Canada Surveiller les volcans
Prédire quel sera le prochain mouvement d'un volcan est une
tâche difficile, particulièrement au Canada
où la plupart des volcans sont situés dans
des régions éloignées et inhospitalières.
Néanmoins, nous avons beaucoup appris, durant le
siècle dernier, au sujet des éruptions grâce
à une recherche soigneuse et à la surveillance
des volcans à travers le monde, en particulier
à Hawaii, au Mont Pelé (Antilles), à
St-Vincent (Antilles), au Mont St-Hélène,
au Pinatubo (Philippines), au Mont Uzen (Japon), à
Montserrat (Antilles) et au Mont Etna (Italie). Grâce
à ces éruptions, les scientifiques ont établi
deux règles d'or qui sont utiles pour la prédiction
concernant n'importe quel volcan. La première
règle, c'est que chaque volcan tend à
avoir son propre schéma de comportement, en termes
de type d'éruption, de magnitude et de fréquence,
et qu'il est probable que la prochaine éruption
sera semblable aux éruptions antérieures.
Cela signifie, qu'en étudiant le passé
d'un volcan, on peut commencer à prédire
son avenir! La seconde règle est qu' habituellement,
un volcan n'entre pas en éruption sans avoir
donné de signes d'avertissement durant les
semaines, les mois ou les années précédentes.
Les signes les plus courants sont des chapelets de petites
secousses sismiques, peu profondes (d'une profondeur
inférieure à 15 km), dont la plupart sont
trop faibles pour être perçues. Cette règle
signifie qu'en surveillant les volcans, au moins
pour les séismes, nous pouvons déterminer
l'activité de leur système de plomberie
souterrain et l'imminence d'une éruption.
En 1991, la surveillance des signes précurseurs
de l'activité du Pinatubo, dans les Phillipines,
a fourni suffisamment d'avertissements de l'éruption
pour sauver la vie de dizaines de milliers de gens.
Au Canada, même si certains volcans présentent
une menace importante pour les communautés locales,
et que toute éruption affecterait l'économie
de l'Ouest canadien, les efforts de surveillance
et de recherche concernant les volcans sont restreints.
Aucune éruption importante n'a eu lieu au
Canada durant les quelques dernières centaines
d'années et la plupart de nos volcans sont
situés dans des régions reculées;
la surveillance de volcans est donc une priorité
moins importante que celle des séismes, des glissements
de terrain et des tsunamis. Cependant, comme pour les
séismes, une éruption volcanique au Canada
dans l'avenir est inévitable et il est vraisemblable
qu'elle aura un impact important sur les gens. Cet
impact est d'autant plus probable avec la population
qui augmente et avec le développement qui s'étend.
Pour toutes ces raisons, la Commission géologique
du Canada, avec l'aide des scientifiques des universités
canadiennes, a graduellement accumulé une connaissance
de base sur l'état de nos volcans. De plus,
nous améliorons sans arrêt notre capacité
à surveiller les volcans de façon à
prévoir toute activité imminente.
La surveillance au Canada |
Pendant les 50 dernières années, les scientifiques
de la Commission géologique du Canada et des universités
canadiennes ont documenté le comportement passé
d'un bon nombre de volcans canadiens. Nous possédons
maintenant une solide base de données nous indiquant
l'emplacement des volcans, comment ils ont tendance
à entrer en éruption et lesquels sont actifs.
Le catalogue des volcans canadiens est la liste d'une
petite partie de cette base de données. Malheureusement,
nous n'en savons pas encore assez au sujet de la
fréquence des éruptions pour prédire
quels sont les volcans qui seront les prochains à
entrer en éruption et quelles sortes d'impact
en seront la conséquence. Les travaux dans ce domaine
sont en cours et vous pourrez trouver plus d'information
dans la section La volcanologie
à la CGC.
Actuellement, aucun des volcans canadiens n'est suffisamment surveillé
pour nous permettre de savoir quelle est l'activité
de leurs systèmes magmatiques. Le réseau
de sismographes, établi pour surveiller et comprendre
les séismes tectoniques, est trop éloigné
de nos volcans pour nous fournir une figure précise
de ce qui se passe en dessous d'eux. Si un volcan
canadien donne des signes d'une activité importante,
le réseau sismique existant enregistrera probablement
l'augmentation de l'activité; mais, dans
la plupart des régions, cette détection
ne se fera à l'avance que dans le cas d'éventuelles
grosses éruptions, quand une éruption sera
à la veille de commencer -ou sera déjà
commencée.
La menace provenant de volcans hors du Canada semble beaucoup
plus grande que celle des volcans canadiens. Cette situation
est en partie due à l'absence de données
de surveillance pour nos volcans. Cependant, il est certain
que les volcans d'Alaska, du Washington, de l'Orégon
et de la Californie sont entrés en éruption
infiniment plus souvent dans les temps historiques que
ceux du Canada. La commission géologique des États-Unis
surveille de près les volcans américains
et il existe un plan pour alerter les autorités
canadiennes dans le cas d'éruptions qui enverraient
des cendres au Canada.
Comment sont surveillés les volcans |
Les signes les plus typiques d'une éruption imminente
sont des seismes peu profonds, des déformations
de terrain, un échappement accru de gaz volcaniques,
un accroissement de l'intensité et des températures
des fumerolles, des glissements de terrain et des éboulements
mineurs. La plupart de ces signes commencent à
se faire sentir des mois ou des semaines avant l'éruption.
Quelques jours avant le début de l'éruption,
d'autres activités sont perceptibles comme
de petites explosions de vapeur et l'apparition de
fissures près de la cheminée éruptive.
Il existe de nombreuses méthodes permettant une
détection anticipée de phénomènes
prééruptifs. Un réseau d'au
moins trois sismographes (Figure 52 et Figure 53)
autour du volcan sont nécessaires pour localiser
précisément les petits secousses souterraines.
Les sismographes servent aussi à détecter,
à distance, des événements tels
ques des éboulements, des glissements de terrain,
des coulées de boues résultant de la fonte
de neige, ou de petites explosions de vapeur. En localisant
précisément les secousses, il est possible
de tracer grossièrement le chemin du magma vers
la surface.
Figure 52. Sismographe et station de surveillance video surveillanceUn sismographe et une station de surveillance vidéo à Montserrat (Antilles). À gauche, la caméra vidéo avec son antenne, et vaguement visible à l'extrême gauche, une boîte noire contenant le sismomètre. Les données sont transmises par radio à l'observatoire. La station est alimentée par une rangée de panneaux solaires (premier plan) que le pilote de l'hélicoptère Jim McMann est en train de nettoyer d'un fin dépôt de cendre. Quand la cendre bloque les rayons solaires, la station perd de sa puissance.
(Photo M. Stasiuk (Commission géologique du Canada))
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Figure 53. SismogrammeUn sismogramme sur son cylindre à l'observatoire de volcan de Montserrat. Le cylindre et le rouleau de papier tournent sous le stylet à encre bleue; celui-ci bouge en fonction des mouvements du terrain subis par le sismomètre qui lui transmet les données. Les signaux de grande amplitude visibles sur l'enregistrement sont pour la plupart des vibrations du terrain résultant de coulées pyroclastiques et d'éboulements du dôme de lave, et non pas des séismes. De tels enregistrements sur papier sont catalogués comme enregistrements visuels, mais les données sont également recueillies, conservées et analysées en format numérique.
(Photo M. Stasiuk (Commission géologique du Canada))
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À mesure que le magma s'approche de la surface, il doit
tasser la roche et cela entraîne le déplacement
et le gonflement de la surface. Normalement, l'ampleur
de la déformation du terrain varie entre des
millimètres et des mètres, particulièrement
à proximité du site de l'éruption.
La déformation du sol peut être mesurée
à l'aide de méthodes traditionnelles
d'arpentage comme les relevés au niveau
et au théodolite ou à l'aide d'une
station totale (par mesure électronique de distance
à l'aide d'un laser infrarouge et mesure
d'angle précise) aussi bien qu'à
l'aide de clinomètres (Figure 48, 49, 50, 51).
Une méthode relativement nouvelle, largement
utilisée, est le relevé grâce aux
méthodes très précises du système
de positionnement global (GPS) (Figure 49).
On développe également une méthode
encore plus moderne pour enregistrer les déformations
de terrain; elle utilise les mesures par satellite appelé
"InSAR" (Interférométrie par
radar à synthèse d'ouverture).
Figure 48. Théodolite optiqueThéodolite optique utilisé à Montserrat en 1996 pour mesurer l'expansion du dôme de lave (à distance, partiellement couvert de nuages météoriques et de cendre). Un théodolite mesure les angles horizontaux et verticaux de manière très précise et c'est un instrument courant de relevé. En relevant des points du dôme depuis au moins deux bases, on peut les situer précisément en trois dimensions. Des mesures répétées permettent d'enregistrer le mouvement du dôme.
(Photo M. Stasiuk (Commission géologique du Canada))
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Figure 49. Système de positionnement globalUn instrument de positionnement par satellites (GPS) de haute précision est utilisé en Dominica en 1999 pour surveiller l'activité volcanique. Ces instruments peuvent fournir des données de localisation avec des précisions d'environ un demi centimètre, et peuvent détecter la déformation du sol, ou le gonflement du volcan, causée par des changements de pression à l'intérieur du volcan.
(Photo par L. Millar)
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Figure 50. Un relevé en coursRob Watts (Université de Bristol) à Montserrat (Antilles) effectuant un relevé du dôme de lave en expansion (hors de vue) à l'aide de jumelles à télémètre laser infrarouge. Les jumelles permettent de mesurer des emplacements situés dans un rayon de trois kilomètres avec une précision de quelques mètres, ce qui est suffisant pour évaluer l'expansion du dôme.
(Photo M. Stasiuk (Commission géologique du Canada))
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Figure 51. Utilisation d'un télémètre électroniqueGeorge Skerritt, de l'observatoire de volcan de Montserrat, utilisant un télémètre électronique couplé à un théodolite numérique, pour mesurer la déformation du terrain près du dôme de lave en expansion à Montserrat (Antilles). Le télémètre électronique utilise un rayon laser infrarouge et exige des réflecteurs spéciaux comme cibles, qui doivent être mis en place. Si on peut en faire l'installation, on peut prendre des mesures avec une précision millimétrique sur une portée de 5 km. Cette technique nécessite du temps clair et que les réflecteurs cibles soient exempts de cendres et de débris, une lourde tâche quand ils sont placés près d'une cheminée en éruption.
(Photo M. Stasiuk (Commission géologique du Canada))
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Figure 73. Le COSPEC CGC-ResonanceSimon Young utilisant le COSPEC CGC-Resonance à Montserrat, Antilles. L'instrument mesure la quantité de dioxyde de soufre dans le panache volcanique (en haut). Le dioxyde de soufre absorbe certaines longueurs d'ondes de lumière et l'instrument peut mesurer la quantité de cette absorption en observant la lumière du soleil passant au travers du panache.
(Photo M. Stasiuk (Commission géologique du Canada))
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On surveille normalement les températures des fumerolles
avec des thermocouples et on analyse des échantillons
d'eau des sources chaudes pour vérifier
les changements brusques de leur composition chimique.
Les émissions de grande magnitude de gaz volcaniques
sont enregistrées à l'aide d'un
instrument nommé COSPEC, une invention canadienne
dont le nom signifie spectromètre de corrélation
et qui mesure la quantité de dioxyde de soufre
dans les panaches de gaz volcaniques (Figure 73).
Le magma produit, de manière caractéristique,
de grandes quantités de dioxyde de soufre; sa
présence dans un panache de vapeur est donc une
bonne indication que le magma est proche de la surface.
Une fois que le volcan est entré en éruption,
la surveillance doit continuer parce que la grande majorité
des éruptions ne sont des événements
ni courts ni simples. Habituellement, une éruption
comprend plusieurs événements ou épisodes
éruptifs, séparés par des jours,
des semaines, des mois, des années, voire des
décades. Par exemple, l'éruption
qui a commencé sur l'île antillaise
de Montserrat en 1995 perdure presque sans interruption
et ne donne aucun signe qu'elle va cesser. Pendant
une éruption prolongée, l'activité
évolue ou passe par des périodes de comportement
plus marquées -et plus dangereuses. La
surveillance continuelle de l'activité permet
aux volcanologues d'enregistrer ces cycles ou ces
évolutions; ils peuvent ainsi développer
leur capacité à fournir des prévisions
à court terme de la croissance de l'activité,
ce qui permet de sauver des vies. Si c'est possible,
toutes les méthodes décrites ci-dessus
sont utilisées en permanence pendant les éruptions;
une grosse part du travail consiste à maintenir
ces instruments en opération en dépit
de l'activité volcanique (Figure 52 et Figure 55).
De plus, chaque fois qu'ils le peuvent, les scientifiques
recueillent des échantillons du magma le plus
récemment rejetés pour surveiller ses
caractéristiques physiques et chimiques (Figure 54).
Ces caractéristiques changent souvent durant
les éruptions et aident à mieux comprendre
le comportement du volcan.
Figure 54. Volcanologues recueillant des échantillonsVolcanologues recueillant des échantillons dans le delta de matériau pyroclastique (voir Fig. 6), sur la côte à Montserrat (Antilles), en 1996. Des effondrements du dôme de lave envoient régulièrement des coulées pyroclastiques sur quelques kilomètres jusqu'à la côte. Savoir quelles sont les propriétés physiques et la chimie de la lave en éruption, peut nous fournir une information importante sur la direction que l'éruption va prendre. Il est donc important de recueillir de tels échantillons quand c'est possible et c'est l'endroit le plus sécuritaire pour le faire, même si le matériau est à une température de quelques centaines de degrés Celsius à seulement quelques centimètres sous la surface.
(Photo M. Stasiuk (Commission géologique du Canada))
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Figure 55. Volcanologues installant leurs instrumentsVolcanologues examinant le bord du cratère, au début de l'éruption de Montserrat (Antilles) en 1996, pour installer les instruments qui transmettront, par radio à l'observatoire, des informations sur la déformation du terrain. Le brouillard est un gaz volcanique acide émis par la cheminée. Près de la cheminée, la concentration de ces gaz est suffisante pour tuer toute végétation; les «tiges verticaux» sont en fait des troncs de palmiers morts encore enracinés. Au premier plan, le scientifique Jean-Christophe Komorowski.
(Photo M. Stasiuk (Commission géologique du Canada))
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Il est aussi difficile de dire quand l'éruption
d'un volcan a cessé que de prédire
quand elle va commencer. Pendant une éruption,
l'activité du volcan peut souvent faire des
pauses qui durent des jours ou des mois durant lesquelles
rien ne semble se passer. Mais l'activité
peut reprendre, ce n'est donc pas une bonne idée
d'arrêter la surveillance et de laisser les
gens rentrer chez eux à l'instant où
le volcan semble calme. Même après plusieurs
mois d'accalmie, quand les gens ont été
autorisés à rentrer chez eux, la surveillance
continue généralement à un niveau
minimal (sismicité) juste en cas de regain d'activité.
Dans les périodes postérieures à
l'éruption, la surveillance permet de différencier
les dangers caractéristiques des volcans d'activité
récente; les avalanches de roches brûlantes
et les nouveaux dômes de lave, les explosions de
vapeurs et les dépôts brûlants, ou
les soudaines coulées de lave ou les inondations
de rivières endiguées par de nouveaux dépôts
volcaniques. Aux Philippines, la région autour
du Pinatubo continue d'être soumise à
des coulées de boue extrêmement dangereuses
quand la pluie et les rivières charrient à
nouveau les énormes volumes de cendres de l'éruption
de 1991. Il est nécessaire de conserver au moins
un certain niveau de surveillance permanent des volcans
à cause de la persistance des risques post-éruptifs
pendant des décades.
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