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Impacts et adaptation liés aux changement climatique : perspective canadienne
Impacts sur l'agriculture

Agriculture Table des matières Adaptation du secteur agricole au changement climatique Effets sur l'agriculture Travaux antérieurs Introduction Références Conclusion Lacunes des connaissances et besoins en recherche

"Le changement climatique aura, sur l'agriculture, des effets qui causeront des dommages et engendreront des gains qui s'étendront des plantes et des animaux, pris individuellement, aux réseaux commerciaux mondiaux." (10)

Impacts sur les cultures

Le changement climatique pourrait avoir de nombreux effets sur la production agricole (voir la figure 1). En fait, les prévisions de la réaction des cultures au changement climatique varient fortement et laissent supposer des gains et des pertes. Plusieurs auteurs ont intégré, dans des études canadiennes récentes, les modèles de cultures et le modèle de circulation générale (MCG) dans un scénario climatique où la concentration de CO2 dans l'atmosphère aurait doublé, afin de connaître l'impact du changement climatique sur différents types de cultures. En voici quelques exemples :

  • McGinn et al.(11) prévoient que l'augmentation de la production agricole de colza, de maïs et de blé tendre, en Alberta, se situera entre 21 et 124 p. 100.
  • Singh et al.(12) prévoient que la production de maïs et de sorgho, au Québec, pourrait augmenter de 20 p. 100, tandis que celle de soja pourrait diminuer de 20 à 30 p. 100. Les récoltes de colza, de tournesol, de pommes de terre, de tabac et de betteraves augmenteraient, tandis que les récoltes de petits pois, d'oignons, de tomates et de choux diminueraient.
  • Bootsma et al.(13) sont d'avis que les récoltes de maïs-grain et de soja, dans les provinces de l'Atlantique, pourraient augmenter respectivement de 3,8 tonnes/ hectare et de 1,0 tonne/hectare, tandis que la récolte de l'orge ne subirait aucun changement notable. Ils prévoient également que, pour maximiser les bénéfices, on convertira au moins 50 p. 100 des terres agricoles actuellement ensemencées en petites céréales et en maïs-fourrage ensilé à la culture du maïs-grain et du soja.

Comme c'est le cas dans d'autres secteurs, la résolution des données que fournit le MCG aux fins de modélisation des effets sur l'agriculture soulève des questions (p. ex., référence 12). Dans de nombreuses études, on a interpolé des données du MCG pour obtenir les prévisions régionales du changement climatique, ce qui soulève des questions quant à la validité des méthodes d'interpolation et à l'exactitude des résultats, en particulier en ce qui concerne les régions à microclimat (p. ex., la péninsule de Niagara, la vallée de l'Annapolis). Cependant, en ce qui a trait à la méthodologie, une étude statistique récente révèle que les différentes méthodes d'interpolation utilisées n'influencent pas outre mesure les résultats des études.(14) Cette conclusion renforce la confiance globale que l'on peut avoir dans les projections des modèles.

Figure 1 : Effets potentiels du changement climatique sur la production agricole au Canada
Figure 1 : Effets potentiels du changement climatique sur la production agricole au Canada
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L'augmentation du stress hydrique et de la sécheresse fait craindre le pire pour les cultures à travers le pays, qu'elles soient irriguées ou non. Si l'eau vient à manquer, la production déclinera et des récoltes entières risquent d'être perdues. Le changement climatique modifiera probablement les profils hygrométriques, mais l'amplitude et la direction de ces changements sont très incertaines. De plus, les saisons de croissance prolongées et les températures plus chaudes augmenteront probablement les besoins en eau, tout comme les variations de la fréquence des sécheresses. Dans les encadrés 1 et 2, on décrit les résultats d'études récentes dans lesquelles on a examiné l'influence du changement climatique sur les conditions d'humidité dans les Prairies et la vallée de l'Okanagan, deux régions agricoles parmi les plus sèches du Canada.

ENCADRÉ 1: Les Prairies s'assécheront-elles? (15, 16)

Le changement climatique entraînera-t-il un manque d'humidité et une augmentation de la sécheresse? La question est cruciale pour les provinces des Prairies, où le manque d'humidité constitue déjà une source de préoccupation importante et où les sécheresses chroniques ont occasionné des pertes substantielles à la collectivité agricole. La réponse à cette question demeure malheureusement assez vague.

En se servant du modèle de circulation générale (MCGA1) du Centre canadien de la modélisation et de l'analyse climatique, Nyirfa et Harron(16) ont trouvé que les contraintes imposées par l'humidité seront beaucoup plus importantes dans la plupart des régions agricoles des Prairies d'ici 2040 à 2069. Les précipitations devraient augmenter, mais elles ne compenseront pas les pertes d'humidité accrues découlant de températures plus chaudes et de l'augmentation des taux d'évapotranspiration. Les chercheurs en concluent que les récoltes de petites céréales semées au printemps seront menacées, à moins que l'on n'adopte des mesures d'adaptation telles que le changement de cultures et le déplacement des pâturages.

Par contre, en utilisant une série de scénarios de changement climatique, McGinn et al.(15) ont trouvé que les niveaux d'humidité de la couche supérieure du sol - de 120 cm - seront égaux ou supérieurs à ceux d'aujourd'hui. Leurs modèles montrent aussi que les dates d'ensemencement du blé au printemps seront avancées de 18 à 26 jours et que la saison de croissance sera plus courte. Les récoltes se feront donc plus tôt, ce qui permettra d'éviter les conditions arides de la fin de l'été. Mais ces avantages ne seront pas répartis uniformément à travers les Prairies; certaines régions suscitent des inquiétudes, comme le sud-est de la Saskatchewan et le sud du Manitoba, où les précipitations estivales devraient diminuer.

Photo : Gracieuseté d'Agriculture et Agroalimentaire Canada.

Photo : Gracieuseté d'Agriculture et Agroalimentaire Canada.

ENCADRÉ 2: Alimentation et besoins en eau dans l'Okanagan (17)

La viabilité agricole du sud de la vallée de l'Okanagan dépend largement de la présence d'eau d'irrigation. Les chercheurs prévoient que, d'ici la fin du siècle, la demande en eau des cultures et les besoins d'irrigation augmenteront de plus de 35 p. 100 par rapport aux valeurs historiques. Le lac et le chenal principal devraient contenir assez d'eau pour répondre à cette augmentation de la demande, mais les exploitations agricoles qui dépendent des affluents risquent de connaître des pénuries d'eau.

Pour régler le déséquilibre entre l'eau disponible et la demande d'eau, Neilsen et al.(17) préconisent l'intensification des mesures de conservation de l'eau, telles que la micro-irrigation et l'application de paillis sur les sols. Ils suggèrent également l'application de nouvelles techniques, comme la régulation de l'irrigation déficitaire et le séchage partiel de la rhizosphère, qui engendreraient d'importantes économies d'eau.

Photo : Gracieuseté de Ken Hall.

Si de nombreuses questions concernant la nature des futurs changements climatiques à l'échelle régionale et locale demeurent sans réponse, il ne fait aucun doute que le niveau de CO2 dans l'atmosphère continuera d'augmenter pendant plusieurs décennies. On sait qu'en général, l'augmentation de la concentration en CO2 dans l'atmosphère entraîne une augmentation de la production agricole. Cela s'explique par le fait que la hausse des concentrations de CO2 a tendance à améliorer l'efficience de l'utilisation de l'eau par les plantes et les taux de photosynthèse. Mais cette relation n'est pas simple. Par exemple, il faut s'attendre à ce que certains types de plantes, tels que les légumineuses, profitent plus que d'autres de cette situation, et il est probable que la valeur nutritive de certaines cultures diminue. En outre, plusieurs facteurs, dont les conditions d'humidité et la présence d'éléments nutritifs, peuvent restreindre ou annuler les avantages de la fertilisation par le CO2. Dans certaines études d'impact, on a tenté d'incorporer les effets du CO2 dans la modélisation, mais de nombreux chercheurs estiment qu'il plane encore trop d'incertitudes sur cette question pour qu'on puisse intégrer efficacement les effets de l'augmentation de la concentration de CO2 dans l'atmosphère.(12)

Un autre facteur qui complique la projection des tendances de la production agricole est l'interaction du changement climatique et de l'augmentation des concentrations de CO2 avec d'autres facteurs de stress environnemental, tels que l'ozone et le rayonnement UV-B. Par exemple, les températures plus chaudes tendent à augmenter les concentrations d'ozone au niveau du sol, situation qui a un effet négatif sur la production agricole. Des études montrent que cet effet négatif peut annuler tous les gains de productivité découlant de l'augmentation des niveaux de CO2 dans l'atmosphère.(18)

Des changements dans les conditions hivernales auraient également un effet appréciable sur la productivité et la croissance des cultures. Les modèles climatiques prévoient que le futur réchauffement culminera en hiver. Des mois d'hiver plus chauds réduiront substantiellement le risque de dommages aux arbres fruitiers et aux rhizomes dans certaines régions, comme le sud de la vallée de l'Okanagan.(17) Mais les hivers plus chauds amèneront également leur lot de problèmes pour l'agriculture, en particulier en ce qui a trait aux ravageurs, puisque le froid extrême de l'hiver joue souvent un rôle important dans la régulation de leurs populations. Les hivers plus chauds risqueront aussi d'altérer la capacité de récupération des cultures (voir l'encadré 3).

ENCADRÉ 3: Les hivers plus chauds profiteraient-ils aux cultures?(19)

Les hivers rudes limitent la distribution géographique des cultures vivaces, mais des hivers plus chauds ne seraient pas nécessairement bénéfiques. En fait, les dommages causés par l'hiver aux plantes fourragères vivaces risqueraient d'augmenter dans l'est du Canada, en raison de leur moindre endurance au froid acquise pendant l'automne, des périodes de dégel plus fréquentes en hiver et de la diminution de l'épaisseur de la couche de neige protectrice. Par exemple, d'ici 2040 à 2069, malgré une augmentation de 5 °C des températures minimales annuelles, le nombre de jours froids (température inférieure à -15 °C) sans une couverture protectrice de neige (couche de moins de 0,1 mètre d'épaisseur) pourrait augmenter de plus de deux semaines.

Par contre, les arbres fruitiers seraient moins exposés aux dommages dus à l'hiver, en raison des températures hivernales plus douces, qui diminueraient l'agression par le froid; de plus, une diminution des gelées tardives du printemps abaisserait le risque de dommages aux bourgeons dans de nombreuses régions. Cependant, de plus fréquentes périodes de dégel, en hiver, auraient pour effet d'abaisser la résistance au froid des arbres et d'augmenter leur sensibilité aux températures froides de la fin de l'hiver.

De nombreuses cultures sont plus sensibles aux variations de la fréquence des températures extrêmes qu'aux changements des conditions moyennes. Par exemple, on a trouvé qu'une période de chaleur extrême coïncidant avec le stade critique de développement d'une culture produit des effets négatifs, comme la diminution de la production annuelle dans le cas des cultures semencières (p. ex., référence 20), ou cause des dommages aux arbres fruitiers tels que les pommiers.(17) Les cultures qui demandent plusieurs années pour s'établir (p. ex., les arbres fruitiers) sont particulièrement sensibles aux phénomènes extrêmes. Mais jusqu'à présent, la plupart des études ont été axées sur les variations des conditions moyennes, et on commence seulement à étudier des scénarios d'événements climatiques extrêmes. De nombreux experts sont persuadés qu'une augmentation de la fréquence et de l'intensité des événements extrêmes engendrerait le plus grand défi que le changement climatique imposerait à l'industrie agricole.

Un autre facteur - les variations du régime des vents - n'est habituellement pas intégré dans la modélisation des effets du changement climatique, pour la principale raison que les projections éoliennes des MCG sont très incertaines(21) et que les phénomènes éoliens en général sont mal connus. Le vent n'en demeure pas moins un paramètre important de la production agricole, car il a une grande influence sur l'évapotranspiration et l'érosion, en particulier dans les Prairies. L'absence de projection de la dynamique des vents dans les évaluations des effets du changement climatique ne fait que rendre ces dernières plus incertaines.

On observe depuis peu un autre phénomène qui joue un rôle important dans la production agricole : le réchauffement est devenu asymétrique, c'est-à-dire que les minima nocturnes augmentent plus rapidement que les maxima diurnes. Et les modèles climatiques laissent prévoir que cette tendance se maintiendra. Ce type de réchauffement asymétrique tend à réduire la perte d'eau des cultures par évapotranspiration et à améliorer l'efficience de l'utilisation de l'eau.(22) Dans ces conditions, les répercussions du changement climatique sur la productivité agricole pourraient être moins marquées que les effets prévus dans un scénario où les réchauffements diurne et nocturne s'équivalent.(23)

Impacts sur le bétail

Au Canada, on compte plus de 90 000 exploitations d'élevage, qui représentaient plus de 17 milliards de dollars des recettes monétaires agricoles en 2000.(4) Malgré l'importance économique de ces exploitations, peu d'études ont été faites au sujet des effets du changement climatique sur celles-ci.

On admet généralement que la température est le facteur bioclimatique le plus important pour le bétail.(24) Des températures plus chaudes présenteront à la fois des avantages et certaines difficultés pour les exploitations d'élevage. Les avantages seront plus manifestes en hiver, car le temps plus chaud diminuera les besoins en nourriture, améliorera la survie des jeunes et réduira les coûts d'énergie.(25) Les difficultés surgiront durant l'été, car les vagues de chaleur entraîneront la mort de nombreux animaux. Par exemple, on entend souvent parler de grandes quantités de poulets qui périssent aux États-Unis pendant les vagues de chaleur.(26,27) Le stress dû à la chaleur a également des répercussions sur la production de lait, la qualité de la viande et la reproduction des vaches laitières.(24) On sait en outre que le réchauffement des températures a pour effet de diminuer l'appétit du bétail et, par conséquent, sa prise de poids.(28) Par exemple, une étude menée dans les Appalaches a montré qu'une augmentation de la température de 5 °C en été avait entraîné une diminution de 10 p. 100 de la reproduction des vaches et de la production laitière.(28)

À condition que l'humidité soit suffisante, on s'attend généralement à ce que des températures plus chaudes et des concentrations en CO2 plus élevées augmentent le taux de croissance des prairies et des pâturages.(29,31,31) On estime qu'un doublement de la quantité de CO2 dans l'atmosphère entraînerait une augmentation de 17 p. 100 de la productivité moyenne des prairies,(29) les augmentations les plus fortes ayant lieu dans les régions froides(32) et les écosystèmes comportant des pâturages à humidité limitée.(29) Mais les résultats des études varient considérablement suivant les endroits, et des changements de composition taxinomique peuvent modifier les effets réels de ces températures sur le pâturage du bétail.(29) Par exemple, des études ont montré que les futurs changements climatiques, en particulier ceux comportant des phénomènes extrêmes, peuvent favoriser l'invasion d'espèces étrangères dans les pâturages,(33) ce qui pourrait réduire la valeur nutritive de l'herbe.

Une augmentation des déficits hydriques dus à la sécheresse pourrait forcer les producteurs à diminuer le nombre de têtes de bétail qu'ils gardent en pâture pour préserver leurs terres, comme l'a montré la sécheresse de 2001, qui a forcé de nombreux producteurs des Prairies à abattre une partie de leurs troupeaux. Pour la saison 2002, on a prévu que de nombreux pâturages ne toléreraient aucun pacage, tandis que la capacité normale d'autres pâturages serait réduite de 70 à 80 p. 100.(34)

Peu d'ouvrages traitent des répercussions des phénomènes climatiques extrêmes sur le bétail. Pourtant, les tempêtes, les blizzards et les sécheresses posent des problèmes importants aux éleveurs.(28) En plus des effets directs qu'elles ont sur les animaux, les tempêtes peuvent causer des pannes de courant qui interrompent le fonctionnement des fermes dont les opérations journalières dépendent étroitement de l'électricité. Ce genre de situation a été illustré par la tempête de verglas de 1998 qui s'est abattue sur l'est de l'Ontario et le sud du Québec, où de nombreux propriétaires de fermes laitières ont passé plusieurs jours, voire plusieurs semaines, sans pouvoir utiliser leurs machines à traire. La santé des vaches en a pâti (elles couraient le risque de souffrir de mammite), et cette tempête a causé d'importantes pertes de revenus,(35) d'autant plus que les fermiers étaient dans l'incapacité de stocker le lait à la bonne température. Et comme le manque d'électricité rendait difficiles la ventilation et le chauffage des étables, les animaux sont devenus plus vulnérables aux maladies.(35)

Dégradation des sols

"Combattre la dégradation des sols s'impose comme un des plus grands défis que l'agriculture mondiale ait à relever. Elle découle de l'érosion, de l'épuisement, de la saturation en eau et de l'accumulation de solutés." (10)

Les répercussions que peut avoir le changement climatique sur la qualité des sols agricoles sont les suivantes : la variation de la teneur en carbone des sols, la lixiviation de leurs éléments nutritifs et le ruissellement. Par exemple, les variations des concentrations de CO2 dans l'atmosphère, les déplacements de la végétation et les variations des cycles assèchement-humidification peuvent tous avoir des effets sur le carbone contenu dans le sol, et donc sur la qualité et la productivité de celui-ci.(36,37)

L'érosion des sols menace la productivité et la pérennité agricoles et nuit à la qualité de l'air et de l'eau.(38) L'érosion des sols peut s'aggraver de plusieurs manières sous l'effet du changement climatique. L'érosion éolienne et l'érosion par l'eau sont étroitement liées à des phénomènes climatiques extrêmes - tels que les sécheresses et les inondations - qui, selon les prévisions, seront plus fréquents par suite du changement climatique.(21,39) Les changements d'utilisation des terres pourraient exacerber ces effets, car la conversion de la couverture végétale en terres labourables augmente fortement la sensibilité du paysage à l'érosion résultant de la sécheresse ou d'autres fluctuations climatiques.(40) Les hivers plus chauds peuvent entraîner une diminution de la couche de neige protectrice et exposer davantage les sols à l'érosion éolienne, tandis que l'augmentation des cycles gel-dégel favorisera la fragmentation des particules du sol.(41) Le risque d'érosion augmentera également si, pour réagir aux conditions de sécheresse, les producteurs recourent davantage à la jachère.

Parasites et mauvaises herbes

Les mauvaises herbes, les insectes et les agents pathogènes sont tous sensibles à la température et à l'humidité,(42) et certains organismes sont aussi sensibles aux concentrations de CO2 dans l'atmosphère.(43,44) Il est donc important de comprendre comment le changement climatique agira sur les parasites, les agents pathogènes et les mauvaises herbes si l'on veut en prévoir les répercussions sur l'agriculture.

La plupart des études traitant des effets du changement climatique sur les mauvaises herbes, les insectes et les maladies débouchent sur un éventail de résultats possibles et sont généralement basées sur des opinions d'experts plutôt que sur les résultats obtenus lors d'expériences de recherche effectuées en laboratoire ou sur le terrain. Les conclusions de ces études suggèrent ce qui suit :

  • Une concentration élevée de CO2 risque de favoriser la croissance des mauvaises herbes.(42)
  • Les parasites et les agents pathogènes du bétail risquent de migrer vers le nord si la ligne de gel se déplace dans cette direction.(28)
  • La probabilité de survie des virus, d'une année à l'autre, risque d'augmenter.(45)
  • Les hivers plus chauds risquent d'étendre la gamme d'insectes et d'aggraver les infestations et les maladies.(42)
  • Les hivers plus longs et plus chauds risquent d'entraîner des infestations plus fréquentes de parasites tels que le doryphore de la pomme de terre.(46)
  • Le taux de prolifération des agents pathogènes et la résistance de l'hôte risquent de changer.(47)
  • La distribution géographique des maladies des plantes risque de changer.(48)
  • L'interaction des mauvaises herbes et des cultures risque d'être influencée.(49)

Il faut effectuer des études pour vérifier et valider ces prévisions, et il faut parfaire l'intégration des résultats dans les évaluations des répercussions.(50)

Un travail important a été accompli dans le domaine des effets du contrôle climatique sur les populations de sauterelles en Alberta et en Saskatchewan.(51) Cette recherche a montré que la reproduction et la survie des sauterelles sont favorisées par des conditions chaudes et sèches. Par exemple, on attribue au temps chaud et sec qui a sévi en 2001 une augmentation de 50 p. 100 du nombre moyen de sauterelles adultes par mètre carré, par rapport aux valeurs de 2000. Des températures supérieures à la moyenne accroissent le développement des sauterelles et leur permettent de déposer des oeufs en plus grand nombre avant l'arrivée du gel. Et puisque le froid extrême peut tuer les oeufs d'hiver, des hivers doux favorisent également la prolifération des sauterelles.(51) Une augmentation de la température et de la sécheresse dans les Prairies, selon les projections des modèles climatiques,(52) pourrait mener à des infestations de sauterelles plus importantes et plus étendues. Des travaux récents indiquent que la relation entre les concentrations élevées de CO2 dans l'atmosphère, les températures plus chaudes et les espèces de parasites est complexe. Prenons pour exemple une étude des effets de ces paramètres sur le puceron,(43) parasite important qui stoppe la croissance des plantes et déforme les feuilles, les fleurs et les bourgeons. Des concentrations élevées de CO2 augmentent le taux de reproduction des pucerons, mais elles rendent ceux-ci plus vulnérables aux attaques de leurs ennemis naturels en diminuant leur quantité de phéromone d'alarme. Il se peut donc que les pucerons s'en tirent moins bien dans un environnement à concentration de CO2 plus élevée.(43) Les espèces végétales envahissantes, telles que les mauvaises herbes, ont une remarquable faculté d'adaptation au changement climatique, comme le laisse supposer la gamme étendue de latitudes sous lesquelles on les trouve actuellement. De plus, les espèces envahissantes ont souvent la capacité de se disperser rapidement, ce qui leur permet de changer de zone en réaction aux changements de climat. Il s'ensuit que ces espèces risquent de devenir des espèces dominantes dans certaines régions.(44) Il faut également s'attendre à ce que le changement climatique diminue l'efficacité des pesticides, ce qui nous forcerait à modifier nos modèles prévisionnels des maladies et nos stratégies de gestion des maladies.(48,49) Cela pourrait entraîner des applications plus massives et plus fréquentes de pesticides et, partant, menacer les organismes non visés et augmenter la pollution de l'eau,(49) en plus d'augmenter les coûts liés à l'utilisation des pesticides.(53) On prévoit des tendances semblables en ce qui concerne l'utilisation et les coûts des herbicides.(54)

Répercussions économiques

Pour évaluer les répercussions économiques du changement climatique sur l'agriculture, on utilise différents outils, dont les modèles climatiques, les modèles de cultures et les modèles économiques. Comme chaque étape du processus de modélisation nécessite la formulation d'hypothèses, la qualité des résultats finaux est altérée par une cascade d'incertitudes.(25) Dès lors, il n'est pas étonnant que les évaluations des répercussions économiques sur l'agriculture au Canada se caractérisent par leur grande variabilité.(55) Sur le plan général, toutefois, il faut s'attendre à ce que les répercussions économiques du changement climatique reflètent les répercussions biophysiques de ce changement (c'est-à-dire qu'on peut s'attendre à des avantages économiques là où les effets sur la production agricole sont positifs). Les études suggèrent qu'un léger réchauffement climatique serait généralement bénéfique à l'agriculture canadienne.(28) Il faut toutefois noter que la plupart des évaluations des répercussions économiques ne tiennent pas compte des changements de fréquence et d'intensité des phénomènes extrêmes. Comme on l'a déjà mentionné, la sensibilité de l'agriculture aux phénomènes extrêmes laisse supposer que les pertes économiques globales seraient beaucoup plus élevées qu'on le prévoit généralement. Par exemple, la sécheresse de 1988 a causé des pertes à l'exportation estimées à quatre milliards de dollars,(56) et la sécheresse de 2001 devrait occasionner des débours records d'indemnités, garanties par les programmes d'assurance-récolte, qui atteindront entre 1,1 et 1,4 milliard de dollars.(6) Dans les études des répercussions économiques, on tend également à considérer globalement les grandes régions et à ne pas s'intéresser aux répercussions que subissent certains types de fermes et des collectivités particulières.(55) Les marchés internationaux joueront également un rôle appréciable dans les répercussions économiques du changement climatique sur le secteur agricole canadien. En fait, l'incidence, sur l'agriculture canadienne, des changements qui se produisent dans les autres pays pourrait être aussi importante que les changements internes de la production agricole.(9) L'agriculture nord-américaine joue un rôle capital dans la production alimentaire mondiale et, puisque le Canada a des chances de mieux s'en tirer que beaucoup d'autres pays en ce qui a trait aux répercussions du changement climatique, les marchés internationaux devraient s'ouvrir davantage à l'économie canadienne. On peut supposer que des accords commerciaux comme l'ALENA et le GATT auront une certaine incidence sur l'agriculture canadienne,(57) mais on manque d'études quantitatives traitant de ces questions.

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2006-10-06Avis importants