DISCOURS
Le 9 juin 2005
HALIFAX (Nouvelle-Écosse)
2005/25
SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS
NOTES POUR UNE ALLOCUTION
DE
L'HONORABLE JIM PETERSON,
MINISTRE DU COMMERCE INTERNATIONAL,
À L’OCCASION DE LA 66e ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ANNUELLE
DU BUREAU DU BOIS DE SCIAGE DES MARITIMES
Aujourd'hui, je vais vous dire quelques mots sur notre situation passée et notre
orientation en matière de bois d'œuvre ainsi que sur la place du bois d'œuvre dans le
programme international général du Canada.
Énoncé de politique internationale du Canada
Nous ne pouvons nous permettre de passer à côté des occasions d'affaires que nous
offrent les puissances économiques émergentes, comme la Chine, l'Inde, le Brésil et la
Corée du Sud.
Au cours des derniers quatre mois et demi, j'ai dirigé des missions commerciales qui
m'ont permis de constater de visu les débouchés remarquables qui s'offraient aux
entreprises canadiennes sur ces marchés. Le Brésil est la plus forte économie
d'Amérique latine, et il y a longtemps que nous y entretenons des rapports de
coopération sur le plan du commerce. L'Inde — importante puissance économique —
connaît une croissance annuelle de 8 p. 100. La Chine a fait dégringoler le coût des
produits manufacturés et est devenue l'atelier de la planète.
Cet état de choses place les entreprises canadiennes devant d'énormes défis et de
fabuleuses possibilités. Nos entreprises doivent se brancher sur ces chaînes de valeur
mondiales. C'est à leurs risques et périls qu'elles omettront de se doter d'une stratégie
pour la Chine et l'Inde, car les emplois et la prospérité du Canada dépendent de la
compétitivité mondiale de nos entreprises.
Par exemple, lorsque j'étais à Shanghai, j'ai visité l'exposition Maison de rêve en Chine.
Ce projet novateur, qui s’occupe de promouvoir les produits canadiens du bois en
Chine, est le fruit d’un partenariat entre la province et l'industrie forestière de la
Colombie-Britannique. L’exposition montrait aux consommateurs, aux architectes, aux
constructeurs et aux représentants du gouvernement de la Chine les avantages des
produits canadiens du bois pour la construction domiciliaire.
L'exploration de nouveaux débouchés et l'ouverture de nouveaux marchés
internationaux pour nos produits du bois permettront aux entreprises forestières
canadiennes de prospérer au sein de l'économie mondiale.
Un de ces nouveaux débouchés nous est offert en Corée du Sud. Celle-ci constitue un
marché à forte croissance dont les progrès sont rapides, ainsi qu'une des portes du
Nord-Est asiatique et une région de grand intérêt stratégique pour les chaînes de valeur
mondiales. La Corée du Sud est déjà notre huitième plus important marché
d'exportation et en 2004, nos échanges bilatéraux ont dépassé 8 milliards de dollars.
Ces chiffres sont sans doute impressionnants, mais nous pouvons et nous devons faire
encore mieux.
Comme beaucoup d'entre vous le savent, le Canada a engagé des pourparlers
préparatoires avec la Corée du Sud à propos de la négociation éventuelle d'un accord
de libre-échange. Au cours de nos consultations officielles, tout le monde a tenu à nous
faire prendre conscience de la vulnérabilité du secteur de la construction navale, mais
dans leur grande majorité, les entreprises du Canada atlantique se montrent fort en
faveur d'un accord de libre-échange, qui procurerait d'énormes avantages aux secteurs
de l'agriculture, des poissons et fruits de mer, du bœuf, du porc, de l'exploitation
minière, de l'énergie, des services et de la foresterie. Au-delà de ces avantages, mon
gouvernement, sous la direction du ministre de l'Industrie, M. David Emerson, a
entrepris des consultations dans le but de trouver des moyens pour que les industries
de l'Atlantique soient concurrentielles sur les marchés mondiaux et deviennent des
fournisseurs de nouveaux emplois nets.
Il serait toutefois impardonnable que notre intérêt pour les économies émergentes nous
fasse oublier nos partenaires de toujours. Nous nous efforçons de conclure avec
l'Union européenne un accord complet et tourné vers l'avenir en matière de promotion
du commerce et de l'investissement et nous hâtons les travaux d'élaboration du cadre
économique Canada-Japon.
Ne vous y trompez pas : le succès des négociations du cycle de Doha pour le
développement est crucial, parce qu'il constitue notre seul espoir de mettre un terme
aux subventions à l'exportation, de réduire considérablement l’appui national qui fausse
les échanges et d'accroître fortement l'accès aux marchés.
Nous devons mettre fin au niveau éhonté des subventions à l'agriculture qui font un tort
considérable à nos producteurs en Union européenne et aux États-Unis. Nous devons
offrir des règles du jeu équitables aux producteurs agricoles canadiens. Nous devons
ouvrir l'univers commercial aux pays en développement et leur permettre, en éliminant
les subventions, de faire face à la concurrence. Pour ce qui est d'ouvrir le monde aux
produits et services que nous sommes plus qu'en mesure de fournir, il nous faut un
cycle de négociations ambitieux. Il va nous falloir opérer des choix difficiles pour
conclure de nouvelles ententes commerciales, mais nous ne pouvons nous permettre
l'inaction. Nous devons continuer à aller de l'avant, conformément à nos priorités.
Relations canado-américaines
Même dans une économie planétaire en mutation, notre première priorité demeure les
États-Unis.
Préparer le Canada à affronter l'avenir, c'est rappeler à nos amis américains que
libre-échange veut effectivement dire liberté des échanges. S'il est exact que plus de
95 p. 100 des échanges commerciaux entre le Canada et les États-Unis se font de
façon harmonieuse et que l'ALENA [Accord de libre-échange nord-américain] est une
réussite, quelques graves problèmes subsistent, comme, tout particulièrement, le
harcèlement dont sont victimes les exportateurs canadiens de bois d'œuvre résineux.
Malgré le chapitre 19 de l'ALENA, des problèmes de taille persistent et font l'objet de
contestations répétées en vertu du droit commercial américain. Ce litige incessant est
destructeur pour notre industrie comme pour celle des États-Unis. Voyez par exemple
comment les droits imposés par les États-Unis sur le bois d'œuvre résineux gonflent le
coût des maisons américaines.
L'ALENA ne peut mener à des solutions nord-américaines si les règlements des
différends opérés en vertu de l'Accord peuvent être renversés par les groupes d'intérêt.
Nous ne pouvons pas accepter cela. Nous n'abandonnerons pas la partie.
En mars, le premier ministre [Paul Martin], le président [George W.] Bush et le
président [Vicente] Fox ont signé le Partenariat nord-américain pour la sécurité et la
prospérité. Il est dit dans l'Accord qu'il est dans notre intérêt commun de réagir à la
montée de la Chine et de l'Inde en forgeant une économie nord-américaine plus
unifiée. Ce partenariat vise entre autres choses à améliorer notre compétitivité et notre
productivité collectives en rendant les règlements respectifs des trois pays plus
compatibles, notamment au chapitre de la reconnaissance des compétences
professionnelles, de l’uniformité des normes de produits et d'une meilleure coopération
dans l'agroalimentaire.
Cette démarche ne portera fruit que si les Américains cessent de contrevenir à l'esprit
des accords commerciaux qui nous unissent. Il faut à l'ALENA un mécanisme de
règlement des différends objectif et exécutoire, qui permette de mener les choses à
leur terme en un laps de temps raisonnable — et dont les gouvernements sont
disposés à respecter les décisions.
Bois d'œuvre résineux
Je suis toujours ravi de travailler avec le secteur du bois d'œuvre qui emploie
290 000 personnes, exporte pour 6,8 milliards de dollars dans l'ensemble du Canada et
est un moteur économique particulièrement important ici même, au Canada atlantique.
Je tiens à vous rappeler aujourd'hui que le gouvernement du Canada est déterminé
à travailler avec les provinces et avec votre secteur afin de régler de façon durable
ce différend au mieux des intérêts des travailleurs canadiens de toutes les régions
du pays.
Nous maintenons notre démarche qui comporte trois volets, soit la négociation, la
contestation juridique et les mesures de rétorsion.
Contestation juridique
Comme vous le savez tous, le gouvernement fédéral, aidé de l'industrie et des
gouvernements provinciaux, recherche activement le règlement des différends devant
l'Organisation mondiale du commerce [OMC] en vertu de l’ALENA et devant le Tribunal
de commerce international des États-Unis.
Nous avons remporté bien des succès dans nos contestations [dans le dossier du bois
d’œuvre]. Le différend pourrait toutefois se poursuivre jusqu'en 2007 et en l'absence
d'un règlement durable, rien ne peut empêcher l'industrie américaine de prendre
d'autres mesures restrictives.
Négociation
Je continue à travailler en étroite collaboration avec les chefs de file de l'industrie et
mes homologues provinciaux pour que les pourparlers futurs avec les États-Unis soient
abordés dans une optique pancanadienne. Et je suis persuadé que cette optique
pourrait très bien déboucher sur un règlement négocié. Pour nous aider à atteindre ce
résultat, Paul Tellier et Gordon Ritchie se sont joints à notre équipe à titre de conseillers
spéciaux. Je suis heureux de pouvoir compter sur leur expérience et sur leur sagesse.
Le 8 mars 2005, j'ai présenté au secrétaire américain au Commerce une proposition qui
mettrait un terme au conflit. Cette proposition comprenait les éléments suivants :
• suppression des droits imposés par les États-Unis;
• remboursement complet des dépôts en espèces;
• droit temporaire à l'exportation sur les livraisons de bois d'œuvre aux États-Unis;
• portes de sortie pour les provinces qui ont opéré des réformes dans leurs
programmes de gestion des matières ligneuses;
• exclusion du Canada atlantique.
Je veux prendre ici un moment pour vous assurer que l'obtention d'une exclusion de
cette région à l'égard de toute mesure aux frontières reste une des premières priorités
du gouvernement fédéral dans un accord négocié.
Les États-Unis ont donné suite à notre proposition en faisant parvenir des documents
sectoriels et gouvernementaux à l'industrie canadienne et aux provinces.
Vous ne l'ignorez pas, l'industrie canadienne fait également sa part. Au début d'avril,
les PDG canadiens et américains du secteur du bois d'œuvre ont exposé leurs
positions respectives au cours d'entretiens qui ont eu lieu à Chicago. Le 3 mai 2005, les
membres de l'industrie canadienne se sont réunis afin de discuter des positions et des
scénarios de négociation. Les documents américains sont analysés en prévision d'une
autre rencontre possible.
Au cours des deux dernières semaines, mes représentants ont poursuivi les
consultations auprès des provinces et de l'industrie canadienne. Nous continuerons de
déployer ces efforts afin de veiller à ce que nous travaillions en collaboration en vue de
trouver les meilleures solutions possibles pour tous les Canadiens.
Mesures de rétorsion
La plus notoire des questions qu'il reste à régler avec les États-unis est celle de ce
qu'on appelle l'amendement Byrd.
L'amendement Byrd a été déclaré à juste titre illégal par l'OMC, mais demeure en
vigueur. Il encourage les producteurs américains à déclencher des litiges commerciaux,
faisant ainsi planer un double péril sur les exportateurs canadiens. Le Canada, de
concert avec l'Union européenne et d'autres pays, a malheureusement dû prendre des
mesures de rétorsion.
La rétorsion n'est pas le recours que nous privilégions, mais la mesure est nécessaire.
Les règles du commerce international doivent être respectées.
Le 9 mai 2005, j'ai été le premier ministre étranger à rencontrer [le représentant
américain au Commerce] M. [Rob] Portman, après sa nomination. Il m'a affirmé que le
gouvernement voyait d'un bon œil l'abrogation de l'amendement Byrd, abrogation qui
n'avait toutefois guère les faveurs du Congrès. C'est la raison pour laquelle il est
essentiel de défendre nos intérêts aux États-Unis.
Promotion et défense de nos intérêts
Nous avons engagé le dialogue avec des représentants du gouvernement américain
aux instances les plus élevées : ainsi, le premier ministre s'est entretenu du différend
avec le président Bush tout dernièrement, à Crawford, au Texas. J'en ai discuté avec le
secrétaire américain au Commerce, M. [Carlos] Gutierrez, et avec le représentant
américain au Commerce, M. Portman. Je soulèverai la question à la première occasion
qui se présentera avec le nouvel ambassadeur des États-unis au Canada, M. David
Wilkins, qui est originaire de la Caroline du Sud, un important acteur dans le secteur
américain du bois de résineux.
Il faut que le Canada ait une forte présence aux États-Unis. Nous avons ouvert sept
nouveaux consulats, en avons élevé deux au rang de consulat général et avons
nommé 20 nouveaux consuls. Nous servons désormais les Canadiens aux États-unis à
partir de 23 bases différentes. Nous avons aussi ouvert un secrétariat à Washington
afin de coordonner les activités des provinces, des territoires et des parlementaires
canadiens.
Le 1er mars 2005, j'ai dirigé une délégation de plus de 30 de mes collègues du
Parlement, d'homologues provinciaux et de représentants de l'industrie à l'occasion de
la journée de promotion du commerce qui s'est déroulée à Washington afin de faire
pression sur les membres du Congrès relativement aux questions urgentes en matière
de commerce international. Les efforts que nous avons déployés à Washington visaient
avant tout à améliorer et à renforcer les relations commerciales canado-américaines et
à régler des différends comme ceux du bois d'œuvre et de la maladie de la vache folle.
Je remercie tous ceux qui m'ont accompagné à Washington et je suis bien décidé à
organiser d'autres visites.
Il reste toutefois beaucoup à faire. En fin de compte, il nous faut transformer le
différend relatif au bois d'œuvre en enjeu local. Il faut que les politiciens américains
soient mis au courant par leurs circonscriptions et leurs électeurs des répercussions du
différend sur les coûts du bois d'oeuvre, le coût accru d'une nouvelle maison, par
exemple.
Nous avons besoin de votre aide pour mieux nous faire entendre.
Nous avons besoin de votre aide pour joindre vos clients, lesquels doivent de leur côté
joindre les leurs. Nous avons besoin qu'ils aillent parler à leurs députés au Congrès et à
leurs sénateurs du coût élevé du bois d'œuvre, des droits américains et de leurs
répercussions néfastes sur l'Américain moyen, qui travaille d'arrache-pied.
Comme chacun de vous le sait, nous avons nommé un nouvel ambassadeur du
Canada à Washington, quelqu'un que vous connaissez tous, l'ancien premier ministre
du Nouveau-Brunswick, M. Frank McKenna. M. McKenna sait admirablement exposer
le point de vue du Canada. M. McKenna et nous mettons tout en œuvre pour débattre
le différend relatif au bois d'œuvre avec les principaux sénateurs et députés au
Congrès ainsi qu'avec le personnel de la Maison-Blanche.
Monsieur l'ambassadeur McKenna s'emploie à relever le prestige du Canada et à faire
connaître ses enjeux à Washington, et nous estimons qu'il fait un travail remarquable.
Son intervention n'aurait pu arriver à un meilleur moment. Au cours des élections
américaines de l'an dernier, on a entendu des rumeurs de protectionniste des deux
côtés, des rumeurs reflétant le sentiment protectionniste qui s'intensifie aux États-Unis.
Nous saurons si les États-Unis sont capables d'échapper à l'emprise d'intérêts
protectionnistes étroits quand le texte de l'Accord de libre-échange avec les pays
d'Amérique centrale [ALEAC] sera soumis au Congrès la semaine prochaine. Le
président Bush lui est favorable, mais il faudra que le Congrès se rende compte que
l'ALEAC est indubitablement dans son intérêt, que le protectionnisme ne protège
personne et que le libre-échange peut être profitable à tous.
J'ai bon espoir que le secrétaire au Commerce, M. Gutierrez, et que le représentant au
Commerce des États-Unis, M. Portman, ont reçu le message et qu'ils feront tout pour
faire tomber les obstacles au libre-échange. Je sais que le secrétaire au Commerce
comprend l'importance de la question du bois d'œuvre pour nos relations, et la
remarquable expérience législative du représentant au Commerce, M. Portman, va
nous aider à abroger l'amendement Byrd. Je crois que ces nouveaux dirigeants se
rendent compte que le protectionnisme sape leur économie, altère leurs relations
internationales et nuit à leur rôle de chefs de file mondiaux.
Au Canada atlantique, ce protectionnisme a dévasté notre industrie forestière en raison
des droits injustifiés. Vos produits forestiers ont toujours été différents et doivent être
traités en conséquence. À mon avis, assurer une exclusion aux Maritimes dans un
accord négocié est une condition non négociable.
Du premier jour de mon mandat à aujourd'hui, ma première priorité a toujours été de
régler le différend sur le bois d'œuvre.
Nous savons qu'il faudra pour ce faire une coopération à tous les niveaux.
Je continuerai, de concert avec le premier ministre, M. [John] Hamm, et avec mes
homologues des provinces, à déployer de grands efforts à l'endroit des législateurs
américains pour promouvoir les intérêts de votre industrie auprès des décideurs
américains du plus haut niveau.
Nous continuerons de travailler avec vous afin de trouver des solutions durables et de
faire respecter les règles qui régissent le commerce international.
Nous continuerons de travailler avec vous afin d'adopter un budget qui ouvre de
nouvelles perspectives au Canada atlantique et à tout le Canada.
Et nous continuerons de travailler avec vous pour accroître la participation du Canada
dans le domaine en évolution rapide du commerce et de l'investissement international,
afin de faire profiter tous les Canadiens de possibilités et d'une prospérité accrues dans
les mois et les années à venir.
Je vous remercie.
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