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M. AXWORTHY - ALLOCUTION À LA 54E SESSION DE L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ANNUELLE DES NATIONS UNIES - NEW YORK

99/48 SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS

NOTES POUR UNE ALLOCUTION

DE

L'HONORABLE LLOYD AXWORTHY,

MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,

À LA 54e SESSION DE L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ANNUELLE

DES NATIONS UNIES

NATIONS UNIES, New York

Le 23 septembre 1999

(12 h 20 HAE)

Monsieur le Président,

Permettez-moi de vous féliciter de votre élection à la présidence de l'Assemblée générale. Les Canadiens sont fiers d'avoir secondé vos efforts et ceux de vos concitoyens tout au long du cheminement au terme duquel vous vous êtes joints à la communauté des nations. Au nom du Canada, permettez-moi également de souhaiter la bienvenue à Kiribati, à Nauru et aux Tonga à titre de nouveaux membres des Nations Unies.

Monsieur le Président, votre élection rend témoignage à votre sagesse et à votre dévouement aux objectifs des Nations Unies. Or, en retour, je suis convaincu que vous serez de bon conseil dans la conduite des travaux pour lesquels nous sommes réunis ici, au nom des peuples du monde entier.

En effet, c'est pour ces peuples que nous représentons que nos prédécesseurs ont fondé les Nations Unies et posé les jalons de son action, et non pas pour les États-nations, les ministres, les ambassadeurs et le secrétariat. C'est pourquoi il convient de se rappeler ces lignes de la Charte des Nations Unies :

« Nous, peuples des Nations Unies, résolus à préserver les générations futures du fléau de la guerre [...] à proclamer à nouveau notre foi dans les droits fondamentaux de l'homme [...] à créer les conditions nécessaires au maintien de la justice [...] à favoriser le progrès social et à instaurer de meilleures conditions de vie dans une liberté plus grande [...] avons décidé d'associer nos efforts pour réaliser ces desseins [...]. »

Il s'agit là de mots empreints de noblesse et de buts qui font l'unanimité. Cependant, correspondent-ils toujours à la réalité, ou nous faut-il trouver une nouvelle orientation et réaffirmer notre engagement?

En effet, comment les peuples mesureraient-ils l'œuvre accomplie jusque-là par les Nations Unies et jugeraient-ils la situation sur la scène internationale aujourd'hui :

  • alors que, cette dernière année seulement, nous avons assisté à une campagne de nettoyage ethnique brutale au Kosovo; que des innocents ont été massacrés et mutilés en Sierra Leone, en Angola, dans les deux Congos ainsi qu'au Soudan; que l'entente prévoyant l'indépendance du Timor oriental a donné lieu à une répression cruelle;
  • alors que les enlèvements et le terrorisme sévissent dans presque toutes les régions du monde; que les trafiquants de drogue et les criminels exercent une influence de plus en plus grande; que nous assistons au retour des marchands d'esclaves et à l'émergence de seigneurs de la guerre modernes qui, poussés par l'appât du gain, brutalisent et exploitent les populations;
  • alors que nous subissons les conséquences de la face sombre de la mondialisation, en ce sens que les échanges mondiaux créent une nouvelle richesse, mais que celle-ci est mal distribuée; que des enfants sans défense sont recrutés par les forces armées ou vendus par l'intermédiaire d'Internet pour ensuite être exploités; que la dégradation de l'environnement inflige un fardeau considérable aux plus démunis, ceux-là mêmes qui ont le moins la force de le supporter?

À l'aube du nouveau millénaire, ces problèmes et une multitude d'autres menaces qui pèsent directement sur les gens influent de plus en plus sur la physionomie du monde. Si nous, les peuples des Nations Unies, avions le loisir de repenser ce préambule, nous pourrions très bien proclamer notre détermination à protéger les générations existantes contre les risques émergents et graves pour la sécurité des personnes et des familles.

Il existe certes une autre façon d'envisager les choses, qui laisse briller une lueur d'espoir. Nous pourrions effectivement souligner avec une certaine satisfaction que, grâce aux efforts conjugués des gens qui collaborent par delà les frontières, la réponse à ces nouvelles menaces pour la sécurité humaine donne lieu à un nouveau sentiment d'accomplissement.

À l'heure actuelle, 86 pays ont ratifié la Convention d'interdiction des mines antipersonnel, sanctionnant dans la foulée un régime juridique et un plan d'action qui sauveront des millions de vies.

L'an dernier, au terme d'un travail de collaboration, 120 pays ont voté en faveur de la création d'une Cour criminelle internationale qui permettra d'inculper des individus de crimes contre l'humanité.

Sur le chapitre des conflits, les Nations Unies s'emploient actuellement à reconstruire le territoire dévasté du Kosovo dans le prolongement d'une intervention humanitaire sans précédent. Au même moment, les soldats de la paix rétablissent l'ordre au Timor oriental, touché depuis longtemps par des troubles.

C'est ainsi que ces peuples dont nous sommes n'abdiquent pas face à la confusion, aux bouleversements et à la misère qui accablent notre monde, et recherchent encore dans cette enceinte l'expression de la coopération et le ralliement à une action concertée.

Cependant, ce n'est pas là tâche facile, car beaucoup oublient qu'ils sont au service de nous tous, les peuples du monde, et non au service de l'intérêt de leur pays en particulier. Ils sont encore trop nombreux à protéger leurs prérogatives, à participer à des jeux de pouvoir exclusifs, ou à refuser d'acquitter leur contribution, paralysant cette institution et l'empêchant de s'attaquer aux problèmes qui nuisent à notre mieux-être collectif.

Les personnes qui, sur la base d'un argument qui a fait son temps, à savoir la souveraineté de l'État, s'opposent à une stratégie pour la sécurité des personnes, ne nous facilitent pas la tâche non plus. Certes, la souveraineté de l'État demeure un principe fondamental et un des principaux piliers de la paix et de la sécurité. Cependant, elle n'a rien d'absolu et ne peut servir à occulter les violations les plus graves des droits de la personne et des libertés fondamentales.

C'est pourquoi il est temps que nous, les peuples représentés au sein de cette assemblée, amorcions une nouvelle réflexion sur notre influence, et que nous fassions entendre notre voix.

De nouveaux jalons ont été posés. La semaine dernière, le secrétaire général a déposé un rapport sur la protection des civils touchés par les conflits armés. Il y décrit bon nombre des enjeux actuels et présente 40 recommandations auxquelles il convient de donner suite.

Le fardeau le plus lourd échoit toutefois au Conseil de sécurité. La recherche de la paix dans le monde touche de plus en plus à la sécurité des personnes, d'autant que les conflits modernes font un nombre démesuré de victimes parmi les civils.

Dans le monde où nous vivons, il importe avant tout que la protection des personnes soit l'une des préoccupations centrales du Conseil. Elle doit servir non seulement de principe à notre action commune dans l'avenir, mais aussi de moteur à nos efforts pour prévenir les conflits, maintenir la paix, appliquer les sanctions et répondre à la volonté collective des Nations Unies.

La poursuite de nos efforts ne va pas sans heurts, toutefois.

Il est légitime de s'interroger sur les objectifs, les limites et les critères de la participation du Conseil à une action humanitaire, qui soulève également des problèmes délicats au regard du principe de la non-ingérence. Nous devons disposer de critères précis et cohérents pour soupeser la nécessité de mener ou non une action humanitaire, y compris une action coercitive, et pour agir en conséquence. Ils doivent être extrêmement stricts et s'appliquer à des violations sérieuses du droit humanitaire international et des droits de la personne.

En raison de la dimension humaine de ces problèmes, le Conseil n'a d'autres choix que de transformer l'argument massue que sont les sanctions en mesure bien ciblée, qui porte un coup à ceux-là mêmes qu'elle vise. Le Conseil doit en outre se montrer résolu à les mettre en œuvre après leur adoption. C'est ainsi que, en sa qualité de président du Comité des sanctions contre l'Angola, le Canada s'emploie à élaborer des mesures plus coercitives pour limiter le trafic des armes et des diamants, et de faire en sorte que l'UNITA ait encore plus de difficulté à faire la guerre. Il est temps, en outre, de s'attaquer à la nouvelle économie de guerre, dans laquelle certaines entreprises, des mercenaires et des seigneurs de la guerre entretiennent des rapports directs, perpétuant la misère et les conflits, et continuant de faire des victimes parmi les civils.

L'établissement d'une stratégie pour la sécurité humaine fait ressortir la nécessité de nous attaquer sans tarder, et clairement, au problème de la représentativité du Conseil et de son processus de prise de décision -- notamment l'utilisation injustifiée du droit de veto, ou la menace constante de l'invoquer -- lorsque cela peut compromettre, compliquer ou ralentir une action internationale ferme et urgente visant à protéger les peuples.

Pour demeurer crédible aux yeux des personnes qu'il a pour mandat de servir, le Conseil doit aplanir ces difficultés. Un siège au Conseil est un témoignage de confiance, et les membres du Conseil doivent s'en montrer dignes.

Les problèmes soulevés par le secrétaire général dans son rapport sur la protection des civils touchés par les conflits armés concernent tous nos peuples. Les solutions qu'il propose dépassent le cadre du Conseil de sécurité, et il incombe à tous les États membres d'agir.

À ce titre, j'engage vivement l'Assemblée générale à prendre connaissance de ce rapport et à mettre rapidement en place les mécanismes qui permettront d'y donner suite, y compris un système pour rendre compte de l'avancement de sa mise en œuvre. Dans cette optique, le Canada se réjouit d'avance à l'idée de collaborer avec le secrétaire général Annan et les autres membres à la création d'un groupe d'« Amis des civils touchés par les conflits armés » qui aidera à guider ces efforts.

Dans ses efforts pour protéger les civils touchés par les conflits armés, l'Assemblée a la capacité d'amener les Nations Unies à agir plus rapidement, l'autorité morale pour établir des critères universels en vertu desquels nous devons tous répondre de nos actes, et la légitimité voulue pour concentrer ses efforts sur de nouveaux domaines de l'action internationale.

Il importe d'avoir la capacité de répondre rapidement lorsque la sécurité des civils est menacée. Le fait de donner aux Nations Unies la capacité d'agir rapidement, en particulier par la création d'un état-major onusien à déploiement rapide, constituerait un pas important dans cette direction. Combien il aurait été possible d'accroître l'efficacité des Nations Unies au Timor oriental et au Kosovo si un tel mécanisme avait existé!

Le volet civil des opérations de paix -- policiers, juges, fonctionnaires, experts des droits de la personne -- gagne également en importance. Cependant, la capacité d'un déploiement rapide pose également problème. Nul doute que la présence de casques blancs soit tout aussi indispensable que celle de casques bleus : nous devons y accorder la même attention. Dans la mesure du possible, nous pourrions commencer par améliorer notre capacité nationale respective à apporter une contribution aux Nations Unies, initiative qu'a entreprise mon gouvernement et qu'il s'applique à améliorer.

Dans l'ensemble, l'adoption de normes ayant force exécutoire en matière de droit humanitaire et de droits de la personne, et de mécanismes concrets pour les mettre en œuvre, permettrait également de mieux assurer la sécurité des citoyens victimes des horreurs perpétrées pendant les conflits armés.

Sur ce point, l'adoption du statut de la Cour criminelle internationale marque un progrès indéniable. Elle contribuera à mettre fin à la culture de l'impunité et à protéger toutes les populations contre les violations les plus graves du droit humanitaire.

L'objectif prioritaire de l'Assemblée consiste maintenant à donner forme à la Cour. Pour cela, nous devons tous collaborer à l'élaboration des fondements techniques de cette instance. Cela suppose en outre la ratification rapide et sur une grande échelle de son statut.

Partout, il convient d'adopter des normes et des stratégies plus fermes. À titre d'exemple, la négociation d'un protocole facultatif le plus strict possible sur la participation des enfants aux conflits armés, qui sera assorti à la Convention relative aux droits de l'enfant et accompagné d'un plan d'action de grande portée, aidera à résoudre l'un des aspects les plus odieux des conflits modernes.

En accord avec le secrétaire général, nous estimons également qu'il convient de mieux protéger les travailleurs d'organismes humanitaires qui mettent leur vie en danger pour aider les victimes de conflits. C'est pourquoi le Canada demandera l'adoption d'un protocole additionnel à la Convention sur la sécurité du personnel des Nations Unies et du personnel associé. Ce document fournira la protection juridique voulue à tous les employés qui travaillent dans des régions touchées par des conflits, y compris aux membres des ONG et aux employés recrutés sur place.

Enfin, sur l'initiative de l'Assemblée, il est possible de faire en sorte que la sécurité des personnes soit au cœur des préoccupations dans un plus grand nombre d'actions internationales.

Par ailleurs, le risque d'un anéantissement nucléaire et les autres armes de destruction massive constituent sans contredit la plus grave menace pour la sécurité humaine. En effet, le régime de non-prolifération à l'élaboration duquel nous avons consacré tant d'efforts au cours des 50 dernières années demeure fragile. Nous devons maintenant faire porter nos efforts sur le respect des obligations contractées aux termes du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), la mise en œuvre efficace du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICE), et la diminution des risques que ces systèmes d'arme font peser sur notre sécurité collective.

L'accent sur le coût humain donne également l'impulsion aux efforts pour s'attaquer aux autres types d'armes, y compris le défi posé par les armes légères pouvant être utilisées à des fins militaires. Que ce soit dans les zones de conflit ou dans les rues d'un quartier, il y a lieu de s'alarmer du coût en perte de vies humaines que représentent ces armes.

De plus, en raison de l'ampleur de la menace qu'elles constituent, nous nous devons d'agir à l'échelle mondiale. Un projet de conférence sur le trafic illicite des armes légères a d'ailleurs été déposé à l'Assemblée. Nous devrions nous entendre pour convoquer cette conférence, et donner une grande portée à son ordre du jour.

La criminalité transnationale, y compris le trafic illicite des drogues, le terrorisme et le trafic des personnes, est étroitement associée à ces questions. Elle influe directement sur la sécurité de nos populations. Dans ce contexte, la conclusion d'une convention des Nations Unies sur le crime transnational organisé et l'adoption des protocoles pertinents serait un bon début.

En amenant l'Assemblée à répondre aux besoins des citoyens d'aujourd'hui, la conjugaison de ces efforts permettrait de prendre un très bon départ. Le respect de la sécurité humaine est en effet le préalable nécessaire à la réussite d'autres mesures importantes que nous prenons pour favoriser le développement humain et économique, l'exécution des programmes d'aide ainsi que la promotion du commerce.

Les agriculteurs ne peuvent travailler la terre dans des champs minés. Les enfants ne peuvent apprendre lorsqu'ils subissent des sévices en temps de guerre. Les investisseurs n'engageront pas de capitaux dans des régions troublées par des conflits. Des sociétés stables ne peuvent s'épanouir lorsque l'on pille les ressources pour attiser la violence et que l'on soumet les populations à un régime de terreur. En fin de compte, le fait d'être libéré de la peur est intimement lié à celui d'être affranchi du besoin.

En raison de la nécessité d'affranchir toutes nos populations de la peur, objectif au cœur même du rapport du secrétaire général et des recommandations qu'il renferme, les Nations Unies sont investies d'un rôle de premier plan en cette fin de siècle.

Grâce aux efforts collectifs déployés à cette fin, nous pourrons concrétiser les aspirations de la génération qui, la première, a proclamé « nous, peuples des Nations Unies » pour jeter les bases de cette organisation. L'Assemblée générale et le Sommet qui se tiendront l'année prochaine, à l'occasion du nouveau millénaire, nous donnent l'occasion de formuler une conception des Nations Unies qui place la sécurité des personnes en tête des priorités onusiennes.

Cependant, les Nations Unies ne peuvent s'acquitter seules de cette tâche. La promotion de la sécurité humaine s'accompagne de défis complexes. À cet égard, les organisations régionales jouent un rôle important. La coopération pratique entre les pays peut servir à résoudre certains problèmes précis. De plus, la participation de la société civile et des organisations non gouvernementales est indispensable.

Si nous tous, autant que nous sommes, voulons aspirer à la paix et à la sécurité, il faut avant tout pouvoir faire fond sur des Nations Unies fortes et efficaces, qui s'attachent à atteindre cet objectif. Nous, peuples des Nations Unies, devons être résolus à conjuguer nos efforts pour y parvenir.


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Dernière mise à jour : 2006-10-30 Haut de la page
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