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M. PETTIGREW - ALLOCUTION À LA RÉUNION CONJOINTE DU CANADIAN CLUB DE TORONTO, DE L'INSTITUT CANADIEN DES AFFAIRES INTERNATIONALES ETDU TORONTO BOARD OF TRADE - TORONTO (ONTARIO)

99/59 SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS

NOTES POUR UNE ALLOCUTION

DE

L'HONORABLE PIERRE S. PETTIGREW,

MINISTRE DU COMMERCE INTERNATIONAL,

À LA RÉUNION CONJOINTE DU

CANADIAN CLUB DE TORONTO,

DE L'INSTITUT CANADIEN DES AFFAIRES INTERNATIONALES ET

DU TORONTO BOARD OF TRADE

TORONTO (Ontario)

Le 26 novembre 1999

(15 h 10 HNE)

Je suis très honoré d'avoir été invité au Canadian Club, une des institutions les plus anciennes et les plus respectées du pays.

Je vous félicite d'ouvrir régulièrement vos portes à des orateurs de toutes les tendances, parce que vous communiquez ainsi à vos membres toutes sortes d'idées et d'opinions différentes, dont certaines vous agréent, j'en suis sûr, alors que d'autres ne vous plaisent peut-être pas!

Je ne sais trop où je me situe là-dedans, mais je poursuis de toute façon!

J'ai intitulé mes remarques « Confiance, cohérence et "canadianisme" à l'Organisation mondiale du commerce à Seattle » parce que je crois que les mots « confiance, cohérence et canadianisme », mes trois mots préférés qui commencent par « C », traduisent bien notre approche de ces importantes assises.

Comme vous le savez peut-être, un comité de la Chambre des communes a étudié cette question durant plusieurs mois et a présenté un long rapport au Parlement. J'ai eu le privilège de déposer la réponse du gouvernement à ce rapport au début du mois.

Depuis quelques jours, je saisis toutes les occasions de parler de notre réponse. Les gens me disent que je leur fais l'effet d'un disque rayé! Qu'il me suffise de citer un grand homme d'État britannique, Winston Churchill, qui a dit un jour que « lorsqu'on en a vraiment par-dessus la tête de toujours répéter un message important, on doit se dire qu'il reste encore 1 p. 100 de la population qui ne l'a pas entendu! »

La confiance

J'aimerais d'abord vous dire pourquoi nous abordons ces négociations avec confiance.

Nous sommes un pays commerçant. L'année dernière, nous avons exporté 43 p. 100 de notre PIB, alors que ce pourcentage était de 30 p. 100 à peine en 1993, au premier mandat du premier ministre Jean Chrétien. Il est aussi plus élevé que dans tout autre pays du G8.

À titre de comparaison, les Américains exportent environ 11,5 p. 100 de leur PIB et les Japonais, à peu près 15 p. 100. Le Canada exporte donc, toutes proportions gardées, quatre fois plus que les États-Unis et trois fois plus que le Japon!

Et cette augmentation des échanges a créé des emplois pour les Canadiens. En fait, l'immense majorité des plus de 1,9 million de nouveaux emplois créés chez nous depuis 1993 l'ont été grâce à la croissance de nos exportations.

Il n'y a pas de doute que l'exposition à la concurrence internationale a tonifié notre économie, stimulé l'innovation et créé des centaines de milliers d'emplois pour les Canadiens.

Elle a prouvé que nous pouvons affronter -- et battre -- avec succès la concurrence sur les marchés internationaux.

Alors qui a le plus intérêt à créer un système commercial international plus prévisible? Nous, bien entendu!

Et qui a le plus d'expérience lorsqu'il s'agit de trouver pour cela des compromis et de conclure des accords entre pays de taille moyenne et d'optique commune? C'est encore nous, les Canadiens!

C'est pourquoi nous nous dirigeons vers ce prochain cycle de négociations de l'OMC avec confiance -- la confiance d'un pays tourné vers l'extérieur et qui n'a pas peur de considérer le monde entier comme son marché.

Il est très important de nous rappeler que tout ce que nous avons accompli, nous l'avons fait grâce à la sécurité offerte par un système basé sur des règles. Notre but à Seattle, c'est de trouver des moyens d'améliorer ce système, qui est fondamental.

Le commerce, le développement et la croissance

Mais si quelqu'un a besoin d'une leçon sur l'utilité du commerce international pour fournir un meilleur système social à la population d'un pays, il lui suffit de considérer les pays qui se sont exclus du marché mondial et des disciplines du GATT et de l'OMC.

Les États qui ont succédé à l'ancienne Union soviétique, par exemple, et beaucoup de pays du Sud ont payé un lourd tribut des points de vue du développement, de la croissance et de la productivité.

En revanche, les pays qui se sont ouverts au commerce en Asie, en Europe et ici en Amérique du Nord jouissent des niveaux de vie les plus élevés du monde.

La Chine

Et c'est une chose que reconnaît la nouvelle classe politique en Chine. C'est pourquoi la Chine cherche à adhérer à l'OMC. Comme vous le savez, j'ai eu le plaisir et le privilège aujourd'hui de signer un accord bilatéral avec le ministre Shi sur l'accession de la Chine à l'OMC -- un accord semblable à celui que la Chine a signé tout récemment avec les États-Unis.

C'est un bon accord, tant pour le Canada que pour la Chine.

Pour nous, cela veut dire des réductions des droits de douane sur nos exportations vers la Chine, et de nouvelles occasions d'affaires pour nos sociétés de services financiers, nos entreprises de télécommunications et nos autres fournisseurs de services.

Nos échanges bilatéraux avec la Chine se sont chiffrés en 1998 à plus de 10 milliards de dollars! La Chine est notre quatrième partenaire commercial en importance. Nous accusons actuellement un déficit commercial avec ce pays, c'est-à-dire que nous importons de Chine plus que nous exportons chez elle.

Cet accord nous procure toutefois un accès beaucoup plus large aux marchés chinois, et nos entreprises sont prêtes à en profiter. Quelque 400 entreprises canadiennes ont déjà des bureaux en Chine, et je suis sûr que leur nombre augmentera fortement à la faveur de cet accord.

Pour la Chine, c'est une autre étape vers son adhésion à l'OMC. Cette dernière sera à l'avantage de tout le monde parce qu'elle assujettira le commerce avec la Chine -- pays comptant plus de 1 milliard d'habitants et représentant le plus grand marché en puissance du monde -- aux principes de l'OMC, à savoir l'équité, la non-discrimination, la cohérence et la transparence, qu'elle nous donnera accès à un système objectif de règlement des différends, et qu'elle aidera à promouvoir la primauté du droit. Elle aidera aussi la Chine à poursuivre ses importantes réformes économiques.

C'est là un jalon très important de l'évolution du commerce international, et nous sommes tous impatients de voir la Chine devenir membre à part entière de l'OMC.

La cohérence

Passons maintenant au deuxième mot qui commence par « C » : la cohérence.

Un autre des grands défis que nous prévoyons pour nos réunions de Seattle, c'est la nécessité d'instaurer une plus grande cohérence entre les diverses organisations et institutions internationales.

Actuellement, nous voyons un grand nombre de groupements qui s'inquiètent du fait que la mondialisation apporte leurs préoccupations dans l'arène commerciale. Qu'ils se préoccupent de normes du travail, de questions environnementales ou de droits de la personne, ils concentrent depuis quelque temps leur attention sur le processus commercial en général et sur l'OMC en particulier.

D'un certain point de vue, c'est compréhensible. De toutes les institutions nées au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, c'est le GATT, prédécesseur de l'OMC, qui a le mieux fonctionné et qui a donné le plus de résultats. De fait, il a établi des règles claires et équitables et des mécanismes puissants pour les faire respecter.

Nous voyons donc que tous ces autres mouvements -- tous légitimes et importants -- portent leur attention sur l'OMC.

Notre défi, c'est de coopérer de façon plus cohérente avec des organisations comme la CNUCED [Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement], l'OIT [Organisation internationale du Travail], le FMI [Fonds monétaire international], la Banque mondiale et un jour peut-être avec l'UNESCO [Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture] pour que toutes ces préoccupations trouvent un écho dans nos politiques. Nous devrons veiller à travailler tous vers un but commun et non pas à nous nuire les uns les autres.

Par exemple, il ne rime absolument à rien que le FMI dise à un pays en développement : « Relevez vos droits de douane, parce que vous avez besoin d'augmenter vos recettes, sinon ni nous ni la Banque mondiale ne financerons plus de projets chez vous », alors que de son côté, l'OMC engage ce même pays à réduire ses droits de douane et à ouvrir son économie aux échanges commerciaux -- ce qu'il présente comme un moyen de développement! Ces conseils contradictoires ne profitent à personne!

L'OMC a le devoir -- c'est d'ailleurs aussi son intérêt -- de coopérer avec les autres organisations internationales pour les aider à réaliser leur programme, qu'il s'agisse de normes du travail, d'environnement ou de droits de la personne.

C'est un sujet que je veux aborder au cours des pourparlers de l'OMC à Seattle, et je crois que cette approche cohérente est essentielle pour surmonter la résistance que nous commençons à sentir dans certains milieux.

Le programme du Canada pour Seattle

Pour Seattle et le cycle de négociations qui débutera sous peu, l'objectif principal du Canada est d'obtenir un plus large accès pour ses produits et ses services, tout en contribuant à la rédaction d'accords qui protégeront nos intérêts sociaux vitaux.

Il y a longtemps que nous participons activement et efficacement aux négociations commerciales. Nous étions au nombre des membres fondateurs de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, il y a plus de 50 ans, et nous participons depuis à toutes les grandes discussions internationales sur le commerce.

Nous avons toujours insisté sur l'importance d'un système commercial international transparent, basé sur des règles. En tant qu'économie de taille moyenne, ce système nous profite parce qu'il assure à nos entreprises un environnement commercial plus prévisible et qu'il donne à une économie relativement modeste comme la nôtre de puissants moyens d'action contre les économies plus grandes et plus fortes.

Un système commercial plus libre et basé sur des règles claires aide à créer des emplois pour les Canadiens. Il ouvre à nos entreprises de plus grands marchés pour leurs produits et leur permet de tirer avantage des économies d'échelle. Il nous donne accès à meilleur prix à des facteurs de production comme les technologies de pointe, et nous apporte des biens de consommation moins coûteux. Il accroît en outre la concurrence et nous rend plus productifs.

Et, ce qui est peut-être le plus important, il encourage les entreprises -- et bien sûr tous les Canadiens -- à regarder davantage vers l'extérieur et à mieux s'adapter aux défis que pose un monde de plus en plus intégré et interdépendant.

Bien entendu, nous avons aussi plusieurs objectifs précis à Seattle.

L'agriculture

Par exemple, en agriculture, nous réclamons l'élimination, dans les plus brefs délais, de toutes les subventions à l'exportation et une réduction substantielle des aides intérieures qui faussent les échanges. Nous nous attacherons à uniformiser les règles du jeu internationales en formulant et en mettant en oeuvre des règles claires et exécutoires en ce qui concerne le commerce des produits agricoles, y compris des produits à valeur ajoutée -- des règles s'appliquant de façon égale à tous les pays. Nous continuerons aussi de défendre le droit du Canada à maintenir des systèmes de commercialisation ordonnée, comme la gestion de l'offre et la Commission canadienne du blé.

L'accès aux marchés des produits non agricoles

Nous voulons aussi obtenir des engagements à négocier des réductions de droits de douane et de barrières non tarifaires sur les marchandises non agricoles comme le poisson, les métaux, le vin et le bois et dans des secteurs de pointe comme les télécommunications. Plus précisément, nous préconisons l'inclusion des produits forestiers dans toute négociation sur les tarifs douaniers. Nous voulons aussi obtenir, pendant les négociations, un accord de statu quo interdisant les nouvelles mesures commerciales et le renforcement de mesures commerciales existantes relatives à tous ces produits.

Les services

Dans le domaine des services, nous voulons élargir l'accès aux marchés étrangers pour nos entreprises et améliorer les règles qui régissent le commerce des services. Étant le 12e exportateur mondial de services, le Canada a beaucoup à gagner de la libéralisation et de l'expansion de ces marchés internationaux. Permettez-moi d'affirmer clairement, cependant, que notre gouvernement n'ouvrira pas notre système de santé public à la concurrence internationale. Notre système de santé fait l'envie du monde entier, et nous n'allons pas le négocier. Aux termes de l'Accord général sur le commerce des services, aucun service n'est sur la table tant qu'un pays ne l'y a pas mis. Nous n'allons pas mettre nos systèmes publics de santé et d'éducation sur la table. Nous avons l'intention de tenir le cap sur nos objectifs définis clairement et de longue date en protégeant la liberté d'action du Canada dans les secteurs clés, à savoir la santé, l'éducation et la culture.

La culture

Plus précisément, nous sommes en faveur de la création d'un nouveau protocole international sur la diversité culturelle. Cela énoncerait des règles claires qui permettraient au Canada et à d'autres pays de définir et de maintenir des politiques de promotion de leur culture, tout en respectant les règles qui régissent le système commercial international. Nous voulons que l'importance de la diversité culturelle soit reconnue dans la Déclaration de Seattle, mais nous sommes prêts à ce stade-ci à examiner où se fera la négociation du nouvel instrument international.

L'investissement

Nous savons que l'investissement est bon pour nous. Il nous aide à créer des emplois, à promouvoir l'innovation et à augmenter les exportations. Des règles plus prévisibles encourageraient l'investissement au Canada et protégeraient nos propres investissements à l'étranger.

Par ailleurs, nous allons défendre notre droit de réglementer et de promouvoir les valeurs canadiennes fondamentales dans des secteurs stratégiques comme la santé, l'éducation, la culture et la protection de l'environnement.

L'environnement

En ce qui concerne les questions internationales relatives à l'environnement, nous envisageons de clarifier les relations entre les règles de l'OMC et les mesures commerciales inscrites dans les accords multilatéraux sur l'environnement. Nous voulons aussi que le Comité du commerce et de l'environnement de l'OMC demeure le point de coordination pour l'intégration des considérations environnementales dans les négociations, et ce, afin de s'assurer que les questions environnementales seront prises en considération par chaque groupe de négociation.

La biotechnologie

Concernant la biotechnologie, nous voulons la formation d'un groupe de travail chargé d'examiner l'à-propos et l'efficacité des règles existantes ainsi que la capacité des membres de l'OMC à les mettre en oeuvre.

Le commerce électronique

Au sujet du commerce électronique, nous allons défendre le statu quo sur les droits de douane. Nous réclamerons également un examen au prochain cycle ministériel ainsi qu'une étude plus poussée de la question entre-temps. Nous essaierons aussi de faire avancer le dossier en obtenant que les règles actuelles concernant le commerce des services et la propriété intellectuelle s'appliquent également au commerce électronique.

Le travail

Pour ce qui est des normes du travail, nous allons continuer à promouvoir la cohérence des politiques économiques, financières et sociales sur la scène internationale, y compris le renforcement du mandat de l'Organisation internationale du Travail afin qu'elle se penche sur les dimensions sociales de la mondialisation.

La facilitation des échanges

Nous allons en outre plaider en faveur de nouvelles règles de facilitation des échanges afin que les pays modernisent leurs systèmes frontaliers pour qu'ils soient plus transparents et que les marchandises et les services puissent franchir plus rapidement les frontières.

Les marchés publics

Nous appuyons l'examen de l'Accord sur les marchés publics et nous voulons qu'il soit achevé d'ici la fin de l'année. Notre but est d'obtenir un meilleur accès pour les fournisseurs canadiens, grâce à l'élimination des programmes d'accès préférentiel. De même, nous sommes en faveur de la conclusion d'un accord sur la transparence des marchés publics, à condition qu'il tienne compte de nos points de vue, surtout en ce qui concerne la portée.

Les subventions et les recours commerciaux

Nous voulons inclure les subventions et les recours commerciaux dans les négociations, afin d'éliminer les subventions qui empêchent nos entreprises d'affronter leurs concurrents sur un pied d'égalité. Nous voulons en même temps continuer de protéger les subventions qui ne faussent pas le marché pour des fins politiques légitimes comme la R-D, le développement régional et la protection de l'environnement contre des atteintes. Nous avons aussi comme but d'améliorer les règles concernant les recours commerciaux, comme les droits antidumping et les droits compensateurs, afin d'éliminer le mauvais usage qui en est fait.

La concurrence

Nous préconisons aussi un accord-cadre portant obligation pour les pays membres d'adopter de bonnes lois sur la concurrence et prévoyant, pour le règlement des différends, de nouvelles options qui respectent la compétence des autorités en matière de concurrence nationale.

Voilà quelques-unes des principales positions que nous allons défendre à Seattle.

Le « canadianisme »

Alors, que voulais-je dire par « canadianisme » à propos de ces négociations?

Simplement ceci. Chaque pays se présentera à la table avec ses propres priorités et ses propres valeurs.

Je crois pour ma part que nos valeurs, façonnées par notre histoire et notre géographie, sont uniques et très différentes de celles d'autres pays. Ces valeurs nous confèrent des avantages, en cette nouvelle ère de mondialisation, dont sont privés d'autres pays.

La mondialisation

Bien entendu, « mondialisation » est devenu le mot à la mode des années 1990, et il le restera peut-être au cours du prochain millénaire.

C'est un mot très fort, qui sème la terreur chez certains, et qui réjouit certains autres. Pour d'autres encore, ce n'est qu'une source de confusion.

Pour ma part, il ne m'inspire ni affection, ni crainte, ni confusion!

C'est une réalité pure et simple. Une réalité qu'il nous faut comprendre et apprécier beaucoup mieux.

La grande bataille entre libéralisme et capitalisme d'une part, et socialisme et communisme d'autre part, est terminée. Le libéralisme et le capitalisme ont gagné.

Et ce qu'ils ont gagné, c'est une grande liberté de pénétrer sur les marchés mondiaux et d'en sortir. Les capitaux n'ont jamais été aussi mobiles; ils vont là où ils rapportent le plus. Ce fait n'est pas nouveau. Ce qui est nouveau, c'est que les frontières sont devenues plus perméables, et que multinationales et transnationales entrent dans un pays étranger et en ressortent presque aussi facilement qu'elles se déplacent dans leur propre pays.

La mondialisation n'est pas quelque chose que les gouvernements peuvent arrêter.

Mais les gouvernements doivent maintenant oeuvrer sur deux plans. En premier lieu, ils doivent faire leur possible pour inciter les organismes internationaux à mettre sur pied un système commercial équitable et fondé sur des règles, parce que c'est dans l'intérêt de tous -- et c'est justement ce dont il s'agit à Seattle.

En second lieu, ils doivent se réinventer eux-mêmes pour relever les nouveaux défis que posent la mondialisation et l'ouverture des marchés.

Les limites des marchés

Parce que les marchés, quelque libres et ouverts qu'ils soient, ont leurs limites. Ils ne s'occupent que d'avantages financiers et de profits, et ils peuvent parfois se tromper. Ils ne considèrent pas l'individu, l'environnement, l'avenir ou les façons dont différents pays cherchent à préserver leur patrimoine culturel. Ils sont insensibles aux intérêts à long terme des pays, des provinces, des États, des villes ou des peuples.

C'est là le rôle des gouvernements -- et, comme je le signalais tout à l'heure, c'est un rôle de plus en plus difficile à jouer, car les marchés sont devenus beaucoup plus puissants et les frontières se sont ouvertes d'autant.

Humaniser la mondialisation

Comme je l'ai affirmé à maintes reprises, il faut trouver des moyens d'humaniser la mondialisation, de faire en sorte que les gens puissent continuer à participer au développement économique et social de nos pays. Faute de quoi notre programme commercial perdra tôt ou tard le soutien et la confiance des Canadiens.

Une des raisons pour lesquelles je crois que le Canada est mieux placé que les autres pays pour gérer la nouvelle diversité et la nouvelle ouverture de l'économie mondiale, c'est qu'il est un pays fondé sur la diversité.

Nous avons évolué différemment des autres pays. Au XIXe siècle, lorsque les États-nations prenaient forme, ils ont tous suivi plus ou moins le même modèle. En France, en Grande-Bretagne, en Allemagne ou en Italie, le groupe dominant au sein de la société a assimilé les minorités. La culture dominante est devenue la seule culture. La langue dominante est devenue la seule langue.

Au Canada, nous avons refusé le modèle traditionnel de l'État-nation. Nous sommes devenus un pays fondé sur l'accommodement. D'abord accommodement avec les citoyens francophones, puis avec tous les immigrants qui ont suivi.

Nous avons créé une citoyenneté qui est d'ordre politique et non ethnique ou religieux.

Et cette citoyenneté porte en elle les valeurs de respect, de tolérance et d'ouverture au pluralisme.

C'est là une différence importante qui nous distingue des États-Unis, pays basé sur l'approche « melting pot », qui a imposé une façon homogène d'aborder la citoyenneté.

Je crois que nous, Canadiens, savons nous adapter plus facilement que d'autres à la mondialisation, car qui dit mondialisation dit pluralisme et diversité.

Nous avons montré au monde que les gens peuvent vivre ensemble, égaux mais différents. Nous n'avons pas besoin d'être tous pareils. Nous pouvons apprécier les cultures, les façons de vivre et d'être des autres sans nous sentir menacés.

Le fait d'être un pays nordique nous a aussi enseigné que la coopération est essentielle à notre survie. C'est une chose que nous avons apprise des premiers Canadiens, les Autochtones. Nous ne pourrions survivre longtemps à nos hivers sans compter sur l'aide des autres. Les distances sont trop grandes, le froid est trop rigoureux et les vivres sont parfois bien rares. Comme dit le poète, aucun homme n'est une île : c'est une leçon que notre géographie et notre climat nous ont fort bien apprise.

L'exclusion

C'est pourquoi nous sommes profondément inquiets de l'un des grands effets de la mondialisation, qui est la tendance à l'exclusion -- le fait que des individus et même des pays tout entiers puissent rester sur la touche alors que le reste du monde progresse.

Et l'exclusion est bien pire que l'exploitation, parce si vous êtes exploités, vous pouvez vous joindre à vos camarades de travail pour négocier en force l'amélioration de vos conditions et de vos salaires. Mais si vous êtes exclus, vous n'avez rien pour négocier.

On n'a simplement plus besoin de vos services. La société vous oublie.

D'une éthique de justice à une éthique de compassion

Pour moi, humaniser la mondialisation veut dire aller plus loin qu'une éthique de justice préoccupée des droits, qui sont certes primordiaux. Néanmoins, une éthique de justice ne tient pas compte de l'exclusion. C'est pourquoi je crois qu'il nous faut la dépasser, pour adopter une éthique de compassion.

Et, encore une fois, ce n'est pas quelque chose que les gouvernements peuvent ou même devraient faire seuls. Il faut que les secteurs privé et bénévole ainsi que tous les autres groupes de notre société soient déterminés à combattre l'exclusion. Cela veut dire trouver de meilleures façons de coopérer pour s'assurer que tous profitent des retombées que nous attendons de l'accroissement des échanges. Et cela veut aussi dire que les gouvernements doivent céder une partie de leur autonomie à d'autres et leur laisser le champ libre pour faire une partie de ce travail.

La troisième voie

Les dirigeants du monde entier parlent d'élaborer une troisième façon d'aborder la façon de gouverner. Une façon d'unir les énergies des secteurs privé et bénévole et des gouvernements pour aborder les questions sociales en particulier, sous un angle nouveau. En terme simples, cela veut dire un plus grand partage des responsabilités du développement social. Cela veut aussi dire que les décisions ne sont plus toutes laissées aux seuls gouvernements.

La troisième voie est une politique d'un nouveau genre. Une approche beaucoup plus coopérative, qui consiste à partager les charges, mais aussi les bénéfices.

Je crois que nous avons déjà fait beaucoup de chemin dans cette direction au Canada, en raison de notre histoire et de la manière dont nous avons grandi ensemble comme pays. En fait, je crois que nous pouvons être un modèle à suivre.

Conclusion

Je viens de vous esquisser les objectifs et les idées que nous voulons aborder à Seattle. À commencer par nos objectifs précis dans les secteurs clés, mais aussi notre confiance, notre plaidoyer en faveur d'une plus grande cohérence entre les organisations internationales et, ce qui est peut-être le plus important, nos valeurs canadiennes. Le nouveau cycle demandera au moins plusieurs années, mais les avantages qu'en retireront notre économie et notre société en valent certainement la peine. Je veux que les Canadiens soient en mesure de faire des affaires n'importe où dans le monde avec confiance, et ce, grâce à l'existence d'un système fort et basé sur des règles qui met tous les concurrents sur un même pied d'égalité. Dans 20 ans, je veux voir le Canada tirer un pourcentage encore plus fort de son PIB du commerce extérieur. Mais il faut que la croissance se fasse sentir dans le monde entier. Que nos exportateurs livrent leurs produits dans toutes les parties du monde.

Quant aux valeurs canadiennes -- notre « canadianisme », c'est-à-dire notre héritage démocratique, notre ouverture, notre respect des autres, notre tolérance, notre volonté de partage -- voilà des denrées dont le monde a certainement besoin en plus grande abondance!

Merci.


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Dernière mise à jour : 2006-10-30 Haut de la page
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