M. AXWORTHY - ALLOCUTION À L'OCCASION DE LA CONFÉRENCE SURLA PROTECTION DES ENFANTSDANS LES CONFLITS ARMÉS,À L'UNIVERSITÉ COLUMBIA - NEW YORK, NEW YORK
99/9 SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS
NOTES POUR UNE ALLOCUTION
DE
L'HONORABLE LLOYD AXWORTHY,
MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
À L'OCCASION DE LA CONFÉRENCE SUR
LA PROTECTION DES ENFANTS
DANS LES CONFLITS ARMÉS,
À L'UNIVERSITÉ COLUMBIA
NEW YORK, New York
Le 12 février 1999
(17 h 30 HNE)
J'arrive tout juste du Conseil de sécurité des Nations Unies qui, à la demande du Canada, avait convoqué
aujourd'hui une réunion sur la protection des civils dans les conflits armés. Nous sommes résolus à faire en
sorte que la dimension humaine de la paix et de la sécurité figure en tête des priorités du Conseil, et que la
sécurité humaine soit un des principaux moteurs de son action.
Le Canada est particulièrement attentif à la situation des enfants dans le monde, notamment dans les conflits
armés. Il s'agit en outre d'une question qui me tient à coeur personnellement. À ce titre, je suis fier d'avoir
participé, il y a dix ans, à l'élaboration de la Convention relative aux droits de l'enfant. Dans les années qui ont
suivi, la concrétisation des idéaux énoncés dans ce document a été un de mes grands objectifs.
Cela me rappelle aussi que, comme me l'ont raconté les Anciens de la nation d'Opaskwayak, pour les Indiens
cris, un enfant est un don ou un prêt du Grand Esprit. Nous sommes chargés de l'élever et d'en prendre soin.
De plus, comme il s'agit d'un don du Grand Esprit, tout enfant est sacré et nous devons le traiter avec respect et
dignité.
Malheureusement, au sein de la grande communauté mondiale que nous formons, nous sommes bien loin de
nous acquitter de ce devoir. Cela est d'autant plus vrai dans les conflits armés. Les civils sont maintenant, dans
une proportion écrasante, les principales victimes et les principales cibles des conflits. C'est là une des tristes
réalités de la guerre en cette fin de siècle. En effet, le nombre de victimes des conflits armés a presque doublé
depuis les années 1980 et se situe maintenant autour de 1 million par année, dont 80 p. 100 de civils. Du reste,
comme vous ne le savez que trop bien, ces conflits font un nombre effarant, et tout à fait inacceptable, de
victimes parmi les enfants du monde entier. Ma visite en Afrique, le mois dernier, n'a fait que corroborer avec
une impitoyable clarté ce triste constat.
Cette conférence ne pouvait tomber à un meilleur moment. Nous devons tous accorder un grande importance à
cette question. En tant qu'intervenants en prise directe avec la réalité, votre perspective est indispensable à
l'établissement de la voie à suivre. Aujourd'hui, j'aimerais situer la position du Canada sur cette question,
notamment dans le contexte de notre stratégie en matière de sécurité humaine. Je vous ferai part de notre point
de vue sur la gravité des difficultés à surmonter, et je décrirai les volets de la stratégie du Canada visant à
protéger et à améliorer le sort des enfants touchés par la guerre.
La sécurité humaine
Au cours de la dernière décennie, le contexte mondial s'est transformé, les réalités de la guerre froide laissant
la place à des voies nouvelles, inexplorées, vers l'avenir. Notre notion de la sécurité mondiale, à savoir la façon
dont nous la définissons, l'obtenons et la maintenons, a changé considérablement. Malgré le tourbillon des
événements qui se sont succédés ces dix dernières années, certaines certitudes se sont fait jour, qui nous
permettent de faire le point.
D'abord et avant tout, comme je viens de le faire remarquer, force est de constater que les populations civiles
sont les principales victimes et les principales cibles des conflits violents. Cela est dû en partie à la nouvelle
physionomie de la guerre. La majorité des conflits se livrent maintenant à l'intérieur des États, et non plus entre
eux. Dans les États en déroute, nous voyons apparaître des seigneurs de la guerre et des justiciers des temps
modernes, aidés par des marchands d'armes et d'autres intéressés pour qui les conflits constituent un marché
lucratif. Ces individus exploitent, brutalisent et terrorisent les civils. Il en résulte des tragédies humaines aux
proportions dévastatrices, qu'il s'agisse de l'exploitation des civils, des mouvements massifs de réfugiés et des
violations les plus graves du droit humanitaire, y compris le génocide.
La nature des menaces qui pèsent sur la sécurité mondiale évolue. Elles ont souvent un caractère multiforme et
transnational. Les problèmes que posent les drogues illicites, le terrorisme, la dégradation de l'environnement,
les violations des droits humains et la prolifération des armements ne respectent aucune frontière, et recoupent
de nombreuses disciplines. Il n'est pas possible de les résoudre unilatéralement. Ils ont toutefois un effet direct
sur notre vie quotidienne.
En raison de la mondialisation, nos destinés sont liées inéluctablement. Nul ne peut nier que nos vies sont
désormais plus interdépendantes que jamais. Nous vivons à l'heure de la toile Internet, c'est-à-dire dans un
monde où les problèmes lointains, isolés de notre vie quotidienne, sont une chose du passé. Et alors que la
mondialisation ouvre des possibilités, elle comporte également un inconvénient. Elle peut nous exposer, tous
autant que nous sommes, à l'insécurité économique et sociale.
Le dénominateur commun de ces nouvelles réalités est leur dimension humaine. Notre monde en mutation
place de plus en plus l'individu, ou plus précisément la sécurité de l'individu, au centre des affaires mondiales.
En conséquence, la sûreté et le bien-être de l'individu, la sécurité humaine, sont devenus la nouvelle mesure de
la sécurité planétaire.
La promotion d'objectifs humanitaires -- protection contre les exactions, réduction des risques physiques,
amélioration de la qualité de vie, et création des outils nécessaires à l'atteinte de ces objectifs -- imprime,
comme il se doit, un nouvel élan à une action concertée de la communauté internationale.
C'est dans ce contexte que le Canada a remodelé et réorienté ses priorités en matière de politique étrangère.
Nous nous occupons de plus en plus de questions qui concernent directement l'individu. Cette approche
centrée sur la sécurité humaine se concrétise de trois façons :
Premièrement, par des mesures pour orienter l'attention de la communauté internationale sur des problèmes
qui menacent directement la sécurité des individus, et pour l'amener à intervenir. Qu'il suffise de citer la
campagne pour interdire les mines antipersonnel, ou la lutte contre l'abus et la prolifération des armes légères
et des armes militaires de petit calibre.
Deuxièmement, par des activités bien circonscrites, y compris la consolidation de la paix par l'intermédiaire de
l'Initiative canadienne de consolidation de la paix; la promotion des normes humanitaires, qui a motivé notre
appui à la création de la Cour criminelle internationale; la réforme des institutions internationales et régionales,
tel le Conseil de sécurité des Nations Unies pour y intégrer les problèmes de sécurité humaine.
Troisièmement, par la recherche de partenariats innovateurs avec des pays d'optique commune et la société
civile, et l'utilisation de nouvelles techniques -- par exemple, l'application des principes du pouvoir discret,
contrebalancée par la volonté d'intervenir fermement quand, comme au Kosovo, cela permet d'atteindre des
objectifs humanitaires.
La protection des enfants touchés par les conflits armés
Le mieux-être des enfants du monde entier occupe une place privilégiée dans la stratégie de la sécurité
humaine du Canada. Dans le nouveau contexte mondial, ce sont les individus les plus vulnérables, mais surtout
les enfants, qui ont le plus à craindre pour leur sécurité. Ce sont eux qui subissent les conséquences les plus
graves et, de ce fait, requièrent une attention soutenue.
Cela est d'autant plus vrai dans les conflits armés. À cet égard, le bilan de la dernière décennie s'avère
particulièrement sombre : les conflits ont tué près de 2 millions d'enfants, ont fait plus de 4 millions d'enfants
handicapés et plus de 1 million d'orphelins; l'armée ou les groupes rebelles ont recruté plus de 300 000 garçons
et filles, utilisés comme combattants, cuisiniers, porteurs, messagers, espions, travailleurs et esclaves sexuels;
plus de 10 millions d'enfants souffrent de traumatismes psychiques par suite d'enlèvements, de séquestrations
et d'agressions sexuelles, ou parce qu'ils ont assisté au meurtre cruel de membres de leur famille.
Le rapport de Mme Graça Machel, sur les conséquences des conflits armés pour les enfants, a ouvert de
nouveaux horizons. Il a attiré l'attention de la communauté internationale sur le sort désespéré de ces derniers,
et a eu l'effet d'un cri de ralliement en faveur d'une action internationale. Mettant à profit les outils de sa
stratégie de sécurité humaine, le Canada est actif dans plusieurs domaines :
Mieux faire connaître cette question et accroître la volonté politique d'agir
L'action commence en effet par la sensibilisation. La nomination de M. Olara Otunnu au poste de représentant
spécial du secrétaire général des Nations Unies pour la protection des enfants dans les conflits armés est un
pas important dans la bonne direction. M. Otunnu a permis de faire beaucoup de progrès en dirigeant l'attention
de la communauté internationale sur la situation des enfants victimes de conflits armés, notamment en
mobilisant celle-ci pour protéger leurs droits et assurer leur mieux-être.
En maintenant cette question en tête des priorités, et en servant de catalyseur à l'action de la communauté
internationale, les efforts du représentant spécial jouent un rôle primordial. Il convient d'appuyer et de renforcer
les activités de celui-ci en faveur des enfants. Pour cela, son bureau a besoin de ressources et d'un appui
politique. Par conséquent, je suis heureux d'annoncer que le Canada versera une contribution de 400 000 $ au
fonds en fiducie créé pour appuyer ce bureau.
Nous constatons que, grâce à une meilleure compréhension, l'ensemble du système des Nations Unies tient
compte des problèmes qui concernent spécifiquement les enfants victimes de la guerre, et met en oeuvre des
programmes concrets à leur intention. Ce sont là de bonnes nouvelles. Les préparatifs commenceront bientôt
en vue de la Session extraordinaire des Nations Unies sur les enfants, qui se tiendra en 2001. Tout au long de
ce processus, et ailleurs aux Nations Unies, le Canada continuera de consolider le progrès accompli à ce jour,
et à en tirer parti.
Il convient en outre de compléter les efforts de la communauté internationale par des efforts au niveau régional
et bilatéral, et par une meilleure sensibilisation de nos citoyens. Le Canada est membre d'un certain nombre
d'organisations régionales. Nous voyons à ce que ces forums se penchent sur le sort des enfants dans les
conflits armés. Par exemple, les enfants dans les régions qui relèvent de la compétence de l'OEA [Organisation
des États américains] et de l'OSCE [Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe] ont souffert des
conflits armés. Or, nous tentons de déterminer la meilleure façon de mobiliser ces organisations pour aider ces
enfants. Leur protection est aussi une des principales considérations qui ont amené le Canada et la Norvège à
conclure, avec un certain nombre de pays d'optique commune, un partenariat pour s'attaquer aux problèmes de
sécurité humaine.
Comme l'a clairement montré la campagne d'interdiction des mines antipersonnel, la contribution de la société
civile est tout aussi essentielle. Un solide partenariat entre les gouvernements et la société civile peut s'avérer
des plus utiles. Au Canada, la société civile joue un rôle crucial et très actif dans le dossier des enfants touchés
par la guerre. L'automne dernier, nous avons mis sur pied un Comité des enfants touchés par la guerre, formé
de représentants du gouvernement et d'ONG [organisations non gouvernementales], et placé sous la
présidence de la sénatrice Landon Pearson. En partageant notre expérience et nos ressources, nous posons
les jalons d'une stratégie commune pour l'avenir.
Renforcer les normes internationales
Avant d'agir, les personnes comme les gouvernements doivent être sensibilisés à un problème. Cependant,
pour que nos efforts soient fructueux, nous devons aussi tous rendre compte de nos actes. C'est pourquoi le
Canada s'emploie, d'une part, à améliorer les instruments juridiques internationaux et, d'autre part, à garantir le
respect des normes humanitaires existantes qui protègent les droits de l'enfant.
Le recrutement d'enfants-soldats est une des pratiques les plus tristement célèbres en période de conflit. Il
s'agit d'un acte barbare défiant tout critère de moralité. Les combats qui se sont déroulés récemment en Sierra
Leone en ont fourni une preuve éloquente. Depuis longtemps, nombre d'entre nous cherchons à rendre illégale
cette terrible pratique. C'est ainsi que le Canada appuie énergiquement les efforts déployés à Genève pour
assortir la Convention relative aux droits de l'enfant d'un protocole facultatif, qui augmentera l'âge du
recrutement et de la participation à un conflit.
Pour appuyer cet objectif, et toujours avec la collaboration de la société civile, le gouvernement du Canada a
été le premier à fournir des ressources à la Coalition d'ONG pour mettre un terme à l'utilisation des enfants-soldats. La coalition, qui mène des activités région par région, s'emploie à mieux faire connaître le problème
des enfants-soldats. Elle tente en outre de faire adopter les normes juridiques les plus strictes au cours des
négociations sur le protocole facultatif.
La plupart d'entre nous peuvent également prendre des mesures additionnelles dans leur pays. Au Canada,
nous examinons actuellement la législation existante en ce qui concerne le recrutement des moins de 18 ans
dans nos forces armées. Dernièrement, nous avons codifié les dispositions qui interdisent d'envoyer au front
quiconque est âgé de moins de 18 ans. De nombreux pays s'interrogent déjà sur la façon d'aligner leurs lois sur
ce que, nous prévoyons, sera la teneur du protocole facultatif. Pour cette raison, le Canada et la Norvège
invitent un petit nombre de gouvernements à un atelier sur cette question, qui se tiendra à Ottawa dans le
courant de l'année. Cette rencontre permettra un échange de vues sur les difficultés communes que nous
devrons surmonter pour modifier nos lois respectives. Nous pourrons également examiner ensemble nos
projets de modification.
Il est important que la communauté juridique internationale s'élève contre l'exploitation des enfants dans les
conflits armés. Nous devons en outre redoubler nos efforts pour garantir le respect des normes humanitaires
existantes en période de conflit. Il existe déjà des normes juridiques acceptées internationalement qui portent
sur un certain nombre de pratiques, y compris le fait de prendre les enfants pour cibles, l'enlèvement et
l'exploitation sexuelle des enfants, l'accès à l'aide humanitaire, le respect des zones humanitaires et la levée de
l'impunité. À cet égard, il convient d'encourager activement les pays à ratifier les accords internationaux
pertinents, puis à y adhérer.
Intégrer la protection des enfants aux opérations de maintien et de consolidation de la paix
Comme les conflits touchent de plus en plus de civils, il est urgent de se pencher sur leurs intérêts et leur
protection dans les opérations de paix. Aujourd'hui, à la demande du Canada, le Conseil de sécurité des
Nations Unies s'est penché sur la protection des civils dans les conflits armés. Cette démarche doit amener le
Conseil à examiner plus attentivement, et plus activement, cette question au cours de ses délibérations, et à en
tenir compte de manière plus systématique dans ses décisions.
En fait, en s'occupant mieux de la situation des civils dans les conflits, le Conseil s'occupera de celle des
enfants. Cependant, j'ai insisté sur l'importance de nous attaquer aux problèmes particuliers qui touchent les
enfants. Une foule de facteurs militent en faveur de cette approche.
Dans leur travail, les casques bleus sont de plus en plus aux prises avec le problème des enfants-soldats. Le
Canada étudie les moyens de faire face à cette nouvelle réalité. La formation des militaires avant leur
déploiement pourrait comprendre des cours sur les droits des enfants et sur la façon de s'occuper des enfants
touchés par la guerre pendant les opérations de soutien de la paix. Le personnel militaire pourrait travailler en
collaboration avec les ONG afin d'aider ces enfants. À cet égard, je me réjouis d'annoncer que le Canada, avec
le concours de la Norvège, s'emploie à mettre sur pied un module de formation destiné à sensibiliser les
casques bleus à cette question. Il doit, notamment, fournir les connaissances qui leur permettront de s'occuper
des enfants dans les zones de conflit.
De plus, le Canada appuie fermement l'affectation de spécialistes de la protection de l'enfance aux opérations
de maintien de la paix des Nations Unies. À l'heure où les opérations de paix présentent des aspects de plus en
plus nombreux, et où un plus grand nombre de civils y participent (police civile, travailleurs humanitaires,
observateurs chargés de surveiller les droits de la personne), l'apport de ces spécialistes peut revêtir une
grande importance pour ces enfants. À cette fin, j'aimerais annoncer que le Canada est également en train
d'étudier des moyens de renforcer la capacité des institutions internationales, régionales et locales afin
d'assurer que les droits des enfants sont pris en considération à chaque étape du conflit. Il pourrait s'agir de
mettre sur pied des équipes de réaction rapide qui se porteraient à la défense des enfants dans les zones de
conflit ou d'inclure les droits des enfants dans les accords de paix suivant les conflits. De telles équipes
pourraient aider à veiller à ce que les droits des enfants soient respectés au cours des premières étapes de
l'application des accords de paix, par exemple lors du désarmement, de la démobilisation et de la réinsertion
sociale des enfants-soldats. Nous sommes en train de mettre au point ce concept et nous consulterons d'autres
intéressés sur la façon la plus efficace et la plus appropriée de le concrétiser.
Encourager l'élaboration de programmes d'aide humanitaire et de développement à l'intention des enfants
touchés par la guerre
Dans les régions où se déroule ou couve un conflit, l'aide au développement peut favoriser la consolidation de
la paix. Dans les situations d'urgence, l'aide humanitaire aide à soulager la souffrance immédiate. Par ailleurs,
lorsqu'une société se relève d'un conflit, les programmes de développement contribuent à la reconstruction de
communautés stables et justes. En tout état de cause, la façon de mettre à contribution nos ressources
consacrées au développement et à l'aide humanitaire, comme leur destination, doit tenir compte des besoins
particuliers des enfants, voire les refléter.
En élaborant des programmes humanitaires multilatéraux et bilatéraux, l'Agence canadienne de développement
international affecte d'importantes ressources à une multitude d'activités qui répondent spécifiquement aux
besoins des enfants touchés par la guerre. Des programmes pour aider les enfants-soldats en Angola, au
Libéria, au Rwanda, en Sierra Leone et en Ouganda ont été mis sur pied, ou sont en cours d'élaboration. De
plus, dans les sociétés déchirées par la guerre, que ce soit le Rwanda ou la Bosnie, l'aide au développement
vise directement à aider les enfants à se remettre des traumatismes causés par la guerre, notamment grâce au
soutien psychologique, à la démobilisation, à la réinsertion, à l'éducation et aux soins de santé.
Dans ces situations, les petits gestes peuvent aussi s'avérer édifiants. Par l'entremise du Programme de stages
internationaux pour les jeunes, nous avons envoyé des stagiaires en Bosnie avec l'institut international pour les
enfants afin de travailler avec les enfants touchés par la guerre. Grâce à l'Initiative de consolidation de la paix et
à la collaboration avec la société civile, nous avons apporté une contribution relativement modeste, mais des
plus utiles, selon moi, à des petits projets locaux. Par exemple, en Algérie, toujours de concert avec la Norvège,
nous avons aidé les professionnels de la santé et les travailleurs sociaux à aider les enfants affectés par les
horreurs perpétrées dans ce pays. En juillet, nous avons lancé le Fonds d'initiatives culturelles pour les enfants
en situation de guerre. Il vise à mieux faire connaître le sort des enfants dans les conflits armés au moyen
d'activités culturelles organisées au niveau international. Un de ces projets -- « Mapping Our World » -- met à
profit l'art thérapie pour aider les enfants à surmonter le traumatisme causé par leur expérience. Les images
qu'ils créent servent ensuite à sensibiliser le public à leur situation.
La coordination de l'aide, en particulier dans les zones déchirées par la guerre, contribuerait grandement à
optimiser l'utilisation de ces ressources.
Pendant des conflits, de nombreux protagonistes peuvent être appelés à répondre aux besoins des enfants : le
rôle de M. Otunnu consiste à se porter directement à la défense des enfants. Des organismes tels que le Haut
Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, l'UNICEF et le Comité international de la Croix-Rouge jouent
un rôle crucial pour que l'aide humanitaire se rende jusqu'aux enfants. Pour leur part, les casques bleus
peuvent être chargés de surveiller et de signaler les mauvais traitements infligés aux enfants, ou le recrutement
de ces derniers par les parties à un conflit. On leur demande également de mettre en place des structures pour
désarmer et démobiliser les enfants-soldats. Après un conflit, la réadaptation et la réinsertion de ces enfants
sont essentielles à la consolidation de la paix et à la démocratisation.
Dans ces cas, il est possible que des activités différentes, ou qui se chevauchent, se déroulent en même
temps. Sans qu'il soit besoin de créer de nouvelles structures, nous croyons que le bureau du représentant
spécial se trouve dans une situation unique, lui permettant de fournir une vue d'ensemble de ces activités, et
des conseils sur la façon de mieux coordonner les ressources.
Promouvoir des partenariats avec la société civile
La création de coalitions entre l'État et la société civile fait partie des méthodes novatrices mises en oeuvre
dans le nouveau contexte mondial. Tous les moyens d'action du Canada pour aider les enfants affectés par la
guerre font appel à la coopération et à la consultation actives de la société civile. Cet aspect du dossier est
crucial, car les ONG font la majeure partie du travail, en particulier sur le terrain. Sur ce point, je citerai le
dialogue que notre gouvernement a amorcé avec les ONG l'année dernière. De plus, j'ai l'intime conviction que
nous pouvons étendre et renforcer ce partenariat. Le Canada et la Norvège conjugueront leurs efforts avec
ceux des ONG afin de coordonner les programmes des gouvernements et des ONG, et éventuellement
d'organiser une conférence internationale à cet égard.
Conclusion
La promotion de la sécurité des enfants est indissociable de la promotion de la sécurité humaine. La protection
des enfants contre les traumatismes causés par les conflits armés est inextricablement liée à notre objectif de
portée plus générale, qui consiste à édifier des sociétés pacifiques et stables. Il est impossible de bâtir un
monde sûr sans penser, comme il se doit, à ceux qui en hériteront. J'ai décrit, dans leurs grandes lignes, les
différents volets de la stratégie canadienne. En conjuguant la défense des droits des enfants et l'action, et
grâce à une solide collaboration avec la société civile, nous avons l'intention, et la capacité, de nous acquitter
de ce devoir sacré décrit avec tant d'éloquence par les Anciens de la nation crie d'Opaskwayak.