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M. AXWORTHY - ALLOCUTION AUX DEUXIÈMES CONSULTATIONS ANNUELLES AVEC LES ONG SUR LA CONSOLIDATION DE LA PAIX - OTTAWA (ONTARIO)

98/10 SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS

NOTES POUR UNE ALLOCUTION

DE

L'HONORABLE LLOYD AXWORTHY,

MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,

AUX DEUXIÈMES CONSULTATIONS

ANNUELLES AVEC LES ONG SUR

LA CONSOLIDATION DE LA PAIX

OTTAWA (Ontario)

Le 18 février 1998

Ce document se trouve également au site Internet du Ministère :

http://www.dfait-maeci.gc.ca

Je suis enchanté de pouvoir vous adresser la parole ce matin au début des deuxièmes consultations annuelles sur la consolidation de la paix que mon Ministère a convoquées en collaboration avec le Comité coordonnateur canadien pour la consolidation de la paix [CCCCP].

La tenue de ces consultations était l'un des engagements que j'ai pris lorsque j'ai annoncé l'Initiative canadienne de consolidation de la paix à l'Université York, le 30 octobre 1996. Elle reflète l'engagement du gouvernement de maintenir un processus d'élaboration de la politique étrangère qui soit ouvert et éclairé par un échange régulier d'idées avec les Canadiens. Elle reflète notre engagement à rendre des comptes aux Canadiens -- à vous dire ce que nous avons fait et ce que nous avons appris dans le processus de mise en oeuvre de la politique étrangère du Canada.

Dans le même esprit d'ouverture et de consultation, nous avons lancé un débat intensif sur la consolidation de la paix aux réunions de 1996 du Forum national sur la politique étrangère. Le dialogue a été poursuivi avec une série de projets de politique entrepris par le Centre canadien pour le développement de la politique étrangère et s'intéressant aussi bien aux jeunes en Afrique du Sud qu'aux effets des armes légères. Et il a évidemment été poursuivi par le biais de ces consultations annuelles.

Ce nouveau forum a prouvé son utilité dans le bref laps de temps qui s'est écoulé depuis l'annonce de l'Initiative de consolidation de la paix. Les premières consultations sur la consolidation de la paix tenues l'an dernier ont rassemblé un large éventail d'organisations non gouvernementales [ONG] et d'institutions oeuvrant, tant au Canada qu'à l'étranger, au développement international, à la paix, au désarmement et à la formation au règlement des conflits. Si j'en juge par l'auditoire de ce matin, nous avons un groupe encore plus impressionnant pour ces deuxièmes consultations. Et puisque nous sommes à l'ère d'Internet, je compte naviguer sur le site Web du CCCCP et sur celui du MAECI [ministère des Affaires étrangères et du Commerce international] pour m'informer des résultats de vos discussions des prochaines semaines.

Lorsque j'ai pris la parole en octobre 1996, il se déroulait un drame international sérieux qui me préoccupait et que chaque personne de mon auditoire avait à l'esprit, à savoir la crise des réfugiés dans l'Est du Zaïre. Le jour même de mon allocution, le gouvernement annonçait que nous avions offert les services de Raymond Chrétien, notre ambassadeur auprès des Nations unies, comme envoyé spécial du secrétaire général dans la région des Grands Lacs.

Aujourd'hui, il se déroule un autre drame international qui retient l'attention des Canadiens et qui nous force à agir pour défendre nos engagements fondamentaux envers la paix et la sécurité internationales. Je parle bien sûr de la situation en Iraq. Nous continuons à espérer un règlement diplomatique de cette crise provoquée par l'intransigeance entêtée de Saddam Hussein. La semaine dernière, j'ai rencontré le secrétaire général à New York pour discuter des possibilités d'une solution diplomatique. La communauté internationale est confrontée à des choix difficiles. Mais nous ne pouvons permettre que les efforts de l'Iraq pour mettre au point des armes de destruction massive viennent miner la stabilité de la région et l'autorité des mécanismes multilatéraux que nous avons établis pour préserver la paix dans le monde.

Une vision évolutive de la consolidation de la paix

La situation en Iraq met en relief la leçon tirée de l'expérience zaïroise, à savoir que nous sommes confrontés à de nouvelles atteintes complexes à la paix et à la sécurité qui exigent de nouvelles approches et une action concertée de la part de la communauté internationale. Si de nouvelles approches de la consolidation interne de la paix avaient été appliquées plus tôt en Iraq, nous ne serions peut-être pas confrontés à la crise actuelle. Chose encore plus importante, nous avons appris que la paix durable ne peut être bâtie qu'avec la coopération et la participation actives des gouvernements, des peuples et des groupes impliqués dans le conflit. C'est dans ce contexte que nous avons lancé l'Initiative canadienne de consolidation de la paix.

L'Initiative canadienne de consolidation de la paix est une mesure que j'ai prise conjointement avec ma collègue Diane Marleau, ministre de la Coopération internationale. L'Initiative est une entreprise conjointe pour la bonne raison que la consolidation de la paix se trouve au carrefour de la sécurité internationale et du développement international : elle pose à la politique étrangère tout comme à la politique d'aide au développement le défi de trouver des moyens de répondre aux besoins de développement des sociétés mises en danger par un conflit violent. La consolidation de la paix exige une attitude différente qui déborde les divisions traditionnelles entre le développement et la sécurité internationale et qui s'attache à favoriser la sécurité humaine.

La consolidation de la paix soulève des questions difficiles pour la conduite traditionnelle de la politique étrangère. Par exemple, comment donnons-nous mandat aux institutions multilatérales de prévenir les conflits intraétatiques tout en respectant la souveraineté des États qui sont membres de ces institutions? En Europe, l'OSCE [Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe] a élaboré de nouvelles approches de ce problème qui pourraient être adaptées à d'autres régions du monde. L'OUA [Organisation de l'unité africaine] a fait la même chose en Afrique.

La consolidation de la paix soulève aussi des questions difficiles pour la conduite traditionnelle de l'aide au développement. Par exemple, comment pouvons-nous utiliser les outils de développement pour bâtir ou rebâtir les structures de sécurité des États déchirés par un conflit? Le Canada a acquis, à cet égard, une expérience valable de la reconstitution d'une force de police nationale en Haïti. Pendant l'année qui vient, le Comité d'aide au développement de l'OCDE [Organisation de coopération et de développement économiques] pilotera un dialogue entre les donateurs sur les épineuses questions de la réforme du secteur de la sécurité dans le contexte du développement.

Le Canada n'est pas le seul pays donateur aux prises avec ces questions. Mais, grâce à l'Initiative de consolidation de la paix, il est maintenant internationalement reconnu comme un leader dans la conception d'approches créatrices tenant compte à la fois de la sécurité et du développement. Dans son récent examen paritaire du programme d'aide du Canada, l'OCDE félicitait le Canada pour son attachement à formuler des réponses cohérentes aux défis mondiaux actuels et futurs, pour le haut niveau de coopération interministérielle qui caractérise la formulation de ses politiques, et pour les mesures prises par l'ACDI [Agence canadienne de développement international] et le MAECI en vue de créer une nouvelle structure de réaction rapide aux situations de conflit et d'urgence dans les pays en développement en tirant profit de l'expertise des ONG.

Pour rendre le compliment, j'aimerais attirer votre attention sur une réalisation historique de l'OCDE dans le domaine de la consolidation de la paix, à savoir la publication des Lignes directrices de l'OCDE sur les conflits, la paix et la coopération pour le développement. Ces lignes directrices, publiées en mai dernier, sont la bible de la consolidation de la paix avant, pendant et après les conflits. Le Canada, par le biais de l'ACDI, a apporté une importante contribution à leur préparation. J'encourage les ONG canadiennes à les lire, à les critiquer et à les utiliser pour la conception de leurs propres programmes de consolidation de la paix. Vous trouverez un lien vers les Lignes directrices à partir du site Web du MAECI sur la consolidation de la paix.

Qu'avons-nous accompli?

En élaborant l'Initiative de consolidation de la paix, nous nous sommes appuyés sur l'expérience considérable du Canada dans des secteurs tels que le développement démocratique, les droits de la personne et la saine conduite des affaires publiques. Ces consultations s'inscrivent elles-mêmes dans un processus consultatif plus large, qui comprend les consultations annuelles des ONG tenues par l'ACDI et les tables rondes organisées par le Centre canadien pour le développement de la politique étrangère. Depuis le lancement de l'Initiative en octobre 1996, le MAECI, l'ACDI et la société civile canadienne ont redoublé d'efforts pour mettre en place les structures.

Parmi les activités marquantes, on peut citer :

la définition d'un cadre stratégique pour l'Initiative de consolidation de la paix;

l'établissement de ce forum consultatif;

l'appui au Comité coordonnateur canadien pour la consolidation de la paix qui a permis de vous rassembler aujourd'hui;

la mise en oeuvre de CANADEM, la liste d'experts canadiens en matière de droits de la personne et de démocratie;

la création de deux nouveaux mécanismes de financement : le Fonds de consolidation de la paix, géré par l'ACDI, pour les projets dans les pays en développement et le Programme de consolidation de la paix, géré par le MAECI, pour les projets qui ne répondent pas aux priorités de l'ACDI.

Certes, les structures sont excellentes, mais qu'avons-nous vraiment accompli depuis octobre 1996 pour relever les véritables défis mondiaux? Je voudrais faire un tour d'horizon très sélectif sur la manière dont nous avons utilisé ces nouvelles structures pour répondre aux quatre priorités géographiques fixées cette année pour le Fonds de consolidation de la paix.

Au Guatemala, les accords de paix ont été signés en décembre 1996. Pour notre premier projet dans le cadre du Fonds de consolidation de la paix, nous avons apporté une contribution financière à la Commission de clarification historique, la « commission de la vérité » du Guatemala, qui aidera à dresser un bilan historique, neutre et objectif des causes et des conséquences humaines de la guerre civile qui a duré 36 ans dans ce pays, particulièrement en ce qui concerne les violations des droits de la personne. Le Canada a été le premier pays qui a contribué aux frais de lancement de la Commission, encourageant ainsi la contribution d'autres pays. Depuis lors, nous avons tenu une consultation orientée avec les ONG canadiennes qui ont établi une liste courte des priorités de consolidation de la paix pour le Guatemala. Sur cette base, nous étudions des moyens d'utiliser le Fonds de consolidation de la paix pour renforcer la capacité de la société civile guatémaltèque à participer efficacement aux divers forums politiques créés dans le cadre du processus de paix.

Au Cambodge, le processus de démocratisation a été retardé en juillet dernier par le conflit, bref mais violent, qui a éclaté entre les forces loyales aux premier et second premiers ministres. Pour évaluer les possibilités de poursuivre l'aide canadienne pour le développement démocratique au Cambodge, nous avons utilisé le Fonds de consolidation de la paix pour envoyer dans ce pays, en août dernier, une mission coordonnée par le Centre parlementaire. Ses membres, à leur retour, se sont déclarés très en faveur de la poursuite de la stratégie d'engagement au Cambodge et, depuis lors, l'ACDI a fourni une aide financière supplémentaire aux travaux de la Commission électorale. Nous étudierons aussi les possibilités d'utiliser le fonds de consolidation de la paix pour renforcer la capacité des ONG cambodgiennes à éduquer les électeurs et à observer leur propre processus électoral.

Dans les Grand Lacs d'Afrique, on a assisté à de grands bouleversements, dont le plus important a été la chute de Mobutu et l'installation d'un nouveau gouvernement dans le pays qui s'appelle maintenant la République démocratique du Congo. Grâce au Fonds de consolidation de la paix, nous avons appuyé les efforts de M. Mohammed Sahnoun, qui a succédé à l'ambassadeur Chrétien dans les fonctions de représentant spécial pour les Grands Lacs du Secrétaire général, en vue de négocier une résolution pacifique des multiples conflits entre les gouvernements de cette région. Nous avons aussi utilisé le Fonds pour soutenir un projet innovateur, géré par l'ONG africaine « Synergie Africa », qui s'efforce de mobiliser les groupes de la société civile, au Congo oriental et au Rwanda voisin, pour trouver des solutions locales à ces conflits.

En Bosnie, l'Accord de Dayton a été maintenu en place grâce à l'appui considérable de la communauté internationale, coordonné par le haut représentant, M. Carl Westendorp, et par le Conseil de mise en oeuvre de la paix. Les changements politiques les plus spectaculaires de l'année dernière sont survenus au sein de l'entité serbe de Bosnie, la Republika Srpska, où se sont affrontées la faction dure de Pale et la faction de Banja Luka, plus modérée et favorable à l'Accord de Dayton. Heureusement, c'est la faction la plus modérée qui a pris récemment le dessus. Nous avons utilisé le Fonds de consolidation de la paix pour répondre à deux appels spéciaux lancés par le haut représentant en vue d'appuyer une nouvelle voix plus modérée dans cette région. Premièrement, nous avons financé une campagne d'information de l'opinion publique dans l'entité serbe pour combattre la propagande haineuse contre le tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie et, plus récemment, nous avons apporté une aide financière immédiate au nouveau gouvernement modéré de Banja Luka.

Nous avons aussi appuyé des initiatives multilatérales qui auront en définitive une incidence sur un grand nombre de pays. Par exemple, le Fonds de consolidation de la paix a soutenu la participation des délégués des pays les moins développés dans les réunions préparatoires qui ont conduit à l'établissement, en 1998, de la Cour criminelle internationale [CCI], parrainée par l'ONU. La CCI sera compétente pour juger des crimes contre l'humanité et ainsi mettre fin à l'impunité.

Ce ne sont que des exemples des initiatives que nous avons appuyées par l'intermédiaire du Fonds de consolidation de la paix et celles-ci ne constituent qu'une petite partie de l'aide apportée par le Canada à la consolidation de la paix, par des voix bilatérales et multilatérales, dans chacun de ces pays. Ces exemples montrent cependant ce que l'on peut accomplir, grâce à un mécanisme d'intervention rapide comme ce Fonds, pour répondre aux nouvelles demandes et pour saisir les possibilités qui se présentent.

Qu'avons-nous appris?

Quatre leçons particulières se dégagent, selon moi, des 16 premiers mois de l'Initiative canadienne de consolidation de la paix.

Premièrement, que la consolidation de la paix dépend de la volonté et de la capacité des populations locales d'y participer. Nous ne devons pas présumer que les spécialistes de l'extérieur, des pays développés, ont réponse à tout, ni qu'il leur suffit d'exporter l'infrastructure de la paix dans les pays en développement.

Deuxièmement, nous devons travailler davantage à la prévention des conflits. Il ne suffit pas de concentrer toutes nos énergies sur la reconstruction après les conflits. La reconstruction de sociétés détruites par la guerre, comme la Bosnie et le Cambodge, représente une tâche énorme. Il faut trouver une façon plus économique de consolider la paix, qui ne se borne pas à relever les sociétés détruites. Il s'agit du principal message de la Carnegie Commission on Preventing Deadly Conflict, qui présentait son rapport final hier dans cet auditorium. J'ai d'ailleurs l'intention d'aborder cette question avec les ministres des Affaires étrangères du P-8 avant le Sommet de Birmingham qui se tiendra cette année.

Les dirigeants africains, et leurs partenaires étrangers, ont tiré la même conclusion des nombreux conflits qui ont sévi sur leur continent au cours des dernières années. L'Afrique fait déjà beaucoup pour se doter de ses propres institutions pour la prévention des conflits. L'OUA a créé une section qui se consacre à cette question, tout comme l'IGAD [Autorité intergouvernementale sur le développement], dans la Corne de l'Afrique. La CEDEAO [Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest] en fera autant. Il s'agit d'institutions nouvelles, qui ont toutes besoin d'un soutien accru. Cependant, elles illustrent toutes, de façon encourageante, la volonté des pays africains de coopérer à l'établissement d'une paix durable dans leur région.

Troisièmement, pour coordonner la consolidation de la paix, nous devons collaborer dans le cadre de structures multilatérales. Les démarches des acteurs externes, comme le Canada, auront très peu d'effet sur la paix à moins qu'elles ne soient coordonnées avec celles des acteurs locaux, des autres pays donateurs et des États voisins des pays en conflit. Comme chacun sait, les Nations unies constituent la cheville ouvrière du système de sécurité dans le monde. Cependant, une crise financière continue de nuire à sa capacité de remplir ce rôle. C'est pourquoi nous appuyons la création de mécanismes onusiens polyvalents, comme le Fonds d'affectation spéciale pour la prévention, du Fonds de consolidation de la paix.

Les représentants résidents du PNUD [Programme des Nations unies pour le développement] ont un rôle essentiel à jouer dans la coordination des activités de consolidation de la paix sur le terrain, dans les pays en développement. C'est également au sein des Nations unies qu'il convient de mettre sur pied des opérations de maintien de la paix d'une durée limitée et des activités de consolidation de la paix à long terme. Le Canada se félicite que le train de réformes entrepris l'année dernière par le secrétaire général renforce la capacité du Secrétariat dans ce domaine.

Lors d'une crise qui évolue rapidement, les structures multilatérales existantes fournissent souvent le moyen d'action le plus rapide et le plus efficace. En effet, lorsque ces structures existent déjà, comme le Bureau du haut représentant en Bosnie, ou la MINUGUA [Mission des Nations unies au Guatemala] au Guatemala, nous pouvons réagir rapidement aux derniers développements. Pour cette raison, nombre de projets initiaux du Fonds de consolidation de la paix se sont concrétisés au moyen d'un fonds d'affectation spéciale. En l'absence de structures multilatérales, ou si ces structures ne permettent pas de réagir assez rapidement, la coordination des efforts internationaux de consolidation de la paix revient souvent à un État en particulier. Ainsi, le Canada a pu prendre la mesure de ce fardeau en s'offrant pour diriger la force multilatérale dans l'Est du Zaïre. Il n'existait alors aucun mécanisme permanent au sein des Nations unies pour répondre à une telle crise.

De plus en plus, les organisations régionales se taillent un rôle dans la prévention des conflits. Je fais allusion non seulement aux organismes africains cités précédemment, mais aussi à l'OSCE, à l'OEA [Organisation des États américains], au Commonwealth et à la Francophonie. Une tendance récente consiste à créer des « coalitions de pays volontaires » pour consolider la paix, comme celle dont s'est servi le Canada pour promouvoir avec succès le traité d'interdiction des mines. Le Canada vient en outre de se joindre à une nouvelle organisation internationale fondée sur ce principe, l'IDEA [Institut international pour la démocratie et la supervision des élections]. Les membres de cet organisme forment un mélange innovateur de pays développés ou en développement, tous résolus à appuyer le passage à la démocratie.

Finalement, il faut beaucoup plus de temps pour mobiliser et déployer les compétences canadiennes en matière de consolidation de la paix. Il convient donc d'investir dans la création de capacités nationales dans ce domaine. Le Centre canadien international Lester B. Pearson pour la formation en maintien de la paix, qui forme des civils et des militaires, illustre ce genre d'investissement. Le répertoire de spécialistes canadiens des droits de la personne et de la démocratie, CANADEM, en est un autre exemple. Je citerai, comme troisième exemple, l'enquête menée par une ONG sur les capacités et la formation en consolidation de la paix, dont vous discuterez ce matin. La connaissance des compétences canadiennes, et des personnes qui les possèdent, est un premier pas essentiel si nous voulons renforcer notre capacité de répondre de façon rapide et créative aux occasions qui se présentent.

Quels sont les nouveaux grands éléments?

Enfin, quels sont les nouveaux grands éléments qui entrent en ligne de compte dans la consolidation de la paix? En fait, j'attends de vous que vous me le disiez. Si je me fie à votre programme de la journée, vous allez vous pencher sur au moins quatre d'entre eux. Voici pour ma part quelques réflexions rapides à leur sujet.

En ce qui concerne l'égalité des sexes et la consolidation de la paix, le Canada a longtemps été à l'avant-garde pour ce qui est de tenir compte de l'aspect égalité des sexes dans le domaine de l'aide au développement, et de faire de l'égalité des femmes une question internationale de droits de la personne. Il nous faut examiner tout l'aspect de l'égalité des sexes qui est lié à la consolidation de la paix, c'est-à-dire la façon dont les conflits et le règlement des conflits mobilisent et touchent aussi bien les hommes que les femmes.

Pour ce qui est de la conduite des affaires publiques, il s'agit d'un élément essentiel dont même le FMI [Fonds monétaire international] a désormais pris conscience. Je suis intrigué par le concept d'« écologie du gouvernement » développé par l'Institut sur la gouvernance, selon lequel une saine conduite des affaires publiques, c'est le maintien de l'équilibre entre les institutions publiques, la société civile et le marché. Les Canadiens et les Canadiennes comprennent instinctivement ce concept à mon avis. Il nous a éclairés dans la démarche que nous avons suivie pour financer les projets de consolidation de la paix au Guatemala et au Cambodge par exemple. Il me tarde d'apprendre comment vous allez développer ce concept au cours de vos consultations.

La résolution des conflits au niveau local est un autre aspect crucial de la consolidation de la paix. C'est l'action au niveau local qui mobilise le plus les gens et les forces du milieu local dans les sociétés plongées dans un conflit. L'action au niveau local est celle où la prise de conscience du rôle de l'égalité des sexes dans la consolidation de la paix est la plus susceptible de mener à des solutions inédites. Dans les sociétés en proie à un conflit, la grande difficulté est de trouver des moyens qui permettent de transposer au niveau régional ou national les avantages tirés de la résolution des conflits au niveau local. Le projet du Fonds de consolidation de la paix dans l'Est du Zaïre est tout simplement une tentative en ce sens.

La prolifération des armes légères, enfin, fait peser une grande menace sur la sécurité des gens dans de nombreuses régions du monde. Pour contrer cette menace, il faut contrôler l'entrée des armes illégales dans les sociétés qui vivent un conflit. Il faut également trouver des moyens de rebâtir les communautés, de ramener un sentiment de sécurité publique et de restaurer l'autorité et la légitimité de l'État afin que la demande d'armes diminue dans la population. Tous ces facteurs sont directement liés à la question de la conduite des affaires publiques et à celle du règlement des conflits au niveau local.

Derrière ces quatre grandes questions se profilent beaucoup d'autres domaines qui nécessitent une action, comme la liberté des médias et l'atténuation de l'incidence des conflits sur les enfants, les enfants soldats en particulier. C'est avec intérêt que j'écouterai vos idées sur la façon d'aborder ces questions telles qu'elles se posent sur le terrain, dans les pays où plane l'ombre d'un conflit meurtrier.

Conclusion

La consolidation de la paix, c'est un processus permanent et de portée générale, une façon de penser, et pas simplement un ensemble limité d'activités. Il y aura constamment de nouveaux pays qui accapareront notre attention. Nous devrons faire en sorte de répondre aux nouvelles exigences qu'ils nous imposeront et, en même temps, d'intégrer les nouvelles méthodes efficaces aux activités normales qui touchent à la diplomatie et à l'aide au développement. Les consultations avec les ONG canadiennes sont essentielles si nous voulons que notre travail de consolidation de la paix demeure vigilant, en accord avec les idées qui ont cours à l'extérieur du gouvernement et adapté aux besoins des populations vivant un conflit que nous essayons d'aider. Je compte sur vous pour que le débat soit animé et tourné vers l'avenir.

Merci.


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Dernière mise à jour : 2006-10-30 Haut de la page
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