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2004/13 SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS

NOTES POUR UNE ALLOCUTION

DE

L'HONORABLE BILL GRAHAM,

MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,

AU

WORLD AFFAIRS COUNCIL

SAN FRANCISCO (Californie)

Le 20 février 2004

Je considère comme un grand privilège que d'être invité à prendre la parole devant ce Conseil, qui s'intéresse activement et depuis si longtemps aux affaires mondiales. Bien sûr, j'ai aussi grand plaisir à me retrouver dans cette ville magnifique qui a également pour moi l'immense avantage d'être dépourvue de neige et immunisée contre le froid.

Évidemment, je ne suis pas le seul Canadien à succomber au charme de la région. En effet, environ 350 000 de mes concitoyens vivent autour de la Baie, et plus d'un millier d'entre eux sont de fiers membres du Digital Moose Lounge, qui, m'a-t-on appris, n'est pas un nouveau bar à la mode, mais plutôt une organisation de réseautage social et commercial pour les expatriés canadiens travaillant dans le secteur de la haute technologie. En outre, comme certains d'entre vous le savent peut-être, bon nombre des meilleurs animateurs-graphistes de l'industrie de l'animation dans la Baie sont diplômés du collège Sheridan, près de Toronto, ma ville.

Les artistes canadiens du spectacle connaissent aussi très bien la force d'attraction de la région sur le plan culturel. On me dit que l'extraordinaire Cirque du Soleil compte de nombreux admirateurs dans cette ville, et je n'hésite pas une seconde à vous recommander d'assister au fabuleux spectacle équestre canadien Cavalia, qui au fait donne sa première représentation ce soir.

Votre invitation à prendre la parole ici tombe particulièrement bien, c'est en effet la première fois que j'ai l'occasion de parler à un auditoire américain depuis que le nouveau premier ministre du Canada Paul Martin a pris ses fonctions en décembre. Il y a deux points que j'aimerais aborder aujourd'hui. D'abord, la façon dont les Canadiens perçoivent la nature des relations entre les deux pays, et ce que nous voulons faire au Canada pour resserrer ces relations. Ensuite, question connexe mais dont on parle moins souvent, comment les deux nations peuvent renforcer leur alliance en Amérique du Nord, en travaillant ensemble à la poursuite des objectifs et des intérêts qu'elles partagent sur la scène mondiale.

Je dirais que notre alliance a un caractère particulier, et qu'elle a établi de nouvelles normes pour les relations entre les États. En fait, les liens qui nous unissent se retrouvent dans pratiquement tous les aspects de la vie de nos concitoyens. C'est la géographie qui dicte cette intimité. Dans le cadre du NORAD [Commandement de la défense aérospatiale de l'Amérique du Nord], nos deux pays sont des partenaires dans la défense de l'Amérique du Nord. Nos autorités civiles, nos corps policiers et d'autres instances travaillent main dans la main pour assurer notre sécurité et nous protéger non seulement du terrorisme, mais aussi de la criminalité et des autres menaces contre nos populations. Nous sommes de plus en plus interdépendants dans le domaine de l'énergie. Le gaz naturel et les produits pétroliers traversent la frontière dans les deux sens, tout comme l'électricité. Et comme nous l'a montré la panne d'électricité dans le Nord-Est du continent l'été dernier, cette dépendance mutuelle comporte des risques substantiels qui ne peuvent être évités que si nous parvenons à la gérer ensemble.

Nous avons aussi pour devoir commun de protéger l'air, l'eau et la faune que nous partageons. C'est par millions que nos concitoyens traversent la frontière; les Canadiens et les Américains se marient entre eux, fréquentent les universités de l'un et l'autre pays, passent leurs vacances dans l'un et l'autre pays, jouent dans les mêmes équipes sportives et se divertissent les uns les autres en tant qu'acteurs, musiciens et auteurs. Nous sommes profondément attachés à de multiples valeurs semblables. Et à la différence de nombreux autres pays, le Canada et les États-Unis apprécient et chérissent l'incroyable diversité de leurs sociétés respectives. Ils affectionnent la démocratie, la saine gestion publique et le respect des droits de la personne. Cela signifie naturellement que nous recherchons les mêmes choses pour nos propres sociétés, et que nous partageons la même vision d'un monde où nous pouvons aider les autres à profiter des avantages que procure une société ouverte et démocratique.

L'examen de nos relations économiques montre clairement que nous sommes l'un pour l'autre le plus important partenaire commercial. Plus de 1,4 milliard de dollars de marchandises et de services traversent en effet la frontière canado-américaine chaque jour, et cela fait de nos relations commerciales les plus importantes à avoir jamais existé entre deux pays. Au Canada, nous sommes extrêmement conscients de l'importance que vous représentez pour nous en tant que marché. Cependant, les Américains ignorent souvent que nous sommes leur plus grand marché, ou que leur pays vend pour au-delà de 280 milliards de dollars de marchandises et de services au Canada chaque année. En d'autres termes, nous absorbons le quart de toutes les exportations américaines, soit plus que tout autre pays. En fait, les États-Unis vendent davantage au Canada qu'à l'ensemble de l'Union européenne.

Pour donner une perspective locale à ces chiffres, disons que la Californie est l'un des 39 États américains ayant le Canada comme principal client. En 2002, les ventes californiennes au Canada ont atteint 8,1 milliards de dollars, les produits de haute technologie en tête. Cette même année, la Californie a acheté pour 15,2 milliards de dollars de marchandises du Canada, plus de la moitié de ces importations étant des automobiles.

À tout cela, il faut ajouter les très nombreux investissements transfrontaliers, une réalité qui me frappe chaque fois que je voyage aux États-Unis et que des gens d'affaires américains me parlent des usines qu'ils possèdent dans la région de Toronto ou ailleurs au pays, ou que des Canadiens me mentionnent leurs investissements dans le secteur de la haute technologie ici même autour de la Baie.

La complexité de toutes ces interconnexions économiques, politiques et sociales fait ressortir certains points sur lesquels nous devrions nous attarder si nous voulons améliorer les relations canado-américaines. Le premier ministre Martin a établi comme objectif prioritaire le renforcement du dialogue et de la coopération transfrontalière, dans le but d'élargir et d'approfondir nos liens avec les États-Unis. Laissez-moi vous donner un aperçu de certains des nombreux domaines où nous poursuivons présentement cet objectif.

Pour commencer, les relations entre les dirigeants des deux pays sont plus détendues. À leur première rencontre à Monterrey [Mexique], le premier ministre Martin et le président Bush ont en effet noué un excellent rapport, et exprimé tous deux leur détermination à régler les dossiers bilatéraux qui compliquent actuellement nos relations, par exemple ceux de l'encéphalopathie bovine spongiforme [EBS] ou encore du bois d'œuvre résineux, et à examiner comment nous pouvons mieux collaborer à la solution de problèmes communs.

Au Canada, cette nouvelle ambiance se traduit par la volonté d'instaurer au sein même du gouvernement de nouveaux niveaux de coopération et de coordination pour gérer nos relations avec votre pays. Le premier ministre Martin a confié ce mandat à un nouveau comité du Cabinet. En outre, un nouveau secrétaire parlementaire aux relations canado-américaines procédera à de vastes consultations pour trouver des moyens qui permettront non seulement au gouvernement fédéral, mais aussi aux autorités provinciales et territoriales, de coopérer plus étroitement au regard des dossiers bilatéraux. En agissant ainsi, nous faisons ce qui aurait dû être fait il y a longtemps, c'est-à-dire reconnaître que nos relations avec les États-Unis constituent une priorité impérative à tous les ordres de gouvernement.

Le gouvernement cherche aussi des moyens d'aider les parlementaires canadiens à développer des liens plus étroits avec leurs homologues du Congrès américain, et cela dans le but d'accroître notre rayonnement aussi bien à Washington que dans les districts du Congrès. L'Association parlementaire Canada-États-Unis est l'une des plus fructueuses du monde, et il est certain qu'en resserrant et en approfondissant les liens qu'elle crée entre les législateurs de nos pays, nous susciterons un foisonnement de relations et d'initiatives personnelles qui n'aurait pas été possible autrement.

Notre Initiative de représentation accrue viendra accentuer considérablement notre présence diplomatique et commerciale dans l'ensemble des États-Unis. Des 15 bureaux actuels, nous passerons à 22 consulats et consulats généraux. C'est surtout dans le Sud et le Sud-Ouest du pays que nous ouvrirons ces bureaux, car c'est là qu'une bonne partie du pouvoir économique et politique s'est transportée au cours des dernières décennies. Je suis particulièrement heureux de noter ici que notre consulat de San Francisco deviendra un consulat général l'an prochain, en reconnaissance de l'énorme importance de cette région pour le Canada. La mission triplera plus ou moins de taille, et nous serons en mesure d'y délivrer des visas et des passeports plutôt que d'envoyer les requérants à Los Angeles, comme c'est le cas présentement.

J'ai la conviction que la région de la Baie continuera de croître en importance pour le Canada dans les années à venir. Pour avancer cela, je ne me base pas uniquement sur le dynamisme du commerce et de l'investissement ici. Je prends aussi en compte le fait que le Canada a vécu une renaissance économique ces 10 dernières années, ce qui signifie que notre présence dans votre pays en général va continuer de s'amplifier. Pendant six ans d'affilée, le Canada a affiché un excédent budgétaire, et l'Organisation de coopération et de développement économiques prédit que nous serons le seul pays du G7 à avoir connu un surplus en 2003. Cette performance nous a permis de réduire notre dette de plus de 47 milliards de dollars depuis notre premier budget équilibré de 1997-1998. Notre rapport dette-PIB s'est amélioré davantage que dans tout autre pays du G7, et il ne le cédera qu'à celui de la Grande-Bretagne l'an prochain. Avec un PIB [produit intérieur brut] par habitant qui a crû de 20 p. 100 entre 1996 et 2002, notre saine gestion financière nous a permis de résister aux chocs provoqués l'an dernier par le SRAS [syndrome respiratoire aigu sévère], la crise de l'EBS, une panne d'électricité massive et une série d'immenses feux de forêt.

Enfin, nous avons accueilli avec plaisir cette semaine les résultats de l'étude comparative de KPMG de 2004, Choix concurrentiels, sur les coûts d'exploitation des entreprises car, pour une cinquième année de suite, le Canada se classe au premier rang des pays du G7 où il coûte le moins cher de faire des affaires. Bref, le Canada offre présentement une solide performance économique, et nous comptons bien devenir ces prochaines années un partenaire de plus en plus important pour votre pays et la région de la Baie dans les domaines de l'économie et de l'investissement.

Si la symbiose économique et la prospérité commune sont une caractéristique fondamentale de nos relations, il en va de même de notre interdépendance concernant la sécurité du continent. Charles Foulkes, un général canadien bien connu, a dit un jour, et je le cite : « Le Canada est physiquement joint aux États-Unis comme deux frères siamois le sont. Quand l'un des deux a mal, l'autre souffre également. Il est tout aussi impossible de séparer la défense du Canada de celle des États-Unis que de séparer deux frères siamois et espérer qu'ils vivront. »

Depuis les terribles événements du 11 septembre, le partenariat entre nos deux pays s'est approfondi, car nous répondons ensemble à la menace du terrorisme. Le Canada est le meilleur allié naturel des États-Unis dans cette lutte. Sur le front bilatéral, nos relations de sécurité s'étendent à de nouveaux domaines, par exemple la création d'un groupe de planification binational chargé d'examiner comment coordonner les réponses des deux pays non seulement aux attaques terroristes, mais aussi aux catastrophes naturelles et aux autres menaces transfrontières. Le Plan d'action en 32 points pour une frontière intelligente dont nous avons convenu nous permet d'accélérer le flux des personnes et des marchandises entre nos deux pays tout en respectant les nouveaux impératifs de sécurité. Ce plan est d'ailleurs un modèle qui commence à intéresser de nombreux autres pays.

Comme je l'ai dit plus tôt, le Canada et les États-Unis partagent depuis longtemps la défense du continent dans le cadre du NORAD. C'est d'ailleurs dans le contexte de ce partenariat que nous avons, le mois dernier, procédé à un échange de lettres concernant de prochaines discussions sur la coopération en matière de défense antimissiles. En établissant clairement les paramètres des négociations, ces lettres permettront au Canada d'avoir accès aux informations dont il aura besoin pour décider s'il participera ou non à la défense antimissile de l'Amérique du Nord. Nous nous associerons à ce projet si nous avons la certitude qu'il contribuera à notre sécurité commune -- mais uniquement aussi s'il répond aux importants objectifs du Canada en matière de désarmement mondial, et ne constitue pas un programme menant à la militarisation de l'espace.

J'émets ces réserves car il est, à mon sens, important de reconnaître que les gestes que nous posons ensemble en Amérique du Nord peuvent avoir des incidences sur des questions mondiales auxquelles nous nous intéressons tous deux. En fait, nous devrions même examiner comment notre partenariat en Amérique du Nord pourrait nous permettre de poursuivre des objectifs mondiaux plus larges en dehors du continent.

Il est clair que le Canada et les États-Unis jouent des rôles très différents sur la scène mondiale, mais nous travaillons souvent ensemble, comme peu d'autres nations peuvent le faire, à la concrétisation d'objectifs communs que ni l'un ni l'autre ne peut atteindre seul. Averell Harriman a évoqué cette idée il y a plusieurs années lorsqu'il a dit : « J'attache une grande importance à une coopération étroite entre le Canada et les États-Unis. Notre vision des choses est à peu près la même, et ne s'embarrasse pas de préjugés et de haines. Et ce rapprochement n'est pas aussi difficile que dans d'autres parties du monde : le leadership en matière de coopération internationale devrait venir de nous. »

Le premier ministre et le président étaient animés de ce même sentiment lors du déjeuner de Monterrey, que j'ai évoqué tout à l'heure. Ils ont tous les deux suggéré que le secrétaire Powell et moi-même examinions comment faire cause commune dans l'arène internationale. Nous le faisons déjà dans le cas d'Haïti, où nos vues sont absolument identiques. M. Powell et moi sommes déterminés à considérer d'autres domaines où il pourrait y avoir convergence de nos efforts.

Au Canada, nous reconnaissons les écrasantes responsabilités de la seule superpuissance au monde, qui doit faire preuve de leadership, fournir les ressources voulues et utiliser la force nécessaire pour instaurer une communauté mondiale meilleure. En retour, les Américains peuvent compter sur le fait qu'il y a, au nord, une frontière sûre, une nation d'où aucune menace n'est venue depuis 1815, et un allié qui partage leurs valeurs et leurs objectifs fondamentaux, mais les défend souvent par des moyens que ne pourrait s'autoriser une superpuissance. Et un allié capable de promouvoir ces causes d'une voix indépendante et largement digne de foi sur la scène mondiale.

Notre partenariat joue un rôle dans la défense de nos intérêts communs sur ce continent, mais il est tout aussi important de promouvoir nos objectifs dans le monde. Je pense qu'en reconnaissant ce qu'ils ont en commun et comment ils sont complémentaires l'un de l'autre, nos deux pays peuvent collaborer pour rendre la communauté mondiale plus sûre et plus prospère.

À l'étranger, nous cherchons avec vous à ériger des sociétés stables là où les terroristes trouvaient autrefois refuge. Plus de 6 000 soldats canadiens ont combattu aux côtés des forces américaines en Afghanistan immédiatement après les attentats du 11 septembre. Aujourd'hui, quelque 1 900 militaires canadiens sont encore là-bas, à la tête de la Force internationale d'assistance à la sécurité, qui opère sous mandat de l'OTAN pour éliminer les terroristes et soutenir la nouvelle administration afghane. À leur effort, s'ajoute notre programme d'aide, qui vise à restaurer et à améliorer la société afghane. Cette année, l'Afghanistan sera le principal récipiendaire de l'aide canadienne parce que nous nous sommes engagés, avec vous et nos alliés européens, à faire en sorte que ce pays ne constitue plus une menace pour nos sociétés, qu'il s'agisse de terrorisme ou du fléau de la drogue.

Pendant longtemps, le Canada a partagé les inquiétudes des États-Unis concernant la présence possible d'armes de destruction massive en Iraq. Nous avons appuyé la décision de porter l'affaire devant l'ONU [Organisation des Nations Unies]. Dans les débats qui ont suivi, nous avons soutenu les États-Unis dans leurs efforts pour renforcer le libellé de la Résolution 1441, mais maintenu que la participation de l'ONU était incontournable, car le désarmement de l'Iraq par la force allait exiger la plus grande légitimité internationale possible. Devant l'impasse, nous avons estimé qu'il était dans l'intérêt du Canada, et dans celui du système multilatéral, si essentiel à notre paix et à notre sécurité collectives, de ne pas nous joindre à la coalition qui allait mener la guerre en Iraq.

Mais cela, c'était hier. Il est maintenant dans l'intérêt de tous que l'Iraq devienne une démocratie pacifique et stable, et c'est pourquoi le Canada a engagé près de 300 millions de dollars pour sa reconstruction. Nous avons envoyé en Jordanie des instructeurs pour y former des policiers iraquiens, et nous accorderons une aide supplémentaire pour l'adoption de réformes dans les domaines de la gouvernance, du fédéralisme, de la police et des services correctionnels en Iraq même, lorsque les conditions locales le permettront.

Les Canadiens reconnaissent donc que la sécurité et la prospérité de leur pays et des États-Unis sont liées non seulement en Amérique du Nord, mais aussi à l'étranger. Cela dit, nous pouvons souvent nous épauler l'un l'autre en adoptant des approches différentes pour atteindre les objectifs que nous partageons. Il est d'ailleurs inévitable que nous ayons des approches différentes, compte tenu de l'histoire et des perspectives internationales propres à chaque pays.

Notre vision des choses est dictée par notre histoire. D'abord, le Canada est une nation bilingue façonnée par les autochtones, les Français et les Anglais, qui a ouvert ses portes pour accueillir des immigrants venus de tous les horizons. Notre structure sociale fait en sorte que nos citoyens soutiennent des politiques nationales qui diffèrent parfois des vôtres, par exemple le contrôle généralisé des armes à feu, un régime d'assurance-maladie accessible à tous, d'un bout à l'autre du pays, des restrictions sur les campagnes de financement des partis politiques et des avantages familiaux, notamment un congé de maternité d'un an financé par le gouvernement.

Nos pays ayant des comportements sociaux distincts et, à l'occasion, des intérêts divergents, il arrive que nous abordions les affaires mondiales sous un angle différent. Cela tient au fait que les Canadiens sont très conscients de leur interdépendance par rapport au reste du monde, ainsi que de la nécessité de poursuivre leurs intérêts en harmonie avec les autres nations. S'ils savent très bien que la lutte contre le terrorisme est d'une importance critique pour notre sécurité commune, les Canadiens estiment néanmoins que cette question ne doit pas dominer l'ordre du jour au point de camoufler les autres crises mondiales, comme la pauvreté, la maladie, les inégalités de l'économie mondiale, la dégradation de l'environnement et la mise en péril des moyens de subsistance. Ce sont là des réalités dont nous devons aussi nous préoccuper, ne serait-ce que parce que la promotion de notre sécurité ici exige que nous ayons des amis et des alliés à l'étranger, qui savent que nous sommes à l'écoute de leurs besoins immédiats.

Les Canadiens croient aussi que le seul moyen de venir à bout de ces problèmes mondiaux qui s'enchevêtrent les uns dans les autres est de travailler à l'unisson avec les autres nations, car aucun pays ni même aucune coalition de pays ne peuvent y parvenir isolément. Pour instaurer les conditions propices au règlement de ces problèmes, il faut créer des partenariats avec les autres pays, ce qui présuppose le respect des perspectives de chacun.

C'est cette vision qui a conduit mon pays à promouvoir la création du Nouveau Partenariat pour le développement de l'Afrique, car nous voulons travailler avec les pays africains à atténuer la pauvreté qui les afflige et à améliorer leur mode de gouvernance. Et je suis fier de dire que le Canada est récemment devenu le premier pays au monde à déposer un projet de loi qui nous permettra d'exporter des médicaments à prix abordables vers les pays pauvres pour les aider à lutter contre des épidémies comme celles du VIH/sida, de la tuberculose et de la malaria.

Nous estimons également que la recherche de solutions à ces problèmes mondiaux doit aussi passer par la création d'institutions multilatérales efficaces pour coordonner les efforts des États concernés, un message qui sera certainement bien reçu en cette ville où l'ONU a été fondée il y a 60 ans. Depuis la Seconde Guerre mondiale, le Canada contribue, avec les autres pays, à construire un système international qui profite à tous en imposant des règles et des obligations communes, et qui nous permet d'accomplir collectivement ce qu'aucun d'entre nous n'arriverait à faire seul. Il arrive souvent au Canada de pouvoir jouer un rôle prépondérant sur les tribunes multilatérales, car nous ne sommes pas empêtrés dans des rivalités régionales et que nous ne portons pas l'odieux d'un passé colonial. Aussi sommes-nous généralement respectés en tant que pays travaillant au bien-être commun de l'humanité.

Le Canada appartient à de nombreux réseaux mondiaux, et cela lui donne l'occasion d'intervenir à de multiples niveaux. Par exemple, notre histoire et notre attachement à la langue française nous permettent d'appartenir à la Francophonie, et de promouvoir des valeurs comme la démocratie, les droits de la personne et la saine gestion publique dans les pays en développement qui partagent avec nous l'usage du français. Dans le contexte des tensions mondiales actuelles, il est particulièrement utile d'avoir cette tribune pour dialoguer avec des pays musulmans modérés comme le Maroc, la Tunisie, le Sénégal et l'Albanie.

Malgré leur attachement au multilatéralisme, les Canadiens ne connaissent que trop bien les lacunes des institutions actuelles, et savent que des réformes s'imposent d'urgence. Il est de toute première importance en effet d'améliorer l'ONU, surtout en ce qui concerne la composition et le fonctionnement du Conseil de sécurité, quelle que soit la difficulté de la tâche. Nous suivrons avec intérêt les travaux du comité créé pour conseiller le secrétaire général à cet égard.

Au cours de la prochaine année, la capacité du Canada à poursuivre ses objectifs internationaux sera définie et renforcée dans le cadre d'un examen des politiques internationales auquel le premier ministre m'a demandé de procéder. Il y a 10 ans que cela n'avait pas été fait, et beaucoup de choses ont changé pendant ce temps en ce qui concerne l'environnement mondial ainsi que la complexité de nos relations avec les États-Unis et les autres pays du monde. L'interdépendance mondiale traîne dans son sillage un faisceau de problèmes qui transcendent les frontières nationales; et même à l'intérieur de ces frontières, cela signifie aussi que presque tous les portefeuilles d'un gouvernement fédéral ont maintenant une composante internationale substantielle.

Pour toutes ces raisons, le premier ministre Martin nous a demandé d'examiner à fond et de moderniser nos modes d'intervention dans le monde. L'objectif général est de trouver des moyens d'accentuer le leadership de notre pays et de multiplier ses initiatives sur la scène internationale, de manière qu'il devienne un catalyseur des efforts déployés pour renforcer la gouvernance mondiale et pour favoriser la croissance équitable, le développement social et la sécurité internationale.

Pour compléter ce mandat, le premier ministre a aussi établi comme priorité l'analyse des moyens propres à renforcer l'intérêt du Canada envers la constitution d'un solide partenariat canado-américain en Amérique du Nord et ailleurs dans le monde. Bon nombre des initiatives que j'ai évoquées s'inscrivent dans cet effort de consolidation de notre partenariat avec les États-Unis. Il en sera de même des plans que nous sommes en train de développer pour fortifier les institutions multilatérales et en créer de nouvelles qui seront mieux outillées pour résoudre les problèmes mondiaux d'aujourd'hui. De même également des efforts que nous faisons pour réajuster les règles de l'économie mondiale, de manière qu'elles soient plus inclusives et reflètent plus fidèlement les réalités de l'interdépendance mondiale. Et de même aussi des plans que nous élaborons pour doter le Canada de moyens spécifiques en matière de lutte contre le terrorisme et d'aide aux États en déroute et aux États défaillants. Il résultera de cet exercice un Canada plus fort et aux objectifs internationaux plus précis, qui sera dès lors pour les États-Unis un allié et un partenaire d'autant plus précieux.

L'expérience particulière du Canada et son indépendance d'esprit sont un atout pour les États-Unis dans l'exercice de leurs énormes responsabilités sur la scène mondiale. Et quand nos gouvernements et nos citoyens divergent d'opinion sur la façon de poursuivre nos objectifs communs, nos relations sont suffisamment solides pour que nous puissions discuter franchement de ces différences. Le général américain Norstad avait très bien saisi ce point lorsqu'il a dit ceci, en 1959 : « Si des pierres sont lancées de part et d'autre de la frontière, et cela arrive, c'est peut-être une bonne chose. Nous demeurons ainsi conscients l'un de l'autre, et cela nous oblige à mesurer de temps à autre l'importance de nos relations, et à apprécier tout ce que nous représentons l'un pour l'autre. » Dans la même veine, je pense que nous sommes pour vous un meilleur allié et un ami plus sincère quand nous défendons avec ferveur nos convictions auprès de vous. Cela ne vaut-il pas mieux que de partir de l'hypothèse qu'il ne peut y avoir de divergences de vue entre nous?

Faire prévaloir les valeurs communes à nos deux pays pour favoriser la sécurité et la prospérité aussi bien chez nous qu'ailleurs dans le monde est quelque chose que nous pouvons faire et que nous ferons. Et cela ne nous empêchera pas de poursuivre, chacun sur son territoire, les objectifs sociaux, culturels et économiques qui nous distinguent l'un de l'autre. Je vous assure que le Canada continuera de travailler avec votre pays dans les mois et les années à venir pour que nous puissions ensemble contribuer à l'avènement de sociétés plus sûres et plus fortes en Amérique du Nord et, pour notre bénéfice mutuel, au-delà de nos frontières.

Je vous remercie.


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Dernière mise à jour : 2006-10-30 Haut de la page
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