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2004/18 SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS

NOTES POUR UNE ALLOCUTION

DE

L'HONORABLE BILL GRAHAM,

MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,

À L'OCCASION DE LA CONFÉRENCE COMMÉMORATIVE

CANADA-RWANDA SUR LE GÉNOCIDE RWANDAIS

NEW YORK (New York)
Le 26 mars 2004

La conférence d'aujourd'hui a lieu grâce aux efforts déployés par plusieurs parties. Je tiens à remercier le gouvernement rwandais pour son partenariat, et plus particulièrement le ministre des Affaires étrangères, Charles Murigande, et l'ambassadeur auprès des Nations Unies, Stanislas Kamanzi, qui ont rendu cet événement possible grâce à leur support moral et intellectuel. La collaboration et les conseils de David Malone et de l'Académie mondiale pour la paix ont également été essentiels. Nous savons que, puisque M. Malone est rapporteur, nos discussions atteindront un auditoire beaucoup plus large. J'aimerais aussi souligner la présence du général Roméo Dallaire dans notre groupe d'experts, un éminent Canadien ainsi qu'une personne particulièrement qualifiée pour nous aider à étudier toutes les questions à l'ordre du jour aujourd'hui.

Je suis particulièrement honoré de partager le podium avec le secrétaire général [des Nations Unies], Kofi Annan, dont le dévouement à la cause de la paix est une source d'inspiration pour nous tous. Il y a deux semaines, le secrétaire général a pris la parole devant le Parlement canadien pour nous rappeler la nécessité d'édifier un système de sécurité collective qui suscite une confiance suffisante pour qu'aucun pays ne se sente obligé de recourir à l'unilatéralisme. C'est en fait là un des grands objectifs de notre réunion d'aujourd'hui.

Cette conférence commémorative nous offre l'occasion de réfléchir au génocide rwandais d'il y a 10 ans et à l'absence collective de réaction dans le monde, comme l'ont souligné le secrétaire général et le ministre Murigande. Cette réflexion, pour être utile, doit nous amener à considérer aussi bien le passé que l'avenir afin de nous assurer que l'échec que le monde a connu au Rwanda ne se reproduira pas. On a beaucoup écrit et beaucoup dit au sujet de cette tragédie, mais nous devons nous demander si nous sommes aujourd'hui mieux préparés à agir pour empêcher qu'une telle chose ne se reproduise. En fait, j'ai bien peur que nous n'ayons pas encore tiré les enseignements pratiques nécessaires.

Comme l'a écrit l'écrivain américain Ralph Waldo Emerson : « Nous n'apprenons la géologie qu'au lendemain d'un tremblement de terre. »

L'horreur de la tragédie rwandaise nous a appris une dure vérité quant à la géologie de notre nouvel environnement mondial : les conflits internes ont aujourd'hui un potentiel extraordinaire de dévastation, apportant mort et bouleversements à la population civile. Nous aurons au moins appris cette leçon après l'affreux séisme qui a secoué le Rwanda. Nous n'avons cependant pas encore appris à édifier les structures mondiales qui pourront supporter de tels déchaînements la prochaine fois. Ou, pour dire les choses plus crûment, nous savons ce qu'il y a à faire, mais nous n'avons pas la volonté politique nécessaire pour nous entendre sur les mesures à prendre pour prévenir un nouveau Rwanda.

La triste réalité, c'est que la communauté internationale se débat encore avec le dilemme de ce qu'il convient de faire quand le principe de la souveraineté se heurte de front aux normes humanitaires fondamentales. Indépendamment de l'importance de la souveraineté, comme principe du droit international, rien n'est plus urgent que de protéger les civils face au génocide, aux crimes de guerre ou à des violations grossières et systématiques du droit humanitaire.

Le secrétaire général a fort éloquemment situé le problème dans son discours au Sommet du millénaire quand il a dit : « Rares sont ceux qui ne pensent pas qu'il faille défendre à la fois le principe de l'humanité et celui de la souveraineté. Hélas, cela ne nous dit pas quel principe devrait prévaloir lorsqu'ils sont en conflit. L'intervention humanitaire est une question délicate [...] très complexe sur le plan politique [...] toutefois, ce qui est certain, c'est qu'aucun principe juridique -- même pas celui de la souveraineté -- ne saurait excuser des crimes contre l'humanité. »

Cet appel à l'action a inspiré le Canada et d'autres pays, les amenant à établir la Commission internationale de l'intervention et de la souveraineté des États, dont le rapport final, La responsabilité de protéger, a été présenté ici en février 2002. L'un de ses auteurs, M. Ramesh Thakur, est parmi nous aujourd'hui, et il participera à la seconde table ronde.

La Commission définit la nouvelle norme de la « souveraineté responsable », qui joue un rôle central dans son rapport. Selon cette norme, si les États ne veulent pas ou ne peuvent pas protéger leur population contre des atrocités massives, ou s'ils sont eux-mêmes les auteurs de telles atrocités, la communauté internationale a la responsabilité d'agir. Tandis que la Commission insiste, à juste titre, sur l'obligation pour la communauté internationale de prévenir les crises humanitaires avant qu'elles ne se produisent, elle reconnaît que, dans des cas extrêmes, l'intervention extérieure peut être justifiée si la diplomatie échoue.

Le Canada appuie ce raisonnement, qui concorde avec notre principe selon lequel le bien-être de l'individu doit être placé au centre des affaires internationales. Nous croyons que la sécurité des personnes est aussi importante que celle des États et rejetons donc la notion que la souveraineté d'un État lui confère une immunité absolue. Nous croyons en fait que les protections inhérentes au concept de la souveraineté de l'État sont sérieusement compromises quand elles servent à protéger la prérogative des gouvernants plutôt que les droits des gouvernés.

À notre sens, pour que l'ONU [Organisation des Nations Unies] s'acquitte pleinement de ses responsabilités en ce qui concerne la paix et la sécurité, le principe de « souveraineté responsable » doit être généralement accepté comme norme fondamentale régissant le comportement des gouvernements. Nous savons que certains États redoutent de façon légitime le risque d'intervention abusive à des fins politiques ou économiques. C'est pour cette raison que la prévention et la diplomatie sont supposées être les principaux moyens à la disposition de la communauté internationale pour assurer la protection des populations, les interventions ne se justifiant qu'en dernier ressort. Il est cependant incontestable, selon nous, que cette organisation a le devoir de réagir lorsque des atrocités sont commises.

Évidemment, pour bien s'acquitter de cette responsabilité, l'ONU doit remplir son plein potentiel à titre d'instrument d'un multilatéralisme crédible et efficace. De plus, elle ne doit pas se contenter de se pencher sur des conflits intérieurs, elle doit aussi s'intéresser aux nombreuses autres nouvelles menaces qui pèsent sur la sécurité des personnes dans le monde entier, du terrorisme planétaire à la prolifération des armes de destruction massive, en passant par des pandémies telles que celle du VIH/sida.

L'ONU demeure l'institution la plus importante du monde et le réceptacle des espoirs communs de l'humanité. Cependant, alors que le monde évolue autour de nous, la communauté internationale doit se demander si l'ONU a bien les moyens de remplir son mandat, à savoir « préserver les générations futures du fléau de la guerre ». Or, je pense que nous devons reconnaître que tel n'est pas le cas. Collectivement, face aux menaces qui pèsent actuellement sur la sécurité, nous sommes souvent paralysés par des définitions rigides de la souveraineté et des interprétations étroites de l'intérêt national qui, trop souvent, influencent le débat international.

Il reste à savoir si les États membres, gardiens de l'organisation et de la Charte, ont la volonté politique d'amorcer le renouvellement et la modernisation nécessaires; autrement dit, si nous sommes décidés à faire en sorte que les normes qui régissent cette institution correspondent aux défis contemporains. Il incombe à chaque État membre de se demander s'il est prêt à s'investir pleinement à l'échelle nationale et internationale pour bâtir un multilatéralisme porteur de vraies solutions.

Permettez-moi de vous assurer que le Canada, qui entame l'examen de sa politique étrangère, accorde une place clé au renouvellement du multilatéralisme, y compris à l'instauration, au besoin, de nouvelles règles et structures ainsi qu'à la réorientation ou à l'élimination de celles qui ont perdu de leur utilité.

Nous applaudissons à l'attachement du secrétaire général à la réforme, exprimé tout dernièrement dans la constitution d'un groupe de haut niveau sur les menaces, les défis et les changements nécessaires. Nous savons qu'il ne lui sera pas facile de connaître les répercussions des menaces qui pèsent sur la sécurité en ce qui a trait à la structure et au fonctionnement de l'ONU. Mais comme vous, les Canadiens sont déterminés à voir cette organisation se donner les moyens de répondre aux besoins urgents des populations du monde.

Nous sommes également déterminés à voir cette organisation acquérir la capacité de tirer des enseignements pratiques du génocide rwandais. Nous pouvons malheureusement être sûrs qu'il y aura d'autres tragédies humanitaires à l'avenir. Mais ne nous laissons pas abattre par cette menace. Au nom des générations futures, et pour respecter nos obligations envers les victimes du Rwanda, nous devons discuter ouvertement des circonstances qui justifient l'intervention militaire pour des motifs humanitaires, et adopter les mesures qui permettront à la communauté internationale d'être à la hauteur de ses responsabilités.

Certains pensent que la communauté internationale n'est pas prête pour un débat de ce genre, que les désaccords occasionnés par l'Iraq ont tellement altéré l'environnement diplomatique qu'il est devenu impossible de discuter d'intervention, quels qu'en soient la forme et les motifs. Je pense néanmoins que c'est un débat auquel nous ne pouvons pas nous dérober. En l'absence de clarté et de consensus sur cette question, nous risquons la même paralysie que dans le cas du Rwanda, avec les mêmes résultats impensables. L'enjeu, ce n'est rien de moins que la crédibilité, la pertinence et l'efficacité futures de l'ONU, comme institution et comme agent de paix.

Il n'y a pas de meilleur moment que maintenant, un an après l'Iraq et 10 ans après le Rwanda, pour lancer un débat mondial honnête sur l'intervention humanitaire. J'espère avoir l'occasion de collaborer avec vous tous pour faire en sorte que l'ONU dispose des moyens juridiques, matériels et politiques dont elle a besoin pour protéger les populations du monde lorsque les États manquent à leur responsabilité de le faire.

Il y a 10 ans, un terrible tremblement de terre, engendré par la haine des hommes, a secoué la communauté mondiale. Nous ne pouvons pas ramener à la vie les victimes qu'il a fait au Rwanda. Mais nous pouvons apprendre de cette tragédie comment reconstruire les structures du multilatéralisme pour empêcher de telles catastrophes à l'avenir. Je vous exhorte tous aujourd'hui à vous consacrer une nouvelle fois à cette tâche.

À l'occasion de sa visite à Ottawa, le secrétaire général a déclaré : « Il est difficile d'imaginer l'ONU sans le Canada. Il est difficile d'imaginer le Canada sans l'ONU. » Le gouvernement du Canada et les Canadiens entérinent ces propos. Nous allons faire en sorte que ce point de vue se traduise en actes, et nous allons travailler avec vous afin que cette institution, si essentielle à l'ordre du monde et à la sécurité de l'humanité, devienne un instrument plus efficace et meilleur pour le bien de tous.

Je vous remercie.


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Dernière mise à jour : 2006-10-30 Haut de la page
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