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Le Canada dans le monde : Politique internationale du Canada
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Entrevue vidéo
David Haglund
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Le Dr. David Haglund discute des impacts démographiques envers la géopolitique.

Le Dr. Haglund
est professeur d’études politiques à l’Université Queen's. Pendant plus de quinze ans, il a été directeur du Centre des relations internationales et professeur au Département des études politiques. En 1978, après l’obtention de son doctorat en relations internationales de la Johns Hopkins School of Advanced International Studies, à Washington, il a occupé des postes d’enseignant et de chercheur à l’Université de la Colombie-Britannique avant d’entrer au service de l’Université Queen's en 1983. De 1985 à 1995, et de 1996 à 2002, il a rempli les fonctions de directeur du Centre des relations internationales de Queen's. Il a occupé des chaires de professeur invité en France et en Allemagne.

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Entrevues vidéo
  (en anglais avec transcription en français)


Note: Les opinions exprimées ne sont pas nécessairement celles du gouvernement du Canada.

  Lien entre la démographie et le géopolitique

3 minutes 

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  Le concept « nouveau fénianisme » 

3 min 30 sec

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  La rupture culturo-linguistique

4 min 30 sec

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(Les vidéolecteurs sont disponibles ici : QuickTimeWindows Media)


Transcription

Lien entre la démographie et la géopolitique

Je m’appelle David Haglund et j'enseigne au Département d'études politiques à l'Université Queen's.

Au départ, l'une des façons les plus faciles d'aborder le lien entre la démographie et la géopolitique consistait simplement à se demander : à quel point des pays pourraient-ils être puissants ou devenir de grands acteurs sur la scène internationale sans un certain poids démographique? On en est donc venu à comprendre avec le temps que vous devez vraiment avoir un seuil minimal de population pour penser faire partie des grandes puissances. Il est difficile de déterminer quelle taille cette population devrait avoir. Il n'y a pas si longtemps, on pensait que des pays comme l'Inde et la Chine étaient entravés dans leur développement, qu'ils étaient moins puissants qu'ils auraient pu l'être autrement parce qu'ils étaient trop populeux et qu'ils avaient trop de problèmes. De nos jours, je soupçonne que la mesure dans laquelle nous nous préoccupons de l'essor de la Chine et de l'Inde a beaucoup à voir avec le fait que ces pays sont effectivement très populeux. Une chose est sûre : vous devez avoir un minimum de population qui dépasse ce que nous avons aujourd'hui au Canada pour prétendre faire partie des véritables grands à l’aulne de la puissance.

Mis à part ce que j'ai dit à propos de la façon dont une population de taille convenable contribue au classement d'un pays en fait de puissance, il y a la question connexe de savoir de combien de personnes vous avez besoin pour être prospères. Parce que la prospérité et les moyens économiques déterminent également qui se classe dans hiérarchie internationale et qui ne se classe pas. Parmi les grands débats qui ont cours aujourd'hui en Europe occidentale — dans des pays comme l'Allemagne (et vous le voyez aussi un peu dans des régions du Canada, par exemple au Québec) — un débat porte sur le taux de natalité, sur la baisse du taux de naissances et les incidences que cela pourrait avoir sur le renouvellement et la stabilisation de la population et idéalement, sur la croissance de la population et tout ce que cela implique pour la prochaine génération de travailleurs et comment ils pourront payer pour les retraités (comme moi et d'autres de ma génération) quand ils prendront leur retraite dans quelques années et qu'ils s'habitueront à l'idée qu'ils devraient toucher des pensions généreuses. Quelqu'un doit travailler pour financer ces pensions. C'est un débat urgent qui a lieu en Allemagne actuellement, et dans d'autres pays. On craint non seulement que le fléchissement du taux de natalité aboutisse à une baisse de population, ce qui d'une quelconque façon fera en sorte que le pays se démarquera moins dans la hiérarchie internationale qu'auparavant, mais ce qui est encore plus important, que cela nuira à la prospérité et aura un impact terrible sur la capacité de maintenir pour la population le niveau de vie auquel elle s'est habituée.


Le concept « nouveau fénianisme »

Pour ce qui est de la taille de notre population, je ne crois pas qu'il y a des points très importants à commenter. La taille du Canada est depuis longtemps environ le neuvième ou le dixième de celle des États-Unis. Même si par rapport aux États-Unis, nous accueillons plus d'immigrants, les États-Unis accueillent encore beaucoup d'immigrants. Quand vous ajoutez les immigrants illégaux, dont le nombre est par définition inconnu parce que nous ne pouvons pas les dénombrer, nous ne risquons probablement pas de nous tromper en supposant que le rapport entre le Canada et les États-Unis (de 9 à 1, ou de 8,5 à 1 ou de 10 à 1) va durer encore longtemps. Cela aura-t-il des répercussions? Comme ça, au pied levé, je n'en vois pas.

Y a-t-il des implications liées à la qualité par opposition à la quantité des flux démographiques — l'origine des immigrants importe-t-elle? Autrefois, les immigrants au Canada provenaient d'Europe. Cette époque est révolue depuis longtemps. La question qui se pose maintenant, dans la mesure où tant le Canada que les États-Unis reçoivent la plus grande partie de leur immigration des pays en développement, est-il important pour leur relation qu'une grande part du flot de l'immigration aux États-Unis vienne de l'Amérique latine et en particulier du Mexique et qu'une part importante du flot de l'immigration au Canada vienne d'Asie? Vous avez la possibilité que les deux sociétés, dans la mesure où elles divergent actuellement, comme Michael Adams le prétend, puissent diverger encore plus à l'avenir à cause des sources différentes de leur immigration.
Vous avez alors le problème, qu'il ne faudrait pas exagérer mais qu'il ne faudrait pas non plus négliger complètement, que j'appellerais « un nouveau fénianisme ». Je veux dire par là : est-il probable qu'en important des gens de différentes parties du monde, nous allons bon gré mal gré importer des gens qui veulent venir ici en guise de moyen d'entrer aux États-Unis et d’y faire quelque chose que ni les dirigeants américains ni les dirigeants canadiens voudraient qu'ils y fassent? Par exemple, lancer des attaques terroristes en sol américain? Certains pourraient dire que c'est exagéré, mais nous avons de toute évidence dans les annales le cas d'un épisode canadien de « nouveau fénianisme » en 1999 — le poseur de bombe du millénaire, Ahmed Ressam, qui s'est établi au Canada dans le but d'attaquer les États-Unis.

Quand je parle de « nouveau fénianisme », je veux évoquer un parallèle avec le fénianisme du XIXe siècle, quand des groupes d'immigrants aux États-Unis essayaient de lancer des attaques contre le Canada parce qu'ils avaient un grief contre la Grande-Bretagne. À l'époque, il s'agissait d'Américains d'origine irlandaise, le Fenian Brotherhood, et le grief concernait l'obtention de l'indépendance de l'Irlande. Le Canada a joué un rôle utile. Il constituait une cible facile pour de nombreux membres du Fenian Brotherhood qui s'étaient établis aux États-Unis. Il y a donc, je suppose, cette perspective qui ne disparaîtra jamais et qui nécessitera toujours une vigilance de la part des autorités. Il est impossible d'exagérer les dommages que pourrait subir la relation canado américaine si l'origine d'une attaque dévastatrice en sol américain pouvait être retracée en sol canadien.


La rupture culturo-linguistique

Il y a un grand débat entre les spécialistes des relations internationales quant à savoir si, dans les sociétés démocratiques libérales, l'impact des pressions de groupes ethniques est positif ou négatif pour l'intérêt national. Je ne sais pas si c'est l'un ou l'autre. Je pense simplement que le phénomène existe et que nous devrions aussi bien le reconnaître. Cela ne donne rien de pratiquer la politique de l'autruche et de dire que cela n'arrive pas ou ne devrait pas arriver. Ça arrive et on compose avec la situation. Lorsqu'on examine la politique étrangère de différents pays, on trouve beaucoup de cas où on peut voir l'influence que des groupes d'intérêt établis dans un pays exercent sur la politique étrangère. Par exemple, prenez la politique des États-Unis envers Cuba. Il serait difficile de comprendre, en l'absence d'une communauté d'électeurs américains d'origine cubaine stratégiquement bien placée en Floride, et accessoirement au New Jersey, pourquoi la politique des États-Unis envers Cuba en 2005 ne diffère pas beaucoup de ce qu’elle était en 1965. Tandis que la politique des États-Unis envers le Vietnam en 2005 est radicalement différente de ce qu'elle était, du moins envers le Vietnam du Nord, il y a 40 ans. Vous pourriez vous demander dans quelle mesure des facteurs ethniques intérieurs jouent un rôle dans l'élaboration de la politique étrangère. Une fois que vous avez réussi à trouver des cas montrant l'existence d'un tel rôle, vous pourriez alors vous demander : est-ce positif ce qui arrive ou est-ce négatif? Mon message est simplement que cela arrive et que nous serions aussi bien d'accepter que cela arrive.

La question plus ancienne des différences au sein du Canada entre les communautés bien établies, irions-nous jusqu'à dire, ethniques — les Canadiens d'expression anglaise et les Canadiens d'expression française — révèle une fois encore des divergences en matière de politique étrangère. Dans le passé, c'était une vérité de La Palice — du moins il y a cent ans et assurément pendant la première moitié du XXe siècle — de dire que n'importe quelle initiative internationale d'envergure à laquelle le Canada participerait et qui courrait le risque d'entraîner le déploiement de soldats canadiens à l'étranger provoquerait une réaction différente du Canada français et du Canada anglais. Par exemple, les crises de la conscription dans la Première et dans la Deuxième Guerre mondiale et tout le rajustement de la politique étrangère canadienne entre les deux guerres pour concilier ce qu'on croyait être les préférences du Québec ou, l'attitude des deux nations fondatrices même avant la Première Guerre mondiale, si vous voulez, envers la Guerre des Boers. On avait l'habitude de penser que toutes ces questions étaient disparues avec l'essor des États-Unis au rang de super-puissance et la division du monde en un conflit idéologique bipolaire, dans lequel il revenait maintenant aux États-Unis d'organiser toutes les initiatives expéditionnaires à l'étranger dans lesquelles le Canada s'engageait au nom d'une cause sur laquelle le Canada anglais et le Canada français pouvaient plus ou moins s'entendre.

Récemment, certains ont détecté une résurgence de cette ancienne rupture culturo-linguistique, en se penchant sur des questions comme la guerre en Iraq et la défense antimissile, où il semble qu'une partie du pays — le Canada francophone — a exprimé des jugements différents de ceux de l'autre partie du pays, au point où l'unité nationale pourrait être mise en péril si cette rupture se poursuivait. J'ai tendance à minimiser les répercussions sur l'unité nationale de toute rupture qu'il peut y avoir entre le Canada francophone et le Canada anglophone. Les différences entre aujourd'hui et la première moitié du XXe siècle sont tellement plus grandes que les similitudes que cela me pousse à conclure que le tort qui pourrait être fait à l'unité nationale est probablement négligeable.