Affaires étrangères et du Commerce internationalGouvernement du Canada
Ministère des Affaires étrangères et du Commerce international

Affaires étrangères et Commerce international Canada

Nos bureaux

Le Canada à l’étranger

Services aux voyageurs canadiens

Services aux entreprises

Le Canada dans le monde

En manchette


Politique internationale


Discussion sur la politique gouvernementale


Programmes


Ressources


Recherche sur le site Web

À propos du Ministère

0
Le Canada dans le monde : Politique internationale du Canada
Ressources


Entrevue vidéo
Jean-Louis Roy
Abonnement aux bulletins d'information et/ou avis par courrier électronique et baladodiffusion



Le Dr. Jean-Louis Roy discute du conflit en Haïti, et de la réponse qu'y apportent le Canada et le reste du monde.

Ancien directeur du quotidien montréalais Le Devoir, Jean-Louis Roy a été, de 1990 à 1998, Secrétaire général de l'Agence de la Francophonie à Paris. Il y était chargé de promouvoir la coopération entre les 49 États membres de la Francophonie, et de mettre en ouvre les programmes politiques, économiques et sociaux arrêtés aux réunions des chef d'État et de gouvernement. Il a été nommé président de Droits et Démocratie (Centre international des droits de la personne et du développement démocratique) au mois de juin et est entré en poste le 19 août, 2002.

 Reconstruire Haïti

Informations sur les discussions en ligne sur la politique internationale du Canada du MAECI:

 Voir l'actuelle discussion en ligne

 Voir la bibliothèque d'entrevues vidéo



Entrevues vidéo
 

Note: Les opinions exprimées ne sont pas nécessairement celles du gouvernementdu Canada.

  Présentation et bilan

4 min 07 sec

Windows Media | QuickTime


  Le rôle du Canada en Haïti

 


5 min 39 sec


Windows Media | QuickTime


  Quel avenir pour Haïti?

 


2 min 46 sec


Windows Media | QuickTime

(Les vidéolecteurs sont disponibles ici : QuickTimeWindows Media)



Transcription


Présentation et bilan

 

Je m’appelle Jean-Louis Roy et je suis président de Droits et Démocratie [Centre international des droits de la personne et du développement démocratique] depuis trois ans. Vous me demandez quels sont mes antécédents... Avant d’être ici, j’étais Secrétaire général de la Francophonie [Organisation internationale de la Francophonie], élu par les 52 pays francophones à deux reprises. Donc, j’ai fait ce mandat pendant neuf ans juste avant l’arrivée de Boutros Boutros-Ghali. Avant cela, j’étais le directeur du journal Le Devoir à Montréal pendant plus de six ans. Avant d’être au Devoir j’ai été associé à l’Université McGill durant 11 ans... des années dont je garde un extraordinaire souvenir. 

Alors voilà! On a renversé le président et on a nommé un gouvernement provisoire pour deux ans. Cette période se termine le 7 février 2006. Durant cette période, ce gouvernement provisoire a fait peu de choses à la vérité et je ne sais pas s’il pouvait faire  davantage. Ce n’est pas une situation très facile. C’est un gouvernement sans parlement; c'est un gouvernement dont tous les membres ont été nommés par des groupes mais qui n’ont pas été élus par les citoyens. Ils ont réussi à faire des choses notamment en ce qui a trait aux droits des femmes qui s’étaient beaucoup dégradés. Ce gouvernement a représenté Haïti d’une façon assez correcte, assez convenable. Mais le vrai travail pendant cette période s’est fait beaucoup par les organisations internationales et les pays qui sont actuellement au travail avec les Haïtiens à Port-au-Prince.


Les Nations Unies [ONU] sont très présentes. De plus, l’Organisation des États américains [OEA] et la Communauté des Caraïbes, la CARICOM, sont présentes fortement ainsi que l’Union européenne et plusieurs pays dont le Canada. C’est une vingtaine de pays qui se sont mobilisés et on remarque d’étonnantes surprises : il y a un contingent chinois, de la Chine continentale, assez important qui est là, les Philippines sont là, la Jordanie est là, le Maroc est là, mais aussi il y a une très forte présence des pays de l’Amérique latine : Brésil, Chili, Argentine, Mexique et Venezuela.

Quand on demande à nos amis latinos-américains ce qui les amène pour la première fois et d’une façon aussi évidente et aussi large à travailler dans les Caraïbes, et à travailler à la restauration des choses en Haïti, leur réponse est double. Ils sont très intéressés par la rénovation de la situation en Haïti, trouvant scandaleux qu’un pays dans l’hémisphère soit à ce point dégradé, mais en évoquant aussi le fait que leur présence en Haïti est un précédent qu’ils pourront utiliser lorsque les choses se produiront à Cuba. Pour des raisons historiques et pour des raisons symboliques, Cuba est pour eux d’une très grande importance et lorsqu’il y aura changement à Cuba, dans un sens ou dans l’autre, les Latinos-Américains -- en tout cas c’était leur réponse unanime lorsque je les ai rencontrés en Haïti -- souhaitent pouvoir y jouer un vrai rôle et ils auront ainsi un précédent dans les Caraïbes. Je viens de mentionner la présence de plusieurs pays, parmi tous ces pays, il y a évidemment la présence du Canada.


Le rôle du Canada en Haïti

Je vais vous répéter ce que j’ai dit à beaucoup de personnes depuis que je suis rentré d’Haïti, il y a maintenant 15 jours. J’ai été très impressionné, très favorablement impressionné, par l’action du Canada aujourd’hui en Haïti. D’abord, la présence canadienne est réelle, mais elle est... comment dire... subtile en quelque sorte. La présence canadienne a été politique : le premier ministre du Canada s’est rendu en Haïti et a accueilli la communauté haïtienne de la diaspora dans une conférence à Montréal; le ministre des Affaires étrangères y est allé deux fois, je crois; Mme Carroll, ministre de la Coopération et responsable de l’Agence canadienne de développement international [ACDI], et le président de l’ACDI y sont allés; le représentant du premier ministre pour Haïti, M. Coderre, y est allé de multiple fois; des parlementaires y sont allés aussi, de toutes les familles politiques et de tous les partis politiques fédéraux; le premier ministre du Québec est allé en Haïti. Il y a eu une visibilité politique qui traduit quand même quelque chose d’une volonté politique extrêmement forte du Canada en Haïti.


Cet aspect-là était évidemment très visible et les Haïtiens l’ont apprécié. Ce n'est pas seulement des communiqués, des intentions, de bons voeux envoyés en Haïti. Les gens ont pris la peine de se déplacer, de s’y rendre, et les Haïtiens ont le sentiment que les Canadiens écoutent, que les Canadiens avant d’intervenir, avant de lancer un programme ou de se mobiliser dans un tel ou tel domaine, ont pris le temps de les écouter. Cette espèce de dialogue que les Haïtiens disent avoir avec le Canada est pour eux extrêmement important. Extrêmement important!

Je pense que la présence canadienne en Haïti bénéficie du fait que nous y avons un bureau local de l’ACDI avec des ressources propres considérables et que ce bureau est composé de Canadiens, ainsi que de beaucoup d’Haïtiens qui sont du pays même. Entre le Bureau de la coopération du Canada en Haïti et la société haïtienne, la société civile haïtienne, il y a une reconnaissance qu’ils ne trouvent pas dans d’autres coopérations. J’ai été frappé par les avis convergents de très nombreux groupes. Le groupe 184, par exemple, qui a un projet de nouveau contrat social de grande qualité qui nous dit « on n’aurait pas été capable de faire ce travail sans l’appui de la coopération du Canada ». La plateforme des organisations haïtiennes des droits de l’homme qui regroupe un très grand nombre de petites ONG, d’églises, etc. nous dit : « Nous n’aurions pas fait le travail de consensus entre nous et de propositions que nous sommes capables de faire sans la coopération du Canada. » On entend ça sans arrêt et c'est vraiment très, très apprécié cette présence du Canada au niveau des institutions évidemment politiques, cette présence au niveau de la société civile, présence forte au niveau de la société civile. Un sentiment aussi que la société civile est respectée, qu’elle est considérée comme l’un des acteurs indispensables et avec raison de la rénovation éventuelle d’Haïti, c’est vraiment apprécié par tout le monde.

Le grand travail, que la communauté internationale avec les Haïtiens a essayé de faire et qui est en train d’être complété, c’est évidemment l’organisation d’une élection pour qu’on sorte de cette période provisoire de deux ans. Les élections ont été reportées quatre fois mais tout était à faire. Il fallait faire une première liste électorale, il n’y avait pas de liste, il n’y avait même pas de registre de citoyenneté. On a décidé de faire ça en même temps : un registre de citoyenneté et, pour les gens qui ont l’âge de voter, ce registre servira aussi de base de données durable pour établir la liste des électeurs. Il fallait établir, sur un ensemble de territoire important quand même, les lieux de votation. Ça semble être simple quand on dit ça mais il fallait que les lieux soient sécurisés pour la sécurité des personnes mais aussi pour la sécurité des résultats. Il fallait trouver des mécanismes d’accréditation des candidatures, etc. Tout au long du processus, Élections Canada, d’une façon très subtile et très habile, a accompagné et soutenu le travail complexe que les trois opérations que je viens de mentionner représentent. Élections Canada qui préside une coalition de sept pays dans l'accompagnement de la préparation de l’élection et pour l’observation électorale lorsque les élections auront lieu.  



Quel avenir pour Haïti?

On est très troublé quand on est en Haïti parce que ça n’a pas de sens qu‘à 45 minutes des États-Unis et à une ou deux heures du Canada, dans la région la plus riche du monde en quelque sorte, il y ait un tel niveau de dégradation des conditions de vie, conditions de vie sociale et, j’ai presque envie de dire, psychologique. C’est la pauvreté radicale, c’est l’extrême pauvreté. C’est une histoire très douloureuse aussi sur deux siècles, c’est la difficulté de sortir de cette histoire et de projeter autre chose pour l’avenir dans un pays où 60 % des gens ont moins de 18 ans, c’est-à-dire 6 millions d’Haïtiens sur 10 millions. Comment? Quel avenir? Quelle école? Voilà pourquoi, si l’élection a lieu et donne des résultats convenables comme on l’espère tous -- ça ne sera pas une élection à la Suisse sans doute mais des élections convenables avec une légitimité reconnue de ceux qui sont élus -- la coopération du Canada devra être maintenue dans la durée. C’est ce que les Haïtiens nous demandent en disant : « Vous êtes venus en 1992, 1993, 1994 et vous êtes partis et ça s’est écroulé. »  Je crois que l’effort considérable qu’a fait le Canada serait à perte si on ne maintenait pas une vraie présence dans la durée pour reconstituer ce qui doit l`être. En Haïti, ça veut dire à peu près reconstituer tout ce qui constitue les éléments de la vie, y compris les éléments psychologiques. C’est pourquoi je crois qu’il faudra être là avec les universités, avec les grandes écoles pour les travaux de recherche en sciences sociales, en sciences économiques. La grande difficulté des Haïtiens, la richesse qui est en même temps un blocage de leur héritage culturel, c'est ce poids du passé. Comment se projeter dans l’avenir? Comment imaginer autrement le destin de ce pays de 10 millions d’habitants qui a eu sa part de souffrance et qui devrait connaître autre chose.