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Le Canada dans le monde : Politique internationale du Canada
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Entrevue Vidéo

Xavier Renou
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Xavier Renou discute du changement de doctrine en matière nucléaire, du rôle du Canada pour un futur sans arme nucléaire et du rôle des institutions internationales.

 

Xavier Renou, chercheur en sciences politiques, est responsable de la campagne "Désarmement nucléaire" de Greenpeace France.

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Entrevue Vidéo

Note: Les opinions exprimées ne sont pas nécessairement celles du gouvernement du
Canada.

 

 Changement de doctrine en matière nucléaire3 min 41 sec Windows Media l QuickTime 

 Le rôle du Canada

2 min 45 sec 

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 Le rôle des institutions internationales

4 min 32 sec
 

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Transcription

Changement de doctrine en matière nucléaire

Je m’appelle Xavier Renou. Je suis chargé à Greenpeace France de la campagne pour le désarmement nucléaire, une campagne qui a été relancée l’an dernier très fortement au niveau mondial. Je suis également chercheur en sciences politiques et j’ai publié récemment un livre sur la privatisation de la violence.

La campagne pour le désarmement nucléaire vise à s’opposer à une évolution qui nous semble extrêmement préoccupante et qui concerne le passage d’une logique de dissuasion, où théoriquement on n’utilise pas les armes nucléaires (puisqu’elles sont là pour se défendre), à une logique d’agression, d’utilisation préventive des armes nucléaires. Cette logique de la guerre nucléaire préventive, c’est celle que nous dénonçons, que nous combattons. Les populations et les opinions publiques sont très peu informées de cette évolution. L’Iran pourrait tout à fait être le premier cobaye de cette nouvelle doctrine. Nous en sommes très inquiets et combattons cela. Donc nos moyens sont divers et variés. Nous utilisons les moyens classiques de lobbying, de sensibilisation de la population, de rencontres avec des parlementaires, des élus qui nous sont plutôt favorables, de harcèlement démocratique des élus qui nous sont moins favorables (qui défendent cette logique de mort) et nous organisons aussi des actions directes non violentes, des actions de désobéissance civile pour créer un rapport de force en faveur des tests pacifistes.

En ce qui concerne la question du désarmement nucléaire, donc, première évolution dramatique : ce changement de doctrine vers la guerre nucléaire préventive qui est complètement contraire à l’esprit et à la lettre du Traité de non-prolifération et qui se traduit en France, en Grande-Bretagne et aux États-Unis par des programmes de développement de nouvelles armes atomiques qui sont à base de mini-bombes nucléaires, et tout cela est ouvertement criminel. C’est-à-dire que l’on est en contradiction non seulement avec le Traité de non-prolifération mais aussi, avec la décision de 1996 de la Cour internationale de justice qui déclare l’arme nucléaire (jusque dans sa menace) comme une arme criminelle. Ça, c’est le premier défi : la constitution de nouvelles armes et le changement de doctrine. Il faut prévenir cette utilisation en informant la population. La population, quand on a accès à elle et quand on l’informe de ces développements, est extrêmement choquée. En aucun cas elle ne soutient cette évolution. Ça c’est le principal défi. Il est évidemment majeur car il [le changement de doctrine] est conduit par trois des principales grandes puissances nucléaires : France, Grande-Bretagne et États-Unis. Et évidemment, tant que ces pays adopteront cette attitude-là avec leurs armes nucléaires, ils encourageront le reste du monde à se doter d’armes nucléaires (elles, dissuasives, puisque le reste du monde est potentiellement visé par ces mini-bombes nucléaires) et empêcheront de nouveaux progrès en matière de désarmement. Il faut rappeler qu’il y a eu un désarmement nucléaire dans les années 80 et au début des années 90, que l’on a divisé par deux le stock d’armes nucléaires dans le monde et qu’il est donc possible de désarmer dès lors que les grands le décident. Aujourd’hui, les grands sont les principaux violateurs de la loi internationale. On nous fait regarder vers l’Iraq ou vers l’Iran mais c’est en fait chez nous, malheureusement, qu’il faut regarder les violations du Traité de non-prolifération.


Le rôle du Canada

Clairement, le Canada a un rôle très important à jouer, à deux titres. Le premier, c’est qu’il est l’allié naturel des États-Unis, qu’il forme un bloc avec l’Australie également (dans une moindre mesure avec la Nouvelle-Zélande), qui apparaît comme homogène mais qui ne l’est pas et qui doit de moins en moins apparaître homogène dès lors que la politique américaine va dans le mauvais sens. Il est clair que l’administration Bush aujourd’hui est extrêmement belliqueuse, qu’elle se permet d’intervenir dans les affaires du monde d’une manière violente et souvent illégale au regard du droit international. Le Canada a évidemment une voix forte à exprimer contre son allié naturel, son voisin naturel, que sont les États-Unis.


Deuxième titre d’intervention du Canada : le Canada est membre de l’OTAN. À ce titre-là, il a renoncé il y a un certain temps à la possession d’armes nucléaires. Il peut exercer une forte pression au sein de l’OTAN pour que les autres pays membres de l’OTAN qui ont encore des bombes nucléaires — notamment des bombes américaines et c’est le cas de six pays en Europe : la Grande-Bretagne, l’Italie, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Belgique et la Turquie qui sont tous membres de l’OTAN et qui accueillent en outre des bombes américaines — le Canada peut exercer sur ces pays une pression forte pour qu’ils se débarrassent de leurs bombes nucléaires pour l’établissement en Europe d’une zone sans arme nucléaire comme préalable évidemment, comme étape vers un désarmement plus global de la planète. Il faut rappeler que l’Amérique latine est une zone sans arme nucléaire par traité, que l’Afrique est une zone sans arme nucléaire par traité, que c’est le cas également d’une partie de l’Océanie. L’Europe pourrait être la prochaine étape. Ce serait évidemment une contribution majeure au désarmement mondial et le Canada peut être un allié très fort dans cette démarche qui est déjà soutenue par des populations. Greenpeace a fait un sondage dans ces six pays, membres de l’OTAN, européens, à accueillir des bombes nucléaires, et qui montre que les deux tiers des populations de ces pays s’opposent à la présence de bombes nucléaires sur leur sol et en demandent le retrait. Le Canada devrait pouvoir relayer ces mobilisations populaires, ces opinions publiques, au sein des instances de l’OTAN. Et justement, il y a un congrès important de l’OTAN à Riga en Lettonie en novembre prochain. Cela pourrait être l’occasion, puisque l’on va y discuter du futur de l’OTAN, de parler d’un futur sans arme nucléaire.



Le rôle des institutions internationales

Je ne crois pas que les mécanismes de désarmement, aujourd’hui, notamment la conférence de désarmement à Genève, les instances de l’ONU, etc., soient affectés d’une quelquonque manière par l’émergence d’agents privés. Je crois que ces agents privés, qu’il s’agisse de sociétés du secteur privé, de grands groupes d’armement ou d’autres, sont encore complètement sous le contrôle des États nations. Pas de n’importe quels États nations. Évidemment, les États nations ne sont pas à égalité devant l’émergence de ces acteurs privés. Mais si l’on parle des grandes puissances nucléaires : États-Unis, France, Grande-Bretagne et dans une moindre mesure Chine et Russie, on a évidemment un contrôle très fort des États, des gouvernements sur ces acteurs privés. Pourquoi les instances internationales en charge de la question du désarmement nucléaire ne fonctionnent plus aujourd’hui alors qu’elles ont très bien fonctionné à partir du début des années 80? Eh bien, parce que les grandes puissances nucléaires n’ont plus la volonté politique de les faire fonctionner. Très concrètement, la France bloque l’avancée du désarmement nucléaire à la conférence à Genève et les États-Unis sont évidemment le premier frein à toute avancée en matière de désarmement nucléaire. Ils empêchent le désarmement de l’espace par exemple. Ils se permettent de s’affranchir du Traité de non-prolifération notamment sur l’article 6 qui leur commande de désarmer. Évidemment, c’est un très mauvais exemple envoyé au reste du monde. Mais dans le reste du monde, on a tout de même une écrasante majorité des États qui sont par ailleurs membres du Traité de non-prolifération, qui respectent ce traité et qui s’interdisent de développer la bombe, qui parfois ont eu la bombe et y ont renoncé, et qui aujourd’hui exercent une pression assez forte sur les États-Unis, la France et la Grande-Bretagne pour débloquer la situation. Alors cette pression n’a jusqu’ici pas été suffisante pour débloquer la situation mais elle a été suffisamment forte pour empêcher ces États de simplement quitter le Traité de non-prolifération. Pour ce qui concerne les États-Unis, c’était très clair, ils le souhaitaient.


Ces organisations internationales sont l’expression la plus avancée de la volonté politique de l’ensemble de la communauté internationale. À ce titre, c’est évidemment en leur sein que doit émerger ou être relancer en particulier, le processus de désarmement nucléaire. Et par ailleurs, clairement, simplement, ces instances internationales ne fournissent pas aux États membres une équivalence de pouvoir. Certains États sont plus égaux que d’autres, en quelque sorte avec un droit de veto, avec évidemment plus de financement et plus d’influence sur les autres États. C’est donc bien sûr ces États-là qui sont d’autant plus responsables de la situation de blocage aujourd’hui. Maintenant, nous croyons fortement au multilatéralisme; c’est évidemment en se mettant autour d’une table que l’on peut résoudre les problèmes du monde. Nous exerçons donc à Greenpeace une pression permanente dans ces instances internationales. Pression qui se traduit d’abord par un travail d’information. Beaucoup d’États n’ont pas les moyens de s’informer des développements militaires, nucléaires qui ont cours au sein des grandes puissances. Donc c’est un travail que nous menons au sein de ces instances. Clairement ces instances ne se débloqueront aujourd’hui que s’il y a conjonction des efforts d’États non nucléaires ou hostiles à l’arme nucléaire comme le Canada, le Brésil, le Mexique, l’Irlande, la Suède, un certain nombre d’États vertueux, comme l’Afrique du Sud, qui se battent aujourd’hui effectivement pour le désarmement nucléaire, et puis, conjonction de ses efforts étatiques avec les efforts des organisations non étatiques internationales comme Greenpeace, comme d’autres organisations non gouvernementales qui peuvent additionner leurs efforts à ceux des États, qui peuvent, aux côtés des efforts diplomatiques de ces États opposés à l’arme nucléaire, mener des actions qui sont plus des pressions de sensibilisation des opinions publiques, et qui peuvent accompagner le travail diplomatique des États pacifistes.