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M. MANLEY - ALLOCUTION DEVANT LE ROYAL INSTITUTE FOR INTERNATIONAL AFFAIRS - LONDRES

2001/16 SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS

NOTES POUR UNE ALLOCUTION

DE

L'HONORABLE JOHN MANLEY,

MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,

AU

ROYAL INSTITUTE FOR INTERNATIONAL AFFAIRS

LONDRES, ROYAUME-UNI

Le 20 mars 2001

(8h30 HNE)

Introduction

C'est pour moi un honneur de prononcer ma première allocution importante à l'étranger à titre de ministre des Affaires étrangères du Canada dans le cadre prestigieux de l'Institut royal des affaires internationales.

Bien des visions du monde sont passées par Chatham House depuis un siècle. Des visions qui ont été façonnées par des idéologies, par le militarisme et par de fausses notions de l'appartenance ethnique et de la race. Mais aussi, sur une note plus positive, des visions qui ont reflété l'internationalisme de l'après-guerre et l'enracinement des principes universels de la démocratie, des droits de la personne et des normes de justice.

Les visions et les mouvements qui ont défini le XXe siècle étaient, pour l'essentiel, ceux de gouvernements ou, du moins, de personnes qui cherchaient à gouverner par la force ou par le droit.

Aujourd'hui, toutefois, l'art de gouverner ne se définit plus en fonction des seules forces politiques traditionnelles. Les concepts sur lesquels reposait notre vision du monde au siècle dernier, et auxquels nous faisions appel pour gérer ce monde, ne peuvent répondre à certains des défis les plus pressants, ni à certaines des perspectives les plus prometteuses, qui nous attendent désormais.

Nous devons donc sortir de ces concepts.

Les forces les plus puissantes à l'œuvre aujourd'hui sont celles de l'intégration :

  • le pouvoir de la technologie;
  • le pouvoir des marchés;
  • le pouvoir des peuples, pour qui la démocratie ne se résume pas à des élections périodiques.

Nous sommes entrés dans une ère où la culture humaine est mondiale. Les idées et l'information circulent aussi facilement le long de ses synapses que les actions ou les monnaies s'échangent. Ce phénomène fait naître des réseaux axés sur le renouveau, que ce soit dans les secteurs de l'éducation, de la santé, de la protection de l'environnement ou des droits de la personne, mais il engendre aussi des réseaux de dégradation : depuis la pornographie infantile sur l'internet jusqu'au trafic des stupéfiants, en passant par les changements climatiques et la crise mondiale du VIH/sida, nous sommes confrontés à une nouvelle génération de menaces qui font fi des frontières politiques.

Avant tout, la mondialisation a le pouvoir d'inclure et de créer une interdépendance, pas seulement des économies, mais aussi des cultures, des concepts et des attentes humaines.

Tout comme les risques que présente la mondialisation, les possibilités et les réalisations qu'elle suscite doivent transcender les frontières.

Si on le résume à sa plus simple expression, l'enjeu que pose la mondialisation est celui de l'art de gouverner, aussi bien à l'échelon national que vis-à-vis les défis que nous devons relever en tant que partenaires et concurrents internationaux. Et cet art consiste à déterminer comment que nous utiliserons les outils que cette époque nous offre pour démocratiser, pour donner à nos citoyens les moyens de contrôler leur destin, pour favoriser l'apprentissage et encourager l'innovation et, plus fondamentalement, pour améliorer la qualité de vie de chacun.

J'estime qu'au Canada, nous sommes prêts à relever ce défi, à la fois parce que nous sommes une société qui apprécie hautement la diversité et la tolérance, et parce que nous avons une économie vigoureuse qui a été transformée par la révolution technologique. Nous savons que, pour instaurer une société juste et prospère, nous devons être capables de combiner ces attributs, chez nous et dans nos alliances au sein de la communauté internationale.

J'aimerais vous présenter le nouveau visage du Canada et vous parler d'un nouvel internationalisme dont nous avons besoin pour que le monde fonctionne mieux.

Le nouveau visage du Canada

En tant que nation, nous avons bien grandi. À nos cultures d'origine - celles de la Grande-Bretagne, de la France et des peuples autochtones du Canada - nous avons ajouté la diversité et la richesse de sociétés du monde entier. Dans le Canada multiculturel d'aujourd'hui, quelque 43 % de la population a des racines ethniques ailleurs que dans nos trois cultures fondatrices. En fait, plus de la moitié des cinq millions d'habitants que compte Toronto se considèrent comme appartenant à des minorités ethniques ou raciales.

Chaque année, 220 000 personnes environ viennent s'établir au Canada et choisissent le modèle socio-économique que nous offrons et qui est unique en Amérique du Nord - un modèle qui est tout à fait nord-américain pour ce qui est de la conduite des affaires, mais qui englobe des valeurs sociales plus proches de celles de l'Europe.

Mais il est un autre Canada que nous voulons faire connaître au reste du monde, soit le Canada qui est un leader mondial dans la nouvelle économie, qui est à la fine pointe de l'innovation technologique et qui est en train de devenir le pays le plus branché de la planète. Un pays dont l'économie est véritablement une économie du savoir.

Le Premier ministre Blair a salué cette autre réalité canadienne le mois dernier, à Ottawa, lorsqu'il a qualifié le Canada - en termes certes flatteurs, mais non pas excessifs, croyons-nous - de « plaque tournante de la haute technologie dans l'économie mondiale ». Si seulement tout le monde était aussi bien informé que votre Premier ministre! Une enquête réalisée l'an dernier aux États-Unis a montré que la plupart des Américains croient que le Canada exporte principalement des joueurs de hockey et de la bière! Il arrive trop souvent que les images de caribous, de police montée et de montagnes font oublier les autres attributs du Canada.

Nous ne sommes pas le seul pays qui soit prisonnier de clichés et de perceptions erronées au sujet de ses capacités technologiques. La plupart des gens, même dans les pays industrialisés, ne savent pas que le téléphone n'a pas été inventé par les Américains ou que l'un des premiers ordinateurs programmables a été mis au point par un jeune postier britannique pendant la Seconde Guerre mondiale.

La réalité devrait parler d'elle-même, car les faits en ce qui concerne le nouveau Canada sont clairs :

  • Le secteur des technologies de l'information et des communications est celui qui croît le plus rapidement au Canada. Aujourd'hui, moins du tiers de nos exportations sont à base de richesses naturelles.
  • Nos concentrations technologiques sont à la fine pointe de l'innovation dans de nouveaux secteurs de haute technologie dynamiques comme la technologie des données optiques.
  • Les activités du secteur tertiaire qui font appel aux nouvelles technologies - finances, ingénierie, médias, conception de logiciel - représentent aujourd'hui les deux tiers de notre économie nationale.
  • En l'an 2000, nous avions le deuxième taux de croissance au sein du G-7, après avoir été en première place en 1999.
  • Malgré les difficultés actuelles aux États-Unis, nos indicateurs économiques de base sont solides, et nous enregistrons, pour la cinquième année consécutive, un excédent budgétaire. Grâce à des politiques budgétaires bien raisonnées et à des investissements socio-économiques judicieux, le Canada a les moyens voulus pour affronter un ralentissement économique.

Pour vraiment comprendre le Canada au XXIe siècle, cependant, il ne faut pas s'arrêter à la seule performance économique. Il faut aussi nous comprendre le contexte de notre relation prédominante, c'est-à-dire nos rapports avec les États-Unis.

Nos relations avec les États-Unis sont primordiales. Les réalités politiques et économiques et les impératifs de la sécurité font qu'il en sera toujours ainsi. Les échanges bilatéraux se chiffrent à présent à 1,3 milliard de dollars américains par jour. En raison de notre proximité géographique et du volume même des échanges, il y aura toujours des problèmes, mais il sera toujours essentiel pour notre prospérité et nos progrès communs de savoir les gérer.

Par ailleurs, il faut aussi signaler que, de plus en plus, notre perspective sur les États-Unis, de bilatérale devient nord-américaine, voire interaméricaine. Au cours des cinq premières années de l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), nos échanges commerciaux avec les États-Unis ont augmenté de 80 % et avec le Mexique, de 100 %. Nous nous efforçons, dans le cadre du processus du Sommet des Amériques, d'élargir cette prospérité à l'ensemble du continent. Le mois prochain, le Canada accueillera les 34 chefs d'État et de gouvernement démocratiquement élus des Amériques afin de poursuivre cet objectif et de promouvoir aussi ces corollaires que sont le renforcement de la démocratie, la réalisation du potentiel humain et l'élargissement de la prospérité aux 800 millions d'habitants de notre région, notamment par l'instauration de la Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA).

Notre situation géographique nous oblige à mieux définir notre identité dans les Amériques, mais nos liens avec l'Europe restent vigoureux. De part et d'autre de l'Atlantique, des changements fondamentaux sont en cours. L'Union européenne continue d'évoluer et d'ouvrir ses rangs. L'Amérique du Nord s'achemine vers une plus grande intégration économique.

Le Canada et le Royaume-Uni partagent une perspective qui leur est propre sur ces transformations. Le Canada est plus européen que les États-Unis et que ses autres partenaires du continent américain, et le Royaume-Uni est plus tourné vers l'Amérique que ne l'est le reste de l'Europe. Qu'il s'agisse du dialogue économique ou des relations de défense et de sécurité, nous sommes dans une position particulière, avec toutes les possibilités que cela suppose, non seulement bilatéralement mais aussi, sur une échelle plus vaste, en ce qui concerne nos intérêts mondiaux.

Les investisseurs canadiens sont de plus en plus nombreux à s'établir en Grande-Bretagne, qui leur sert de tremplin vers les marchés européens. Nos investissements au Royaume-Uni sont passés de 14 à 23 milliards de dollars au cours des trois dernières années. L'inverse, cependant, n'est pas vrai, puisque les investissements britanniques au Canada, même s'ils sont importants, ne bougent guère. Le fait est que vos entreprises laissent échapper une occasion importante de se positionner en Amérique du Nord en passant par le Canada.

Une étude après l'autre démontre que le Canada offre un des climats d'investissement les plus favorables du monde. Pourquoi choisir le Canada? À part la solidité des indicateurs économiques de base et les avantages évidents qui découlent de notre situation géographique, le Canada possède d'autres atouts par rapport à ses concurrents. Il dispose d'un bassin important de travailleurs qualifiés et éduqués et d'un environnement technologique solide. Le coût de la vie y est le plus faible des pays du G-7. Les dépenses en recherche-développement (R-D) sont en train de doubler et le Canada a le crédit d'impôt à la R-D le plus généreux de tous les pays de l'OCDE. Le taux d'imposition sur les sociétés y est maintenant inférieur à celui des États-Unis. Enfin, des politiques sociales évoluées et un environnement social stable valent au Canada d'être en tête de l'indice du développement humain des Nations Unies depuis sept années consécutives.

Nous apprécions trop nos partenaires britanniques pour ne pas vouloir qu'ils profitent eux aussi de ces avantages.

Nous voulons aussi en faire plus et mieux en Europe. Le Canada est l'un des huit pays au monde qui ne bénéficient pas d'un accès préférentiel au marché de l'UE, et nos relations commerciales sont trop souvent assombries par des différends et des sujets de friction. Dans son allocution au Parlement canadien, le Premier ministre Blair nous a mis au défi de nous donner pour objectif d'instaurer le libre-échange. Nous convenons que nous devons étudier sérieusement toutes les options susceptibles de libéraliser davantage les échanges transatlantiques et même d'instaurer un régime de libre-échange si possible, que ce soit au niveau régional ou à l'échelle multilatérale, sous les auspices de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).

Mais il y a aussi un argument politique majeur qui nous incite à faire en sorte que ce vaste réseau mondial fonctionne efficacement : l'enjeu est trop important pour la communauté transatlantique et pour le monde entier.

Relations transatlantiques

Nos liens transatlantiques sont essentiels, pas seulement sur le plan économique mais aussi pour notre sécurité et notre prospérité sociale communes. Lorsque nous collaborons, le monde fonctionne mieux. Quand nous n'y parvenons pas, les progrès tardent trop souvent à se manifester et ce, au détriment de la communauté mondiale toute entière.

Le Premier ministre Blair a parlé avec éloquence de ce lien le mois dernier, déclarant que « lorsque l'on fait front commun, de part et d'autre de l'Atlantique, la planète est plus sûre, plus stable et plus prospère ». Il en est ainsi depuis longtemps, non seulement en temps de guerre, mais aussi en tant de paix, quand nous unissons nos efforts dans la construction d'une nouvelle architecture internationale qui a donné au monde les Nations Unies, les institutions de Bretton Woods, le GATT [Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce] et l'OMC, et l'OTAN.

Coopération canado-européenne en matière de sécurité

Notre appartenance à l'OTAN reste la pierre angulaire de notre relation de sécurité et de défense avec l'Europe, tout comme l'OTAN reste la base de la sécurité et de la défense au sein de l'Europe. Cette relation découle du fait que nous savons que notre propre liberté et notre propre sécurité sont étroitement liées à celles de l'Europe. Il y a même un monument sur Pall Mall à la mémoire du million de soldats canadiens qui ont été stationnés en Grande-Bretagne pendant les deux guerres mondiales.

Depuis un demi-siècle, notre coopération en matière de sécurité a pris de multiples formes, reflétant l'évolution constante de l'Europe elle-même. Nous sommes ensemble sur les lignes de front dans les Balkans, et nous travaillons ensemble dans des opérations de maintien de la paix des Nations Unies à travers le monde.

Le Canada se félicite de l'adoption d'une Politique européenne de défense et de sécurité. Cependant, avec la constitution d'une force européenne d'intervention rapide, l'OTAN et l'UE devront veiller à collaborer étroitement sur divers problèmes de sécurité et de défense. Pour sa part, le Canada est heureux du lancement de consultations trimestrielles avec l'UE sur la sécurité et la défense. C'est avec plaisir que nous nous attaquerons à la tâche de définir les modalités de la participation canadienne à de futures opérations de maintien de la paix menées sous l'égide de l'UE.

Pour un monde meilleur

Bien sûr, la coopération transatlantique ne doit pas se limiter strictement aux frontières géographiques. Nous devons aussi en faire une force dynamique pour marquer des points sur toute la gamme de nos intérêts communs, que ce soit aux Nations Unies, au G-8, au Commonwealth ou à l'OMC.

Nous devons encourager, dans la conduite des relations internationales, une culture de l'innovation, tout comme nous le faisons dans le domaine commercial et dans le domaine scientifique et technologique. Il faut mettre en place de nouvelles approches qui correspondent aux besoins d'une ère nouvelle; il faut, par exemple, favoriser une transparence accrue et une meilleure application des technologies de l'information et des communications afin de mieux informer nos citoyens et d'engager un dialogue avec eux. Nous devons également être ouverts à de nouvelles perspectives sur les problèmes mondiaux, être prêts à considérer ensemble leurs dimensions politiques, économiques, sociales et environnementales, et à tenir compte des intérêts des économies en développement ou en transition.

Nos pays peuvent exercer une influence considérable à cet égard, et ils le font.

L'alliance transatlantique présente un avantage critique, à savoir qu'elle fournit une base qui peut servir de point de départ pour réaliser un consensus avec d'autres nations du monde, tout particulièrement en ces temps où une nouvelle génération d'acteurs importants joue un rôle de plus en plus important sur la scène mondiale.

Inévitable, l'apparition de nouveaux centres de pouvoir dans les pays en développement a même tardé à se manifester. Un dialogue élargi avec ces pays est essentiel - un dialogue constructif, qui n'empêche pas des désaccords ou des critiques justifiées, mais qui reste le moyen le plus efficace de mieux se comprendre et d'élargir l'influence des normes et des valeurs universelles.

Nous l'avons fait avec la Chine et nous le ferons bientôt avec l'Inde. Tout en continuant de demander à l'Inde de renoncer à son programme d'armes nucléaires, nous en sommes venus à la conclusion que, pour mener un réel dialogue, nous devons maintenir des rapports avec elle de tous les secteurs qui intéressent le Canada et ce, à tous les niveaux. L'Inde est une démocratie vigoureuse abritant le sixième de l'humanité, et son économie en pleine croissance est de plus en plus intégrée à l'économie mondiale.

Nos institutions internationales doivent se réorienter par rapport à ces nouvelles réalités et veiller à tenir compte, dans leurs priorités, des besoins les plus pressants de l'humanité toute entière, ce qui commence souvent dans les régions pauvres et déchirées par des conflits.

Nous nous efforçons de relever ce défi de diverses façons.

Le G-8 a consolidé son leadership en s'attaquant à des problèmes mondiaux, tant pour le bien de nos citoyens que pour celui de la communauté mondiale. Le Canada et la Grande-Bretagne travaillent en étroite collaboration, et efficacement, au sein du G-8, notamment pour ce qui est de la définition d'un nouveau rôle pour celui-ci dans la prévention des conflits. Lors du Sommet de Gênes qui aura lieu cette année, et jusqu'en 2002, année où le Canada présidera le G-8, nous aurons à coeur de poursuivre cette initiative et d'autres actions communes, telles que le programme de connectivité, l'allégement de la dette des pays les plus pauvres et la lutte contre les maladies très infectieuses.

Le Groupe des Vingt (G-20), qui a été créé par le G-8 en 1999 en réponse à la crise financière asiatique, et que mon collègue le ministre des Finances du Canada a l'honneur de présider, est une autre manifestation importante de cet internationalisme de la « prochaine génération ». En encourageant une politique de stabilité et de réforme sur les marchés financiers internationaux, le G-20 montre l'exemple en intégrant dans ses priorités économiques générales un volet lié à l'infrastructure du développement. Si l'on ajoute à cela que ses membres forment un groupe équilibré de pays développés et de nations en développement, le G-20 est une des institutions les plus pertinentes de notre époque.

Le caractère innovateur de la politique étrangère englobe également notre optique vis-à-vis la substance même des problèmes de notre époque, et non pas seulement les institutions qui servent à les gérer.

Sécurité humaine

En concentrant nos efforts sur la qualité et la sécurité des vies humaines au lieu de mettre l'accent sur les intérêts géopolitiques traditionnels, nous avons pu accomplir des progrès importants dans la réalisation des priorités internationales concernant la sécurité humaine, notamment par rapport à des problèmes qui paraissaient insolubles.

La Convention d'Ottawa, qui interdit la production et la vente de mines antipersonnel, est entrée en vigueur à peine 15 mois après avoir été ouverte à la signature, ce qui représente sans doute un record dans le droit international moderne. Elle condamne le recours à ces armes dans le monde entier et contribue à réduire les souffrances qu'elles causent. Ces souffrances restent encore trop élevées, et nous devons maintenir la détermination de la communauté internationale à mettre fin à la terreur que sèment les mines terrestres.

Cette approche axée sur la personne humaine a également aidé à rallier les appuis nécessaires à la création de la Cour pénale internationale. Lorsque le statut de Rome entrera en vigueur, la Cour deviendra un instrument critique pour mettre fin à la culture de l'impunité dont jouissent ceux qui se rendent responsables de graves atteintes au droit international humanitaire, y compris en maltraitant les combattants et les civils dans des situations de conflit. Mais c'est là un domaine où la communauté transatlantique n'a pas encore trouvé un consensus, et il faudra répondre aux préoccupations relatives à la souveraineté pour que cette institution essentielle puisse commencer à travailler.

La sécurité humaine a également une dimension économique importante, à mon sens. La justice sociale et la prospérité économique n'avancent pas toujours au même rythme, mais il importe qu'elles ne soient jamais très éloignées l'une de l'autre. Toutes deux reposent sur l'idée que des sociétés progressistes et des économies prospères doivent privilégier le respect de la primauté du droit. Les structures et les processus qui favorisent des échanges commerciaux ouverts et équitables s'inspirent des mêmes principes de gestion publique qui protègent les droits de la personne et permettent aux êtres humains de réaliser tout leur potentiel sans être exposés à la persécution ou à la discrimination.

Les liens entre les intérêts économiques, sociaux et politiques sont de plus en plus étroits. Le développement économique favorise la stabilité, tandis que les échanges commerciaux encouragent la compréhension, la tolérance et l'exploitation des possibilités entre les cultures. Mais surtout, le commerce est plus florissant dans une société libre et un environnement politique stable et transparent.

Nous pouvons, et nous devons, poursuivre ces objectifs de façon cohérente et coordonnée.

Technologie, développement et démocratie

On s'intéresse davantage depuis quelques années aux liens entre la technologie, le développement et la démocratie. L'an dernier, au Sommet du Millénaire des Nations Unies, un grand nombre de leaders de la communauté mondiale, y compris le Premier ministre du Canada, ont exprimé leur vive inquiétude devant le « fossé numérique » qui ne cesse de se creuser entre les pays riches et les pays pauvres.

Or, plus qu'un manque de richesses, ce fossé est un déficit croissant au chapitre des connaissances, qui se traduit par un déficit du point de vue des chances de progresser.

Dans des pays comme le Canada et le Royaume-Uni, les citoyens n'ont jamais eu autant de moyens à leur disposition qu'aujourd'hui, grâce à l'accès à l'information et à la possibilité de se brancher sur l'internet, de faire entendre son point de vue et de tirer parti des débouchés qu'offre la nouvelle économie. Au Canada, nous avons fait de la connectivité une priorité nationale. Dans le cadre du programme « Un Canada branché », nous avons déjà relié toutes les écoles et les bibliothèques publiques du pays à l'internet, et tous les grands services publics seront en ligne d'ici 2004. Avec les États-Unis et la Scandinavie, le Canada a le taux le plus élevé au monde pour ce qui est de l'accès à l'internet à domicile.

C'est là une réussite remarquable, mais le contraste n'en est que plus frappant avec les nombreuses régions du monde qui n'ont pas encore accès à ces outils qui ouvrent tant de possibilités. À l'heure actuelle, la moitié des habitants de la planète n'ont jamais utilisé le téléphone, tandis que l'autre moitié se sert du téléphone cellulaire pour faire des opérations boursières sur l'internet. Il y a plus de téléphones à New York que sur tout le continent africain. Et si le commerce électronique est une industrie de plus de 200 milliards de dollars dans les pays de l'Ouest, moins de 1 % de la population du tiers-monde a accès à l'internet.

Il faut absolument combler ce fossé numérique. Le groupe de travail du G-8 sur l'expansion de l'accès au numérique a été créé au Sommet d'Okinawa afin de veiller à ce que tous les êtres humains puissent avoir accès aux bienfaits rattachés aux technologies de l'information et des communications. De même, le Commonwealth, qui compte des membres des deux côtés du fossé numérique, se sert du programme « Commonwealth of Learning » pour améliorer l'accès à l'éducation au moyen des techniques de télé-enseignement. Le Commonwealth étudie également les moyens de promouvoir une utilisation accrue des technologies de l'information et des communications, notamment dans les pays membres moins développés et de plus petite taille.

Le Canada et d'autres pays ont aussi mis en place des programmes visant à transférer aux pays en développement les compétences nécessaires pour exploiter le potentiel des nouvelles technologies. Ainsi, dans le cadre de notre programme « Cyberjeunes », des centaines de jeunes stagiaires canadiens formés en technologie aident les pays les plus pauvres du monde à raccorder des écoles et des petites entreprises à l'internet.

Démocraties axées sur la participation : le rôle de la société civile

Les technologies et les possibilités de l'ère de la mondialisation ont également des répercussions importantes sur le rôle et les attentes de la société civile. Le public revendique de plus en plus le droit d'être informé et de prendre part à un dialogue sur les grands enjeux de notre temps.

Au Canada, nous nous sommes engagés à promouvoir l'ouverture et la transparence dans les activités du gouvernement. La participation des citoyens est essentielle pour informer et légitimer la prise de décisions. Nous organisons de vastes consultations avec le public, y compris avec les entreprises, les ONG et les groupes de citoyens, sur presque tous les aspects de la politique nationale, ce qui inclut la politique étrangère et la politique commerciale.

Cette voie n'est toutefois pas toujours facile à suivre. Le droit d'exprimer son désaccord, notamment par des manifestations publiques, est un des principes de base de notre société démocratique libérale. Mais ce droit n'autorise pas à recourir à la violence ni à paralyser les gouvernements et les organisations internationales dans leurs tâches légitimes. Toutes les parties au débat ont le même intérêt vital à veiller à ce que l'objectif supérieur recherché par tous - qui est de dialoguer davantage pour bâtir des sociétés plus vigoureuses, plus saines et plus justes - ne soit pas diminué par le spectacle médiatique des confrontations. C'est là un défi constant.

Conclusion

Les forces de la mondialisation, parfois vilipendées, parfois portées aux nues, représentent des influences capables de transformer qui sont la conséquence inévitable des technologies modernes de l'information et des communications. Le défi que doivent relever les gouvernements consiste à trouver les moyens d'orienter ces forces de façon à améliorer la condition humaine.

Je suis convaincu que les outils essentiels à la gestion démocratique des sociétés modernes - la technologie, l'adhésion à des valeurs communes comme la justice, la tolérance, le respect des droits de la personne et la primauté du droit - créent les conditions capables de transformer notre univers complexe et de moins en moins épars en un monde meilleur - un monde où l'interdépendance est une réalité de plus en plus immédiate pour chacun d'entre nous.

Merci.


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Dernière mise à jour : 2006-10-30 Haut de la page
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