DISCOURS
M. PETTIGREW - ALLOCUTION DEVANT L'ASSOCIATION CANADIENNE DES IMPORTATEURS ET EXPORTATEURS - LE COMMERCE, L'OMC ET LA SÉCURITÉ ÉCONOMIQUE DU CANADA - TORONTO (ONTARIO)
2001/31 SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS
NOTES POUR UNE ALLOCUTION
DE
L'HONORABLE PIERRE PETTIGREW,
MINISTRE DU COMMERCE INTERNATIONAL,
DEVANT
L'ASSOCIATION CANADIENNE DES IMPORTATEURS
ET EXPORTATEURS
LE COMMERCE, L'OMC
ET LA SÉCURITÉ ÉCONOMIQUE DU CANADA
TORONTO (Ontario)
Le 22 octobre 2001
(8 h 40 HAE)
Introduction
J'aimerais remercier l'Association canadienne des importateurs et exportateurs de m'avoir invité. Je suis très
heureux d'être ici aujourd'hui, d'abord et avant tout parce que c'est à Toronto que la plus grande partie de
l'activité commerciale du Canada commence ou se termine et, deuxièmement, parce qu'il y a des questions
très importantes dont il faut débattre et que c'est une excellente instance pour le faire.
L'Association canadienne des importateurs et exportateurs est une importante organisation nationale qui a une
longue histoire. De fait, je veux vous féliciter à l'occasion de votre 70e congrès annuel. Je sais que vos
membres s'en remettent à vous pour obtenir des informations sur les douanes canadiennes et sur notre
politique commerciale, ainsi que pour faire des représentations auprès du gouvernement, et c'est un de vos
objectifs clés que d'aider les importateurs et exportateurs du Canada à demeurer rentables et compétitifs sur le
marché mondial. Je vous rends hommage, à vous et à vos membres, pour vos efforts constants et j'espère que
le présent congrès de trois jours se révélera très fructueux.
Reconnaître le nouveau contexte
Si vous me le permettez, j'aimerais commencer en situant le contexte de nos discussions. Manifestement, le
contexte est nouveau. Vous le savez, vous y êtes confrontés tous les jours. Les événements tragiques du
11 septembre ont envoyé une onde de choc dans le monde entier.
En ce jour fatidique, en l'espace de quelques moments, un message brutal incitant à la réflexion nous a été
livré à tous, soit que le terrorisme est un problème mondial et qu'aucun pays n'en est à l'abri. Ébranlés devant
l'ampleur à la fois de la tragédie humaine et du crime, les Canadiens en sont ressortis avec une prise de
conscience avivée du fait que le monde est un endroit moins sûr.
Nous avons découvert en un instant que notre sécurité même était mise à l'épreuve et que nos institutions et
nos valeurs étaient attaquées par des forces qui étaient disposées à prendre des moyens sans précédent pour
déstabiliser et terroriser nos sociétés.
Ne vous méprenez pas : cette tragédie a effectivement touché des peuples de tous les pays. Abstraction faite
de l'impact psychologique sur chacun de nous, lorsque nous examinons la liste des victimes, nous y trouvons
des gens de plus de 60 pays différents, représentant une multitude de nationalités et de religions différentes
dont, je tiens à le mentionner, 500 musulmans.
Devant une violence aussi ignoble, nous vivons toujours des sentiments mêlés de douleur, de colère et
d'inquiétude. Ces événements et cette nouvelle prise de conscience ont changé notre façon de voir, notre
orientation et nos priorités.
Nouvelles priorités -- Faire face au terrorisme et assurer la sécurité
La garantie de la sécurité des citoyens et la lutte permanente contre la menace du terrorisme se sont
instantanément retrouvées à la tête de la liste des priorités de tous les gouvernements. Traduire en justice les
responsables des attaques est, bien évidemment, un grand aspect de cette problématique. De ce fait, nous
avons maintenant une large coalition militaire internationale dont le Canada est un partenaire très important.
D'ailleurs, avec le déploiement de 2 000 soldats, d'un groupe opérationnel naval se composant de nombreux
navires et hélicoptères, le soutien à la surveillance et à l'aérotransport que doit assurer la force aérienne, et
avec la participation d'une composante de notre force spécialisée, le Canada est le troisième pays à contribuer
à cette force internationale, tout juste derrière les États-Unis et la Grande-Bretagne.
Mais les Canadiens ont également des raisons d'être fiers de notre contribution non militaire. Entre autres
choses, nous prodiguons une assistance humanitaire en faveur des Afghans déplacés et un soutien au
Pakistan au moyen de la conversion de près d'un demi-milliard de dollars de dettes pour financer le
développement social.
Les initiatives antiterroristes du Canada
Pour préserver et rehausser la sécurité du Canada, le gouvernement du Canada a agi avec célérité sur divers
fronts. Nous avons pris d'importantes mesures nouvelles pour combattre le terrorisme et les activités terroristes
ici et à l'étranger.
L'une d'elles est le dépôt de larges propositions législatives dans la Loi antiterroriste. Celles-ci visent les
organisations terroristes et elles aideront le gouvernement à relever les défis extraordinaires que pose le
terrorisme. L'ensemble :
• prévoit des mesures pour identifier, poursuivre, condamner et châtier les groupes terroristes;
• fournit de nouveaux instruments d'enquête aux organismes d'application de la loi et de sécurité nationale;
• garantit que les valeurs canadiennes de respect et d'équité seront préservées et qu'on s'attaquera aux
causes profondes de la haine au moyen de lois plus rigoureuses contre les crimes motivés par la haine et la
propagande haineuse.
Ces mesures sont un volet important de notre Plan antiterrorisme doté de 280 millions de dollars -- un plan qui
porte à 1,8 milliard de dollars le montant que le gouvernement du Canada a investi dans les services policiers,
la sécurité et le renseignement depuis le budget de l'an 2000. Simplement en guise de rappel, ces nouvelles
initiatives font suite aux mesures déjà adoptées pour protéger les Canadiens. Par exemple :
• La GRC [Gendarmerie du Canada] et le SCRS [Service canadien du renseignement de sécurité] oeuvrent de
concert avec des enquêteurs internationaux pour traquer et capturer les terroristes et détruire leurs réseaux.
• Les postes frontaliers du Canada demeurent en état d'alerte élevé.
• Les mesures de sécurité visant les personnes qui voyagent par avion ont été renforcées.
• Les actifs d'Oussama ben Laden ou de ses associés au Canada ont été gelés.
• Nous avons mis en oeuvre de nouveaux règlements rigoureux visant la répression du financement du
terrorisme.
• Le Parlement étudie un projet de loi déposé le printemps dernier qui renforcera le filtrage des immigrants et
des réfugiés, en plus d'entraver la capacité des terroristes de recueillir des fonds au Canada.
Les répercussions économiques du 11 septembre sont un autre aspect du problème auquel doivent faire face
non seulement les gouvernements, mais aussi les entreprises dans le monde entier. L'économiste en chef de
la Banque mondiale, Nick Stern, a récemment confirmé que les attaques aux États-Unis ont eu des
conséquences à l'échelle mondiale.
M. Stern estime que les attaques terroristes et les reculs qui ont suivi dans les domaines du commerce, de
l'investissement transfrontalier et des cours des produits de base, retireront en moyenne 1 p. 100 au taux de
croissance des pays en développement en 2002. Cela met en évidence l'ampleur des dégâts que connaît
l'ensemble du tiers monde en raison des actions des terroristes.
À la lumière des récentes réalités mondiales, le présent forum et nos discussions revêtent une importance
encore plus grande.
D'après mon expérience, nombreux sont ceux qui se sont interrogés, particulièrement en ce qui a trait à deux
choses. Premièrement, la mesure dans laquelle tout cela peut avoir des incidences sur nos relations
commerciales avec les États-Unis. Deuxièmement, les incidences pour l'OMC [Organisation mondiale du
commerce] et ses prochaines négociations relatives au lancement éventuel d'un nouvel cycle.
Le Canada et les États-Unis -- Le traitement de questions frontalières pressantes
Peu de Canadiens sont au courant des détails quotidiens de notre commerce par-delà notre longue frontière
avec les États-Unis. Mais les engorgements soudains et graves à la frontière ont été une des répercussions de
la tragédie du 11 septembre. Les gens et les produits ont été retardés pendant que nous nous attaquions aux
préoccupations en matière de sécurité. La certitude que les camions traverseraient la frontière, que les
investissements continueraient de circuler et que les échanges commerciaux se feraient a été soudainement
moins grande.
Des usines ont temporairement marché à vide. Des produits destinés aux consommateurs se sont enlisés dans
de longues files d'attente. On a montré des images de camions et de personnes attendant de traverser la
frontière au journal télévisé du soir. Des emplois étaient en jeu.
Jusqu'à ce moment-là, les Canadiens en étaient venus à tenir pour acquis que le commerce et l'investissement
se feraient sans encombres, sans entraves déraisonnables. Subitement, notre sentiment d'autosatisfaction a
été ébranlé.
Nous avons découvert que nous ne pouvions plus être certains que la frontière demeurerait ouverte. Il nous
fallait agir, et agir rapidement, pour réduire ces retards. Notre sécurité économique en dépendait. C'est ainsi
que notre façon de gérer nos relations avec les États-Unis est devenue pour bien des Canadiens une
préoccupation immédiate et pressante étant donné les nouvelles exigences à la frontière.
Le Canada et les États-Unis ont, et ce depuis plus de 130 ans, la plus longue frontière non défendue dans le
monde. Aucun autre groupe de deux pays dans le monde n'a des économies plus interdépendantes et des
sociétés plus étroitement reliées. Malgré tout cela, après le 11 septembre, la sécurité devenant de manière
compréhensible l'inquiétude primordiale, une des questions posées le plus fréquemment était la suivante :
« Les États-Unis deviendront-ils plus isolationnistes? »
De nombreuses personnes au Canada ont craint que nous ne nous retrouvions de l'autre côté d'une clôture
que le gouvernement américain se sentirait dans l'obligation d'ériger pour protéger ses citoyens. Mais, s'il faut
certainement prêter attention à la frontière, notre inquiétude doit être modérée par quelques faits.
Le plus important de ces faits est que le Canada et les États-Unis ont de longs antécédents de bonnes
relations auxquelles ni l'un ni l'autre n'est disposé à renoncer. Nos relations sont sans pareilles. Outre nos
similarités sociales et culturelles, nous sommes les plus importants clients l'un de l'autre, et de loin. Plus de
80 p. 100 de nos exportations sont destinées aux États-Unis et plus de 25 p. 100 de leurs exportations
prennent le chemin du Nord vers le Canada. Chaque année, plus de 200 millions de personnes franchissent la
frontière entre nos deux pays.
Donc, on peut facilement comprendre pourquoi il fallait agir rapidement pour assurer la sécurité et la protection
du public, tout en continuant de faciliter des échanges quotidiens d'une valeur avoisinant 2 milliards de dollars.
À la frontière, nous avons oeuvré de concert avec les États-Unis pour conférer un élément de certitude aux flux
commerciaux qui sont si importants pour notre mode de vie. Et nous continuerons de le faire. Je suis ravi de
constater que les mesures que nous avons prises ont contribué au rétablissement des courants commerciaux
qui avaient été interrompus ou retardés.
Les mesures de sécurité et d'antiterrorisme que j'ai exposées plus tôt témoignent de notre détermination de
protéger les Canadiens. Elles livrent aussi le message suivant à nos partenaires américains : une approche
commune de la sécurité à la frontière signifie que la frontière demeure ouverte pour le commerce, mais fermée
à la terreur. Ces mesures peuvent vous inspirer confiance à vous, les importateurs et exportateurs, qui
dépendez de l'existence d'une frontière ouverte pour une part si importante de votre succès. Ces mesures
peuvent en outre inspirer confiance aux investisseurs actuels et potentiels. Nous sommes également tout à fait
déterminés à faire en sorte que notre frontière demeure un modèle pour le monde.
Dans les mois qui viennent, alors que nous continuerons d'examiner de nouveaux moyens de renforcer la
sécurité à nos frontières, dans nos aéroports et dans l'ensemble de la société, il faudra que nous atteignions
nos objectifs sans nous replier derrière nos frontières respectives et sans mal comprendre la nature et
l'ampleur de la menace.
Nous, les entreprises et le gouvernement, devons oeuvrer en partenariat pour renforcer la confiance de vos
clients, fournisseurs et investisseurs américains ainsi que des législateurs américains. Le message à livrer est
que le Canada est le partenaire commercial le plus sûr et le plus fiable des États-Unis, à tous les égards. Nous
entretenons une relation unique en son genre avec les États-Unis, une relation que nous cherchons à
maintenir, et que le gouvernement du Canada maintiendra.
Bien entendu, les législateurs et les citoyens américains souhaitent que leurs frontières soient aussi sûres que
possibles. La sécurité économique exige la sécurité nationale. Nous comprenons cela. Notre message doit être
que le Canada a agi rapidement, et sans hésitation, pour s'assurer que son partenariat avec les États-Unis
signifie une sécurité commune ainsi que des engagements économiques communs. Ils vont de pair. Notre
longue frontière est un point de transit pour le commerce, et non pour la terreur.
Je tiens à vous donner l'assurance que tout en poursuivant nos travaux avec nos partenaires américains, les
décisions que nous prendrons ne seront pas seulement réactives, mais continueront de contribuer à des
relations commerciales vigoureuses et essentielles.
Importance du lancement fructueux d'un nouveau cycle
Cela m'amène à traiter de l'autre question qu'on m'a posée si fréquemment récemment, soit quelles sont les
perspectives du lancement fructueux d'un nouveau cycle à la prochaine Réunion ministérielle de l'OMC. À mon
sens, il est clair, plus qu'il ne l'a jamais été, que l'économie mondiale a besoin du stimulant que fournirait un
nouveau cycle de négociations multilatérales.
Nous ne devons pas oublier que l'architecture économique internationale dont nous dépendons tous, y compris
les institutions de Bretton Woods et le GATT [Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce] -- qui est
devenu l'OMC --, a été édifiée en grande partie suite aux grandes guerres du dernier siècle afin de contribuer à
la création de la prospérité qui prévient et empêche la violence et la guerre.
Nous ne saurions permettre au terrorisme d'ébranler ce système. Nous ne saurions laisser les terroristes nous
détourner de notre objectif fondamental qui consiste à mettre en place les fondements de notre prospérité
future. Si nous le faisions, nous renoncerions au but même d'institutions comme l'OMC.
Même avant le 11 septembre, nombreux étaient ceux qui se demandaient si les membres de l'OMC
réussiraient dans leur effort de s'entendre sur le lancement d'un nouveau cycle de négociations commerciales
mondiales. Dans les faits, ils demandaient si nous allions planter les germes de la prospérité future ou si nous
allions échouer comme nous l'avions fait à Seattle.
Les objectifs du Canada -- Notre ordre du jour réaliste
Avant de vous parler des perspectives de lancement d'un nouveau cycle, je vais rapidement passer en revue
ce que le Canada cherchera à obtenir dans celui-ci. Le Canada est en faveur de négociations sur toute une
série de questions, dont les suivantes :
• les droits de douane touchant les produits non agricoles;
• la facilitation du commerce;
• la transparence des marchés publics;
• des règles pour clarifier et renforcer les disciplines en matière d'antidumping et de subventions;
• l'amélioration du régime de règlement des différends.
Je crois et je fais valoir depuis longtemps qu'il s'agit là d'un ordre du jour réaliste pour les négociations, un
ordre du jour qui renforcerait la réalisation de progrès dans les négociations en cours qui sont d'une importance
déterminante pour ce qui est de l'agriculture et des services.
En ce qui concerne la politique de la concurrence, le Canada est disposé à entamer des négociations qui
excluent l'élaboration d'obligations assujetties au règlement des différends. S'agissant de l'investissement,
nous sommes disposés à négocier des règles mondiales si elles bénéficient du soutien de tous les membres
de l'OMC et si le droit des gouvernements de réglementer dans l'intérêt public est préservé.
Des progrès dans les négociations à l'égard de chacun de ces domaines procureraient des avantages
considérables aux entreprises canadiennes et créeraient des emplois pour les Canadiens. Nous savons que
les Canadiens peuvent rivaliser avec le monde. En fait, un rapport du Forum économique mondial sur la
compétitivité internationale publié la semaine dernière classe le Canada au troisième rang, juste derrière la
Finlande et les États-Unis, dans son évaluation générale des facteurs contribuant à une croissance
économique future. Donc, nous sommes déjà bien positionnés du point de vue de la productivité et de la
compétitivité. Avec l'élargissement des débouchés commerciaux qui pourraient résulter d'un nouveau cycle, les
possibilités qui s'offrent à nos exportateurs sont illimitées.
Le besoin de transparence
Comme bon nombre d'entre vous le savent, un autre objectif du Canada est une plus grande transparence. En
réalité, le Canada est un des principaux partisans de l'intégration dans la déclaration ministérielle d'un passage
sur la transparence et une plus grande ouverture, à la fois parmi les membres de l'OMC et entre l'OMC elle-même et le public. Nous avons proposé que les membres de l'OMC conviennent de rendre public le projet de
déclaration et ses versions subséquentes.
Selon mon expérience, nous n'avons rien à craindre d'un examen public. La décision prise plus tôt cette année
de publier nos projets de textes de négociation de la ZLEA [Zone de libre-échange des Amériques] a eu pour
effets de les démystifier et d'écarter une grande critique -- à savoir, le secret -- que certaines ONG
[organisations non gouvernementales] ont formulée par le passé. Elle a également supprimé la capacité des
détracteurs du commerce de propager des craintes à propos de ce que les textes pourraient contenir.
Perspectives d'un nouveau cycle
Donc, quelles sont les perspectives de lancement d'un nouveau cycle? Je vois des motifs d'optimisme prudent.
D'après mes discussions avec des ministres du commerce du monde entier, y compris à l'occasion d'une mini-rencontre ministérielle tenue récemment à Singapour, le soutien à un lancement s'accroît. Il est manifeste,
toutefois, que des divergences réelles persistent entre certains membres sur l'ampleur et sur le caractère
ambitieux de l'ordre du jour des négociations.
Il est tout aussi clair que de nombreux pays en développement ne sont pas encore convaincus des avantages
de nouvelles négociations. Tout compte fait, cependant, si nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir
avant notre prochaine réunion ministérielle, nous avons pris certaines mesures très positives au cours des sept
ou huit dernières semaines.
Le projet de déclaration ministérielle, que le président du Conseil général de l'OMC, Stuart Harbinson, a
distribué aux membres le 26 septembre constitue un signe tangible de nos progrès. Même si ce projet de texte
n'est pas parfait, il offre bel et bien de solides fondements en vue du lancement de négociations élargies. Une
des vertus de ce texte est qu'il compte 42 paragraphes, comparativement au texte de 34 pages que nous
avions à Seattle.
Je suis particulièrement heureux du fait que le projet de déclaration correspond aussi étroitement à l'ordre du
jour équilibré et réaliste que le Canada fait sien depuis Seattle, dont la proposition que les membres
souscrivent à des négociations sur l'investissement et la politique de la concurrence.
La prise en compte des questions liées à la croissance et au développement sera un facteur important
de réussite
Je suis satisfait aussi du fait que le projet fournit les bases du cycle de la croissance et du développement que
le Canada préconise. En réalité, il est maintenant clair que le soutien à cette idée s'est considérablement
renforcé. Le projet de déclaration ministérielle décrit le soutien des membres à l'avancée de larges objectifs
sociaux et il met en relief le rôle positif que le commerce peut jouer dans le développement durable.
À mon avis, il n'est pas tellement surprenant que le soutien à un cycle de la croissance et du développement
ait augmenté. En premier lieu, il existe un impératif moral, et je suis heureux de dire que davantage de pays se
sont ouverts à cela au cours de la dernière année, environ. Deuxièmement, pour dire les choses comme elles
sont, les aspects politiques de la situation l'exigent. Les pays en développement forment la majorité des pays
au sein de l'OMC et ils ne souscriront pas à un lancement à moins qu'ils n'aient l'impression qu'on prend leurs
préoccupations en considération.
En termes tangibles, le soutien du Canada à un cycle de la croissance et du développement signifie que nous
appuyons : une aide technique améliorée liée au commerce; une prise de décisions plus inclusive à l'OMC;
ainsi que de nouvelles négociations et des améliorations plus générales du système de l'OMC qui s'attaquent
directement au besoin qu'ont les pays en développement d'un meilleur accès aux marchés, particulièrement
dans le domaine de l'agriculture.
Le Canada reconnaît que ce qui se passe à l'OMC a des incidences directes sur les perspectives de
développement des pays et nous croyons qu'il faudrait prendre cela en considération dans nos approches de la
négociation. C'est pourquoi, par exemple, le Canada est favorable à une déclaration vigoureuse sur le rôle de
l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce et sur l'accès aux
médicaments essentiels. Cela demeure une question importante pour de nombreux pays en développement.
Il faut s'attaquer aux questions de mise en oeuvre
Notre soutien d'un cycle de la croissance et du développement signifie aussi que nous sommes favorables à la
poursuite du règlement de préoccupations légitimes au sujet de la mise en oeuvre. En réalité, la question de la
mise en oeuvre des obligations que les membres de l'OMC ont contractées pendant le Cycle de l'Uruguay
continue de peser sur nos préparatifs en vue d'un lancement.
Même si aucun autre domaine n'a fait l'objet d'autant d'attention, d'effort ou de temps, les progrès ont été lents.
La mise en oeuvre suscite de nombreuses questions sensibles et épineuses. Mais je crois que si tous les
membres, aussi bien développés qu'en voie de développement, font preuve d'un esprit de compromis et de
pragmatisme, il sera possible d'accomplir d'autres progrès.
Pour que cela se produise, cependant, les pays en développement doivent reconnaître que bon nombre de
leurs propositions sur la mise en oeuvre nécessiteraient la réouverture des accords en vigueur de l'OMC. Cela,
à son tour, aurait des incidences sur l'équilibre général que les membres ont négocié dans le cadre du Cycle
de l'Uruguay et nécessiterait donc des considérations politiques intérieures difficiles et importantes.
C'est pour cette raison que j'ai affirmé que plusieurs des questions ayant trait à la mise en oeuvre ne peuvent
être réglées hors du contexte de négociations plus larges. Si cela peut représenter une réalité politique difficile,
je crois qu'un nombre croissant de membres acceptent maintenant qu'un nouveau cycle constitue le seul
moyen concret de régler des préoccupations au sujet de l'aboutissement du dernier cycle. À n'en pas douter, il
y a eu encore d'autres preuves de mouvement à Singapour vers l'opinion selon laquelle ce n'est qu'au moyen
de négociations plus larges que nous trouverons la latitude voulue pour consentir aux compromis nécessaires
pour aborder les préoccupations et les pressions intérieures des uns et des autres.
Conclusion -- Belles perspectives pour le commerce international
En guise de conclusion, je tiens à réaffirmer que le succès du lancement d'un nouveau cycle nécessitera à la
fois un engagement politique de prendre le développement en considération et des preuves de la façon dont
nous sommes disposés à donner suite à cet engagement.
Pour obtenir un large appui de la part des pays en développement, un nouveau cycle doit mettre
vigoureusement l'accent sur la croissance et le développement, et contribuer à faire en sorte que ces pays
puissent bénéficier pleinement des avantages de l'appartenance à l'OMC et de la participation à l'économie
mondiale.
Nous savons déjà qu'un nombre croissant de pays en développement acceptent l'existence de nombreuses
preuves que les pays de leur groupe qui ont le plus progressé sur le plan économique et social sont ceux qui
ont ouvert leurs frontières au commerce. En réalité, il est maintenant très clair que la logique de l'adhésion à
l'ordre mondial s'est enracinée dans le monde entier. L'entrée longuement recherchée, et bientôt officielle, de
la Chine à l'OMC et les efforts que fait la Russie pour lui emboîter le pas sont des exemples de cette tendance.
De fait, lorsque le président Poutine a pris la parole devant l'Empire Club à Toronto en décembre dernier, il a
qualifié l'adhésion à l'OMC d'élément central et essentiel de l'action que mène la Russie pour remplir son
potentiel en qualité de membre totalement engagé de la communauté commerciale mondiale.
Nous avons en outre des études qui donnent à penser que les pays en développement bénéficient beaucoup
plus de la réduction des droits de douane que de l'aide étrangère.
Un rapport récent réalisé pour le compte du gouvernement de l'Australie a permis de constater que la
mondialisation avait contribué à la réduction de la pauvreté mondiale au cours des 30 dernières années. Selon
le rapport, les pays affligés par la pauvreté représentent maintenant seulement 8 p. 100 de la population du
monde, comparativement à 45 p. 100 en 1970. Dans des pays comme la Chine, l'Inde, le Pakistan, le
Bangladesh et l'Indonésie, qui se sont tous ralliés à la mondialisation, les revenus ont progressé deux fois plus
vite que dans les pays développés.
Bien évidemment, les échanges commerciaux ne sont pas suffisants à eux seuls pour réduire la pauvreté, mais
nous savons aussi qu'il n'existe pas de solution sans le commerce. Ce que nous faisons à l'OMC peut
contribuer à garantir que le commerce joue son rôle.
L'objectif primordial de l'OMC devrait donc être de gérer le système commercial multilatéral d'une façon qui
épouse le rythme des changements de l'économie mondiale et offre un maximum de possibilités et d'avantages
à tous les membres, aussi bien développés qu'en voie de développement. Notre prochaine conférence
ministérielle nous donnera l'occasion d'établir une orientation collective en vue de l'atteinte de cet objectif.
Pendant que la croissance économique ralentit dans le monde entier, et que la confiance de nombreuses
personnes est ébranlée, le libre mouvement des biens et services légitimes prend encore plus d'importance.
Nous ne devrions pas laisser cette occasion nous échapper.
Je vous remercie.
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