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M. GRAHAM - ALLOCUTION DEVANT LE CHICAGO COUNCIL ON FOREIGN RELATIONS - CHICAGO (ILLINOIS)

SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS

NOTES POUR UNE ALLOCUTION

DE

L'HONORABLE BILL GRAHAM,

MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,

DEVANT LE CHICAGO COUNCIL ON FOREIGN RELATIONS

CHICAGO (Illinois)

Le 20 novembre 2003

Je vous remercie de l'immense privilège que vous me faites en m'invitant à prendre la parole devant ce Conseil, qui convie depuis fort longtemps d'éminents orateurs à venir parler des affaires étrangères. C'est aussi un grand plaisir de me trouver dans cette cité que nous considérons, dans ma ville de Toronto, comme une cité sœur mordue par le froid sur les rives d'un grand lac. Ceux qui sont dans le secret des dieux affirment que Chicago, tout comme Toronto, est un des meilleurs endroits où vivre sur ce continent. Sa diversité, son centre-ville revitalisé, ses universités renommées, ses arts et sa culture dynamiques sont autant de raisons de le croire. Les explorateurs canadiens-français Marquette et Joliette savaient certainement qu'ils avaient découvert une région prometteuse quand ils l'ont explorée pour la première fois, il y a quelque 300 ans, et nous sommes navrés, au fond, que le Canada n'ait pu conserver un peu plus de la Nouvelle-France.

Aujourd'hui, j'aimerais vous parler de nos deux pays et de la nature de notre alliance, notamment du fait qu'elle influe sur notre rôle dans le monde, au-delà de notre continent. Le Canada et les États-Unis jouent des rôles très différents sur la scène internationale, mais nous sommes, à mon avis, capables de travailler de concert à la réalisation d'objectifs communs que ni l'un ni l'autre ne peut atteindre seul. Et très peu d'autres pays réussissent à collaborer ainsi.

Le Canada a conscience des énormes responsabilités qui incombent à la seule superpuissance de la planète, autrement dit du fait qu'elle doit fournir un leadership, des ressources et des forces, si nécessaire, pour ramener la communauté internationale à de meilleures dispositions. Les Américains savent, quant à eux, que leur frontière septentrionale est sûre et qu'au-delà se trouve un pays ami d'où n'est venue aucune menace depuis 1815, un allié qui partage ses valeurs fondamentales et ses objectifs, mais qu'il les poursuit souvent comme une superpuissance ne peut le faire. Un allié qui peut défendre ces causes en s'exprimant d'une voix indépendante et largement crédible sur la scène internationale. Car, aussi important que soit notre partenariat pour la promotion de nos intérêts sur ce continent, il est tout aussi important pour nous de promouvoir nos objectifs dans le monde en général. J'estime qu'en reconnaissant ce que nous avons en commun et ce en quoi nous sommes complémentaires, nos deux pays peuvent collaborer à la prospérité et à la sécurité de la communauté internationale.

Les liens qui unissent nos deux pays touchent à presque tous les aspects de la vie de nos concitoyens. La géographie dicte notre proximité. Par le biais du NORAD [Défense aérospatiale de l'Amérique du Nord], nos pays sont partenaires dans la défense de l'Amérique du Nord. Nos autorités civiles, notre police et d'autres travaillent en étroite collaboration pour notre sécurité, pas seulement face au risque terroriste, mais aussi pour lutter contre le crime et d'autres menaces qui pèsent sur nos populations. Nous protégeons ensemble notre air, notre eau et notre faune, qui traversent tous notre frontière, tout comme le font des millions de nos concitoyens, ce que savent bien les habitants de l'Illinois avec qui nous partageons une des ressources les plus précieuses du continent : les Grands Lacs.

Si nous prenons le cas de nos relations économiques, il est évident que nous sommes l'un pour l'autre le plus important partenaire commercial. Nous savons parfaitement, au Canada, à quel point votre marché est important pour nous. Les Américains ne se rendent pas toujours compte que nous sommes votre principal marché d'exportation, autrement dit que les États-Unis vendent chaque année au Canada pour plus de 280 milliards de dollars de biens et de services. L'exemple suivant est très révélateur : chaque année, plus de marchandises traversent le seul pont Ambassador à Windsor qu'il n'est exporté de produits américains vers le Japon. Cela signifie que nous absorbons un quart des exportations américaines, soit plus que tout autre pays. En fait, les États-Unis vendent plus au Canada qu'à toute l'Union européenne.

À une échelle plus locale, l'État de l'Illinois est le quatrième marché d'exportation mondial du Canada, et le Canada est le premier marché d'exportation de l'Illinois. En fait, l'an dernier, nous avons acheté environ 32 p. 100 de vos exportations.

Cependant, les chiffres du commerce ne donnent qu'une idée de l'ensemble. En effet, s'y ajoutent bon nombre d'investissements transfrontières, ce dont je m'aperçois régulièrement dans mes déplacements aux États-Unis, quand des gens d'affaires américains me parlent des usines qu'ils possèdent dans la région de Toronto ou ailleurs dans le pays, ou quand des Canadiens me parlent, par exemple, de leurs investissements importants ici, à Chicago, dans les services financiers, le secteur des transports et le secteur manufacturier.

Par ailleurs, nous sommes aussi de plus en plus interdépendants en ce qui concerne l'énergie. Le gaz naturel et les produits du pétrole traversent nos frontières dans les deux sens, tout comme l'électricité. La grande panne de l'été dernier nous a rappelé, à nous qui habitons dans le nord-est, que cette dépendance mutuelle peut être très bénéfique, mais qu'elle présente aussi des risques importants, que l'on ne peut éviter qu'en renforçant nos relations afin de gérer cette interdépendance énergétique ensemble.

Au-delà du commerce et de l'économie, nos populations sont profondément liées. Américains et Canadiens se marient, fréquentent les universités d'un pays ou de l'autre, passent des vacances des deux côtés de la frontière, s'adonnent aux mêmes sports d'équipe, et se divertissent mutuellement comme acteurs, musiciens et auteurs. Nous sommes fondamentalement attachés à plusieurs valeurs communes. Contrairement à beaucoup d'autres nationalités, Canadiens et Américains apprécient vivement la diversité étonnante des sociétés dans lesquelles ils vivent. Nous croyons à la démocratie et à la bonne gouvernance, et nous respectons les droits de la personne. Il est donc tout naturel que nous souhaitions les mêmes choses pour nos sociétés respectives et que nous partagions une vision commune d'un monde où nous pouvons aider d'autres pays à profiter des avantages des sociétés ouvertes et démocratiques.

Depuis les terribles événements du 11 septembre, notre alliance s'est renforcée en faisant front commun à la menace terroriste. Le Canada est le principal allié naturel des États-Unis dans ce combat. Sur le front intérieur, nos relations de sécurité s'élargissent à de nouveaux domaines. Ainsi, un groupe de planification binational étudie des solutions pour coordonner les réponses de nos deux pays, non seulement à des attentats terroristes, mais aussi aux catastrophes nationales et à d'autres menaces transfrontalières. Le plan d'action en 30 points pour une Frontière intelligente nous offre les moyens d'améliorer la circulation des biens et des personnes entre nos deux pays sans compromettre nos besoins en matière de sécurité. Par là-même, d'ailleurs, nous proposons un modèle auquel bon nombre de pays commencent à s'intéresser.

Depuis quelques mois, nos gouvernements cherchent en quoi le Canada pourrait participer au système de défense anti-missiles des États-Unis, afin de mettre l'Amérique du Nord à l'abri d'une éventuelle attaque dévastatrice qui toucherait inévitablement nos deux pays.

À l'étranger, nous nous associons à vous pour essayer de construire des sociétés stables là où des terroristes trouvaient naguère refuge. Aussitôt après les attentats du 11 septembre, les Forces canadiennes se sont battues aux côtés des Américains en Afghanistan. Aujourd'hui, quelque 1 900 militaires canadiens sont déployés en Afghanistan, où leur corps dirige la Force internationale d'assistance à la sécurité [ISAF], à qui l'OTAN a donné pour mandat d'éliminer les terroristes et d'appuyer le nouveau gouvernement afghan. Ils sont épaulés dans leur mission par un programme d'aide actif qui vise à reconstituer la société afghane et à l'améliorer. Cette année, l'Afghanistan sera le principal bénéficiaire de l'aide canadienne au développement et ce, parce que le Canada s'est engagé, avec vous et avec nos alliés européens, à faire en sorte que ce pays ne constitue plus une menace pour nos sociétés, que ce soit sous la forme du terrorisme ou du fléau débilitant des stupéfiants.

Quand les États-Unis ont exprimé leur inquiétude au sujet de l'Iraq, le Canada a lui aussi souligné les dangers que représentait la menace de ses armes de destruction massive. Nous avons approuvé la décision initiale des États-Unis de porter l'affaire devant les Nations Unies. Dans les débats qui ont suivi, nous avons soutenu les États-Unis lorsqu'ils réclamaient un langage plus ferme dans la résolution 1441, mais tout en affirmant que les Nations Unies devaient nécessairement être impliquées, car le désarmement de l'Iraq par la force devait bénéficier de la plus grande légitimité internationale possible. Quand cela s'est révélé impossible, nous avons pensé qu'il était dans l'intérêt du Canada, et dans celui d'un système multilatéral si essentiel à notre paix et à notre sécurité, de ne pas faire partie de la coalition dans la guerre en Iraq.

Cependant, c'était alors. À présent, il est dans notre intérêt et dans celui du monde entier que les États-Unis et d'autres pays réussissent à aider l'Iraq à devenir une démocratie stable et pacifique. C'est pourquoi le Canada s'est engagé à verser près de 300 millions de dollars pour la reconstruction. À la récente conférence des donateurs, à Madrid, ma collègue, Mme Susan Whelan, ministre canadienne du Développement international, a nettement contribué à persuader d'autres pays n'appartenant pas à la coalition de s'asseoir à la table. Seul un autre donateur a promis plus que nous pour le Fonds d'affectation spéciale pour l'Iraq, auquel nous verserons 100 millions de dollars. De plus, nous avons déjà annoncé que le Canada enverrait des instructeurs pour former des policiers iraquiens en Jordanie. En outre, lorsque la situation locale le permettra, nous entendons toujours apporter notre concours aux chapitres de la gouvernance et du fédéralisme, ainsi que de la réforme de la police et des services correctionnels.

Les Canadiens savent que la sécurité et la prospérité du Canada et des États-Unis sont liées, non seulement ici, en Amérique du Nord, mais aussi outre-mer. Cela dit, nous pouvons souvent nous renforcer mutuellement en adoptant des approches différentes par rapport à ces objectifs communs. En fait, il est inévitable que nos approches diffèrent, car nous n'avons ni la même histoire, ni les mêmes perspectives internationales.

Le point de vue du Canada s'explique par son histoire de pays d'abord bilingue, où vivaient Français, Anglais et peuples autochtones, et à qui sont venus s'ajouter, plus récemment, des immigrants arrivés des quatre coins du monde. Notre tissu social particulier explique aussi que nos concitoyens appuient des politiques intérieures parfois différentes des vôtres, comme celles qui prévoient un contrôle général des armes à feu, un régime d'assurance-maladie national universel et la réforme du financement des campagnes électorales. Nous reconnaissons aussi actuellement la nécessité d'une non-discrimination totale dans la détermination des droits des couples homosexuels, et nous offrons même des prestations familiales qui comprennent un congé de maternité de 12 mois financé par l'État, pour ne citer que quelques exemples.

Notre position dans les affaires internationales reflète aussi notre attitude sociale différente et notre place dans le monde. Les États-Unis assument les responsabilités énormes qui incombent à la seule superpuissance de la planète. Par contraste, le Canada est une puissance moyenne riche qui, de par sa proximité et son alliance solide avec votre pays, occupe une place unique parmi les autres moyennes puissances.

Évidemment, nous avons nos propres intérêts, et nous adoptons une politique étrangère qui les sert. Dans l'immense majorité des cas, comme je l'ai dit, nos intérêts, de même que nos objectifs et nos valeurs, coïncident en fait avec ceux de votre pays. Il se peut que nous adoptions des approches différentes, mais souvent, elles sont complémentaires des vôtres parce que nous tendons si souvent vers les mêmes fins.

Les Canadiens connaissent généralement bien notre interdépendance avec le reste du monde et la nécessité de défendre nos intérêts de concert avec d'autres pays. Ils savent qu'il est primordial pour notre sécurité de lutter contre le terrorisme. Cependant, ils pensent aussi que nous ne pouvons nous permettre de nous laisser obnubiler par cette question au point d'en oublier les autres crises mondiales, comme la pauvreté, la maladie, les inégalités de l'économie mondiale, les dommages écologiques et les atteintes aux moyens de subsistance. Nous devons également tous nous sentir concernés par ces questions, notamment parce que, pour renforcer notre sécurité ici, nous devons avoir à l'étranger des amis et des alliés conscients du fait que nous nous soucions de leurs besoins urgents.

En définitive, les priorités des pays en développement coïncident, à long terme, avec nos propres besoins en matière de sécurité. Lorsqu'ils pensent à la sécurité, les Canadiens sont d'accord avec mon ami Colin Powell quand il dit que : « Le terrorisme se développe dans des régions où règnent la pauvreté et le désespoir, où les gens ne voient pas d'avenir. Nous devons montrer à ceux qui pourraient être tentés par le terrorisme qu'il existe une meilleure solution. »

Pour sa part, Kofi Annan l'a formulé ainsi : « Soit que nous aidions les laissés-pour-compte de la mondialisation par obligation morale et par pur intérêt, soit que l'avenir nous y oblige, quand leurs problèmes deviendront nos problèmes dans un monde sans frontières. »

Les Canadiens ont cette perspective à cœur. Ils sont convaincus qu'il est impossible de s'attaquer à ces problèmes mondiaux étroitement liés autrement qu'en coopération avec d'autres pays, puisqu'il s'agit de problèmes qu'aucun pays, ni même aucune coalition de pays, ne peut résoudre seul. Pour créer les conditions nécessaires à leur solution, il faut former des partenariats avec d'autres pays qui demandent, pour leur part, que leur propre perspective soit également respectée.

C'est dans cet esprit que nous avons collaboré à l'adoption du Nouveau Partenariat pour le développement de l'Afrique car nous nous efforçons de travailler de concert avec les pays africains afin d'y soulager la pauvreté et d'y instaurer les conditions nécessaires à la gouvernance. Je suis d'ailleurs fier de dire que le Canada est depuis peu le premier pays au monde à avoir adopté une loi qui lui permettra d'exporter des médicaments à prix abordable vers les pays pauvres afin de lutter entre autres contre les épidémies de VIH/sida, de tuberculose et de malaria.

Nous sommes également convaincus que, pour résoudre les problèmes mondiaux, nous devrons créer des institutions multilatérales qui coordonneront les efforts déployés par les États pour en venir à bout. Le Canada a ratifié dernièrement, ce qui est certes tard, la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. Il peut ainsi travailler de concert avec d'autres pays sur des questions d'intérêt commun en matière de gestion des ressources et d'exercice des pouvoirs en haute mer. Je suis ravi d'apprendre que votre Sénat a l'intention de nous emboîter le pas bientôt et de faire ratifier cet instrument par les États-Unis d'Amérique.

Depuis la Deuxième Guerre mondiale, le Canada travaille en collaboration avec d'autres pays pour bâtir un système international qui soit source d'avantages communs en imposant à tous des règles et des obligations, et qui nous permette d'accomplir en collaborant ce qu'aucun de nous ne peut réaliser seul. Nous sommes convaincus d'avoir ce qu'il faut pour jouer un rôle prépondérant dans les instances multilatérales, car nous ne sommes pas prisonniers de rivalités régionales et que nous ne portons pas le poids d'un passé colonial. Nous sommes donc généralement très respectés en tant que pays qui s'efforce de servir les intérêts communs de tous et, pour cette raison, nous avons pu jouer souvent un rôle unique.

En appartenant à de nombreux réseaux internationaux, le Canada peut aussi engager des efforts à bien des niveaux. Son histoire et son attachement à la langue française en font un membre de la Francophonie, et il défend les valeurs de la démocratie, les droits de la personne et la bonne gouvernance auprès des pays en développement qui partagent avec lui l'usage de la langue française. Au milieu des tensions internationales actuelles, il est particulièrement utile de pouvoir dialoguer à ce forum avec des pays musulmans modérés, comme le Maroc, la Tunisie, le Sénégal et l'Albanie. Nous appartenons aussi au Commonwealth, au sein duquel nous travaillons actuellement avec le Nigéria, l'Afrique du Sud et d'autres pays afin de trouver une solution à la gabegie imposée par Robert Mugabe au Zimbabwe.

Cela dit, le Canada sait pertinemment que les institutions multilatérales existantes ne fonctionnent pas au mieux et que leur réforme devient urgente. Il est essentiel d'améliorer les Nations Unies, notamment la composition et le fonctionnement du Conseil de sécurité, mais force est de reconnaître que les obstacles à la réforme sont de taille.

Voilà pourquoi, depuis quelque temps, nous concentrons nos efforts d'innovation sur d'autres organisations multilatérales. Nous travaillons en concertation avec d'autres membres du Réseau de la sécurité humaine, qui réunit 13 pays de tous les continents, animés d'un même esprit et soucieux de questions qui influent sur la sécurité individuelle. Ce groupe devient un pont prometteur entre le Nord et le Sud. Il peut servir la coopération internationale en se concentrant sur des questions comme la réforme de la Commission des droits de l'homme de l'ONU et en aidant à mieux comprendre quand il est justifié, dans le monde actuel, de s'ingérer dans les affaires intérieures des États.

Une nouvelle forme de coopération multilatérale promet également de ressortir du G20, groupe qui comprend les pays du G8 en plus des puissances régionales importantes d'Asie, d'Afrique et d'Amérique latine. M. Paul Martin, élu la semaine dernière à la tête du Parti libéral du Canada et bientôt premier ministre, a joué un rôle clé dans la création de ce groupe il y a quelques années, alors qu'il était ministre des Finances. D'abord créé pour affronter les crises financières mondiales, ce groupe aide aujourd'hui les économies naissantes à rester sur le bon chemin. Tout donne à penser qu'en élargissant le champ d'action du G20 à d'autres problèmes internationaux auxquels il faut trouver des solutions, il pourrait obtenir des résultats d'une plus grande portée encore, ce qui ouvrirait au multilatéralisme une voie plus productive et plus prometteuse.

Permettez-moi de mentionner un autre exemple de la façon dont les activités du Canada peuvent servir nos objectifs communs pour un monde meilleur. Les conflits qui opposent différents groupes ethniques et religieux sont au cœur de violences terribles qui secouent le monde. Or, le Canada dispose, à ce sujet, d'atouts uniques qui tiennent à son histoire, à sa population et à son attachement délibéré au pluralisme des institutions politiques, juridiques et sociales. Tous ces traits particuliers qui sont les nôtres, font que nous pouvons, comme vous, contribuer à l'instauration, hors de nos frontières, de sociétés stables, pacifiques et régies par des lois.

Ainsi, fort de notre propre expérience en tant qu'État fédéral multiethnique, nous aidons le Sri Lanka dans son processus de paix. Par l'intermédiaire d'une ONG canadienne appelée Forum des fédérations, nous avons envoyé des spécialistes canadiens de domaines techniques conseiller les équipes qui participent aux négociations de paix sur des modèles de gouvernance fédérale à plusieurs niveaux, et aider à informer les Sri-Lankais sur ces sujets.

Dans les Balkans, nous avons sur le terrain, depuis le début des années 1990, des soldats de la paix canadiens qui aident à rétablir la sécurité et la primauté du droit en formant la police civile, en participant à des opérations de déminage, en veillant au respect des droits de la personne et en contribuant à des projets de presse libre.

Ces exemples, parmi d'autres, montrent que notre détermination à aider est renforcée par le fait que nous comptons dans notre pays des groupes de population importants originaires de ces régions et par les enseignements que nous pouvons en tirer.

Quant au Moyen-Orient, il est probablement vrai que seuls les États-Unis ont l'influence voulue pour convaincre Israéliens et Palestiniens de reprendre sérieusement les pourparlers de paix, même s'il est évident que l'Autorité palestinienne doit contribuer à ce processus en s'engageant clairement à combattre le terrorisme et en agissant vraiment dans ce sens. En attendant, le Canada prépare le terrain pour que la paix dure lorsqu'elle viendra. Pour bâtir des sociétés civiles saines, le Canada finance, dans plusieurs pays arabes, un programme qui forme des juristes, des avocats, des journalistes et des policiers aux droits de la personne. Il y finance aussi une formation à l'éthique de la presse et à la protection juridique des journalistes. Par ailleurs, il finance également des programmes qui encouragent la coopération entre les corps médicaux israélien, jordanien et palestinien. Le Canada est bien placé pour accomplir ce genre de travail, car il est respecté dans la région en tant que médiateur honnête et indépendant, jugé crédible par tous.

Il va sans dire, je pense, que le Canada et les États-Unis doivent continuer de renforcer la sécurité en Amérique du Nord. Nous devons progresser en ce qui concerne notre prospérité commune en veillant à ce que les relations commerciales restent ouvertes entre nos deux pays et avec le reste du monde, et en résistant aux impulsions protectionnistes et isolationnistes. Nous pouvons, évidemment, travailler de concert dans bien d'autres sphères pour contribuer à un monde meilleur. Cependant, j'aimerais conclure aujourd'hui en attirant votre attention sur deux domaines en particulier où nos pays ont tout à gagner à travailler en collaboration.

Tout d'abord, en ces temps où la sécurité préoccupe particulièrement, il est essentiel que nos deux pays défendent les valeurs qui ont amené tant d'immigrants sur nos rivages, à savoir l'esprit d'ouverture, la liberté, les droits civils et l'égalité de tous les citoyens devant la loi. Nous perdrons l'âme même de nos pays si la guerre contre le terrorisme que nous menons chez nous, nous conduit à recourir à une répression qui serait à l'image de celle que nous combattons à l'étranger. Nos deux pays sont enrichis par la présence d'une population musulmane grandissante, mais les communautés musulmanes sont actuellement ébranlées par ce qui arrive au nom de la sécurité. Ce n'est qu'en refusant catégoriquement de se livrer à une discrimination parmi nos citoyens que nous préserverons ce qui fait que nos sociétés valent la peine d'être protégées.

Je suis certain que le Canada et les États-Unis sauront concilier les impératifs de leur sécurité et la nécessité de préserver les libertés publiques, et nous coopérerons pour cela comme nous coopérons à bien d'autres égards.

Enfin, nous pouvons adopter cette approche dans nos relations extérieures et trouver de meilleures solutions pour remédier à l'exaspération, à la méfiance et au désespoir croissants qui conduisent à la violence dans le monde musulman. Je suis convaincu que nous pouvons accomplir beaucoup en unissant nos efforts, car nous souhaitons tous deux dialoguer avec les voix modérées de l'Islam dans le monde, et les communautés musulmanes, nombreuses dans nos deux pays, peuvent nous aider dans cette tâche.

Nous devons également unir nos efforts contre le regain d'antisémitisme virulent auquel nous assistons et que les récents attentats à Istanbul ainsi que les incidents survenus à Paris et ailleurs nous rappellent trop douloureusement.

Ainsi, entre autres choses, l'expérience particulière du Canada et son point de vue indépendant sont complémentaires de ceux des États-Unis dans l'exercice de leurs immenses responsabilités mondiales. Nos deux pays apportent des atouts distincts dans la poursuite commune d'objectifs tels que la paix, la sécurité, le développement et le respect des droits de la personne.

Et lorsque nos gouvernements et nos citoyens ne s'entendent pas sur l'approche à adopter pour atteindre des objectifs communs, nos relations sont assez solides pour supporter de franches discussions sur ces différends. Je suis convaincu que nous sommes un meilleur allié et un meilleur ami en ne cédant pas sur nos convictions et en les défendant auprès de votre pays, que si nous partions du principe qu'il n'y a pas de place pour les divergences d'opinions entre nous. Nos deux pays gagnent certainement à un échange de vues sincère sur les meilleures solutions pour arriver à nos fins communes.

Je suis sûr que nous continuerons d'honorer les valeurs communes de nos pays, tandis que nous renforcerons la prospérité et la sécurité en coopérant entre nous et avec le reste du monde. Nous pouvons et nous devons le faire, tout en tendant dans chacun de nos pays vers les objectifs économiques, sociaux et culturels qui nous donnent notre identité unique.

M. Paul Martin a parlé avec éloquence, après sa victoire éclatante au congrès d'investiture du Parti libéral, la fin de semaine dernière, de la nécessité de mieux nous entendre avec les États-Unis et de l'absolue nécessité de nous comprendre le mieux possible avec ce pays qui est à la fois notre ami et notre allié le plus proche. Cependant, il a aussi parlé avec éloquence du monde en général, d'un monde où le Canada est convaincu d'avoir un rôle spécial à jouer, un rôle essentiel, si notre sécurité et notre prospérité communes doivent être assurées.

Nous vivons des temps où les alliances sont mises à l'épreuve, voire redéfinies, mais dans ces circonstances difficiles, quelles que soient les différences entre nos approches, nous devons tous garder à l'esprit les objectifs communs vers lesquels nous tendons. Le Canada continuera de travailler en collaboration avec vous dans les mois et les années à venir, afin que nous puissions bâtir des sociétés plus sûres et plus fortes, ici, en Amérique du Nord et, dans notre intérêt commun, dans le reste du monde.

Je vous remercie.


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Dernière mise à jour : 2006-10-30 Haut de la page
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