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Le Canada dans le monde : Politique internationale du Canada
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Discours de l'ambassadeur Christopher Westdal
à l'occasion de la Conférence sur le Partenariat mondial organisée par le Centre d'études politiques de Russie, le 23 avril 2004, à Moscou

 

L'élimination des armes chimique revêt une signification particulière à ce moment de l'année, notamment pour le Canada. La première utilisation moderne des armes chimiques remonte en effet à avril 1915, contre les troupes alliées, dont des milliers de Canadiens. Certes, près d'un demi-siècle s'est écoulé depuis la terrible tragédie dont ont été victimes les Canadiens sur les champs de bataille d'Ypres. Mais, en raison des visions d'horreur restées dans les mémoires – soldats tentant en vain de reprendre leur souffle, en train de mourir d'asphyxie, ou encore, blessés et aveuglés, attendant dans des files interminables de recevoir des soins –, le Canada et les autres pays éprouvent désormais une haine viscérale pour les armes chimiques.

 

Dans les décennies de l'après-guerre, le Canada a contribué aux efforts pour faire reculer la menace chimique. Il y a 80 ans, en signant le Protocole de Genève, nous avons aidé à l'interdiction de ces armes. Mais, voyant que cela n'était pas suffisant, nous nous sommes employés à interdire entièrement leur utilisation, par l'adoption de la Convention sur les armes chimiques (CAC). Une décennie après la signature de ce traité par le Canada, après sa prise de position en faveur de l'interdiction et de la destruction effectives des armes chimiques, étant témoins du désir impérieux des terroristes de s'emparer de ces armes et d'autres armes de destruction massive, nous avons conclu à l'urgence de donner corps à cet engagement et de le renforcer. C'est d'ailleurs ce que nous avons fait au Sommet du G8 de Kananaskis, il y a deux ans, où, sous présidence canadienne, il a été convenu de lancer le Partenariat mondial.

 

Comme la plupart le savent, les dirigeants du G8 se sont engagés, lors de ce même Sommet, à mobiliser 20 milliards $US pour financer des projets de coopération, d'abord réalisés en Russie, pour empêcher que des terroristes acquièrent des armes et des matières de destruction massive ou les connaissances connexes. Pour sa part, le Canada s'est engagé à affecter au Partenariat mondial jusqu'à 1 milliard $CAN au cours des dix prochaines années, soit près de 750 millions $US. Comme tous les membres du Partenariat mondial, le Canada s'emploie rapidement à mettre en œuvre ses engagements et à concevoir des projets concrets dans les quatre domaines d'action prioritaires dégagés à Kananaskis, y compris la destruction des armes chimiques.

 

À l'heure actuelle nous concentrons notre attention et nos ressources sur la construction d'une usine de destruction des armes chimiques à Shchuch'ye à Kurgan Oblast. Certes, Shchuch'ye n'est que l'un des sept dépôts d'armes chimiques de Russie, et il n'abrite que le 1/7e de l'ensemble de l'arsenal chimique russe, en termes de volume. Toutefois, dans la perspective du Partenariat mondial et, plus particulièrement, de la lutte contre le terrorisme, ce dépôt représente un danger particulièrement important. Après tout, on y trouve 1,9 million d'obus contenant au total 5 400 tonnes métriques d'agents neurotoxiques mortels. Qui plus est, ces obus sont robustes et faciles à transporter : qui ne se souvient pas de cette photo célèbre du sénateur américain Lugar, transportant un obus chimique de 85 mm dans son porte-documents? Ces deux caractéristiques, à savoir la solidité et la portabilité, rendent les armes de Shchuch'ye particulièrement attrayantes pour les terroristes.

 

Par ailleurs, dans le cadre d'un projet initial réalisé au titre du Partenariat mondial, le Canada verse une contribution de 33 millions de dollars, soit près de 25 millions $US, pour la construction d'un chemin de fer de 18 km reliant un dépôt d'armes chimiques, près de Planovy, à l'usine de destruction de Shchuch'ye. Ce tronçon ferroviaire servira à transporter en toute sécurité les armes chimiques du dépôt de munitions jusqu'à l'usine de destruction. Il servira aussi probablement au transport de 2 millions d'obus additionnels contenant un agent neurotoxique, depuis le dépôt d'armes chimiques de Kizner. Il pourrait également servir au transport des matières résiduelles provenant des agents neurotoxiques neutralisés dans d'autres usines. Toutefois, étant donné l'absence d'une entente juridique en bonne et due forme entre nos deux pays, la contribution canadienne à ce projet sera versée en vertu de l'accord bilatéral conclu entre le Royaume-Uni et la Russie. Ici, il convient de rappeler que, le 19 novembre 2003, le Royaume-Uni et le Canada ont signé un protocole d'entente à cet égard, aux termes duquel les autorités britanniques se chargeront de la mise en œuvre du projet, en consultation avec le Canada. Je me permets d'ajouter que, selon nous, la collaboration étroite entre nos deux pays, conforme à l'esprit et aux objectifs du Partenariat mondial, constitue un exemple à suivre.

 

Malheureusement, même si cinq mois se sont écoulés depuis la conclusion de ce protocole d'entente, force est d'admettre que les travaux n'ont pas encore commencé en raison d'une impasse dans les discussions avec l'Agence russe des munitions. Même si le Canada et le Royaume-Uni, comme leurs partenaires russes, sont impatients de voir les travaux commencer, cela sera impossible aussi longtemps que cette question administrative, ayant trait à la passation des marchés, ne sera pas réglée. Les enjeux sont trop importants pour agir autrement. Comme le Partenariat mondial en est à ses premiers balbutiements, le Canada ne peut se permettre de poser un geste susceptible d'être réprouvé par nos autorités chargées de la vérification et, ce faisant, compromettre le financement ultérieur du projet. Nous avons cependant bon espoir qu'il sera possible de lever l'impasse, et que la construction du chemin de fer pourra commencer sous peu.

 

À l'heure actuelle, en coopération avec le Royaume-Uni et l'Agence russe des munitions, le Canada s'attache à définir les prochains projets réalisés à Shchuch'ye. L'objectif premier de tous les pays qui apportent une contribution financière au projet actuel, y compris la Russie, les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Union européenne, la Norvège et la République tchèque, consiste à terminer la construction de l'usine de destruction des armes chimiques, puis à commencer, dès que « réalisable », la destruction de ces armes.

 

Et je dis bien « dès que réalisable » et non pas « dès que possible ». Il s'agit là d'une nuance importante. Lorsqu'on entreprend de construire une usine pour détruire certaines des substances les plus létales sur terre, il faut faire bien attention de ne pas mettre en danger les travailleurs, la population locale et l'environnement, de sorte que la qualité et la sécurité revêtent une importance prioritaire. C'est pourquoi il convient de fixer un calendrier réaliste pour la construction et le démarrage de l'usine, sur la base non seulement de ce qui est souhaitable, mais de ce qui est réalisable.

 

Certes, des ressources additionnelles permettraient d'accélérer la destruction de ces armes. C'est d'ailleurs pourquoi la Russie, tenue de supporter le coût des activités de destruction en vertu de la Convention, devra augmenter sa contribution financière. Même si, à ce jour, celle-ci est importante, elle n'est cependant pas suffisante.

Moscou devra consentir à investir beaucoup plus d'argent s'il tient à détruire entièrement et rapidement l'arsenal chimique russe. Et, pour que l'aide des donateurs donne les résultats escomptés, ceux-ci devront obtenir un engagement ferme de la part de la Russie en ce qui concerne le financement pluriannuel prévu.

 

De la même façon, la Russie doit s'attacher à répondre aux exigences juridiques et réglementaires des pays participants. En effet, les contribuables de ces pays apportent une contribution financière considérable à ces efforts, à telle enseigne qu'ils sont en droit de s'attendre à une utilisation judicieuse des fonds. De plus, avant que le Canada ne puisse s'engager à verser des fonds pour la destruction des armes chimiques, il doit obtenir des renseignements détaillés des autorités russes. Tout retard dans ce domaine, ou dans l'accomplissement de formalités, comme l'échange de notes diplomatiques, retarde inévitablement la mise en œuvre d'un projet.

 

Mais les donateurs ont aussi leur rôle à jouer. Ils doivent trouver des façons novatrices de collaborer avec la Russie, pour permettre la mise en chantier des projets dès que cela est réalisable. Et, bien entendu, ils doivent aussi prendre en compte les priorités russes, et se conformer pleinement aux lois nationales.

 

Même s'il reste encore beaucoup à faire avant de débarrasser le monde des armes chimiques, il ne faut pas sous-estimer les progrès réalisés à ce jour. Nul ne doit se méprendre, il y a tout lieu de se réjouir. Ensemble, nous mènerons ce projet à bon port.