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M. AXWORTHY - ALLOCUTION DANS LE CADRE DU DÉBAT EN DEUXIÈME LECTURE DE LA LOI SUR LES CRIMES CONTRE L'HUMANITÉ - OTTAWA (ONTARIO)

2000/13 SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS

NOTES POUR UNE ALLOCUTION

DE

L'HONORABLE LLOYD AXWORTHY,

MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,

DANS LE CADRE DU DÉBAT EN DEUXIÈME LECTURE DE

LA LOI SUR LES CRIMES CONTRE L'HUMANITÉ

OTTAWA (Ontario)

Le 6 avril 2000

(17 h HAE)

Un des grands penseurs du XXe siècle, Isaiah Berlin, a exprimé un jour sa conviction profonde que les camps de concentration nazis présentaient la justification la plus probante de l'Histoire quant à la nécessité d'un droit moral universel; il a également affirmé que les abominations de la Deuxième Guerre mondiale renforçaient son opinion selon laquelle le devoir primordial de toute politique consistait à éviter les « souffrances [humaines] extrêmes ».

Depuis un demi-siècle, des procès de Nuremberg à la constitution de tribunaux pénaux internationaux pour le Rwanda et l'ex-Yougoslavie, en passant par la codification de conventions internationales humanitaires et relatives aux droits de la personne, la communauté mondiale a progressé sur la voie de l'accomplissement de ce devoir, de la définition de normes universelles de défense et de protection des populations, ainsi que de la mise en place des structures nécessaires à la présentation de comptes de la part de ceux qui infligent des souffrances extrêmes à des êtres humains.

L'adoption du Statut de la Cour criminelle internationale [CCI], il y a près de deux ans, a valeur d'énorme pas en avant dans cette démarche.

C'est pourquoi j'ai eu le privilège, en décembre dernier, le déposer le projet de loi C-19, la Loi sur les crimes contre l'humanité. Ce texte de loi vise à mettre en oeuvre au Canada le Statut de Rome de la CCI et à renforcer également le fondement législatif des poursuites criminelles au Canada.

Dans notre examen du projet de loi dont nous sommes saisis, nous devons garder présentes à l'esprit les raisons primordiales pour lesquelles il est d'une importance tout à fait pressante que nous soutenions la CCI.

Un peu partout dans le monde, la sécurité humaine est depuis longtemps menacée par des violations choquantes du droit humanitaire. Au lieu de perdre de son intensité au fil du temps, cette violence n'a fait que s'aggraver au XXe siècle. Plus que jamais, les civils représentent, délibérément, la cible de ces violations brutales. Des millions d'hommes, de femmes et d'enfants ont fait l'objet de meurtres, de viols et d'actes de torture à une échelle de masse. Des gens ont été affreusement mutilés sans aucun autre motif que la haine. Nous avons vu apparaître, puis ré-apparaître des camps de concentration, geôles caractérisées par un sadisme effréné.

Fait attristant, la communauté internationale, trop souvent, a fait preuve d'indifférence ou de passivité face à ces crimes. Le climat d'impunité qui en a résulté n'a fait qu'encourager d'autres extrémistes à commettre des violations plus graves encore. Si nous voulons sauvegarder la sécurité humaine, il faut que nous remplacions cette culture d'impunité par une culture de responsabilité.

L'établissement de l'obligation de rendre des comptes a valeur d'impératif moral auquel les Canadiens souscrivent vigoureusement. Toutefois, il s'agit aussi d'un impératif sur le plan concret. Du fait de la mondialisation et de la porosité des frontières, nous avons constaté à maintes reprises les graves répercussions internationales que peuvent provoquer les crimes contre l'humanité. Ces atrocités massives entraînent des déplacements de populations, elles aggravent les conflits et compromettent la stabilité sur les plans régional et international.

L'optique de la sécurité humaine suppose que nous nous dotions de nouveaux instruments et de nouvelles organisations afin que nous puissions traiter ces problèmes dans une démarche préventive. Nous ne pouvons plus nous permettre d'attendre qu'une catastrophe se produise avant d'agir. La solution consiste, en partie, à faire en sorte que les auteurs des violations soient tenus responsables de leurs actes, ce qui aura du même coup un effet de dissuasion de nouvelles violations et de protection de leurs éventuelles victimes.

La création de tribunaux sur les crimes de guerre, chargés de sanctionner les atrocités de masse commises en ex-Yougoslavie et au Rwanda, a constitué un très grand pas en avant. Toutefois, cette approche ponctuelle souffre de profondes faiblesses, dont d'importants coûts de démarrage et la lenteur des travaux. Elle est également tributaire de tiraillements au sein du Conseil de sécurité, ce qui débouche sur une justice sélective. La création d'un organisme permanent et indépendant permettra de remédier à bon nombre de ces déficiences. En raison de son caractère permanent, l'effet de dissuasion sera également plus fiable. C'est pourquoi les Canadiens se sont exprimés aussi fermement en faveur de la CCI et en faveur du rôle directeur joué par leur pays, qui a demandé instamment que la cour soit indépendante et efficace. D'ailleurs, le Canada a présidé les négociations finales à l'issue desquelles la communauté internationale a adopté le statut de la CCI, en juillet 1998.

C'est pourquoi les Canadiens se sont exprimés aussi fermement en faveur de la CCI et en faveur du rôle important joué par leur pays, qui a insisté pour que la Cour soit indépendante et efficace.

En effet, le Canada a présidé les négociations finales à l'issue desquelles la communauté internationale a adopté le statut de la CCI, en juillet 1998.

Le Statut de la CCI prévoit la constitution d'une cour permanente qui instruira le procès des personnes accusées des crimes les plus graves reconnus par le droit international, à savoir, les actes de génocide, les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre. Fait important, le Statut contient des dispositions essentielles visant à remédier au triste sort des femmes et des enfants dans des situations de conflit armé.

La CCI ne menace pas la souveraineté du Canada. Dans le but, justement, de respecter la souveraineté des États, le Statut de la CCI dispose que les États ont, en premier lieu, le droit d'intenter des poursuites relativement à ces crimes. La CCI a valeur de tribunal de dernier recours -- elle n'exercera sa compétence que dans les cas où les systèmes judiciaires nationaux ne veulent pas ou ne peuvent pas faire enquête sur ces crimes.

Le Statut de la CCI contient de nombreuses autres sauvegardes des intérêts nationaux légitimes. Plusieurs dispositions garantissent que la Cour ne servira pas à des fins d'enquête ou de poursuites dénuées de fondement ou reposant sur des motivations politiques. Son procureur et ses juges doivent satisfaire aux normes professionnelles les plus rigoureuses et ils doivent être élus par l'Assemblée des États parties. Les crimes dont elle peut se saisir sont soigneusement définis dans le respect du droit international en vigueur.

La CCI sera constituée à La Haye lorsque 60 États auront ratifié le Statut. Près de 100 États ont signé le Statut et 8 l'ont ratifié. Les États doivent également adopter les amendements législatifs nécessaires à la mise en oeuvre du Statut de la CCI. Au moyen de la Loi sur les crimes contre l'humanité, le Canada est le premier pays qui a préparé une loi de mise en oeuvre globale.

Ladite Loi prévoit la reconnaissance, ce qui est nouveau, d'infractions en matière de génocide, de crimes contre l'humanité, de crimes de guerre et de manquement à leur responsabilité de commandement de la part de chefs militaires et civils. Ces modifications permettront au Canada de traduire devant les tribunaux les personnes responsables ou de les livrer à la CCI.

Des dispositions similaires seraient en outre énoncées relativement à ces crimes lorsqu'ils ont été commis à l'extérieur du Canada. Ces nouvelles dispositions permettront de surmontrer certains des problèmes auxquels nous nous sommes heurtés par le passé. Une fois votée, la loi renforcera la capacité du Canada de mener à bien des poursuites relatives à ces crimes, indépendamment de l'endroit et du moment où ils ont été perpétrés.

De plus, on codifierait aussi de nouvelles infractions afin de protéger l'administration de la justice de la part de la CCI, et pour assurer la sécurité des juges, des agents judiciaires et des témoins.

La loi permettra au Canada de remettre à la CCI des personnes recherchées pour génocide, crimes contre l'humanité ou crimes de guerre. Quiconque fait l'objet d'une demande de remise présentée par la CCI ne pourra bénéficier de l'immunité relativement à l'arrestation ou à la remise. Le Canada pourra également fournir d'autres formes d'aide à la CCI dans les enquêtes sur les infractions, de la même façon qu'il aide d'autres États dans le cas d'enquêtes normales.

La Loi garantirait la possibilité d'intenter des poursuites à l'encontre des personnes qui détiennent ou blanchissent le produit de ces infractions. L'argent dégagé de la confiscation d'éléments d'actif ou de la perception d'amendes sera versé dans un Fonds de crimes contre l'humanité, au bénéfice des victimes de ces crimes.

Je formule l'espoir qu'il sera possible de soumettre le présent projet de loi au Comité permanent des affaires étrangères ou du commerce international, afin qu'il y fasse l'objet d'un examen attentif. L'adoption du projet de loi traduira l'engagement du Canada de veiller à ce que les pires criminels du monde ne puissent se soustraire à la justice.

L'adoption du Statut de la CCI a marqué un tournant décisif dans l'Histoire, une rupture avec le passé, où on a si souvent fait fi des victimes de ces crimes. Cent vingt États ont déjà exprimé leur soutien du Statut de la CCI à la Conférence de Rome.

Depuis, certains États qui éprouvaient des réserves à l'égard du Statut ont revu leur position et ont décidé de s'y rallier. Sous la présidence du Canada, la communauté internationale est en train de mettre au point des instruments techniques qui assureront l'efficacité des travaux de la Cour.

La CCI a déjà joué un rôle précieux, du fait qu'elle a changé l'état d'esprit international en ce qui concerne l'impunité. Depuis l'adoption de son Statut, nous avons été témoins de l'inculpation de Pinochet et de l'affirmation du principe voulant que les anciens chefs d'État ne bénéficient pas de l'immunité à l'égard de crimes reconnus par le droit international, et de l'inculpation de Milosevic, un chef d'État au pouvoir. Les décideurs et le grand public insistent pour que justice soit faite dans des pays comme le Cambodge et le Timor-Oriental. Une vague de fond de soutien a déferlé, notamment au sein de l'opinion publique mondiale, l'objectif consistant à garantir la responsabilité; du coup, cette question revêt une importance prioritaire pour les gouvernements.

Je souhaite que nous, ici présents, ferons notre part pour maintenir la vigoureuse dynamique enclenchée et, en particulier, la dynamique en faveur de la constitution de la CCI. L'adoption du projet de loi à l'étude, et la ratification du Statut de la CCI, exprimeront le fait que nos compatriotes sont atterrés par ces crimes et que nous sommes résolus à veiller à ce que justice soit faite.

Je vous remercie.


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Dernière mise à jour : 2006-10-30 Haut de la page
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