DISCOURS
M. AXWORTHY - ALLOCUTION À L'OCCASION DE LA CONFÉRENCE INAUGURALE SUR LES AFFAIRES PUBLIQUES ET LA SOCIÉTÉ CIVILE DU ARTHUR KROEGER COLLEGE - OTTAWA (ONTARIO)
2000/10 SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS
NOTES POUR UNE ALLOCUTION
DE
L'HONORABLE LLOYD AXWORTHY,
MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
À L'OCCASION DE LA CONFÉRENCE INAUGURALE SUR LES
AFFAIRES PUBLIQUES ET LA SOCIÉTÉ CIVILE DU
ARTHUR KROEGER COLLEGE
OTTAWA (Ontario)
Le 22 mars 2000
(15 h 30 HNE)
Je viens tout juste de terminer la lecture de la description terrifiante que présente le journaliste Philip
Gourevitch du génocide au Rwanda dans son récit intitulé Nous avons le plaisir de vous informer que, demain,
nous serons tués avec nos familles.
Cet exposé effrayant des actes de violence commis par les génocidaires saisit l'une des réalités de notre
monde : celle d'un endroit où règnent l'intolérance, la méfiance, la brutalité, la crainte, la destruction et la
violence, qui reflète le côté sombre de la nature humaine. Cette réalité a pour effet, purement et simplement,
de mettre en danger la sécurité des personnes.
Dans notre monde, les menaces vont de la victimisation de chaque personne touchée par les conflits civils au
spectre de l'anéantissement global par les armes nucléaires. Essentiellement, toutes ces menaces
compromettent la sécurité humaine.
D'aucuns pensent que la réponse consiste à s'enfermer, se dérober, ignorer, battre en retraite, s'exclure du
monde.
C'est impossible. Les forces de la mondialisation, le progrès technologique ainsi que l'amélioration des
transports et des communications excluent l'option de l'isolement.
Cette solution n'est pas souhaitable. Ces mêmes forces nous font partager les problèmes d'autrui, tout en
faisant ressortir notre appartenance et notre destinée communes en tant qu'êtres humains.
L'isolement ne s'inscrit pas dans la tradition canadienne. Les Canadiens se sont toujours engagés dans le
monde. Nous avons forgé un pays multiculturel fondé sur l'inclusion, la démocratie, la primauté du droit et le
respect d'autrui -- une société qui intègre la différence.
Nous nous sommes efforcés de projeter ces valeurs sur la scène internationale et de les mettre en pratique
afin de promouvoir la paix et la stabilité dans le monde, et notre position enviable dans la communauté
internationale reflète cette démarche.
Dans le monde actuel en pleine mutation, où le rôle des personnes -- leurs droits, leur sécurité et leur vie --
prend plus d'importance dans la politique et la pratique face aux enjeux mondiaux, notre politique étrangère
doit traduire cette réalité.
Placer les êtres humains au premier plan de notre politique étrangère est la force qui donne une impulsion au
programme de sécurité humaine du Canada. Il s'agit d'un effort en vue de construire une société globale où la
sécurité des personnes est une priorité et un moteur d'action, où le respect des règles humanitaires et de la
primauté du droit forme la trame d'un réseau cohérent de protection des personnes, où ceux qui violent ces
normes sont tenus responsables de leurs actes, et où l'édification de nos institutions mondiales, régionales et
bilatérales sert à améliorer et à renforcer ces règles. Bref, il s'agit d'un moyen de s'attaquer aux dangers de la
mondialisation.
La campagne pour l'interdiction des mines terrestres, la création de la Cour criminelle internationale, la lutte
contre le narcotrafic et les efforts visant à protéger les civils en situation de conflit, du Kosovo au Timor-Oriental
en passant par la Sierra Leone, ne sont que quelques exemples différents, quoique reliés, qui non seulement
montrent comment le Canada met en oeuvre ce programme, mais aussi témoignent véritablement du désir
croissant de la communauté internationale de le promouvoir.
T.S. Eliot a dit qu'avril était le mois le plus cruel. Pour le Canada, le mois d'avril sera crucial. Plusieurs
événements qui auront lieu le mois prochain -- l'accession du Canada à la présidence du Conseil de sécurité
des Nations Unies ainsi que la tenue de la Conférence de l'Afrique de l'Ouest sur les enfants touchés par la
guerre, coparrainée par le Canada et le Ghana, et de la Conférence de révision du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) -- concentreront tous l'attention -- et, espérons-le, l'action -- sur les
dossiers urgents de la sécurité humaine.
Lorsque nous avons obtenu un siège au Conseil de sécurité l'année dernière, notre but était d'adapter le
Conseil à un nouveau contexte où les perspectives du maintien de la paix dans le monde -- sa mission
essentielle -- sont de plus en plus axées sur la problématique de la sécurité humaine.
C'est en partie grâce à la présence du Canada que le Conseil écoute plus directement la voix de la souffrance
humaine. Il s'attaque aux questions qui menacent directement les populations. Il prend des mesures concrètes
et sans précédent afin de protéger les civils touchés par les conflits armés. En d'autres termes, le Conseil
s'intéresse davantage aux préoccupations relatives à la sécurité humaine.
En avril, nous avons l'intention de consolider ces progrès.
La victimisation des civils, pris comme cibles directes, instruments ou trophées de guerre, constitue le volet
central des conflits armés modernes. Il s'ensuit que la protection des civils doit occuper le premier rang des
préoccupations du Conseil de sécurité. À cette fin, le rapport présenté l'automne dernier par le secrétaire
général Annan et ses propositions à cet égard -- à la suite d'une initiative du Canada -- fournissent un plan
directeur des mesures à prendre.
Les répercussions des décisions prises par le Conseil se font déjà sentir. À la demande répétée du Canada,
les nouvelles missions de paix en Sierra Leone et au Timor-Oriental, que le Conseil a approuvées l'an dernier,
disposent de mandats qui comprennent expressément la protection des civils. On leur a également donné les
ressources pour ce faire, ce qui est une première dans le cas du Conseil.
Nous désirons ancrer cette pratique dans l'usage afin que la défense des intérêts des civils figure parmi les
préoccupations habituelles du Conseil lors du déclenchement et du déploiement de ses missions de maintien
de la paix.
Le Conseil n'a pas abordé le problème que pose la situation d'un groupe de civils, celui des personnes
déplacées dans leur propre pays, en tant que thème de portée générale du dossier de la sécurité. Pourtant,
des conflits -- qui souvent font déjà l'objet d'un examen par le Conseil -- ont forcé jusqu'à 25 millions de
personnes à fuir leur foyer pour chercher refuge dans d'autres régions de leur propre pays.
Nous avons l'intention de convoquer en avril une réunion du Conseil qui servira de première étape pour inciter
le Conseil de sécurité à adopter une approche thématique plus complète à l'égard de ce problème.
L'émergence de nouvelles économies de la guerre, qui alimentent les conflits armés et aggravent les
souffrances de l'humanité, constitue une autre évolution inquiétante. Les seigneurs de la guerre de la nouvelle
génération, avec la complicité de commerçants sans scrupules, exploitent les ressources et les personnes pour
financer la violence.
Il est temps que le Conseil s'attaque sérieusement et résolument à cette menace. C'est pourquoi le Canada
s'efforce d'accroître l'efficacité du régime des sanctions en Angola afin d'empêcher les rebelles de l'UNITA de
poursuivre la guerre. Le rapport des experts, distribué la semaine dernière, cerne les enjeux.
Le mois prochain, nous insisterons pour que l'on prenne des mesures concertées afin de donner suite à ces
recommandations. Nous présenterons également une étude importante sur les régimes de sanctions réalisée
par l'Académie mondiale pour la paix et parrainée par le Canada. Cette étude s'inscrira dans le cadre d'un
réexamen général des régimes de sanctions auquel nous comptons procéder au Conseil. Nous envisagerons
comment cibler les sanctions pour en accroître l'efficacité, comment réduire leurs répercussions sur les gens
ordinaires et comment trouver des moyens pratiques pour permettre au Conseil d'y parvenir.
Le rapport de l'enquête indépendante sur le génocide au Rwanda, publié en décembre, soulève des questions
graves quant à l'intervention -- et à l'inertie -- du Conseil de sécurité face aux violations monstrueuses des
droits de la personne et du droit humanitaire, au dilemme entre l'intervention et la non-intervention et au choix
des moyens d'intervention. Le Conseil a encore été confronté aux mêmes questions à Srebrenica, puis au
Kosovo.
Le Conseil doit discuter de son rôle dans ces situations. À cette fin, nous comptons organiser un débat au sujet
du rapport portant sur le Rwanda. Cette discussion ne sera pas facile, mais elle doit avoir lieu pour que les
membres de la communauté internationale assument leurs responsabilités.
Ce travail en vue de promouvoir la sécurité humaine serait incomplet s'il ne tenait pas compte des conflits qui
continuent de faire rage et font chaque jour de nouvelles victimes. C'est pourquoi nous nous efforcerons de
convaincre le Conseil de s'intéresser davantage à des zones de conflit souvent oubliées -- notamment à la
crise humanitaire au Soudan et au traitement infligé aux femmes en Afghanistan.
Dès le départ, l'une des mesures que nous désirions prendre afin d'accroître la pertinence du Conseil consistait
à améliorer la liaison entre ses activités et les initiatives de promotion de la sécurité humaine prises dans
d'autres assemblées afin que l'action du Conseil serve de complément à ces efforts.
C'est d'ailleurs le cas pour un dossier prioritaire du Canada, à savoir la situation des enfants touchés par la
guerre. Le bilan accablant de la dernière décennie seulement illustre clairement l'ampleur de cette tragédie :
des millions d'enfants ont été tués ou estropiés, sont devenus orphelins, ont été déplacés, traumatisés ou
forcés de s'enrôler dans l'armée.
Les mesures prises par le Conseil de sécurité dans ce domaine -- notamment l'inclusion de spécialistes de la
protection des enfants dans le processus habituel des opérations de maintien de la paix -- renforcent la
pression en vue d'une intervention internationale.
En janvier, le Protocole à la Convention relative aux droits de l'enfant a été enfin signé.
Ce Protocole s'attaque au problème de la participation des enfants aux conflits armés, en particulier à la
pratique odieuse des enfants-soldats. Le gouvernement du Canada a déposé hier un projet de loi portant à 18
ans l'âge minimum requis pour le déploiement de soldats canadiens en situation de conflit -- ce qui fait du
Canada un chef de file dans ce domaine.
La conférence d'avril sur les enfants touchés par la guerre en Afrique de l'Ouest, coparrainée par le Canada,
vise à catalyser les efforts régionaux en vue de protéger les droits et le bien-être des enfants dans une des
régions les plus durement touchées.
En outre, le Canada présidera en septembre une Conférence internationale sur les enfants touchés par la
guerre, qui rassemblera les représentants des gouvernements, des organismes internationaux et de la société
civile afin de dresser un plan global d'action complet.
Promouvoir la sécurité humaine au Conseil de sécurité ou ailleurs signifie s'attaquer aux menaces qui pèsent
sur elle. Par ailleurs, nous ne pouvons guère nous réjouir des progrès que nous avons réalisés -- et pourtant
nous avons progressé -- tandis que le spectre de l'anéantissement global plane sur notre sécurité collective.
Franchement, il n'existe pas de menace éventuelle plus grave pesant sur la sécurité humaine.
Pourtant, il semble que les risques associés aux armes nucléaires ne suscitent plus autant de préoccupations
internationales. L'urgence d'agir a diminué, et la structure que nous avons érigée pour gérer les menaces
repose sur un terrain de plus en plus instable. Il semble que nous ayons perdu notre méthode -- et notre
volonté -- pour agir résolument et progresser ensemble sur la voie du contrôle des armements et du
désarmement.
Les dangers sont bien réels.
La menace de la prolifération horizontale est évidente. Les essais nucléaires en Asie du Sud ont donné une
nouvelle dimension effrayante à l'instabilité politique dans cette région.
La prolifération verticale continue de faire problème. Les progrès réalisés en matière de désarmement
nucléaire sont indéniables. Néanmoins, la tendance de certains à justifier le maintien de leur arsenal nucléaire
comme moyen de se protéger contre les autres armes ou pour des raisons économiques cause une réelle
inquiétude.
La perspective du transfert illicite de matériel assimilable aux armes nucléaires crée une nouvelle menace.
Enfin, le débat engagé sur l'utilisation de missiles comme moyens de défense aux États-Unis pourrait
compliquer les démarches pour faire avancer le dossier de la non-prolifération nucléaire et du désarmement à
l'échelle mondiale.
Nous ne pouvons laisser le régime de non-prolifération nucléaire mondiale s'effriter sous l'effet de telles
menaces. Il faut le renforcer en recentrant l'énergie et en faisant preuve d'imagination. Ce sont de telles
mesures, et non pas l'attrait chimérique des actes unilatéraux -- peu importe leur origine --, qui nous offrent la
meilleure garantie en matière de sécurité collective.
Le Canada tient encore à atteindre ce but.
Un TNP efficace s'avère l'élément central du régime de non-prolifération. Comme il n'y a que quatre États qui
ne l'ont pas signé, c'est l'accord international sur la sécurité qui a recueilli la plus large adhésion. D'ici un mois,
les membres de la communauté internationale se réuniront à la conférence de révision du TNP -- la première
depuis la remise à une date indéterminée en 1995.
Le succès de cette conférence est crucial. L'enjeu porte sur l'évolution future des attitudes à l'égard des armes
nucléaires, des politiques et des arsenaux. La perspective est cependant nébuleuse.
On estime que l'élément fondamental de ce traité -- la promesse de pays non détenteurs d'armes nucléaires
de ne pas acquérir de telles armes contre celle des États détenteurs de s'en débarrasser -- n'est pas respecté
par certains représentants de l'une ou l'autre des parties.
Parallèlement, on estime que l'engagement des pays détenteurs vis-à-vis du concept de « responsabilité
permanente » -- prolonger indéfiniment le TNP en échange d'une plus grande obligation de rendre compte
pour les autres -- n'est pas respecté.
Le Canada a adopté une démarche à trois volets : obtenir l'accord des intéressés sur un programme de
mesures quinquennal actualisé qui comporte de nouveaux objectifs concrets pour le désarmement et la non-prolifération; demander un processus de révision et d'évaluation plus vigoureux pour donner tout son sens au
principe de « responsabilité permanente » ; encourager l'adhésion universelle au TNP et inviter les États
signataires du traité à respecter leurs obligations.
Un TNP renforcé est indispensable. Il faut aussi renforcer d'autres parties du régime de non-prolifération. Cela
demande un nouvel effort pour la ratification et la mise en oeuvre du TICE [Traité d'interdiction complète des
essais], malgré le rejet du sénat aux États-Unis. Ainsi, il faudra entamer de sérieuses négociations sur un
accord qui interdira la production de matières fissiles [TIMF]. Il faudra qu'une AIEA [Agence internationale de
l'énergie atomique] plus solide et plus efficace limite la circulation du matériel et du savoir-faire nécessaires à la
mise au point d'armes nucléaires.
Le Canada insiste pour que des mesures soient prises à tous les égards.
Cela signifie que nous devrons être davantage déterminés à restreindre l'accès aux moyens d'utiliser les armes
nucléaires et d'autres armes, notamment les missiles.
Les pays qui possèdent des missiles capables d'envoyer des ogives nucléaires, chimiques et biologiques sont
maintenant plus nombreux. Les pays capables d'importer de tels missiles, de les mettre au point eux-mêmes et
de les exporter sont aussi plus nombreux. En outre, un plus grand nombre de pays sont en mesure de les
tester et de les déployer.
Cependant, il n'y a ni traité, ni code d'éthique, ni lignes directrices sur ce qui constitue un comportement
responsable dans ce domaine.
Il n'est donc pas étonnant que l'on doive se soucier de cette question. Le Canada partage pleinement ces
inquiétudes. Toutefois, il est peu probable que les tentatives unilatérales pour lutter contre ces dangers
apportent une sécurité durable -- en fait, elles pourraient accroître l'insécurité.
Il faut résister à la tentation d'ériger des murs, de battre en retraite et de s'isoler du reste du monde, ici comme
ailleurs. Il faut plutôt trouver d'abord un moyen multilatéral de mettre fin à la prolifération des missiles, moyen
qui serait l'un des principaux éléments d'un régime mondial de non-prolifération renforcé.
C'est là le but des tentatives internationales pour établir un Régime efficace de contrôle de la technologie
relative aux missiles [RCTM]. Voilà pourquoi le Canada s'efforce de ranimer le débat et s'offre à prendre la
direction du RCTM l'année prochaine.
À cette fin, nous tenons à promouvoir une méthode plus rigoureuse de contrôle des exportations de
technologies pertinentes afin d'accroître la participation au Régime, de faire en sorte que la démarche prévoie
des mesures de confiance efficaces et de mettre en place des normes universelles qui établiraient une
distinction entre un comportement responsable et un comportement irresponsable en rapport avec les missiles.
L'adoption d'un plus vigoureux régime de non-prolifération demande des arrangements efficaces d'envergure
mondiale et dépend du désir des pays et des groupes de pays de déterminer la validité de leur propre
démarche. Voilà pourquoi le Canada dirige les travaux en cours à l'OTAN pour réviser en profondeur ses
options en matière de non-prolifération, de contrôle des armements et de désarmement.
L'accord conclu par les dirigeants de l'Alliance, qui a déjà réduit de plus de 80 p. 100 l'arsenal nucléaire,
permet à l'OTAN de prendre le leadership pour le contrôle des armements et le désarmement à l'échelle
internationale.
Le Canada s'efforce d'inciter l'OTAN à faire une révision générale de l'ensemble de ses politiques. Les alliés
de l'OTAN connaissent l'importance des efforts concernant la non-prolifération, le contrôle des armements et le
désarmement pour leur sécurité et savent que ce processus leur donne l'occasion d'examiner d'autres
mesures que l'Alliance pourrait prendre. Les résultats seront présentés aux ministres des Affaires étrangères
de l'OTAN en décembre. En attendant, le processus de révision envoie un signal positif important pour la
conférence de révision du TNP qui se tiendra le mois prochain.
Il faut tenir compte d'un autre facteur crucial à cet égard : le rôle de chaque citoyen et de la société civile. La
volonté politique et l'énergie nécessaires pour rétablir l'élan essentiel au contrôle des armes nucléaires et à la
réduction des menaces ne proviennent pas des sous-sols mal aérés des Nations Unies, à New York, ni de la
chambre du Conseil du Palais des Nations, à Genève.
Dans une démocratie comme la nôtre, l'énergie et la volonté politiques sont d'abord dans le coeur et dans
l'esprit de nos citoyens, puis dans les systèmes qui ont été établis dans les mandats et les politiques
qu'appliquent nos chefs, au pays et à l'étranger. En fait, le nom de ce collège -- Arthur Kroeger Institute of
Public Affairs and Civic Society -- reflète réellement ce lien.
Cela explique pourquoi, il y a deux ans, j'ai demandé au Comité parlementaire des Affaires étrangères de se
pencher sur les défis nucléaires et de formuler des recommandations, pourquoi l'Ambassadeur canadien au
désarmement vient de terminer une visite dans huit villes canadiennes pour parler de la question, pourquoi
nous avons tenu le mois dernier des consultations avec la société civile afin de discuter des dossiers de la non-prolifération des armes nucléaires, du contrôle des armements et du désarmement et, enfin, pourquoi je suis
heureux d'annoncer aujourd'hui que la délegation canadienne à la conférence de révision du TNP comprendra
un représentant des ONG en tant que participant à part entière.
La collaboration entre les ONG et les gouvernements peut être très féconde, comme en témoignent la
signature récente de la Convention d'Ottawa visant à interdire les mines antipersonnel ainsi que les efforts en
vue de préparer des présentations sur la Cour criminelle internationale. Bien que l'on ne puisse pas règler
aussi rapidement la question du désarmement nucléaire, ce problème ne sera jamais résolu si nous -- c'est-à-dire tant le gouvernement que la société civile -- ne redoublons pas d'efforts.
J'ai commencé mon exposé en faisant allusion à la description qu'un journaliste a donnée du génocide au
Rwanda, la vérité sur les atrocités commises alors et la réalité plus globale que ces horreurs reflétaient sur le
côté sombre de la nature humaine, les menaces pesant sur la sécurité humaine et l'inaction.
Un autre épisode me vient à l'idée. Dans un couvent, lorsque les génocidaires ont essayé de séparer un
groupe d'élèves tutsis de leurs compagnes de classe hutus, ces dernières ont refusé. Elles ont décidé de
rester avec leurs compagnes. Au lieu de se protéger, elles ont choisi de défendre leurs amies.
C'est là une autre réalité de notre monde, un exemple de solidarité, d'engagement, d'humanité courante, du
meilleur côté de la nature humaine et, en fin de compte, d'un avenir plus prometteur.
C'est cette réalité que vise l'approche centrée sur la personne de la politique étrangère du Canada. Elle crée
un lien entre nos actes -- depuis la protection des civils jusqu'à la prévention de la destruction par le nucléaire.
À la fin d'avril, lorsque le Canada n'assumera plus la présidence du Conseil de sécurité, après la Conférence
de l'Afrique de l'Ouest sur les enfants touchés par la guerre et à la suite de la conférence de révision du TNP,
j'espère que nous serons un peu plus près de ce but.
Je vous remercie.
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