Les livrées et leurs parasites seraient-ils
les animaux les plus abondants de la forêt boréale?
Edmonton, le 12 mars 2002 - Jens Roland, PhD, chercheur principal
au RGDF, a découvert une corrélation entre les infestations
de la livrée des forêts et la quantité de forêt
restante après une coupe réalisée dans une zone particulière.
Le professeur Roland affirme que, dans les plus grandes étendues
forestières, les facteurs de mortalité entraînant
l'effondrement de l'infestation de la livrée des forêts (parasites
et maladies) sont plus efficaces que dans les plus petites étendues
forestières. Les travaux du professeur Roland indiquent que la
prolifération des livrées des forêts ainsi que le
taux d'effondrement constituent un indicateur essentiel de l'état
de santé général des tremblaies de la forêt
boréale canadienne et offrent de nouveaux choix aux aménagistes
forestiers désireux de minimiser les effets des épidémies
de livrées des forêts.
L'impact de la livrée des forêts ne doit pas être
sous-estimé. À des fins de comparaison, au plus fort d'une
infestation de chenilles, leur biomasse par km2 serait équivalente
à 657 caribous par km2. De la même façon,
la biomasse des petites mouches parasitaires qui attaquent ces chenilles
et s'en nourrissent équivaudrait, quant à elle, à
82 loups pour la même surface.
Étant donné l'immense échelle de la lutte à
laquelle se livrent prédateurs et proies dans nos arrière-cours,
nos parcs et nos forêts, il n'est point surprenant que la livrée
des forêts soit le principal insecte défoliant des peupliers
faux-trembles dans la forêt boréale canadienne. « Pendant
une grave épidémie, explique le professeur Roland, la livrée
des forêts peut complètement défolier une forêt
de trembles et arrêter virtuellement leur croissance, réduisant
ainsi la progression ligneuse de quatre mètres cube par hectare
chaque année. » Et le professeur Roland d'ajouter : «
Bien que nous ne puissions arrêter une infestation de livrées,
nous ne voulons pas pour autant faire quoi que ce soit qui puisse la prolonger,
comme par exemple rendre inefficaces ses ennemis naturels en modifiant
la structure forestière. » Si le nombre d'années de
défoliation (sur un cycle de 12 ans) pouvait être réduit,
ne serait-ce que d'une année, alors la production de fibre augmenterait
de presque 10 % globalement.
Les travaux de recherche se sont aussi concentrés sur quatre espèces
de mouches parasitaires qui représentent les principaux ennemis
de la livrée, ainsi que sur diverses maladies virales qui ont également
pour effet de tuer la livrée. Le professeur Roland déclare
: «Nous savions que le couvert forestier jouait un rôle important
au niveau du comportement de prédation de ces mouches au moment
où elles sont en quête de leurs proies, ainsi qu'au niveau
du taux de dissémination de divers virus. Il nous restait à
élucider quelle était la superficie optimale d'un tel couvert
forestier permettant à ces agents d'opérer normalement et
de supprimer rapidement et avec succès une épidémie.
»
Le professeur Roland et son équipe de chercheurs ont échantillonné
127 sites s'étendant sur une surface de 400 km2 à
proximité de Ministik Hills, en Alberta, dans des peuplements de
trembles de six superficies différentes, variant de 0,28 à
289 hectares. « Nous avons déterminé, dit le professeur
Roland, que, pour que les parasites et les virus soient les plus efficaces,
les peuplements forestiers devaient faire un minimum de 100 hectares.
Les peuplements forestiers plus petits servaient de refuge aux chenilles
du fait de l'efficacité réduite de leurs ennemis naturels,
ce qui contribuait ainsi à rallonger l'infestation de plusieurs
années. »
Roland, J. 2000. Predator-prey dynamics of forest tent caterpillar
as an indication of Forest integrity. (La dynamique prédateur-proie
comme indicateur de l'intégrité des forêts) Rapport
de projet 2000-31, Réseau de gestion durable des forêts,
University of Alberta (Edmonton), Alberta.
Autres références :
Rothman L. et J. Roland 1998 Relationships between forest fragmentation
and
colony performance in the forest tent caterpillar, Malacosoma disstria.
Ecography 21 : 383-391. (Les relations entre le morcellement forestier
et le rendement de la colonie chez les livrées des forêts,
Malacosoma disstria)
Roland, J., B.G. Mackey et B. Cooke. 1998. Effects of climate and forest
structure on duration of forest tent caterpillar outbreaks across central
Ontario, Canada. Canadian Entomologist. 130 : 1-12. (L'influence du climat
et de la structure des forêts sur la durée des pullulations
de livrées dans le centre de l'Ontario).
Roland J. et P.D. Taylor. 1997. Insect parasitoid species respond to
forest structure at different spatial scales. Nature, 386 : 710-713. (Les
espèces d'insectes parasitaires répondent aux structures
des forêts selon différentes échelles spatiales)
Le Réseau de gestion durable des forêts est un center
d'excellence sans but lucrative d'envergure nationale, member du Programme
de réseaux de centers d'excellence (RCE) fédéral.
Le Programme des RCE est une initiative du gouvernement fédéral
administrée conjointement par le Conseil de recherches en sciences
naturelles et en génie (CRSNG), les Instituts de recherche en santé
du Canada (IRSC) et le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH),
en partenariat avec Industrie Canada.
|