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Sajeev John et Geoffrey Ozin, University of Toronto

Tout a commencé comme une énigme ancienne. Le jeune visionnaire demande au grand charpentier de faire une chose qui semble impossible : « Construis-moi une maison qui aura beaucoup de fenêtres, mais de laquelle la lumière ne pourra pas s’échapper. » Le charpentier éclate de rire, mais la vision du rêveur l’intrigue. « Comment pourrait-on y parvenir? », demande-t-il. « Construis-la aussi parfaitement qu’une opale, réplique son interlocuteur, en utilisant le matériau le plus abondant du monde, le silicium, et tu emprisonneras la lumière. Et, ce n’est pas tout, ajoute-t-il d’un ton invitant, tu pourras la contrôler. »

Sajeev John et Geoffrey Ozin Le visionnaire de cette légende est Sajeev John, spécialiste de la physique théorique, tandis que le charpentier est Geoffrey Ozin, spécialiste de la chimie des matériaux. Ces deux professeurs de l’University of Toronto ont créé ensemble le premier cristal photonique du monde permettant d’emmagasiner la lumière. Il s’agit d’un pas de géant dans la mise au point de micropuces optiques fonctionnant à la vitesse de la lumière.

Mais les chercheurs ne se sont pas contentés de faire une percée remarquable. Ils ont aussi établi une collaboration fructueuse et durable entre des disciplines scientifiques disparates et cet exploit leur a valu le tout premier Prix Brockhouse du Canada pour la recherche interdisciplinaire en sciences et en génie.

Pendant une dizaine d’années, M. John a parcouru le monde en donnant des conférences sur son idée révolutionnaire, qui consistait à emmagasiner et à canaliser la lumière dans un minuscule réseau cristallin de silicium. Il essayait de trouver un collaborateur prêt à s’attaquer à la construction de cette structure.

L’idée avait germé dans son esprit au milieu des années 80 pendant ses études de doctorat. Les électrons et les photons se comportent comme des ondes. Nous pouvons déterminer l’emplacement des électrons, pour diriger leur déplacement dans n’importe quelle structure, qu’il s’agisse entre autres de lignes de transport d’électricité ou de micropuces, alors serait-il possible d’emmagasiner un photon se déplaçant à une vitesse de 300 000 kilomètres par seconde? M. John y croyait. Il fallait pour ce faire créer à partir de silicium une structure de dimensions parfaites de manière à obtenir une bande interdite photonique, une zone dont la taille empêcherait la propagation des ondes lumineuses.

« Il est beaucoup plus difficile de repérer la lumière que les électrons », souligne M. John.

Le physicien n’exagère pas. Des douzaines de scientifiques du monde entier lui ont affirmé que c’était impossible. Mais Sajeev John a persisté et, en août 1998, il est parti à la recherche du charpentier dans son propre milieu de travail. Il s’est rendu au département de chimie de l’University of Toronto pour rencontrer Geoffrey Ozin.

« J’étais le scientifique idéal pour cette expérience », signale M. Ozin.

Ce spécialiste de la chimie des matériaux s’employait depuis près de 30 ans à construire des structures synthétiques en contrôlant à la perfection leurs dimensions, leur forme et leurs fonctions. De plus, il était passé maître dans l’art de fabriquer des structures poreuses, en y créant des trous de taille moléculaire. Un peu comme un bloc de fromage suisse parfaitement symétrique. Une industrie qui se chiffre à des milliards de dollars repose sur ces matériaux, appelés « zéolites », qu’elle utilise comme séparateurs et, en raison de leur vaste superficie, comme surfaces catalytiques. M. Ozin a été l’un des rares scientifiques à créer des zéolites à base de silicium nanoporeux.

Mais, rappelle Geoffrey Ozin, l’idée de la cage à lumière était complètement différente. Tout d’abord, elle se situait à une échelle beaucoup plus grande, celle des microns (les ondes lumineuses) au lieu des nanomètres (la taille des molécules utilisées pour créer les trous dans les zéolites). Et c’est la lumière, et non une réaction chimique, que l’on voulait contrôler. Il s’agissait à l’époque d’un concept étranger pour ce chimiste.

Pourtant, un déclic s’est fait lors de cette première réunion. Alors que d’autres avaient affirmé que c’était irréaliste, M. Ozin a éclaté de rire en appréciant la beauté de l’idée. Un an plus tard, Sajeev John est revenu à la charge en lui faisant une proposition qu’il ne pouvait refuser. Des collègues espagnols lui avaient fourni la matrice parfaite pour sa cage à lumière : une opale synthétique à base de silice.

Quelques mois plus tard, M. Ozin a mis à profit ses compétences en science des zéolites pour créer par inversion le tout premier matériau opalin à base de silicium. Et, comme l’expliquait leur article paru dans la revue Nature, le matériau emprisonnait bel et bien la lumière, en propageant des impulsions lumineuses selon un mouvement de va-et-vient à un rythme de mille billions de fois par seconde (soit le chiffre 1 suivi de 15 zéros).

On était en 1999 et l’essor des télécommunications atteignait son paroxysme. La découverte a alors suscité une énorme vague d’excitation et d’attentes, car elle ouvrait la voie à la création de micropuces optiques d’une rapidité inouïe permettant de contrôler étroitement le déplacement de la lumière.

Selon M. Ozin, il est depuis ce temps devenu évident que le passage de la validation de principe à un composant de puce optique perfectionné sera beaucoup plus difficile que la plupart des personnes l’imaginaient à l’origine. C’est pourquoi les deux chercheurs ont continué à explorer des moyens de fabriquer des matériaux à bande interdite photonique de façon plus efficiente et d’utiliser cette technologie pour concevoir et fabriquer des composants de puces optiques, y compris celles à trois dimensions.

« Il est extrêmement rare qu’on obtienne ce type de complémentarité, qu’on la porte à un niveau très élevé dans un domaine pointu aussi porteur et que la collaboration se poursuive », fait remarquer M. Ozin.

Au cours des cinq dernières années, les deux scientifiques se sont à maintes reprises assis ensemble à une table du Faculty Club de l’University of Toronto pour se pencher sur des idées en vue des prochaines étapes dans l’inconnu. « Sajeev est le gourou », précise Geoffrey Ozin qui propose une foule d’avenues possibles, rejetées par le physicien dans la plupart des cas en se fondant sur des considérations théoriques (ce qui évite de consacrer temps et argent à des recherches menées au petit bonheur). Mais sur dix idées, le physicien en retient une, celle qui est porteuse sur le plan théorique. En partie inspiré par ces conversations, M. Ozin a étendu l’utilisation possible de cristaux photoniques dans le domaine de la couleur fondée sur la structure. En collaboration avec des partenaires de l’industrie, son laboratoire travaille à mettre au point une encre photonique colorée et une chromatographie optique.

« Geoffrey est un as de la chimie des matériaux, affirme M. John, et il a une certaine audace. Nous ne craignons pas de nous faire part mutuellement de notre ignorance. »

Et pourquoi cette collaboration fonctionne-t-elle si bien? « L’efficacité d’une collaboration repose sur les mêmes éléments que le mariage : la confiance et le respect mutuel », ajoute M. Ozin. Et les deux chercheurs soulignent l’importance particulière d’une bonne communication.

« Nous avons eu un parcours scientifique très différent. Le dernier cours que nous avons suivi tous les deux remonte probablement à notre première année d’université, affirme Sajeev John. Il arrive souvent que les personnes d’horizons différents ne se comprennent pas très bien l’une l’autre. »

Toutefois, M. Ozin souligne : « Sajeev peut parler de questions très complexes d’une façon assez simple pour qu’un praticien de la chimie de synthèse comme moi arrive à bien les comprendre. »

Les deux collègues soulignent que la recherche interdisciplinaire comme la leur est maintenant essentielle au processus de découverte dans de nombreuses disciplines scientifiques, dont la nanoscience, puisque les nouvelles idées se situent à la frontière de ces disciplines. Ils ont créé un séminaire interdisciplinaire à l’intention des étudiants des cycles supérieurs pour favoriser l’exploration de ce champ à la limite de leurs domaines de compétence respectifs.

« En général, les gens hésitent beaucoup à s’aventurer à l’extérieur des sphères qu’ils connaissent, mentionne M. John. À mon avis, il est important d’encourager de plus en plus ce type d’approche, qui devrait permettre de faire les découvertes les plus excitantes. »

Parcours de Geoffrey Ozin

Né à Londres, en Angleterre, il y a 61 ans, le professeur Ozin est titulaire d’un baccalauréat de l’University of London et d’un doctorat de l'Oxford University. Il a joint les rangs de l’University of Toronto en 1969. Actuellement titulaire de la Chaire de recherche du Canada en chimie des matériaux, il occupe un poste de professeur à un niveau où son établissement n’en compte qu’une trentaine. Il a par ailleurs écrit plus de 500 articles scientifiques. Au cours des 35 dernières années, ses travaux ont aidé à modifier le point de vue prédominant dans plusieurs domaines de la chimie des matériaux, depuis la sciences des zéolites jusqu’à la chimie inorganique biomimétique en passant par les cristaux photoniques. Propriétaire de dix brevets américains, il a formé plus de 50 étudiants des cycles supérieurs et est un collaborateur de l’équipe de nanoscience de l’Institut canadien de recherches avancées. M. Ozin a reçu le prix Alexander von Humboldt Senior Scientist Research Award (2005), le prix Royal Society of Chemistry Award in Materials Chemistry (2002) et le Prix de chimie E.W.R. Steacie décerné par la Société canadienne de chimie (2002).

Parcours de Sajeev John

Maintenant âgé de 47 ans, le professeur Sajeev John a fait ses études secondaires à l’école Sir Frederick Banting de London, en Ontario. Il est titulaire d’un baccalauréat du Massachusetts Institute of Technology et d’un doctorat en physique de la Harvard University. Professeur adjoint de physique à Princeton University entre 1986 et 1989, il y a alors participé à la création du concept des matériaux à bande interdite photonique. En 1989, il a joint les rangs de la faculté de physique de l’University of Toronto, où il est maintenant professeur et titulaire d’une chaire de recherche du Canada en physique. Auteur de plus de 100 articles scientifiques, M. John est reconnu à l’échelle internationale pour ses théories novatrices. Lauréat du Guggenheim Fellowship, aux États-Unis, et du prix Alexander von Humboldt Senior Scientist Research Award (2000), il a été le premier physicien canadien à recevoir le prix international du roi Faisal en sciences. En 2002, il a été lauréat de la Médaille de platine du premier ministre pour l'excellence en recherche, assortie d’une bourse de recherche d’un million de dollars, attribuée au meilleur chercheur de l’Ontario toutes disciplines confondues.


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Date de création : 
Mise à jour : 
2004-05-04
2006-02-27

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