Produit pour le comité sénatorial spécial sur les drogues illicites
Gérald
Lafrenière
Division des affaires politiques et sociales
le 23 mai 2002
BIBLIOTHÈQUE DU PARLEMENT
AFFAIRES
DÉCLARÉES, CONDAMNATIONS, PEINES D’EMPRISONNEMENT ET DÉTERMINATIONS DE
PEINES EN RAPPORT AVEC LES DROGUES ILLICITES AU
CANADA
INTRODUCTION
Le présent document donne un bref aperçu des statistiques canadiennes relatives aux affaires déclarées, aux condamnations, aux peines d’emprisonnement et aux déterminations de peines relativement à des infractions liées aux drogues illicites. La majorité des renseignements qu’il contient ont été tirés de documents publiés par le Centre canadien de la statistique juridique.
Certains des renseignements contenus dans le présent document doivent faire l’objet d’une interprétation prudente. Bien qu’il serait facile de se servir de cette information pour tirer des conclusions sur la consommation de drogues et la demande de drogues illicites au Canada, il est généralement admis que les statistiques déclarées par les corps policiers sont le reflet de leurs activités. Par conséquent, ces données sont souvent liées à des changements dans les méthodes et les priorités des corps policiers et ne reflètent généralement pas l’évolution de la société. C’est particulièrement le cas des statistiques sur les des drogues illicites communiquées par la police. Il serait toutefois difficile de réaliser une étude exhaustive de la politique canadienne en matière de drogues illicites sans à tout le moins faire un bref survol de certaines statistiques criminelles touchant la consommation de drogues illicites au Canada.
La présente fait partie d’une série de documents produits par la
Direction de la recherche parlementaire de la Bibliothèque du Parlement à
l’intention du Comité spécial du Sénat sur les drogues illicites.
AFFAIRES DÉCLARÉES([1]) ET
ACCUSATIONS
Comme le montre clairement la figure 1 au sujet des affaires déclarées par la police selon l’infraction la plus grave, le nombre d’affaires concernant des infractions relatives aux drogues illicites s’est avéré relativement stable de 1983 à 1995, s’établissant à environ 60 000 par année. Toutefois, de 1995 à 2000, ce nombre s’est accru d’environ 50 p. 100 pour atteindre près de 88 000. En fait, le nombre d’infractions relatives à la drogue a connu une augmentation de 9 p. 100 en 2000 par rapport à l’année précédente.
Cette augmentation est en grande partie attribuable aux infractions relatives au cannabis. Ces affaires représentent la majorité des infractions liées à la drogue au Canada. En 2000, les infractions relatives au cannabis ont constitué un peu plus des 66 000 affaires déclarées, soit 75 p. 100 de toutes les affaires déclarées liées à la drogue. Cette proportion est restée relativement stable au cours des années. Parmi ces 66 000 affaires déclarées, 68 p. 100 (plus de 45 000) étaient liés à la possession du cannabis, 16 p. 100 au trafic, 14 p. 100 à la culture et 2 p. 100 à l’importation de cette drogue([2]). Cela veut dire que plus de 50 p. 100 des affaires déclarées relatives à la drogue étaient liées à la possession de cannabis.
Ces dernières années, la culture du cannabis a
soulevé certaines inquiétudes, plus particulièrement en
Colombie-Britannique. Voici ce
que dit à ce sujet un rapport du Centre canadien de la statistique juridique : « La
question de la culture illicite du cannabis, notamment lorsque celle-ci
s’effectue sans le consentement des propriétaires fonciers concernés, a récemment
pris de l’importance. Ce type d’infraction a également connu une augmentation au
cours des dix dernières années, passant de 5 infractions par 100 000 habitants
en 1990 à 29 infractions par 100 000 habitants en 2000 »([3]).
[Traduction libre]
Source: Statistique Canada,
Catalogue 85-205
Les
figures 2A et 2B indiquent les provinces où les affaires déclarées se sont
produites de 1988 à 1997. Comme
on pouvait s’y attendre, les provinces les plus populeuses figurent en tête
de liste, avec dans l’ordre l’Ontario, la Colombie-Britannique, le Québec
et l’Alberta. Jusque-là, la
Colombie-Britannique avait toujours affiché le plus haut taux de criminalité
provincial lié à la drogue([4]).
Par exemple, en 1997 le taux dans cette province s’établissait à
426 incidents par 100 000 habitants, soit presque le double de
la proportion nationale de 222 incidents par 100 000 habitants.
La même année, Terre-Neuve a enregistré le taux de criminalité le
plus bas relié à la drogue, soit 132 incidents par 100 000 habitants.
Source :
Statistique Canada, catalogue 85-002
Selon les données disponibles (figure 3), il semble que le nombre des
accusations pour des infractions relatives à la drogue ait diminué
sensiblement depuis 1997. Il est
important de garder en mémoire que le nombre d’affaires déclarées (point
dont il a été question précédemment) ne correspond pas au nombre
d’accusations portées par la police. Dans
certains cas, la police rapporte un incident lié à la drogue sans toutefois
porter d’accusations contre le contrevenant.
Il importe de noter que la figure 3 ne contient pas les données
relatives à trois provinces (Nouveau-Brunswick, Manitoba et
Colombie-Britannique) et à un territoire (Nunavut). En outre, les données de
certains tribunaux du Québec ne sont pas représentées dans cette figure.
Par ailleurs, l’information pour les années antérieures à 1995 sont fondées
sur des approximations établies à partir de la répartition moyenne des
accusations de 1995 à 2000.
Puisque
les statistiques concernant la Colombie-Britannique ne sont pas comprises dans
la figure 3, il est évident que le nombre indiqué d’accusations reliées
à la drogue au Canada est beaucoup plus bas qu’il ne devrait l’être.
Comme nous l’avons mentionné, la Colombie-Britannique a dans le passé
constamment enregistré le plus haut taux de criminalité au pays en matière
d’infractions relatives à la drogue. Toutefois,
les statistiques de 1997 révèlent que cette province se montre plus clémente
que les autres au chapitre des accusations portées : « Parmi
les corps policiers des provinces et des territoires, ceux de la
Colombie-Britannique ont enregistré le taux d’accusation le moins élevé
(47 p. 100) en rapport avec des infractions reliées à la drogue.
Seulement 35 p. 100 des affaires déclarées relatives au cannabis
et 36p. 100
des affaires déclarées relatives à d’autres drogues se sont soldées par
des accusations, comparativement à 79 p. 100 et 81 p. 100 respectivement
dans l’ensemble des autres provinces »([5]). [Traduction libre]
En ce
qui a trait aux infractions relatives au cannabis pour l’année 2000, ce
sont les hommes qui sont les plus susceptibles d’être accusés d’une
infraction. Pour ce qui est des
jeunes (de 12 à 17 ans) et des adultes, 87 p. 100 des personnes
accusées d’une infraction relative au cannabis sont de sexe masculin([6]).
De plus, les adultes sont beaucoup plus susceptibles d’être accusés
que les jeunes (83 p. 100 des personnes accusées sont des adultes)([7]).
Source :
Statistique Canada, tableau 252-0004
CONDAMNATIONS
La figure 4 illustre en détail les résultats
des accusations pour des infractions reliées à la drogue dans certaines
provinces. De 1995 à 2000, il semble qu’il y ait eu une hausse relativement importante
de la proportion d’accusations qui ont été suspendues ou retirées.
Comme il fallait s’y attendre, il en résulte un nombre moins grand
de verdicts de culpabilité rendus à la suite d’accusations pour des
infractions relatives à la drogue. Ici
encore, il faut mentionner que la
figure 4 ne contient pas les données relatives à trois provinces
(Nouveau-Brunswick, Manitoba et Colombie-Britannique) et à un territoire
(Nunavut). En outre, les données de certains tribunaux du Québec ne
sont pas représentées dans cette figure.
Par ailleurs, l’information pour les années antérieures à 1995
sont fondées sur des approximations établies à partir de la répartition
moyenne des accusations de 1995 à 2000.
Source : Statistique Canada, tableau 252-0003
PEINES D’EMPRISONNEMENT
En date du 31 décembre 2000, 5 779 personnes reconnues coupables d’infractions reliées à la drogue étaient sous responsabilité fédérale (c’est-à-dire qu’elles purgeaient une peine dans un établissement fédéral ou qu’elles étaient en liberté sous condition). De ce nombre, 3 890 purgeaient des peines pour trafic, 621 pour importation, 225 pour culture et 2 221 pour possession de drogues([8]).
Au 31 décembre 2000, des 5 779 personnes condamnées pour
une infraction liée à la drogue, 2 548 purgeaient des peines dans des
établissements correctionnels fédéraux : 1 613 pour trafic, 113 pour
importation, 82 pour culture et 1 318 pour possession de drogues([9]).
En outre, 3 231 étaient en liberté sous condition : 2 312
pour trafic, 508 pour importation, 145 pour culture et 946 pour possession([10]).
Au cours de la période de 1995 à 2000, le nombre de personnes sous
responsabilité fédérale condamnées pour une infraction liée à la drogue
a augmenté de près de 9 p. 100. Cette
augmentation est en grande partie attribuable à la hausse de 19 p. 100
du nombre de personnes ayant obtenu leur liberté sous condition au cours de
cette période. Du même coup, le
nombre des personnes purgeant une peine dans un établissement a diminué de 2 p.
100([11]).
À la fin de 2000, les personnes sous responsabilité fédérale
condamnées pour une infraction liée à la drogue purgeaient une peine
d’une durée moyenne de 2,2 ans. Les
personnes obtenant leur liberté sous condition purgeaient en moyenne 3,7 ans. Bien que ces durées soient inférieures à la durée moyenne
des peines relatives aux infractions non reliées à la drogue, il est intéressant
de souligner que la durée moyenne des peines purgées pour possession était
de 2,52 ans, alors qu’elle était de 1,89 an pour trafic, de 1,48 an
pour importation et de 0,88 an pour culture. Pour les personnes ayant obtenu une mise en liberté sous
condition, la peine purgée durait en moyenne 4,6 ans pour importation,
3,6 ans pour possession, 3,5 ans pour trafic et 2,2 ans pour culture.
La
figure 5 contient des données sur le nombre d’admissions par région dans
des établissements correctionnels fédéraux pour une infraction liée à la
drogue durant l’année 2000, et le nombre de détenus dans diverses régions
du pays au 31 décembre 2000. Ces
données concernent des délinquants qui se sont vu imposer une peine de deux
ans ou plus.
Source : Forum Recherche sur l’actualité correctionnelle, septembre 2001, vol. 13, p. 26.
La
figure 6 présente des données sur le nombre d’admissions dans des établissements
correctionnels provinciaux pour certaines infractions reliées à la drogue
(trafic et importation). Ces données
concernent des délinquants qui se sont vu imposer une peine de moins de deux
ans.
Source :
Statistique Canada, catalogue 85-211.
Source :
Statistique Canada, catalogue 85-211.
Pour l’année 1996-1997, 64 p. 100 des
personnes reconnues coupables de trafic de drogues ont reçu une peine
d’emprisonnement. La peine
durait en moyenne quatre mois. La
probation représentait la peine la plus sévère dans 24 p. 100 des cas
et l’imposition d’une amende, dans 9 p. 100 des cas([12]).
En ce qui a trait aux infractions relatives à la
possession, l’amende était imposée dans 63 p. 100 des cas, celle-ci
s’élevant à 200 $ en moyenne. L’amende
représentait la peine la plus sévère dans 55 p. 100 des cas, la
probation dans 22 p. 100 des cas et l’incarcération, dans 13 p. 100
des cas([13]).
La présente partie ne comporte pas de statistiques pour le
Nouveau-Brunswick, le Manitoba, la Colombie-Britannique et les Territoires du
Nord-Ouest.
Vous
trouverez ci-après les données qui ont permis de créer les figures du présent
document.
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([1])
Selon le Centre canadien de la statistique juridique, il s’agit
d’affaires connues de la police qui sont saisies et
communiquées au Centre canadien de la statistique juridique selon un
ensemble, défini à l’échelle nationale, de catégories et de définitions
relatives au crime. Le Centre
canadien de la statistique juridique tient à signaler que les statistiques
sur la criminalité peuvent varier en fonction de nombreux facteurs,
notamment les déclarations par le public à la police, les données
communiquées par la police au Centre canadien de la statistique juridique,
l’impact de nouvelles initiatives telles que des changements apportés aux
lois, aux politiques ou aux pratiques d’application de la loi et enfin les
changements sociaux, économiques et démographiques.
De plus, le sondage ne tient compte que de l’infraction la plus
grave pour chaque affaire criminelle, ce qui entraîne une sous-estimation
du nombre d’incidents relatifs à la drogue.
([2])
Centre canadien de la statistique juridique, Statistiques de la
criminalité au Canada, 2000, Juristat, catalogue no
85-002-XIE, vol. 21, no 8, p. 11.
([4])
Fait à noter, en 1997 les taux affichés par le Yukon et les T. N.-O.
étaient même supérieurs à celui de la Colombie-Britannique.
([5])
Centre canadien de la statistique juridique, Drogues illicites et
criminalité au Canada, Juristat, catalogue no 85-002-XIE,
vol. 19, no 1, p. 5. Ici, « autres drogues » signifie :
1) les drogues illicites autres que le cannabis, la cocaïne ou l’héroïne
2) les drogues réglementées.
([6])
Statistiques de la criminalité au Canada, 2000, note 2 plus
haut, p. 19.
([8])
Service correctionnel du Canada, Forum Recherche sur l’actualité
correctionnelle, volume 13, no 3, septembre 2001, p. 25.
Il est à noter que les données relatives à la possession de
drogues dans le but d’en faire le trafic sont comprises dans les
statistiques sur le trafic.
([9])
Ibid. Il
est à noter que certaines personnes reconnues coupables peuvent figurer
dans plusieurs catégories d’infractions reliées à la drogue.
([12])
Drogues illicites et criminalité au Canada, note 5 plus haut,
p. 7.