SIR JOHN A. MACDONALD
Les victoires, les tragédies, l'alcoolisme et la fierté nationale
ont marqué la vie du premier premier ministre du Canada.
Sir John A. Macdonald, reconnu comme le père fondateur
du Canada, a uni les représentants francophones et anglophones
du pays et initié la construction du chemin de fer du
Canadien Pacifique. Il était un homme politique habile
et a su gouverner en tenant compte des différents intérêts
du pays. Les qualités qui ont fait de lui un dirigeant
efficace sont celles qui caractérisent la nation canadienne.
![John A. Macdonald](/web/20061101114638im_/http://www.cbc.ca/grandscanadiens/images/topten/macdonald2.jpg) |
Sir John A. Macdonald |
|
John A. Macdonald est né le 10 janvier 1815 à Glasgow, en Écosse,
de l'union de Helen Shaw et Hugh Macdonald. Son père, un marchand,
ne réussit pas bien en affaires et veut tenter de repartir à neuf.
En 1820, il décide d'émigrer avec sa famille à Kingston,
dans le Haut-Canada. Hugh Macdonald s'enrichit dans son nouveau pays, ce qui
lui permet d'envoyer son fils dans les meilleures écoles. John devient
avocat et ouvre son propre cabinet à Kingston, dès l'âge
de 19 ans. En 1844, quand il est élu député de Kingston à l'Assemblée
législative, il est un avocat réputé et un homme d'affaires à la
tête d'au moins dix sociétés.
Il épouse sa cousine Isabelle Clark, mais deux ans après leur
mariage, celle-ci est atteinte d'une maladie mystérieuse et commence à dépérir.
Elle donne naissance à deux garçons. Le premier fils meurt à l'âge
de 13 mois; le deuxième enfant, Hugh John, devient un avocat prospère.
Isabelle meurt en 1857.
John A. Macdonald sera le chef du Parti conservateur pendant 24 ans, entre
1867 et 1891. Il dirigera le pays à titre de premier ministre à deux
reprises durant cette période, soit de 1867 à 1873, puis de
1878 à 1891. En 1847 et 1848, il occupe les postes de receveur général
et de commissaire des terres de la Couronne. Lors de sa réélection
en 1854, il est nommé procureur général du Haut-Canada
au sein du gouvernement de coalition d'Allan MacNab et d'Augustin-Norbert
Morin. En 1855, il réussit à faire voter un projet de loi controversé sur
les écoles séparées que réclament les Francophones
catholiques, alors que les électeurs protestants du Haut-Canada s'y
opposent. En 1856, il devient le chef du gouvernement du Haut-Canada. John
A. Macdonald prouve qu'il est un homme politique perspicace en formant une
alliance durable avec George-Étienne Cartier, ce qui lui permettra
de garder le Bas-Canada dans le giron conservateur.
L'État grandit, la consommation d'alcool augmente
Sous la direction de John A. Macdonald, L'État canadien connaît
de nombreuses transformations avec, notamment, l'instauration d'un régime
public d'assistance et de protection sociales, l'établissement de refuges
pour les pauvres, l'imposition de normes aux institutions gouvernementales,
la création de nouveaux départements dont ceux de l'agriculture,
des pêcheries et de la milice, et la mise en oeuvre en 1857 de tarifs
douaniers pour protéger l'industrie canadienne. John A. Macdonald souhaite
aussi faire voter une loi sur l'expansion de la milice. Or, ce projet soulève
un vaste mouvement d'opposition dans le pays. Le projet de loi est finalement
défait en 1862, et le gouvernement démissionne.
Durant la campagne électorale qui suit, les problèmes d'alcool
de John A. Macdonald deviennent notoires. Les journaux parlent de ses « crises »,
un mot de code qu'ils utilisent pour décrire son état d'ébriété lors
des assemblées électorales. Son adversaire essaie de tirer parti
de la situation et déclare : « Est-ce que c'est cet homme, un
ivrogne, que vous voulez à la tête du pays?» John A. Macdonald
réplique du tac au tac : « Si je suis malade..., ce n'est pas
parce que j'ai bu, mais parce que je suis obligée d'écouter
les divagations de mon honorable adversaire. »
À l'issue de la campagne, les Réformistes prennent le pouvoir
en remportant le double des sièges des Conservateurs. Toutefois une
menace venant du sud oblige les deux partis à s'unir et à entreprendre
la marche qui mènera le pays à la Confédération.
La Guerre civile fait rage aux États-Unis et les rebelles américains
ont l'œil sur le Canada. Cette situation favorise la formation de la
Grande Coalition. Le 30 juin 1864, les Réformistes s'unissent aux Conservateurs
et aux Bleus de George-Étienne Cartier dans le but de façonner
un gouvernement d'union nationale. Alors que John A. Macdonald s'était
toujours montré indifférent à l'union, craignant qu'il
en résulte un gouvernement central faible, il la défend maintenant
avec ardeur.
Quelques mois plus tard, les chefs des trois partis se rendent en bateau à l'Île-du-Prince-Édouard
où a lieu la Conférence de Charlottetown. John A. Macdonald
prononce un discours passionné en faveur de la participation des provinces
maritimes à l'union. Les chefs conviennent de se réunir à Québec
afin de conclure une entente. La conférence a lieu en octobre et regroupe
les représentants du Canada, de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau-Brunswick
et de l'Île-du-Prince-Édouard, qui jetteront les bases du futur
Acte de l'Amérique du Nord britannique.
En 1865, Macdonald et plusieurs autres pères de la Confédération
partent pour l'Angleterre afin de faire ratifier l'accord. Le 1er juin 1967,
le Parlement britannique vote l'Acte de l'Amérique du Nord britannique,
qui donnera naissance à la nation canadienne. John A. Macdonald est
choisi comme premier ministre du nouveau pays, et on le nomme Chevalier Commandeur
de l'Ordre du Bain, ce qui lui confère le titre de « Sir ».
Il remporte facilement la victoire aux élections tenues durant l'été de
1867.
Cette année-là, il épouse Susan Agnes Bernard, qui lui
donnera une fille en 1869. L'enfant naît avec handicap physique et mental,
et son état ne s'améliorera jamais. John A. Macdonald en est
très affecté et parfois, quand il rentre tard d'une session
parlementaire, il berce sa fille pour l'endormir.
Les racines d'une nation
Après sa victoire aux élections de 1867, Macdonald commence à rédiger
la Constitution du Canada. Il prévoit des clauses qui établiront
un Parlement bilingue et un système pénal. Le Parlement aura
la responsabilité de maintenir « la paix, l'ordre et le bon gouvernement ».
Les autres juridictions fédérales comprendront notamment la
défense, les finances, le commerce, la monnaie, le système bancaire
et les impôts. Une disposition assurera la suprématie du gouvernement
fédéral, en lui accordant le droit d'annuler les lois provinciales.
Une des priorités du premier ministre est l'appropriation par le Canada
de la terre de Rupert, une région située à l'ouest du
Haut-Canada et administrée par la Compagnie de la Baie d'Hudson. Les États-Unis
offrent une forte somme à l'Angleterre pour cette région, mais
Londres la cède au Canada pour 300 000 livres. La région sera
officiellement transférée au Canada le 1er décembre 1869.
L'annonce cette transaction inquiète au plus haut point les Métis
du Manitoba, qui risquent ainsi de perdre leurs terres, et leurs craintes
seront attisées par Louis Riel. John A. Macdonald redoute l'influence
de ce meneur métis, qu'il considère comme un « homme intelligent ».
Les Métis décident de défier le Parlement fédéral
en instituant leur propre gouvernement provisoire, et Louis Riel entreprend
des négociations avec le gouvernement du Canada. En 1870, il obtient
la promulgation de l'Acte du Manitoba, qui accorde au Manitoba le statut de
province.
Après avoir fait entrer le Manitoba dans le Canada, John A. Macdonald
se tourne vers la Colombie-Britannique. De nombreux habitants de la Colombie-Britannique,
notamment des Américains venus s'y installer au moment de la ruée
vers l'or, préconisent l'union avec les États-Unis. Étant
donnée que cette région est coupée du Canada par une
cavalcade de montagnes, John A. Macdonald, en politicien astucieux, pense
que la solution au problème réside dans la construction d'un
chemin de fer d'un océan à l'autre. La construction du Canadien
Pacifique sera plus tard considérée par de nombreuses personnes
comme la grande réalisation de John A. Macdonald, mais c'est elle qui
finira par causer sa perte.
Vers 1872, Macdonald choisit sir Hugh Allan de Montréal pour former
la compagnie qui construira le chemin de fer. Toutfois, il ignore que son
bras droit, George-Étienne Cartier, a promis à l'homme d'affaires
une majorité des actions de la compagnie, en échange d'une somme
de 350 000 $ pour financer les élections. Ces tractations sont bientôt
révélées sur la place publique et qualifiées de « scandale
du Pacifique ». Les journalistes découvrent des télégrammes
attestant que John A. Macdonald et George-Étienne Cartier ont reçu
de fortes sommes d'argent de Hugh Allan pendant l'étude des soumissions
pour la construction du chemin de fer. Le gouvernement de John A. Macdonald
est contraint de démissionner le 5 novembre 1873 - au moment même
où l'Île-du-Prince-Édouard se joint au Canada.
Nouvelle ascension d'un homme politique tenace
Aux élections de 1874, les Conservateurs cèdent le pouvoir
aux Libéraux dont le chef est Alexander MacKenzie. Mais le mandat de
celui-ci est de courte durée, en raison d'une récession économique
qui frappe de pays peu après les élections. John A. Macdonald
revient au pouvoir en 1878 en prônant sa « politique nationale ».
Ce programme prévoit une série de mesures dont la construction
du chemin de fer transcontinental, l'augmentation de l'immigration européenne
pour coloniser l'Ouest et l'intensification des échanges commerciaux
entre l'ouest et l'est du pays. Une fois au pouvoir, John A.Macdonald prend
en charge le Département de l'intérieur et donne au Canadien
Pacifique l'autorisation de construire le chemin de fer, dont le dernier crampon
sera posé en novembre 1885.
La même année, Louis Riel resurgit à la tête de
la rébellion du Nord-Ouest. Les Métis et les autres groupes
autochtones de la Saskatchewan se sentent menacés par le nombre grandissant
de colons européens qui envahissent leurs terres et organisent la résistance
dans le village de Batouche. Ottawa envoie une importante force militaire
qui attaque la ville sur deux fronts : depuis la rivière Saskatchewan
Sud et par voie de terre. Au terme d'une bataille de trois jours, Louis Riel
et les autres chefs métis capitulent. À la suite de cette défaite,
Louis Riel est condamné pour trahison par un jury composé de
six membres protestants. John A. Macdonald lui accorde trois sursis, mais
Louis Riel est pendu à Regina le 16 novembre 1885. Son exécution
provoque des dissensions entre les Canadien français et les Canadiens
anglais.
En 1887, Macdonald est élu une nouvelle fois avec un gouvernement
majoritaire, mais il perd du terrain au Québec. Il dispute ses dernières élections
en mars 1891. Le vétéran de la politique a alors 76 ans et commence à sentir
l'usure de toutes ces années de surmenage, de stress, de consommation
d'alcool et de maladies diverses - il a souffert notamment d'un calcul biliaire
en 1870, et son bureau a été transformé en chambre d'hôpital
pendant deux mois.
La session parlementaire reprend à la fin avril 1891. Le 29 mai, Macdonald
subit un accident vasculaire cérébral et perd l'usage de la
parole. Il meurt une semaine plus tard, le 6 juin. Après des funérailles
d'État, il est inhumé au cimetière Carataqui, près
de Kingston.
Des hommes politiques, amis et historiens se souviennent de lui comme d'un
dirigeant habile, un négociateur redoutable et un défenseur
passionné du Canada. John A. Macdonald laisse en héritage un État
centralisé qui servira de cadre à de nombreux gouvernements
qui suivront. |