J’ai répondu que non, que je voulais étudier l’histoire.La marine et moi avons eu
de longues discussions à ce sujet.On m’a fait venir à Ottawa pour rencontrer le
directeur de l’Instruction de la marine et lui expliquer comment l’histoire pouvait
bien être utile à un officier de marine.Ensuite, je lui ai démontré à quel point il était
important de tirer des leçons du passé, surtout en matière de stratégie navale, et
ainsi de suite.Vaguement impressionné, il a fini par me donner son accord, mais
avec réticence : « Bon, si vous voulez réellement gâcher votre existence en étudiant
l’histoire, allez-y, mais nous avons vraiment besoin d’ingénieurs dans la marine. »
À ce stade, j’avais décidé que, de toute évidence, ça ne collerait pas très bien entre la
marine et moi.Il m’a fallu travailler un an pour rembourser 3 378,29 $ (pour une
raison qui m’échappe, ce chiffre m’est toujours resté en mémoire), ce qui
représentait le prix de mon instruction jusque-là.J’ai travaillé un an au NCSM
Hochelaga, la base d’instruction navale montréalaise de Lachine, afin de rembourser
la marine et j’y ai gagné un petit supplément qui m’a permis d’entamer la deuxième
année du programme d’histoire et de philosophie de Queen’s.
Ces événements ont marqué la fin de ma carrière dans la marine et, en 1963, j’ai
commencé mes études à Queen’s.L’été, grâce à l’instruction que j’avais reçue dans
la marine, je réussissais à obtenir du travail à bord de bateaux d’excursion.Il m’a
fallu passer un examen pour devenir capitaine suppléant d’un navire commercial sur
le Saint-Laurent.Je partais de Kingston, je faisais le tour des Mille-Îles avec une
brève escale aux deux châteaux, puis je continuais jusqu’à Brockville ou Gananoque
avant de rentrer à Kingston.
En 1966, tout en terminant mes études, j’ai commencé à travailler aux archives de
Queen’s avec Harold Naugler, un étudiant du niveau supérieur qui travaillait à mi-
temps, et je me suis mis à explorer la profession d’archiviste.Nous apprenions le
métier nous-mêmes, car il n’existait pas de cours.Nous lisions des livres, nous
discutions beaucoup et nous nous efforcions de démêler en quoi consistait ce travail.
Harold allait devenir directeur ici-même, aux Archives, dans les années 1970 et
1980, et travaille à la préservation des documents électroniques.
Quant au poste d’archiviste que j’ai obtenu, voici comment les choses se sont
passées.Un beau jour, je suis allé au bureau du personnel de Queen’s, et je leur ai
dit que j’allais obtenir mon diplôme en histoire et que j’aimerais beaucoup demeurer
à Kingston.Auraient-ils du travail pour un historien ?C’était un lundi.Ils m’ont
répondu que, le vendredi précédent, l’archiviste les avait quittés pour aller travailler
à la bibliothèque.Est-ce que ça me tentait de devenir archiviste ?J’ai dit oui, bien
sûr.
Intervieweur : Et c’est tout ce que vous avez passé comme entrevue pour obtenir le
poste ?
M. Wilson : À peu près.Je suis allé voir l’une des bibliothécaires principales, elle
était très heureuse de faire ma connaissance, elle m’a embauché, et voilà.
Intervieweur : Et c’est comme ça que votre carrière a débuté.
M. Wilson : Ce qu’il y a de terrible, là-dedans, c’est que moi, aujourd’hui, il ne me
viendrait jamais à l’idée de m’embaucher.
Mémoire de maîtrise
Le fonds d’Adam Shortt était conservé à Queen’s.J’ai commencé à comprendre
que le projet de Shortt avait été un élément du plan global de publication des
Archives, et que tout le processus faisait partie d’un programme très actif
d’extension des services attribuable à Arthur Doughty.C’est alors que j’ai
commencé à lire les documents de Doughty, et tout mon mémoire s’en est trouvé
modifié, jusqu’à ce qu’il finisse par devenir : « Shortt et Doughty, le rôle culturel des
Archives publiques du Canada de 1904 à 1935 ». Par la suite, j’en ai fait un
document démesuré après avoir étudié ce que Shortt et Doughty avaient tenté de
faire des Archives, parallèlement à Mackenzie King, Laurier et Borden : quelque
chose de très éloigné de l’image traditionnelle.
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