Au cours des derniers mois, on a beaucoup parlé
de la confusion suscitée par la tenue à
Montréal de trois festivals - des festivals
espacés de quelques mois seulement. On
a critiqué Téléfilm, et on
m'a critiqué en tant que directeur général
pour ne pas avoir trouvé une solution aux
problèmes. Je tiens d'abord à signaler
que si je ne me suis pas impliqué directement,
c'est pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, ce dossier date de bien longtemps
avant mon arrivée et il était bien
géré par Charles Bélanger,
président du conseil d'administration de
Téléfilm. Deuxièmement :
j'avais des défis et des responsabilités
dans l'immédiat : un nouveau travail extrêmement
exigeant, et la négociation d'une nouvelle
collaboration avec le Fonds canadien de télévision.
Troisièmement : j'avais occupé le
poste de directeur du festival de Toronto pendant
huit ans (1978-1985), période durant laquelle
j'ai eu plusieurs confrontations avec le Festival
des films du monde de Montréal (FFM). Et
j'ai continué de siéger au conseil
du Festival de Toronto jusqu'à l'annonce
de ma nomination comme directeur général
de Téléfilm en novembre 2004, où
j'ai alors démissionné du conseil.
Après neuf mois dans mes nouvelles fonctions
et avec la saison des festivals qui tire à
sa fin (Montréal, Toronto, Halifax, Vancouver
et quelques festivals de Sudbury à Calgary
et jusqu'en Abitibi), il est temps de faire le
point.
J'appuie totalement la décision de Téléfilm
et de la Société de développement
des industries culturelles (SODEC) de retirer
leur soutien financier au Festival des films du
monde de Montréal.
Il y avait des inquiétudes légitimes
au sujet de la gouvernance et de l'imputabilité
financière du FFM. Des professionnels du
cinéma québécois et des journalistes
s'inquiétaient aussi parce que le FFM était
en perte de vitesse sur les scènes nationale
et internationale.
En tant qu'administrateur de fonds publics et
de partenaire de l'industrie, Téléfilm
avait l'obligation d'agir. Nous ne pouvions pas
rester là à ne rien faire alors
que nous connaissions la gravité des problèmes.
Téléfilm et la SODEC ont donc commandé
une évaluation indépendante des
quatre grands festivals internationaux du Canada
(festival de Toronto; FFM; festival de Vancouver
et festival de l'Atlantique). Le FFM a pris la
décision de ne pas coopérer.
L'étude indépendante de Secor a
révélé que le FFM ne répondait
plus aux critères d'un festival moderne,
transparent et imputable.
Téléfilm et la SODEC ont donc lancé
un appel de propositions auprès de professionnels
intéressés à relever le défi
d'organiser un nouveau festival international
du film à Montréal. Le FFM ne fut
pas exclu du processus, mais encore une fois,
il a décidé de ne pas y participer.
Le projet du regroupement pour un festival de
cinéma à Montréal, appuyé
par Alain Simard de l'équipe Spectra et
Daniel Langlois, s'est imposé au comité
de sélection de Téléfilm
et de la SODEC comme le plus prometteur.
Ce plan initial, ne l'oublions pas, impliquait
une collaboration entre le nouvel événement
et le Festival du nouveau cinéma. Malheureusement,
à ce jour, ce partenariat ne s'est pas
encore concrétisé.
Mais cela n'affecte en rien le raisonnement qui
a mené à la décision de retirer
tout soutien financier au FFM.
Comme je l'ai déjà dit, j'ai été
le premier directeur du Festival international
du film de Toronto, et je sais très bien
qu'un nouveau festival a de la difficulté
à acquérir de bons films et à
attirer le public. Je me souviens que le public
des premières éditions du Festival
de Toronto s'est parfois limité à
une poignée de gens -- dans une salle de
600 sièges - et en présence d'un
cinéaste qui aurait bien voulu être
ailleurs. À ses débuts, le Festival
de Toronto a été la cible de critiques
cinglantes de la part des médias du canada
et du monde entier.
Je devine très bien les sentiments et
la frustration des organisateurs du Festival international
de films de Montréal en cette première
année d'existence. Mais j'ai été
impressionné par ce qu'ils ont réussi
à accomplir en si peu de temps. Il y a
eu des ratés et des déceptions -
comme c'était une première édition,
rien de ça ne m'a surpris.
La sélection des films doit être
améliorée. Il faut un mélange
de premières mondiales et des meilleurs
films des autres grands festivals du film. On
ne bâti pas sa crédibilité
auprès des cinéastes et des distributeurs
en un an. C'est quelque chose qui s'établit
avec le temps.
C'est la même chose avec les cinéphiles.
Il faut gagner leur confiance.
Il y aura des changements positifs au cours des
prochains mois - il le faut - et téléfilm
jouera un rôle constructif - au besoin.
Wayne Clarkson
Directeur général
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