Agence de gestion des resources humaines de la fonction publique du Canada
Sautez à la colonne latéraleSautez à la colonne principale
English Contactez-nous Aide Recherche Site du Canada
Employés Gestionnaires professionels RH Outils Index A-Z
Quoi de neuf? À notre sujet Politiques Carte du site Accueil

Bureau des valeurs et de l’éthique de la fonction publique
Code des valeurs et d'éthique Code des valeurs et d'éthique
Interprétation du Code Guide d'interprétation
Quelles sont les valeurs et l'éthique de la fonction publique?
Obligation de loyauté
Réseaux de soutien en matière de valeurs et d'éthique
Pratiques exemplaires
Rapports et publications
Discours et présentations
Partenariats
Valeurs et éthique à l'international Valeurs et éthique à l'internationale
Valeurs et éthique dans les provinces et territoires
Catalogue
des produits
Catalogue des produits en matière de valeurs et d'éthique
Votre opinion est importante
Format(s) de rechange
Version imprimable

Discours d'ouverture


Discours d’ouverture, Symposium national en éthique 
Université Saint-Paul, Ottawa, Canada
25 septembre 2004

Ralph Heintzman Vice-président 
Valeurs et éthique de la fonction publique, Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada

Bonjour à tous et je vous remercie beaucoup, Denis, de votre présentation fort aimable. Il a toujours été un honneur pour moi de collaborer avec M. Desautels, que ce soit en œuvrant en parallèle avec lui lorsque j’étais au Secrétariat du Conseil du Trésor, ou dans une relation plus étroite lorsque j’ai apporté mon appui au Groupe de travail sur la divulgation des actes répréhensibles. Je suis donc ravi de me retrouver à nouveau en sa compagnie ce matin.

Je me sens presque obligé de commencer par m’excuser de ne pas être Alex Himelfarb! S’il s’agit pour vous d’une mauvaise surprise, ou au moins d’une déception, c’est pour moi un honneur d’avoir l’occasion, ce matin, de vous parler des valeurs et de l’éthique dans la fonction publique au nom du gouvernement fédéral.

Je sais que, s’il avait été là ce matin, Alex Himelfarb aurait tenu à féliciter les organisateurs de ce symposium pour avoir eu l’idée d’une telle conférence, consacrée à un sujet qui touche d’aussi près les faits et gestes du gouvernement fédéral actuel. C’est donc à moi qu’il incombe, à sa place, de remercier et de féliciter les organisateurs de ce symposium, non seulement pour avoir eu l’idée de l’organiser, mais également pour la portée qu'ils lui ont donnée, pour la vaste gamme de thèmes et de sujets abordés et pour la qualité des conférenciers.

Vous avez invité Alex à venir vous parler ce matin de la vision du gouvernement canadien en matière de valeurs et de l’éthique de la fonction publique. Je vais donc commencer par attirer votre attention sur la signification de ces deux termes, en anglais, « ethics » et « values ».

La signification et l’utilisation que nous faisons aujourd’hui de ces deux notions sont sensiblement différentes. Nous nous démarquons peut-être en cela de la signification que les philosophes leur confèrent, mais si nous examinons l’utilisation que nous en faisons aujourd’hui dans nos organisations, nous constatons que leurs significations sont différentes.

La nature bilingue du Canada, avec nos deux langues officielles, pose un autre défi parce que les mots ne sont pas des calques exacts dans les deux langues. En français, nous parlerions probablement « d'éthique et de déontologie », ou de quelque chose de semblable, au lieu « de valeurs et d’éthique ». Il y a donc un problème de correspondance entre les deux langues officielles.

Pour en revenir à l’anglais, permettez-moi d'attirer votre attention sur ces deux termes : « ethics » et« values ». Dans l’utilisation que nous en faisons aujourd’hui au quotidien, « ethics » ou déontologie fait pour l’essentiel référence à un comportement basé sur des règles. Cela signifie que vous savez très bien, quand il s’agit de « ethics » ou de déontologie, si vous êtes du bon ou du mauvais côté, si vous avez enfreint ou non une règle.

Les valeurs, elles, ont davantage trait aux aspirations. Pour quelle raison sommes-nous ici, qui sommes-nous, que défendons-nous, qui voulons-nous devenir quand nous serons grands.

Le premier point sur lequel je veux insister tout de suite est que nous avons besoin des deux. Nous avons besoin des règles, mais les règles sont lettre morte si elles ne sont pas inspirées et motivées par l'ethos, l'esprit qui les sous-tend. C'est précisément ce que nous entendons quand nous parlons des valeurs de la fonction publique.

Nous devons avoir un comportement conforme à la déontologie, un bon comportement au sens des règles, mais nous devons aussi avoir des valeurs qui nous propulsent vers l’avenir, qui définissent l’institution que nous essayons de mettre en place et qui précisent le genre de personnes que nous essayons de devenir.

Si Alex Himelfarb s’était adressé à vous ce matin, je sais qu’il aurait ajouté – et je suis ravi de le faire à sa place – que, s’il est très bien d’avoir une vision des valeurs et de l’éthique, cette vision ne suffit pas. La vision est la projection dans le temps que nous essayons de réaliser. Il nous faut donc absolument savoir si nous nous en approchons ou non. Nous devons donc nous intéresser en même temps aux résultats ou trouver d'autres façons de déterminer si nous sommes prêts ou non de concrétiser cette vision. C'est là un point sur lequel je vais revenir.

Il est évident que traiter de valeurs et d’éthique dans le contexte actuel est un peu délicat pour le moins, pour ne pas dire un peu difficile. Les sujets abordés ces jours-ci dans les journaux laissent entendre que, dans certains cas, nous n’avons pas concrétisé cette vision, ou ces idéaux, et que, peut-être, il nous est parfois arrivé de ne pas respecter les règles.

Je ne crois toutefois pas qu’il soit nécessaire de vous rappeler que c’est le cas dans pratiquement tous les secteurs de la société et de la vie à notre époque. C’est certainement vrai en ce qui concerne la fonction publique, mais c’est aussi vrai pour les autres. J’ai lu cette semaine, dans le Globe and Mail, une citation du Président de la Securities and Exchange Commission des États-Unis. Il déclarait que la haute direction et les conseils d’administration d’un grand nombre de sociétés américaines ont trahi leurs investisseurs et leurs employés. Répondre en permanence aux attentes raisonnables du public constitue actuellement un défi pour tous les secteurs, un défi encore compliqué par quantité de choses qui surviennent dans le monde d’aujourd’hui. Je pense en particulier au relèvement des normes en matière de transparence et d’ouverture, à l’évolution de ce qui est considéré comme acceptable, et ainsi de suite. Les gens sont quelquefois coincés par le temps. Ils respectent encore une façon de faire, où une vision commune, qui peut avoir été utile pendant un certain temps, mais qui ne l’est plus. Et ils n’ont pas fait la transition…

Je pense que ce décalage est lié au défi inhérent auquel nous sommes confrontés dans la fonction publique et, en réalité, dans toute organisation, soit la nécessité de concilier, de gérer et d'harmoniser des objectifs divergents, un thème sur lequel je reviendrai. La maîtrise de ce défi est importante pour tout dirigeant d'une organisation, et en particulier pour ceux d’entre nous qui oeuvrent dans la fonction publique.

Ce qui importe c’est la persévérance. La question n'est pas de savoir si, à un moment donné – et je cite presque John Tait ici – si, à un moment particulier de notre vie, nous n’atteignons pas l’idéal. Ce qui importe est que nous parvenions à nous relever, que nous nous souvenions de ce que nous voulons faire, de ce que nous essayons d'atteindre, et que nous continuions à essayer.

Je sais que si Alex Himelfarb était parmi nous ce matin, il tiendrait à ce que nous fassions la distinction, en ce qui concerne ce défi, entre deux types d'erreurs bien distinctes. Il y a les erreurs faites de bonne foi. Si votre erreur découle d'une bonne intention ou d'une intention louable, je crois que le Greffier serait d'avis qu'il faut la pardonner et, dans une certaine mesure, presque l’encourager. Bien sur, je ne dis pas cela au sens strict, mais si nous voulons que les fonctionnaires innovent, s’efforcent d’atteindre des résultats importants de façon imaginative, la prise de risque raisonnable aboutira parfois à des erreurs. On ne parvient pas toujours au bon résultat du premier coup.

Mais il y a un autre type d’erreurs, qui se produit quand on fait fie de ses valeurs et de son éthique, ou qu’on les néglige, que ce soit de façon délibérée ou non. Je suis convaincu que le Greffier vous dirait que, face à celles-ci, nous devons adopter une autre attitude, beaucoup plus rigoureuse. Les gens doivent en être tenus strictement responsables.

Toutefois, ce qui importe est de continuer à essayer de bien faire. Je sais qu’Alex aurait tenu à évoquer devant vous le cheminement parcouru par le gouvernement fédéral au cours de la dernière décennie et la voie qu'il continue à suivre. Nous ne sommes pas parvenus au bout de cette voie, et ce ne sera jamais le cas. Il aurait évoqué le Groupe de travail Tait – le Groupe de travail sur les valeurs et l’éthique dans la fonction publique – et le rapport qu’il a produit en 1996, intitulé De solides assises, dont vous pourrez trouver des copies au comptoir du Bureau des valeurs et de l’éthique de la fonction publique qui se trouve dans le hall d’entrée. Je suis ravi qu’il aurait eu l’intention d’évoquer ce rapport, pour au moins deux raisons. La première est que nous étions tous deux membres de ce Groupe de travail, et nous en avons gardé donc tous deux, bien naturellement, des sentiments chaleureux à son égard! La seconde raison est que nombre des développements actuels au sein de la fonction publique, dans les domaines des valeurs et de l’éthique, sont apparus à la suite de la publication par le Groupe de travail Tait du rapport, De solides assises, et découlent de sa logique.Je vous recommande donc la lecture de ce document.

J’aimerais vous rappeler deux aspects marquants de ce rapport. Tout d’abord, il utilise une approche inductive par opposition à une approche déductive. Le Groupe de travail n’a pas débuté ses travaux en affirmant qu’il y a des valeurs propres à la fonction publique et donc… Il a plutôt commencé en se demandant quels sont les défis auxquels nous sommes confrontés dans la fonction publique, et comment nous pouvons les aborder. Quand nous nous attaquons à cette tâche, quelles sont les valeurs qui font surface de façon naturelle, spontanée ou inévitable? Quelles sont les valeurs sans lesquelles nous ne pourrions même pas parler de fonction publique? Nous pourrions donc dire, en exagérant à peine, que le rapport Tait est arrivé à la question des valeurs et de l'éthique « à reculons ». Je suis d’avis qu’il s’agit là d’une caractéristique méthodologique très importante dont il faut nous souvenir et que nous devrions en vérité continuer à utiliser aujourd’hui, c’est-à-dire commencer l’analyse par le problème réel et non pas par la solution, et ensuite remonter aux principes fondamentaux qui sont en jeu.

Le second aspect marquant de ce rapport est qu’il s’est intéressé très sérieusement aux dimensions des valeurs, de l’ethos, de la signification de la fonction publique et c’est là quelque chose qui est encore important pour nous aujourd'hui. Comme je l’ai déjà dit, les règles ne suffisent pas. Les règles doivent en effet traduire dans la réalité un esprit ou des principes, la vision de la fonction publique qui nous propulse vers l'avant et qui nous incite à faire de l'idéal une réalité. C'est ce dont traite le rapport Tait, beaucoup plus que de défis précis en matière de déontologie.

Depuis la publication du rapport Tait, nous avons été témoins d’un certain nombre d’activités, de phases, d’événements et de rapports publiés dans la fonction publique. On peut citer le « dialogue » sur les valeurs et l’éthique animé par deux co-champions, Scott Serson et Janice Cochrane; plusieurs sondages des employés de la fonction publique; trois rapports de la vérificatrice générale sur les valeurs et l'éthique; l'initiative de la fonction moderne de contrôleur qui inscrit les valeurs au cœur de la gestion financière; la création d’un premier Bureau des valeurs et de l’éthique au Secrétariat du Conseil du Trésor, qui est maintenant devenu le Bureau des valeurs et de l’éthique de la fonction publique; le programme de gestion Des Résultats pour les Canadiens et les Canadiennes présenté au Parlement par Mme Robillard, et qui a engagé le gouvernement à mettre en œuvre les mêmes quatre « familles » de valeurs que celles mentionnées dans le rapport Tait; et ainsi de suite.

Toutes ces activités ont pavé la voie à l'adoption, l'an dernier, du Code de valeurs et d'éthique de la fonction publique, le petit « livre rouge » (même s’il n’est pas vraiment rouge!) qui, je le sais, vous tient à cœur!

J’aimerais mentionner quelques éléments du Code. Tout d’abord, celui-ci comporte quatre chapitres. Le premier est consacré à l’énoncé des valeurs et de l’éthique de la fonction publique. Le second et le troisième traitent d’aspects qui reposent sur des règles, essentiellement des mesures concernant les conflits d’intérêts et l’après-emploi. Le quatrième chapitre, très important, est consacré aux « pistes de solutions », soit à ce que vous pouvez faire si vous êtes confronté à quelque chose qui ne cadre pas avec les valeurs et l’éthique de la fonction publique, ou si on vous demande de faire quelque chose de tel. C’est très important parce que le Code n’est pas uniquement un ensemble de règles imposé à la fonction publique, c'est aussi un outil à sa disposition. Les fonctionnaires peuvent l'utiliser eux-mêmes pour s'assurer que les valeurs et l'éthique sont conservées et défendues dans la fonction publique.

Le Code s’appuie sur les mêmes quatre « familles » de valeurs mentionnées dans le rapport Tait et dans Des Résultats pour les Canadiens et les Canadiennes, soit les valeurs démocratiques, les valeurs professionnelles, les valeurs liées à l’éthique et celles liées aux personnes. Toutes sont importantes et, à mon avis, sur un pied d’égalité. Il y en a cependant deux sur lesquelles j’aimerais insister, peut-être parce que sans cela elles pourraient ne pas retenir toute votre attention.

Tout d'abord, il y a les « valeurs démocratiques » qui soulignent le fait que tout ce que nous faisons dans la fonction publique, et au gouvernement du Canada, est destiné à servir la cause du gouvernement démocratique. Le rôle essentiel des fonctionnaires est de servir l’intérêt public, de servir et d’appuyer les ministres dans leur poursuite de l’intérêt public, dans le respect de la loi et de la Constitution.

L’autre famille de valeurs sur laquelle j’attire votre attention est celle des « valeurs liées aux personnes ». Vous pourriez en effet fort bien vous demander ce que cette expression vient faire dans un Code de valeurs et d’éthique de la fonction publique. Sa présence ici se justifie, entre autres, par la nécessité – pour devenir crédibles et concrètes – que les valeurs de la fonction publique commencent par s'appuyer sur les valeurs liées aux personnes. Si les gens ne voient pas les valeurs de la fonction publique s’exprimer au quotidien dans nos organismes, dans la façon dont les gens se comportent et se traitent les uns les autres, ils ne croiront pas à tout le reste. Si nous nous conduisons comme des cons dans notre vie quotidienne, tout ce que nous pourrions dire au sujet des valeurs et de l'éthique n'aurait aucun sens, et aucun effet. Les valeurs liées aux personnes sont donc le « creuset » dans lesquelles toutes les autres valeurs prennent naissance, et c’est là qu’elles acquièrent signification, force, crédibilité, ou qu’elles n’y parviennent pas.

Le Code tient les sous-ministres responsables de sa mise en œuvre et son application est une condition d’emploi dans la fonction publique. Le Code est donc une condition d'emploi de tout fonctionnaire. Les infractions au Code peuvent faire l’objet de mesures disciplinaires, allant éventuellement jusqu’au renvoi.

Nous disposons donc maintenant du Code qui, dans une certaine mesure, nous fournit un cadre et nous dit ce que nous sommes, ce que nous essayons d'être, de faire, comme fonctionnaires. Mais, comme je l'ai dit auparavant, la vision ou l'idée ne suffit pas. Comment pouvons-nous parvenir aux résultats? C'est là, à mon avis, la prochaine étape, la nouvelle frontière à atteindre ou le nouveau défi à affronter. J'aimerais m'attarder un peu sur cet aspect avant d'aller plus loin.

Tout d’abord, permettez-moi d’évoquer Des Résultats pour les Canadiens et les Canadiennes, et ce que disait ce rapport sur la façon dont la fonction publique s'efforce d'atteindre des résultats et d'assumer ses responsabilités. Concrètement, cet effort s'est traduit par, entre autre choses, un outil que nous appelons le Cadre de responsabilisation de gestion.

Le Cadre de responsabilisation de gestion (ou « CRG ») est un cadre qui définit dix domaines de gestion et précise les attentes, les indicateurs et les mesures pour chacun de ces dix domaines, y compris les valeurs et l’éthique. Les sous-ministres vont être responsables ou le sont déjà, de leur rendement en regard de ses dix éléments de gestion, et sont évalués en fonction de ces dix éléments par le Secrétariat du Conseil du Trésor, par l’Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada et par les autres organismes centraux. Les valeurs et l’éthique constituent un volet important de cette évaluation. C'est l'un des dix éléments du CRG.

J’aimerais par ailleurs attirer votre attention sur deux choses.

Tout d’abord, en ce qui concerne le cadre lui-même, il comporte, comme je viens de le dire, un volet distinct consacré aux valeurs et à l’éthique appelé « Valeurs de la fonction publique ». Toutefois, de nombreux autres volets de ce cadre concernent également les valeurs et l’éthique. Il y a un volet « Personnes » et les indicateurs et les mesures utilisés dans ce domaine sont également importants pour les valeurs et l’éthique de la fonction publique. Il y a ensuite un volet « Gérance » et un certain nombre d’attentes, d’indicateurs et de mesures dans ce domaine sont aussi importants en matière de valeurs et d’éthique. Il en va de même pour la « Gestion des risques » et les « Services axés sur les citoyens ». Quant à la « Régie » et à la « Responsabilisation », il s’agit de deux volets étroitement liés aux « valeurs démocratiques ». On ne peut donc se contenter d’examiner uniquement le volet « valeurs ». Il faut tenir compte de tous.

Mon second rappel concernant le Cadre de responsabilisation de gestion est que, s’il démarre au sommet, il est destiné à s’appliquer à tous. Cela veut dire que son application devrait se faire en cascade, à partir du niveau de sous-ministre, par tous les niveaux de l’organisation, et ainsi devenir l’outil permettant à tout gestionnaire, et en vérité à tout leader de la fonction publique, d’examiner ses compétences et son niveau de rendement. C’est important parce qu'un des principaux messages qu’Alex voulait vous transmettre est que le leadership ne le concerne pas seul, ni la collectivité des sous-ministres ou des sous-ministres adjoints, ou quelque collectivité que ce soit. C’est un défi pour tous. Il aime à dire, et je suis sûr que vous l'avez vu dans les divers documents émanant de lui, que tout le monde au sein de la fonction publique devrait se considérer comme un leader, et se comporter comme un leader. Ainsi, de ce point de vue, le Cadre de responsabilisation de gestion concerne tout le monde.

La fonction publique met, bien sûr, en place, un certain nombre d’outils pour aider les leaders à atteindre les résultats que l’on attend d’eux dans le Cadre de responsabilisation de gestion. Je ne mentionnerai ici que quelques éléments, comme la nouvelle École de la fonction publique du Canada, et les nouveaux cours qui ont été préparés pour elle; la Loi sur la modernisation de la fonction publique et les activités qui en découlent; l'élaboration de nouvelles compétences en leadership pour les dirigeants de la fonction publique, y compris dans les domaines des valeurs et de l'éthique; la mise en place du Bureau des valeurs et de l'éthique de la fonction publique l'an dernier, et les travaux que nous faisons actuellement sur une Carte routière vers les résultats en matière de valeurs et d’éthique, que nous serons en mesure de partager avec nombre d’entre vous sous peu, je l’espère.

Je sais que János Bertók de l’OCDE est ici et qu’il va vous entretenir des travaux et des recherches réalisés par l'OCDE dans ce domaine. Entre nous, entre ces quatre murs – si vous vous engagez à ne pas le répéter! – je suis d’avis que le Canada est actuellement un leader mondial dans ce domaine. Je pense que János pourra vous le confirmer.

Où ce cheminement nous conduit-il donc? Je vais me permettre ici de vous lire les commentaires qu’Alex avait préparé à votre intention, parce qu’il y définit sa vision de ce qui lui paraît l’aboutissement de nos travaux sur les valeurs et l’éthique :

« À mon avis, [c’est ce qu’il allait dire ou aurait pu dire s’il avait réellement utilisé son texte!], les valeurs et l’éthique sont la clé pour poursuivre la construction de la fonction publique dont les Canadiens ont besoin et qu’ils méritent. Dans mon dernier rapport au Premier ministre sur la fonction publique du Canada, j’ai indiqué qu’en fixant des buts élevés pour la fonction publique, nous grandirions sûrement parce que les défis engendrent la croissance. Nous devons définir les idéaux auxquels nous aspirons pour la fonction publique, même si nous ne les atteignons jamais pleinement. En misant sur nos nombreux atouts dans le contexte de la modernisation en cours, les efforts que nous entreprenons permettront à notre grande institution de réaliser toutes ces possibilités.

« Ma vision de la fonction publique du XXIe siècle [c’est Alex qui vous parle] en est une qui, par-dessus tout inspire confiance, puisqu’une vie consacrée au service public comporte toujours des devoirs à caractère fiduciaire; une fonction publique qui est efficace – qui s’efforce d’obtenir le meilleur rapport qualité-prix; une fonction publique compatissante, parce qu’elle prend soin des gens qu’elle dessert et de ceux qui la servent; une fonction publique dynamique grâce au leadership qu’elle exerce dans les domaines de politique qui intéressent les Canadiens; une fonction publique créatrice, améliorant continuellement ses programmes grâce à l’innovation. J’entrevois pour l’avenir une fonction publique diversifiée, correspondant à la réalité de la société canadienne, faisant preuve d’ouverture grâce à une gestion transparente; et enfin une fonction publique dévouée, composée de fonctionnaires résolus à faire la différence au quotidien pour les autres Canadiens.

« Ce sont là les idéaux que nous devons mettre de l’avant pour parvenir à l’excellence, pour mettre en place la fonction publique de l'avenir en tirant partie de nos atouts d'aujourd'hui et en puisant dans notre imagination et nos convictions pour l'avenir.

« Et cette vision est motivée par les valeurs et l’éthique ».

Vous pouvez en déduire que ce qui importe pour lui, et pour nous tous, est en un sens la question de la confiance : la défi de gagner et de mériter la confiance de nos employés, la confiance de nos collègues, et la confiance des gens au service de qui nous sommes, qu’ils s’agissent des ministres du gouvernement du Canada ou des citoyens du Canada. Ce qui importe, au bout du compte, quel que soit le point de vue, est la confiance. C'est l'une des raisons pour laquelle les valeurs et l'éthique de la fonction publique sont si importantes.

Comme je l’ai dit au début de mes commentaires, je crois que l’une des conditions pour gagner et mériter la confiance est d’apprendre comment gérer et concilier les dualités, comment gérer et concilier des objectifs divergents. L’un des problèmes qui est apparu dans la fonction publique au cours de la dernière décennie, ou même peut-être au cours des deux dernières, est que nous avons parfois reçu des messages contradictoires. D’un côté, on nous disait « Faites-le », « Adoptez un parti pris pour l’action », « Obtenez des résultats ». Alors qu’un autre type de message nous disait « Ne faites pas d'erreur » ou « Ne me causez pas de problème ».

Comprenez-moi bien, je ne veux pas dire que c’est ridicule. Il ne me paraît pas surprenant ni absurde que nous ayons deux ensembles différents de messages. Je suis d'avis que, de son propre point de vue, chacun était effectivement logique dans une certaine mesure. Ce que je veux souligner est qu’il s'agit là d’un exemple de haut niveau de dialectique, ou de paradoxe – le défi des dualités divergentes -- qui réside au cœur de toute organisation, mais tout particulièrement, il me semble, au cœur de la fonction publique.

L’une des tendances les plus intéressantes, et très prometteuse, dans les ouvrages qui traitent actuellement de gestion est, à mon avis, la redécouverte du thème du paradoxe organisationnel. Cela signifie que, dans le domaine de la gestion et du leadership, il ne peut jamais s'agir simplement d'une question, disons de centralisation, c’est toujours une question de bon équilibre à atteindre entre la centralisation et la décentralisation. Il ne devrait jamais s’agir uniquement d’une question de contrôle, mais plutôt du bon équilibre à obtenir entre le contrôle et la liberté d’action. Nous devons penser au contrôle et à la liberté d’action, et non pas au contrôle versus la liberté d'action. Je pourrais vous dresser une liste sans fin d'exemples de cette nature. Le même défi, celui de la conciliation et de la gestion de dualités divergentes, se manifeste dans pratiquement tous les aspects du leadership et de la gestion.

En réalité, il s’agit simplement là de la redécouverte d’un thème qui remonte en occident à Hegel, à Nicolas Cusanus, à St Augustin, et peut-être même à Platon. Chaque génération doit redécouvrir cette vérité. Je suppose que c’est là la mission d’une université comme l’Université Saint-Paul. Je tiens cependant à vous dire que je suis d’avis que si cela est vrai pour toutes les organisations, privées et publiques, le défi est encore plus élevé dans le secteur public. Il en est ainsi parce que ce que nous faisons – ce que les ministres font et ce que les personnes au service des ministres font – est de gérer et d’équilibrer des biens publics qui se font concurrence. C’est là la tâche quotidienne de gouvernement, de ceux qui gouvernent. C’est la tâche quotidienne de toute fonction publique. Apprendre à bien le faire, et intelligemment, est notre vocation, dans la fonction publique. C’est aussi ce que les valeurs et l’éthique, le Code, et les autres instruments connexes dans ce domaine, nous aident à faire. Il nous aide à gérer correctement des dualités divergentes.

La réponse se trouve dans nos valeurs et en particulier dans le concept qui, à mon avis, est le principal fil conducteur qui éclaire l’ensemble de nos valeurs de la fonction publique. Ce fil conducteur est, en l’absence d’un meilleur terme, l’intérêt public.

Qu’est-ce que l’intérêt public? Il existe une personne, que je ne nomme pas, qui est d’avis que nous devrions définir l’intérêt public. Franchement, je crois que c’est là un objectif assez irréaliste. L’intérêt public est en effet comme la justice. C’est quelque chose que l’on vise à atteindre, dont on peut parler, mais ce n’est pas quelque chose qu'on peut définir. Vous le reconnaîtrez dans une situation particulière si vous y êtes confronté, mais vous ne parviendrez pas à le définir à l'avance.

Il y a toutefois certains critères que nous pouvons utiliser pour tenter de déterminer si une décision ou une mesure précise est dans l'intérêt public. Ce sont des critères que nous devrions nous appliquer à nous-mêmes, et à toutes nos actions, tous les jours. Il y a plusieurs critères de cette nature, mais je n'en mentionnerai que deux.

Le premier d’entre eux consiste à se demander quelle est la gamme des intérêts qui sont pris en compte en prenant cette décision, ou en prenant cette mesure. Ai-je (ou avons-nous) pris en compte toute la gamme des intérêts concernés par cette décision? En effet, si nous n’avons retenu qu'une petite partie de toute l'étendue des intérêts, ou même encore pire d'une seule personne ou d'un seul secteur, nous n'agissons certainement pas dans l'intérêt public.

Le second critère est d’examiner, une fois que nous avons analysé les divers intérêts qui pourraient être en jeu, comment nous les avons conciliés? Quelles sont les valeurs sur lesquelles nous nous sommes appuyés pour faire ce choix, prendre cette décision ou concilier ces valeurs? Sont-elles les valeurs les plus élevées? S’agissait-il de valeurs comme l’équité, l’impartialité, la justice, la compassion?

Ce sont là deux questions que nous devons nous poser, si nous voulons savoir si cette décision ou si cette mesure est prise dans l’intérêt public. Et c'est pourquoi – si vous me permettez de revenir au début de mon propos – c’est pourquoi le rapport Tait disait, et je cite, « L’intérêt public représente pour la fonction publique ce que représente la justice et la liberté pour le milieu juridique, ou ce que représente la guérison et la compassion pour le milieu médical ».

Ce que j’aimerais donc vous suggérer, en guise de conclusion, c’est que pour nous, pour ceux d’entre nous qui oeuvrons dans le secteur public, l’intérêt public peut nous servir de colonne de fumée le jour et de colonne de feu la nuit. Cela semble une bonne analogie à utiliser dans cette enceinte, et dans cette université! Sans cela, toutes les pratiques de gestion que nous avons mises en œuvre au cours des 20 dernières années, tous les cadres de résultat, et la quantité de tous les autres outils impossibles à répertorier que nous avons mis en œuvre sont tous inutiles. Mais en tenant compte de l’intérêt public, et en étant éclairé par lui, je pense qu'ils peuvent briller comme de l'or.