Discours par
L'honorable Lucienne Robillard
Présidente du Conseil du Trésor, Ministre responsable de l'Infrastructure
et députée de Westmount-Ville-Marie
le 6 juin 2001
Ottawa
Mesdames et messieurs,
Je suis heureuse de me retrouver parmi vous aujourd'hui, et je
remercie Monsieur Graham, Monsieur DeBlois ainsi que l'APEX qui ont
organisé cette activité et qui m'ont invitée à y participer.
Comme vous le savez, le Premier ministre m'a demandé, en avril
dernier, d'assumer la responsabilité de la modernisation de la gestion
des ressources humaines de la fonction publique. Il s'agit là d'un
défi emballant, mais qui nécessitera de tous les partenaires une
énergie et une volonté sans faille. Et cela, d'autant plus que les
efforts de modernisation de la gestion des ressources humaines suscitent
beaucoup de débats et de questions parmi vous, comme ils en suscitent
parmi l'ensemble des employés de la fonction publique canadienne. Il y
a beaucoup de curiosité au sujet de la nature et de l'ampleur des
mesures que nous envisageons d'adopter pour y parvenir. Évidemment, je
n'ai pas toutes les réponses à ces questions, puisque nous en sommes
au début du processus. Mais nous avons déjà une très bonne idée des
perspectives et des principes qui nous guideront de même que des
objectifs que nous souhaitons atteindre et du cheminement critique qu'il
nous faudra établir pour y parvenir. C'est de cela que je veux vous
entretenir aujourd'hui.
Modernisation des ressources humaines : un défi à relever et
une volonté politique d'y parvenir
En guise de préambule, je vous dirais sans détour que notre premier
obstacle est sans doute le scepticisme que provoque une telle démarche.
Ce n'est pas la première fois que vous entendez parler de «réforme»
n'est-ce pas, ni la première initiative du genre ! Et vous doutez sans
doute de notre capacité et de notre volonté à instaurer de vrais
changements, qui auront un impact réel non seulement sur le recrutement
et le maintien en poste, mais également sur l'organisation du travail.
Je tiens à vous assurer qu'il y a à ces égards une volonté
politique claire et sans équivoque d'apporter les changements
nécessaires afin de faire en sorte que notre fonction publique soit non
seulement apte à relever les défis du 21e siècle, mais qu'elle
demeure un employeur de choix pour nos jeunes diplômés et un objet de
fierté pour l'ensemble de la population.
Le Premier ministre a été on ne peut plus clair à ce
sujet quand il a mis sur pied le groupe de travail sur la modernisation de
la gestion des ressources humaines à la fonction publique. Et il me tient
à coeur que nous respections cet engagement.
Pourquoi cette volonté ? Parce que nous sommes conscients de l'importante
contribution des milliers d'employés du gouvernement du Canada au
maintien des valeurs que nous défendons comme société et à la
protection de notre qualité de vie. Parce que nous sommes également
conscients que pour répondre aux besoins légitimes des citoyens, nous
devons compter sur une fonction publique efficace, professionnelle et
compétente. C'est grâce à vos efforts quotidiens que les lois que
nous promulguons sont préparées et appliquées comme il se doit et si
les politiques que nous adoptons sont établies judicieusement.
Comme parlementaire, j'estime que, parmi les caractéristiques
essentielles de notre démocratie, se retrouvent l'énergie et la
puissance qui se dégagent du soutien offert par une fonction publique
impartiale aux personnes élues pour servir les Canadiens et les
Canadiennes. Si le gouvernement établit le programme général, je
suis très consciente qu'il revient à nos employés d'en faire une
réalité.
Nous avons donc pris cet engagement en toute connaissance de cause. La
fonction publique est un des principaux piliers de notre société et,
comme pour tout fondement, nous avons l'obligation de nous assurer qu'il
soit stable, résistant et à la hauteur de la tâche qui lui est
confiée.
Or, à l'heure actuelle, certaines lois essentielles qui régissent
vos actions sont désuètes et insuffisantes pour relever les défis de la
nouvelle économie du savoir. Bon nombre de politiques sont trop rigides
pour que soit instauré un climat de gestion qui favorise l'innovation
et la délégation.
Nous devons adopter dès maintenant des mesures pour satisfaire à ces
exigences. Bien entendu, la modernisation des lois et des politiques ne
constitue pas une fin en soi. Tout ce que nous faisons est et doit être
justifié par notre volonté inébranlable de servir nos concitoyens. Il
est trop facile de perdre de vue cet impératif. Nous sommes tellement
concentrés sur les rouages du système que nous oublions souvent la
raison d'être de ce système : servir les citoyens et veiller à
ce que notre pays progresse en toute confiance, en ne laissant personne de
côté.
J'aimerais donc expliciter l'esprit de cette
entreprise de modernisation en revenant sur les principes de saine gestion
des ressources humaines qui sont à son origine et qui doivent en
éclairer le déroulement.
Un milieu de travail exemplaire : une condition fondamentale à
de bons services publics
Dans le document exposant le cadre de gestion du gouvernement du
Canada, intitulé des Résultats pour les Canadiens et les Canadiennes,
nous nous sommes engagés à établir un «milieu de travail
exemplaire », condition préalable fondamentale à la prestation de
bons services publics. Cela nous conduit à nous poser la question
suivante : qu'est-ce au juste qu'un milieu de travail exemplaire
? Quelles sont ses principales caractéristiques ? J'estime qu'il est
essentiel de répondre à ces questions pour comprendre où nous mèneront
nos efforts de modernisation.
À mon avis, un milieu de travail exemplaire est un milieu de travail
où les employés comprennent et partagent la signification de ce qu'ils
font, un milieu dans lequel ils estiment pouvoir, et peuvent
effectivement, apporter une contribution positive. Un milieu où ils se
sentent dès lors valorisés.
L'un des éléments de l'établissement de ce milieu de travail
exemplaire est évidemment la rémunération. Les employés doivent sentir
qu'ils sont rémunérés équitablement. À cet égard, le secteur
public évolue dans des conditions sensiblement différentes de celles du
secteur privé. Notre cadre de rémunération est restreint par des
limites réalistes. Cela dit, il n'est pas impossible d'améliorer le
cadre de rémunération, comme nous l'avons fait pour les employés de
direction.
Notre engagement à ce chapitre s'est traduit par la mise en oeuvre
immédiate de la plupart des recommandations du rapport Strong. Dans les
derniers mois, nous avons ajusté les conditions salariales et apporté
des améliorations au Programme de gestion du rendement. Nous entendons
continuer le travail avec l'aide d'un nouveau comité consultatif dirigé
cette fois-ci par madame Carol Stephenson.
Évidemment, et vous le savez comme moi, la valorisation ne dépend pas
uniquement de la paie et des avantages sociaux. Il importe tout autant de
savoir que l'organisation pour laquelle vous travaillez se préoccupe de
votre mieux-être professionnel et personnel. Nous devons redoubler d'efforts
dans le domaine de la formation et du perfectionnement professionnel pour
tous les employés, quel que soit leur niveau. Nos employés doivent
savoir qu'il leur est possible d'avoir accès à des programmes de
perfectionnement professionnel et personnel.
Je sais que l'APEX a beaucoup insisté pour déterminer les besoins
en formation de ses membres et pour y répondre. J'applaudis également
aux efforts de nos partenaires du Centre canadien de gestion et de la
Commission de la fonction publique dans ce domaine
La rémunération et la formation sont des éléments essentiels d'un
milieu de travail exemplaire, mais ils ne sont pas suffisants. Outre le
fait qu'il répond aux besoins personnels de l'employé, le milieu de
travail exemplaire doit tenir compte de ses besoins en tant travailleur et
gestionnaire. Cela signifie qu'il faut fournir à nos employés des
outils leur permettant d'accomplir leur travail de manière optimale.
Personne ne doit avoir l'impression d'exécuter ses tâches
quotidiennes en luttant contre le système établi. Personne ne doit avoir
l'impression de devoir toujours tout recommencer à zéro ou de devoir
contourner les règles pour bien faire son travail.
Dans un milieu de travail exemplaire, les systèmes, les pratiques et
les règlements sont harmonisés à l'obtention des résultats.
Actuellement, bon nombre de nos pratiques de gestion des ressources
humaines sont tout simplement trop rigides ou carrément insuffisantes
pour nous permettre de relever les défis de l'heure. Quiconque a
essayé d'embaucher un nouvel employé ou même de muter un employé d'un
ministère à l'autre sait que le processus est plutôt fastidieux. Tout
cela doit changer et va changer.
Évidemment, un milieu de travail exemplaire devrait également être
un lieu où les relations de travail sont harmonieuses et où une
véritable dynamique de collaboration, plutôt que de confrontation,
permet des échanges francs et constructifs entre l'employeur et les
syndicats.
Enfin, le milieu de travail exemplaire est caractérisé par d'autres
éléments. Ce milieu doit faire place à la diversité. Il se doit d'être
un milieu auquel nos employés sont fiers d'appartenir. C'est un
endroit où nos employés peuvent travailler dans la langue officielle de
leur choix. C'est un milieu de travail où les gestionnaires invitent
les employés à tirer profit de la souplesse de conditions de travail
comme le télétravail, de façon à mieux concilier les exigences
professionnelles et la vie familiale.
Reste à savoir comment concrétiser ce milieu de travail exemplaire
que nous souhaitons. Comment faire de ce modèle une réalité?
Nous devons travailler sur plusieurs fronts. A certains égards,
cependant, nous avons déjà accompli d'importants progrès. Et, à
certains autres, il reste fort à faire. Soyez cependant assurés que nous
adopterons les mesures nécessaires. Les Canadiens et les Canadiennes
exigent et méritent les meilleurs services possibles et, pour ce faire,
sont en droit de s'attendre à une fonction publique professionnelle et
compétente.
Un plan de travail ambitieux, des mesures concrètes et réalisables
et des résultats tangibles
Comme il en a déjà été question aujourd'hui, le groupe de travail
sur la modernisation de la gestion des ressources humaines explorera les
modifications législatives et structurelles à apporter pour assurer la
viabilité à long terme de la fonction publique. Nul doute dans mon
esprit que des modifications législatives s'imposent, mais cela ne sera
pas suffisant en soi. Nous devons essayer, dans la mesure du possible, d'instaurer
un changement qui pourra être incorporé aux structures actuelles des
ressources humaines. Car il ne s'agit pas de faire des changements pour
le plaisir de faire des changements, et d'arriver avec des mesures que
nous pourrons difficilement implanter. Si nous voulons véritablement
atteindre les résultats que nous souhaitons atteindre, notre approche
devra être réaliste. Mais, malgré les inquiétudes légitimes que notre
projet de modernisation soulève, je sens qu'il retient l'attention et
suscite l'enthousiame. Nous devons saisir l'occasion et créer un
élan en faveur de l'action.
Et soyons clairs : les changements législatifs sont nécessaires,
mais ils ne sont pas la solution à tous nos problèmes. Nous devons
également travailler sur nos politiques et nos pratiques et mettre
rapidement en oeuvre, de manière coordonnée, des mesures qui ont dès
maintenant des impacts sur le milieu de travail.
Je suis heureuse de vous rappeler qu'il s'est accompli beaucoup de
choses en matière de gestion des ressources humaines dans les dernières
semaines. Nous avons modifié, par exemple, les pratiques qui régissent
les déplacements en service commandé pour les employés du Gouvernement.
Nous voulons simplifier les processus et faire en sorte que nos employés
puissent bénéficier d'avantages auparavant inaccessibles.
Nous avons aussi instauré une nouvelle politique sur la prévention et
la résolution du harcèlement en milieu de travail. Dans un milieu de
travail exemplaire, il est crucial que les employés soient traités avec
respect et sentent que l'organisation est soucieuse de cela. Nous
estimons qu'il est primordial de mettre un frein aux comportements
déplacés avant qu'ils ne dégénèrent en problèmes plus graves.
Nos efforts de modernisation se traduisent également par notre
volonté de sauvegarder et de défendre nos principes d'éthique et nos
valeurs. L'application d'un code supérieur de principes d'éthique
professionnelle est l'une des caractéristiques déterminantes de la
fonction publique canadienne. Il est impérieux que les employés sachent
à qui se confier quand ils sont témoins de situations inacceptables dans
leur milieu de travail. Mais plus encore, ils doivent pouvoir obéir à
leur conscience sans crainte de représailles. J'annoncerai sous peu une
nouvelle politique sur la divulgation interne qui sera appliquée avec
souplesse, car il n'est pas question de cautionner quelque système de
délation que ce soit et qui permettra que toute divulgation sérieuse et
fondée soit traitée de manière équitable, opportune et confidentielle.
Mesdames et messieurs, ce ne sont là que quelques exemples sur
lesquels nous avons déjà adopté des mesures concrètes. Le greffier
vous a parlé ce matin de plusieurs autres aspects du défi qui nous
attend, y compris ceux du recrutement et du maintien en poste. J'imagine
que la diversité de ces sujets vous donne une idée de l'ampleur du
travail qui nous attend.
Mais s'il reste beaucoup à accomplir, j'estime cependant que nous
sommes à la hauteur de la tâche qui nous attend. Je sais que mon
objectif de déposer les modifications législatives requises à l'été
2002 est ambitieux et que cela nous laisse peu de temps. Mais je suis
confiante.
Ma confiance repose toutefois sur un postulat de base : nous
aurons besoin d'employés qui offrent volontairement leur appui et leurs
conseils. Nous aurons besoin d'employés de la fonction publique,
gestionnaires mais également membres du personnel, pour soutenir ces
initiatives.
Je vous invite donc à prendre une part active au processus. Sans l'appui
et l'engagement des employés de direction, cet exercice aboutirait tout
simplement nulle part. Nous voulons que cette initiative devienne la
vôtre, et que vous incitiez vos employés à suivre votre exemple. Je le
répète : je sais qu'il existe une bonne dose de scepticisme dans
nos rangs. Nous pouvons toutefois y remédier en montrant que nous sommes
capables d'obtenir rapidement des résultats. C'est, à mon avis, la
seule façon de susciter un engagement de tous nos employés à faire en
sorte que le milieu de travail dans lequel ils évoluent réponde à leurs
besoins, et à leurs préoccupations.
J'ai pris l'engagement personnel de tenir les employés au courant
à chaque étape du processus. Ce qui explique ma présence ici aujourd'hui.
C'est également la raison d'être des bulletins d'information que j'ai
déjà envoyés à tous les employés. Mais la communication doit être
bilatérale. Nous avons besoin de votre avis et je sais que l'APEX sera
un partenaire crucial à cet égard. Pour améliorer notre capacité de
communication avec l'ensemble de nos employés, nous mettons la touche
finale à notre site Intranet qui renfermera tous les renseignements pertinents et
actuels ainsi qu'un numéro de téléphone sans frais pour permettre à
ceux et celles qui le souhaiteront de présenter leurs suggestions sur la
façon de faire progresser nos efforts en vue d'établir un régime
moderne de gestion des ressources humaines.
Nous ne voulons toutefois pas nous embourber dans des processus de
consultations à n'en plus finir. Si nous voulons rapidement arriver là
où nous souhaitons arriver, nous ne pouvons nous permettre le luxe de
refaire les consultations et réécrire les nombreux rapports qui servent
de base à notre réflexion et à notre travail actuel. Nous consulterons,
évidemment, mais ces consultations seront intensives et ciblées.
D'ailleurs, le groupe de travail a déjà amorcé des discussions avec
divers partenaires.
***
Mesdames et messieurs, j'estime que nous sommes sur la bonne voie. Le
changement ne se produira toutefois pas du jour au lendemain. Certains
changements seront graduels et exigeront du temps et de la patience. Mais
ces changements vont bel et bien survenir. Et pour ce faire, nous
ciblerons nos objectifs adéquatement, avec, en tête, le souci d'apporter
des changements réalistes et réalisables. En bout de piste, tous les
membres de la fonction publique du Canada, gestionnaires comme employés,
en bénéficieront.
J'aimerais en terminant vous rappeler que nous n'entreprenons pas cette
aventure parce que nous croyons que la fonction publique est déficiente.
Je crois, et mon gouvernement croit, que nous possédons une des
meilleures fonctions publiques qui soit. Et c'est justement par fierté et
par respect à l'égard de ces hommes et ces femmes professionnels et
compétents que nous voulons en assurer la pérennité. C'est l'essence
même de la modernisation du cadre de gestion des ressources humaines.
C'est l'essence même d'un gouvernement efficace.
Je vous remercie de votre attention.
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