Discours par
L'honorable Lucienne Robillard
Présidente du Conseil du Trésor,
et députée de Westmount-Ville-Marie
le 28 avril 2003
Halifax
1.Introduction
Bonjour mesdames et messieurs. C'est pour moi un grand
plaisir d'être parmi vous aujourd'hui.
La conférence de cette année a pour thème Gestionnaires
en action. C'est un sujet qui, j'en suis sûre, tombe à point
nommé pour chacun d'entre vous. Vous avez tous l'impression, sans
doute, d'être constamment mis à l'épreuve : devoir composer avec
plusieurs priorités, respecter des délais serrés tout en conciliant les
tensions de votre vie privée. Ce n'est pas une tâche facile. J'espère
donc que cette conférence sera l'occasion de vous évader du bureau, de
renouer de vieilles amitiés et d'échanger des points de vue dans un
cadre un peu moins formel et plus décontracté.
Je ne sais pas combien d'entre vous ont pris
connaissance du document Diriger par l'entremise des cadres
intermédiaires que le Conference Board du Canada a publié récemment.
Ce document a bénéficié du soutien financier du Secrétariat de la
Communauté nationale des gestionnaires. Voilà un excellent
investissement selon moi. Les auteurs du rapport soulèvent plusieurs
questions fort intéressantes.
En effet, les auteurs transmettent un message très clair
: le monde dans lequel évoluent les gestionnaires s'est transformé
profondément au cours de la dernière décennie. La priorité n'est
plus l'application stricte de processus mais plutôt l'atteinte de
résultats, la gestion des ressources humaines et l'établissement de
relations. En tant que gestionnaires, vous devez faire preuve de
créativité et de compétences stratégiques dans votre façon d'effectuer
votre travail. On vous demande de faire preuve d'innovation en ce qui
touche le perfectionnement de votre personnel. Tel que souligné par les
auteurs du document, vous êtes de plus en plus appelés à vous occuper
de tout.
En ce qui me concerne, comme présidente du Conseil du
Trésor, j'espère que vous n'avez pas l'impression d'être seuls
à vous acquitter de cette tâche. Ce n'est absolument pas le cas. Le
Conseil du Trésor reconnaît pleinement l'importance d'un encadrement
solide, cohérent et dynamique d'une communauté de gestionnaires. L'aboutissement
des efforts que nous déployons pour la population canadienne repose
directement sur vos épaules et, de plus en plus, sur les moyens que nous
mettons en oeuvre pour vous appuyer.
J'aimerais parler, ce matin, de l'évolution de votre
rôle de gestionnaire, surtout en ce qui concerne notre effort pour
moderniser la gestion des ressources humaines. La Loi sur la modernisation
de la fonction publique en est, vous le savez, à l'étape de l'étude
en comité parlementaire. C'est une loi importante qui pourrait avoir
des répercussions significatives sur votre façon de travailler.
- J'aimerais profiter de cette occasion pour revoir avec vous ce que
nous tentons d'accomplir avec cette loi.
- Je ferai ensuite un survol des défis auxquels nous devons faire
face avec la mise en oeuvre de la loi et comment nous comptons vous
appuyer.
Tout d'abord, permettez-moi de faire une mise en
contexte. Nous savons tous que les attentes de la population évoluent.
Vous vivez cette réalité tous les jours, surtout si vous faites partie
du personnel de première ligne. Les citoyens demandent un service et des
réponses de plus en plus rapides. Ils cherchent à jouer un rôle plus
important dans le processus gouvernemental et, entre autres, à avoir un
plus grand droit de regard dans l'élaboration des politiques. Ils
exigent une plus grande responsabilisation et une plus grande transparence.
Ils veulent s'assurer que les fonds publics soient dépensés avec
prudence.
Cela constitue des développements positifs. En revanche,
bon nombre des processus opérationnels perdent de leur importance dans un
contexte axé sur l'obtention des résultats et où nous plaçons les
citoyens au centre de nos préoccupations. Il faudra donc que souplesse,
innovation et rapidité soient dorénavant les mots d'ordre de la
gestion. Nous devons en outre nous orienter vers une gestion qui met
davantage l'accent sur des valeurs laissant une large place à l'expérimentation
tout en s'assurant que nous avons une compréhension commune de ce qui
ne l'est pas.
J'ai le plaisir d'affirmer que, peu à peu, nous
faisons des progrès à ce sujet. Nous favorisons, par exemple, des
méthodes plus réfléchies de gestion des risques au sein du gouvernement.
Nous élaborons des mécanismes plus efficaces pour identifier et
présenter les résultats. Nous tirons parti des nouvelles technologies
pour mieux communiquer avec le public. Et, fait sans doute le plus
important, nous cherchons à changer les rapports entre les organismes
centraux et les ministères. Depuis trop longtemps, ces rapports sont à
sens unique. Il nous appartient de
mieux exploiter le savoir-faire des gestionnaires de première ligne. Nous
devons mettre en place des cadres et politiques qui favorisent la
responsabilisation tout en laissant une marge de manoeuvre nécessaire
pour l'exécution des tâches courantes. Nous devons, je ne cesse de le
répéter aux fonctionnaires du Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT),
faire un effort pour mieux vous écouter.
De toutes les réformes qui sont en cours, je suis
particulièrement fière de ce que nous sommes en train d'accomplir sur
le plan des ressources humaines. Cela peut sembler un peu cliché mais il
est vrai qu'un bon travail ne peut être effectué sans main d'oeuvre
compétente. Et pour attirer une main d'oeuvre compétente et la
maintenir en poste, une gestion efficace s'impose. C'est-à-dire,
créer un milieu de travail productif et où règne un esprit de
collaboration. Il faut également offrir une bonne rémunération,
cultiver l'épanouissement et le perfectionnement professionnel. Enfin,
il faut reconnaître ses employés comme professionnels et leur fournir
les outils de travail nécessaires.
2. La Loi sur la modernisation de la fonction publique : objet
général
La modernisation de la gestion des RH constitue un
exercice d'une grande portée qui va bien au-delà des modifications
législatives. Ce que nous entendons par là, c'est un changement
culturel par rapport à la façon dont nous concevons la gestion des RH et
de former nos employés. Plus précisément, nous parlons de changement de
politiques, d'un appui envers l'apprentissage, du perfectionnement des
leaders, de la création de milieux de travail sains et positifs, du
développement des capacités et de l'adoption de valeurs et de
principes éthiques clairs.
Il va de soi qu'il est difficile d'avancer avec
confiance et rapidité si l'on ne possède pas une solide base
législative sur laquelle s'appuyer. En ce moment, nous n'en avons
pas. Le cadre législatif actuel qui régit la gestion du personnel date
de plus de 35 ans et, en tant que cadres de direction, vous travaillez à
partir de ces paramètres désuets. Vous connaissez les problèmes que
cela occasionne : dotation lourde; règles trop normatives; et un système
si lent qu'il incite les gens à trouver des moyens de le contourner.
Cela doit donc cesser. Et je crois que cela cessera car, avec la
présentation du projet de loi C-25, nous avons effectué un grand
pas en avant.
Je crois que nous avons produit un projet de loi
équilibré et ambitieux, qui aura pour effet d'atténuer le caractère
contradictoire et procédural du système actuel, d'améliorer les
relations patronales-syndicales et de préciser les responsabilités et l'imputabilité
de chacun.
Si le projet de loi est adopté plus ou moins dans sa
forme actuelle, les responsabilités vont changer. La nouvelle définition
du mérite vous accordera une plus grande latitude en matière de dotation.
On vous encouragera à résoudre des questions liées à la dotation et à
d'autres domaines en milieu de travail. Vous travaillerez de manière
plus étroite et plus positive avec les représentants syndicaux afin de
régler les problèmes. Nous voulons aussi accorder une plus grande
importance à l'amélioration conjointe du milieu de travail avec les
agents négociateurs, autrement dit vous travaillerez ensemble pour cerner
les problèmes qui se posent en milieu de travail et pour mettre au point
des solutions.
Notre objectif est de vous amener à penser comme des
conseillers en ressources humaines et d'amener ces derniers à penser
comme des gestionnaires. Nous aimerions que vous compreniez les points de
vue de chacun ainsi que les différentes perspectives et priorités que
vous devez concilier. Bon nombre d'entre vous, je le sais, estiment qu'ils
suivent déjà cette démarche. Si c'est le cas : bravo! Vous avez ainsi
une longueur d'avance. Nous voulons essentiellement transformer les
pratiques exemplaires en pratiques courantes. La loi facilitera ce
processus.
3. La Loi sur la modernisation de la fonction publique : les enjeux de
la mise en oeuvre
Il va de soi que la fonction publique ne se modernisera
pas du jour au lendemain. Ce sera un processus complexe et graduel. Il ne
peut pas en être autrement. Il faudra créer de nouvelles institutions,
élaborer des cadres stratégiques et former le personnel pour le
préparer à assumer de nouveaux rôles et de nouvelles responsabilités.
Autrement dit, le véritable travail ne fait que commencer.
Dans les mois qui viennent, nous devrons développer les
compétences nécessaires. Les gestionnaires devront acquérir des
connaissances pratiques au sujet, par exemple, de la façon de planifier
leurs effectifs à une époque caractérisée par les départs à la
retraite, la vive concurrence dans le recrutement de gens compétents et
une population de plus en plus diversifiée. Cela exigera également un
engagement et des efforts de communication soutenus.
Il s'agira ici d'une vaste entreprise de gestion du
changement. Les experts en la matière vous diront que toute initiative du
genre passe inévitablement par la participation active des cadres
intermédiaires. Vous êtes en effet le trait d'union entre la haute
direction et les effectifs de première ligne. Vous traduisez une bonne
stratégie en réalité opérationnelle. Les auteurs du document du
Conference Board soulignent d'ailleurs que les gestionnaires incarnent
la vision, les valeurs et la stratégie de l'organisme. Si nous ne
pouvons compter sur votre enthousiasme quant à la transformation de la
gestion et si vous n'êtes pas prêts à vous impliquer, l'initiative
est vouée à l'échec.
Quel serait donc le meilleur moyen de mobiliser les
principaux intéressés ? Comme votre charge de travail est déjà assez
lourde, comment vous démontrer que votre participation en vaut la peine ?
Je suis d'avis que le rôle que vous jouerez est essentiel au bon
fonctionnement de l'État. Alors, comment gagner votre appui ?
En premier lieu, nous devons, je pense, vous prouver que
nous sommes prêts à vous supporter. Le besoin d'habiliter les
gestionnaires a déjà été un sujet débattu à fond. J'admets
cependant que cette question est un sujet d'inquiétude pour plusieurs d'entre
vous parce que ce changement d'approche pourrait vous laisser croire qu'on
veut strictement augmenter la charge de vos responsabilités Cela ne
devrait pas être le cas et ce ne sera pas le cas.
Nous ne pouvons vous demander d'innover ou d'assumer
de nouvelles tâches sans vous donner les moyens nécessaires pour les
accomplir.
Nous devons notamment améliorer notre processus de
responsabilisation pour s'assurer que les employés sont guidés par des
principes d'éthique communs. Nous devons élargir le dialogue quant aux
valeurs et à l'éthique. Les valeurs aident les fonctionnaires à
mettre en oeuvre les règles. Toutefois, il est impossible de réglementer
chaque nouvelle situation dans un monde où les bouleversements sont chose
courante. Nous devons conserver des règles de base. Il s'agira ensuite
de les appliquer dans le cadre des valeurs prônées par la fonction
publique.
Je suis heureuse de dire que nous préparons un nouveau Code
de valeurs et d'éthique pour la fonction publique. Ce code se
voudra un outil de gestion fondé sur des valeurs définissant les
comportements professionnels pertinents et aidant à la révision du Code
régissant les conflits d'intérêts et l'après-mandat s'appliquant
à la fonction publique. Il réitérera les valeurs chères à la
fonction publique, soit l'intégrité, l'équité, l'impartialité
et une responsabilisation plus grande afin de satisfaire aux attentes et
à la confiance que les Canadiens et les Canadiennes ont envers leurs
institutions publiques.
Nous devons aussi accorder une place plus importante au
perfectionnement des cadres. Le SCT a l'intention d'intensifier ses
efforts quant à l'appui et à l'orientation pour les dirigeants de
tous les échelons afin de leur donner les moyens de bien gérer leur
personnel et de réaliser leurs objectifs stratégiques. Nous devons
mettre en place un « continuum du leadership » qui se renouvelle. Aussi
devons-nous reconfirmer les qualités et les habiletés requises pour
chaque échelon de direction et veiller à ce que les titulaires de postes
de cadre possèdent les compétences nécessaires et les capacités
requises sur le plan des langues officielles. Nous devons nous assurer que
tous les cadres ont les compétences de base nécessaires. Nous cherchons
par conséquent à mettre au point un « profil de formation » pour les
gestionnaires. Cela ne veut pas dire que nous croyons que certaines
personnes ne sont pas à la hauteur, loin de là. La grande majorité des
gestionnaires sont compétents. Nous voulons simplement reconnaître que
les compétences nécessaires en milieu de travail de nos jours ne cessent
d'évoluer et que nous devons tous continuer d'apprendre pour demeurer
en tête.
Nous nous penchons sur d'autres questions aussi, comme
la planification de la relève et l'encouragement du mentorat et du
coaching. Le Réseau du leadership au SCT a lancé un projet pour les
cadres composé de quatre objectifs essentiels : définir ce qu'est un
gestionnaire, confirmer leurs compétences, mieux évaluer leur rendement
et élaborer les outils qui leur permettent d'exercer leurs fonctions.
Nous souhaitons obtenir vos commentaires à ce sujet. Vous
pourrez vous faire entendre grâce à des groupes de discussion et à des
sondages qui seront menés à l'échelon régional. Nous tenons à
exploiter les bons résultats déjà obtenus pour les gestionnaires, comme
les activités d'apprentissage, la formation en classe et l'apprentissage
en ligne offert par le Centre canadien de gestion.
Je sais que certains d'entre vous se préoccupent de la
viabilité et du futur du Secrétariat de la Communauté nationale des
gestionnaires. Je vous assure que nous reconnaissons la grande
contribution qu'il apporte dans ce domaine. Je n'ai nullement l'intention
d'abandonner un mécanisme d'engagement collectif aussi dynamique et
important. J'ai discuté de cette question avec le secrétaire du CT et
nous nous employons à trouver le meilleur moyen d'appuyer l'initiative
et, par conséquent, la collectivité.
Personnellement, vous me permettrez d'insister, je crois
qu'il est à peu près temps que nous reconnaissions le rôle de pivot
qu'exercent les cadres intermédiaires de la fonction publique du
Canada.
4. Conclusion : remise de prix à Michael Nurse
Mesdames et Messieurs, les modifications législatives,
les valeurs et l'éthique et le perfectionnement des cadres figurent
parmi les moyens essentiels à mettre en oeuvre pour moderniser la gestion
des ressources humaines. L'effort se poursuit aussi sur de nombreux
autres fronts. Les kiosques et séances de cette conférence en sont d'ailleurs
un témoignage éloquent.
J'ai le plaisir de vous informer que des représentants
de la Direction générale de l'équité en matière d'emploi au SCT
sont ici pour lancer de nouveaux outils pratiques permettant aux
gestionnaires d'atteindre leurs objectifs dans le cadre de l'initiative
Faire place au changement. Nous devons continuer de nous efforcer
de bien représenter la population canadienne, surtout en ce qui touche la
représentation des minorités visibles.
Des représentants de la Direction des langues officielles
tiendront un atelier de travail intitulé « Les langues officielles...
et vous ». Cet atelier a pour objectif de favoriser un
changement des attitudes et des comportements afin d'instaurer un climat
propice à l'utilisation des deux langues officielles en milieu de
travail.
Je suis convaincue que nous sommes sur la bonne voie et
que nous allons continuer à faire des progrès. Il s'agira tout
simplement de saisir cette opportunité. Nous avons certainement les
cadres qu'il nous faut, dans cette salle et à l'échelle du pays. En
conclusion, j'aimerais souligner le mérite d'un dirigeant en
particulier dont le dévouement et le talent ont eu des effets importants
pour les gestionnaires et pour le gouvernement dans son ensemble.
Michael Nurse s'est révélé un champion éloquent et
dynamique de votre groupe pendant cinq ans. Il a reçu de nombreux
hommages pour ses réalisations dans différents domaines : Prix du
leadership de l'APEX et Prix du chef de la fonction publique, pour ne
mentionner que ces deux-là.
En outre, il a réalisé un objectif qui, selon lui, j'en
suis sûre, est beaucoup plus important, à savoir le respect, l'admiration
et l'affection de ses collègues de travail.
J'ai le grand plaisir d'inviter Michael Nurse à venir
accepter notre témoignage de reconnaissance au nom de son employeur.
Merci et bonne conférence!
|