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Ottawa, le 5 juin 2000
2000-044

Discours prononcé devant la Fédération canadienne des municipalités

L'honorable Paul Martin,
ministre des Finances du Canada

London (Ontario)
Le 5 juin 2000

Le texte prononcé fait foi.


Permettez-moi de commencer en vous disant à quel point je suis heureux d'être avec vous aujourd'hui dans le cadre de votre congrès annuel 2000.

L'aube de ce nouveau millénaire est sans contredit une période d'optimisme pour le Canada.

Notre excédent commercial est à la hausse, tout comme notre productivité. Parmi les pays industrialisés, nous affichons l'un des meilleurs taux de croissance. Au premier trimestre de cette année, le premier du nouveau millénaire, la croissance du produit intérieur brut réel a atteint 4,9 %, et notre économie a dépassé la barre du billion de dollars un an plus tôt que prévu.

Quant aux facteurs qui touchent les personnes plus directement, la création d'emplois au Canada atteint presque un rythme record. En conséquence, le taux de chômage a chuté, atteignant son plus faible niveau en 19 ans.

En outre, le revenu disponible est non seulement à la hausse, mais on prévoit qu'il augmentera de façon encore plus importante dans l'avenir prévisible. Autrement dit, l'économie canadienne roule à plein régime.

Ce n'est pas un hasard si une économie vigoureuse et des prévisions de forte croissance continue font suite à des années d'efforts de compression budgétaire déployés par notre administration, et les gouvernements provinciaux, en vue de réduire nos déficits. En équilibrant leur budget, nos gouvernements ont suivi l'exemple des administrations municipales.

J'aimerais également vous parler aujourd'hui d'une autre chose que nous vous devons. Une vision qui a permis d'accroître radicalement la qualité de vie de tous les Canadiens et de toutes les Canadiennes : la vision de collectivités viables. Une vision dont vous avez pris l'initiative, mais à laquelle nous collaborons tous. En fait, nous sommes partenaires dans le cadre de presque toutes les initiatives nationales. La présence à votre congrès du Premier ministre et d'un certain nombre de ministres illustre la force de ce partenariat. La raison en est évidente. Nous sommes partenaires dans l'édification de l'avenir du pays et dans la réalisation des objectifs fixés en prévision de cet avenir. Des objectifs comme : faire du Canada un chef de file dans la nouvelle économie, donner à chaque Canadien une chance égale de réussir, assurer la meilleure qualité de vie possible à toute la population canadienne.

En ce qui a trait au premier objectif, faire du Canada un chef de file dans la nouvelle économie, de toute évidence le gouvernement fédéral influe le plus directement sur des facteurs clés comme la politique financière et monétaire, l'impôt et la compétitivité générale.

Toutefois, en cette ère de mondialisation – du marché mondial de produits, de services et d'idées –, le rôle des municipalités est vital, car les villes d'un pays font concurrence à d'autres situées à l'autre bout du monde. Le leadership municipal est essentiel pour dépeindre les villes canadiennes comme un endroit attrayant pour les investisseurs et pour les travailleurs hautement qualifiés qui ont un effet déterminant sur l'économie mondiale. Autrement dit, ensemble, nous devons faire en sorte que, en ce nouveau millénaire, nos collectivités métropolitaines et celles de taille moyenne puissent faire partie des grandes villes du monde.

De même, en cette ère de mondialisation, dans les plus petites collectivités, notre partenariat est nécessaire pour permettre de répondre à des questions clés comme : Comment maintenir les services alors que les populations rurales et l'assiette fiscale diminuent? Comment inciter des collectivités fondées sur une seule industrie à diversifier leur activité économique? Comment s'assurer qu'un plus grand nombre de jeunes Canadiens talentueux demeurent au pays?

Pour ce qui est du deuxième objectif, offrir aux Canadiens l'égalité des chances, un effort de collaboration est clairement nécessaire. Même s'il incombe aux administrations fédérale et provinciales de déterminer la structure et la solidité du filet de sécurité sociale, il est indéniable que les collectivités, les conseils municipaux, les groupes de bénévoles et l'engagement actif des citoyens constituent le gage de l'efficacité des programmes sociaux dans ce pays. Ce sont les municipalités qui assurent la prestation des services garantis par un si grand nombre de nos programmes sociaux. Ce sont les administrations municipales qui sont nos partenaires essentiels dans la lutte contre la disparité croissante entre les riches et les pauvres.

Voilà pourquoi nous avons vu à ce que le nouveau programme d'infrastructure soit assez souple pour financer des logements abordables dans les collectivités où cela est hautement prioritaire. Pourquoi? Parce que, quand ma collègue Claudette Bradshaw a commencé à se pencher sur la question des sans-abri, vous lui avez dit que la conception d'une stratégie efficace devait se faire sur le plan communautaire.

Ce qui m'amène à notre troisième objectif, assurer la meilleure qualité de vie à toute la population canadienne.

Les administrations représentées par la Fédération canadienne des municipalités influent sur notre qualité de vie à tous. Par exemple, sur le fait que les gens peuvent facilement et de façon agréable se rendre au travail et en revenir, que le logement est disponible et abordable, que les familles se sentent en sécurité dans la rue, que les enfants ont accès à des soins de qualité et à de bonnes écoles, que l'air est sain et respirable, qu'il y a des parcs, des espaces verts et une infrastructure de loisirs.

C'est la raison pour laquelle le gouvernement du Canada a annoncé dans le budget un nouveau programme d'infrastructure, fondé précisément sur votre proposition de « qualité de vie ». Le programme d'infrastructure précédent a démontré le pouvoir d'une bonne collaboration intergouvernementale tripartite. Nous entendons faire encore plus avec le nouveau programme et élargir le rôle des municipalités dans la détermination des priorités en matière d'infrastructure. Cela a beaucoup de sens : des 2,65 milliards de dollars, un peu plus de 2 milliards seront investis dans l'infrastructure municipale.

L'économie du XXIe siècle doit pouvoir s'appuyer sur une infrastructure matérielle solide afin de soutenir la croissance du pays, d'assurer la meilleure qualité de vie possible aux Canadiens et aux Canadiennes, et de bâtir des collectivités plus viables. Le nouveau programme d'infrastructure est une composante essentielle des efforts communs que nous déployons en vue de la réalisation de ces objectifs.

Parallèlement, les efforts que nous consacrons au renouvellement de l'infrastructure doivent être ancrés dans un engagement inébranlable d'avancement dans le respect de l'environnement. Je vous dis tout cela non pas en tant qu'environnementaliste trônant sur un podium, mais en ma qualité de ministre des Finances dans une salle remplie de dirigeants municipaux. À ce titre, j'aimerais consacrer les quelques minutes qu'il reste à ce lien qui doit exister entre les défis environnementaux, les pratiques municipales et les ambitions nationales.

Si nous choisissons d'avancer en direction de notre objectif de collectivités viables, nous devons accepter une nouvelle approche, une approche où les aspects économiques et environnementaux ne sont plus considérés comme des entités distinctes.

Premièrement, nous devons soutenir et restaurer notre capital naturel. Qu'entend-on par « capital naturel »? De toute évidence, cela comprend la totalité de nos ressources naturelles ayant une valeur commerciale, comme nos forêts et nos poissons. Cela englobe aussi des écosystèmes comme les bassins hydrographiques et les terres humides, et des processus écologiques vitaux comme le cycle du carbone. Vu sous cet angle, notre « économie humaine » fait partie intégrante de l'« écologie de la nature ». Notre « capital naturel » constitue donc la base de la totalité de notre activité économique, de la viabilité de nos collectivités et de notre qualité de vie. Dans ce contexte, la réduction de nos déficits environnementaux continus n'est que partie intégrante d'une gestion responsable pour les générations futures, de la même façon et pour les mêmes raisons que nous avons dû réduire nos déficits financiers.

Deuxièmement, nous devrons également utiliser des énergies renouvelables comme l'énergie solaire, l'énergie éolienne et les biocombustibles à une échelle commerciale et industrielle.

Troisièmement, nous devrons abandonner le concept même de la production de déchets. Pour cela, nous devrons modifier fondamentalement notre façon de penser, en nous éloignant des modèles linéaires de production et en nous rapprochant de la voie que nous montre la nature.

Le modèle traditionnel prend des matières vierges, crée des déchets et des émissions en cours de production, et met aux rebuts, après usage par le consommateur, des matières qui pourraient être utilisées autrement. Or, la nature connaît depuis longtemps un bien meilleur modèle : elle réutilise ailleurs les déchets comme source d'alimentation ou d'énergie. La réutilisation et le recyclage perpétuels des matériaux dans la nature ne sont pas radicaux, mais plutôt rationnels. Et nous aurions tout intérêt à nous inspirer de ce système.

Quatrièmement, nous devrons apprendre à tirer un meilleur profit de ce que nous consommons. Bon nombre d'experts estiment que nous devons apprendre à obtenir un rendement de 4 à 10 fois plus élevé pour chaque tonne d'acier ou de fibre de bois, ou pour chaque litre d'eau que nous consommons aujourd'hui. Il est possible de le faire et, par le fait même, de réaliser des économies et de préserver l'environnement. Il suffit de faire un peu plus attention.

La Fédération canadienne des municipalités a démontré un grand leadership en mettant ces questions au premier plan du programme collectif. Vous avez été les premiers à intégrer la notion de viabilité aux politiques publiques.

Dans le dernier budget, nous avons accepté votre proposition d'affecter 125 millions de dollars à la mise sur pied de deux fonds écologiques municipaux que gérera la Fédération canadienne des municipalités. Ces fonds permettront d'ajouter expérience et confiance à l'élaboration de démarches exemplaires à l'égard de l'infrastructure environnementale.

En fait, tout en remettant en état l'ancienne infrastructure, nous voulons établir la norme dans la recherche de modes innovateurs et écologiques en matière de prestation de services. Dans les milieux d'affaires, c'est ce qu'on appelle l'éco-efficacité. Pour les municipalités, c'est ce qu'on appelle le gros bon sens.

Mais ne nous trompons pas : si les nouvelles méthodes éco-efficientes s'avèrent moins coûteuses que celles en usage à l'heure actuelle, tant mieux. Mais ce ne doit pas être cela qui nous motive. Nous devons tous garder un œil sur les résultats, mais comme nous l'ont tragiquement rappelé les événements qui se sont déroulés au cours des dernières semaines, la gestion des installations d'infrastructure, qu'elles servent à traiter l'eau, les déchets ou l'air, doit toujours privilégier la protection de la santé publique.

Vous savez cela. Vous savez que les technologies propres sont aussi saines. Vous savez qu'une infrastructure neuve est une infrastructure sûre. Et vous savez que le fait que le public réclame de l'air pur, des services de transport sûrs, accessibles et efficaces et davantage d'espaces récréatifs et verts est étroitement lié à ses préoccupations au sujet de la qualité de vie. Ces préoccupations ne feront que s'accentuer au cours des prochaines années. Or, nous pouvons leur donner suite en adoptant des pratiques, des technologies et des normes plus durables au plan écologique, sûres pour l'environnement et même économiques.

Les défis qui nous attendent sont clairs. L'augmentation de la population mondiale et l'accroissement correspondant de l'ampleur et de l'intensité des activités ont de plus en plus d'effet sur l'environnement. La population de la planète devrait atteindre près de 9 milliards de personnes d'ici 50 ans, et l'économie mondiale poursuit son expansion au rythme d'environ 1 billion de dollars par année. Face à cette réalité, comment pouvons-nous espérer atténuer, ou à tout le moins ne pas augmenter, les pressions que nous exerçons sur l'environnement?

Nous devons éliminer la distinction à la fois fausse et ultimement futile entre les considérations économiques et environnementales. Il nous faut reconnaître que notre qualité de vie future dépend nécessairement des décisions que nous prenons aujourd'hui. Nous devons concilier notre détermination à bénéficier d'une économie plus forte et d'un environnement plus sain.

Pour y parvenir, il faut notamment admettre l'existence de synergies entre les pratiques environnementales et l'innovation technologique, d'où proviendront les progrès futurs. C'est ce que Jane Jacobs appelle le « codéveloppement ». Il s'agit d'un important concept pour l'industrie, pour les collectivités et pour chacun d'entre nous dans la quête d'une meilleure qualité de vie. Cela n'est pas seulement faisable, mais impérieux. Et cela se produit en ce moment même, parce qu'il s'agit de la source des récompenses les plus valorisantes et des gains les plus importants.

L'un des meilleurs exemples de cette démarche est le système écologique de traitement des eaux usées mis au point par un Canadien, John Todd. Dans ce système, les produits chimiques des usines conventionnelles de traitement des eaux usées sont remplacés par un écosystème mettant à contribution les fonctions naturelles des bactéries, des algues, des plantes, des poissons et des escargots pour traiter les eaux usées. Il en résulte un effluent plus propre que celui des systèmes conventionnels de traitement des eaux usées secondaires.

Une autre invention, la pile à hydrogène, est présentement à l'essai à bord des autobus du réseau de transport en commun de Vancouver. Cette pile peut également alimenter des automobiles et des génératrices autonomes. Elle élimine les gaz d'échappement polluants et, comparativement à une voiture conventionnelle, peut réduire des deux tiers les émissions de gaz à effet de serre pendant sa vie utile. Imaginez un peu comment cela permettrait d'améliorer la qualité de l'air dans nos villes et la santé de milliers d'enfants, de personnes âgées et de personnes qui souffrent de troubles respiratoires causés par la pollution.

Pour participer à cette prochaine évolution industrielle, le Canada devra mobiliser toutes ses compétences, tout son savoir, toute sa capacité d'innover et toute sa polyvalence. Nous savons que les nations qui sauront inventer, commercialiser et adopter ces technologies, ces procédés et ces services révolutionnaires en tireront des avantages énormes.

Cependant, il faudra beaucoup plus que les nouvelles technologies pour garantir notre avenir écologique. Il faudra aussi remanier sensiblement nos pratiques, nos comportements et nos processus décisionnels. Et c'est ici que vous, les élus municipaux, entrez en scène.

Il y a parmi vous des représentants des municipalités qui ont inventé le système de recyclage à l'aide des boîtes bleues, incitant chaque ménage à faire sa part pour protéger l'environnement. Vous avez fait en sorte que les concepts de « réduire, réutiliser et recycler » fassent maintenant partie du vocabulaire de tous les jours. Vous n'avez pas tardé à vous engager à réduire les émissions de gaz à effet de serre grâce au Programme des partenaires pour la protection du climat. Vous avez adopté des règlements municipaux pour que l'utilisation des égouts ne soit pas une source de pollution. Vous avez développé des réseaux urbains de pistes cyclables que le reste du monde envie. Et vous avez limité l'utilisation des pesticides à des fins esthétiques, pour ne citer que ces exemples.

Vous avez pris l'initiative de reconnaître et de faire savoir que « l'environnement » n'est pas « quelque part par là » et ne se limite pas à un magnifique parc national de la Colombie-Britannique ou aux étendues sauvages du Labrador. L'environnement, ce n'est pas seulement des ours polaires, des mouches noires, des cèdres centenaires ou des sapins transplantés. L'environnement, c'est là où vous habitez. C'est là où nous habitons tous.

En tant qu'administrations municipales, c'est à vous que revient véritablement la responsabilité de promouvoir cette vision chaque jour. Et les décisions que vous prenez commanderont la réussite de notre nation à transformer nos collectivités, notre pays, et en bout de ligne, notre monde.

J'ai parlé de l'importance de l'environnement pour notre qualité de vie. J'ai aussi parlé du nouveau paradigme où les tensions environnementales et économiques nous entraînaient tous dans la même direction plutôt que dans des directions opposées.

Le Premier ministre, bon nombre de mes collègues du Cabinet et moi-même avons tous parlé du besoin de préserver les partenariats entre nos diverses administrations. Des partenariats au sujet des enjeux que les Canadiens ont à cœur, où qu'ils habitent. La création de ces partenariats gagne en importance en cette période fébrile de changement où la technologie améliore la vie des Canadiens jusque dans les collectivités les plus petites, et où l'innovation aiguillonne l'émergence des nouvelles grandes villes de ce monde.

En qualité de dirigeants municipaux, je sais que, comme moi, vous croyez que bon nombre de ces grandes villes pourraient se développer ici même au Canada, et qu'il en sera ainsi.

Cela est essentiel pour réaliser nos objectifs pour l'avenir, c'est-à-dire être des chefs de file mondiaux là où cela compte. Bâtir une nation où tous les Canadiens, jeunes et moins jeunes, auront toutes les occasions de réaliser leurs rêves. Bâtir une nation où non seulement les plus grands cerveaux voudront rester, mais où les plus talentueux d'ailleurs voudront venir.

Le budget repose sur cette philosophie. Une philosophie rendue possible grâce à notre coopération soutenue avec les provinces et les municipalités.

À l'aube du XXIe siècle, voilà ce que doit être notre ambition, voilà le Canada que nous devons bâtir.

Je vous remercie.


Dernière mise à jour :  2003-01-13 Haut

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