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Ottawa, le 29 mars 2001
2001-032

Allocution de
l’honorable Paul Martin, ministre des Finances du Canada, à l’occasion de la Conférence nationale Traverser les frontières

Ottawa (Ontario)
le 29 mars 2001

Le texte prononcé fait foi.


La conférence d'aujourd'hui sur le cybergouvernement porte sur un nouveau monde, dans lequel le temps et le lieu sont réorganisés et refaçonnés par le pouvoir de la technologie de l'information et des communications. Il en va ainsi pour les entreprises et, de plus en plus, pour le gouvernement.

Toutefois, avant que je ne m'avance davantage dans la réalité virtuelle, permettez-moi d'exprimer mes remerciements les plus réels, en temps réel et avec un réel enthousiasme, à Reg Alcock, à Don Lenihan et à Jean-Guy Finn, qui m'ont invité ici aujourd'hui. Étant moi-même député, je suis en mesure de vous affirmer que Reg a été un défenseur ardent de la nouvelle technologie de l'information au Parlement. Reg, Don et Jean-Guy ont une large vision et affirment leur leadership au moyen de l'initiative Traverser les frontières, qui a mené à la tenue de cette tribune stimulante et fort opportune.

Ce faisant, ils perpétuent une importante tradition. En effet, il y a aujourd'hui 124 ans – en 1877 – le Premier ministre Alexander Mackenzie logeait le premier appel téléphonique commercial au Canada, de la pièce 310 de l'édifice de l'Ouest du Parlement à la résidence du gouverneur général. Cet appel survenait seulement un an après l'octroi à Alexander Graham Bell du brevet pour le téléphone.

Nous sommes aujourd'hui portés par une révolution profonde et puissante. Celle d'une nouvelle économie forgée par une succession de percées technologiques qui s'inscrivent dans un monde sans frontières. La mondialisation de même que les technologies de l'information et des communications ont pour effet de comprimer l'espace et le temps. Elles modifient notre mode de vie et la manière dont nous faisons des affaires. Et pour cette raison, cette transformation s'accompagne d'un important corollaire. Les modèles du passé ne fonctionnent plus. L'économie du savoir comporte de nouveaux principes qui impriment leur marque sur toutes les organisations tant publiques que privées.

Nous sommes entrés dans une nouvelle ère – dont les impératifs ne laissent planer aucun doute.

Premièrement, l'information est devenue la devise mondiale du XXIe siècle. Sa création, son acquisition, son adaptation et sa diffusion établissent l'avantage économique dont jouissent une société, un secteur ou même un pays, et elles permettent à ces derniers de conserver cet avantage.

Deuxièmement, l'innovation prédomine, car on ne peut vendre les produits ou les services du passé sur les marchés de demain.

Troisièmement, la vitesse est un important facteur de réussite. Les nouvelles technologies créent de nouveaux marchés. Les nouveaux marchés entraînent de nouvelles règles, et la première règle, c'est qu’il ne faut jamais être deuxième, car les meilleures occasions sont offertes à celui qui prend l'initiative.

Quatrièmement, comme les gens peuvent naviguer sur Internet et comparer à loisir, l'excellence est devenue la norme mondiale par rapport à laquelle nous sommes tous jugés.

Cinquièmement, l'abolition des distances constitue le dernier principe. La nouvelle technologie ne fait pas que transcender les frontières, elle les abolit carrément. Bref, nonobstant la volatilité des cybercompagnies, la technologie de l'information et des communications modifie radicalement la façon de travailler, de réfléchir et de réussir dans le secteur privé.

De même, le gouvernement peut exploiter les nouveaux outils d'information. En fait, il se doit de le faire. En effet, ces outils sont puissants : ils confèrent le pouvoir d'informer et de dialoguer, le pouvoir de créer et de fournir des services novateurs ou conventionnels, le pouvoir d'être davantage efficace et plus rentable.

Permettez-moi de vous donner un exemple concret, que bon nombre d'entre vous connaissez sans doute, de l'incidence d'Internet en comparant le temps et le coût de l'envoi d'un document de 42 pages d'Ottawa à Tokyo. Par courrier recommandé, le document arrive en 24 heures et son envoi coûte 40 $. Par télécopieur, l'envoi prend 31 minutes et coûte environ 9 $. Par Internet, l'envoi prend 2 minutes et coûte environ un dixième d'un cent! Autrement dit, Internet est 720 fois plus rapide et, vous permettrez à un ministre des Finances d'insister sur ce point, il coûte 40 000 fois moins cher!

Passons maintenant à un élément encore plus important au titre de la discussion de ce matin. Il s’agit du rôle que peut jouer la technologie dans l'amélioration de la régie nationale au sein d'un marché en évolution rapide, et ce, grâce à une prompte prestation d’excellents renseignements. Comme les entreprises misant sur leurs systèmes de production « juste-à-temps », les gouvernements doivent pouvoir surveiller plus efficacement l'évolution du marché et du contexte financier. Tout ministre des Finances ou gouverneur de banque centrale qui doit prendre des décisions en fonction d'une multitude de données contradictoires en constante révision pourra vous le confirmer.

Par ailleurs, les gouvernements des économies les plus développées ne sont pas les seuls à ressentir la pression en faveur de l'exploitation des nouvelles technologies. Pensons au Groupe des Vingt, un groupe de pays que le Canada préside. Le G-20 représente 66 % de la population mondiale, 88 % du produit intérieur brut du monde et 60 % des pauvres à l'échelle mondiale. Toutes ses communications régulières en matière d'organisation et de planification se font par Internet. Cela ne surprend guère, mais ce qui est étonnant, c'est que cette pratique n'a pas été instaurée par le Canada, les États-Unis ou le Royaume-Uni. C'est la Chine qui a décidé de passer outre aux contraintes d'infrastructure qui existent chez elle, montrant à quel point la nouvelle technologie peut aider des pays à diverses étapes de leur développement à être chefs de file, plutôt qu'à accuser un retard, en matière de régie électronique au XXIe siècle.

L'utilisation publique des nouvelles technologies ne doit pas non plus se restreindre aux rapports entre gouvernements. Tout comme la technologie permet aux administrations publiques d'établir des politiques économiques plus efficaces, elle confère aux citoyens un nouveau pouvoir leur permettant d'évaluer les décisions que nous prenons au gouvernement, d'y réagir et d'influer sur celles-ci. Un jeune résident du Cap-Breton peut désormais comparer la performance de son pays sur la scène mondiale simplement par quelques clics, et ce, plus efficacement qu'aurait pu le faire il y a quelques années un expert de l'analyse financière avec une bibliothèque entière de rapports écrits. Une femme de Whitehorse peut communiquer avec un représentant de son gouvernement fédéral se trouvant à des milliers de kilomètres, en se servant de divers formats rendus possibles par la technologie numérique, soit la voix, les données, l'image ou le texte. Un activiste de Gaspé peut créer une page Web qui lui permettra d'échanger avec des millions de personnes dans le monde aussi facilement qu'il peut le faire avec ses proches et ses voisins.

Les gouvernements et les organismes internationaux doivent donc eux aussi profiter de ces possibilités pour devenir beaucoup plus proactifs. Par exemple, pourquoi ne pas établir des groupes de discussion en direct qui permettraient aux personnes préoccupées par la mondialisation de faire connaître leur point de vue aux responsables et d'obtenir des réponses? Il en résulterait certainement un dialogue productif sans que personne n'ait à monter aux barricades. À ce sujet, j'estime que cela devient de plus en plus un problème de base du cybergouvernement, à savoir non pas si oui ou non les gouvernements et les élus doivent communiquer en direct, mais plutôt s'ils peuvent le faire assez rapidement et efficacement pour demeurer réceptifs aux citoyens qui sont de plus en plus branchés.

Au Canada, le défi qui se pose à tous les niveaux de gouvernement présente un caractère immédiat. Les Canadiens sont parmi les citoyens les plus actifs et les plus avertis de la planète en ce qui touche Internet. Premièrement, nous misons sur la technologie Internet optique la plus perfectionnée au monde, le Ca*net 3. Deuxièmement, le Canada est le premier pays à brancher toutes ses écoles et bibliothèques – plus de 18 000 – à Internet. Troisièmement, la proportion de notre population qui est branchée s'élève à 39 %, soit le pourcentage le plus élevé du globe. Quatrièmement, c'est au Canada que l'on trouve le plus grand nombre d'ordinateurs par habitant et l'accès le plus répandu aux systèmes de câblodistribution. En d’autres mots, la plupart des Canadiens et Canadiennes comprennent que la connectivité et les nouvelles technologies sont importantes, et ils vont insister pour que leurs gouvernements ne soient pas en retard.

Tout cela pour dire que les gouvernements du Canada, à tous les paliers, ont pour défi de communiquer avec les citoyens en utilisant des technologies de pointe, et de répondre à leurs besoins grâce à des moyens nouveaux et innovateurs. C'est pourquoi nous nous sommes engagés à faire du gouvernement canadien un utilisateur modèle des technologies de l'information et d'Internet – permettant ainsi aux Canadiens d’avoir accès à tous les services et à toute l'information du gouvernement, en direct. Ma collègue, Lucienne Robillard, présidente du Conseil du Trésor, vous fournira bientôt davantage de renseignements sur notre stratégie et sur le déroulement du programme « Gouvernement en direct ». Mais permettez-moi de prendre un moment pour vous parler de l'évolution d'un ministère en particulier, celui des Finances.

Il y a sept ans, en 1994, nous avons créé notre premier site Web au ministère des Finances afin de communiquer les détails du budget fédéral. À ce moment-là, nous considérions cette initiative comme une expérience, plutôt que comme un outil de communication de premier plan au même titre que le matériel écrit et les numéros 1-800. Pour être entièrement honnête, je continuais personnellement de penser et de me comporter ainsi il y a encore quelques années. Par exemple, dans les jours qui ont précédé le dépôt du budget de 1998, je me souviens d’avoir été absorbé par la dernière relecture des cahiers budgétaires (qui ne sont lus pour la plupart que par quelques centaines de journalistes et d'économistes) et de m’être résigné à contrecœur à filmer des messages vidéo pour le site Web.

Aujourd'hui, je pense différemment. Pourquoi? Parce que, pour le budget de février 2000, notre site a enregistré près de 2 millions de clics le jour du dépôt et environ 500 000 visites au cours des deux semaines suivantes. Cela se compare à seulement 5 004 appels téléphoniques à notre numéro 1-800 établi pour le budget. Il s'agit d'un ratio de 100 pour 1.

Et qu'en est-il des messages vidéo? Au cours des 24 heures qui ont suivi le jour du dépôt du budget de 2000, plus de 22 000 personnes y ont accédé. En deux semaines, ce chiffre passait à 37 000. Fait à noter, nous n'avons imprimé que 35 000 exemplaires de la trousse du budget de 2000. Cela signifie que nos vidéoclips sur le site Web ont permis d’informer un plus grand nombre de Canadiens sur les principales caractéristiques budgétaires qu'auraient pu le faire les documents budgétaires imprimés. Le site du budget de 2000 offrait également une diffusion en temps réel par Internet du discours budgétaire. À lui seul, cet élément a réuni 9 000 spectateurs, des centaines d’entre eux vivant aux États-Unis et à l'étranger et n’ayant pas accès à la télévision canadienne.

Bien que le gouvernement aime connaître le degré d'efficacité de sa diffusion sur le Web, il ne révèle pas l’identité des personnes qu’il rejoint ainsi. Quand nous avons étudié l'échantillonnage de nos spectateurs internationaux du budget de 2000, nous avons déniché un internaute à un endroit particulièrement surprenant. Le branchement Internet de ce spectateur a transmis le signal au-delà du continent, au-dessus de l'océan Pacifique, jusqu'en Asie en passant par Harbin, en Chine, pour aboutir à la limite orientale de l'Ouzbékistan. Tout un périple!

Précisons enfin que l'évolution du Ministère se poursuit. D'ailleurs, nous profitons aujourd'hui de cette conférence pour lancer la nouvelle génération du site Web du ministère des Finances – reconçu dans le cadre de l'initiative du Gouvernement en direct. Notre nouveau site Web illustre bien que les avantages d'Internet ne se résument pas à l'accès et aux coûts. Ils s'étendent également au service. Par exemple, on trouvera sur le site une nouvelle fonction – une première sur le Web. Il s'agit d'une fonction pour expliquer et simplifier le jargon économique. Elle établit un lien entre l’acronyme ou le terme spécialisé dans un document du site et le glossaire du ministère des Finances.

Notre site comprend aussi un service interactif très populaire – une calculatrice d'impôt qui aide les Canadiens à constater l’effet de nos réductions d'impôt sur leur situation personnelle et familiale. D'ici le prochain budget, cette calculatrice sera dotée d'une voix, ce qui permettra aux personnes non voyantes de l'utiliser.

Finalement, dès la première page du nouveau site, nous avons un bouton appelé « Consultations », qui emmène les visiteurs aux initiatives de consultation en cours et leur donne l’occasion de s'exprimer. Pour moi, ceci est fondamental. Le succès d’un budget dépend de la qualité des consultations réalisées avec les Canadiens. Il faut utiliser toutes les possibilités d’Internet et les nouvelles technologies de communication afin d’améliorer le dialogue au maximum.

Nous avons toutefois assez parlé du ministère des Finances. Comme le souligne le rapport issu de la table ronde Traverser les frontières, en bout de ligne, le cybergouvernement, c'est beaucoup plus que le Gouvernement en direct. Il transforme non seulement la méthode de travail des ministères, mais le processus de la régie en soi.

Cela crée des possibilités intéressantes. Cela soulève aussi des questions auxquelles il est difficile de répondre. Par exemple, nous pouvons combiner l'accès à de multiples bases de données de façon à offrir un service plus complet et plus cohérent qui est adapté aux besoins des particuliers. Cependant, comment faire pour assurer le respect des exigences de sécurité de l'information et du droit fondamental à la protection de la vie privée? Nous pouvons en fait regarder au-delà des structures conventionnelles du gouvernement fondées sur des ministères ou des organismes spécialisés dans un domaine unique. Cependant, de quels genres de changements avons-nous besoin – sur le plan de l'organisation, des attitudes, de la reddition de comptes – pour collaborer tous ensemble à la prestation aux citoyens d'un service souple, réceptif et intégré? Les nouvelles technologies de l'information présentent des possibilités sans précédent de transparence pour le gouvernement. Comment toutefois faire en sorte que cette transparence profite également à ceux qui se trouvent du mauvais côté du fossé informatique? Quand nous affirmons vouloir habiliter les citoyens, nous parlons vraiment de tous les citoyens.

Nous traversons une période où la question de la réforme parlementaire est à l'ordre du jour et doit y être. Il faut bien comprendre que la clé de la réforme réside dans la mesure dans laquelle elle permet de renforcer le rôle du député fédéral ou provincial. Que signifie Internet pour eux? Comment pouvons-nous intensifier leur rôle de décideurs, étant donné que ce sont eux qui doivent en bout de ligne rendre compte des travaux du gouvernement dans leur circonscription?

Bon nombre de députés – Reg en est un exemple parfait – utilisent déjà cette technologie pour communiquer avec leurs commettants. Il s’agit d’une véritable communication bilatérale. Si le gouvernement veut respecter sa promesse intrinsèque – celle d'être un chef de file de la régie du XXIe siècle – les députés ne devraient-ils pas tous avoir accès aux communications de pointe?

Prenons seulement trois exemples. Le fait de donner aux députés un lien audiovisuel direct à haute vitesse entre leur bureau de la Colline parlementaire et leur circonscription ne leur permettrait-il pas d'être plus présents dans leur circonscription pendant qu'ils sont ici à Ottawa, et de poursuivre leurs efforts stratégiques ici pendant qu'ils sont dans leur circonscription?

Pourquoi ne pas utiliser les nouvelles technologies de l'information pour améliorer le dialogue continu, non seulement entre les administrations publiques, mais aussi entre les parlementaires et les législateurs du monde entier? On le fait déjà, mais pas suffisamment et de manière trop superficielle. Nous nous heurtons à un grand nombre des mêmes problèmes. Nous recherchons un grand nombre des mêmes solutions. En réalité, j'estime que le recours aux nouvelles technologies constituera un élément important de l'évolution de la régie à l'échelle internationale. Il nous aidera à mieux collaborer.

De retour au pays, ne devrions-nous pas sérieusement améliorer les technologies du cybergouvernement au chapitre des travaux des comités parlementaires? Avec le bon matériel, les logiciels et la largeur de bande qui s'imposent, Internet offre une occasion unique de consulter en temps opportun des particuliers et des groupes de Canadiens d'un océan à l'autre, dès qu'une question est soulevée. Les comités devraient pouvoir, d'une façon cohérente et exhaustive, sonder véritablement le pouls de tous les Canadiens – et non seulement des associations et des groupes d'intérêt bien nantis qui peuvent se permettre de garder une base à Ottawa.

Certains peuvent trouver qu'il s'agit là d'un caprice inutile. Cependant, cela reviendrait à faire comme ce député en poste au Parlement en 1898, qui avait critiqué le ministre des Travaux publics parce qu'il demandait 5 000 $ de plus pour faire installer un plus grand nombre de lignes téléphoniques sur la Colline. Comment raisonnait ce député? Il a dit, et je cite (traduction) : « J'espère que le ministre n'accédera pas à cette demande, simplement parce que tout le monde en réclame. Cette question du téléphone prend rapidement des proportions exagérées. » Était-il ministre des Finances?

Sérieusement, il se dégage de cette anecdote une importante leçon. Ce député de la fin du XIXe siècle illustre bien l'état d'esprit qui caractérise le très important « fossé numérique » auquel nous devons nous attaquer. Face à une nouvelle technologie, ce député n'en voyait que l'aspect négatif. L'économie du savoir requiert toutefois un changement d’attitude : l'état d'esprit d'une personne qui saisit les occasions, qui considère les problèmes éventuels comme autant de défis à relever et qui n'hésite pas à faire les investissements humains et financiers qui s'imposent.

Dans leur document de travail sur l'administration publique au XXIe siècle, Reg Alcock et Donald Lenihan nous ont donné ample matière à réflexion. Ils ont exploré de nombreux thèmes, depuis les modèles de gouvernement, l'importance des partenariats, les outils de gestion et les instruments de régie jusqu'à l’obligation de rendre des comptes et la transparence dans une société axée sur le savoir.

Tandis que nous évoluons en plein cœur des changements rapides de la technologie, nous devons constamment faire attention à deux tendances bien naturelles – un optimisme aveugle et un cynisme cinglant. La première peut entraîner des mesures coûteuses découlant d’hypothèses non fondées au sujet des nouvelles technologies. La seconde peut aussi s'avérer coûteuse, en raison de l'inaction que la peur, non justifiée, des risques que posent ces mêmes technologies peut engendrer. Or, plus que jamais, l'époque actuelle exige une vision claire, du sang-froid et un calme à toute épreuve. Voilà l’importance de cette conférence.

Pour conclure, permettez-moi de dire simplement qu'un des plus importants messages qu’il faudrait selon moi retenir de cette conférence, outre l'aspect captivant des nouvelles technologies, c'est que la démocratie de l'ordinateur ne constitue la réponse à des problèmes complexes que dans la mesure où elle permet la tenue d'un débat éclairé.

Dans notre quête visant à permettre aux Canadiens et aux Canadiennes de relever les défis du XXIe siècle, nous ne devons pas perdre de vue les principes durables qui ont fait de notre régime un modèle de régie démocratique admiré partout dans le monde. Le premier de ces principes est la reddition de comptes et la transparence. Les groupes de discussion en direct et les réseaux électroniques sont des outils qui permettent de se concentrer sur un problème et d'établir un consensus. En fin de compte, ils ne joueront leur rôle que si nous reconnaissons qu'ils sont aussi des instruments permettant aux gouvernements de rendre des comptes aux personnes qui les élisent et assurant la transparence du processus décisionnel.

Le second principe est celui de la réceptivité – les gouvernements ne sont véritablement branchés que s'ils répondent aux besoins changeants des citoyens et que s'ils tiennent compte de leurs points de vue. Cela met en relief un aspect d'Internet qui est réellement fascinant : le soi-disant fossé informatique comporte plusieurs dimensions, l'une d'entre elles étant le fossé des générations. De nos jours, les jeunes prennent pour acquis le pouvoir de la nouvelle technologie. Ils s'en servent de façon automatique et instinctive. Ils s'attendent à ce que le gouvernement et tous ses représentants soient aussi actifs et aient la même connaissance du Web qu'eux. Or, cela signifie que si vous n'êtes pas branchés sur les « réseaux » qu'ils utilisent, vous ne pourrez les entendre. Cela, ils finiront par le savoir et par développer un sentiment d'exclusion. Quand cela surviendra, ce ne seront pas les jeunes qui perdront le « pouvoir » de leur droit de vote, mais plutôt nous, du gouvernement, qui serons les grands perdants. En effet, les jeunes qui sont frustrés de ne pas être écoutés par ceux qui ne sont pas branchés peuvent laisser libre cours à leur frustration, et ils le feront.

Les nouvelles technologies ne doivent pas servir à donner davantage de pouvoirs aux gouvernements. Elles doivent plutôt servir à habiliter les citoyens, à leur permettre de scruter de plus près les décisions et les mesures prises par leur gouvernement. À une époque où la mondialisation est devenue la question de l'heure, et où la frontière entre les politiques nationales et internationales est de plus en plus ténue, cet aspect est crucial.

Manifestement, un nombre croissant de jeunes se sentent dépossédés du pouvoir de leur droit de vote; ils estiment avoir perdu la capacité d'influer sur les mesures qu'adoptent leurs administrations publiques. Nous devons saisir toutes les occasions d’effacer cette perception, y compris en recourant aux nouvelles technologies. Il est essentiel au processus démocratique que les citoyens aient le droit de voir et de savoir ce que font leurs gouvernements.

En conséquence, notre défi est clair. Il consiste à mettre à profit les nouvelles technologies de l'information et des communications de façon à renforcer les principes et les pratiques qui ont si bien servi notre démocratie jusqu'ici. Il consiste à donner à la génération actuelle et à celles qui vont suivre un gouvernement plus responsable, plus réceptif et plus transparent que jamais. Je me permets d'ajouter en guise de conclusion que cette conférence constitue un excellent départ.

Merci.


Dernière mise à jour :  2003-02-25 Haut

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