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Ottawa, le 29 avril 2001
2001-045

Déclaration préparée à l’intention du Comité de développement

L’honorable Paul Martin,
ministre des Finances du Canada

le 30 avril 2001
Washington, D.C.

Le texte prononcé fait foi.


Il y a quelques années, l’auteur américain Francis Fukayama déclarait « la fin de l’histoire ». À la suite de la chute du communisme, le capitalisme libéral, qui se traduit par une mondialisation accrue, devait constituer le seul modèle de développement viable. Pourtant, comme on nous l’a fréquemment rappelé au cours des dernières années, plusieurs ne l’entendent pas ainsi. En effet, les tenants de la mondialisation se retrouvent souvent sur la défensive.

La critique à l’endroit de la mondialisation repose sur deux thèmes : l’instabilité et l’inégalité. D’abord, bien que la mondialisation puisse promouvoir la croissance, le système est instable et propice aux crises – des crises qui peuvent faire disparaître du jour au lendemain des années de progrès et dont les effets sont ressentis de façon démesurée par les plus pauvres et les plus vulnérables de la société. Même en période de forte croissance, les laissés pour compte sont trop nombreux. On soutient que la mondialisation accroît les inégalités à l’intérieur des sociétés et entre les nations.

Hier, au Comité monétaire et financier international, nous avons examiné les progrès que nous avons réalisés au chapitre du renforcement des systèmes financiers pour réduire la vulnérabilité du système financier international face aux crises. Aujourd’hui, nous mettons l’accent sur la nécessité de nous attaquer au problème de la pauvreté dans le monde. Ce n’est pas pour laisser entendre que la Banque mondiale n’a aucun rôle à jouer dans le renforcement des systèmes financiers car, de toute évidence, elle en a un. Mais dans la lutte contre la pauvreté, le rôle de la Banque est crucial parce que, d’abord et avant tout, la réduction de la pauvreté, c’est l’objectif de la Banque.

La réduction de la pauvreté, c’est l’objectif de la Banque

La participation à l’économie mondiale permet à des millions de personnes de se soustraire de la pauvreté. Selon bon nombre d’indicateurs de développement et de qualité de vie, nous avons déjà accompli d’énormes progrès au cours des 50 dernières années. Pourtant, dans la réalité, 1,2 milliard de personnes – le cinquième de la population mondiale – doivent vivre avec moins de un dollar par jour. Dans certaines régions – particulièrement en Afrique – le pourcentage de la population qui vit dans la pauvreté a en fait augmenté au cours des années 1990. On remettra toujours en cause la légitimité d’un système qui permet le maintien d’une telle situation.

À l’occasion du Sommet du Millénaire organisé par les Nations Unies en septembre 2000, les chefs d’État ont appuyé une série d’objectifs de développement international qui prévoient, entre autres, une réduction de moitié de la pauvreté dans le monde d’ici 2015. Ce message ferme et clair est sans équivoque : nous devons tous dépasser les simples réponses rhétoriques et affecter des ressources pour atteindre ces objectifs. La décision de la Banque d’assujettir son plan d’activité triennal à l’atteinte des sept objectifs de développement international constitue donc une mesure très bien accueillie.

La tâche énorme qui nous attendait a été énoncée l’an dernier dans le Rapport sur le développement dans le monde 2000-2001 : lutter contre la pauvreté, qui constitue un rapport décisif de la Banque sur les causes de la pauvreté et les solutions possibles.

Évidemment, la croissance est essentielle à la réduction de la pauvreté. Pour combattre efficacement la pauvreté, nous devons tous réduire les inégalités au moyen de stratégies qui dépassent la promotion unique de la croissance. Nous devons insister sur un contexte institutionnel plus vaste et éliminer les obstacles sociaux qui nuisent aux groupes désavantagés, y compris les femmes et les minorités. Nous devons nous attaquer aux problèmes urgents de santé : quelque 7,5 millions d’enfants meurent chaque année pendant la période périnatale; 30 % de la population mondiale n’a pas accès à des systèmes d’eau salubre et à des systèmes d’hygiène publique; en outre, les maladies infectieuses ravagent démesurément les régions les plus pauvres.

L’éducation représente la clé de l’égalité

L’investissement dans le capital humain constitue la pierre angulaire de toute stratégie visant à réduire la pauvreté parce que cela multiplie les possibilités pour tous, y compris les plus démunis. Les documents traitant des sources de croissance sont sans équivoque quant à la contribution directe de l’accès à une éducation de qualité à la croissance et au développement d’une société. Les études effectuées par la Banque mondiale ont révélé que le plus important facteur de croissance économique des « tigres » de l’Asie de l’Est au cours des trois dernières décennies avait été l’enseignement primaire. L’accès à l’éducation est essentiel pour répartir plus équitablement les retombées pour les plus pauvres. N’ayant pas accès à l’éducation, les pauvres se voient retirer leur droit de participer pleinement à la vie économique, politique et culturelle de leur pays.

L’éducation est un droit de la personne fondamental, et il incombe à l’État de donner accès à une éducation de qualité. La Déclaration universelle des droits de l’homme et la Convention relative aux droits de l’enfant mentionnent que chaque enfant, jeune ou adulte a le droit à l’éducation nécessaire pour répondre à ses besoins fondamentaux d’apprentissage. Pourtant, à l’heure actuelle, plus de 113 millions d’enfants d’âge scolaire (primaire) ne vont pas à l’école. Ce problème touche de façon démesurée les filles, qui comptent pour plus des deux tiers de ce groupe. En outre, plus de 150 millions d’enfants quittent l’école avant d’avoir terminé leur cinquième année. Cela représente d’énormes possibilités perdues et une perte importante de ressources potentiellement productives pour leur société. L’inscription des enfants à l’école n’est que le début : une formation de qualité, inclusive, pertinente et axée sur l’élève représente un important défi dans les pays en développement.

Les gouvernements et les institutions internationales ont reconnu la nécessité d’agir plus rapidement et, en avril 2000, le Forum mondial sur l’éducation a adopté le Cadre de Dakar. Appuyé par plus de 180 pays, ce cadre réaffirme la détermination collective de la communauté internationale à atteindre les objectifs de l’éducation pour tous, y compris l’objectif de développement international en matière d’enseignement primaire universel d’ici 2015 de même qu’une meilleure égalité des sexes au primaire et au secondaire d’ici 2005.

L’éducation et la formation représentent des éléments importants du programme Ireland Aid. L’aide prend la forme de subventions en vue de la construction d’écoles et de la formation de fonctionnaires dans leur propre pays, et de financement de la formation des étudiants provenant de pays en développement dans des institutions de troisième niveau en Irlande. La disponibilité d’un effectif jeune et bien formé a représenté un élément clé de la politique de développement industriel de l’Irlande, plus particulièrement pour ce qui est d’attirer des investissements internationaux mobiles et d’offrir des emplois de grande qualité. L’Irlande croit que l’investissement dans l’éducation offre un rendement très élevé; à cet égard, sa réussite témoigne de la validité de son orientation.

Du point de vue du Canada, l’éducation de base constitue une priorité de son programme bilatéral d’aide publique au développement (APD). L’Agence canadienne de développement international (ACDI) entend quadrupler son investissement dans l’éducation de base et, ce faisant, unir ses forces à celles de ses partenaires des pays en développement et d’autres organismes donateurs pour permettre à tous les enfants d’avoir accès à l’éducation d’ici 2015 et leur offrir la possibilité de réussir des études primaires de bonne qualité tout en éliminant du secteur de l’éducation les inégalités fondées sur le sexe d’ici 2005.

Les progrès réalisés au cours de la dernière année au chapitre de la mise en œuvre du Cadre de Dakar ont toutefois été décevants. Malgré l’accent placé sur l’éducation par plusieurs organismes individuels d’aide au développement, la mise en œuvre du Cadre de Dakar est mal coordonnée à l’échelle internationale. En outre, l’exécution de programmes sur place est marginale, et la plupart des pays n’ont pas encore pris en charge ces programmes. Développer le leadership des pays en multipliant les possibilités en matière d’éducation est donc primordial. L’atteinte de nos objectifs en matière d’éducation dans bon nombre de pays exigera l’affectation d’une plus grande partie des deniers publics à l’éducation, de même que la répartition et l’utilisation plus efficaces de ces ressources.

Étant donné que les ressources nationales seront insuffisantes pour permettre aux gouvernements d’atteindre ces objectifs en matière d’éducation, le Cadre prévoit un projet mondial d’éducation qui regroupera des ressources de coopération en matière de développement pour l’éducation, appuiera les plans nationaux en éducation et dirigera l’aide vers les pays qui s’engagent à accroître les retombées en éducation pour les pauvres. La priorité a été accordée aux pays de l’Afrique subsaharienne et de l’Asie du Sud, à d’autres pays moins développés et à des pays aux prises avec des conflits et en reconstruction. Nous ne pouvons nous permettre de perdre plus de temps. Nous devons agir sans tarder, et il convient de savoir que les tensions exercées sur les ressources ne sont pas insurmontables. Parmi tous nos objectifs de développement international, ceux qui ont trait à l’éducation doivent être à notre portée.

Forte d’une expérience de plus de 35 ans dans les pays en développement dans le domaine de l’éducation, la Banque constitue une précieuse source d’expertise pour les pays en développement. Nous espérons qu’elle continuera d’améliorer son rôle pour accroître l’accès à l’éducation pour les plus pauvres. En effet, la Banque a fait de l’éducation la « pierre angulaire » de sa mission globale au chapitre de l’aide aux pays en développement dans la lutte contre la pauvreté. Nous lui demandons donc de resserrer les liens de coopération qui l’unissent à l’UNESCO, à l’UNICEF et à d’autres organismes pour donner suite aux mesures convenues à Dakar. Nous demandons à la Banque, en collaboration étroite avec les organismes qui mettent en œuvre le Cadre de Dakar, de rendre compte des progrès réalisés lors de la réunion du Comité du développement, à l’automne 2001.

Le rôle du commerce

Le commerce représente un facteur essentiel de croissance. Les pays en développement doivent accroître leur participation à l’économie mondiale afin de bénéficier des retombées de la mondialisation. C’est pourquoi les pays les moins développés et les plus vulnérables tout particulièrement ont besoin d’aide pour développer leur potentiel commercial. La Banque est en mesure d’assumer un rôle clé au chapitre de l’aide aux pays en développement, mais jusqu’à tout récemment, nous n’avons pas accordé toute l’attention voulue au développement du potentiel commercial dans le cadre de ses activités. Cette situation doit changer. La Banque doit collaborer plus étroitement avec les pays en développement pour que le commerce soit partie intégrante du processus de préparation des documents stratégiques sur la réduction de la pauvreté.

Nous saluons les trois objectifs généraux de la Banque à l’égard du commerce : (a) des services d’analyse stratégique et des conseils sur la façon d’aider les pays en développement à respecter les engagements en matière de commerce multilatéral et de tirer profit des possibilités commerciales; (b) une aide pour conclure des accords commerciaux régionaux entre les pays en développement; et (c) un appui pour concevoir des politiques qui permettront d’accorder aux groupes à faible revenu les avantages du commerce. Il s’agit d’un bon départ, et nous espérons que des mesures seront appliquées rapidement à l’égard de ces objectifs; nous encourageons également la Banque à intensifier ses efforts pour soutenir le commerce dans ses activités de prêt et ses conseils stratégiques. De l’avis du Canada, la Banque doit accorder une attention particulière au développement du potentiel de réglementation et du capital humain nécessaire pour renforcer le secteur des exportations.

Le Canada, l’Irlande et les pays des Antilles considèrent que le cadre intégré de l’aide technique liée au commerce constitue à la fois un instrument important d’évaluation des besoins en capacité commerciale des pays en développement et un modèle de partenariat entre plusieurs organismes dans un secteur clé. La Banque mondiale joue maintenant un rôle plus important à l’égard du cadre intégré. L’Irlande, le Canada et les pays des Antilles appuient fermement l’initiative de fonds fiduciaire auprès du Programme des Nations Unies pour le développement afin d’aider à financer des projets pilotes en vertu du cadre intégré. En outre, le Canada et l’Irlande participent activement à l’effort international en vue d’aider les pays en développement à prendre part au processus de règlement des différends de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Le Canada est un membre en règle du Centre consultatif sur la législation de l’OMC, qui aide les pays en développement à se prévaloir de leurs droits en vertu du mécanisme de règlement des différends de l’OMC. Le Canada et l’Irlande se sont tous les deux engagés à financer cet organisme.

Les pays des Antilles ont dû composer avec un certain nombre de problèmes stratégiques importants se rapportant à leur intégration au régime commercial mondial, compte tenu de la complexité qu’engendre un régime commercial mondial plus ouvert et fondé sur des règles. Bon nombre d’entre eux continuent de reconnaître l’importance fondamentale du commerce et du développement pour la réduction de la pauvreté et ont adopté des mesures ambitieuses au niveau macro-économique pour garantir une croissance durable en vue de réduire la pauvreté. En outre, les régimes commerciaux ont été davantage libéralisés. Néanmoins, les importants avantages qui découlent de ces mesures ne se sont pas entièrement concrétisés, d’où la menace d’être tenu à l’écart du régime commercial mondial. Par conséquent, le rôle plus actif qu’envisage la Banque dans le domaine du commerce et du développement pourrait permettre d’appuyer les mesures prises à l’échelle locale et régionale. La Banque pourrait être des plus efficaces, entre autres, en appuyant des enjeux « secondaires », notamment le développement du potentiel, le renforcement des institutions et la mise en place d’autres réformes sectorielles, pour faire en sorte que les petits pays profitent au maximum des possibilités qu’offre la mondialisation.

Le rôle de l’aide

1. Progrès dans les PPTE

Les besoins en développement sont énormes, et l’aide au développement provenant de l’extérieur ne peut que renforcer les mesures et programme locaux. En vertu de l’initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE), des ressources supplémentaires sont accordées à des pays parmi les plus pauvres de la planète pour élargir la prestation de services en matière de santé, d’éducation et d’autres services sociaux. Lors de la dernière réunion du Comité du développement, notre tâche consistait à respecter notre objectif, c’est-à-dire permettre à 20 pays d’atteindre le point de décision; à l’époque, cela représentait un défi de taille. Ainsi, le Canada a mis au défi les créanciers bilatéraux d’imposer un moratoire sur le paiement de la dette en réformant les économies des PPTE pour leur offrir un allégement provisoire jusqu’à ce qu’ils aient terminé ce processus. En janvier 2001, le Canada a appliqué ce type de moratoire. Grâce aux nombreux efforts des PPTE et des centaines d’employés dévoués de la Banque et du Fonds, l’objectif de 20 pays a même été dépassé. La Banque et le Fonds estiment qu’en raison de notre action commune au chapitre des PPTE, une somme de un milliard de dollars américains sera libérée pour des dépenses dans le secteur social cette année et l’an prochain dans les PPTE.

Nous devons maintenant veiller à ce que les ressources soient suffisantes pour financer le solde de l’aide consacrée à l’allégement de la dette lorsque ces 22 pays, et tous les autres, atteindront la fin du processus. Bien que d’importants progrès aient été réalisés pour trouver les ressources nécessaires au financement de cette initiative, il reste encore beaucoup à faire. Compte tenu des besoins spéciaux des petites banques multilatérales de développement régionales, le Canada a fourni une somme de 10 millions de dollars américains au Fonds d'affectation spéciale en faveur des PPTE pour compenser les paiements de ces pays à la Banque centraméricaine d’intégration économique. Ainsi, la participation totale du Canada au Fonds d'affectation spéciale en faveur des PPTE atteindra 112 millions de dollars américains, la deuxième plus importante contribution à ce fonds.

Le gouvernement de l’Irlande appuie lui aussi fermement l’initiative en faveur des PPTE et, ce qui est plus important, il se préoccupe de la durabilité du service de la dette des PPTE après l’allégement de leur dette. L’Irlande croit que les prévisions économiques sur lesquelles la Banque et le Fonds se fondent pour évaluer la durabilité doivent être examinées de près. Dans le cas des PPTE aux prises avec les problèmes de VIH/SIDA, il sera particulièrement important d’évaluer encore une fois la durabilité de la dette. Jusqu’à présent, l’Irlande a versé 12 millions de dollars américains au Fonds d'affectation spéciale en faveur des PPTE et, par l’intermédiaire d’Ireland Aid, elle versera une somme supplémentaire de 5 millions de dollars américains cette année. La totalité de l’aide bilatérale au développement offerte par l’Irlande et le Canada prend la forme de subventions.

2. Au-delà des PPTE

Bien qu’il reste encore beaucoup à faire pour entièrement mettre en œuvre l’initiative en faveur des PPTE, nous devons également commencer à porter davantage attention à la période qui suivra cette initiative. L’annulation de la dette des pays les plus pauvres n’a jamais été envisagée comme une panacée. Au mieux, elle a permis à ces pays de relever quelques-uns des défis auxquels ils faisaient face au chapitre du développement de leur économie. Il reste encore beaucoup à faire pour que ces pays puissent espérer atteindre le stade de la croissance durable propice à la réduction de la pauvreté.

Le développement assumé par les pays est synonyme de développement

Comme nous l’avons appris au cours de décennies de développement, le financement ne représente qu’un élément de l’équation de la réduction de la pauvreté et du développement. Le financement du développement est des plus efficaces lorsqu’il appuie directement des stratégies nationales de développement bien conçues et bien mises en œuvre. Les stratégies nationales de développement sont plus susceptibles d’être efficaces dans les pays qui s’engagent à respecter les principes de la démocratie et la saine pratique de la gouvernance. Tous les parlementaires ont intérêt à renforcer la gouvernance; la nouvelle Global Organization of Parliamentarians Against Corruption peut jouer un rôle important pour accorder aux politiques de gouvernance et de lutte contre la corruption une place de choix dans les programmes stratégiques nationaux. Nous saluons l’appui accordé par la Banque à la Global Organization of Parliamentarians Against Corruption.

Le Canada réitère son appui à l’égard des stratégies nationales de développement enchâssées dans le Cadre de développement intégré et dans les documents stratégiques sur la réduction de la pauvreté. L’un des principaux messages formulés dans le Rapport sur le développement dans le monde révèle que la mise à contribution de tous les segments de la société dans le processus et le débat stratégiques est essentielle pour assurer une répartition plus équitable des retombées de la croissance. La formulation de stratégies nationales de réduction de la pauvreté et de développement doit reposer sur la participation des pauvres, et les gouvernements des pays en développement doivent être en mesure d’élaborer et de mettre en œuvre ces stratégies. La Banque et d’autres organismes de coopération en matière de développement ont un important rôle à jouer pour aider ces pays à développer ce potentiel.

Nous reconnaissons également le rôle éventuel que pourraient jouer les prêts programmés – qui simplifieraient les conditions et orienteraient directement le financement vers les programmes sociaux des pays en développement – pour appuyer la réduction de la pauvreté. Cependant, il s’agit d’une question stratégique fondamentale qui n’a pas été suffisamment débattue. Nous devons examiner cette option de près; notre point de vue et celui de la Banque doivent profiter d’une consultation ouverte avec les gouvernements des pays en développement et des organismes non gouvernementaux, plus particulièrement des organismes qui représentent la population la plus pauvre de ces pays.

Défis spéciaux que posent les ppte en situation d’après-conflit

Les PPTE qui ont déjà atteint leur point de décision représentent, à bien des égards, les cas les plus faciles. Par contre, les PPTE qui n’ont pas encore atteint ce point posent des défis supplémentaires et difficiles à relever. Dix d’entre eux sont aux prises avec un conflit ou viennent tout juste de le régler. Les PPTE en situation d’après-conflit n’ont jamais eu le temps ni la chance de faire le bilan au chapitre de la gouvernance, de la réduction de la pauvreté ou de la politique économique.

Nous saluons les efforts déployés par le Fonds et la Banque pour offrir une aide technique aux PPTE en situation d’après-conflit. Nous sommes conscients de la tâche difficile qui attend ces institutions si elles tentent d’appliquer le cadre des PPTE aux pays en situation d’après-conflit. D’une part, la capacité de ces pays d’utiliser efficacement les ressources peut être limitée, et les ressources peuvent être détournées directement ou indirectement pour appuyer d’énormes dépenses militaires. D’autre part, les besoins de la population sont grands, et une action rapide pour satisfaire ces besoins pourrait représenter le meilleur espoir de paix durable. Pouvons-nous vraiment leur demander d’attendre au moins trois ans pour atteindre leur point de décision? La Banque et le Fonds doivent travailler en étroite collaboration avec d’autres intervenants, plus particulièrement les Nations Unies, pour déterminer sur une base individuelle le bien fondé de l’aide et son niveau.

Le Canada est d’avis que le moratoire sur la dette qu’il a préconisé en septembre à Prague et qui a été mis en œuvre en janvier pourrait représenter une solution à ce problème. Il n’a appliqué son moratoire qu’aux pays qui se sont engagés à réaliser un développement pacifique et une saine gouvernance. Nous pouvons appliquer, et nous l’appliquerons, notre moratoire aux pays qui sont actuellement en situation de conflit lorsque ces conflits seront terminés et que leurs gouvernements se seront engagés à respecter ces objectifs, qu’ils aient ou non atteint le point de décision des PPTE. Le Canada presse d’autres donateurs bilatéraux de lui emboîter le pas.

Pays à revenu moyen

Nous saluons les efforts de la Banque en vue d’accroître l’efficacité du développement dans les pays à revenu moyen; nous avons tenu dûment compte des recommandations formulées dans le rapport de la direction au Comité du développement à cet égard. Nous sommes entièrement d’accord avec l’obligation imposée à la Banque de raffermir la collaboration avec les partenaires du développement dans ces pays. Puisque ces pays représentent 80 % des pauvres de la planète, une étroite collaboration entre la Banque et les pays à revenu moyen est essentielle pour respecter les objectifs mondiaux de réduction de la pauvreté.

Bien que l’objectif déterminant de la Banque demeure la réduction de la pauvreté, la Banque doit maintenir le cap et faire preuve de sélectivité à l’égard des pays compte tenu de la grande diversité au sein du groupe des pays à revenu moyen. Par conséquent, l’un des principaux défis que posera l’application des recommandations de ce rapport très utile consistera à déterminer la mesure dans laquelle les divers éléments de la stratégie peuvent être appliqués dans l’ensemble des divers pays à revenu moyen. Il s’agit de décisions difficiles pour la Banque, compte tenu des nombreuses demandes contradictoires. Cependant, nous croyons que le rapport énonce un vaste cadre à l’intérieur duquel la Banque pourra accroître l’efficacité de ses activités pour appuyer des programmes nationaux de développement et de réduction de la pauvreté. Nous émettons toutefois une réserve au sujet de l’adoption d’une méthode uniforme et de l’accroissement des fardeaux imposés aux pays.

3. La lutte mondiale contre le VIH/SIDA

Le Canada, l’Irlande et les pays des Antilles accordent une très grande importance aux efforts internationaux visant à combattre le VIH/SIDA et saluent la réaction intensifiée de la Banque à cet égard, comme le précise le document présenté au Comité du développement. Cette maladie menace d’annuler des décennies de développement à l'échelle mondiale et de ruiner nos efforts visant à atteindre les objectifs de développement international. Le taux d’infection dans la population adulte des pays des Antilles occupe le second rang, derrière l’Afrique subsaharienne, et les conséquences socio-économiques pourraient être dévastatrices pour ces petites îles. Nous accueillons très favorablement le plan de la Banque qui a été annoncé par le Président Wolfensohn à Québec au début du mois. Ce plan prévoit une aide pouvant atteindre 150 millions de dollars pour appuyer les efforts déployés par la région des Antilles dans le but de combattre la propagation de la maladie au cours des cinq prochaines années.

4. Nécessité d’améliorer la coordination entre les donateurs

Dans le cadre de leur engagement à l’égard des principes de la participation des pays, les partenaires de la coopération en matière de développement – bilatéral et multilatéral – doivent modifier leur propre façon d’envisager le développement et leurs pratiques à cet égard, c’est-à-dire écouter leurs partenaires des pays en développement et rajuster en conséquence leurs pratiques commerciales.

L’un des domaines où la coordination des donateurs doit rapidement progresser – où elle présente des lacunes criantes – réside dans la simplification et l’harmonisation des méthodes appliquées par les donateurs. De nos jours, les organismes donateurs imposent à leurs partenaires des pays en développement une série déconcertante de politiques et de procédures individuelles – qu’il s’agisse de nombreuses visites de missions, d’exigences variées en matière d’obtention de l’aide, de formulation de stratégies par pays et par secteur, d’évaluations, de rapports financiers et matériels, de surveillance ou d’imputabilité. Un pays africain type bénéficie de 600 projets d’aide. La conformité aux exigences des donateurs dans le cadre de ces projets peut toutefois exiger la préparation de 2 400 rapports trimestriels et plus d’un millier de missions de surveillance organisées par les donateurs chaque année. Ce fardeau, plus particulièrement pour les pays les plus pauvres et les plus petits, est insoutenable. Il a pour effet de majorer les coûts pour les clients et les donateurs, de réduire l’efficacité du développement, de détourner des ressources administratives rares dans les pays en développement et de compliquer le processus de propriété locale.

Mesure visant à accroître l’harmonisation de l’aide

À eux seuls, les efforts bilatéraux ne suffiront pas. Pour faire progresser le dossier de l’harmonisation, il faudra compter sur le dynamisme de tout un chacun dans un certain nombre de secteurs :

  • la Banque doit jouer un rôle plus dynamique pour promouvoir l’harmonisation en œuvrant avec d’autres banques multilatérales, les organismes des Nations Unies, des donateurs bilatéraux et les bénéficiaires de l’aide pour élaborer des normes de saines pratiques d’achat, de gestion financière et d’évaluation environnementale;
  • les procédures d’harmonisation pourraient être appliquées dans le cadre de projets pilotes dans un petit nombre de pays. De concert avec d’autres organismes multilatéraux et bilatéraux de développement, la Banque mondiale pourrait s’entendre sur des objectifs axés sur les pays et des objectifs d’aide communs, et sur les méthodes d’évaluation des résultats obtenus. Les gouvernements des pays donateurs devraient faire preuve d’une plus grande souplesse, et les vérificateurs nationaux chargés d’examiner les dépenses publiques devraient participer davantage;
  • tous les donateurs doivent envisager la possibilité de créer une tribune de manière à intégrer les pays en développement dans le débat sur l’harmonisation de l’aide. Cette tribune pourrait être épaulée par le Groupe de travail sur l’harmonisation des méthodes des donateurs, qui relève du Comité d’aide au développement de l’Organisation de coopération et de développement économiques;
  • qui plus est au chapitre de la propriété locale, les donateurs doivent insister davantage sur le développement du potentiel des bénéficiaires de sorte que ces derniers soient plus en mesure de gérer l’aide eux-mêmes. À défaut d’un tel renforcement du potentiel, l’harmonisation ne saurait être durable;
  • enfin, nous encourageons tous les donateurs à aligner de plus en plus leur aide sur la planification de l’emprunteur et les processus budgétaires.

Tous les organismes donateurs peuvent ainsi participer à la réduction des fardeaux administratifs qu’ils doivent assumer et qui sont également imposés à leurs clients en continuant de tendre vers des méthodes systématiques en matière de développement qui insistent davantage sur la coordination de l’aide et la propriété locale. L’ACDI envisage également le recours à la structure consortiale avec d’autres donateurs, ce qui devrait favoriser une plus grande rationalisation de l’administration des donateurs.

Priorités de l’Irlande en matière d’aide au développement

Le gouvernement de l’Irlande passe actuellement en revue son programme d’aide au développement dans la foulée de l’engagement pris par le Premier ministre Ahern lors du Sommet du Millénaire des Nations Unies pour atteindre le ratio d’APD par rapport au produit intérieur brut (PIB) des Nations Unies de 0,7 % d’ici 2007. Cet examen vise à mettre en place des politiques et des structures de gestion qui appuieront cet objectif. L’Irlande élargit rapidement son programme d’aide au développement et s’est fixé comme objectif un ratio provisoire d’APD/PIB de 0,45 % pour 2002. L’atteinte de cet objectif provisoire suppose une augmentation de 55 % de l’APD en Irlande.

Ireland Aid s’est imposée comme chef de file dans l’élaboration de méthodes systématiques et souples d’aide au développement, en collaboration avec d’autres intervenants. Le programme d’aide au développement de l’Irlande n’est pas lié, et il est largement intégré à des démarches sectorielles dans un certain nombre de pays d’Afrique. Au cours des cinq dernières années, le programme de l’Irlande a été décentralisé, et le nombre d’employés irlandais expatriés dans le cadre de ce programme a radicalement chuté.

Que nous réserve l’avenir?

La lutte contre la pauvreté, la réduction des inégalités et l’accroissement des débouchés issus d’un régime commercial international plus ouvert représentent des impératifs moraux qui lient les pays en développement, les pays industrialisés et les institutions internationales. Nous en avons d’ailleurs tenu compte en appuyant les objectifs de développement international. Les ressources nécessaires pour exécuter cette tâche sont rares et doivent être utilisées efficacement. Ni les donateurs ni les clients ne peuvent se permettre les multiples exigences rattachées à l’aide – il est urgent d’harmoniser davantage les exigences imposées aux donateurs en matière d’aide. Mais la leçon la plus importante que nous ayons tirée relativement à l’efficacité de l’aide réside dans le fait que l’aide doive appuyer des priorités et des programmes appartenant au pays. La Banque doit jouer un rôle essentiel dans l’aide aux gouvernements des pays en développement qui s’engagent à réduire la pauvreté; elle doit appuyer des programmes socio-économiques dans des domaines tels que l’éducation et la santé, développer la capacité des pays les plus pauvres de la planète de participer davantage au régime commercial mondial, et elle doit travailler avec nous tous pour améliorer considérablement la coordination entre les donateurs.


Dernière mise à jour :  2003-02-25 Haut

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