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Ottawa, le 26 septembre 1999
1999-081

Déclaration préparée à l'intention du Comité intérimaire du Fonds monétaire international

L'honorable Paul Martin, ministre des Finances du Canada

Washington, D.C.
le 26 septembre 1999

Le texte prononcé fait foi.


Mesdames et Messieurs mes collègues, permettez-moi tout d'abord de féliciter le chancelier Gordon Brown de son élection à la présidence de ce comité. Ces deux dernières années et demie, j'ai eu le plaisir de travailler avec le chancelier Brown dans le cadre de diverses tribunes internationales dont ce comité, le G-7 et le Commonwealth. Il est des plus qualifiés pour diriger la destinée du Comité intérimaire face aux possibilités et aux défis qui nous sont présentés.

Le contexte économique mondial

En parlant de possibilités et de défis, c'est avec un certain soulagement que nous pouvons cette année, en discutant des perspectives économiques mondiales, mettre davantage l'accent sur les « possibilités » et peut-être un peu moins sur les « défis ».

L'année dernière, à la même époque, nous nous retrouvions dans une situation très précaire. Vous vous souviendrez peut-être que dans l'introduction du document Perspectives de l'économie mondiale, il y avait cette mise en garde :

La situation économique et financière internationale s'est considérablement détériorée en l'espace de quelques mois. La récession s'est creusée dans bon nombre de marchés émergents d'Asie et au Japon, et la crise financière russe fait planer la menace du défaut de paiement.

Le document qualifiait la situation économique qui régnait à l'époque d'« inhabituellement fragile ».

Heureusement, les risques ne se sont pas matérialisés dans la majeure partie du monde – je dis bien dans la majeure partie. Après la turbulence financière qui a ébranlé le monde entier ces deux dernières années, laquelle a eu un effet dévastateur sur l'activité économique et le niveau de vie dans de nombreux pays, il y a des signes évidents que l'économie mondiale est en voie de redressement.

Heureux contraste par rapport à l'année dernière, dans le document Perspectives de l'économie mondiale actuel et dans d'autres prévisions, les perspectives de croissance dans la plupart des économies de marché émergentes et des pays développés ont été révisées à la hausse. La reprise en Asie a été étonnamment robuste, et les récessions au Brésil et en Russie moins profondes que prévu. Par ailleurs, l'économie américaine, avec sa croissance soutenue et son inflation contenue, demeure impressionnante.

La performance et les perspectives économiques dans les pays membres

a) Le Canada

L'évolution de l'économie canadienne a aussi été plus favorable que beaucoup l'avaient prévu il y a un an. Cette situation témoigne dans une large mesure de l'engagement du gouvernement à l'égard de politiques économiques et financières robustes, à savoir inflation faible et stable et budgets équilibrés, ou mieux.

Dans l'ensemble, la croissance économique au Canada, qui était de 4,0 % en 1997, s'est stabilisée à 3,1 % en 1998. La croissance au pays a considérablement ralenti au milieu de 1998 en raison, en partie, du climat d'incertitude et d'agitation financières qui régnait à l'époque.

Au fur et à mesure que se sont atténués les effets de cette agitation, la croissance a repris de la vigueur pour s'établir en moyenne à un taux annuel de 4,0 % au cours des trois derniers trimestres.

L'augmentation de la production a donné lieu à une progression de l'emploi. En effet, plus de 450 000 emplois ont été créés en 1998, soit la plus importante augmentation annuelle depuis 1987. Jusqu'à présent en 1999, 116 000 emplois de plus ont été créés. La forte progression de l'emploi a permis de ramener le taux de chômage de quelque 10 % à la fin de 1996 à 7,8 % en août 1999, presque son plus bas niveau depuis 10 ans.

Parallèlement, l'inflation au Canada demeure contenue. Malgré la dépréciation du dollar canadien en 1998, l'inflation des prix à la consommation s'est établie en moyenne à 0,9 % en 1998, soit une baisse par rapport à 1,6 % en 1997. En dépit des récentes augmentations du prix du pétrole, le taux d'inflation sommaire en août était de 2,1 %, et le taux d'inflation fondamentale de 1,6 %, ce qui s'inscrit bien dans les mesures de lutte contre l'inflation qui la limitent à une fourchette de 1 à 3 %.

L'inflation faible et l'amélioration de sa situation financière ont permis au Canada d'offrir des taux d'intérêt peu élevés. Mis à part la période d'instabilité dans les marchés financiers internationaux l'automne dernier, les taux à court et à long terme au Canada ont été inférieurs aux taux correspondants des États-Unis pour la majeure partie des trois dernières années.

Dans le cadre de l'examen des prévisions du secteur privé utilisées dans la préparation du budget de février 1999, les prévisionnistes du secteur privé prévoyaient que la croissance se situerait en moyenne à 2,0 % en 1999 et à 2,5 % en 2000. Dernièrement, ces mêmes personnes se sont entendues pour réviser à la hausse la croissance du PIB réel et l'établir à 3,5 % en 1999 et à 2,6 % en 2000. Ces chiffres sont sensiblement les mêmes que ceux avancés récemment par le personnel du Fonds monétaire international (FMI).

(b) L'Irlande

L'économie irlandaise a continué à connaître une croissance rapide. En effet, le PIB réel a progressé de 8 % en 1998 et devrait progresser de 6,5 % cette année. L'inflation des prix à la consommation est demeurée relativement contenue et devrait s'établir en moyenne à 2 % en 1999, même si des mesures sous-jacentes laissent entrevoir une tendance un peu plus marquée. Le surplus budgétaire qui, prévoit-on, se situera à environ 3 % du PIB et les recettes de la privatisation devraient permettre de baisser encore le ratio d'endettement. L'emploi a fait une progression remarquable de 6 % en 1998, d'où une migration intérieure nette et un recul du taux de chômage qui est maintenant inférieur à 6 %.

D'après les prévisions, cette robuste performance se poursuivra. Bien qu'il y ait des signes de plus en plus évidents de pressions inflationnistes dans le marché du travail et le secteur du logement, où le prix des biens immobiliers n'a cessé d'augmenter considérablement, les autorités irlandaises sont bien conscientes des risques que présenterait une reprise soutenue de l'inflation. Les efforts en vue de minimiser ces risques sont un élément clé du plan d'investissements à moyen terme qu'elles préparent actuellement, ainsi que des discussions en cours quant à la possibilité d'un nouvel arrangement dans la foulée du contrat social « Partnership 2000 » qui vient bientôt à expiration.

c) Les pays des Antilles

Malgré l'agitation qui a perturbé les marchés financiers mondiaux en 1998, les progrès économiques réalisés dans les pays des Antilles ont aussi été dans l'ensemble positifs, même si des risques importants dans les petites économies qui reposent sur l'agriculture persistent; en outre, nous avons encore une fois constaté la vulnérabilité de ces pays aux ouragans, le plus récent ayant frappé les Bahamas. Les pays antillais membres, des Bahamas au nord, à la Guyane au sud, en passant par les pays de l'Organisation des États des Caraïbes orientales et la Jamaïque, ont affiché des résultats relativement bons l'année dernière. Sauf quelques exceptions, la plupart des économies ont enregistré une croissance réelle positive, des taux d'inflation de faible à modéré et des déséquilibres fiscaux moindres. Le taux de chômage a baissé en moyenne, mais il y a encore d'importants regroupements de chômeurs, laissant trop de personnes aux prises avec le problème de la pauvreté.

La plupart des gouvernements des pays des Antilles ont travaillé assidûment pour consolider l'architecture financière internationale. À cette fin, ils ont commencé à accroître la transparence des opérations fiscales et financières. Certains pays antillais membres que je représente ont accepté de participer au projet pilote du Fonds sur la transparence et ont instauré des mécanismes pour adhérer aux pratiques exemplaires en matière de politique fiscale et monétaire. Il y a toujours place à l'amélioration dans l'édification de systèmes fiscaux et de bases statistiques plus rigoureux, et la région compte sur le Fonds pour obtenir l'aide technique dont elle a besoin à cet égard.

Certains des pays membres dont les économies sont toujours dépendantes des recettes d'exportation de marchandises, notamment les bananes, s'adaptent aux dures réalités d'un nouveau régime commercial dans le contrecoup de la décision défavorable de l'Organisation mondiale du commerce au sujet des bananes. La stratégie d'adaptation comprend notamment la diversification des services, y compris le tourisme et les activités bancaires outre-mer comme solutions de rechange à l'agriculture. En ce qui concerne les activités bancaires outre-mer, les gouvernements en cause sont déterminés à garantir que le tout se fera dans le cadre d'un rigoureux système de réglementation.

Nous comptons sur l'appui soutenu de la communauté internationale pour aider les pays des Antilles à poursuivre leur développement économique et leurs efforts en vue de bâtir et de soutenir des sociétés florissantes, démocratiques et productives.

Les défis qui restent au chapitre des politiques

Les perspectives économiques mondiales plus favorables de cette année témoignent en partie d'un certain nombre de mesures stratégiques adoptées au cours de la dernière année tant par les pays développés que les pays des marchés émergents en vue de favoriser une plus grande stabilité du marché financier et de promouvoir une croissance durable.

Nous pouvons donc être satisfaits de la façon dont la situation et les perspectives se sont améliorées au cours de la dernière année. De toute évidence, cependant, il nous reste d'importants défis à relever au chapitre des politiques.

Même si les marchés financiers ne peuvent plus être qualifiés d'« inhabituellement fragiles » comme ils l'étaient l'année dernière à la même époque, la situation est cependant loin d'être réglée. Il est facile d'imaginer des événements aussi bien dans les grands pays industrialisés que dans les pays de marché émergents qui pourraient entraîner un retour à l'instabilité.

La solution idéale pour éviter une telle instabilité repose sur une activité plus forte en Europe et au Japon et sur une croissance soutenue aux États-Unis. Il serait ainsi possible de progressivement dénouer les déséquilibres actuels des comptes et de faciliter une croissance mondiale davantage équilibrée.

À cet égard, il est impératif que les signes de reprise encourageants constatés en Europe et au Japon aboutissent à une croissance soutenue. Outre des politiques macro-économiques adéquatement positives, il faudra à cette fin mettre activement en œuvre des réformes structurelles clés, en particulier dans le secteur financier au Japon et dans le marché du travail de la zone Euro.

Il importe également que les pays de marché émergents poursuivent dans la voie stratégique qui les a aidés à se sortir de la crise des deux dernières années. S'ils ne parviennent pas à achever les réformes nécessaires, nous courrons tous de grands risques.

Cependant, le risque peut-être le plus sérieux, c'est que nous ne parvenions pas à réaliser les réformes qui permettraient de rendre nos propres systèmes financiers et le système international moins vulnérables aux crises.

Il y a au moins deux raisons pour lesquelles nos efforts pourraient ne pas porter les fruits escomptés.

La première est la complaisance. Un calme relatif est revenu sur les marchés financiers et les perspectives de croissance sont plus reluisantes, mais nous commettrions une grave erreur en pensant qu'il est inutile de réaliser d'autres réformes. Il semble que le dicton selon lequel ceux qui oublient le passé sont voués à le répéter s'applique nulle part ailleurs mieux qu'aux marchés financiers. Dans les années 1990, l'histoire, sous forme de crises financières, s'est répétée à un rythme de plus en plus rapide.

La deuxième est ce qu'on pourrait appeler la mauvaise orientation. Autrement dit, se laisser embarquer dans une cascade d'activités qui nous donnent une impression de réalisation, mais qui nous font oublier de régler les questions ou de combler les lacunes importantes.

Ces deux dernières années, beaucoup de travail a été amorcé sur la scène internationale. En effet, dans le rapport de juin dernier des ministres des Finances du G-7 à l'intention des dirigeants au sujet de la réforme du système financier international, il a fallu plus de 20 pages pour énumérer tous les efforts de réforme en cours. Il y a eu certaines réalisations concrètes, notamment l'augmentation de la transparence, l'élaboration de codes et de pratiques exemplaires et la création d'outils pour gérer les crises, comme l'octroi de lignes de crédit à titre éventuel et le mécanisme de réserves supplémentaires. Ces mesures et les autres mesures prises contribueront sans aucun doute à stabiliser davantage les systèmes financiers.

Or, en dépit de ces progrès, certaines questions fondamentales demeurent quant à l'orientation des réformes de l'architecture financière internationale. Quel genre de système financier international devrions-nous envisager? Comment y parvenir? Que reste-t-il à faire? Comment créer le dynamisme pour garantir que les réformes nécessaires sont mises en œuvre?

Tribunes consultatives

Pour répondre à ces questions, il faudra non seulement du temps, mais également les infrastructures institutionnelles qui conviennent. C'est là un aspect où nous accomplissons de réels progrès.

Le Canada appuie la proposition selon laquelle un Comité intérimaire revitalisé deviendrait en permanence le Comité monétaire et financier international (CMFI). Le FMI doit demeurer au centre du système monétaire international. Pour ce faire, il doit bénéficier de l'orientation et de l'appui de ses membres. Le CMFI réformé doit exercer ce rôle. Le système international requiert toutefois également que d'autres institutions appuient ces efforts dans leurs domaines respectifs.

Plus tôt cette année, le Canada et ses partenaires du G-7 ont créé le Forum sur la stabilité financière. Ce Forum joue un rôle essentiel qui consiste à cerner les lacunes qui existent au chapitre de la réglementation des systèmes financiers et à proposer des solutions visant à y remédier. Le Forum a mis sur pied trois groupes de travail qui étudient des questions importantes dans le système financier international, et le Canada attend avec impatience leurs rapports le printemps prochain. Comme le Canada a toujours été en faveur d'une large représentation au Forum, il était donc heureux de l'élargissement des rangs initiaux du G-7 pour inclure quatre autres grands centres financiers. D'autres pays ont aussi participé aux activités des groupes de travail du Forum.

Ces étapes contribuent à une amélioration importante de l'architecture internationale. Comme nous l'avons vu dans les dernières années toutefois, nous avons toujours besoin d'un forum qui puisse fournir une vue d'ensemble et qui permette de traiter de questions qui vont au-delà des responsabilités d'une seule organisation ou qui concernent plus que la réglementation financière en tant que telle. Les crises des deux dernières années ont clairement montré qu'il existe des liens étroits entre les régimes de taux de change, les systèmes financiers, les secteurs réels de notre économie et la société au sens large. Les crises ont aussi montré que ce qui se produit dans les marchés émergents a une grande incidence pour tous. Il existe donc un besoin pour un forum permanent qui inclut non seulement les économies de pays industrialisés, mais aussi les économies émergentes et en développement. Ce forum ne remplacera pas les forums existants et leur rôle décisionnel, mais il appuiera plutôt leurs efforts.

Le Canada a donc appuyé la formation d'un nouveau mécanisme de consultation permanente au sujet de questions reliées au système financier international – le nouveau G-20. Nous avons l'honneur d'avoir été nommé à la présidence de ce nouveau groupe, qui constituera un outil efficace pour se concentrer sur les grandes questions et qui pourra par ailleurs permettre de favoriser la cohérence des divers efforts déployés et des tribunes visant à réformer et à renforcer le système financier international.

À cette fin, il est important que le groupe soit aussi souple que possible, tant du point de vue de son fonctionnement que des questions qu'il examinera. Le groupe doit donc être une tribune qui permettra aux ministres de parler franchement de questions stratégiques importantes, dans un climat qui encourage la spontanéité. L'étendue du mandat du groupe favorisera la souplesse dans les discussions.

Cependant, le nouveau groupe devra éviter de faire double emploi avec les travaux des autres tribunes existantes. Le G-20 viendra plutôt compléter et aider à coordonner les efforts de ces dernières.

Nous pouvons nous appuyer à cet égard sur l'expérience fructueuse du G-22 et du G-33. C'est ainsi par exemple qu'on a pu apprécier la valeur des petits groupes de travail ad hoc pour étudier les questions d'ordre technique ou entamer des consultations avec des pays autres que ceux du G-20, avec des institutions internationales ou avec le secteur privé.

Le plan de travail du système financier international

Le plan de travail du G-20 et des autres tribunes susmentionnées devrait être dicté par notre vision de l'évolution du système financier international.

En général, les marchés libres sont plus efficaces que les marchés contrôlés de près ou contenus et ils permettent davantage d'améliorer le niveau de vie, soit notre principal objectif. L'ouverture des marchés commerciaux ou financiers doit cependant se faire de façon ordonnée. Par exemple, l'expérience des quelques dernières années nous a appris que la libéralisation des marchés financiers ne consiste pas seulement à abolir les restrictions imposées à l'égard des activités des institutions financières. Pour que les marchés financiers soient efficients, efficaces et stables, ils doivent reposer sur une solide infrastructure, comportant des normes comptables, des régimes de supervision, ainsi que des lois et des règlements cohérents visant à assurer la transparence et la reddition de comptes. Ils doivent évoluer dans un milieu macroéconomique sain où l'inflation est faible, où les finances publiques sont en ordre et où le régime de taux de change est conforme au cadre stratégique.

Dans les deux dernières années, la collectivité internationale a déployé de grands efforts afin d'établir les conditions et les critères qui permettraient d'assurer l'efficacité et la stabilité des marchés financiers, y compris des codes de transparence, des pratiques exemplaires, ainsi que des normes de base dans divers domaines.

Le défi consiste maintenant à continuer de mettre au point ces codes et ces normes et à veiller à ce qu'ils soient mis en œuvre. Deux facteurs déterminent la mesure dans laquelle ces codes et ces normes sont mis en œuvre : la capacité et les incitatifs.

Il ne sert pas à grand-chose de mettre au point et d'approuver des codes si nous n'aidons pas les pays à développer la capacité de les mettre en œuvre. La tâche qui consiste à se préparer à accéder aux marchés financiers mondiaux n'est pas simple. Elle requiert une infrastructure et des capacités que certains pays n'ont peut-être pas ou dont ils ignorent peut-être même la nécessité. Le FMI peut jouer un rôle extrêmement utile en aidant les pays à établir les conditions préalables d'une libéralisation ordonnée et durable de leur compte de capital. Il peut aider les pays à établir les politiques macroéconomiques qui assureront le succès de la libéralisation du compte de capital. Il peut conseiller les pays sur la meilleure façon de procéder à cette libéralisation. En outre, de concert avec la Banque mondiale et les banques régionales de développement, il peut aider les pays à mettre au point les capacités nécessaires à l'ouverture réussie de leur compte de capital. Le Canada soutient que c'est dans ce rôle consultatif que le FMI présente un avantage comparatif. Le Canada est heureux de constater que le plan de travail du FMI attribue une plus grande importance à des questions comme le jalonnement adéquat des réformes des marchés financiers et une moins grande place aux futiles débats de sphères de compétence.

Cependant, même lorsque les capacités existent, les pratiques exemplaires ne seront pas mises en œuvre à moins que les secteurs public et privé ne soient incités à le faire. L'incitatif le plus important, et de loin, que les administrations publiques peuvent instaurer pour favoriser l'adoption de pratiques exemplaires consiste à rendre le secteur privé responsable de ses actes et des risques qu'il choisit d'assumer sur les marchés financiers.

Nous savons tous que même si nous réussissons à concevoir la meilleure architecture financière qui soit à l'échelle internationale, il se produira néanmoins d'autres crises financières. Il semble être dans la nature des marchés de passer par des périodes d'enthousiasme excessif, suivies de cycles de correction qui, s'ils sont assez aigus ou profonds, peuvent dégénérer en crises.

Il s'agit pour nous de déterminer comment établir un cadre adéquat qui assurerait la participation productive du secteur privé quand une crise se déclenche. Dans leur rapport remis aux dirigeants à Cologne en juin dernier, les ministres des Finances du G-7 ont établi le cadre général de la participation du secteur privé au règlement des crises. Ce rapport définit les outils qui pourraient être utilisés à cet égard, notamment les clauses d'action collective dans les marchés obligataires, les lignes de crédit à titre éventuel et les comités de créanciers. Le Canada a insisté pour que l'on procède rapidement à l'examen de ces outils et pour qu'on les mette en œuvre selon les besoins.

Ce ne sont donc pas les idées qui manquent, mais plutôt l'engagement de leur mise en œuvre à l'échelle internationale. L'engagement est absent parce que les créanciers et les débiteurs ont jusqu'ici eu peu de bonnes raisons de trouver des façons de régler leurs différends en période de crise. Or, si les deux parties ne sont pas incitées à régler leurs différends, c'est en partie en raison de la façon dont nous réglons les crises – avec des injections de fonds publics parfois très généreuses.

Les créanciers espèrent ainsi qu'à défaut de se faire rembourser, ils ne subiront que des pertes atténuées. De leur côté, les débiteurs espèrent éviter les rajustements difficiles qu'exige le règlement d'une crise.

On ne peut continuer à régler les crises financières de cette façon. D'abord, l'injection à grande échelle de fonds publics, en créant la dynamique que nous venons de décrire, a peut-être favorisé les mouvements de capitaux excessifs et imprudents, qui ont peut-être à leur tour contribué à accroître la fréquence et la gravité des crises.

Ensuite, les flux de capitaux privés sont désormais beaucoup plus importants que les ressources dont dispose le secteur public, si bien que les fonds publics ne permettent plus d'éviter la crise ni la dévaluation et le rééchelonnement de la dette.

En conséquence, nous avons pratiquement été contraints de passer à un système dans lequel une contribution substantielle du secteur privé est un élément essentiel des mécanismes de financement. La collaboration des banques privées a constitué un élément clé des mesures d'aide à la Corée et au Brésil. Plus récemment, dans certains cas – soit en Ukraine, en Roumanie, au Pakistan et en Équateur –, la participation du secteur privé a constitué une condition préalable à l'aide publique ou au rééchelonnement.

Le Canada estime que nous devrions pousser ce processus encore plus loin. Le Canada croit en effet que nous devons mettre au point des mécanismes permettant une gestion ordonnée de la dette. Le secteur public devrait essentiellement jouer le rôle de coordonnateur neutre ou de catalyseur dans le cadre des négociations de ces mécanismes de gestion. L'injection de fonds publics à grande échelle ne devrait survenir que très rarement.

Dans certains cas, il n'a pas été possible pour les gouvernements de réunir suffisamment de fonds dans le secteur privé – comme en Ukraine et en Roumanie. Selon le Canada toutefois, cela est attribuable en grande partie à la façon plutôt spéciale que nous avons d'assurer la participation du secteur privé. Un certain nombre de programmes récents ont exigé l'injection de fonds privés. Le secteur privé n'est donc pas convaincu que cette façon de faire sera adoptée, et que les crises financières seront désormais réglées de cette manière.

Nous devons éviter de laisser la rhétorique l'emporter sur le fond du problème. Il a beaucoup été question d'approches concurrentielles : l'instauration de règles ou le règlement au cas par cas. En réalité, ces deux démarches ne sont pas si différentes. L'imposition de règles ne signifie pas que nous observerons à la lettre un manuel de gestion des crises dictant quels mécanismes seront appliqués et dans quelles circonstances. Pour que le secteur privé participe à la prévention et au règlement des crises, cependant, nous devrons renforcer le cadre établi à Cologne de façon que les investisseurs privés puissent connaître à l'avance leurs responsabilités en cas de crise. De plus, nous devrons veiller à ce que les mécanismes qui sont appliqués dans ce cadre concilient les intérêts des créanciers et les responsabilités des débiteurs afin que les deux parties soient incitées à collaborer pour qu'un financement suffisant soit fourni à un prix qui convient.

Cependant, chaque crise est unique en son genre. Chaque crise peut comporter des aspects qui se déclarent pour la première fois. C'est la raison pour laquelle il faudra faire preuve de souplesse. Nous devrons être prêts à nous adapter aux circonstances.

Nous devrons cependant pouvoir établir en termes généraux le rôle du secteur privé en période de crise. Les investisseurs privés l'exigeront. Encore le mois dernier, par exemple, l'une des grandes sociétés de placement internationales écrivait ce qui suit dans un rapport sur les efforts déployés récemment par le FMI pour susciter la participation du secteur privé dans le règlement des crises :

Le problème, ce n'est pas que la situation soit inéquitable… Les marchés n'ont pas besoin d'être équitables pour être efficaces. Ils ont toutefois besoin de règles compréhensibles et raisonnablement prévisibles …. Le danger, c'est que le fait … d'insister sur l'adoption d'une approche au cas par cas, qui assure aux décideurs … un pouvoir discrétionnaire optimal et qui cause aux marchés une insécurité maximale, fera peser en bout de ligne une menace réelle sur les marchés de titres internationaux  (traduction).

L'élaboration de ce cadre visant à susciter la participation du secteur privé devrait figurer parmi les premiers objectifs prioritaires auxquels s'attaquera le G-20 , avec la collaboration du FMI, au début de ses activités.

Facilité d'ajustement structurel renforcée et pays pauvres très endettés

La plupart de mes observations jusqu'ici ont porté sur des problèmes et des enjeux auxquels est confronté le système financier international. J'ai parlé plus tôt d'un document sur l'architecture internationale que les ministres des Finances ont présenté aux dirigeants dans le cadre du sommet de Cologne. Au même sommet cependant, les ministres des Finances ont également présenté un document de quatre pages qui pourrait avoir une importance beaucoup plus immédiate pour un grand nombre de personnes qui vivent dans des pays trop petits, trop pauvres ou trop instables pour éveiller l'intérêt des marchés financiers internationaux. Il s'agissait du rapport, approuvé par les dirigeants, recommandant que l'initiative d'allégement de la dette des pays pauvres soit plus généreuse.

Avant de conclure, permettez-moi de dire quelques mots sur l'initiative d'allégement de la dette des pays pauvres très endettés (PPTE). Les ministres des Finances ont reconnu à Cologne que les modifications apportées à l'initiative en faveur des PPTE comporteraient des coûts élevés. Nous avons demandé aux institutions financières internationales de mobiliser leurs propres ressources dans la plus grande mesure qui soit à l'appui de cette initiative. Le Canada se réjouit des efforts déployés jusqu'ici au FMI et à la Banque mondiale afin de trouver des sources de financement pour cette initiative.

Le Canada appuie l'idée de la vente de réserves d'or pour permettre au FMI de contribuer au fonds de la Facilité d'ajustement structurel renforcée (FASR) pour les PPTE. Parallèlement, le Canada, à titre de grand producteur d'or, appuie l'entente conclue sur la façon d'y parvenir de manière à éviter tout dérèglement significatif des marchés aurifères privés.

Un financement additionnel est fourni à partir des contributions bilatérales rendues disponibles en raison de la fermeture anticipée du deuxième compte spécial conditionnel (CSC-2) du FMI. Comme le compte n'est plus nécessaire, les cotisations qui y ont été versées devraient être remboursées aux cotisants initiaux. Le Canada est disposé à remettre son remboursement de cotisations versées dans le compte spécial, soit 11,2 millions de DTS, à la FASR pour les PPTE.

Conclusion

Nous sommes à la croisée des chemins en ce qui a trait au développement de l'économie mondiale. Au cours des quelque 10 dernières années, le développement ouvert et axé sur le marché est devenu le modèle économique dominant. Un nombre croissant de pays ont adopté ce modèle et ont ainsi pu hausser le niveau de vie de leurs habitants.

Les défis de la mondialisation et les reculs éprouvés par un certain nombre de pays lors des récentes crises ont soulevé des problèmes auxquels nous devons nous attaquer. Nous devons veiller à ce que tous les pays puissent profiter du processus de la mondialisation et nous assurer d'avoir le cadre qui fera en sorte que les crises n'effaceront pas des années de progression du niveau de vie. La nouvelle architecture que nous mettons en place sera jugée par la réussite à ce chapitre.


Dernière mise à jour :  2004-04-23 Haut

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