Ottawa, le 24 avril 2004
2004-031
Déclaration préparée à l’intention du Comité monétaire et financier international
du Fonds monétaire international
L’honorable Ralph Goodale,
ministre des Finances du Canada
Washington, D.C.
Le texte prononcé fait foi
Introduction
Sous l’impulsion d’une amélioration du contexte économique
mondial ces derniers mois, les perspectives de l’économie mondiale sont
plus encourageantes. Le défi consiste à soutenir et à étendre la
reprise en cours et à corriger les déséquilibres mondiaux de manière
crédible et dans un esprit de coopération. Le Fonds monétaire
international (FMI) devrait continuer d’ajouter à sa capacité de
promouvoir la stabilité financière en rendant la surveillance plus
efficace, notamment en poursuivant le développement de ses mécanismes de
surveillance.
L’économie mondiale
Depuis notre dernière rencontre, la reprise de l’économie mondiale
a pris de la vigueur et s’est généralisée. La croissance s’est
nettement accélérée aux États-Unis, au Japon, au Royaume-Uni et dans
les pays émergents d’Asie, quoique les signes d’une reprise plus
vigoureuse tardent à se concrétiser dans la zone euro. Tout compte fait,
nous sommes heureux de constater que la reprise a progressé dans la
plupart des régions, et nous sommes confiants que la croissance deviendra
plus équilibrée entre les régions au cours de l’année.
Au même moment, de nombreux pays doivent donner à leur politique
budgétaire une orientation durable à moyen terme. Cela vaut
particulièrement pour les pays industrialisés aux prises avec des
tensions à long terme attribuables au vieillissement de leur population.
Les économies de marché émergentes aux prises avec une lourde dette
publique et d’importants besoins financiers sont sensibles aux sautes d’humeur
des marchés financiers. Cet aspect deviendra plus préoccupant pendant la
progression des taux d’intérêt qui accompagnera la reprise de l’économie
mondiale. L’un des principaux défis pour ces pays consiste à mettre en
œuvre un plan crédible de consolidation budgétaire à moyen terme.
Au Canada, la croissance au deuxième semestre de l’an dernier a
été plus faible que prévu. L’activité économique a ralenti au cours
de l’année en raison d’une série de chocs imprévus et d’une
appréciation de plus de 20 % du dollar canadien face au dollar
américain. C’est ainsi que notre produit intérieur brut (PIB) réel n’a
progressé que de 1,7 % en 2003, la plus faible hausse annuelle
observée depuis 1996.
Des facteurs économiques solides, des taux d’intérêt bas et un
contexte économique international favorable, en particulier une économie
américaine plus forte, devraient appuyer la croissance au Canada à court
terme. Au Canada, les économistes du secteur privé prévoient que le PIB
réel du pays augmentera de 2,7 % en moyenne en 2004 et de 3,3 %
en 2005, ce qui rejoint les prévisions du FMI pour le Canada.
La situation financière du Canada reste solide. Le gouvernement du
Canada a dégagé six excédents budgétaires de suite entre 1997-1998 et
2002-2003, et le budget de 2004 prévoit que le budget des trois prochains
exercices sera équilibré ou même excédentaire.
Pour ce qui est des autres pays que je représente auprès du FMI, l’économie
irlandaise a résisté au ralentissement persistant qui a touché ses
partenaires de l’Union européenne, traduisant le maintien de politiques
propices à la croissance l’an dernier. Malgré la faiblesse des
marchés européens et l’appréciation de l’euro, le produit national
brut réel a gagné 3,25 %. Il y a eu un modeste excédent
budgétaire, l’emploi continue d’augmenter de façon appréciable et l’inflation
est tombée au dessous de 2 %. La croissance devrait s’accélérer
à compter de 2004. Mais il y a des risques. À l’extérieur, la
faiblesse persistante de la reprise en Europe et la vigueur de l’euro
posent problème. À l’intérieur, il faudra absolument que les
résultats des négociations salariales qui s’amorcent à l’échelle
de l’économie soient concurrentiels. Compte tenu de ce dernier facteur,
les autorités irlandaises envisagent l’avenir avec confiance. Mais leur
rôle clé actuel se joue sur une scène plus vaste. Elles se consacrent
pleinement à faire en sorte que l’Union européenne procède avec
succès à une expansion sans précédent, avec l’ajout de
10 nouveaux membres la semaine prochaine, et à relever le défi qui
consiste à mettre la dernière main à la nouvelle constitution
européenne. Je souhaite bon voyage aux autorités irlandaises et à
chacun des 25 membres de la nouvelle Union européenne.
Malgré certains signes encourageants, la situation de bon nombre des
pays des Caraïbes que je représente demeure difficile. Après une
performance économique récente plutôt anémique, la plupart de ces pays
ont connu un modeste regain de croissance en 2003 sous l’aiguillon d’une
reprise naissante dans le secteur névralgique du tourisme. Même s’il
reste encore beaucoup à faire pour que cette reprise soit viable, de
récents efforts visant à intensifier les réformes économiques et à
mieux soutenir la concurrence internationale semblent connaître un
certain succès. Jumelées à une évolution favorable de l’économie
mondiale, ces initiatives devraient aider à améliorer les perspectives
économiques des Caraïbes.
La prévention des crises et le rôle de surveillance du FMI
La surveillance exercée par le FMI joue un rôle clé dans le
dépistage des problèmes émergents avant qu’ils n’engendrent des
crises. La prévention des crises passe par l’amélioration de la
surveillance exercée par le FMI, ce qui permet de disposer d’une
meilleure information pour effectuer des analyses économiques de
qualité, y compris une meilleure tarification du risque contribuant à
stabiliser davantage les flux de capitaux. Le FMI a fait des progrès pour
mieux cibler la surveillance et en rehausser l’impact. Ces efforts
devraient se poursuivre et se concentrer sur le dépistage anticipé des
problèmes potentiels et sur l’élaboration d’évaluations candides
pour que les correctifs stratégiques soient valables. Nous croyons en
outre que le FMI pourrait élaborer, comme je l’explique ci-dessous, un
cadre de surveillance dirigé par les pays.
Une surveillance dirigée par les pays : proposition à l’intention
des membres à revenu faible et moyen
L’an dernier, à Dubaï, nous avons fait part de notre inquiétude à
propos de l’écart au chapitre du soutien que nous accordons aux pays à
revenu faible et moyen. À l’heure actuelle, ces pays doivent choisir
entre une participation très active du FMI par le biais d’un programme
formel (y compris une conditionnalité formelle) et un engagement beaucoup
plus modeste dans le cadre du processus annuel de surveillance en vertu de
l’article IV. Nous avons réclamé une réflexion plus poussée sur
une façon de rehausser la continuité du soutien en comblant l’écart
de manière que les pays qui n’ont plus besoin d’un programme du FMI,
ou qui ne veulent pas d’un tel programme, puissent quand même recevoir
amplement de conseils et de soutien technique du FMI sans devoir
contracter un emprunt.
À cette fin, le Canada a récemment proposé au Conseil d’administration
de mettre sur pied un mécanisme de surveillance dirigé par les pays.
Contrairement aux programmes formels, il n’y aurait ni soutien financier
du FMI, ni conditionnalité. Grâce aux conseils du personnel du FMI, le
pays en cause élaborerait plutôt ses propres objectifs économiques et
budgétaires. La tâche du FMI consisterait à exercer une surveillance à
intervalles rapprochés mais, contrairement à l’ancien programme de
signalement surveillé par le personnel, les rapports traiteraient de la
surveillance, approuvée par le Conseil d’administration, de la mesure
dans laquelle le pays réalise ses propres objectifs économiques et
financiers. Un tel mécanisme servirait d’incitatif au pays –
pour convaincre les instances politiques de mener à bien le programme de
réformes – et sur la scène internationale – pour informer
clairement les donateurs et les marchés financiers des progrès
réalisés par le pays en cause en regard de ses objectifs. À l’instar
de nombreux autres membres du Conseil d’administration, nous pensons qu’un
mécanisme de surveillance dirigé par les pays permettrait de combler une
importante lacune au chapitre de l’aide que le FMI fournit aux pays à
revenu faible et moyen, et nous encourageons le personnel et les
dirigeants du FMI à consulter les intervenants afin de préciser cette
proposition.
Préciser et renforcer le rôle du FMI à l’appui des pays à faible
revenu
Depuis un an, le FMI a continué de peaufiner et de renforcer son
soutien aux pays à faible revenu. Nous appuyons bon nombre de ces
initiatives, et plus particulièrement celles visant à accroître l’aide
aux pays à faible revenu qui sont vulnérables aux chocs exogènes et qui
émergent de conflits. Nous appuyons en outre la récente proposition
visant à établir des normes d’accès à la facilité pour la
réduction de la pauvreté et la croissance (FRPC), qui rejoint notre
position selon laquelle il faut un effort plus énergique pour sevrer les
pays des programmes de la FRPC puisque le recours prolongé aux ressources
du FMI peut miner la prise en charge.
Nous nous réjouissons aussi du projet de cadre opérationnel conçu
pour évaluer la viabilité de la dette. Ce cadre pourrait nettement aider
à cerner les modalités de financement et le niveau adéquat des nouveaux
emprunts. Il pourrait constituer une nette amélioration dans notre façon
d’évaluer la dette en faisant appel à des indicateurs de viabilité de
la dette et en tenant compte de la qualité de la gouvernance des pays.
Sur ce dernier point, nous pressons vivement le FMI de coordonner ses
efforts d’évaluation de la gouvernance avec d’autres institutions
financières internationales, et plus particulièrement la Banque
mondiale.
Enfin, on continue de mettre en œuvre l’Initiative améliorée en
faveur des pays pauvres très endettés (PPTE) et d’alléger le fardeau
d’endettement des pays pauvres, mais il reste encore beaucoup à faire.
Nous pressons le FMI d’accorder un allégement substantiel de la dette,
y compris l’octroi du plein montant de l’aide supplémentaire au
besoin, pour faire en sorte que ces pays aient une meilleure chance d’échapper
pour de bon au piège d’une dette insoutenable. Puisque certains pays
susceptibles d’avoir droit au mécanisme des PPTE pourraient bientôt se
sortir de conflits, nous demandons au Conseil d’administration d’appuyer
promptement le report de l’échéance de l’Initiative en faveur des
PPTE à la fin de 2005.
Conclusion
Les perspectives de l’économie mondiale sont encourageantes, mais il
subsiste un certain nombre de défis et de risques. Nous avons tous
intérêt à appliquer de saines politiques économiques pour veiller à
ce que la reprise actuelle de l’économie mondiale se poursuive et que
nous disposions de la marge de manœuvre requise pour pouvoir réagir à
tout choc pouvant survenir. Dans ce contexte, le FMI doit continuer d’améliorer
ses outils d’évaluation et de surveillance des politiques et d’adapter
ses mécanismes de crédit au nouvel environnement dans lequel il évolue.
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