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Ottawa, le 29 septembre 1996
1996-064

Notes pour une allocution du ministre des Finances du Canada, Paul Martin, devant le Comité intérimaire du Fonds monétaire international

Washington, D.C.
le 29 septembre 1996

Le texte prononcé fait foi


Le défi

Notre rencontre d'aujourd'hui est pour moi l'occasion de souligner les énormes progrès accomplis ces dernières années dans la résolution d'un certain nombre d'importants problèmes de politique économique dont souffrent nos pays. L'inflation, qui avait retenu l'attention des décideurs publics pendant les années 70 et 80, a été ramenée à un faible niveau dans presque tous les pays industrialisés. Les déficits budgétaires, qui nous semblaient incompressibles pendant nombre d'années, sont maintenant sur une trajectoire évidente à la baisse dans plusieurs pays, même si l'on ne peut pas encore en dire autant de la dette publique. Ces accomplissements ont mis en place des conditions propices à une baisse des taux d'intérêt et à un rythme plus élevé de croissance durable. De même, les importants déséquilibres des paiements courants qui affligeaient des pays de premier plan et qui, au cours des années 80, risquaient de compromettre les progrès réalisés au prix de bien des efforts durant les cinq dernières décennies dans le domaine de la libéralisation des échanges, ont été sensiblement réduits.

Qui plus est, les progrès ne se limitent pas aux pays industrialisés. En fait, l'un des phénomènes les plus encourageants des dernières années a été l'amélioration des facteurs fondamentaux dans les pays en développement. Dans bien des «marchés en émergence» qui connaissent une croissance rapide, les jeunes d'aujourd'hui peuvent aspirer de leur vivant au niveau de vie que connaissent les pays industrialisés et, dans certains pays, ils peuvent espérer l'atteindre avant l'âge adulte. Un grand nombre de pays en développement sont sortis de la stagnation économique dans laquelle ils croupissaient depuis tant d'années, pour récolter maintenant les fruits d'une politique publique améliorée et d'une rigueur plus grande sous la forme d'une croissance économique et d'une hausse du niveau de vie.

Par ailleurs, bien des défis importants demeurent. Le conseil d'administration du Fonds monétaire international (FMI) a reconnu le besoin de relever ces défis. Il a en effet proposé à notre attention une nouvelle déclaration de partenariat pour une croissance durable. J'attends avec impatience nos discussions à ce sujet plus tard aujourd'hui. Je voudrais maintenant centrer mon allocution sur les mesures que nous devons prendre pour relever les trois défis cruciaux.

L'un des principaux sujets de préoccupation, autant pour moi que pour les décideurs publics des autres pays industrialisés, est la lenteur de l'expansion dans nos économies, les États-Unis mis à part, par rapport aux cycles économiques précédents. Ce phénomène, combiné aux rigidités structurelles du marché du travail et des marchés des produits, se traduit par un taux de chômage qui reste beaucoup trop élevé.

Il est donc important d'éviter de nous reposer sur nos lauriers. Nous avons certes accompli d'énormes progrès au cours des dernières années dans le renforcement des principaux paramètres de nos économies. Le moment est maintenant venu de prendre appui sur ces réalisations, et de faire porter notre action au delà des questions macroéconomiques, afin d'accroître le nombre et la qualité des emplois offerts.

La vulnérabilité des administrations aux tensions sur les dépenses qui pourront se manifester à l'avenir est l'une des difficultés que nous devrons surmonter. Et en particulier, les gouvernements doivent saisir clairement la signification de ce que les milieux d'affaires appellent le «passif hors bilan» -- des éléments susceptibles d'exercer des tensions sur les finances publiques, notamment les dettes non provisionnées au titre des pensions et les tensions imminentes sur les coûts provoquées par le vieillissement de la population.

Nous devons exercer cette vigilance tout en maintenant le cap sur notre objectif ultime. En ce sens, la réduction du déficit n'est pas une fin en soi, mais traduit une grave inquiétude quant au maintien soutenable des programmes sociaux et au partage de la prospérité que les générations antérieures et nous-mêmes avons acquise au prix de tant d'efforts. Les gouvernements doivent exercer le pouvoir avec plus de jugement, afin de préserver les mesures vitales de protection sociale, alors qu'on procède simultanément à la modernisation de leur fonctionnement, tout en s'assurant que les difficultés budgétaires ne viennent pas progressivement nuire à la capacité de l'économie de créer des emplois et d'assurer la prospérité.

La vulnérabilité du système monétaire international aux crises est le deuxième défi que nous devons relever. Les effets directs de la crise du peso mexicain sont maintenant, pour une bonne part, chose du passé grâce, dans une large mesure, aux mesures efficaces prises en temps voulu par la communauté internationale, et tout particulièrement par le FMI. Nous ne pouvons cependant exclure la possibilité d'autres crises financières à l'avenir. Il importe donc de prendre des mesures préventives pour diminuer la fréquence des crises éventuelles et disposer d'une capacité de réaction suffisante si elles se présentent.

Troisièmement, la communauté internationale doit veiller à ce que la croissance soit largement répartie entre tous les pays en développement. Ces derniers présentent un large éventail de situations structurelles. Nous devons nous attacher davantage à comprendre ces situations diverses de manière à mettre en place des politiques qui tiennent mieux compte des facteurs particuliers à chaque pays. Les perspectives d'un certain nombre de pays en développement sont limitées à l'heure actuelle par un lourd endettement extérieur. Le printemps dernier, je souscrivais au cadre fondamental visant à alléger le fardeau des pays pauvres lourdement endettés méritants présenté par le Directeur général et le Président. Nous avons depuis réalisé des progrès sur les trois fronts essentiels de cette initiative. Nous disposons d'une engagement d'attribuer des ressources de la Banque mondiale à un Fonds spécial d'affectation à l'intention des pays pauvres lourdement endettés; nous disposons d'un engagement du Club de Paris afin qu'il envisage d'accroître l'allégement de la dette lorsque cette mesure est indiquée; et nous avons également un engagement à fournir un financement au FMI par le biais de la facilité d'ajustement structurel renforcée (FASR). C'est donc pour moi un grand plaisir aujourd'hui de pouvoir prendre part au lancement de cette initiative importante.

J'aborderai maintenant différents aspects de ces trois défis.

Le renforcement de la prospérité

J'aimerais examiner d'abord le premier des défis auxquels nous sommes confrontés, c'est-à-dire le rythme trop lent de la reprise et de l'expansion économique dans la plupart des pays industrialisés.

Une panoplie d'initiatives en matière de politiques nous sont proposées chaque jour afin de relever ce défi. Pour ma part, je reste fermement convaincu que l'approche à moyen terme que le Comité intérimaire a adoptée il y a deux ans à Madrid était la bonne. Le Canada offre un bon exemple des bienfaits de cette approche.

Celle-ci repose sur un constat : de mauvais résultats économiques sont souvent le reflet des interactions complexes qui se produisent entre les problèmes macroéconomiques et structurels. Il nous revient donc d'élaborer et de mettre en oeuvre des politiques qui se renforcent mutuellement à la fois au plan macroéconomique et au plan structurel, afin que les gens aient à la fois la capacité de réagir aux perturbations économiques et à l'essor ou au déclin des différents secteurs économiques ou régions, et des incitations à le faire.

Le marché du travail illustre particulièrement bien cette interaction entre les problèmes macroéconomiques et structurels. Nous devons rendre le marché du travail plus efficient en éliminant les réglementations qui découragent l'embauche et en donnant plus de facilité aux gens pour adapter leurs capacités aux aptitudes que réclament les employeurs.

Sur le plan macroéconomique, les tâches prioritaires, dans la plupart des pays industrialisés, continuent d'être la réduction des déficits budgétaires et la maîtrise de l'inflation, de manière à permettre une baisse des taux d'intérêt, un renforcement de l'investissement et une stimulation de la croissance.

Certains ont exprimé la crainte que la poursuite des mesures de réduction des déficits budgétaires, dans les pays où la croissance est déjà faible, ne fassent qu'aggraver le ralentissement économique -- et, par conséquent, le déficit budgétaire et le chômage. La réalité est que, dans trop de pays, l'état des finances publiques ne permet pas de remettre à plus tard les mesures correctives. En fait, tout délai à cet égard risquerait d'entraîner une forte réaction négative des marchés financiers et, donc, d'affaiblir encore davantage l'économie.

Bien au contraire, le défi que doivent relever les responsables de la politique publique dans ces pays, et en fait dans la plupart des pays industrialisés, est de prendre des mesures de redressement budgétaire qui soient crédibles et efficaces, de manière à obtenir un effet maximal sous la forme d'une baisse des taux d'intérêt à long terme. La politique monétaire appliquée dans ces pays devrait pouvoir compenser tout effet de contraction susceptible de résulter, à court terme, d'une réduction du déficit budgétaire. Ces mesures sont entièrement compatibles avec l'objectif qui consiste, à moyen terme, à réaliser et à maintenir la stabilité des prix.

De façon plus générale, la politique monétaire a pour rôle de préserver les progrès remarquables accomplis par la plupart des pays industrialisés, au cours des dernières années, au chapitre de l'inflation. En maintenant celle-ci à un faible niveau, les autorités monétaires permettent aux entreprises comme aux particuliers de planifier pour l'avenir et contribuent à éviter que nos économies ne retombent dans une alternance de phases d'expansion et de contraction.

La politique du Canada

Le gouvernement canadien est déterminé à mettre en oeuvre de saines politiques macroéconomiques et structurelles qui visent à créer un cadre économique propice à l'essor du secteur privé et à la création, dans ce secteur, d'emplois de haute qualité. Seul un tel cadre peut nous permettre de dispenser des programmes sociaux de qualité, que nous sommes par ailleurs engagés à maintenir.

L'assainissement des finances publiques du Canada est la pierre angulaire de notre politique. Pour parvenir à ce but, nous avons adopté une série d'objectifs mobiles, sur deux ans, de réduction du déficit. Ces objectifs à court terme obligent le gouvernement à tenir parole en ne lui laissant aucune possibilité de remettre à plus tard les décisions nécessaires. Notre méthode s'est révélée extrêmement efficace puisque, chaque année, le déficit a été égal ou inférieur au niveau projeté. La manière dont le gouvernement s'y prend pour réduire le déficit est tout aussi importante que cette réduction elle-même. Étant donné que les hausses d'impôt diminuent les incitations à travailler, à épargner et à investir, les mesures du gouvernement fédéral ont porté principalement sur les dépenses publiques.

Dans le budget de mars 1996, j'ai annoncé un nouvel objectif : ramener le déficit fédéral à 2,0 p. 100 du PIB d'ici l'exercice 1997-98, qui commence en avril prochain. Quand cet objectif sera atteint, le ratio de la dette nette du gouvernement fédéral au PIB enregistrera sa première diminution notable depuis le milieu des années 70. Nous prévoyons aussi que les besoins financiers du gouvernement fédéral -- l'indicateur du déficit budgétaire le plus comparable à celui qu'utilisent beaucoup d'autres pays -- tomberont à 0,7 p. 100 du PIB au cours de l'exercice 1997-98, soit son plus faible niveau en près de 30 ans, et seront par la suite ramenés à zéro à brève échéance. Le gouvernement fédéral n'est pas le seul à considérer la réduction du déficit comme prioritaire au Canada : sept de nos dix provinces sont parvenues à équilibrer leur budget ou à dégager un excédent au cours de leur dernier exercice (1995-96).

Ce n'est pas tout de réduire le déficit; pour faire baisser les taux d'intérêt, encore faut-il maîtriser l'inflation. Le gouvernement et la Banque du Canada ont établi de concert, pour l'inflation, une fourchette cible de 1 à 3 p. 100 qui s'applique jusqu'à la fin de 1998. À l'heure actuelle, l'inflation demeure dans la portion inférieure de cette fourchette et n'a jamais été aussi faible, de manière soutenue, depuis trois décennies.

Nous avons également pris des mesures pour résoudre les problèmes structurels qui se posaient dans notre économie. Nous avons sabré dans les subventions aux entreprises et privatisé des sociétés d'État pour rendre notre économie plus dynamique et concurrentielle. En ce qui concerne le marché du travail, nous avons mis en branle une réforme des régimes sociaux de manière à atteindre un double objectif : renforcer les incitations à travailler et mieux préparer les travailleurs aux possibilités d'emploi qui se présentent.

Les résultats de l'économie canadienne

Notre politique porte fruit, comme le montre une série de résultats bien concrets.

Comme beaucoup d'autres pays industrialisés, le Canada n'a pas obtenu des résultats aussi bons que prévu en 1995 et au premier semestre de 1996. Les perspectives sont toutefois encourageantes pour 1997 et les années suivantes. Les progrès que nous avons réalisés dans la réduction du déficit budgétaire et la maîtrise de l'inflation se sont traduits par une forte diminution des taux d'intérêt. Ainsi, les taux à court terme ont baissé de plus de 400 points de base depuis mars 1995 et se situent actuellement à environ 150 points de base en dessous des taux américains. Les rendements offerts sur les obligations canadiennes dont l'échéance est égale ou inférieure à cinq ans sont en ce moment plus faibles que sur les obligations américaines. L'écart entre les taux des obligations à dix ans du gouvernement fédéral au Canada et aux États-Unis est passé de 160 points de base, il y a un an, à environ 50 points de base maintenant. La baisse des taux d'intérêt stimulera la demande intérieure.

L'excellente tenue des coûts au Canada a engendré une amélioration spectaculaire de notre compétitivité internationale et une forte hausse des exportations. Les paiements courants du Canada, qui se soldent habituellement par un déficit, sont devenus excédentaires au deuxième trimestre de cette année, et ce, pour la première fois depuis 1984. En raison de cet excédent des paiements courants, les besoins d'emprunt nets du Canada sont désormais satisfaits sur le marché intérieur plutôt que par les prêteurs étrangers, comme cela a presque toujours été le cas. On ne saurait surestimer l'importance de cette évolution, puisqu'elle offre la possibilité d'instaurer un cercle vertueux : des taux d'intérêt réduits en permanence et une croissance économique plus soutenue à long terme.

Enfin, notre politique produit des résultats positifs dans le domaine où cela compte le plus : la création d'emplois plus nombreux et meilleurs pour les Canadiens. Le taux de chômage reste trop élevé au Canada, je ne le sais que trop. Cependant, le secteur privé a réagi de façon extrêmement dynamique à la baisse des taux d'intérêt et au redressement de la confiance engendrés par les bons résultats obtenus dans la lutte contre l'inflation et la réduction du déficit budgétaire, puisque près de 220 000 nouveaux emplois ont été créés depuis novembre dernier.

L'évolution en Irlande et dans les Caraïbes

La même approche est à l'origine de la croissance durable plus vigoureuse qui est observée en Irlande et dans les pays des Caraïbes que je représente au Comité intérimaire.

L'attachement de longue date des autorités irlandaises à la discipline budgétaire et à la stabilité des prix et du taux de change, de même qu'à une évolution concurrentielle des coûts et revenus, continue de propulser l'économie de ce pays.

La croissance de l'économie irlandaise se ralentira pour atteindre environ 6 p. 100 en 1996 -- ce qui ferait de l'Irlande, pour une troisième année consécutive, le pays de l'OCDE où l'expansion est la plus rapide. L'emploi a progressé de plus de 3 p. 100 en taux annuel pendant cette période. Une légère augmentation des revenus bruts, grâce aux allégements fiscaux rendus possibles par la diminution de la dette et une faible inflation, se sont traduites par une hausse appréciable du niveau de vie. Parallèlement, l'évolution modérée des revenus a permis d'accroître la rentabilité des entreprises; et ce facteur, joint aux bonnes chances que l'Irlande a de répondre dès le départ aux critères de participation à l'Union monétaire européenne, a engendré une vigoureuse augmentation des investissements. Le taux de chômage reste toutefois dans les deux chiffres, malgré une baisse de quatre points au cours des trois dernières années.

Pour continuer de faire baisser le chômage et soutenir ces performances économiques exceptionnelles, les autorités irlandaises aspirent à prolonger le consensus actuel sur l'évolution modérée des revenus après l'expiration du pacte actuel, en fin d'année, et ce dans un cadre qui maintiendra la crédibilité de la gestion financière et sera conforme aux exigences de l'Union monétaire européenne.

Les pays des Caraïbes au sein de notre groupe ont, pour la plupart, continué de travailler à la stabilisation de la situation financière intérieure ou au maintien et au renforcement de cette stabilisation lorsqu'ils y étaient déjà parvenus. Simultanément, le taux faible ou modeste de croissance économique demeure très préoccupant dans la plupart de ces pays tandis que, dans les cas notables où l'expansion est relativement vigoureuse, son maintien pose tout un défi. L'urgence que revêtent, sur le plan social, l'accroissement de l'emploi et l'atténuation rapide de la pauvreté dans les pays des Caraïbes signifie que la stabilisation doit s'accompagner, ou être suivie de près, d'une expansion soutenue de la production. Les efforts déployés par les autorités, avec le ferme appui des services de conseil du Fonds, visent à renforcer la réforme structurelle, y compris dans le secteur public, les entreprises publiques et la composition des recettes et des dépenses de l'État.

Plusieurs de ces pays s'efforcent d'améliorer l'épargne publique de manière à pouvoir se lancer dans un nouveau développement de l'infrastructure qui appuiera les investissements privés. Les autorités s'efforcent également d'améliorer les grands équilibres budgétaires de manière à éviter ou à atténuer les déséquilibres intérieurs et extérieurs. La réforme du secteur financier par le développement institutionnel est à l'ordre du jour des législateurs et des autorités réglementaires, afin de rendre le secteur financier plus solide. Signalons notamment que, dans les pays de l'est des Caraïbes, une importante initiative a été lancée afin de développer et de regrouper en un seul système financier intégré les minuscules marchés de capitaux qui existent actuellement. Les efforts déployés dans le secteur financier devraient, en temps voulu, rendre l'intermédiation plus efficace, ce qui contribuera à une plus grande souplesse de l'économie et à une croissance plus vigoureuse.

Les pays exportateurs de bananes de cette région poursuivent les initiatives de restructuration de la production et les accords institutionnels de transport et de commercialisation de ce produit, de manière à réussir la transition aux nouvelles modalités qui régiront le marché de l'Union européenne à l'avenir. D'ici là, les petits pays de l'est des Caraïbes qui dépendent fortement de la culture bananière poursuivent la difficile tâche de diversification de leur économie, au moyen notamment du développement durable de leur potentiel touristique.

Les pays des Caraïbes que je représente ne sont pas la source d'effets systémiques. Cependant, comme ils doivent s'aligner sur les prix établis sur les marchés des produits et des services et les marchés financiers, leurs perspectives dépendent autant de l'évolution internationale que de la qualité de leurs politiques intérieures. C'est pourquoi ils continuent d'appuyer les efforts déployés par le Fonds pour assurer une surveillance étroite dans le but de réduire l'instabilité du marché mondial.

L'évolution dans les pays en développement et les pays en transition

De bonnes politiques macroéconomiques et structurelles sont de façon générale tout aussi importantes pour les pays en développement et les pays en transition. Dans la plupart des régions du monde, les pays en développement bénéficient, grâce à l'amélioration de ces politiques, d'une croissance plus vigoureuse.

En Asie, bien des pays ont maintenu un taux de croissance impressionnant, grâce à un taux élevé d'épargne intérieure et, en particulier, à une bonne politique budgétaire. Ces pays doivent cependant faire attention à la surchauffe, de même qu'à l'inflation élevée et au déficit des paiements courants qui l'accompagnent. L'un des principaux facteurs à l'origine de la surchauffe et du déficit de la balance courante observés dans certains pays a été la réaction au plan macroéconomique à de fortes entrées de capitaux étrangers. À cet égard, je salue les travaux de recherche qu'a entrepris le Fonds dans le but d'affiner ses conseils à cet égard.

En Amérique latine, la croissance se renforce graduellement. Dans plus d'un pays de cette région, la priorité consiste à mettre en branle une réforme en profondeur des finances publiques, et notamment de la répartition des recettes et des dépenses entre les autorités fédérales et locales, de même qu'à prendre des mesures de privatisation et de renforcement du secteur financier.

Je suis particulièrement heureux de noter la forte expansion que connaissent actuellement un certain nombre de pays d'Afrique -- expansion qui, si elle se maintient, ouvre la perspective d'une amélioration notable du niveau de vie de leurs populations. Cela est le fruit, pour une bonne part, des efforts de redressement budgétaire, des réformes structurelles et d'une meilleure administration. Cependant, le renforcement de la croissance est loin d'être universel. De ce point de vue, les bons résultats et l'amélioration des perspectives des pays qui ont renforcé leurs politiques font d'autant plus ressortir la nécessité d'un redressement dans les autres pays de la région.

Pour ce qui est des pays en transition, il est encourageant de constater qu'un grand nombre d'entre eux recueillent maintenant les fruits de la stabilisation financière et de la réforme structurelle, sous la forme d'une production accrue et d'une inflation sensiblement réduite. Un grand nombre de pays en transition ont maintenant maîtrisé leur inflation et éliminé bien des distorsions et des pesanteurs héritées de la planification centrale.

Les perspectives de poursuite de la croissance dans ces pays dépendront du maintien de politiques macroéconomiques et structurelles prudentes, favorables à l'épargne et à l'investissement. De nouveaux efforts sont nécessaires en particulier dans quatre domaines clés. Premièrement, une discipline budgétaire doit être imposée aux entreprises afin d'accélérer la restructuration industrielle et de libérer des ressources pour des activités plus productives. Deuxièmement, des mesures fondamentales de protection sociale doivent être mises en place à l'intention des travailleurs touchés par les réformes. Troisièmement, une réforme plus approfondie doit être entreprise dans le secteur financier de la plupart des pays en transition afin que le système bancaire suscite davantage la confiance. Quatrièmement, de nouvelles réformes doivent être entreprises dans le domaine des dépenses publiques pour les rendre conformes aux nouvelles priorités d'une économie de marché, notamment par le renforcement des politiques sociales et de l'infrastructure des télécommunications et des transports. Il faudra notamment, pour cela, instaurer un code des impôts permanent et transparent, qui puisse être mis en application de manière efficace et constituer pour l'État un source de recettes stable.

Éviter et gérer les crises

J'aborderai maintenant la deuxième question à laquelle j'ai fait allusion au début de mon allocution : améliorer la capacité de la communauté internationale de prévoir les crises et d'y réagir.

Un système efficace d'avertissement rapide permettra au Fonds et à la communauté internationale de prendre plus vite des mesures de prévention ou de correction en cas de choc financier. Un élément clé de ce dispositif est une meilleure surveillance des politiques économiques nationales.

L'amélioration de la surveillance exercée non seulement par le Fonds, mais aussi par le secteur privé, dépend elle-même de l'information disponible. Au cours de l'année écoulée, le Fonds a travaillé à l'établissement de normes assurant une déclaration et une publication plus rapides des données économiques et financières clés. En avril, il a instauré une nouvelle norme spéciale de diffusion de données à l'intention des pays qui font appel aux marchés internationaux de capitaux ou aspirent à le faire.

Je signale avec plaisir l'inauguration, ce mois-ci, du tableau d'affichage des normes de diffusion du Fonds. Je suis heureux de constater que le Canada et l'Irlande font partie du large éventail de pays dont les méthodes de diffusion des données sont déjà décrites dans ce tableau d'affichage. J'incite les autres pays à informer également le public de la disponibilité de leurs données ainsi que de leurs dates de publication.

La possibilité d'accéder sur Internet à l'information concernant les méthodes statistiques des pays souscripteurs sera extrêmement utile aux opérateurs internationaux qui veulent procéder à une évaluation du risque. La prochaine étape consistera à offrir un accès direct à la base de données de chaque pays. On pourra y parvenir en établissant un lien entre l'information disponible au tableau d'affichage et les données accessibles aux sites Internet des différents pays concernés.

J'incite vivement le Fonds à continuer d'élaborer une norme générale de diffusion des données applicable à tous les pays membres.

Des mécanismes adéquats de recours financier constituent un important complément à l'amélioration de la surveillance internationale. À titre de coprésident du groupe du travail du G10, le Canada a contribué dans une mesure appréciable aux efforts déployés depuis un an pour mettre au point de nouveaux mécanismes de financement, destinés à compléter les ressources à la disposition du FMI en cas de crise financière.

Je suis extrêmement heureux qu'une entente définitive soit prêt d'être conclue entre le G10 et un certain nombre d'autres pays au sujet des nouveaux accords d'emprunt (NAE), qui doubleront les ressources à la disposition du Fonds en cas de crise financière pour les porter à 34 milliards de droits de tirage spéciaux (DTS).

Grâce aux nouveaux accords, les marchés pourront tabler avec confiance sur la capacité du Fonds de réagir efficacement aux situations d'urgence financière. Cette confiance repose sur le fait que non seulement le G10, mais toute une série d'autres pays, dotés de la capacité d'appuyer le système monétaire international, participent aux nouveaux accords d'emprunt.

Il importe que le Fonds dispose de ressources suffisantes pour ses activités normales de prêt. Les liquidités du Fonds sont à l'heure actuelle relativement satisfaisantes. On prévoit toutefois que la demande à l'égard des ressources du Fonds restera vigoureuse après 1997. Il est donc d'autant plus nécessaire d'avancer rapidement dans le dossier du relèvement des quotes-parts, dans le cadre de la onzième révision générale des quotes-parts.

Je suis heureux de noter les progrès considérables qui ont été accomplis lors des discussions tenues au Fonds sur les options qui permettraient d'atténuer les disparités actuelles dans la répartition des DTS. La question essentielle tient au fait qu'un certain nombre de nouveaux membres n'ont pas participé aux allocations antérieures de DTS. Une allocation exceptionnelle de DTS, autorisée sous le régime d'une modification des Statuts du FMI, permettrait à tous les membres de recevoir une part équitable du total cumulatif des allocations de DTS. Les discussions devraient se poursuivre de manière qu'une entente puisse être conclue avant notre prochaine réunion, concernant la taille et la répartition d'une allocation spéciale de DTS.

L'aide aux pays lourdement endettés

Je passerai maintenant à l'initiative qui est proposée pour venir en aide aux pays pauvres lourdement endettés. Je pense que, plus que toutes les questions dont nous discuterons ici aujourd'hui, ce dossier sera celui dont on se souviendra le mieux en raison des progrès réalisés.

Nous avons fait bien du chemin depuis deux ans, et je suis particulièrement fier du rôle que le Canada a joué dans les progrès réalisés. Il n'y a pas si longtemps, le large consensus maintenant établi sur la nécessité de prendre des mesures exceptionnelles pour venir en aide aux pays pauvres les plus endettés était loin d'être acquis. Maintenant, il est largement reconnu aussi que cette aide doit rassembler, dans un effort global et bien coordonné, tous les créanciers importants, y compris, pour la première fois, les institutions financières internationales.

Le fait que nous soyons parvenus à obtenir des principaux créanciers qu'ils engagent plus de 5 milliards de dollars découle d'une logique qui fait bien ressortir la nécessité de mesures d'allégement exceptionnelles en faveur d'un certain nombre des pays les plus pauvres et les plus endettés. Faute de mesures extraordinaires, un endettement excessif -- qui fait surgir le spectre d'importants transferts négatifs nets de fonds des institutions financières internationales vers certains des pays les plus pauvres de la planète -- continuera de peser sur les perspectives de développement de ces pays en exerçant un effet désincitatif sur l'investissement et en ne laissant aucune ressource pour les dépenses publiques productives en infrastructure, en éducation et en santé, où un effort est tellement nécessaire. De toute évidence, toute stratégie efficace de développement et de croissance dans ces pays doit s'accompagner d'un allégement de leur dette et de l'engagement de ressources pour des projets et des programmes nouveaux, moyennant la mise en route des réformes appropriées. Toute stratégie qui n'englobera pas tous ces éléments sera vouée à l'échec, dans ses efforts pour favoriser un développement suffisant, dans les cas les plus graves.

Le printemps dernier, j'avais souscrit au cadre fondamental présenté par le Directeur général et le Président; aujourd'hui, j'ai le plaisir de pouvoir renouveler cet appui et de participer au lancement de cette initiative. Nous sommes manifestement prêts à commencer à offrir aux pays pauvres lourdement endettés - où les réformes sont démontrables - les allégements exceptionnels nécessaires, sur le plan de la dette pour leur permettre de progresser dans leur effort de développement. Ces mesures ont pris bien du temps à se concrétiser. Je suis fier d'avoir pu jouer un rôle utile à cette fin.

Si nous pouvons à bon droit nous réjouir de cette initiative, il convient de ne pas sous-estimer un certain nombre d'embûches qui pourraient encore faire obstacle à la mise en oeuvre de cette stratégie.

Par exemple, lorsqu'on cherche à venir en aide aux pays méritants qui ont manifestement besoin d'une aide exceptionnelle et qui se sont engagés de façon démontrable sur la voie de la réforme, il est essentiel de coordonner étroitement l'action de tous les principaux créanciers. À cet égard, aucun créancier en particulier ne devrait exiger la participation préalable des autres intervenants avant que lui-même ne s'engage dans cette initiative. La nécessité d'une action simultanée souligne cependant combien il est important que les principales parties prenantes -- le FMI, la Banque mondiale et le Club de Paris, en particulier -- coopèrent dès le début de façon étroite pour déterminer la mesure dans laquelle l'endettement d'un pays est supportable, ainsi que pour fixer les normes de résultats et les mesures de réforme dont dépendra l'admissibilité permanente du pays aux mesures d'allégement.

Un autre défi capital consiste à veiller à ce que les ressources libérées grâce à cette Initiative soient non pas gaspillées, mais consacrées à des usages productifs par les pays bénéficiaires. Il faut pour cela, dans une large mesure, adopter de bonnes politiques macroéconomiques, mais je relève avec plaisir l'incorporation explicite de critères axés sur les services sociaux et la qualité des dépenses publiques. L'importance accordée aux besoins fondamentaux de la personne -- notamment l'instruction élémentaire et les soins de santé -- est un point sur lequel j'ai insisté et dont je me réjouis en particulier. C'est de toute évidence la Banque mondiale qui est la mieux placée pour suivre le respect de ces normes, mais j'aime à croire que tous les créanciers importants considéreront le respect des critères applicables au secteur social comme faisant partie intégrante des conditions globales d'admissibilité à l'Initiative.

En ce qui concerne le partage du fardeau et la contribution financière relative des créanciers bilatéraux et multilatéraux, nous devons prendre acte de l'effort considérable déjà consenti par les créanciers bilatéraux. À lui seul, le Club de Paris a radié plus de 8 milliards de dollars de créances sur les pays en développement depuis 1989 -- pour une bonne part en faveur des pays les plus pauvres. Un certain nombre de pays ont également à peu près effacé la totalité de la dette qu'avaient envers eux les pays les plus pauvres au titre de l'aide publique au développement (APD). Cela représentait près d'un milliard de dollars dans le cas du Canada. Il s'agit là de chiffres impressionnants, qui ne comprennent même pas le coût de l'octroi des termes de Naples, dans leur intégralité, aux nombreux pays pauvres lourdement endettés qui n'en ont pas encore bénéficié.

Nous sommes prêts à faire davantage encore. Le Canada apportera son appui à une augmentation de la réduction de la dette que le Club de Paris pourra accorder aux pays pauvres lourdement endettés qui deviennent admissibles à l'Initiative de réduction de la dette. Nous sommes disposés à appuyer une réduction de l'encours des dettes admissibles à concurrence de 80 p. 100, au cas par cas. Cette mesure, ajoutée à celles qui ont déjà été prises, constituerait un geste équitable et généreux de la part des créanciers bilatéraux. Il faut donc que la partie restante des coûts liés à l'Initiative soit assumée en majeure partie par les institutions multilatérales.

En ce qui concerne, enfin, la manière de financer la participation du FMI à cette initiative, et conformément aux conclusions du directeur général, j'aimerais voir, le plus tôt possible, le conseil d'administration du FMI donner son aval à la vente de 5 millions d'onces d'or. La liquidation d'une aussi petite quantité d'or est tout à fait indiquée. L'or étant un avoir non productif, à une époque où d'énormes pressions s'exercent sur d'autres sources de financement, nous devons utiliser avec le plus d'efficience qui soit l'ensemble des ressources.

Je constate avec plaisir qu'un certain nombre de pays, industrialisés ou en développement, se sont déclarés disposés à permettre un recours aux ressources bilatérales dans le cadre de cette initiative. Le Canada prendra les mesures nécessaires pour permettre l'utilisation de nos ressources tirées des CSC-2, afin d'appuyer la FASR. J'estime cependant que la majeure partie du financement doit provenir des ressources propres du FMI si nous voulons que le financement de la participation du Fonds représente un véritable supplément de ressources pour les pays les plus pauvres, et non une simple réaffectation des ressources d'aide, qui ne seraient alors plus disponibles pour d'autres emplois importants.

Il est évident que toute vente de l'or du Fonds doit être menée de manière progressive et transparente. Cela assurera des perturbations minimes sur le marché mondial de l'or, par rapport aux flux bien plus considérables des opérations dictées par l'offre et la demande. Il faut également veiller à ce que la vente commence dès que la prudence le permettra. On pourra ainsi maximiser le rendement de l'investissement relatif à la facilité d'ajustement structurel renforcée (FASR) et minimiser l'incidence de cette mesure sur les autres ressources mises à la disposition de tous les emprunteurs recourant à cette facilité.

Je suis ravi que nous soyons enfin prêts à lancer l'Initiative de réduction de la dette. Cette Initiative est un accomplissement de taille non seulement pour les pauvres de ce monde, mais aussi pour l'efficacité des institutions internationales. C'est maintenant qu'il faut la lancer.


Dernière mise à jour :  2004-03-21 Haut

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