La rentrée au Théâtre français ! L'Autre de Pigeons International ouvre officiellement la saison 2003-2004
25 septembre 2003
« J'aime le théâtre pour tout ce qu'il peut dire : j'aime les histoires, les symboles, la philosophie que peut véhiculer un spectacle de théâtre. En revanche, j'aime la danse pour tout ce qu'elle ne dit pas : j'aime sa façon de nous obliger à nous exprimer autrement que par la précision des mots. La danse nous oblige à court-circuiter le rationnel, à être subjectif. J'aime l'espace mental qu'elle donne à un spectacle. En plus, je considère que la danse nous force, par les choix formels qu'elle impose, à faire d'un spectacle un objet d'art. »
Paula de Vasconcelos
Ottawa -- Le Théâtre français du Centre national des Arts est fier de présenter la toute dernière production d'une compagnie hors norme. Bien qu'elle ait visité nombre de villes étrangères depuis 1987, offrant chaque fois des spectacles audacieux, des modèles d'intelligence scénique, Pigeons International fait escale pour la première fois à Ottawa. Le 1er octobre à vingt heures tapantes, sept pigeons dansants non identifiés atterriront au 53, rue Elgin. Leur mission : envahir la scène du Studio avec leur création L'Autre, une œuvre captivante, atypique, mi-théâtrale, mi-dansée, qui pose un regard poétique sur la dualité de la condition humaine. Fruit de l'imaginaire de la chorégraphe et metteur en scène Paula de Vasconcelos et de ses oiseaux rares - des danseurs et des comédiens issus de cultures et d'horizons divers -, L'Autre est peut-être un conte de fées chorégraphique, ou une fable dansée, ou même un songe. C'est assurément du théâtre novateur. Du 1er au 4 octobre, au Studio, ils seront là ! Prière de réserver un siège dès aujourd'hui avant qu'ils ne s'envolent vers d'autres contrées.
Rencontre de la première
Les spectateurs qui assisteront à la représentation du mercredi 1er octobre auront l'occasion de rencontrer l'équipe des créateurs du spectacle après la représentation. Cette rencontre sera animée par Paul Lefebvre, adjoint du directeur artistique du Théâtre français.
Autour de l'autre
Nous sommes dans le rêve, peut-être dans la légende, ou même dans la matière primitive du monde - ces fourrures, ces pierres, ces branchages. Sous la neige qui tourbillonne, une nomade vêtue de peaux de bêtes entreprend un lent périple au bout duquel elle redonnera le souffle de la vie à un homme mourant de froid. Une reine quitte son roi nain pour aller au cœur de la forêt interroger un ermite sur la nature du féminin et du masculin. Un homme, qui traîne sa vie, la mort et ses vêtements dans une valise, ne sait pas trop quoi déclarer à un douanier. Un couple abolit le reste du monde à grandes rasades de vodka. Au delà des différences de sexe, de classe, de langue et de culture, au delà des fractures et des frontières, si l'autre n'était simplement que celui que l'on reconnaît ?
L'Autre, dont un passage du roman Le Dieu Manchot de l'auteur portugais José Saramago, prix Nobel de littérature, a servi de matériau de base, est structuré autour de l'histoire de cette reine qui va à la rencontre d'un ermite pour obtenir une réponse à ses questions sur la nature des hommes. Constituée de tableaux vivants, de scènes presque hypnotiques, la pièce traite de la thématique de la rencontre, par le biais d'une galerie de personnages et d'histoires hétéroclites, lesquelles sont racontées en français, en anglais, en portugais et en ukrainien, et pose la question complexe et toujours pertinente de l'altérité. Pour cette production, Pigeons International a bénéficié pour une première fois de l'aide d'un coproducteur international, la Fondation Calouste Gulbenkian de Lisbonne, ce qui lui a permis d'intégrer deux artistes portugais à sa distribution, Carla Ribeiro et Bruno Schiappa, et d'approfondir ainsi les échanges entre artistes issus de différents pays et cultures.
« Une création envoûtante - peut-être même la plus envoûtante de toutes les œuvres de Vasconcelos depuis les dernières années -, originale et particulièrement imaginative, où les anges sont déchus et la quête de soi sans fin. Réellement poétique. »
Andrée Martin, Le Devoir
Au carrefour du théâtre et de la danse
Liberté, métissage et hybridité. Amour, rêve et humanité. Des mots et des thèmes qui définissent bien l'univers et la démarche de Pigeons International. Cofondée en 1987 par Paula de Vasconcelos et Paul-Antoine Taillefer qui, depuis, en assurent la codirection artistique, cette compagnie montréalaise se distingue, dès sa première production Du sang sur le cou du chat, par l'attention portée à la mise en scène, privilégiant l'interrelation du langage textuel et corporel. Que ce soit par le biais de textes d'auteurs étrangers tels Rainer Werner Fassbinder - Du sang sur le cou du chat (1987) -, Georg Büchner - Le Cri d'après Woyzceck (1988) - et Sam Shepard - Savage/Love (1994) et Cruising Paradise (1997) - ou de textes créés au sein de la compagnie - Le Réverbère (1990), Perdus dans les coquelicots (1991), Le Making of de Macbeth (1996) -, Pigeons International affiche une démarche artistique activement engagée dans une recherche originale et féconde où se côtoient et s'entrechoquent le jeu et la danse, les mots et les gestes : une approche qui connaît aujourd'hui un grand succès, entre autres, en Colombie, en Italie, au Portugal et dans l'Ouest canadien. Ses créations aux images scéniques à la fois tendres et brutales ne cessent, partout où elles s'arrêtent, de surprendre et d'émerveiller.
« La démarche de Pigeons International est manifestement séduisante et sait puiser le meilleur de la danse et du théâtre. »
Christian Saint-Pierre, Les Cahiers de théâtre Jeu
Éloge de la pluralité
Depuis sa fondation, Pigeons International favorise la participation d'artistes d'origines et de disciplines diverses. Comme l'a écrit Christian Saint-Pierre dans Les Cahiers de théâtre Jeu : « La démarche de Pigeons International se situe dans ce fragile équilibre entre l'efficacité de la construction dramatique et la puissance brute de l'abstraction dansée. » Or, c'est en 1997 avec Cruising Paradise que la compagnie amorce véritablement un virage remarqué vers ce que l'on peut appeler le « théâtre-danse » (ou, selon le point de vue, la « danse-théâtre »). En effet, depuis la création de Lettre d'amour à Tarantino en 1997 pour la compagnie Montréal Danse - une sorte de pied de nez poétique au film Pulp Fiction -, les chorégraphies de Paula de Vasconcelos se complexifient, contribuant ainsi à affirmer la signature de Pigeons International : un style bien personnel qui tend à abolir les frontières étanches qui persistent entre danse et théâtre, où le langage passe à la fois par le corps et le verbe.
Laissons enfin la parole à Paula de Vasconcelos et Paul-Antoine Taillefer : « Par le théâtre et la danse et la poésie des deux, nous voulons parler de la montagne et de la mer chez l'homme. Et que tout cela ouvre sur l'espoir. »