Si ce n’est toi d’Edward Bond, mis en scène par Alain Françon, lance l’Événement Théâtre National de la Colline au Centre national des Arts

6 mai 2005

Ottawa -- La Colline de Paris débarque sur la colline d’Ottawa ! Dès le 11 mai 2005 à 20 h, le Théâtre français du Centre national des Arts (CNA) ouvrira ses portes du Studio pour accueillir l’une des pièces visionnaires de l’auteur britannique Edward Bond : Si ce n’est toi, une production du Théâtre National de la Colline de Paris mise en scène par Alain Françon.

Comédie de mœurs ? Drame de science-fiction ? Huis clos absurde ? Si ce n’est toi, qui se déroule en 2077, c’est tout cela : une pièce d’anticipation à la logique implacable et à l’humour irrésistible qui tient autant de la crainte que de l’avertissement. Comme si Feydeau venait taquiner Orwell et Ionesco. Appartenant à la série des pièces courtes qu’Edward Bond appelle familièrement ses « petites pièces » — ce qui ne veut pas dire des modèles réduits de ses grandes pièces (Sauvés, La Compagnie des hommes) mais plutôt des détails agrandis, comme on pourrait le dire d’une photographie —, Si ce n’est toi pose, à l’instar de 1984, une question fondamentale : quel futur sommes-nous en train de préparer ?

« Alain Françon a monté avec une diabolique exigence ce texte ogre aux multiples visages. Drôle, hystérique, noirissime. Il en décortique cliniquement le tempo, alternant savamment temps morts, silence et allégrettos, faisant une vraie composition sonore de ce cauchemar entêtant. Plein de mystères. » ? Fabienne Pascaud, Télérama

Mais qui frappe à la porte ?

En 2077, la question de la sécurité de vos biens et avoirs — qui n’auront cessé de croître au cours du XXI^e siècle — aura enfin été réglée : les autorités vous auront retiré et rendu illégales toutes vos possessions de valeur, souvenirs personnels compris. Ainsi, Jams et Sara habitent un logement dénudé comme il se doit; ce qui veut dire dans la pièce principale : une table étroite et deux chaises, strictement utilitaires, murs nus, rien d’autre, rien. Un soir, à l’heure du repas, on frappe à la porte : c’est un homme venu de loin qui dit être le frère de Sara. Il a même, objet suspect et interdit, une photo d’enfance pour le prouver. Car, malgré toute la bonne volonté du monde, peut-on vraiment tout contrôler ?

Edward Bond situe l’action de Si ce n’est toi (Have I None en anglais) le 18 juillet 2077, le jour de son anniversaire. Ce jour-là, il fêtera ses 133 ans. Un assez bel âge. Il imagine qu’à cette époque les hommes seront convaincus eux-mêmes que, pour vivre en paix, il fallait supprimer le passé. Mais le passé est têtu, il revient : comme un fantôme, comme une maladie, pire que la peste.

« Mais qu’est-ce qu’un domicile en 2077 ? Un intérieur, sans doute, où chacun comme aujourd’hui peut se sentir chez soi, un espace privé où l’intime reste à l’abri de l’autorité qui régit l’espace public. Mais que deviendrait cet espace si, petit à petit, l’autorité réussissait à conquérir l’intimité elle-même ? Si, ayant enfin colonisé les régions les plus élevées et les plus secrètes de notre âme, elle nous faisait aspirer avec de plus en plus de passion et de zèle à l’idée qu’elle se fait du bien et de l’ordre public ? Que deviendrait notre “ intérieur” ? Edward Bond répond à cette question dans une lettre adressée aux metteurs en scène : “Quelque chose d’étrange, un mélange de farce et d’autre chose.” Si ce n’est toi est cette chose étrange. L’énergie comique de la farce trace le chemin qui mène vers l’autre chose. L’autre chose ? C’est sans doute ce qui frappe à la porte et qui bientôt frappe partout, au-dehors et au-dedans de la pièce : ce léger dérèglement qui échappe à toute autorité et qui, au plus secret de notre intimité, de notre “ intérieur”, nous met littéralement hors de nous. » – Michel Vittoz, le traducteur de Si ce n’est toi

Edward Bond, auteur anglais

Edward Bond est né le 18 juillet 1934 dans le nord de Londres. Il a écrit plus d’une trentaine de pièces de théâtre, des scénarios pour le cinéma ou la télévision, un livret d’opéra, un scénario de ballet et des recueils de poèmes. Praticien qui a plusieurs fois mis en scène ses pièces et dirige des ateliers d’acteurs ou d’amateurs, il a aussi développé une vaste réflexion théorique sur l’art dramatique, notamment dans son récent essai traduit en français chez L’Arche, La Trame cachée, qui donne à voir l’étendu de son théâtre, échafaudant une pensée libératoire pour trouver l’humain. Depuis la détonante création de sa pièce Saved à Londres en 1965, il s’est affirmé comme un des grands dramaturges contemporains avec des textes comme Lear, La Compagnie des hommes et sa trilogie des Pièces de guerre. Portant sur le monde un regard marqué par d’impitoyables analyses politiques, il met en lumière les contradictions de l’Occident d’aujourd’hui, persuadé que « nous naissons radicalement innocents mais tandis que nous grandissons, l’innocence se protège en se corrompant ».

Alain Françon, metteur en scène français

Le metteur en scène Alain Françon est depuis 1996 le directeur du Théâtre National de la Colline, à Paris. Auparavant, il avait fondé le Théâtre Éclaté d’Annecy en 1971, puis dirigé le Centre Dramatique National de Lyon-Théâtre du Huitième de 1989 à 1992, et le Centre Dramatique National de Savoie de 1992 à 1996. Au Théâtre National de la Colline, il réaffirme son attachement à présenter des œuvres du théâtre moderne et contemporain : Tchekhov, Ibsen, Brecht, Georg Kaiser, aux côtés d’auteurs d’aujourd’hui tels Heiner Müller, Edward Bond, Michel Vinaver et Daniel Danis. D’un tournant de siècle à l’autre, son questionnement demeure sous-tendu par une volonté d’« arracher un bout de sens au chaos du monde » et par une exigence centrée sur la place première de l’auteur dans le processus de la création dramatique.

Outre Si ce n’est toi, le public du Centre national des Arts aura également la chance de voir les 19, 20, 21, 27 et 28 mai 2005 la dernière mise en scène d’Alain Françon : e de Daniel Danis.

Billets 30 $ (16 $ étudiant) en vente à la Billetterie du CNA, chez Ticketmaster au (613) 755-1111 ou via le réseau Internet au www.nac-cna.ca.

Le Théâtre français du Centre national des Arts tient à remercier Le Droit, Week-end Outaouais et la Première Chaîne de Radio-Canada.

Renseignements :
Guy Warin, agent de communication
Théâtre français, Centre national des Arts
(613) 947-7000 ou 1 866 850-2787, poste 759
gwarin@nac-cna.ca