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Les sites urbains contaminés : une manne tirée d’une boîte bleue de sept milliards de dollars

The Globe and Mail
11 février 2003, p. A17

Par David J. McGuinty
Président-Directeur général
Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie

Le Canada pourrait tirer parti de près de sept milliards de dollars en bénéfices pour la collectivité — tout en freinant considérablement l’expansion tentaculaire des villes – s’il saisissait l’occasion de nettoyer les sites urbains contaminés réhabilitables qui jonchent nos centres-villes.

Il y a, au Canada, près de 30 000 propriétés situées en zone urbaine, qui demeurent abandonnées ou sous-utilisées, et qui ont été contaminées par des activités passées : raffineries désaffectées, anciennes cours de triage, propriétés riveraines vétustes, entrepôts tombant en ruine, stations-service et nettoyeurs à sec abandonnés, et autres propriétés commerciales où des substances toxiques ont été utilisées ou stockées.

La Table ronde nationale sur l’environnement et l’économie (TRNEE) vient tout juste de rendre publique, une stratégie destinée à sortir ces propriétés de l’impasse. Un réaménagement adéquat des sites urbains contaminés réhabilitables peut favoriser l’expansion de l’économie, améliorer l’environnement et venir en aide aux villes en difficulté. En conséquence, les promoteurs et les utilisateurs de ces terrains ne seront pas les seuls à en bénéficier.

Le réaménagement des sites urbains contaminés réhabilitables est susceptible de générer jusqu’à sept milliards de dollars par année en bénéfices pour le Canada. Ainsi, les propriétés situées aux alentours des sites urbains réaménagés prendraient de la valeur et les municipalités canadiennes, à court d’argent, toucheraient des impôts fonciers supplémentaires et des droits d’aménagement substantiels. Tous les ordres de gouvernement tireraient des revenus de ce réaménagement. Les bénéfices pour la collectivité comprennent aussi la réduction des risques pour la santé, et des déplacements quotidiens et, par le fait même, de la pollution de l’air. En outre, la préservation des terres agricoles constituerait un frein à l’expansion tentaculaire des villes.

Cependant, pour revitaliser les sites urbains contaminés comme le site ferroviaire du CN sur la façade portuaire de Hamilton, le secteur des Eastern Portlands de Toronto ou le quartier Hochelaga-Maisonneuve à Montréal, il faudra surmonter les obstacles juridiques, financiers et réglementaires qui empêchent le réaménagement de sites urbains contaminés réhabilitables. L’expérience montre que des incitatifs et des partenariats créatifs et astucieux peuvent contribuer à redonner aux sites urbains contaminés une vocation productive. Toutefois, malgré quelques exemples isolés de réussite, le réaménagement de ces sites demeure une possibilité largement inexploitée.

Souvent situés le long de voies de communication et dans des zones où tous les services municipaux sont disponibles, les sites urbains contaminés réhabilitables présentent une valeur potentielle importante, mais ils sont condamnés à être sous-utilisés parce que les coûts et les risques liés à leur nettoyage paralysent les propriétaires actuels, les promoteurs, les bailleurs de fonds, les assureurs, les administrations municipales et les futurs propriétaires. Parmi les obstacles au réaménagement figure le régime de responsabilité « conjointe et solidaire » qui découle du droit commun et de la réglementation. Ce régime fait peser sur toutes les personnes associées de près ou de loin à un projet de réaménagement, le risque de devoir assumer, seule, tous les frais de nettoyage ainsi que les dommages éventuels — sans compter que cette responsabilité ne s’éteint jamais. La conséquence de cette impasse juridique est la difficulté d’obtenir un financement initial de l’évaluation environnementale des terrains et de leur nettoyage.

La Table ronde proposent des solutions pour contourner ces obstacles :

  • Des investissements publics stratégiques — incitatifs fiscaux, prêts, subventions et garanties d’hypothèques — pourraient aider à vaincre la réticence du marché à fournir des capitaux pour financer les premières étapes du réaménagement des sites urbains contaminés réhabilitables. Et cela fonctionne! Depuis 1993, l’agence américaine de protection de l’environnement, (Environmental Protection Agency) a octroyé plus de 162 millions de dollars US aux communautés œuvrant dans le réaménagement de terrains abandonnés. Ce capital de départ a permis par la suite de lever un investissement du secteur privé de 2,9 milliards de dollars et de créer 11 000 emplois.
  • Des critères devraient être définis afin de supprimer les privilèges de la Couronne (liés aux arriérés d’impôts) aux échelons fédéral et provincial, qui grèvent de nombreux sites urbains contaminés réhabilitables.
  • Les gouvernements provinciaux devraient mettre en place des protocoles d’évaluation du risque environnemental, en fonction de la situation particulière des sites, et autoriser des nettoyages personnalisés plutôt qu’employer des critères génériques de nettoyage. Les municipalités devraient rationaliser leur processus d’approbation.
  • Les nettoyages réussis devraient tous être approuvés par des organismes de réglementation provinciaux. Cette approbation ferait courir un délai qui mettrait fin aux responsabilités civile et réglementaire pesant sur toutes les parties passées, présentes et futures, liées au site contaminé. Afin de protéger les personnes innocentes des dangers qui pourraient survenir ultérieurement, le promoteur du réaménagement serait requis de souscrire une assurance privée pour une durée de 15 ans maximum à partir de la date d’extinction de la responsabilité. Il devrait aussi contribuer à un fonds spécial d’assurance à long terme qui couvrirait les réclamations subséquentes. La responsabilité des promoteurs impliqués dans le réaménagement serait ainsi, remplacée par une assurance.
  • Les propriétaires de sites urbains contaminés réhabilitables pourraient être autorisés à transférer leur responsabilité, en même temps que le terrain, aux acheteurs qui prouveront qu’ils possèdent les ressources financières suffisantes pour terminer les opérations de dépollution. Le transfert de la responsabilité par contrat, aiderait à vaincre les réticences des propriétaires à vendre leurs propriétés de sites urbains contaminés à des promoteurs.

Le réaménagement des sites urbains contaminés réhabilitables, favorise une croissance urbaine plus compacte et plus efficiente. Une étude récente, réalisée aux États-Unis, a montré que, pour chaque hectare de site urbain contaminé réhabilitable réaménagé, ce sont 4,5 hectares de « terres vierges » — terres arables, terres à bois, terres de loisirs — qui sont sauvés de l’aménagement. Une expansion urbaine plus compacte est synonyme d’air plus pur, et confère aux villes un avantage concurrentiel en réduisant les coûts d’infrastructures.

Ottawa pourrait donner le feu vert au projet en indiquant son appui à la stratégie de la Table ronde dans son prochain budget. Toutefois, afin de réaliser pleinement tous les bénéfices éventuels susceptibles de découler de cette stratégie, tous les ordres de gouvernement, ainsi que le secteur privé, doivent collaborer. Recycler les sites urbains contaminés — une boîte bleue pour l’immobilier.

David J. McGuinty est Président-Directeur général de la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie.