C. La
base conceptuelle de la sélection des indicateurs
du développement durable
Les travaux de la TRNEE sur les indicateurs du développement
durable se fondent sur la notion de capital. Au cours de
la phase 1 de l'Initiative sur les IDDE, un cadre conceptuel
fondé sur le capital a été présenté
dans le document de discussion Établir
des indicateurs d'environnement et de développement
durable en fonction du capital : méthode proposée
2.
Ce cadre, qui a été accepté par le
comité directeur des IDDE, sert de point de départ
aux phases 2 et 3 de l'Initiative sur les IDDE. L'adoption
du cadre par le comité directeur des IDDE comporte
plusieurs implications pour les travaux des groupes de concertation.
Ces implications sont décrites dans les directives
suivantes.
Directive C1 - Les indicateurs
proposés par les groupes de concertation doivent
respecter la notion de base de capital définie dans
le cadre conceptuel des IDDE.
Le capital comprend, par définition, les intrants
durables (par opposition aux intrants qui sont consommés
lors de leur utilisation) nécessaires aux activités
économiques. Autrement dit, ce sont les biens que
nous conservons aujourd'hui afin que les perspectives d'une
société et d'une économie saine puissent
perdurer. En tant que concept, le capital s'aligne très
bien à l'aspect temporel du développement
durable. L'essence de la durabilité (telle qu'elle
est définie dans le contexte de l'Initiative sur
les IDDE) est que nous désirons que la production
économique se poursuive dans l'intérêt
des générations futures (non pas parce que
la production est bonne en soi, mais parce qu'elle contribue
au bien-être de la personne - voir à la directive
C3 la définition d'"activité économique"
employée dans cette initiative). Pour assurer la
continuité de la production économique, il
nous faut maintenir les moyens de production - le capital
- intacts à long terme. Le capital englobe une grande
partie de ce qu'il faut pour créer le flux de services
et de matériel nécessaire à la production
économique, aujourd'hui et dans l'avenir. Si le capital
est maintenu constant ou accru avec le temps, alors la production
économique peut elle aussi être soutenue à
long terme. Les indicateurs des services de l'écosystème
et de la santé de l'écosystème peuvent
aider à faire le suivi de la durabilité du
capital environnemental.
L'insistance mise sur le capital déplace l'accent
des indicateurs des mesures traditionnelles de l'activité
économique actuelle, comme le produit intérieur
brut, vers des mesures de la portée et de l'utilisation
des biens nécessaires pour permettre la poursuite
de l'activité économique. Autrement dit, elle
met l'accent non pas sur notre niveau de développement,
mais sur les facteurs nécessaires pour faire durer
ce développement. Les groupes de concertation sont
encouragés à rechercher des indicateurs qui
mesurent ces facteurs (c.-à-d. le capital) d'un point
de vue quantitatif et qualitatif.
Directive C2 - Les indicateurs
doivent respecter les catégories de capital définies
dans le cadre conceptuel des IDDE ainsi que le mandat individuel
confié à chacun des groupes de concertation.
On a toujours surtout pensé au capital en fonction
de biens produits que l'on peut acheter ou vendre pour utilisation
dans des processus de production. La machinerie, l'équipement,
les immeubles et les infrastructures sont autant d'exemples
de ce type de capital.
Le cadre conceptuel qui sous-tend l'Initiative sur les
IDDE exige une interprétation beaucoup plus large
de la notion de capital. Il doit comprendre tous les éléments
de l'économie humaine et de la nature qui fournissent
des flux de matériel ou de services à l'activité
économique et qui sont durables, c'est-à-dire
qu'ils ne sont pas consommés par le processus de
production. Ce concept englobe les formes de capital traditionnelles
mentionnées plus haut, plus le capital humain que
constitue la main-d'uvre et le capital naturel qui
se trouve dans notre environnement.
On peut décrire le concept de capital humain comme
la capacité, tant innée que dérivée
ou accumulée, contenue dans la population et qui
lui permet d'effectuer un travail productif avec d'autres
formes de capital en vue de soutenir la production économique.
Ce concept va plus loin que la définition traditionnelle
de capital humain, qui s'appliquait uniquement à
l'éducation de la main-d'uvre. Le capital naturel
se divise en trois grandes catégories : les stocks
de ressources naturelles, les terres et les systèmes
environnementaux (ou écosystèmes). Toutes
trois sont considérées essentielles à
la durabilité à long terme de l'économie.
Les stocks de ressources naturelles sont la source de matières
premières utilisées dans la production de
biens manufacturés. Les terres sont essentielles
à la dotation de l'espace dans lequel pourra se dérouler
l'activité économique. Les écosystèmes
sont essentiels à cause des services qu'ils rendent
directement et indirectement à l'économie,
comme la purification de l'air vicié et des eaux
usées; la fourniture d'un sol productif; la fourniture
de la biodiversité; la fourniture d'un climat prévisible
et relativement stable; la protection contre le rayonnement
solaire incident; et la production de flux fiables de ressources
naturelles renouvelables.
Le mandat de chaque groupe de concertation, tel que le
décrit le Cadre de référence des groupes
de concertation, donne des directives plus détaillées
sur la manière d'interpréter la portée
de leurs travaux.
Directive C3 - La notion d'activité
économique doit comprendre non seulement l'activité
du marché, mais aussi la production de biens et de
services à l'extérieur du marché.
Le cadre des IDDE est axé sur la durabilité
de deux facteurs : la production économique et la
salubrité de l'environnement.
La production économique au sens strict renvoie
uniquement à la production exécutée
dans le contexte de l'activité du marché,
ce qui correspond (à quelques exceptions mineures
près) aux extrants des entreprises et des personnes
qui exercent des activités lucratives, plus la valeur
des services gouvernementaux. Les activités extérieures
au marché effectuées par les ménages
ou les bénévoles (la cuisine, l'éducation
des enfants, etc.) ne sont pas comprises dans la production
au sens strict. Toutefois, cette définition de la
production économique est trop restreinte dans le
contexte du développement durable, car beaucoup d'activités
de grande valeur (au sens psychologique plutôt que
monétaire) se déroulent à l'extérieur
du marché officiel. Les indicateurs de développement
durable doivent nous parler non seulement de notre aptitude
à soutenir la production de biens et de services
mis en marché, mais aussi de notre aptitude à
soutenir la production de tous les biens et services offrant
des avantages aux humains.
Directive C4 - Les indicateurs
du capital les plus directs sont ceux qui mesurent la quantité
et la qualité du capital dont l'économie dispose
et les tendances de cette utilisation du capital en fonction
du temps.
En théorie, les indicateurs du développement
durable fondés sur l'approche du capital doivent
être choisis afin de mesurer l'évolution de
la quantité et (ou) de la qualité du stock
de capital dont dispose l'économie en fonction du
temps. Ces mesures représentent des indicateurs directs
de la durabilité des activités économiques
actuelles. Si les stocks de capital utilisés aujourd'hui
dans l'activité économique sont stables ou
que leur taille ou leur qualité s'accroît,
nous pouvons conclure que l'économie est durable
dans sa forme actuelle. Si, au contraire, la taille ou la
qualité de ces stocks est en déclin, la conclusion
est que certaines formes actuelles d'activité économique
ne sont pas durables à long terme.
Directive C5 - Les indicateurs
du capital qui n'est pas directement mesurable doivent être
choisis afin de mesurer soit les flux de biens ou de services
découlant du capital, soit la demande de flux de
biens ou de services.
Toutes les formes de capital ne se prêtent pas nécessairement
à des mesures directes. Les écosystèmes,
en particulier, ne sont pas observables au sens quantitatif;
même leur évaluation au sens qualitatif n'est
pas évidente. Dans de tels cas, il faut choisir des
indicateurs qui mesurent les flux de biens ou de services
fournis par le capital. En principe, si la quantité
ou la qualité de ces flux demeure constante en fonction
du temps, on peut raisonnablement conclure que le capital
lui-même demeure intact.
On a demandé à plusieurs groupes de concertation
de proposer des indicateurs qui puissent refléter
la santé d'un écosystème, soit l'état
de l'écosystème et sa capacité de continuer
de fournir des services. Ces aspects traduisent également
la durabilité de l'environnement lui-même.
Lorsqu'on ne peut pas mesurer les flux de biens ou de services
fournis par le capital, il est également possible
d'examiner la demande de flux de biens ou de services sur
le capital en question. Bien que les indicateurs de ce type
ne précisent pas la quantité ni la qualité
réelle du capital disponible, ils mesurent quand
même l'évolution du capital en fonction du
temps. En principe, si la demande de capital est en croissance
constante, elle finira par atteindre un point où
elle dépassera la capacité du capital de fournir
des services.
Directive C6 - Le cas échéant,
la possibilité de remplacer une forme de capital
par une autre doit être envisagée dans le choix
des indicateurs.
La substitution du capital renvoie à l'utilisation
d'une forme de capital à la place d'une autre dans
un processus de production. Par exemple, il fut un temps
où les statistiques étaient compilées
à la main par des commis qui transcrivaient l'information
de questionnaires d'enquête remplis dans un grand
livre (une utilisation évidente de capital humain).
Aujourd'hui, cette même fonction est exécutée
en grande partie par des ordinateurs (capital produit).
Le même extrant est produit au moyen d'une autre combinaison
de charges en capital, soit, dans notre exemple, du capital
produit plutôt que du capital humain.
Si les possibilités d'utiliser une forme de capital
au lieu de n'importe quelle autre forme de capital sont
illimitées (c'est-à-dire qu'il y a substituabilité
parfaite), il n'y a alors pas de raison de mesurer les diverses
formes de capital indépendamment les unes des autres.
La durabilité économique est assurée
tant que le total des stocks de capital ne diminue pas avec
le temps. La position prise par le cadre conceptuel de l'Initiative
sur les IDDE est que certains types de capital naturel offrent
des possibilités de substitution importantes, mais
que d'autres types n'offrent que peu de possibilités
de substitution, voire aucune. Dans ce cadre, on considère
que certains types de ressources naturelles (les minéraux,
les métaux et les combustibles) offrent un degré
de substituabilité très élevé
et que les services découlant des écosystèmes
ne sont pratiquement pas substituables.
La conséquence de tout cela pour le choix des indicateurs
du développement durable est que, le cas échéant,
les indicateurs doivent être construits de manière
à traduire la substituabilité du capital en
question. Si on recherche un indicateur pour une forme de
capital jugée substituable (les ressources renouvelables
et non renouvelables, par exemple), on peut raisonnablement
tenter de construire cet indicateur de manière à
pouvoir le combiner ou le comparer à des indicateurs
d'autres formes substituables de capital. Par exemple, comme
les minéraux sont généralement considérés
comme un capital substituable, les indicateurs de ces ressources
pourraient être combinés ou comparés
de façon signifiante à des indicateurs du
capital produit (notamment en commentant la faisabilité
d'indicateurs monétisés; voir la directive
C7). En revanche, un indicateur correspondant à une
forme de capital non substituable (les services rendus par
l'atmosphère, par exemple) doit être explicitement
autonome, et l'utilisateur doit être averti de ne
pas le combiner ni le comparer à des indicateurs
d'autres formes de capital.
Directive C7 - Les indicateurs
individuels peuvent être exprimés en unités
physiques ou monétaires ou les deux. Les unités
physiques doivent être considérées comme
le point de départ de tous les indicateurs. Les unités
monétaires doivent être employées uniquement
lorsque les prix du marché pour le capital en question
peuvent s'observer directement ou être estimés
au moyen de techniques crédibles.
En principe, il est possible de mesurer n'importe quelle
forme de capital au moyen d'unités physiques ou monétaires.
Le capital produit peut se mesurer par le nombre de machines
d'un type défini ou par la valeur des services fournis
par les machines. Le capital humain peut se mesurer par
le nombre d'années d'instruction ou par la valeur
des services offerts par les travailleurs. Le capital naturel,
lui aussi, peut s'évaluer par la mesure physique
des ressources et des écosystèmes ou par la
valeur des biens ou des services qu'il fournit. Cependant,
pour diverses raisons, il n'est pas toujours adéquat
d'utiliser l'une ou l'autre forme d'évaluation, selon
le type de capital en question.
Les IDDE doivent utiliser des unités monétaires
uniquement lorsque le capital en question (ou les flux de
biens ou de services qui en émanent) fait l'objet
de transactions régulières sur des marchés
ouverts. Les prix auxquels se font les transactions doivent
être directement observables ou il doit être
possible de les estimer au moyen d'une méthode indirecte
crédible. L'emploi d'unités monétaires
est particulièrement souhaitable lorsque le capital
en question est substituable à d'autres formes de
capital qui sont communément mesurées en unités
monétaires. Par exemple, comme c'est un fait reconnu
que le capital produit peut parfois remplacer le capital
naturel, il est donc souhaitable que ces deux formes de
capital soient mesurées au moyen des mêmes
unités. Lorsque les deux formes de capital sont mesurées
au moyen d'unités monétaires, on peut retracer
leur évolution en fonction du temps afin d'évaluer
si elles sont maintenues au total (même si la part
de l'une par rapport au total décroît). Dans
ce cas, la durabilité exige uniquement que le stock
total de capital soit maintenu, car la production ne dépend
pas du type de capital disponible.
Malgré leurs avantages au plan de la comparabilité,
les unités monétaires ne conviennent pas toujours
aux indicateurs du développement durable. C'est particulièrement
le cas du capital naturel, pour lequel il n'existe aucune
possibilité de substitution. Dans les faits, le capital
naturel qui est essentiel au fonctionnement global du système
économique n'a pas de prix et ne peut s'évaluer
correctement qu'au moyen de mesures physiques. On peut probablement
arriver à la même conclusion dans le cas du
capital pour lequel les possibilités de substitution
sont très réduites, voire inexistantes. En
effet, les prix qui sont au cur de l'évaluation
monétaire sont établis sur des marchés
qui omettent (de façon parfois remarquable) de tenir
compte des coûts environnementaux de l'activité
économique. Cela n'a pas de sens d'utiliser des prix
de ce genre pour évaluer les services mêmes
du capital naturel auxquels on attribue un prix nul dans
les transactions économiques qui sont à la
base de la fixation des prix.
Directive C8 - Les indicateurs
doivent être choisis afin de refléter une perspective
à moyen ou à long terme.
On ne peut ignorer les horizons temporels lorsqu'on considère
le développement durable, particulièrement
en ce qui concerne la durabilité du capital. La classification
d'un type particulier de capital comme étant substituable
ou complémentaire dépend au moins en partie
de la période sur laquelle on évalue les possibilités.
Il n'y a pas de réponse définitive à
savoir quel horizon temporel est le plus approprié.
De toute évidence, le très bref horizon qu'ont
en commun beaucoup d'indicateurs économiques (de
un à plusieurs mois) est généralement
insuffisant pour traiter des enjeux de la durabilité.
L'évolution des stocks de capital et de l'usage que
nous en faisons se fait sur une durée plus longue
et, pour l'essentiel, les mouvements qui se produisent sur
quelques mois n'apportent rien à l'évaluation
de la durabilité. Il semble adéquat de fixer
une durée de un an comme période minimale
pour la mise à jour des indicateurs du développement
durable. Dans certains cas, cependant, il faudra un horizon
temporel beaucoup plus long pour évaluer adéquatement
les tendances de l'évolution du capital. La mesure
significative de l'évolution des systèmes
atmosphériques ne peut se faire que sur plusieurs
décennies.
Directive C9 - Les indicateurs
doivent être choisis afin de refléter des seuils
pertinents connus à l'égard du type de capital.
Idéalement, ces valeurs seuils doivent être
établies à partir d'une connaissance scientifique
des systèmes humains ou naturels. En l'absence d'une
telle connaissance, on peut utiliser des valeurs seuils
déterminées sur la base de processus politiques
si on le juge approprié.
Il y a parfois des seuils critiques au-delà desquels
on ne peut prédire le comportement d'un système
avec la moindre certitude. De telles valeurs seuils existent
dans tous les systèmes complexes, y compris les systèmes
humains et environnementaux. Dans la mesure du possible,
il faut s'efforcer de concevoir des indicateurs de développement
durable qui incorporent des valeurs seuils afin de pouvoir
donner une alerte rapide dès qu'une forme de capital
critique approche d'une valeur seuil.
Idéalement, les valeurs seuils doivent être
établies en fonction d'une connaissance scientifique
du système concerné. Par exemple, les biologistes
pourraient être en mesure de prédire quelle
quantité de charge de polluants peut être absorbée
par un écosystème aquatique avant que le comportement
du système passe d'un point d'équilibre à
un autre point, inconnu celui-là. Toutefois, dans
bien des cas, la connaissance scientifique des seuils est
inadéquate; nous devons alors nous fier plutôt
aux valeurs seuils définies par des politiques. Par
exemple, nous ne savons pas avec certitude quel niveau annuel
d'émission de gaz à effet de serre l'atmosphère
peut supporter sans que cela n'entraîne de changements
climatiques inacceptables. En l'absence de cette connaissance,
les cibles de réduction des émissions ont
été établies par la voie diplomatique.
Si les membres d'un groupe de concertation considèrent
que ces cibles sont adéquates, elles peuvent remplacer
de façon acceptable les valeurs seuils si aucun seuil
n'est établi sur la base de connaissances scientifiques.
D. L'utilité
analytique des indicateurs proposés
L'utilité analytique renvoie à la mesure
dans laquelle les indicateurs peuvent servir de base à
l'évaluation, aux fins de l'élaboration de
politiques, de la durabilité du développement
économique au Canada. Un certain nombre de facteurs
déterminent l'utilité analytique des indicateurs;
voici quelques directives fondées sur ces facteurs.
Directive D1 - Les indicateurs
doivent être dérivés de données
sous-jacentes accessibles aux analystes désireux
de comprendre les phénomènes qui font évoluer
un indicateur en particulier.
Au mieux, les indicateurs servent de balises du changement;
ils indiquent où le changement se produit et ils
favorisent une analyse approfondie de la situation. Si une
analyse approfondie est impossible, c'est en vain que les
indicateurs auront rempli leur fonction d'indiquer le changement.
Pour être correct, un ensemble d'indicateurs doit
donc obligatoirement reposer sur des systèmes de
données tout aussi corrects. On insiste donc pour
que les groupes de concertation déterminent quelles
données sous-jacentes ils jugent nécessaires
pour soutenir une analyse significative des indicateurs
qu'ils proposent, y compris les aspects relatifs à
la désagrégation géographique et sectorielle
des données.
Directive D2 - Les ensembles d'indicateurs
doivent avoir une cohésion interne.
Il faut que tous les indicateurs et les données
sous-jacentes " s'alignent " de façon significative
et utile lorsqu'on les combine à des fins analytiques.
On peut arriver à ce genre de cohésion par
des moyens simples tels que l'utilisation d'unités
de mesure communes et la normalisation des données
(p. ex. en exprimant les indicateurs en données par
habitant lorsqu'il y a lieu). On peut également
y arriver par des moyens plus complexes tels que l'emploi
de méthodologies, de définitions, de classifications
et d'unités géographiques communes dans la
collecte des données et l'élaboration des
indicateurs. On demande aux groupes de concertation de veiller
à la cohésion interne des indicateurs qu'ils
proposent et, dans toute la mesure du possible, à
leur cohésion avec les indicateurs d'autres domaines
(voir la directive suivante).
Directive D3 - Les indicateurs
du développement durable doivent être compatibles
avec les indicateurs d'autres domaines.
La compatibilité est étroitement liée
à la cohésion. Alors que la cohésion
renvoie à l'intégrité interne des indicateurs,
la compatibilité renvoie à leur intégrité
par rapport à d'autres indicateurs et systèmes
de données. La compatibilité est particulièrement
importante lorsque, comme dans le cas de l'Initiative sur
les IDDE, des indicateurs sont proposés dans plusieurs
domaines distincts. Comme la cohésion interne, la
compatibilité s'atteint par l'emploi d'unités
de mesure, de méthodologies, de définitions,
de classifications et d'unités géographiques
communes.
Des trois domaines pour lesquels des indicateurs seront
proposés (capital produit, capital humain et capital
naturel), le mieux établi est le capital produit.
Dans une certaine mesure, on peut en déduire qu'il
faut que les indicateurs choisis dans les deux autres domaines
s'adaptent aux conventions utilisées dans la mesure
du capital produit. Bien sûr, cela n'est pas tout
à fait possible, car certaines de ces conventions
ne conviennent tout simplement pas à la mesure du
capital humain et tout particulièrement du capital
naturel. Néanmoins, les groupes de concertation qui
étudieront des types de capital éventuellement
" substituables " (comme le capital humain ou
les ressources) devraient envisager lorsqu'il y a lieu d'utiliser
des conventions économiques dans la définition
de leurs indicateurs. Si de telles conventions sont inadéquates,
ils devront s'efforcer de réduire au minimum les
effets sur la compatibilité de l'utilisation d'unités
de mesure, de méthodologies, de définitions,
de classifications ou d'unités géographiques
différentes.
Directive D4 - Les indicateurs
doivent être constants en fonction du temps.
La constance en fonction du temps des concepts, des sources
de données et des méthodes est d'une importance
cruciale pour l'utilité analytique des indicateurs.
Pour pouvoir servir de base à l'évaluation
des tendances dans l'évolution de la durabilité,
les indicateurs doivent se prêter à une analyse
significative des séries chronologiques. La probabilité
que les indicateurs demeureront stables avec le temps s'accroît
si leurs concepts, leurs sources de données et leurs
méthodes sont décrits clairement au départ.
On demande donc aux groupes de concertation de documenter
dans toute la mesure du possible ces éléments
des indicateurs qu'ils proposeront.
Directive D5 - Les indicateurs
doivent être crédibles.
Les indicateurs sont inutiles si la collectivité
des utilisateurs ne les considère pas à la
fois fiables et vraisemblables; ce sont là les deux
attributs de la crédibilité.
La fiabilité est principalement une question d'actualité
et d'exactitude. L'actualité renvoie au délai
écoulé entre la période visée
par les données et la période à laquelle
elles sont publiées. L'exactitude renvoie au degré
de correction avec lequel les données décrivent
les phénomènes qu'elles sont censées
mesurer. Bien que, dans la pratique, l'actualité
et l'exactitude soient souvent échangées l'une
contre l'autre, dans un monde idéal, les données
sont à la fois actuelles et exactes.
La vraisemblance concerne la neutralité de la provenance
des données, qu'elle soit perçue ou réelle.
Si l'utilisateur est convaincu, à tort ou à
raison, que le fournisseur des données a un parti
pris d'un côté ou de l'autre, il ne fera pas
confiance aux données et, par conséquent,
il ne s'en servira pas.
Bien entendu, les groupes de concertation ne pourront pas
assurer la crédibilité complète des
indicateurs du développement durable qu'ils proposeront.
Néanmoins, on leur demande de garder à l'esprit
la nécessité que les indicateurs soient crédibles
et de suggérer des moyens par lesquels, à
leur avis, cette crédibilité pourrait se concrétiser.
Directive D6 - Les indicateurs
doivent couvrir tous les échelons géographiques,
temporels et sectoriels pertinents.
Il faut que la couverture spatiale, temporelle et sectorielle
des indicateurs soit conforme aux besoins analytiques actuels
et à la nature du phénomène à
l'étude. Dans certains cas, il ne faut rien de moins
qu'une couverture complète. Par exemple, si le but
est de mesurer les répercussions d'une politique
conçue pour réduire les émissions de
gaz à effet de serre provenant de l'utilisation de
combustibles fossiles, on aura besoin de données
sur les émissions de gaz à effet de serre
tous les ans dans chaque secteur de l'économie et
dans chaque région du pays. Dans d'autres cas, un
besoin analytique plus précis peut justifier une
couverture d'envergure réduite. Il convient toutefois
de souligner que les données d'une portée
réduite peuvent n'avoir que peu de valeur pour l'analyse
des enjeux qui débordent leur champ d'application
particulier. Ceci peut nuire aux efforts visant à
les utiliser de façon novatrice ou imprévue.
Ainsi, bien qu'il soit légitime dans certains cas
et parfois même nécessaire de limiter la portée
des données au début d'une activité
de collecte, il est sage de fixer une couverture complète
comme but à long terme du système d'information
environnementale.
En gardant à l'esprit que l'Initiative sur les IDDE
a pour but d'élaborer des indicateurs du développement
durable pour l'ensemble du pays, les groupes de concertation
devraient préciser quelle échelle géographique,
temporelle et sectorielle convient aux indicateurs qu'ils
proposeront. En général, l'échelle
géographique sera nationale, l'échelle temporelle
sera annuelle ou plus longue et l'échelle sectorielle
sera à la grandeur de l'économie. Ce ne sera
cependant pas toujours le cas, en particulier pour l'échelle
géographique. Dans certains cas, l'échelle
géographique appropriée sera infranationale;
par exemple, certaines émissions de polluants ayant
des impacts localisés pourront être rapportées
à l'échelle de régions infranationales.
Il est important de garder aussi à l'esprit que
les systèmes de données sous-jacents doivent
toujours permettre aux analystes d'étudier les forces
motrices des indicateurs dans plus de détail aux
plans géographique, temporel et sectoriel que l'indicateur
lui-même.
E. Le
mode de présentation des indicateurs proposés
Chaque groupe de concertation est censé produire
un rapport final comprenant des renseignements détaillés
sur chacun des indicateurs qu'il recommandera. On demande
aux groupes de concertation de suivre les directives ci-dessous
dans la préparation de leur rapport.
Directive E1 - Le rapport final
doit comprendre une description détaillée
de chaque indicateur proposé. La description doit
donner suffisamment de détails pour qu'un tiers puisse
les suivre afin de produire l'indicateur comme le groupe
de concertation l'a conçu. Chaque description doit
comprendre au moins les détails suivants :