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Le travailleur vulnérable

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Travailler, oui mais...  Le droit du travail à retravailler



Introduction

Le travail est beaucoup plus qu'un moyen de satisfaire nos besoins physiques et ceux de nos familles. Pour assurer son bien-être émotif, spirituel et social, tout humain a foncièrement besoin d'un travail décent qui exploite convenablement ses capacités, qui lui demande d'être à la hauteur de ses possibilités et qui lui procure une chance d'apporter sa contribution.

On peut travailler pour un salaire (travail rémunéré), par amour (éducation des enfants et autres formes de soins) ou au bénéfice de la collectivité (travail bénévole). Toutes ces formes de travail contribuent, directement ou indirectement, à façonner la nature de notre société. En retour, l'opinion de la société à l'égard notre travail et la récompense qu'elle nous accorde ont une incidence majeure sur notre capacité à prendre soin de nous-mêmes et de nos proches, sur notre dignité et notre fierté et sur l'envergure de notre participation et de notre apport à la société.

Le droit joue un rôle important pour déterminer les types de travail qu'on reconnaît, apprécie et récompense, mais aussi ceux qu'on dénigre, néglige ou interdit. En outre, le droit a un rôle à jouer dans l'équilibre des pouvoirs en milieu de travail, la répartition des récompenses et l'accès aux droits et aux avantages au travail. De plus, les lois sur la main-d'œuvre et l'emploi ont d'importantes répercussions sur les coûts d'exploitation d'une entreprise au Canada. Bref, le droit a des répercussions directes sur la capacité des Canadiens d'accéder au bien-être économique et personnel par leur travail. Il a aussi des conséquences sur la productivité du pays.

C'est en réponse aux inquiétudes soulevées par le Conseil consultatif de la Commission du droit du Canada que la Commission a entrepris l'examen du droit canadien sur la main-d'œuvre et l'emploi. Ce groupe de Canadiens craint que les lois sur la main-d'œuvre et l'emploi et les politiques sociales du Canada ne prennent du retard par rapport aux changements qui se produisent dans le monde du travail. Ils se disent inquiets du nombre de travailleurs canadiens dont le travail met en péril le bien-être personnel et financier et qui se considèrent très mal protégés et rassurés par les lois et politiques canadiennes sur la main-d'œuvre et l'emploi.

En particulier, ils soulèvent les préoccupations suivantes relatives à la réalité de la vie des travailleurs canadiens et au cadre réglementaire applicable au travail :

· Plus du tiers de la main-d'œuvre canadienne occupe un emploi atypique, c'est-à-dire qui s'éloigne du modèle traditionnel d'emploi à temps plein et permanent chez un employeur unique. Pourtant, aujourd'hui encore, les critères d'admissibilité à la plupart des droits, des avantages et des mesures de protection relatifs au travail et à l'emploi sont presque exclusivement fondés sur une relation d'emploi dite « normale ». [1]

· On craint que les lois et politiques actuelles entraînent une répartition inéquitable des coûts et des avantages de la participation à la population active. En 2000, par exemple, près de deux millions de travailleurs canadiens adultes gagnaient moins de 10 $ l'heure. Beaucoup de ces travailleurs et leur famille vivent dans la pauvreté malgré le fait qu'ils occupent à l'année un emploi à temps plein. Environ 670 000 personnes, dont la plupart sont des femmes, essaient de subvenir seules aux besoins de leur famille avec un salaire inférieur à 10 $ l'heure. Pour un grand nombre, il est très difficile d'accéder à un emploi bien rémunéré.

· On craint que le cadre de réglementation actuel ne permette pas suffisamment aux travailleurs d'avoir voix au chapitre dans leur milieu de travail. La syndicalisation est en baisse et les autres formes de représentation des employés n'ont pas pris assez d'ampleur pour améliorer la démocratie au travail.

· Les ressources consacrées à la mise en application des lois et des règlements existants, de même que les méthodes et les pratiques de leur mise en application sont peut-être insuffisantes pour atteindre les buts visés. Par exemple, certains groupes de travailleurs, comme les jeunes, les immigrants et les réfugiés de couleur, les travailleurs de minorités visibles et les travailleurs dépréciés signalent que les lois existantes sont peu appliquées, qu'ils se font exploiter et qu'ils travaillent dans des conditions extrêmement médiocres qu'ils se sentent incapables de changer.

· Les lois et politiques actuelles sur le travail tiennent toujours pour acquis que « quelqu'un » (autre que le travailleur) s'occupe des enfants, de la maison et des parents âgés. Dans les faits, la plupart des travailleurs tentent désespérément de concilier les demandes croissantes de leur travail et les obligations familiales et domestiques; pour y arriver, ils bénéficient de très peu de ressources et de soutien. Les travailleurs canadiens doivent faire des sacrifices qui risquent fort de saper leur bien-être à court et à long termes, ainsi que celui de la société dans son ensemble.

Les Canadiens que nous avons rencontrés se sont dits inquiets de la possibilité que les lacunes des lois et des politiques canadiennes sur la main-d'œuvre et l'emploi finissent par épuiser l'une des principales ressources naturelles du pays : sa main-d'œuvre. Les travailleurs qui n'arrivent pas à joindre les deux bouts et qui ne peuvent ni s'offrir de soins dentaires ou de la vue, ou offrir à leurs enfants des services de garde adéquats, en subiront des conséquences négatives à long terme pour eux-mêmes et leur santé. Souvent, leur régime de retraite est inadéquat, leur santé et le bien-être de leurs enfants, sont également affectés. Au bout du compte, c'est la société qui en subit les contrecoups, sous forme de coûts et de perte de productivité. Pour être productifs, les travailleurs doivent être en santé et capables de s'adapter aux changements.

On reconnaît parallèlement que les milieux d'affaires et les gouvernements subissent d'énormes pressions. La libéralisation des échanges commerciaux a obligé de nombreuses entreprises à sabrer dans leurs dépenses pour rester concurrentielles. Les critiques exprimées au sujet de la taille de la fonction publique et des budgets des gouvernements ont forcé ces derniers à réduire leurs dépenses. Par conséquent, les employeurs des secteurs privé et public ont estimé qu'ils devaient réduire les coûts de la main-d'œuvre. Les lois du travail qui obligent les employeurs à assumer l'entière responsabilité du bien-être des travailleurs canadiens sont considérées irréalistes et nuisibles à la survie de nombreuses entreprises. On estime qu'il faut instaurer des changements novateurs, solidement fondés sur le principe de la responsabilité collective ou partagée à l'égard du bien-être des travailleurs.

À partir de ces problèmes et de ces préoccupations, on a proposé que la Commission du droit mène un projet visant à répondre aux questions suivantes :

· Quelles lacunes et faiblesses de l'actuel cadre de réglementation ont rendu certains groupes de travailleurs particulièrement vulnérables?

· Quelles solutions novatrices pourrait-on proposer pour réformer le droit canadien sur la main-d'œuvre et l'emploi et modifier les politiques afin de réduire la vulnérabilité des travailleurs, d'accroître la productivité et de répartir de façon plus équitable les avantages et les coûts de la participation à la population active?

La première étape du processus consistait à commander des études sur ces questions. Ensuite, il fallait rassembler les résultats de ces recherches et des recherches antérieures dans le présent document de façon à inciter le public à s'exprimer sur les questions ci-dessus.

Dans la première partie du document, nous examinons les lacunes du droit canadien sur la main-d'œuvre et l'emploi dans le contexte du vécu de quatre travailleurs. Ces quatre études de cas sont basées sur des profils de personnes qui, en raison de leur travail et de leurs caractéristiques ou circonstances personnelles, se sont retrouvées dans l'une ou l'autre des catégories suivantes : travailleurs autonomes et à temps partiel, employés d'agences de travail temporaire, travailleurs marginalisés ou travailleurs dépréciés. Selon les recherches, beaucoup de travailleurs de ces catégories sont fortement vulnérables par suite de certaines des lacunes et faiblesses du cadre de réglementation mentionnées ci-dessus.

Dans les études de cas, nous nous penchons sur les répercussions du droit sur la vie des quatre travailleurs vulnérables et de leur famille. Après chaque étude de cas, nous analysons les données empiriques et examinons quelques lois qui traitent de chaque catégorie de travail et de travailleurs.

Des quatre études de cas, trois concernent des femmes. Nous désirons ainsi souligner qu'un nombre disproportionné de travailleurs vulnérables sont des femmes. Les recherches indiquent qu'en 2001, même si les femmes ne représentaient que 46 p. cent de la population active, elles occupaient 63 p. cent des emplois précaires [2] . En 2000, 69 p. cent des travailleurs qui gagnaient moins de 8 $ l'heure étaient des femmes [3] .

Ce n'est pas un hasard si la majorité des emplois précaires reviennent aux femmes. En général, les arrangements d'emploi traditionnels s'adressent à des travailleurs ayant peu ou pas de besoins en matière de garde d'enfants, de soins aux parents âgés et d'entretien domestique, ou qui disposent d'aide (rémunérée ou non) pour assurer ces services à leur place. Traditionnellement, les femmes se sont occupées de ces services de soins et de soutien et généralement, ces services ont été sous-estimés et mal rémunérés. Les travailleuses ne sont donc pas seulement reléguées aux secteurs des services et des soins, habituellement moins bien rémunérés que les domaines typiquement masculins, mais en plus, elles tentent souvent de concilier leur participation à la main-d'œuvre rémunérée avec les soins et le soutien dont elles sont responsables à la maison, auprès de leur famille et dans leur collectivité. Bon nombre y arrivent grâce à des arrangements de travail atypiques, associés à de faibles niveaux de protection et d'avantages sociaux.

Après avoir analysé les données empiriques et nos quatre études de cas, nous examinons les justifications qui sous-tendent l'actuel cadre de lois et de politiques relatives au travail. La protection des travailleurs repose sur une série de choix de société qui déterminent qui a droit à la protection et pourquoi. Ces choix sont fondés sur des valeurs et des convictions relatives aux personnes, à la société et à la répartition des coûts et des avantages de la vie en société. Il est utile de réfléchir aux valeurs et aux objectifs qui sous-tendent le cadre de réglementation afin de déterminer s'ils sont toujours pertinents et équitables et s'ils justifient les conséquences qui découlent de l'application du droit.

Dans la dernière partie du document, nous explorons quelques possibilités de réforme du droit canadien sur la main-d'œuvre et l'emploi. La décision d'améliorer la protection offerte aux travailleurs vulnérables ne suppose pas nécessairement que nous sachions comment assurer cette protection. Même si on s'entend pour améliorer la protection offerte à ces travailleurs, rien n'empêche la polémique et les divergences quant au choix d'outils permettant d'assurer une protection efficace et aux effets qu'auraient ces pratiques réglementaires sur la compétitivité de l'économie canadienne. Nous aborderons donc une série de projets de réforme du droit. Les options diffèrent quant au degré de changement requis : elles vont de l'amélioration des pratiques d'application, du droit et de l'élargissement de la protection existante pour englober un plus grand nombre de travailleurs, à un changement radical de la façon de réglementer le travail. Cette section ne vise pas nécessairement à proposer des solutions, mais plutôt à inciter les lecteurs à faire des commentaires sur les éléments qu'ils jugent essentiels à la réforme du droit en la matière. L'objectif est de susciter un examen critique des effets des lois canadiennes sur le travail et des valeurs et hypothèses qui sous-tendent ces lois.

Nous demandons aux Canadiens de réfléchir aux changements nécessaires pour favoriser le bien-être de tous les travailleurs et, de ce fait, de contribuer à la productivité et à la prospérité du pays.


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