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Page d'accueil À propos de nous Rapport Document de recherche 1998 Les sévices contre les enfants placés en établissements

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Rapport

Document de recherche

Les sévices contre les enfants placés en établissements

Rapport provisoire

    1. Introduction
    2. Le cadre de recherche
    3. Le redressement des sévices passés
    4. Les sujets de recherche
    5. Conclusion

ANNEXES:

    1. La lettre de la Ministre
    2. Les rapports examinés

16 février 1998

I. INTRODUCTION

Maintenant que les enfants qui ont subi en établissements des sévices physiques et sexuels atteignent l’âge adulte et peuvent se faire entendre en public, la question de savoir ce qu’il faut faire est devenue une préoccupation du gouvernement fédéral, de nombre de gouvernements provinciaux, des Premières nations et de diverses organisations religieuses et autres. La nature complexe du problème et l’ampleur du préjudice causé font qu’il est d’autant plus difficile de trouver des solutions satisfaisantes. Les mécanismes juridiques traditionnels – actions civiles et poursuites pénales - paraissent insuffisantes pour remédier aux conséquences multiples de la violence physique et sexuelle contre des enfants dans les établissements. Il est devenu clair qu’il faut aussi envisager d’autres méthodes.

Le 14 novembre 1997, la Ministre de la Justice a demandé à la COMMISSION DU DROIT DU CANADA de lui présenter " un rapport sur les méthodes de réparation des sévices physiques et sexuels commis contre des enfants dans les établissements ". La lettre de la Ministre constitue l’annexe 1 jointe au présent rapport provisoire.

Par ce renvoi fait en application de l’alinéa 5(1)b) de la Loi sur la Commission du droit du Canada, la Ministre a confié à la Commission du droit la tâche de présenter " aux gouvernements, et plus généralement aux Canadiens, la recension et l’évaluation comparative des méthodes possibles ".

Le renvoi ordonne à la Commission d’effectuer ses recherches " en consultant toutes les parties intéressées et groupes concernés ". Il spécifie aussi la nature et le contenu de l’étude envisagée par la Ministre :

L’étude de la Commission doit être analytique, générale et non normative. Elle doit comprendre l’examen des méthodes adoptées au Canada et ailleurs, mais ne doit pas être structurée de façon à prévenir ou à faire dérailler des processus en place ou envisagés, quels qu’ils soient. Plus spécifiquement, elle ne doit pas servir à déplacer, retarder ou remplacer de quelque façon que ce soit les mesures prises par le gouvernement à la suite des recommandations de la Commission royale sur les peuples autochtones. Ce renvoi à la Commission du droit ne crée pas non plus une tribune publique pour le redressement de problèmes généraux ou de cas d’espèce.

La Commission se voit investie par cette lettre de la Ministre de deux tâches distinctes :

    • En premier lieu, elle doit dresser la liste des cas de sévices en établissements qui ont été perpétrés jusqu’à maintenant ainsi que des mesures de redressement qui ont été prises. Les problèmes actuels et les enquêtes en cours échappent au cadre de cette recherche.

    • En second lieu, elle doit évaluer les points forts et points faibles des modèles de redressement possibles. Les modèles existants seront analysés à la lumière des valeurs qu’ils incarnent, de leurs risques inhérents et de leur efficacité une fois mis en oeuvre.

La lettre de la Ministre engage la Commission à soumettre au plus tard à la fin de janvier 1998 " un rapport initial qui définit les sujets d’étude et délimite les recherches et études nécessaires, ce qui s’entend aussi de la gamme des groupes qui doivent prendre part au processus ". Sur la base de la documentation et des rapports examinés, ce rapport provisoire présente l’évaluation faite par la Commission de ce qui se fait actuellement en la matière (voir l’annexe II). Il présente aussi les conclusions de la Commission sur la question de savoir dans quels cas l’évaluation de cette expérience et des recherches complémentaires sont indiquées, lesquelles conclusions peuvent évoluer au fil des travaux.

 

II. LE CADRE DE RECHERCHE

Chargée d’examiner les processus de redressement des sévices physiques et sexuels commis par le passé contre des enfants dans les établissements, la Commission s’est vue confrontée à un choix complexe d’orientations : faut-il envisager son mandat dans une perspective générale et, dans l’affirmative, quel cadre faut-il adopter?

Initialement, le renvoi peut s’inscrire dans le cadre de certaines questions fondamentales concernant les sévices.

  1. Quelles sont les causes et le contexte de ces sévices (étant donné les conditions propices aux sévices : l’accès, l’occasion et l’autorité) – pourquoi se produisent-ils? où se produisent-ils? qui les commet et les perpétue?

  2. Quelles en sont les conséquences – quels sont les effets physiques, psychologiques, affectifs et autres sur les victimes? quels en sont les effets sur la famille de la victime et sur la collectivité?

  3. Quels sont les facteurs qui influencent la guérison – l’âge quand les sévices ont été subis, la durée des sévices, le nombre d’auteurs, l’influence d’une intervention efficace, le laps de temps entre les sévices et leur divulgation ?

  4. Quelles sont les méthodes possibles de redressement des sévices passés – quels sont les mécanismes juridiques formels? de quels services les victimes ont-elles besoins? comment mesure-t-on le préjudice subi pour fixer la réparation en conséquence?

  5. Quelles sont les méthodes possibles de prévention de ces sévices – comment peut-on identifier les facteurs qui contribuent à éliminer ou à tempérer les sévices?

Il est possible que pour trouver une réponse informée et satisfaisante à la quatrième question (qui est expressément mentionnée dans le renvoi), il faut connaître la réponse aux trois premières questions. Ces éléments nous indiquent alors la possibilité de répondre à la cinquième question.

Une fois adoptée cette perspective générale, il faut, pour répondre à la première question, savoir quels facteurs contribuent effectivement aux sévices et ce, de quelle façon et dans quelle mesure. Ces études doivent porter sur chaque élément constitutif des sévices :

    • le lieu

    • l’auteur(les auteurs)

    • la(les) victime(s)

    • les autres parties se trouvant sur les lieux

    • les parties qui ne sont pas sur les lieux mais qui devraient ou pourraient protéger la victime ou le groupe de victimes.

Comme ces questions débordent du problèmes des sévices contre des enfants en établissements, la Commission pourrait étendre ses études aux points communs qu’on retrouve dans d’autres genres de sévices, dont :

    • les sévices commis dans les lieux autres que les établissements

    • les sévices contre des adultes

    • les sévices autres que physiques ou sexuels.

Pareille extension du champ d’étude pourrait permettre à la Commission de trouver des liens entre les sévices physiques et sexuels commis contre des enfants en établissements et d’autres genres de sévices. Elle pourrait aussi donner une idée des risques de sévices qui menacent d’autres groupes que les enfants. Notre société continue à compter sur les foyers collectifs pour assurer abri et soins pour des personnes autres que les enfants, et qui sont potentiellement aussi vulnérables : les personnes âgées, les personnes atteintes de maladie chronique, les malades mentaux, pour ne citer que ceux-là. Une étude élargie pourrait aussi jeter la lumière sur les sévices contre les enfants en dehors des établissements, par exemple au sein de leur propre famille ou de diverses organisations (par exemple les ligues de sport amateur et les organisations de bénévolat pour la jeunesse).

La Commission n’écarte pas la possibilité que le principal lieu où se commettent actuellement des sévices contre des enfants soit leur propre famille, et non les établissements. Si la société semble s’être rendu compte que les établissements sont rarement des lieux qui conviennent aux enfants, elle n’est pas prête à prendre conscience du danger de sévices chez soi et ailleurs, ni à y faire face. Les sévices tiennent au fond de l’abus de pouvoir, et le potentiel en existe presque partout. Les leçons tirées du contexte des sévices contre des enfants dans les établissements pourraient nous aider à prévenir et à réduire le même danger en d’autres lieux.

La Commission se rend compte de l’importance des études dans toutes ces directions, mais il s’agit là de vastes domaines généraux qui sont inextricablement liés à d’autres considérations. Il vaudrait donc mieux examiner ces questions plus générales dans le cadre des programmes de recherches distincts et plus étendus que la Commission pourrait formuler dans le cadre de son programme stratégique. Bien qu’une étude sur les processus de redressement des sévices commis contre des enfants dans les établissements soulève par la force des choses toute une variété de questions, la Commission estime qu’il vaut mieux satisfaire la demande de la Ministre en se concentrant sur les sujets spécifiques que soulève le renvoi.

 

III. LE REDRESSEMENT DES SÉVICES PASSÉS

La formulation et le choix des méthodes d’examen des sévices commis par le passé dans les établissements dépendent des résultats recherchés et de la gamme des méthodes disponibles. Si les résultats voulus par les victimes individuelles varient, certains thèmes communs dominent. Il ressort de ce qui se passe au Canada que ces victimes recherchent généralement certains ou l’ensemble des résultats suivants :

    • le sentiment de prise en charge
    • la guérison
    • la reconnaissance du préjudice qui leur a été fait
    • la dénonciation ou la punition des auteurs du préjudice
    • la responsabilité de l’établissement où le tort a été commis
    • le redressement du préjudice
    • le changement systémique pour prévenir les sévices à l’avenir
    • le sentiment de clôture (dans la mesure du possible).

Les principales méthodes tentées ou envisagées au Canada pour parvenir à ces résultats sont les suivantes :

    • poursuites pénales
    • actions civiles
    • enquêtes publiques
    • programmes de dédommagement administratif
    • autres processus de justice réparatrice et non répressive.

Bien que ces options ne soient pas mutuellement exclusives, certaines méthodes se traduisent naturellement par certains résultats. Par exemple, seule une poursuite pénale peut aboutir à une peine d’emprisonnement pour l’auteur des sévices. De même, l’excuse faite publiquement par l’organisme responsable de l’établissements où se sont produits les sévices peut être un élément de guérison nécessaire pour certaines victimes. L’efficacité de telle ou telle méthode ou d’une combinaison de différentes méthodes dépendra de diverses variables, dont la situation personnelle de la victime, le contexte des sévices, et la réaction d’autres entités (par exemple les organisations religieuses).

Il ressort d’une étude des méthodes de redressement des cas de sévices dans les établissements à travers le Canada que certains facteurs peuvent contribuer à leur succès. Bien que ces facteurs puissent être envisagés dans l’abstrait, leur présence et leur effet dans les cas d’espèce ne peuvent être connus qu’après que le processus soit amorcé. Voici les facteurs primordiaux à prendre en considération.

Le processus

Qui choisit et mène le processus? Les victimes ont-elles lancé le processus, ou ont-elles participé à leur formulation, est-ce l’État ou les responsables de l’établissements où se sont produits les sévices ou bien est-ce que le processus a été négocié par toutes les parties?

Les circonstances

Les sévices ont-ils été commis par une personne ou un petit groupe, où étaient-ils systémiques? S’agissait-il d’un incident isolé, ou se sont-ils poursuivis pendant des années ou des décennies? Quelles sont la nature et la gamme des sévices commis, par exemple sévices physiques, sexuels, psychologiques ou moraux? La durée des sévices et le nombre des victimes seront un facteur à prendre en considération pour savoir dans quelle mesure la méthode peut être spécifiquement adaptée à chaque individu.

Les victimes

Combien y a-t-il de victimes? Quels effets les sévices ont-ils sur les victimes? Quel est l’effet par ricochet sur les familles des victimes, leurs collectivités et la société? Les plaignants se sont-ils présentés en groupe ou à titre individuel? Les résultats recherchés par les victimes sont-ils les mêmes?

Pour pouvoir évaluer l’efficacité des diverses méthodes de redressement des sévices en établissements, il faut avoir une idée claire des résultats recherchés. Il se peut que les intéressés ne recherchent pas tous les mêmes résultats et n’accordent pas la même priorité aux résultats mêmes qu’ils recherchent tous. Par exemple, certains peuvent voir dans l’offre d’une réparation financière un aveu suffisant que les sévices commis à l’établissements étaient répréhensibles. Pour d’autres cependant, une excuse claire et sans équivoque, faite en public, peut être une contribution essentielle au processus de guérison. En dernière analyse, c’est d’abord la victime elle-même des sévices qui doit être convaincue que la méthode adoptée est équitable et que les résultats sont adaptés aux circonstances. À cette fin, il faut se poser au moins les questions suivantes.

    • Comment est-ce que les victimes comprennent-elles et vivent-elles leurs expériences ?
    • Quels sont les principaux résultats recherchés par les victimes?
    • Quels sont les principaux obstacles à la réalisation de ces résultats voulus?

    • Quelles méthodes peuvent contribuer le mieux à faciliter la réalisation de ces résultats?

    • Quelles parties doivent ou devraient prendre part à la formulation du redressement des sévices passés?

    • Quel degré d’expérience devons-nous tirer de l’application de telle ou telle méthode avant de pouvoir en mesurer l’efficacité?

IV. LES SUJETS DE RECHERCHE

Le renvoi permet à la Commission d’examiner toutes les méthodes possibles de redressement des sévices contre des enfants en établissements. Elle offre la possibilité de réfléchir sur toutes les facettes du redressement. Cet effort de réflexion consiste aussi à repenser les questions fondamentales suivantes : en quoi consiste un élément de preuve? en quoi consiste la preuve formelle? comment les dommages-intérêts sont-ils définis? comment sont-ils déterminés ou calculés? L’évaluation des points forts et points faibles des méthodes déjà mises en oeuvre peut mettre en relief les effets limités des voies de droit sur le comportement pathologique et la nécessité d’autres méthodes.

L’examen préliminaire de ce sujet amène la Commission à conclure que des recherches en profondeur s’imposent. Dans la mesure où il y a des études ou rapports sur ces questions, elle continuera à les assembler et à les évaluer. S’il y a des lacunes, elle entreprendra de les combler. Ce travail pourraient nécessiter l’identification de documents d’archives ou le rassemblement direct (à première main) des expériences des survivants des sévices contre les enfants placés en établissements et l’octroi des contrats de recherches nécessaires. Elle a relevé les thèmes essentiels suivants :

  1. Un inventaire détaillé des cas connus des sévices contre les enfants placés en établissements ; examen et catégorisation des méthodes d’aborder les sévices contre les enfants en établissements au Canada et plus spécifiquement, l’examen de la mesure dans laquelle chaque méthode englobe ce qui suit :
    • Poursuites pénales
    • Actions civiles
    • Enquêtes publiques
    • Négociation – médiation – règlement des conflits
    • Excuses (en public ou en privé, individuelles ou collectives)
    • Autres méthodes

  1. Nouvelles façons de concevoir le processus de redressement des sévices contre des enfants en établissements.
  2. Examen des méthodes de redressement des sévices commis dans les établissements ou sanctionnés par l’État par le passé dans d’autres pays, par exemple Argentine, Chili, Afrique du Sud, Rwanda et Australie.
  3. Examen et analyse des résultats recherchés par les victimes.
  4. Examen et analyse des résultats identifiés par les gouvernements ou les autres organismes responsables des établissements où se sont produits les sévices.
  5. Analyse, dans la mesure du possible, des points forts et points faibles de diverses méthodes pouvant être appliquées pour atteindre ces résultats, et des effets d’une combinaison de ces méthodes.
  6. Évaluation de la mesure dans laquelle les moyens choisis déterminent les résultats réalisés, ainsi que la mesure dans laquelle les résultats recherchés déterminent les moyens adoptés.
  7. Examen de nouvelles méthodes possibles de redressement des sévices commis par le passé contre des enfants dans les établissements, et évaluation de leurs mérites et risques relatifs.

Une fois terminé l’examen de ces questions ainsi que d’autres qui pourront se faire jour au fil de ses recherches, la Commission procédera à une vaste consultation des Canadiens au sujet de sa réponse au renvoi de la Ministre. La consultation est un élément fondamental des travaux de la Commission et une prescription explicite du renvoi, qui lui demande d’identifier "les groupes qui doivent prendre part au processus ". Il ressort des recherches initiales que ces groupes doivent comprendre au moins les catégories suivantes :

    • les victimes de sévices en établissements
    • les familles des victimes et leurs collectivités
    • ceux et celles qui ont traité ces victimes
    • ceux et celles qui ont représenté ces victimes pour demander réparation
    • les responsables des établissements où se sont produits les sévices
    • ceux et celles qui travaillent dans les institutions où se sont produits les sévices.

Avant d’entreprendre les consultations publiques et d’arrêter son plan de recherches, la Commission se mettra en rapport avec un petit nombre de gens représentatifs des groupes intéressés pour s’assurer qu’ils ne voient aucun problème majeur dans le cadre qu’elle assigne à ses études et que celui-ci ne souffre d’aucune lacune majeure.

 

CONCLUSION

Ce rapport provisoire repose sur la conviction que l’examen des méthodes de redressement des sévices commis contre des enfants dans les établissements ne se fait pas dans l’abstrait. Il faut absolument saisir les questions plus générales concernant les sévices – sévices contre des adultes, sévices en dehors du contexte des établissements – si nous tenons à réparer les sévices passés et à en prévenir la répétition.

La Commission commence tout juste à définir ses propres programmes de recherches spécifiques sous quatre thèmes généraux : rapports personnels, rapports sociaux, rapports économiques, rapports de gouvernance. D’autres sujets d’étude qui pourraient se dégager du renvoi s’inscriraient dans ces thèmes. Les sévices entendus au sens général du terme pourraient être examinés sous l’angle des rapports personnels (à quel moment des relations légitimes deviennent-elles abusives? qui sont les auteurs? qui sont les victimes?) ou des rapports sociaux (de quelle façon la société prend-elle soin des gens vulnérables? comment aide-t-elle les victimes? que fait-elle des auteurs des sévices?). Les sévices commis contre des enfants dans les lieux autres que les établissements pourraient être examinés sous l’angle des rapports personnels. Les sévices commis dans les établissements pourraient être examinés sous l’angle des rapports sociaux (pourquoi mettons-nous certains groupes en établissements?) ou des rapports de gouvernance (pourquoi créons-nous certains genres d’établissements? comment nous assurons-nous qu’ils remplissent leur mandat?).

Dans la mesure où les recherches effectuées par la Commission dans le cadre de ce renvoi dégagent d’autres directions d’études qui permettent de formuler une meilleure réponse à la Ministre, elle veillera à les intégrer dans son propre programme de recherches qui évolue avec le temps.


M. Roderick A. Macdonald
Président
COMMISSION DU DROIT DU CANADA
473, rue Albert, 11e étage
Édifice Trebla
Ottawa (ont.)
K1A 0H8

 

Monsieur le Président,

La présente donne suite à nos récentes discussions concernant un renvoi à la COMMISSION DU DROIT DU CANADA. Vous savez déjà que j’apprécie grandement le rôle de la COMMISSION DU DROIT DU CANADA en ce qui concerne la prestation de conseils indépendants sur la réforme du droit du Canada et ses effets, en vue de faire en sorte que le système juridique réponde aux nouveaux besoins de la société canadienne et de chaque membre de cette société.

Dans cet ordre d’idée, je demande à la Commission, conformément à l’al. 5(1)b) de la Loi sur la Commission du droit du Canada, de produire un rapport sur les méthodes de réparation des sévices physiques et sexuels contre les enfants placés en établissements.

Le gouvernement fédéral et bon nombre de gouvernements provinciaux et territoriaux sont aux prises avec la difficile question de répondre aux victimes de sévices physiques et sexuels infligés dans le passé dans des établissements dirigés, financés ou parrainés par le gouvernement. Les cas de ce genre soulèvent des questions délicates pour les victimes, leurs familles et leurs collectivités. Les gouvernements cherchent la meilleure façon de régler ces questions d’une manière responsable et juste. Il est évident que de longs procès civils et criminels ne s’avèrent pas la solution idéale dans ce contexte, mais les meilleures méthodes permettant de redresser les injustices, tout en offrant des réparations adéquates et en favorisant la réconciliation, la justice et la guérison, ne sont pas aussi évidentes.

La COMMISSION DU DROIT DU CANADA étant un organisme indépendant et multidisciplinaire chargé d’examiner les questions de droit et de justice, il convient de lui confier l’examen des méthodes de réparation des sévices contre les enfants placés en établissements. Elle peut présenter aux gouvernements, et plus généralement aux Canadiens, la recension et l’évaluation comparative des méthodes possibles.

Je demande à la Commission de mener ses recherches et ses études en consultant toutes les parties intéressées et groupes concernés. Cependant, la Commission ne doit pas aborder les processus qui touchent les peuples autochtones avant d’avoir bien consulté les chefs des organisations autochtones nationales sur la meilleure façon de faire participer les Autochtones au renvoi.

L’étude de la Commission doit être analytique, générale et non normative. Elle doit comprendre l’examen des méthodes adoptées au Canada et ailleurs, mais ne doit pas être structurée de façon à prévenir ou à faire dérailler des processus en place ou envisagés, quels qu’ils soient. Plus spécifiquement, elle ne doit pas servir à déplacer, retarder ou remplacer de quelque façon que ce soit les mesures prises par le gouvernement à la suite des recommandations de la Commission royale sur les peuples autochtones. Ce renvoi à la Commission du droit ne crée pas non plus une tribune publique pour le redressement de problèmes généraux ou de cas d’espèce.

Je suppose que la Commission pourrait mener ses travaux par étapes. Elle pourra soumettre au plus tard à la fin de janvier 1998 un rapport initial qui définit les sujets d’étude et délimite les recherches et études nécessaires, ce qui s’entend aussi de la gamme des groupes qui doivent prendre part au processus. Une analyse exhaustive de tous les aspects du problème pourra être soumis en juin 1998. Le rapport final exposant les diverses méthodes et leurs implications doit être soumis en novembre 1998.

J’attends avec impatience le rapport de la COMMISSION DU DROIT DU CANADA sur cette question complexe et importante.

Veuillez recevoir, Monsieur le Président, l’expression de mes sentiments les meilleurs.

A. Anne McLellan


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