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Page d'accueil À propos de nous Rapport Document de recherche 1998 Sévices contre les enfants placés en établissement

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Rapport

Document de recherche

Sévices contre les enfants placés en établissement

Besoins et attentes en matière de réparation pour les sévices commis contre les enfants placés dans les pensionnats pour enfants autochtones

Rapport final
soumis à
La Commission du droit du Canada
le 23 octobre 1998

par

Sage

 

Rhonda Claes
Deborah Clifton


* AVERTISSEMENT *


Ce rapport contient des descriptions détaillées de sévices commis contre des enfants. La lecture de ces descriptions peut avoir des effets très perturbateurs. Ce rapport ravivera vos souvenirs si vous faites partie des personnes qui ont été placées dans des pensionnats pour enfants autochtones. Nous vous recommandons de faire appel à quelqu’un de confiance avec qui vous pourrez parler lorsque vous le lirez.


TABLE DES MATIÈRES

1.Sommaire
2.Introduction
3.Objectifs
4.Vocabulaire utilisé
5.Méthodologie
6.Histoire des pensionnats pour enfants autochtones
6.1Chronologie
6.2Politiques et attitudes
7.L’expérience de la violence
7.1La vie avant le pensionnat pour enfants autochtones
7.2Les types de violence
5.8Évaluer l’étendue et la nature de la violence dans les pensionnats pour enfants autochtones
8.Les conséquences de la violence dans les pensionnats pour enfants autochtones
9.Conclusions
9.1Conclusions empiriques
9.2Tableaux et graphiques
9.3Conclusions qualitatives
1.Enquête publique
2.Dédommagement individuel
3.Action en justice
3.1Poursuite au criminel
3.2Poursuite au civil
5.8Solutions obtenues par la médiation et par la négociation
4.Excuses
5.Revitaliser la culture et développer les collectivités
5.1Guérison des collectivités
5.2Guérison individuelle
5.3Problèmes sociaux
5.4Langues
5.5Guérison intergénérationnelle
5.6Justice réparatrice
5.7Changement structurel
5.8Commentaires sur la guérison et sur le développement des collectivités.
10.Recommandations
10.1Aperçu des recommandations formulées à ce jour
10.2Recommandations de ce rapport
2.1Recommandations URGENTES
2.2Recommandations générales
Annexes
1.Recommandations formulées antérieurement
2.Pensionnats pour enfants autochtones identifiés, par province
3.Témoignages des victimes devant la Commission royale d’enquête sur les peuples autochtones — Répartition des thèmes et des besoins
4.Un article intéressant
5.Le programme de guérison de l’expérience des pensionnats pour enfants autochtones de four worlds
6.Lettre ouverte de Gilbert Oskaboose, auteur
7.Options et exemples : programmes pour le changement


1. Sommaire exécutif

Les pensionnats pour enfants autochtones ont été un aspect de la colonisation qui a eu un effet particulièrement destructeur sur les collectivités, sur les familles et sur les particuliers métis, inuit et des Premières nations. Les politiques relatives à ces pensionnats reconnaissaient que la langue et les liens familiaux, ces fondements de la culture, de la spiritualité et de l’histoire, étaient des éléments primordiaux pour assurer la pérennité de peuples autochtones distincts. Jusqu’à il y a très peu de temps, les gouvernements et les représentants des Églises ont manifesté clairement leur intention d’éliminer ces éléments.

Plusieurs générations des peuples autochtones ont été placées dans des pensionnats pour enfants autochtones au cours des 150 dernières années. Plusieurs enfants ont été victimes de violence physique et de sévices sexuels atroces, qui ont parfois duré des années. Plusieurs en sont morts. Un plus grand nombre encore d’enfants ont subi un degré standard de brutalité, et ce, dans un contexte caractérisé par le travail forcé, par une alimentation insuffisante et déficiente, par une discipline sévère, par une attention médicale réduite, sinon absente, par l’absence de liens avec la famille et avec la collectivité et par un manque total d’attention sur le plan émotionnel. Seule une petite minorité a eu accès à l’instruction — théorique ou professionnelle — dans le cadre de l’expérience des pensionnats pour enfants autochtones. Tous les élèves dépendaient d’un système qui reposait sur la croyance absolue en la supériorité morale et intellectuelle de la culture blanche et sur la diffamation de tous les aspects de la vie des Autochtones.

C’est la reconnaissance longtemps attendue du fait que cette expérience a eu des effets profonds, et profondément négatifs, qui a présidé à la production de ce rapport. Cette reconnaissance n’est arrivée que parce que les victimes des pensionnats elles-mêmes commencent à se présenter, en grand nombre, pour demander justice.

Nous ne croyons pas seulement à la réparation pour les effets produits par les pensionnats pour enfants autochtones, que nous cernerons dans la recherche qui porte sur les torts causés aux personnes et sur les tentatives d’évaluer les recours possibles. Cette façon de voir sortirait l’injustice de son contexte, qui, dans le cas de ces pensionnats, de toute évidence, en a été un de combat incessant pour faire disparaître les modes de vie autochtones. Nous nous sommes concentrés amplement sur les cas particuliers, principalement parce que nous voulions démontrer qu’une telle recherche n’aide pas et ne peut permettre d’aider à trouver des " réponses " à la question de savoir ce qu’il faut faire. Il n’existe pas de belles petites réponses toutes faites pour les problèmes humains et sociaux de grande ampleur.

Nous espérons avoir présenté un portrait clair de ce que sont les problèmes, parce qu’un portrait bien défini permet d’établir les fondements d’une action. La nécessité d’une action importante qui visera à répondre aux attentes des anciens élèves des pensionnats pour enfants autochtones est indéniable. Nos recommandations, dont aucune, incidemment, n’a pas déjà été formulée ailleurs, indiquent certaines des nombreuses actions qui permettraient de reconnaître et, peut-être dans une certaine mesure, d’atténuer un immense malheur et une injustice qui ont trop duré.

2. Introduction

En novembre 1997, la ministre de la Justice a demandé à la Commission du droit du Canada de lui préparer un rapport sur les mécanismes à employer pour s’occuper des sévices physiques et sexuels commis contre des enfants dans les pensionnats pour enfants autochtones. Reconnaissant le contexte culturel et historique particulier qui a entouré ces pensionnats et l’ampleur du préjudice dont ces derniers sont la cause, la Commission a décidé d’examiner les expériences des victimes de ces établissements séparément des expériences des victimes de sévices dans d’autres types d’institutions.

En conséquence, ce rapport porte exclusivement sur les sévices subis par les enfants métis, inuit et des Premières nations dans les pensionnats ainsi que sur les façons d’accorder réparation pour ces sévices.

L’étendue de la recherche était très large : l’étude des causes des sévices commis, des types de préjudices causés, des moyens éventuels d’apporter réparation et des stratégies de prévention. La Commission du droit du Canada a signalé que les sévices peuvent prendre plusieurs formes autres que la violence physique et sexuelle. Elle a donc demandé de tenir compte de toutes les formes de préjudices, incluant les torts sur les plans émotionnel, culturel et psychologique.

Compte tenu que plus de 100 pensionnats pour enfants autochtones ont été en activité à différentes périodes au Canada, et qu’entre 105 000 et 150 000 personnes encore en vie ont vécu dans ces établissements, un examen en profondeur de toutes les situations qu’ont connues ces personnes n’était ni notre intention ni possible dans ce document. Un historique plus complet de ces établissements, particulièrement des circonstances qui ont prévalu à la façon dont les enfants ont été amenés à y séjourner, qui a varié selon les écoles, les époques, les groupes culturels, les nations, les familles et les enfants pris individuellement, pourrait permettre une meilleure compréhension des effets et des sévices qui ont suivi. Nous ne nous sommes pas étendus sur le fait que plusieurs personnes ont connu des expériences positives dans les pensionnats. Il n’était pas dans notre intention de le taire ni d’en faire fi. Seulement, cet aspect n’était pas pertinent à notre recherche, qui porte sur les sévices qui ont été commis sur une grande échelle.

Nous avons entrepris notre tâche en nous fondant sur la prémisse qu’il existait déjà une documentation suffisante qui nous permettrait d’avoir une bonne connaissance des besoins et des attentes des victimes, ce que l’avenir allait confirmer. L’obligation de se servir de cette documentation avant d’entreprendre toute autre recherche primaire est soulignée dans un commentaire final de l’étude Breaking the Silence produite par l’Assemblée des Premières Nations, en 1994, sur l’effet des pensionnats pour enfants autochtones et sur la guérison :

" Mon histoire est un cadeau. Si je vous fais un présent et que vous l’acceptez, vous n’irez pas aussitôt le jeter au panier. Vous allez en faire quelque chose. "

Des milliers de victimes ont fait cadeau de leurs propres expériences, et de celles de personnes qui n’ont pas vécu assez longtemps pour parler en leur nom propre. Cette présentation et cette analyse sont une étape de plus dans la démarche visant à faire quelque chose pour arriver à comprendre et pour réagir à une intervention qui a causé des traumatismes qui ont largement déterminé et façonné la situation actuelle des peuples autochtones. Au cours des quatre mois qu’a durés la recherche, nous avons cherché à offrir un aperçu des principaux enjeux des victimes des pensionnats pour enfants autochtones. Nous espérons que le rapport contribuera à la démarche de réconciliation et de résolution de l’héritage toujours en souffrance et profondément troublant de ces pensionnats au Canada.

3. Objectifs

Ce document vise à passer en revue les besoins des victimes de sévices dans les pensionnats pour enfants autochtones et les résultats qu’elles attendent de la démarche de réparation. Notre but est d’obtenir un portrait aussi complet et exact que possible des besoins et des attentes de ces victimes.

4. Vocabulaire utilisé

Nous utilisons les termes suivants dans le rapport :

" Sévices ou violence " s’entendent d’une blessure physique, émotionnelle, spirituelle ou mentale subie par un enfant, y compris la violence verbale et sexuelle, et comprend toute commission ou omission d’un acte qui cause un préjudice ou menace de causer un préjudice à un enfant par la personne qui a la charge de l’enfant, ou par d’autres personnes, quand l’adulte en charge sait ou devrait savoir qu’il y a risque de préjudice. Il est important d’inclure ici le concept de violence spirituelle, que la culture dominante tend à oublier. La violence spirituelle se définit comme étant des comportements et des situations qui nient ou qui minent l’identité, les valeurs et les croyances d’un enfant. Cette forme de violence comprend, par exemple, le fait d’empêcher une personne de s’exprimer dans sa langue ou de prier à sa manière ou le fait de ridiculiser son mode de vie ou de susciter un sentiment de honte à l’égard de ce mode de vie. La législation de l’Ontario précise encore davantage ce qu’est la violence.

Dans un contexte institutionnel ou systémique, la " violence " s’entend des violations des droits de la personne, y compris les préjudices de nature physique, sexuelle et mentale, le génocide, la torture, la disparition, la détention arbitraire ou prolongée, les pratiques d’esclavage ou s’apparentant à l’esclavage, la répression civile et la discrimination systémique.

Le mot " victime " revient continuellement dans ce document. Il décrit les personnes qui, individuellement ou collectivement, ont souffert de préjudices, y compris des dommages d’ordre physique et mental, de la violence psychologique, des pertes économiques ou une restriction de leurs droits en raison de la violence exercée à leur endroit. Il découle de cette définition que les " victimes " ne sont pas seulement les personnes qui ont connu la violence directement, mais aussi leurs parents, leurs personnes à charge, les personnes qu’elles aiment et leurs collectivités.

Dans ce document, nous employons le mot " victime " pour des raisons de pertinence et de brièveté, mais son usage est problématique pour deux raisons. Les traumatismes répétés et prolongés qui surviennent durant l’enfance, et particulièrement la violence sexuelle, font partie de la vie de l’enfant et, d’une façon ou de l’autre, en conditionnent les croyances, les sentiments, les comportements et la sexualité. Définir une personne comme étant une " victime " risque de minimiser le dysfonctionnement intérieur qui peut se produire à la suite de la durée de la période durant laquelle la violence a été subie et de l’étendue de cette violence. Deuxièmement, ce mot rapporte trop l’identité d’une personne à son rôle de victime d’un traumatisme subi dans son enfance, ce qui diminue l’importance de cet aspect dans le cas d’une personne qui, actuellement, fonctionne de façon normale et productive. Il perpétue l’association à l’histoire de la violence, que plusieurs désirent laisser derrière eux; c’est pourquoi, par exemple, le document du Conseil de la tribu Nuu-chah-nulth peut se traduire ainsi : Après l’état de victime.

Le nom propre " Inuit " et l’adjectif " inuit " s’entendent du " peuple " de l’Inuktitut, c’est-à-dire les descendants des gens qui ont migré par la mer de Béring il y a quelque 1 000 à 4 500 ans et qui ont peuplé l’Arctique canadien.

Le nom propre " Métis " et l’adjectif " métis " définissent les gens qui s’identifient eux-mêmes comme étant des membres de ce groupe culturel distinct. À l’origine, ils étaient les descendants de pères d’origine européenne et de mères d’origine indienne. De nos jours, l’inverse est également vrai. Sans statut ni traités, exclus de la Loi sur les Indiens, les Métis sont également un cas unique sur le plan juridique.

L’expression " peuple autochtone " s’entend des " peuples qui habitent ou vivent sur un territoire depuis les temps anciens ou qui y étaient avant l’arrivée des colonisateurs ". Elle décrit les descendants des peuples autochtones qui, avant l’époque coloniale, habitaient le territoire de ce qui est désormais connu comme étant le Canada. L’expression " Première nation " se rapporte à une collectivité qui s’identifie elle-même comme étant autochtone et, donc, aux personnes qui sont membres de cette collectivité. Ce ne sont pas tous les peuples autochtones qui s’identifient comme étant une Première nation : par exemple, les Inuits, les Dénés et les Métis ne se définissent pas ainsi.

Bien que certaines personnes et certains groupes conservent ou réclament l’appellation " Indien " parce qu’ils y trouvent une connotation positive, ce mot demeure offensant pour plusieurs. Ailleurs que dans les témoignages où les Autochtones se définissent eux-mêmes comme des Indiens, nous n’utilisons ce mot que dans des contextes particuliers, quand il reflète un vocabulaire ou des attitudes historiques.




Je m’appelle Aurora. Je viens d’une petite bande qui vit dans les Territoires du Nord-Ouest. J’ai quarante-six ans. Je suis mariée à Charlie. Nous avons six enfants. J’ai une fille qui vient de mourir d’un cancer. Elle avait vingt-six ans. Je ne suis pas allée à ses funérailles. Je ne pouvais pas, parce que je ne suis pas capable d’entrer dans une église. Je ne peux entrer dans une église depuis des années. Il y a eu beaucoup de décès dans ma famille. Je ne suis jamais allée à leurs funérailles non plus. Je ne suis simplement pas capable. Certains Anciens de notre collectivité disent que je vais aller en enfer. Peut-être, mais je ne le pense pas. Quand j’avais six ans, j’ai été placée dans un pensionnat.



5. Méthodologie

En 1998, à la mi-juin, nous avons entrepris de colliger la documentation relative aux expériences et aux points de vue des victimes des pensionnats . Ayant établi qu’une grande part de cette documentation n’avait pas été l’objet d’une large publication ou diffusion, nous avons écrit à 273 personnes et organisations partout au Canada. Une lettre d’introduction expliquait qu’il ne nous apparaissait pas pertinent de conduire une recherche primaire directement auprès des victimes, alors que les points de vue de plusieurs d’entre elles devaient déjà être consignés.

Nous avons envoyé notre demande relative à de tels renseignements déjà consignés à :

  • 44 publications et médias autochtones (y compris cinq journaux nordiques largement diffusés parmi les Autochtones);
  • 103 centres d’accueil qui, à titre de sources importantes de renseignements et de références au sujet des collectivités, à notre avis, seraient au courant des activités et des initiatives en matière de pensionnats pour enfants autochtones dans leur région;
  • 136 auteurs, chercheurs, avocats, membres d’organisations des Premières nations ainsi que représentants de la GRC et d’Églises qui s’occupent de questions relatives à ces pensionnats.

Nous faisons état de la documentation que nous avons recueillie dans la bibliographie.

Dans le cadre de nos efforts pour en arriver à un portrait aussi complet et aussi exact que possible des besoins et des attentes des victimes de sévices commis dans les pensionnats, nous avons examiné plus de 8 000 pages touchant ce sujet, y compris des rapports de conférences et de réunions scolaires, des documents de recherche, des descriptions et des propositions de programmes, des dossiers de journaux, le rapport de la Commission royale d’enquête et des livres contemporains qui portent sur des questions relatives aux pensionnats pour enfants autochtones d’un point de vue anthropologique, sociologique et politique. La grande partie de la documentation au sujet des pensionnats se fonde ou est tirée de l’expérience et de l’analyse de première main qui proviennent des victimes de ce système.

En effectuant la recherche de ces documents, il était inévitable que nous ayons à parler directement à des victimes. Nous avons également parlé à des personnes qui ont passé leur vie à lutter contre les effets de leur passage dans des pensionnats : des enfants et des petits-enfants de victimes, des directeurs de programmes, des conseillers, des chercheurs et des auteurs. En plus de nous remettre ou de nous orienter vers les documents que nous cherchions, ces personnes nous ont fait part de leurs histoires, de leurs perceptions et de leurs compréhensions respectives, que nous avons consignées. Plusieurs personnes nous ont également souligné que, de manière plutôt pertinente, une grande part du dialogue et de l’activité qui ont lieu en réaction aux sévices commis dans les pensionnats pour enfants autochtones ne font l’objet d’aucune consignation; ces descriptions et ces explications de première main sont souvent la seule source de renseignements relativement aux initiatives nouvelles ou courantes.

Tout cela constituait un défi à relever du point de vue méthodologique : comment synthétiser autant de types différents de données au sujet de questions si nombreuses, et pourtant reliées. Contrairement à l’analyse fondée sur la théorie, qui examine les données a priori, en fonction de concepts préalables tels que ceux qu’on utilise pour rédiger un questionnaire, cette démarche exigeait que nous examinions les renseignements d’abord, pour établir ensuite les types de réponses. L’analyse fondée sur les données s’effectue d’abord en fonction des données mêmes, a posteriori, et consiste en un examen des événements qui se répètent ou, dans ce cas-ci, des questions ou des thèmes.

Dans le cours de la lecture des livres et de l’écoute des témoignages, nous avons retenu les expressions de " besoins " ou " d’attentes " en matière d’intervention ou de réparation relativement aux sévices commis dans les pensionnats : en somme, des témoignages qui mentionnaient " ce que les victimes désiraient ". Nous avons également relevé les expressions de ce que les victimes considéraient comme des faiblesses ou des insuffisances dans la situation actuelle. Nous avons aussi souligné les recommandations, les solutions proposées, des stratégies et des modèles de changement au regard des conséquences du passage dans les pensionnats.

Une fois établis les principaux thèmes qui décrivent les besoins et les attentes en ce qui concerne les réparations définies par les victimes, nous avons testé plusieurs moyens de les inscrire et de les calculer dans une base de données. Plusieurs interlocuteurs ont abordé des sujets de manière holistique, c’est-à-dire en les incorporant dans un important contexte d’ensemble : les catégories rigides établies préalablement pour les bases de données classiques ne pouvaient donc pas s’appliquer ou n’étaient pas pertinentes. Le fait de sortir des citations de leur contexte pose un problème pratique. De plus, quand on cite les descriptions de vie et les opinions, notamment en les traitant à des fins statistiques, l’on soulève des questions d’ordre éthique. Nous avons cherché à établir un équilibre entre le respect des opinions et des descriptions des gens et la nécessité d’en effectuer une certaine analyse en vue de résumer les besoins et de faciliter les actions futures de manière efficace.

Pour saisir comment les besoins des enfants victimes des sévices commis dans les pensionnats ont pu changer au fil du temps ou selon le contexte dans lequel ils ont pu être exprimés (et aussi, en partie, pour apporter de la substance et une crédibilité théorique aux affirmations exprimées de manière narrative), nous avons choisi trois sources principales pour le calculateur et nous avons étudié différentes déclarations de victimes plus en profondeur. Nous nous sommes concentrés sur les sources qui présentaient les points de vue du plus grand nombre de personnes, afin d’obtenir la diversité et l’éventail les plus grands possibles de réponses. Cette manière de faire nous a amenés à éliminer plusieurs études et documents examinés dans le cadre de l’examen de la littérature et qui se fondaient sur l’expérience de 3 à 15 participants. Nous avons mis de côté le livre sur Knockwood, qui rend compte des souvenirs et des points de vue de 26 personnes, en raison de la difficulté que nous avions à suivre et à attribuer les descriptions et les expériences dans les fragments qui y étaient rapportés.

Nous avons décidé de porter notre attention sur The Mush Hole, car il contient des témoignages verbaux longs et spontanés de 55 personnes qui ont eu, en apparence, des expériences variées. Les travaux de la Commission royale sur les peuples autochtones contiennent également la transcription de témoignages, et ce, dans un contexte qui reconnaît et accepte clairement que des injustices ont été commises à l’égard des peuples autochtones. Le livre Indian Residential Schools et la bande vidéo " Beyond Survival ", que le Conseil tribal Nuu-chah-nulth a produits, sont d’une évocation particulièrement saisissante dans leur présentation des points de vue que les victimes ont exprimés dans leurs propres mots. Ces travaux, le Conseil tribal les a entrepris dans un contexte communautaire et de guérison où il existait des liens entre les participants, où le processus était important et où il y avait eu déjà beaucoup de discussions sur les questions relatives aux pensionnats pour enfants autochtones. Enfin, nous avons passé en revue les journaux des Premières nations, dans lesquels plusieurs personnes ont exprimé leurs points de vue, habituellement avec une certaine réflexion et une certaine analyse. Tout en présentant l’expression de besoins et d’attentes dans des milieux et dans des contextes différents, ces quatre sources offrent des points de vue exprimés à différents moments au cours des dix dernières années.

Bien que cette analyse soit intéressante et indique certaines tendances utiles, nous rappelons aux lecteurs que " l’expérience personnelle n’atteint pas une plus grande vérité lorsqu’on y ajoute des chiffres. " En plus de la banalisation que peut entraîner le fait de réduire une expérience et sa signification à des chiffres, la recherche sans fin de moyens d’établir, de caractériser et de quantifier les dommages peut être une forme de tergiversation gouvernementale. Une telle recherche peut également tendre à " (légitimer) la résolution d’enjeux moraux par des moyens empiriques. "

Étant donné que le mérite d’un tel exercice de calcul est limité — les chiffres n’ont aucune valeur absolue en soi — la plupart des témoignages que nous présentons ici le sont sous forme narrative, quand nous trouvons qu’ils sont mieux représentés ainsi sur un plan éthique et qu’ils sont tout aussi convaincants. Certaines des affirmations et des observations les plus poignantes proviennent de conversations non officielles avec des personnes et méritent qu’on les rapporte malgré l’anonymat requis. Bien que la forme narrative puisse être considérée comme expérimentale en sciences sociales, elle est la norme bien établie au sein de plusieurs cultures, à titre de méthode principale d’enseignement et d’apprentissage.

Nos observations et nos recommandations se fondent sur la qualité et sur la quantité des renseignements. Elles reprennent également des recommandations effectuées antérieurement par plusieurs groupes et personnes. Nous avons joint un certain nombre de ces recommandations antérieures dans leur intégrité en annexe, dans l’espoir qu’ainsi regroupées, leurs similarités, leur fréquence et leur répétition des besoins exprimés par tant de personnes et d’organismes justifient un appel à l’action représentatif et sain à juste titre.




Je suis allé au pensionnat de Fort Resolution. Nous étions nombreux à prendre l’autobus pour nous y rendre. Je me souviens que mes sœurs pleuraient lorsque nous sommes partis. Je crois que mes frères étaient sur le point de pleurer, mais ils ne l’ont pas fait. Leurs visages étaient très tristes.

Avant de partir, ma mère nous a demandé d’être gentils et de faire tout ce qu’on nous demanderait de faire. Ma sœur, qui est de deux ans plus âgée que moi, m’a dit que les religieuses et les religieux étaient toujours stricts et méchants. Elle m’a dit que nous devions désormais parler anglais, sauf lors de la messe, où il fallait parler latin. Ma sœur m’a dit que parler dogrib entraînait une raclée. Que je devais rester tranquille et obéir à tous si je ne voulais pas me faire frapper. Elle m’a dit que je ne pouvais lui parler à elle-même que lorsque j’étais certain que personne ne nous surveillait, sinon nous aurions droit tous les deux à une raclée.



6. Histoire des pensionnats pour enfants autochtones

Il est essentiel d’établir un historique pour comprendre la portée et l’étendue des effets des pensionnats pour enfants autochtones, la nature des sévices commis et la façon dont ils ont été commis et se sont poursuivis sans qu’ils n’éveillent l’attention. La connaissance des attitudes et des politiques qui ont prévalu à la création de ces écoles est primordiale à la compréhension des griefs de leurs anciens élèves, car leurs philosophies ont pavé la voie à ce que plusieurs perçoivent comme les sévices les plus sérieux et les plus dommageables commis dans le cadre du système des pensionnats.

6.1 Chronologie de l’établissement des pensionnats pour enfants autochtones

La chronologie qui suit est tirée de nombreuses sources telles que Fournier et Crey, Thompson, Miller, l’Assemblée des Premières Nations, La Fondation pour la guérison des Autochtones, la Commission royale sur les peuples autochtones, Haig-Brown et d’autres; les renseignements varient selon les sources. Une liste de toutes les écoles retracées et de leurs dates respectives de fonctionnement apparaît en annexe 2.

1620 Les franciscains ouvrent le premier pensionnat pour les enfants autochtones de la Nouvelle-France, mais le ferment en 1629 en raison du manque d’élèves. Les jésuites reprennent l’expérience en rapprochant les écoles des villages des Autochtones, mais ne réussissent pas non plus à attirer des élèves.

1668 Les ursulines fondent un pensionnat pour les filles, mais les résultats les découragent elles aussi.

Années 1800 Différentes Églises établissent des écoles industrielles indiennes. La fréquentation n’est pas obligatoire.

Années 1820 Les homesteaders demandent de neutraliser les Indiens de quelque façon ou de les éloigner de leurs terres.

1830 La compétence sur les affaires indiennes devient une question civile, lorsqu’il devient clair qu’on n’a plus besoin des Indiens en tant qu’alliés militaires.

1845 Un rapport gouvernemental présenté à l’assemblée législative du Haut-Canada recommande d’établir des pensionnats pour les Indiens.

1846 Le gouvernement s’engage à établir des pensionnats pour les Indiens. Les grandes Églises administrent des écoles au Manitoba, en Alberta et en Colombie-Britannique.

1847 Le rapport Ryerson appuie la création d’écoles industrielles.

1857 Il y a établissement de pensionnats à Metakatla (1857) et à Mission (1861 ? 1863 ?).

1867 L’Acte de l’Amérique du nord britannique accorde la responsabilité de l’éducation des Indiens au gouvernement fédéral. Il y a établissement d’externats scolaires pour les Indiens en vertu des dispositions du traité de 1850.

1876 L’Acte des Sauvages établit que tous les Autochtones sont les pupilles (enfants) du gouvernement.

1879 Le rapport Davin recommande l’établissement d’écoles industrielles en tant que moyen le plus efficace de " civiliser " la population indienne. Différentes missions administrent déjà des pensionnats.

1880 Il y a 11 écoles en activité.

1889 Il y a création du ministère des Affaires indiennes, qui entraîne la nomination d’agents des sauvages dans l’ensemble du pays. L’élimination des externats débute. Il y a des allégations de violence physique et sexuelle à l’école de la Terre de Rupert, à Selkirk, suivies d’admission. Le principal reçoit une réprimande.

1892 Un décret réglemente le fonctionnement des pensionnats pour enfants autochtones. Il y a formation d’un partenariat officiel entre le gouvernement et les Églises.

1896 Il y a 45 écoles en activité : en Colombie-Britannique, 11 écoles accueillent 1 500 élèves. Les écoles industrielles, généralement situées loin des collectivités autochtones, s’adressent aux jeunes de 14 à 18 ans et sont au nombre de 24. De plus jeunes les fréquentent. On y forme les filles aux tâches domestiques telles que la couture, la blanchisserie, le nettoyage et la cuisine; les garçons, à l’agriculture, à la menuiserie, à la cordonnerie et au métier de forgeron. Il y a établissement de pensionnats pour les enfants autochtones plus jeunes : ceux-ci sont généralement plus petits et situés dans ou près des collectivités autochtones. Les écoles industrielles et les pensionnats mettent grandement l’accent sur l’enseignement de la religion et ne laissent aux matières théoriques que des demi-journées.

1900 Il y a 39 écoles industrielles en activité. Leur manque de succès suscite la préoccupation générale. Les élèves ne s’adaptent pas à la société blanche et, à leur retour, ne réussissent pas non plus dans leurs collectivités d’origine. La population autochtone qui diminue de façon importante (en raison de maladies et de la famine) et l’immigration qui répond aux besoins du Canada en matière de main-d’œuvre remettent la politique de formation professionnelle en question.

1904 Les pensionnats affichent un déficit de 50 000 $.

1907 Le rapport Bryce sur les conditions de santé épouvantables dans les écoles.

1909 Il y a environ 88 écoles en activité.

1910 Un changement de politique tend à retourner les élèves dans les réserves avec le minimum de compétences de base, en se fondant sur l’isolement des Autochtones et sur la ségrégation à leur égard. Les objectifs de formation professionnelle et industrielle changent en faveur des tâches et des compétences rurales pratiques. Certaines écoles industrielles ferment, et l’on en vient à considérer la plupart comme des " pensionnats pour enfants autochtones ". Le modèle des écoles industrielles est abandonné complètement en 1922.

1912 Il y a 3 904 élèves dans les pensionnats.

1920 L’instruction devient obligatoire pour les enfants de 7 à 15 ans. La fréquentation des pensionnats augmente.

1930 Les jeunes de 7 à 15 ans se retrouvent dans des pensionnats dans une proportion de 75 % et les trois quarts d’entre eux fréquentent les classes de la première à la troisième année; seulement 3 % se rendent plus loin que la sixième année.

1931 Il y a plus de 80 écoles en activité au Canada.

1932 La fréquentation scolaire se chiffre à 8 213. Environ 250 élèves fréquentent les classes de la neuvième à la treizième année.

1938 Les subventions du gouvernement fédéral aux écoles, par personne, sont de 180 $. Aux États-Unis, elles sont de 294 $ à 642 $.

1945 La fréquentation se chiffre à 9 149 élèves. Il y a à peine plus de 100 d’entre eux dans une classe supérieure à la huitième année, et aucun n’est rendu plus loin que la neuvième année.

1946-1948 Un comité spécial mixte du Sénat et de la Chambre des communes recommande que l’instruction des enfants indiens se fasse dans les écoles régulières.

Années 1940 et 1950 L’on commence à amener les enfants inuit dans les pensionnats et dans les foyers.

1950 Dans une proportion supérieure à 40 %, le personnel des pensionnats pour enfants autochtones n’a aucune formation professionnelle.

1951 La Loi sur les Indiens évolue de la ségrégation vers l’intégration. Certains élèves commencent à fréquenter les externats laïques là où ils sont accessibles. Plusieurs élèves des collectivités plus petites ou éloignées demeurent dans les pensionnats.

Années 1950 Il y a introduction d’un programme d’études standard. L’on met fin au programme officiel des demi-journées de travail.

1957 Les subventions par personne font place au financement contrôlé des coûts.

Années 1960 Environ 10 000 élèves fréquentent 60 écoles.

1969 Les partenariats avec les Églises prennent fin. Le gouvernement fédéral prend le contrôle direct des pensionnats. Les élèves autochtones se retrouvent dans les externats provinciaux dans une proportion de 60 %.

Quelque 7 740 élèves se répartissent dans 52 pensionnats.

1970 Blue Quills IRS est la première école sous le contrôle des Premières nations.

1972 La Fraternité des Indiens du Canada demande que le gouvernement fédéral mette fin au contrôle qu’il exerce sur le système scolaire des Autochtones.

1979 Il reste 1 899 élèves dans 12 pensionnats.

1983 ou 1984 Le dernier pensionnat pour enfants autochtones, celui de New Christie, à Tofino, Colombie-Britannique, ferme ses portes. Les foyers continuent leurs activités.

 

Du milieu des années 1800 jusqu’en 1970, jusqu’à un tiers de tous les enfants autochtones ont été confinés dans les pensionnats, et plusieurs d’entre eux y ont passé la majorité de leur enfance. Lorsqu’on examine les chiffres de la fréquentation scolaire, il faut observer que plusieurs enfants métis ont fréquenté les écoles sans y être inscrits. Le financement fédéral n’était appliqué que dans le cas des Indiens assujettis à un traité, de sorte que les Églises acceptaient souvent les enfants métis à charge de façon clandestine et, souvent, les retenaient comme manœuvres sans leur offrir de repas, mais seulement des reliefs de table.

6.2 Politiques et attitudes

L’évolution des pensionnats pour enfants autochtones s’est effectuée en quatre phases distinctes, qui ont reflété les changements de la politique gouvernementale en ce qui concerne la manière de s’occuper des peuples autochtones. Nous pouvons caractériser ces phases de la manière suivante :

Années 1840 à 1910 : L’assimilation. L’objectif était de faire en sorte qu’on ne puisse plus distinguer les Indiens des Européens.

1910 à 1951 : La ségrégation. Comme l’assimilation ne semblait pas pouvoir se réaliser, il fallait instruire les Autochtones en fonction de la vie dans leurs collectivités et les limiter à vivre dans ces dernières.

1951 à 1970 : L’intégration. Il faudrait absorber les Autochtones dans les institutions et dans la société de la majorité.

1970 jusqu’à

aujourd’hui : Il y a une tendance de plus en plus forte à l’autodétermination et au contrôle par les Autochtones (à l’intérieur de certains paramètres).

Dès le premier contact, le but des missionnaires européens était clair : il s’agissait de convertir les Autochtones à l’une ou l’autre forme du christianisme, selon les Églises auxquelles ils appartenaient. Pour y arriver, ils devaient s’occuper de l’éducation des " sauvages " afin qu’ils puissent comprendre ce que la conversion signifiait, mais aussi qu’ils puissent atteindre un degré de civilisation suffisant pour apprécier les valeurs européennes et s’assimiler au mode de vie des Européens. Le gouvernement et, jusqu’à récemment, la société dans son ensemble ont appuyé cet objectif.

Le fondateur des oblats, Eugène de Mazenod a écrit qu’il fallait prendre tous les moyens pour amener les tribus nomades à abandonner leur vie migratrice et à se construire des maisons, à cultiver les champs et à pratiquer les métiers élémentaires de la civilisation. Grant, Haig-Brown et d’autres ont documenté que " la destruction du lien qu’avaient les enfants avec leur culture ancestrale et leur assimilation à la société dominante étaient les objectifs principaux " de la politique d’éducation des Indiens et que les missionnaires acceptaient cette politique.

M. Egerton Ryerson, le superintendant principal de l’éducation du Haut-Canada, a grandement déterminé la nature et les politiques de l’éducation offerte aux enfants indiens. Son rapport à l’assemblée législative du Haut-Canada, en 1947, mentionnait ceci :

" Leur éducation ne doit pas simplement se limiter à former leur esprit, mais elle doit aussi leur apprendre à abandonner les habitudes et les sentiments de leurs ancêtres et à acquérir la langue, les arts et les coutumes de la civilisation. " L’auteure Agnes Grant remarque que ce document a fait de l’oppression culturelle une partie intégrante de la politique gouvernementale et des écoles de mission, et ce, durant une longue période.

Dans son rapport d’une recherche détaillée relativement à deux pensionnats de l’Ontario, Elizabeth Graham écrit :

" Les pensionnats séparent les enfants des parents, mais, dans les pensionnats pour enfants autochtones, l’on a ajouté à ce mécanisme l’objectif d’éradiquer " l’indianité ". Les écoles ont éradiqué la culture des Autochtones en arrachant les enfants à leurs foyers, en limitant leurs congés et en ne leur permettant pas de communiquer avec leurs parents dans leur langue maternelle. Après 1872, les élèves ne pouvaient même plus communiquer entre eux dans leur langue maternelle. Les visites et les conversations entre frères et sœurs étaient interdites, sinon rigoureusement limitées. L’on disait souvent que les parents constituaient une entrave. Les administrateurs des écoles considéraient même qu’ils protégeaient les enfants de leurs parents. Ils considéraient que les parents avaient une mauvaise influence ou qu’ils étaient immoraux et qu’ils habitaient dans des maisons sales et insalubres; que les enfants malades ou mourants étaient mieux à l’institut. "

En 1879, le gouvernement fédéral cherchait des modèles pour les écoles indiennes. Il a demandé à N.F. Davin de faire rapport sur les écoles industrielles américaines pour les Autochtones des États-Unis. Ses recommandations positives ont entraîné l’établissement de plusieurs pensionnats pour enfants autochtones au Canada. Dans son rapport, Davin mentionnait que " l’école industrielle est la principale caractéristique de la politique connue sous l’appellation de " civilisation persuasive ". " Tout en appuyant le concept des pensionnats pour les Autochtones au Canada, Davin observait ceci :

" ... si l’on veut arriver à quelque chose avec un Indien, il faut le prendre très jeune. ".

Le secrétaire d’État responsable des provinces, Hector Langevin, a appuyé le point de vue de Davin lorsqu’il a pris la parole au Parlement, en 1883 :

" Le fait est que, si nous voulons instruire les enfants, nous devons les séparer de leurs parents durant leurs études. Si nous les laissons dans leur famille, ils pourront apprendre à lire et à écrire, mais ils demeureront des sauvages, tandis que si nous les séparons de la manière proposée, ils vont apprendre les habitudes et les goûts... de la société civilisée. "

Un éditorial paru en 1892 dans le Calgary Herald appuyait les pensionnats pour enfants autochtones, car l’éducation qu’on y offrirait s’avérerait " le moyen d’effacer toute classe dirigeante indienne ". J.R. Miller souligne que les pensionnats sont un sous-ensemble d’un ensemble complexe de législation et de programmes conçus pour contrôler et pour refaçonner le comportement politique autochtone. Ces efforts ont varié des tentatives pour forcer les chasseurs autochtones à devenir des fermiers sédentaires jusqu’à rendre illégales les coutumes autochtones traditionnelles. La classe politique et les colons croyaient que ces actes étaient légitimes et justifiés. Il se fondaient ainsi sur le postulat que les Autochtones étaient moralement inférieurs aux Caucasiens.

Les politiques du XIXe siècle ont un rapport avec l’établissement des pensionnats pour enfants autochtones : la formation du Manitoba, en 1870, en partie pour prévenir une annexion aux États-Unis, et l’entrée de la Colombie-Britannique dans le Canada, en 1871, en fonction d’un chemin de fer qui serait aménagé pour la relier au reste du pays, voilà des événements qui reflétaient le sentiment général qu’il fallait coloniser l’Ouest le plus rapidement possible en y accueillant des Européens. Il y a eu signature de traités, souvent avec réticence, par des Indiens démoralisés par la diminution rapide de leurs populations et menacés par la disparition de leurs sources d’alimentation. Plusieurs ont vu dans les traités la seule possibilité de survivre. Les exemples de résistance aux États-Unis et de la part des Métis au Manitoba ne laissaient présager rien de bon. " Une fois que les traités eurent été signés, l’on ne voyait plus les Indiens et l’on ne s’en préoccupait plus, isolés qu’ils étaient dans plus de deux mille réserves. " Ces réserves ont été créées en grande partie pour les fins administratives du gouvernement.

En général, les Canadiens n’acceptent pas que les traités et la création des réserves ont pu être entrepris pour en faire profiter les colons européens. On a eu tendance à établir les réserves dans des zones agricoles de qualité inférieure; la plupart ont été localisées dans des secteurs où elles n’interféreraient pas avec le développement économique des Blancs. Dans la démarche relative aux traités, en plus de l’attribution de petits territoires, des gratifications et des annuités, qui étaient garantis, chaque bande a reçu la promesse qu’elle aurait une école. John Tootoosis croit que cette promesse non tenue a été un grand malheur pour les Indiens.

Parmi ces développements politiques, les modifications apportées à la Loi sur les Sauvages, ont été importantes. L’Acte relatif aux Sauvages et l’Acte de l’avancement des Sauvages, adoptés en 1884, ont étendu l’autorité des chefs en conseil d’établir des règlements au sujet de l’éducation des enfants dans les réserves. Cependant, les modifications apportées en 1894 ont amorcé une tendance à s’éloigner du contrôle local en faveur d’un contrôle ministériel plus centralisé sur la nature et sur la fréquentation des écoles indiennes. Il y a eu adoption de la fréquentation obligatoire pour les enfants " de sang indien " âgés de moins de 16 ans, ainsi que de pouvoirs d’arrêter, de conduire et de détenir des enfants dans les écoles. Les modifications prévoyaient également des amendes ou l’emprisonnement des parents ou des tuteurs qui n’envoyaient pas leurs enfants à l’école.

Le surintendant général adjoint Duncan Campbell Scott a influencé la politique indienne du gouvernement fédéral durant plus de vingt ans, en exposant une croyance ferme en l’assimilation : " ... l’épanouissement de la race en fonction de son but ultime, son absorption dans la vie civile ordinaire du pays. " En 1920, dans le cours d’un débat à la Chambre des communes sur les modifications à la Loi relative aux Sauvages, Scott a établi clairement que les cultures indiennes devaient être éliminées :

" Je veux qu’on se débarrasse du problème indien... Notre objectif est de continuer jusqu’à ce qu’il n’y ait plus un seul Indien au Canada qui n’ait pas été absorbé dans la société, qu’il n’y ait plus de question indienne ni de ministère des Affaires indiennes, voilà l’objectif du projet de loi. "

Périodiquement, il y a eu des protestations contre de telles politiques et contre les écoles elles-mêmes. Dans un rapport commandé en 1927, on pouvait lire :

" La philosophie qui sous-tend la création des pensionnats pour enfants autochtones, c’est-à-dire que le moyen de " civiliser " un Indien est de prendre un enfant indien, et même un très jeune enfant, et de le tenir le plus complètement possible loin de son foyer et de la vie familiale, diverge de la conception moderne de l’éducation et du travail social, selon laquelle le foyer et la famille sont des institutions sociales essentielles dont il est généralement indésirable de déraciner les enfants. " De toute évidence, ce rapport a eu peu d’incidences.

Plus récemment, en 1945, un chercheur américain observait la lutte systématique du Canada contre les pratiques religieuses et culturelles traditionnelles des Indiens et concluait que le but du Dominion du Canada était l’assimilation. Il remarqua que le Canada avait choisi d’éliminer les Indiens en les assimilant, contrairement aux Américains qui avaient longtemps cherché à les exterminer physiquement. Ce fonctionnaire américain conclut ainsi : " Autrement dit, l’extinction des Indiens en tant qu’Indiens est la fin ultime " de la politique indienne du Canada.

En 1947, il y a eu présentation d’un mémoire au comité spécial mixte du Sénat et de la Chambre des communes formé pour examiner et étudier la Loi relative aux Sauvages. Ce mémoire intitulé Plan pour éliminer les problèmes indiens d’ici 25 ans recommandait l’abolition des réserves indiennes et la création d’un système d’éducation intégré comme fondement de l’assimilation. Haig-Brown remarque que même si la nouvelle Loi sur les Indiens ne différait pas tellement de la législation antérieure, elle a marqué la fin de plusieurs pensionnats, parce qu’elle a permis la fréquentation du système scolaire public par les enfants autochtones.

Dans les années 1950, les pensionnats pour enfants autochtones ont servi aux fins de bien-être et de développement social des enfants de même qu’à des fins éducatives. En vue de limiter les coûts de fonctionnement, le gouvernement fédéral a élaboré une politique qui prévoyait :

(1) l’admission dans les pensionnats des seuls enfants qui avaient besoin de services institutionnels pour des raisons sociales ou familiales, et des enfants qui vivaient dans des collectivités dépourvues d’écoles;

(2) l’ouverture d’un plus grand nombre d’externats dans les réserves et l’amélioration de l’accès à ces derniers;

(3) l’octroi de subventions pour la fréquentation des écoles non indiennes par des enfants indiens.

Entre 1947 et 1958, le nombre des enfants indiens qui fréquentaient les écoles provinciales (autres que les pensionnats) est passé de 200 à plus de 7 000. Toutefois, " les raisons d’ordre social et familial " qui nécessitaient d’arracher les enfants autochtones à leurs familles pour les placer dans les pensionnats continuaient d’être régies par le gouvernement et par les Églises tant que les écoles continuaient leurs activités.

Malgré les changements de nom — pensionnats, écoles industrielles, internats — les institutions sont demeurées des " institutions complètes ", dans lesquelles de grands nombres d’enfants vivaient, coupés de la société, séparés de leur famille et de leur communauté durant de longues périodes. Il semble y avoir peu de doutes que la dévastation culturelle attribuée aux pensionnats pour enfants autochtones et les sévices perpétrés pour atteindre le but explicite d’éradiquer les comportements des Autochtones sont le résultat direct des politiques gouvernementales et des actes posés par les Églises pour mettre ces politiques en œuvre.




Lorsque nous sommes arrivés à l’école, ma sœur m’a dit d’être tranquille et de faire tout ce qu’on me demanderait. Elle m’a dit qu’elle me parlerait lorsqu’elle le pourrait. Ma sœur avait l’air très triste et cela m’a fait peur. Je me rappelle que c’était à peu près l’heure du dîner et que j’avais vraiment faim. L’on m’a amené dans une grande salle avec d’autres enfants. Certains étaient plus grands que moi, mais pas beaucoup. Plusieurs de mes amis de notre collectivité étaient présents. J’aurais voulu leur parler, mais je me suis rappelé ce que ma sœur m’avait dit. Une religieuse nous a dit à tous d’enlever nos vêtements et de nous rendre dans la salle de bains. Là, je me souviens qu’elles nous ont frottés très rudement. Certains enfants ont pleuré et les religieuses se sont mises en colère contre eux. Cette première année a été très dure. Je voyais mes frères et mes sœurs souvent, mais je n’avais jamais la permission de leur parler. Je me souviens qu’un prêtre nous a dit que nous étions des sauvages. Je ne savais pas ce que c’était, mais je savais que c’était méchant. Je ne me souviens pas beaucoup de ma jeunesse, seulement que j’avais toujours peur et que je voulais rentrer à la maison.



7. L’expérience de la violence

Cette partie présente les types de violence mentionnés et décrits dans certaines des sources que nous avons examinées. Un bref historique du mode de vie des enfants dans leurs collectivités aide à établir le contexte de leurs expériences futures à l’école.

7.1 La vie avant le pensionnat pour enfants autochtones

Les souvenirs de la prime enfance sont importants, en partie parce qu’ils permettent d’illustrer que, malgré la grande diversité de leurs langues et de leurs cultures, les Premières nations ont des approches remarquablement semblables en matière d’éducation des enfants. Elles placent les enfants au cœur d’un système de croyances axées grandement sur le monde naturel. La survie économique et sociale des sociétés autochtones dépendait de la transmission d’une grande quantité de connaissances spirituelles et pratiques entre les anciens et les jeunes, et ce, par le moyen d’une tradition exclusivement orale42.

Si des retours sur la tendre enfance aident à donner une compréhension des sentiments que pouvaient avoir les enfants que l’on arrachait soudainement à leur environnement familial, ils ne devraient pas laisser à penser que les conséquences de la violence dans les pensionnats sont reliées de quelque façon aux circonstances ou aux expériences antérieures.

Isabelle Knockwood43 écrit au sujet des histoires que l’on se racontait en cercle et qu’on lui a permis d’écouter lorsqu’elle était enfant. Les histoires fondées sur des milliers d’années d’expérience de vivre de la terre mettaient l’accent sur la valeur de vivre harmonieusement avec toutes choses. Les anciens étaient porteurs d’un vaste héritage de connaissances, que ce soit en histoire, en médecine, en géographie, en généalogie, ainsi que d’habiletés qui leur permettaient de bien vivre. Les valeurs transmises aux enfants comprenaient la responsabilité de protéger les autres, les bonnes manières et la participation au travail familial. La description de la façon de dormir dans un campement traduit bien la force des liens familiaux.

" Papa s’assoyait d’un côté de l’appentis et s’occupait du feu, tandis que maman s’assoyait de l’autre côté. Nous, les cinq enfants, nous nous tenions entre les deux... Quand nous nous réveillions le matin, ils étaient encore là. Il me semblait qu’ils gardaient leurs enfants durant toute la nuit44. "

Knockwood et d’autres se rappellent qu’ils savaient qu’on les aimait et qu’on s’occupait d’eux à la maison, souvent malgré les conditions de pauvreté. " Même lorsque nous avions faim et que nous étions sales, nous savions qu’on nous aimait, parce que, lorsqu’il y avait de la nourriture, nous étions les premiers à manger45. " Dans son livre, Knockwood compare et établit les différences entre les coutumes et les expériences de la prime enfance, d’une part, et les méthodes et les attitudes étrangères, aliénantes et rudes des religieuses et des prêtres qui dirigeaient l’école Shubenacadie, d’autre part.

Willie Blackwater raconte comment les meilleures années de sa vie ont été les dix premières, alors que ses grands-parents l’élevaient dans le village de Kispiox46. Il décrit comment ces derniers lui apprenaient des choses et le reprenaient sans jamais lever la main ni élever la voix. " Si je faisais quelque chose de mal, mon grand-père me racontait une longue histoire, et je devais chercher à comprendre sa signification et ce qu’elle m’apprenait au sujet de ce que j’avais fait. " Même si sa grand-mère vivait sa propre spiritualité traditionnelle, elle l’amenait aussi à l’Église unie. " Elle enseignait toujours des choses. Elle cuisinait des mets merveilleux et me disait pourquoi c’était si important de respecter tout ce qui nous nourrit sur terre. "

Tous les participants à la recherche de Rosalyn Ing47 ont décrit avoir été élevés dans des milieux attentionnés et où on les aimait. Les anciens servaient de modèles et racontaient des histoires pour enseigner. Les enfants apprenaient en imitant, en écoutant et en observant. L’on demandait aux enfants de travailler, mais l’on tenait compte de l’âge. La famille étendue était importante quand il s’agissait d’éduquer et d’élever les jeunes. Pour tous les participants, le premier apprentissage s’est effectué dans la langue maternelle. Deux des trois personnes ont décrit comment l’apprentissage des enfants et les attentes qu’on formait à leur endroit étaient progressifs. Un homme a également décrit ses parents comme ayant une connaissance intuitive des phases de développement des enfants. Apprendre les valeurs de bonté, de respect pour tous, d’honnêteté, garder la foi dans le Créateur et travailler étaient une part importante des premiers apprentissages des enfants48.

Les sujets interrogés par Haig-Brown ont plusieurs souvenirs de la vie avant l’école, la plupart positifs. Leurs souvenirs se concentrent de façon similaire sur les méthodes d’enseignement et d’apprentissage, sur le travail qu’on attendait des enfants et, pour plusieurs, sur un milieu où l’amour prévalait.

" Comme nous venions d’une famille nombreuse, nous avions tous des corvées domestiques à accomplir dès que nous étions capables d’apprendre quelque chose, et puis il y avait toujours un bébé. Comme j’étais l’aîné... J’avais sept ou six ans, et je gardais déjà les enfants... Plus tard, nous travaillions dans le jardin, nous cordions le bois, nous faisions toutes ces corvées49. "

L’étude de James Miller sur le pensionnat de Walpole Island50 ajoute une autre dimension au portrait de la vie avant l’école. Plusieurs de ses sujets interrogés ont parlé de la pauvreté terrible à la maison, du chômage généralisé durant la Grande dépression et des nombreux parents qui envoyaient leurs enfants au pensionnat seulement pour qu’ils aient de la nourriture. Nombre de témoins se rappellent la Deuxième Guerre mondiale comme ayant été un événement traumatisant dans leur vie, alors que 70 hommes étaient absents de la collectivité. Les gens de Walpole Island établissent clairement que tous les enfants ne quittaient pas un milieu sûr et heureux lorsqu’ils partaient pour le pensionnat. Le groupe d’étude de l’Assemblée des Premières Nations51 comprenait une personne qui a décrit comment elle volait du lait lorsqu’elle était enfant, pour se nourrir et nourrir ses frères et sœurs, alors que ses parents étaient " partis boire "; et une autre qui vivait dans un milieu imprévisible où la violence et l’alcool étaient présents52.

Les auteurs de Breaking The Silence soulignent que, quelle que soit la façon d’évaluer le milieu, au moins les enfants s’y sentaient chez eux. Que, rétrospectivement, le monde des enfants ait semblé sécuritaire ou menaçant, les enfants ont trouvé les moyens de cultiver et de retenir une impression de bien-être53. Il y a peu de circonstances au cours d’une vie où le monde change aussi radicalement que lorsqu’il faut s’immerger dans un nouveau monde qui exige de s’adapter à une langue, à une nourriture, à des coutumes et à des comportements différents. La difficulté augmente encore lorsque le contact avec l’ancien monde et le soutien de ce dernier n’existent plus. C’est cet arrachement à ce qui était familier et le plongeon dans l’inconnu que plusieurs anciens élèves définissent comme le commencement d’un traumatisme profond et durable.




La quatrième année où j’étais là, le prêtre nous a appelés, ma sœur et moi, un soir, tard. Le prêtre nous a demandé de nous étendre sur le lit de camp. Le prêtre nous a dit d’enlever nos caleçons. Ma sœur était étendue près de moi et m’entourait de son bras. Le prêtre a dit à ma sœur de toucher mes parties intimes et de me frotter là tandis qu’il regardait. C’est la seule fois que j’ai touché ma sœur, selon ce que je me rappelle. Je savais que ce que nous faisions était mal. Je me sentais sale et honteux et je savais que j’allais me retrouver en enfer. Ma sœur et moi n’avons jamais parlé de cela jusqu’à ce jour. La honte est trop grande.



7.2 Les types de violence

Le livre d’Isabelle Knockwood au sujet de l’école Shubenacadie, Out of the Depths, débute par une description du traumatisme causé par la séparation d’avec les parents et, à l’intérieur de l’école, par la séparation stricte entre les frères et les sœurs; par la nouveauté que représentaient la coupe des cheveux et les vêtements semblables à ceux des prisonniers; par la température toujours froide des dortoirs, par le manque de soins de nuit pour les petits enfants et par la censure des communications. Pour plusieurs, la séparation forcée d’avec les membres de la famille a eu des conséquences durant toute la vie54. Les souvenirs les plus vivaces se rapportent à l’isolement et aux punitions pour avoir parlé Mi’kmaw. Les jeunes enfants qui ne comprenaient pas l’anglais étaient tenus au silence jusqu’à ce qu’ils l’apprennent. Les témoins signalent qu’au moment de quitter les études, ils ne connaissaient que très peu leur langue.

Les punitions brutales et arbitraires étaient une caractéristique quotidienne de la vie scolaire. Il y a des descriptions de volées de coups et d’humiliations publiques, de rasage de crâne et de confinement d’enfants dans des placards, nourris au pain et à l’eau durant plusieurs jours. Les souvenirs communs portent aussi sur la faim qui tenaillait constamment, sur l’alimentation insuffisante, sur l’obsession de l’assistance à la messe, sur la confiscation des présents et des biens personnels, sur les chaussures et les vêtements mal ajustés et sur le refus de distribuer les vêtements disponibles aux enfants.

Un chapitre consacré " au travail et au jeu " décrit le contexte de l’apprentissage à l’école. " Nous étions forcés d’oublier tout ce que nos parents et les anciens nous avaient appris, et nous apprenions toutes les choses nouvelles dans une atmosphère de crainte55. " L’on ancrait profondément en nous la honte de notre ascendance autochtone. Les niveaux d’étude étaient attribués selon la taille plutôt que selon les réalisations scolaires. Comme les élèves de cinquième année devaient être assez grands pour contrôler la machinerie lourde, plusieurs élèves de petite taille restaient en quatrième année durant trois ou quatre ans.

Les garçons de 12 à 16 ans exploitaient une ferme complète à Shubenacadie. Les garçons les plus âgés, qui s’occupaient des chaudières, ne venaient jamais en classe. Knockwood observe que les garçons consacraient tellement de temps au travail physique que peu d’entre eux ont pu profiter d’apprentissages scolaires plus que minimaux. Plusieurs rejettent la cause de leur analphabétisme sur les pensionnats. Les filles travaillaient seulement quelques heures de moins à la blanchisserie, à la cuisine et au nettoyage de l’institution. Elles fabriquaient aussi de la poterie, et l’auteure a appris que ces objets étaient vendus dans les foires agricoles. Il y a également des descriptions d’accidents du travail dont certains élèves sont sortis mutilés.

Le chapitre sur " les récompenses et les punitions " est encore plus détaillé, dans la récapitulation de l’horrible violence apparemment non exceptionnelle d’ordre physique, émotionnel et sexuel perpétrée par les religieuses et par les prêtres. Il contient des descriptions de volées de coups, d’enfants projetés dans les classes, d’humiliations, d’enfants malades battus et forcés de manger leur vomi, d’attouchements sexuels et d’atmosphères de terreur qui régnaient. Plusieurs punitions avaient un caractère sexuel, étaient associées à la sexualité ou étaient infligées pour avoir résisté à des abus sexuels. Il y a des descriptions de fouets, de palettes et de tortures. L’un des témoins se rappelait qu’on lui avait donné un sac de fouets noueux pour qu’il les brûle dans la fournaise lorsque les inspecteurs scolaires étaient arrivés56.

Knockwood réfléchit sur le manque de connaissance que le public avait de ces pratiques et, plus tard, sur le manque de reconnaissance par l’Église que ces atrocités avaient été commises à l’école. Elle analyse comment l’école était en mesure de se donner une façade de bienveillance malgré les enquêtes des parents, des particuliers ou publiques, y compris la Commission royale d’enquête sur la flagellation de 19 garçons par le prêtre, en 1934.

Elizabeth Furniss57 relate combien, durant les 30 premières années d’activité de l’école de Williams Lake, il y a eu de plaintes formulées par les parents, par les colons blancs locaux et par les fonctionnaires des Affaires indiennes au sujet des conditions de privation et de brutalité que subissaient les élèves de l’école St. Joseph’s. Il y a eu des enquêtes ministérielles en 1899, en 1902 et en 1920, mais toutes sortes d’explications et de jeux d’intérêts ont fait en sorte de rejeter les inquiétudes des enfants et de leurs familles. La recherche de Furniss se concentre principalement sur les enquêtes menées sur la mort de deux enfants et sur la façon dont les oblats ont été exonérés et dont on a rejeté les plaintes des Autochtones.

Des protestations et des enquêtes de cette sorte ont eu lieu dans plusieurs écoles durant leur histoire et, inévitablement, elles ont résulté en un discrédit des Autochtones et dans le renforcement du contrôle total des institutions.

Agnes Grant commence son livre par une analyse de la coupe des cheveux comme étant un élément principal des rituels de domination interculturelle partout dans le monde. Dans son introduction, Grant décrit l’importance spirituelle des tresses, qui symbolisent l’unité de l’intelligence, du corps et de l’esprit essentielle à la vie humaine. Parlant de cette dévastation symbolique et pourtant très réelle causée par l’introduction de cette habitude dans les pensionnats, elle demande :

" Comment pouvons-nous comprendre, aujourd’hui, ce que ressentaient les élèves plus âgés quand on leur demandait de raser les têtes des petits enfants horrifiés ?58 " La coupe des cheveux était également une forme commune de punition, dont, souvent, on n’a pas reconnu les effets. Grant cite une femme dont on a soudain coupé les cheveux après qu’elle se fut mise à parler Mohawk lorsqu’elle jouait avec une amie. Après cet incident, lorsqu’elle a essayé de parler sa langue, elle n’en a pas été capable, et elle n’en a plus été capable depuis59.

Expliquant la difficile nécessité d’examiner le passé, malgré la douleur que cela cause, Grant parle des enfants qui sont morts seuls et sans amour, loin de leur famille, enterrés par les dirigeants scolaires dans un sol étranger à celui de leurs ancêtres. Même si la tuberculose sévissait dans toutes les collectivités autochtones, " il est impossible, aujourd’hui, de comprendre l’anxiété des parents qui ne savaient pas si leurs enfants mouraient dans la solitude60 ". Lever le voile sur cette douleur est traumatisant. Grant rapporte que ses étudiants chercheurs ont été ébranlés par leurs expériences et se sont sentis incroyablement coupables d’avoir ravivé des souvenirs longtemps ensevelis dans le silence61.

Grant passe en revue l’étude de la Federation of Saskatchewan Indians, effectuée en 1973, Report on Indian Education in Saskatchewan. On y a signalé que l’éducation avait atteint le statut de tragédie alors que " la jeunesse indienne, génération après génération, a été détruite, confinée à une vie de désespoir, de désillusion et d’indignité ". Ce rapport cernait plusieurs problèmes relatifs à l’éducation des Indiens, dont l’absence de règlements et de décrets, le bris de traités, le manque de participation parentale et le manque de protection du rôle essentiel des parents dans l’éducation des enfants.

Grant documente l’étendue du travail des enfants dans les pensionnats et observe qu’à plusieurs endroits, durant l’été, l’on sortait les élèves des pensionnats pour les envoyer dans les familles de colons, où on les accueillait comme une source de main-d’œuvre à bon marché62. Elle fait aussi état de la nature toujours plus coercitive du système, du fait que les grandes écoles industrielles, en particulier, étaient établies loin des collectivités d’origine afin de limiter les contacts entre les élèves et leurs familles.

Parmi les exemples des nombreux abus, Grant mentionne les mariages arrangés, à l’école Lebret, à File Hills. Une victime dont les parents ont participé à cette expérience a rapporté que ses parents avaient été réunis et qu’on leur avait dit qu’ils allaient se marier. " Ces couples étaient mal assortis. Ils ne se connaissaient pas et n’étaient pas en amour. " L’auteure remarque que les principaux des écoles et les agents des Indiens prenaient des libertés qui excédaient de beaucoup leurs mandats respectifs. Ils choisissaient des étudiants qui demeuraient très éloignés l’un de l’autre et, consciemment, réunissaient des partenaires de groupes linguistiques différents, de sorte qu’il était impossible de perpétuer les langues indiennes dans les foyers63.

Grant a observé ce qui suit :

" Tous les enfants n’ont pas été victimes de violence sexuelle et physique, mais tous les enfants ont souffert du dénigrement à l’égard de leurs parents et de leur culture. La violence psychologique et spirituelle était institutionnalisée et aucun enfant ne pouvait échapper aux conséquences débilitantes associées à l’état de victime et au lavage de cerveau auxquels on l’astreignait... puisqu’on montrait aux enfants à avoir horreur de la façon dont leurs parents vivaient, il aurait été impossible de concevoir un complot plus diabolique pour détruire l’harmonie... et l’efficacité de la culture64. "

Nous ne mentionnons que brièvement les préjudices décrits dans d’autres livres et études. Dans une large mesure, les thèmes sont récurrents.

Des chercheurs Nuu-Chah-Nulth65 ont employé le cadre suivant pour décrire les types de sévices commis dans les pensionnats :

i. séparer les enfants de leurs familles;
ii. les conditions physiques dans les écoles;
iii. la perte de la langue autochtone;
iv. la violence (émotionnelle, physique, sexuelle, spirituelle);
v. la main-d’œuvre enfantine.

Chaque partie contient les témoignages éloquents de victimes au sujet de ces sévices, souvent avec une compréhension des effets qu’ils ont eus sur les personnes qui les rapportent, sur leurs familles, sur leurs collectivités et sur leurs cultures respectives.

Miller et Danziger, dont la conclusion a été que l’expérience du pensionnat n’a pas influé de manière fondamentale sur le cours de la vie communautaire à Walpole Island, ont observé que les plus graves problèmes que connaissaient les enfants au pensionnat étaient le manque d’une nourriture satisfaisante, un manque d’éducation et, dans certains cas, des punitions physiques abusives.

Les conclusions de l’étude de Roland Chrisjohn66 mentionnaient que les pensionnats étaient beaucoup plus rudes et surpeuplés que les externats. Les anciens élèves rapportent avoir passé moins de temps au travail scolaire et se rappellent du temps passé à l’école comme étant beaucoup moins heureux que les répondants des externats. Ils avaient beaucoup moins de temps de récréation et de moments libres et passaient plus de temps dans les travaux manuels et dans les corvées domestiques. Dans les pensionnats, l’enseignement religieux et la participation aux cérémonies religieuses occupaient beaucoup plus de temps. Nombre de pratiques disciplinaires des pensionnats " s’approchaient (et parfois devenaient) du domaine de la torture physique67 ". En ce qui concerne l’étendue de la violence sexuelle, 89 des répondants pour les fins de l’étude ont indiqué avoir été victimes de violence sexuelle, 38 ont répondu " non " et 60 ont refusé de répondre à la question. Selon que l’on exclut les non-répondants ou qu’on les entre dans la catégorie de ceux qui ont dit " non ", les répondants ont été victimes de violence sexuelle dans une proportion variant de 48 à 70 p. 10068.

Dans The Mush Hole, l’expérience scolaire générale des anciens élèves des écoles Mount Elgin et Mohawk varie de très positive, de la part de ges qui sont reconnaissants à l’école de leur avoir donné des habiletés et des attitudes positives, à ceux qui décrivent les écoles comme des " camps de concentration ". La description du traitement des enfants comprend de sévères volées de coups et l’usage des chocs électriques pour " guérir " l’incontinence urinaire. Les lettres administratives et les histoires racontées par les élèves, qui ont fréquenté l’école entre le début du siècle et la fin des années soixante, démontrent qu’il y a eu une grande variation dans le traitement des enfants, principalement due à l’attitude du principal en exercice.

La recherche de Jim Miller comprend une documentation volumineuse du travail des enfants, qui subvenaient aux besoins de l’école, et de la discipline qui " dégénérait trop facilement en sévérité et, même, en violence69 ". Miller décrit les " punitions les plus populaires ", telles que forcer les enfants à demeurer à genoux dans un endroit public, les bras étendus durant des heures, la coupe des cheveux, le rasage du crâne et le confinement prolongé dans des placards noirs, avec alimentation au pain et à l’eau. Il cite de nombreux cas individuels tels que celui d’une fugueuse, à la fin des années 1940, à qui le principal a donné 100 coups de lanière de cuir et a coupé les cheveux avec des ciseaux à jardiner... avant de lui raser le crâne; les garçons brûlés avec la flamme des briquets et battus avec cinq ceintures à la fois (préférablement cloutées); une fille qu’on a informée de la mort de son frère, puis amenée dans une chambre, attachée et violée.

Après 25 pages d’atrocités, Miller observe : " L’on ne se demande pas longtemps pourquoi Mel H. Buffalo... a indiqué que "chaque Indien à qui j’ai parlé et qui a fréquenté ces écoles a une histoire de violence mentale, physique ou sexuelle à raconter." 70 "

Les résumés ci-dessus ne représentent qu’une fraction des témoignages et des rapports disponibles, et de ceux qui ont été enregistrés. Notre expérience de la seule réunion des documents a été semblable à celle de Mel Buffalo : à quelques exceptions près, que les élèves aient été des Inuit, des Métis ou des Premières nations, ils ont des témoignages de violence à transmettre. Avant que nous puissions discuter de réparation pour ces sévices, il est nécessaire de comprendre pourquoi un phénomène de violence et de dégradation aussi répandu a eu lieu et de chercher à comprendre les effets à longue échéance.




Lorsque nous étions beaucoup plus âgés, je me rappelle que ma sœur m’a dit, une fois qu’elle était ivre, que le prêtre avait touché ses parties intimes alors qu’elle était à l’infirmerie. En patinant, elle avait fait une chute et s’était infligé une mauvaise coupure. Elle l’a cachée aux religieuses, parce qu’elle savait que si elle leur montrait sa blessure, elle aurait une fessée. Sa jambe a pris du mal et elle n’a plus pu le cacher. Une nuit, le prêtre est venu dans l’infirmerie et lui a dit qu’il voulait voir sa jambe. Le prêtre lui a dit qu’elle était chanceuse qu’on prenne soin d’elle et, tandis qu’il parlait, il a glissé ses mains sur sa robe de nuit et a touché ses parties intimes.



7.3 Évaluer l’étendue et la nature de la violence dans les pensionnats

Avant l’holocauste et les autres politiques d’extermination nazies, le mot génocide n’existait pas; cependant, les actes de la Grande-Bretagne et des gouvernements de colonisation en Australie et au Canada démontrent clairement que la pratique du génocide existait71.

À ses débuts, le Canada a hérité des obligations légales et morales de la Grande-Bretagne à l’égard des alliés autochtones qui l’avaient aidée à établir son territoire en Amérique du Nord. Il a adopté les politiques britanniques qui consistaient à ne pas tuer ses alliés et à conclure des traités avec eux. Le problème qui est survenu, et qui n’a jamais été résolu, était de savoir comment occuper et utiliser les terres qui n’avaient jamais été conquises à l’occasion d’une guerre ni cédées par entente légale ni par autre titre; autrement dit, en termes européens, en fonction d’une entente légale72.

La connaissance de l’intention de génocide des colonisateurs est bien ancrée dans la conscience autochtone, mais le grand public canadien ne le sait ou ne le reconnaît pas encore. Le fait que les Autochtones le comprennent explique clairement pourquoi plusieurs d’entre eux ne veulent pas traiter les questions de violence sur la base de situations particulières ou du cas par cas.

Dans la conclusion de son livre No End of Grief, Agnes Grant examine les pensionnats en relation avec chacun des cinq points de l’Article II de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (9 décembre 1948) qui se lit ainsi :

"  Dans la présente Convention, le génocide s'entend de l'un quelconque des actes ci-après, commis dans l'intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel :

a) Meurtre de membres du groupe;
b) Atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe;
c) Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa
destruction physique totale ou partielle;
d) Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe;
e) Transfert forcé d'enfants du groupe à un autre groupe73.

Nous étions également intéressés de connaître jusqu’à quel point les témoignages que nous avions recueillis entraient dans cette définition et nous avons trouvé qu’il s’agissait d’une méthode efficace pour analyser les activités des pensionnats et celles qui les touchaient.

a) Meurtre de membres du groupe

Selon Grant, " le meurtre intentionnel, en soi, n’a pas eu lieu... 74 ". D’autres prétendent avec conviction que le meurtre intentionnel était un fait réel dans les pensionnats, se référant en cela à " ... sept témoins visuels à la seule cour de Vancouver, [qui] ont parlé d’observations d’enfants battus à mort, projetés à travers les fenêtres et qu’on frappait du pied, les faisant ainsi débouler les escaliers, pour ne citer que quelques témoignages75. " De fait, Grant poursuit et concède ceci : " ... mais des enfants sont décédés en grand nombre dans les pensionnats. Même parmi les victimes, aujourd’hui, l’on en trouve qui ont eu connaissance d’enfants qui sont morts des suites de volées de coups. Les agresseurs n’ont jamais été punis. Au mieux, ils ont simplement disparu des écoles76. "

À l’école Shubenacadie, en Nouvelle-Écosse, plusieurs élèves sont morts, parfois de manière qui laissait à penser aux autres enfants que leur vie était en danger. Il y a description de la mort de deux élèves à la suite de volées de coups graves. " Le fait de l’amener à l’infirmerie du troisième étage après qu’on l’eut battue était déjà une menace à sa vie ou à sa disparition permanente. Pour nous, l’infirmerie devint l’endroit d’où les enfants disparaissaient à jamais77. "

L’une des femmes interrogées par Fournier et Crey, âgée de 86 ans à cette époque, a rapporté avoir été témoin de l’enterrement secret d’un bébé né à l’école de Kuper Island d’une jeune fille terrifiée. Les archives de l’école de Kuper Island révèlent une foule de décès prématurés, la plupart du temps d’enfants noyés en tentant de s’échapper de l’école78. Les 13 participants à l’étude Haig-Brown relatent au moins deux morts que l’on aurait pu prévenir parmi leurs compagnons d’enfance79. Les témoignages des victimes de l’école Alberni font état de décès qui n’ont pas fait l’objet d’enquêtes et de certificats de décès falsifiés. En 1937, quatre garçons sont morts gelés après s’être enfuis de l’école Lejac seulement revêtus de vêtements d’été80.

Les enquêtes sur les décès à l’école Thunderchild ont commencé en 1990, et à l’école de Port Alberni, en 1995. Grant note les témoignages de victimes au sujet d’un garçon battu à mort à l’école Elkhorn; d’une jeune fille battue à mort dans une école non identifiée; et une autre victime se rappelle d’un élève battu à mort à son école81. Les témoignages des victimes et la recherche soutiennent les allégations de décès suspects, occultés ou d’homicides involontaires de plusieurs élèves dans les pensionnats. Selon Fournier : " À toutes les périodes d’activité des pensionnats, il est certain que des élèves sont décédés de morts accidentelles, violentes ou à la suite de négligence, qui pourraient être qualifiées — si les pensionnats avaient été reconnus coupables — de négligence criminelle, d’homicide involontaire et, même, de meurtre82. "

Le taux de décès parmi les sortants des écoles est encore plus saisissant. Parmi les premières 20 personnes avec lesquelles nous sommes entrés en communication pour la recherche de documents au sujet des pensionnats, trois ont subi, alors qu’ils étaient enfants, le suicide d’un parent qui avait fréquenté un pensionnat83. Plusieurs groupes de victimes rapportent le suicide de membres. Tant au sommet des Premières nations de la Colombie-Britannique que devant la Commission royale d’enquête, il y a eu des témoignages se rapportant à des victimes des pensionnats qui se sont suicidées peu après84. Au moins deux des plaignants qui ont témoigné dans des poursuites criminelles relatives à des sévices commis dans un pensionnat se sont enlevé la vie depuis.

La recherche qu’a effectuée Grant a amené cette dernière à se pencher sur les chiffres de la fréquentation scolaire, sur les chiffres de la diplômation et sur les listes des élèves. Le tout révélait " un nombre extraordinairement élevé de personnes décédées ", en plus du grand nombre de personnes en détention. Grant fait remarquer que peu des condisciples d’Isabelle Knockwood ont vécu assez longtemps pour lire son livre. Linda Bull a interrogé un ancien qui a estimé que 90 p. 100 de ses condisciples étaient devenus alcooliques, étaient morts prématurément ou de mort violente85.

En 1990, la GRC a visité une petite collectivité de la Colombie-Britannique pour interroger huit victimes " probables " de violence sexuelle assez récente dans un pensionnat, pour découvrir que sept des huit étaient déjà décédées. Dans au moins deux cas, il s’agissait clairement de suicides. Cette expérience n’est pas exceptionnelle. L’une des nombreuses difficultés que la GRC rapporte lorsqu’elle a à enquêter et à poursuivre des accusés dans les cas de crimes dans les pensionnats est qu’un grand nombre des victimes alléguées sont mortes86.

En grand nombre, des enfants sont morts de maladie, particulièrement de la tuberculose. On les forçait à quitter leur foyer si les parents n’acceptaient pas de les envoyer au pensionnat. En 1907, le docteur Bryce, un médecin examinateur de l’Ontario, observait que des immeubles ne rencontraient pas les normes et n’avaient pas de ventilation. C’est dans ces établissements que les élèves ayant différentes infections, dont la tuberculose était la plus mortelle, étaient admis87.

Un rapport daté de 1902 établit que, parmi 1 700 élèves sortis des écoles industrielles, " nous savons que 506 sont morts; nous avons perdu la trace de 249; 139 sont en mauvais état de santé; 86 ont été transférés dans d’autres écoles; 121 ont mal tourné et 599 ont dit se trouver bien88. "

La Commission royale d’enquête sur les peuples autochtones a couvert les taux de décès dans les écoles de façon détaillée, dont la tuberculose était particulièrement responsable, et citait la conclusion du Saturday Night voulant " même la guerre fait rarement autant de morts que le système scolaire que nous avons imposé aux jeunes Indiens dont nous avons la charge89. " Elle retient une opinion antérieure de S.H. Blake, c.r., qui avait l’impression que, du fait que le ministère n’avait rien fait pour " pour lutter contre les causes de décès que l'on aurait pu prévenir, [et] s'exposait dangereusement à être accusé d'homicide involontaire90. " " Les innombrables rapports dénonçant les conditions dans lesquelles vivaient les enfants — affamés, mal nourris, mal habillés, mourant de tuberculose, surmenés — ne parvinrent pas à amener les Églises ni les gouvernements successifs à dépasser le stade du vœu pieux et à adopter des mesures de redressement concertées et efficaces91. "

Fournier et Crey rapportent ce qui suit à propos de la période entourant le début du siècle :

" Les écoles ont commencé à rapporter des taux de décès de 11 p. 100, comme l’a fait le principal de l’école Alberni, à 17 p. 100 à l’école Crowstand de la Saskatchewan, jusqu’à une moyenne de 24 p. 100 pour 15 écoles des Prairies, un chiffre qui passerait à 42 p. 100 si l’on y incluait ceux qui mouraient à la maison dans les trois ans après avoir quitté l’école.92 Parmi les élèves qui ont fréquenté l’école Sarcee, à l’extérieur de Calgary, entre 1894 et 1908, 28 p. 100 sont décédés, la plupart de la tuberculose. À l’école industrielle File Hills, en Saskatchewan, 69 p. 100 des élèves sont morts de la tuberculose au cours d’une décennie au tournant du siècle... À Kuper Island... les dossiers du ministère des Affaires indiennes lui-même estiment que jusqu’à 40 p. 100 des élèves sont décédés avant de revenir à la maison93. " À l’école Old Sun, dans la réserve Blackfoot, 47 p. 100 des élèves sont décédés94.

À l’école St. Henri, à Thunderchild, en Saskatchewan, en 1908, 10 p. 100 des élèves sont décédés; en 1928, 15 p. 100; en 1931, 7 p. 10095. Les taux de mortalité étaient jusqu’à cinq fois supérieurs que dans le cas des élèves non autochtones qui fréquentaient les écoles provinciales. L’on ne parlait pas des décès. Le plus souvent, l’enfant disparaissait, simplement, et on interdisait aux autres enfants de poser des questions. Cela pouvait prendre des mois avant d’en informer les parents, qui souvent l’apprenaient lorsque l’enfant ne revenait pas de l’école au moment prévu. Le système (illégal) de laissez-passer, selon lequel les adultes ne pouvaient pas quitter les réserves sans permission, aidait à garder les parents ignorants des affaires des écoles96.

La cruauté, des services médicaux inappropriés offerts par un personnel incompétent, les tombes sans inscription et des statistiques modifiées, tout indique que la prestation des services ne s’effectuait pas de manière responsable97. Grant conclut ainsi : " S’il y avait eu une notion de choix dans l’envoi des enfants à ces écoles, le terme "génocide" pourrait ne pas se justifier. Mais il n’y avait pas de dispositions prévoyant un autre type d’instruction et la législation sur la fréquentation obligatoire a donné aux agents des Indiens et à la GRC tous les pouvoirs dont ils avaient besoin pour forcer les enfants à quitter leurs foyers et pour les amener dans les écoles, où on les surveillait aussi étroitement qu’un prisonnier dans un pénitencier98. "

b) Atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe

La liste des sévices dressée par M. Roland Chrisjohn99, quoiqu'abrégée de son propre aveu (et incomplète ici) est plutôt complète.

Violence physique

  • Agression sexuelle, y compris des rapports sexuels forcés entre les hommes ou les femmes en autorité, d’une part, et les filles ou les garçons, ou les deux, sous leur responsabilité, d’autre part.
  • Contact oral-génital ou de l’ordre de la masturbation forcé entre les hommes ou les femmes en autorité, d’une part, et les filles ou les garçons, ou les deux, sous leur responsabilité, d’autre part.
  • Attouchement sexuel par les hommes ou par les femmes en autorité sur les filles et sur les garçons, ou les deux, sous leur responsabilité.
  • Effectuer de faux examens intimes des parties génitales des filles et des garçons.
  • Organiser des avortements pour des jeunes filles enceintes à la suite de relations avec des hommes qui étaient en situation d’autorité par rapport à elles, ou inciter ces jeunes filles à se faire avorter.
  • Passer des aiguilles de part en part des langues des enfants et, souvent, les laisser là durant des périodes prolongées.
  • Insérer des aiguilles dans d’autres parties du corps de l’enfant.
  • Brûler ou ébouillanter les enfants.
  • Battre les enfants jusqu’à ce qu’ils perdent connaissance.
  • Battre des enfants au sang.
  • Battre des enfants au point de leur infliger des blessures permanentes ou semi-permanentes, y compris des bras cassés, des jambes cassées, des côtes cassées, des fractures du crâne, des membranes du tympan éclatées.
  • Appliquer des chocs électriques à des enfants immobilisés physiquement.
  • Forcer des enfants malades à manger leur propre vomi.
  • Exposition sans protection (à des fins punitives) aux éléments naturels (neige, pluie et noirceur), parfois prolongée au point d’entraîner des conditions qui mettent la vie en danger (p. ex., engelures, pneumonie).
  • Privation d’attention médicale pour les personnes souffrant des effets de la violence physique.
  • Raser le crâne des enfants (à des fins punitives).

Violence psychologique et émotionnelle

  • Administration d’une volée de coups à des enfants nus ou partiellement nus devant leurs condisciples ou devant les dirigeants de l’institution, ou les deux.
  • Violence verbale, dépréciation et menaces publiques dirigées contre une personne.
  • Diffamation publique basée sur la race de tous les aspects des modes de vie des Autochtones.
  • Racisme.
  • Exécuter sur des enfants des fouilles à nu et des examens génitaux publics.
  • Arracher les enfants à leur foyer, à leur famille et à leur peuple.
  • Couper les cheveux des enfants et leur raser le crâne (quand c’est une politique).
  • Priver les enfants des présents, des lettres et d’autres biens personnels.

  • Embarrer des enfants dans des placards (à des fins punitives).
  • Ségrégation fondée sur le sexe.
  • Interdiction d’utiliser les langues autochtones.
  • Interdiction de pratiquer les rites religieux ou spirituels des Autochtones.
  • Éliminer tout moyen de déposer des griefs, d’informer les parents ou d’informer les autorités extérieures des sévices commis.
  • Main-d’œuvre forcée.

À cette liste, nous devons aussi ajouter :

  • Interdiction des contacts entre frères et sœurs.
  • Forcer les enfants à participer aux volées de coups administrées à leurs condisciples.
  • Forcer les enfants à nettoyer les traces (sang et vomi) des volées de coups dont ils ont été témoins.
  • Actes sexuels forcés entre des enfants, tandis que des personnes en autorité surveillent la scène.
  • Interdire aux enfants de poser des questions ou de parler des enfants qui ont " disparu ".
  • Forcer ceux qui souffrent d’incontinence urinaire à parader en public en portant des draps souillés au-dessus de leur tête.
  • Refuser aux jeunes femmes des serviettes sanitaires, la nuit, puis, publiquement, administrer des volées de coups ou humilier celles qui avaient saigné dans leurs draps.
  • Destruction délibérée des biens personnels des enfants.

Le matériel qui servait à battre les enfants mérite une mention. Les objets suivants étaient d’usage courant dans les différentes écoles, à différentes périodes :

  • Lanières de cuir et de caoutchouc (utilisées dans le cas d’enfants ayant même seulement quatre ans).
  • Lanières avec des punaises, des clous ou des câbles incorporés.
  • Gants de boxe.
  • Planches de bois.
  • Ceintures cloutées.
  • Cinq ceintures à la fois.
  • Bâtons et baguettes.
  • Fouets.
  • Commandes électriques.
  • Peau crue noueuse, lanières de harnais de chevaux noueuses.
  • Fouets à neuf lanières.100

La Commission royale d’enquête a rapporté ce qui suit : " Il arrivait donc fréquemment qu'on batte les enfants à coups de fouet et de bâton, qu'on leur administre des coups de poing, qu'on les enchaîne, qu'on les ligote avant de les enfermer dans un placard, une cave ou un cabinet de toilette, et qu'on leur rase la tête complètement ou presque101. " La Commission a documenté plusieurs cas de violence grave à l’égard de laquelle aucune action n’avait été entreprise contre ceux qui avaient perpétré cette violence, malgré les protestations des inspecteurs et des agents des Indiens. Elle a découvert que des centaines d’enfants s’étaient enfuis pour ne pas avoir à subir les conditions de négligence, de mauvais traitement et de violence102. Grant a observé que les punitions les plus sévères étaient réservées à ceux qui s’étaient enfuis, et que les plus fréquentes étaient administrées dans les cas d’utilisation de la langue autochtone. Les punitions qui avaient tendance à faire perdre le contrôle totalement étaient le plus souvent associées à la langue103. Bien que la plupart des " punitions " correspondaient à des infractions aux règles, plusieurs semblaient relever du caprice, et d’autres visaient des objectifs éducatifs.




Je me souviens de ces années horrifiantes comme si c’était hier. Il y avait une religieuse, sœur Gilberta, qui administrait toujours les punitions. Chaque jour, elle m’amenait dans la salle de bains et barrait la porte. Elle entreprenait alors de me frapper 30 fois sur chaque main... Elle comptait à voix haute le nombre de coups qu’elle me donnait. C’est un moyen affreux d’apprendre à compter jusqu’à trente...1



Un homme raconte l’histoire d’un prêtre qui le frappait avec des lanières, un coup pour chaque lettre de la phrase T-U N-E P-A-R-L-E-R-A-S P-A-S C-R-I jusqu’à ce qu’il atteigne 21 ans104.

Chrisjohn dresse également la liste d’autres infractions :

Imposer des conditions de vie inappropriées

  • Inanition (à des fins punitives).
  • Nutrition inadéquate (p. ex., des niveaux de nutrition en dessous du minimum nécessaire pour assurer une croissance normale et la subsistance).
  • Offrir de la nourriture impropre à la consommation humaine.
  • Exploiter le travail des enfants.
  • Travail forcé dans des conditions non sécuritaires (observation de notre part : parfois pouvant conduire à des blessures permanentes ou à la mort).
  • Services médicaux insuffisants, ce qui entraînait parfois la mort des enfants105.

Chrisjohn réfléchit sur l’argument voulant que la Convention des Nations Unies ne comporte aucune disposition relative au génocide culturel, sauf dans le cas du transfert forcé d’enfants, et qu’elle se limite généralement au génocide physique et biologique106. Il se demande : " Comment l’assimilation forcée peut-elle se réaliser sans causer de sérieux préjudices corporels ou mentaux ?107 " Les documents que nous avons étudiés ou écoutés documentent clairement que le programme d’assimilation des pensionnats et les méthodes décrites ci-dessus pour l’appliquer ont causé des préjudices physiques et mentaux innombrables à l’ensemble des Premières nations.

c) Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle

Se reporter à la partie précédente sur " l’assimilation " en ce qui concerne la théorie, et à la partie qui la précède immédiatement pour ce qui est de la pratique. Par ailleurs, il faut tenir compte de ce qui suit :

" ... la spiritualité est à la base de notre culture. Si on nous l’arrache, notre culture s’en trouve dissoute. Si notre culture est dissoute, le peuple indien en soi cessera d’exister. Par définition, causer la fin d’une culture est un acte de génocide. 108 "

" Si un peuple perd soudainement son " principal symbole ", la base de sa culture, sa vie perd sa signification. Il devient désorienté et sans espoir. La désorganisation sociale suit souvent une telle perte, et il arrive souvent qu’il soit incapable d’assurer sa survivance... La perte et la souffrance humaine de ces peuples dont la culture vigoureuse a été attaquée et désintégrée sont incalculables. 109 "

d) Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe

Cet aspect du génocide n’a pas été appliqué directement dans les pensionnats, quoique la stérilisation involontaire des femmes indiennes et inuit s'est poursuivie dans les hôpitaux du sud jusqu’à ce qu’on en fasse état à la fin des années 1970110.

e) Transfert forcé d'enfants du groupe à un autre groupe

À une époque, la politique des pensionnats consistait à arracher les enfants à l’influence de leurs parents aussi longtemps que possible. Dans l’élaboration de la politique d’éducation des Indiens, l’on croyait que les adultes indiens étaient une " perte pour la civilisation ": " Par leur intermédiaire, ‘l'influence du wigwam’ se transmettait à leurs enfants et aux générations

successives.111 " L’on considérait largement et explicitement qu’il était nécessaire de couper le lien qui attachait les parents et les enfants112.

La législation sur la fréquentation obligatoire des pensionnats mentionnée plus tôt visait à composer avec la résistance croissante des parents autochtones à envoyer leurs enfants dans ces écoles. Les menaces de mettre fin aux rations et aux autres " privilèges " ainsi qu’au paiement des allocations familiales étaient d’autres moyens de forcer les parents à envoyer leurs enfants dans ces écoles. Le financement par personne des écoles, qui constituait une prime pour chaque élève arraché à sa communauté, a conduit à des techniques de recrutement bizarre, y compris " la corruption et le rapt113 ".

Les parents ne savaient pas que, lorsqu’ils signaient la demande d’inscription dans les écoles, ils accordaient au principal le rôle de tuteur de leurs enfants, y compris durant leurs vacances d’été. Quand les enfants ne revenaient pas à l’école, le ministère des Affaires indiennes envoyait des lettres aux agents des Indiens pour le leur rappeler, et mettait l’accent sur le fait que le principal, dans la réalité, était le gardien personnel des enfants114.

Les enfants étaient attirés dans des bateaux et dans des avions sans que les parents le sachent et, parfois, ceux-ci ne les revoyaient jamais plus. Des agents de la GRC en uniforme arrachaient les enfants des bras de leur mère. Plusieurs victimes décrivent les bétaillères et les wagons dans lesquels on les rassemblait en troupeau chaque automne. La pratique de cogner aux portes la nuit et d’envahir les lieux pour trouver les enfants fugueurs rappelle les temps de guerre. Certaines familles ont émigré aux États-Unis pour protéger leurs enfants. D’autres ont trouvé le moyen de se cacher de différentes façons115.

Voici ce que Grant prétend être le plus grand préjudice, et plusieurs témoignages de victimes l’appuient sur cette voie : " ... la violence mentale et psychologique par laquelle on détruisait le lien entre les enfants et leurs parents, leur culture et leur langue. Les enfants ont souffert de la solitude de se retrouver séparés de leurs parents, et les parents ont été dévastés par la perte de leurs enfants. Plusieurs savaient qu’ils envoyaient leurs enfants à un endroit où l’on commettrait toutes sortes de sévices à leur endroit. Cependant, les parents n’avaient pas la possibilité d’intervenir. 116"

Ses questions lourdes de sens reflètent " le préjudice mental " infligé aux peuples autochtones : " Comment les parents indiens ont-ils pu vivre avec cette souffrance ? Qu’est-il advenu des parents et des grands-parents lorsque les collectivités eurent perdu leurs enfants ? Que se produit-il dans la personnalité des enfants lorsqu’on supprime impitoyablement chez eux leur langue et leurs émotions ?... Comment peuvent-ils vivre une fois devenus adultes ? Comment les enfants peuvent-ils réagir quand les adultes qui les entourent leur enseignent que les personnes qui leur sont chères ne sont pas bonnes, et combien de temps cela prend-il pour laver le cerveau d’un petit enfant ? 117 " Les réponses sont évidentes quand on considère la position et la condition sociale et économique des Premières nations au Canada aujourd’hui.




Dès que j’ai quitté l’école, à l’âge de 16 ans, je me suis rendue en ville et je me suis soûlée. J’ai été ivre durant 25 ans. J’ai été enceinte et j’ai donné naissance à une petite fille difforme. Je l’ai donnée pour adoption et je ne l’ai jamais revue. J’ai rencontré un autre homme un peu plus tard, et nous nous sommes mariés. Nous avons eu six autres enfants. Je ne me sens pas vraiment près de mes enfants. Je ne bois plus depuis deux ans maintenant et je cherche vraiment à leur faire part de mes expériences. Je veux qu’ils sachent que je les aime et que si je pouvais revenir en arrière, je m’en occuperais mieux. Je cherche encore à me sortir d’une situation de violence et je fais de grands efforts pour rester sobre, mais, parfois, je me demande pourquoi, parce que les choses étaient beaucoup plus faciles lorsque j’étais soûle.



8. Les conséquences de la violence dans les pensionnats pour enfants autochtones

Les façons dont les préjudices causés aux élèves des pensionnats se manifestent dans la vie des peuples autochtones et dans leurs cultures ont fait l’objet de discussions et d’analyses dans nombre de tribunes ainsi que de rapports provenant de nombreuses sources. Nous présentons ici ces conclusions.

1. L’Assemblée des Premières Nations conclut ceci : " Le résultat le plus scandaleux des pensionnats est une longue liste de pertes :

perte de mémoire,
perte de l’innocence,
perte de signification,
perte de la famille,
perte des liens,
perte de la langue,
perte de l’enfance,
perte des sentiments,
perte de la fierté,
perte de la communauté,
perte d’identité,
perte de confiance,
perte de l’esprit,
perte des habiletés,
perte de la moralité,
perte de vie,
perte de contrôle.

Considérées de manière générale et en fonction des nombreuses générations qu’elles ont affectées, ces pertes constituent un volume colossal de griefs qui, jusqu’à récemment, ont été niés de différentes façons et pour toutes sortes de raisons.118 "

  1. Les participants à la recherche du Conseil tribal Nuu-Chah-Nulth ont dressé la liste des conséquences des pensionnats dans les principaux domaines suivants :

  • La perte de la culture autochtone.
  • La perte du respect de soi. On a enseigné aux enfants à se sentir inférieurs aux Blancs sur le plan culturel, et à se sentir moins que des humains.
  • L’apprentissage acquis dans le pensionnat : se soumettre à l’autorité des Blancs.
  • Établir des relations sociales fondées sur le pouvoir et sur le contrôle et se donner une discipline de style militaire.
  • De retour dans les foyers : les élèves revenaient à la maison incapables de vivre avec la liberté et avaient des modèles de comportement inappropriés; ils manifestaient de l’irrespect pour les coutumes de la famille et du village. Ils n’avaient pas de notion de leur place au sein de la collectivité et ne savaient pas ce que c’était qu’être parents.
  • L’alcool et autres toxicomanies119.

3. La thèse de Rosalyn Ing120 cite différents travaux qui documentent les conséquences intergénérationnelles des pensionnats et leurs effets sur les aptitudes en art parental, y compris l’un des premiers travaux sur le sujet fondés sur la recherche empirique. Cette étude conclut que les pensionnats (les pensionnats indiens) " ont détruit l’estime de soi chez les femmes... entraîné des conséquences négatives sur la façon dont elles se perçoivent elles-mêmes à titre de femmes et de mères et influé négativement leurs interactions familiales. De plus, les effets dommageables... sur les mères affectent à leur tour la génération suivante des enfants "navajos".121 "

Ing s’est préoccupée des conséquences de la séparation d’avec le foyer et les parents; sur la façon dont l’expérience du pensionnat en matière de langue a affecté la capacité d’être parent; et comment les enfants des répondants ont été affectés par la façon dont les répondants eux-mêmes ont été traités lorsqu’ils étaient des enfants. Plusieurs auteurs appuient son affirmation que les comportements des Autochtones, quand il s’agit d’élever les enfants, ont été marqués de façon indélébile par les pensionnats, et ce, pour plusieurs générations.

" Les anciens ont été victimes de grandes pertes psychologiques, pertes que l’on considère habituellement comme des traumatismes dont les effets sont durables : la séparation d’avec les parents et le foyer en bas âge, la séparation d’avec les parents durant les années de développement de l’enfance, l’expérience du pensionnat, la séparation des sexes, les modèles parentaux inefficaces dans les pensionnats — rigidité, manque de compréhension des émotions et de respect et grand autoritarisme.

Ces expériences traumatisantes influenceront leur façon de percevoir le monde, leur compréhension de la culture euro-canadienne, leur interaction avec les autres, leurs relations personnelles et leur art parental. Ils transmettront également ces expériences traumatisantes à la prochaine génération de quelque façon.122 "

Ing réitère l’observation d’Haig-Brown :

" Les anciens élèves qui sont aujourd’hui des parents reconnaissent leurs lacunes dans l’expérience des unités familiales... les enfants acquièrent leurs habiletés parentales à même la façon dont les parents les élèvent. Ceux qui ont passé huit, dix années et plus au pensionnat indien de Kamloops avaient une expérience limitée de ce que c’est qu’être membre d’une famille. De la même façon que l’usage de leur langue se fonde sur la connaissance qu’ils en ont eue avant d’aller à l’école, leurs habiletés en art parental viennent de leur expérience limitée.123 "

Une thèse portant sur la socialisation squamish a révélé que les Squamishs qui sont désormais parents " appartiennent à la génération qui a été arrachée à l’influence des familles et qui a été élevée dans le pensionnat. Cette situation a entamé la culture indienne, elle ne l’a pas renforcée... Parce que les enfants vivaient au pensionnat, les parents ne pouvaient résister à ces attaques contre la culture, puisqu’ils ne les voyaient pas souvent, sinon jamais... Ils n’étaient pas en mesure de conserver les " comportements essentiels " dans les pensionnats et ils ont connu une perte culturelle... et la perte de contact avec les générations voisines.124 "

Ing a trouvé deux autres sources qui portent sur les effets des pensionnats sur les générations subséquentes, par la perte des modèles parentaux que l’on peut faire remonter au manque de rôle parental et de soins nourriciers dans les institutions125.

Les conclusions des entrevues effectuées par Ing étaient que tous les répondants avaient le sentiment :

  • d’avoir été seuls, sans amour et sans soins alors qu’ils étaient enfants;
  • qu’on leur avait volé leur culture, qu’on les avait forcés à penser différemment et qu’ils n’avaient pas reçu la formation à l’art parental;
  • qu’ils avaient essayé de vivre dans deux cultures;
  • qu’ils n’avaient pas une bonne notion de ce qu’ils étaient126.

Les aspects que les participants ont reconnus comme ayant des conséquences intergénérationnelles étaient les suivants :

  • l’estime de soi est affectée;
  • aucun apprentissage des habiletés ou des relations interpersonnelles;
  • aucun renforcement des enseignements moraux autochtones;
  • le concept de soi négatif affecte le rôle parental;
  • les conséquences d’avoir été des enfants laissés à eux-mêmes, sans supervision.

Deux aspects ont eu des effets positifs pour ces répondants :

  • l’éthique du travail (influence de l’école et de la maison) leur a permis de devenir des adultes productifs;
  • le rôle des anciens se poursuivait à la maison et avait une influence positive127.

4. Bien que l’ouvrage d’Isabelle Knockwood tende à laisser le lecteur imaginer et interpréter les conséquences vraisemblables des témoignages de Shubenacadie, les quelques dernières pages portent sur les effets sur les anciens élèves. Le plus sérieux d’entre eux est un ahurissement durable devant ce qui pourrait avoir motivé les prêtres et les religieuses qui dirigeaient les écoles à traiter les enfants comme ils l’ont fait. Il y a aussi reconnaissance d’un éventail de problèmes sociaux subséquents : la dépendance à l’égard des programmes sociaux, le jeu et l’abus d’alcool et des drogues; l’analphabétisme et l’instruction insuffisante128. Plusieurs personnes mentionnent la peur de toucher ou d’être physiquement trop près d’autres personnes comme étant l’un des effets les plus dévastateurs des écoles. Certains se rappellent également de cette inaptitude chez leurs parents qui avaient fréquenté ces écoles.

Knockwood décrit la frustration personnelle qui découle de l’incapacité de confronter et de tenir pour responsables ceux qui ont infligé de si graves préjudices (parce qu’ils sont morts); elle évoque aussi le sentiment que cela ne fait aucune différence que les dirigeants du gouvernement et que certains représentants de l’Église catholique aient demandé pardon aux Autochtones. L’ouvrage Out of the Depths raconte comment plusieurs personnes " ont été capables de transformer leur vie et de se sortir des profondeurs129 ", plusieurs grâce à la redécouverte et au retour à la spiritualité et aux traditions autochtones ou en réclamant à titre d’adultes l’éducation qu’on leur avait niée quand ils étaient enfants.

5. Elizabeth Furniss allègue que l’expérience du pensionnat n’explique pas seulement plusieurs des difficultés que rencontrent les peuples autochtones dans leurs vies personnelles, mais qu’elle incarne les problèmes profondément ancrés dans l’histoire qui ont imprégné les relations entre les Indiens et les Blancs au Canada depuis des siècles130. Elle cite Ing, Bull et Sellars au sujet des conséquences de la séparation d’avec les familles, des punitions physiques empreintes de rudesse, du fait de nier le droit de parler les langues d’origine, de l’endoctrinement avec des messages d’infériorité personnelle et culturelle, des conséquences psychologiques et sociales du programme d’assimilation et du dévoilement récent des questions entourant les pensionnats. Elle traduit les conséquences des pensionnats comme étant les hauts taux d’alcoolisme, de suicide et de violence sexuelle, la perte de la langue et de la culture, la faible estime et fierté de soi, les ruptures familiales, la perte d’habiletés en art parental, la dépendance à l’égard des autres et la perte d’initiative.

6. Les comptes rendus des réunions du pensionnat de la Nation Nishnawbe-Aski contiennent des listes détaillées des pertes causées par les pensionnats et des préjudices causés aux comportements des Premières nations en ce qui concerne la manière de penser, de voir, d’entendre, de sentir et de parler. Ils mettent en évidence l’affirmation de toute la recherche sur les pensionnats selon laquelle ces effets ont été ressentis parmi les enfants, la jeunesse, les adultes et les anciens de chaque Première nation dont les enfants ont dû fréquenter les pensionnats. Les participants ont défini les pertes qui suivent :

  • la perte de la culture, qui est la perte de la langue, de la religion et de la justice;
  • la perte du lien avec la terre perdue et de la liberté de spiritualité;
  • la perte de l’innocence de l’enfance;
  • la perte des enseignements culturels et de l’histoire familiale;
  • la perte de l’innocence et de l’identité;
  • la perte de l’estime de soi et de la confiance en soi; les personnes conditionnées à vivre dans la confusion au sujet de leur patrimoine et de leur identité;
  • la perte d’habiletés en art parental et d’une expérience familiale complète;
  • la perte de soins nourriciers;
  • la perte des relations avec la cellule familiale et avec la collectivité; un sentiment d’isolement (la perte d’appartenance);
  • la perte de l’amour et de la sécurité;
  • la violation de la dignité (cheveux coupés, usage du D.D.T. pour se laver le corps);
  • la démoralisation;
  • la perte de souvenirs positifs de l’enfance;
  • l’apprentissage de ne pas dire ce qu’on pense; formation à ne pas questionner, ce qui conduit à des personnalités sans sentiments ou qui ne réagissent pas;
  • la perte du respect pour tout (terre, anciens, culture);
  • être programmés à ne pas avoir d’occasions de prendre des décisions;
  • la perte des relations avec ses frères et ses sœurs;
  • la privation de nourriture, de médicaments et de traitements médicaux131 .

Les conséquences de ces pertes comprennent les situations qui suivent ou y ont conduit :

  • le suicide;
  • la dépendance à l’égard de la société non autochtone;
  • l’aliénation familiale et communautaire;
  • l’apprentissage de ce que la violence et les autres situations de victime sont acceptables;
  • l’apprentissage d’accepter une grande tolérance à l’égard de la violence;
  • la crainte de Dieu, que si on est mauvais on ira en enfer;
  • être privé d’être soi-même et de savoir qui l’on est, de l’individualité;
  • devenir raciste;
  • être en colère et diriger cette colère vers les gens qu’on aime;
  • la difficulté de prendre des décisions et de dire " non ";
  • la peur de perdre ses propres enfants;
  • les personnalités passives ou agressives;
  • apprendre à punir les autres en les dépréciant;
  • la colère à l’égard des parents;
  • l’insécurité et le manque de confiance;
  • les sentiments de culpabilité du fait qu’on vit dans un contexte de honte;
  • la honte d’être autochtone; le sentiment de ne pas être propre;
  • les cauchemars récurrents;
  • vivre malheureux;
  • l’amnésie et les trous de mémoire;
  • la dépendance à l’égard de l’alcool, des drogues, de la nourriture et du jeu;
  • la crainte de l’intimité;
  • l’adoption de méthodes de discipline rudes;
  • le développement de maladies physiques et mentales;
  • la dissociation entre les processus de guérison et d’enseignement et la personne en ressourcement, l’enfant, la famille et la collectivité;
  • le développement de conflits intérieurs qui conduisent à un sentiment de ne pas être une entité;
  • l’inaptitude à entrer en relation avec les autres au retour à la maison;
  • le changement dans nos propres systèmes de valeurs; l’altération des croyances et des valeurs; la croyance forcée aux religions chrétiennes;
  • l’inaptitude à communiquer;
  • l’inceste et le développement d’autres problèmes d’ordre sexuel;
  • l’apathie;
  • les problèmes par rapport aux représentations de l’autorité;
  • ne pas savoir comment s’occuper de soi et toujours ne penser à soi qu’en dernier lieu;
  • le manque de modèles parentaux positifs parce que la majorité du personnel des pensionnats était sans conjoint;
  • la perte de membres des Premières nations qui ont choisi de ne pas reconnaître leur identité, leur collectivité ou leur patrimoine;
  • la colère à l’endroit des Églises, de la société dominante et envers soi-même;
  • les sentiments de haine;
  • les sentiments de désespoir et de solitude;
  • l’encouragement des systèmes de classe par le personnel des pensionnats a conduit au développement de groupes;
  • le stress quotidien, puisqu’il faut chercher et continuer de guérir chaque jour;
  • le fait de transmettre tous ces traits négatifs aux enfants.

Bien que les participants aient pu reconnaître huit avantages reliés à la fréquentation des pensionnats, " il est très apparent que les effets négatifs l’emportent sur les effets positifs ". La colère et la souffrance ont entraîné nombre de suicides et de décès prématurés. Les participants remarquent que la plupart des suicides chez les jeunes sont ceux d’enfants dont les parents ont fréquenté les pensionnats. La liste des conséquences et des effets se conclut ainsi : " Cette invasion et cet assaut contre la famille, le foyer, la collectivité et le pays ont été une tentative de génocide culturel et humain. 132 "

7. À partir de travaux tirés en grande partie des entrevues avec d’anciens élèves ainsi que de documents historiques, Agnes Grant a conclu que les pensionnats ont réussi " d’assez bonne façon " à atteindre leur but d’aliéner les enfants de leurs parents et de leurs coutumes tribales. " Quand les enfants n’étaient pas ouvertement aliénés et honteux de leur patrimoine, ils avaient une grande difficulté à se réadapter à la vie parmi leur propre peuple. 133 "

Grant établit des liens directs entre les politiques adoptées historiquement et l’état des Premières nations aujourd’hui, y compris que " la Loi sur les Indiens a également assuré qu’un système hiérarchique gouverne les réserves... les élèves ont été formés à accepter ce système...  ", que la raison du plus fort est toujours la meilleure, " (ces) enseignements ont eu des conséquences indélébiles sur les politiques en matière de réserves qui sont encore évidentes aujourd’hui134. " Lorsqu’elle aborde la question du leadership politique contemporain, elle observe que la plupart des leaders politiques et de l’éducation des Premières nations, de nos jours, viennent des rangs de ceux et celles qui ont fréquenté les pensionnats, et que cela ne devrait pas être interprété comme une justification de ces régimes répressifs. Le leadership politique se limite à un petit nombre de personnes, et exclut presque entièrement les femmes. Cela concorde avec les pratiques patriarcales classiques, une autre méthode utilisée pour briser les familles et pour dévaluer la culture135. Grant cite Doris Young, qui blâme également les pensionnats pour la quasi-destruction du gouvernement et du rôle des femmes au sein des Premières nations, soulignant que l’opinion des femmes a été ignorée et n’a pas été respectée dans le processus de prise de décisions, et elles ne sont pas encore respectées comme elles l’ont déjà été136.

Grant souligne que les écoles sont venues dangereusement près d’atteindre leur objectif d’éliminer les langues autochtones. Une partie détaillée sur la langue met en lumière les observations d’Ing et d’autres en ce qui concerne le grave préjudice psychologique qui découle du fait d’avoir imposé le silence aux enfants, quoique Grant remarque également que ceux qui connaissaient déjà leur langue au moment où ils ont commencé l’école avaient une assez bonne chance de la retenir, notamment ceux qui pouvaient retourner à la maison l’été. Les témoignages d’un grand nombre d’élèves viennent appuyer les conclusions de la dévastation individuelle et culturelle générale à laquelle ont présidé les écoles et font écho au commentaire d’un ancien élève de l’école de métiers St. Joseph’s, qui avait gardé sa rage pour lui-même durant 45 ans : " Qui sait ce que j’aurais été, si je n’y étais pas allé ?137 "

8. James Miller et Edmund Danziger ont observé que l’expérience du pensionnat de la Première nation de Walpole Island, après la Première Guerre mondiale, était grandement individualisée et variait de positive (33 % des répondants) à négative (25 %)138. Ils concluent que les effets négatifs des pensionnats ont été importants, mais n’ont pas modifié entièrement le développement de la collectivité. Plusieurs femmes qui ont mentionné avoir eu une expérience scolaire " surtout positive " ont toutefois indiqué le manque de soins et de soutien émotionnel. Certaines d’entre elles ont affirmé qu’en raison de leur passage au pensionnat, elles ont eu de la difficulté à montrer leur affection à leurs propres enfants139.

9. L’ouvrage de Fournier et Crey constitue une exploration détaillée portant spécifiquement sur les résultats des politiques passées et courantes du Canada à l’égard des peuples autochtones, y compris des pratiques des pensionnats et en matière de bien-être des enfants. Les conséquences qu’ils explorent, telles que l’alcoolisme, la violence sexuelle et physique, le suicide, le syndrome d’alcoolisme fœtal et la pauvreté, sont bien connues des Autochtones partout au Canada140.

10. La démarche historique méticuleuse de J.R. Miller examine les programmes des Églises et du gouvernement en ce qui concerne l’établissement et la direction des écoles. Miller se penche aussi sur les expériences des pensionnats et sur leurs effets sur les élèves eux-mêmes par le moyen d’entrevues et de documents de première main. Comme Furniss, Crey et d’autres, Miller considère que les pensionnats ont été un élément important de la destruction de l’identité et de la culture autochtones. Il illustre la complexité des questions étroitement reliées; que jamais, par exemple, l’on ne peut pointer du doigt ni les traités ni les pensionnats comme la seule cause du phénomène. Son analyse historique comprend les témoignages de nations qui ont elles-mêmes demandé un traité dont elles ont déterminé les conditions, et d’autres qui ont construit et financé leur propre pensionnat et ont choisi la mission pour des raisons particulières141. Il poursuit en montrant comment l’autonomie et le contrôle manifestés dans ces initiatives ont été de plus en plus érodés et renversés pour satisfaire la volonté du gouvernement. Miller souligne qu’avant 1950 moins d’un tiers des enfants inuit et inscrits et une proportion encore moindre d’Indiens non inscrits et de Métis ont fréquenté les pensionnats142.

Miller examine les incidences dramatiques et très négatives des pensionnats sur les familles et sur les collectivités des Premières nations ainsi que l’histoire d’inaction et de négation gouvernementales à leur sujet. Il illustre la façon dont " l’héritage nocif " des pensionnats fait encore sentir ses effets aujourd’hui. À l’aide des exemples d’Oka et de Davis Inlet, entre autres, il montre comment " l’attitude nous-savons-mieux-que-vous-ce-qui-est-bon-pour-vous est toujours vivante et perdure143 ".

11. En se concentrant grandement sur l’anthropologie, Lyndy-Lou Flynn documente également le préjudice culturel causé par le colonialisme, particulièrement la période de 100 ans qu’a durée le " rapt légalisé " dans les pensionnats et les problèmes de fonctionnement et d’orientation qui ont résulté pour les personnes et pour les collectivités des Premières nations. L’ouvrage de Flynn met l’accent sur le silence imposé aux Autochtones : " ... jusqu’aux années 1970, l’on a gardé les peuples autochtones isolés et silencieux dans leurs réserves et dans les pensionnats, dans les bas-fonds et autres lieux de "mort apparente"144 ". Bien que plusieurs aient été au courant que la désintégration sociale dont ils étaient les témoins résultait de la violence apprise dans les pensionnats et transmise, la crainte, la honte, le trouble, la colère et la confusion ont empêché les gens de parler.

Flynn décrit le code du silence qui a enveloppé les réserves et les collectivités autochtones (et qui enveloppe encore certaines d’entre elles) et se demande : " Comment dire ses quatre vérités à votre propre peuple quand vous comprenez comment il en est arrivé là ? Et comment entreprendre une démarche de guérison quand vous savez que... les Blancs, une fois que vous leur aurez exposé vos problèmes, se serviront de cette information pour vous contrôler encore davantage ? 145 "

Lorsqu’elle examine les nombreuses manières dont le silence a été brisé, Flynn explique que les témoignages sur les pensionnats sont faits en partie pour que " les Blancs comprennent que (les Autochtones) n’étaient pas vulnérables sur les plans biologique et culturel à l’alcoolisme ou à la violence familiale, mais que ces problèmes sont des aberrations146 ", le résultat de l’imposition de politiques cruelles régissant tous les aspects de la vie, et ce, durant plusieurs générations.

L’un des effets inattendus des pensionnats sur lequel Flynn attire l’attention est que l’usage forcé d’une langue commune et les amitiés et les alliances forgées dans les pensionnats ont permis d’établir un réseau de loyautés et d’activistes politiques parmi tous les peuples autochtones. Les histoires échangées mutuellement sont devenues le fondement d’un nouveau discours et une question commune du programme politique contemporain147.

12. L’étude empirique la plus importante des effets des pensionnats se trouve dans Faith Misplaced, le résultat de l’effort conjoint du Conseil tribal de Cariboo et de l’University of Guelph. Cette étude a démontré que les effets à long terme des pensionnats ont été une incidence négative sur les relations avec les autres et (de façon surprenante) une conséquence positive sur les sentiments d’appartenance à une identité indienne. Les répondants dont les pères ont fréquenté les pensionnats étaient plus vraisemblablement portés à mentionner que leur père avait battu leur mère. Les autres effets sur les pères ont été l’émergence d’un plus grand nombre de problèmes personnels, des formes plus sévères de punition, moins d’attention portée aux enfants et moins d’affection manifestée à leur égard148.

En utilisant la liste de vérification des symptômes de traumatismes de Brière et Runtz, cette étude est le reflet d’autres études en ce qui concerne les différences découvertes entre les répondants qui ont été victimes de violence, y compris des problèmes de sommeil, de dépression, de comportements dépressifs, de colère et de sexualité, et ceux qui ne l’ont pas été. Entre autres différences, les répondants victimes de violence avaient plus de difficulté à exprimer leur amour, recouraient davantage à des punitions physiques et verbales et se sentaient moins près de leurs parents. Les chercheurs concluent : " Nous ne croyons pas qu’il puisse y avoir un doute sérieux quant au fait que les différentes expériences examinées ici ont des effets importants à long terme. Il n’est plus possible de chercher à gagner du temps149. "

13. Le dernier ouvrage de Roland Chrisjohn sur les pensionnats reconnaît les effets des violences horribles qu’il répertorie, mais se concentre sur le prodigieux plongeon dans l’illogisme typique des études faites sur la violence dans les pensionnats, sur ses effets et, plus encore, sur les enjeux entourant leur réparation. Il est très critique de la méthodologie selon laquelle l’oppression est une expérience émotionnelle individuelle de l’ordre du mauvais traitement, plutôt que le mauvais traitement institutionnalisé de populations marginalisées. Il trouve dans cette perception une continuité du même fondement idéologique qui sous-tend l’oppression. The Circle Game pose ceci : le point de vue délibérément faux que les pensionnats sont une erreur qui découle malheureusement d’une bonne intention, a engendré, tout aussi délibérément, une réaction qui " concentre toute notre attention sur des explications personnelles, individuelles et internes de nature putative, et nous éloigne des explications morales, légales, politiques et économiques flagrantes150. "

L’on a recouru à plusieurs démarches pour susciter un débat dans le cadre duquel les bonnes intentions sont mesurées en rapport avec les mauvais résultats, le tout en fonction de " la nature et de la portée " des pathologies individuelles. Le fait de mettre ainsi l’accent sur le caractère individuel ainsi que sur les effets spécifiques personnels, communautaires et sociaux, laisse de côté l’immoralité et l’illégalité du principe qui était à la base des actions des gouvernements, de la bureaucratie, des Églises et de la société. Cette façon de faire transforme le tout en problèmes personnels et psychiatriques des adultes autochtones. Chrisjohn allègue que, dans la recherche pour établir les conséquences particulières et les moyens de réparation, nous continuons de manquer le point le plus important, qui est celui-ci :

L’on relègue à l’arrière-plan l’immoralité que recèle le fait de croire qu’il est normal d’imposer à des peuples souverains une autre religion, une autre langue et une autre façon de vivre, tout en détruisant celles qui existent. L’on met de côté la question du génocide, de l’illégalité d’une législation qui arrache les enfants aux soins de leurs parents et de leurs familles et qui les place sous l’autorité d’organisations dont la vocation est de détruire ce qu’ils sont. L’on cache le motif politique prévalant au fait d’interpréter une obligation d’instruire comme une permission d’endoctriner. La question de l’impératif économique de réduire les coûts de production en expropriant la propriété des nations autochtones emprisonnées et sans défense n’est jamais soulevée. Et l’on évite de manière fort commode le sujet de la relation sociale empreinte de racisme débridé, qui offrait une justification voilée pour les mesures les plus extrêmes151.

Je ne sais pas vraiment être une bonne mère. Ma mère a fréquenté le pensionnat et je m’insurge parfois, quand je pense qu’elle m’y a envoyée même si elle savait que ce n’était pas un bon endroit. Longtemps, j’ai été en colère à son endroit, jusqu’à ce que je devienne sobre. Ma mère boit encore, et je sais que c’est parce qu’elle a trop de mauvais souvenirs et qu’elle ne peut y faire face. Maintenant, j’ai moi-même des petits-enfants, et je dis à mes propres enfants que je veux qu’ils élèvent leurs enfants de la bonne façon. Je sais que mes enfants ont été affectés par mon alcoolisme, mon fils a toujours des difficultés avec la loi. Je ne laisserai pas mes petits-enfants être affectés par l’alcool et par la violence physique. Cela doit finir dans ma famille

9. Conclusions

Il y a des victimes de violence qui affirment : " Nous avons prouvé que les gens peuvent guérir de cette expérience1 ". Il y en a d’autres qui parlent et qui écrivent, fort et clair, au sujet des attentes et des besoins qu’ils ont définis. Ces personnes semblent toutefois être une minorité parmi ceux et celles qui ont vécu l’expérience des pensionnats pour enfants autochtones.

9.1 Conclusions empiriques

Le tableau 1 et la figure 1 montrent les nombres et les proportions des personnes qui définissent des attentes en matière de réparation et de besoins particuliers dans leurs déclarations au sujet des expériences des pensionnats pour enfants autochtones. Ces chiffres apparaissent pour chacune des quatre sources examinées en détail ainsi que pour l’ensemble des sources. Le tableau 2 dresse une liste des actions de réparation et des besoins particuliers définis par les victimes selon les différentes sources. Les besoins exprimés par les victimes semblent changer avec le temps et aussi selon la tribune où elles les expriment. Les conclusions que nous présentons ici se fondent sur quatre ensembles de déclarations de victimes et semblent cohérentes avec celles de la littérature et des études examinées.

1. Graham, Elizabeth. The Mush Hole: Life at Two Indian Residential Schools

La recherche effectuée par Graham est importante parce qu’elle constitue l’un des premiers projets qui a enregistré les déclarations d’un groupe assez nombreux d’anciens élèves des pensionnats pour enfants autochtones. Il y a eu enregistrement des souvenirs de 55 personnes dans le cadre d’entrevues sans cérémonie au cours desquelles les questions posées étaient générales et ouvertes. Les entrevues ont eu lieu entre 1988 et 1993. Dans une lettre, Mme Graham signale que la recherche entourant son ouvrage a eu lieu " avant que les gens pensent à un dédommagement ou, même, à une guérison. " Ce n’est pas la chercheuse qui a suggéré les effets négatifs ou le besoin de réparation. Plutôt, certains besoins et certaines recommandations ont émergé au cours des entrevues.

Près de la moitié des participants ont décrit une expérience généralement positive des pensionnats, malgré des souvenirs de faim, de piètre alimentation, de ne pas pouvoir parler sa langue et d’avoir été témoin ou d’avoir reçu des coups de lanières. Souvent, l’on mettait l’expérience en relation avec les conditions d’extrême pauvreté qui prévalaient à la maison.

Plusieurs personnes ont exprimé de la colère ou du regret dans deux domaines : 12 d’entre elles, parce qu’elles n’ont pas eu droit à une meilleure instruction ou à une instruction qui leur aurait permis d’atteindre l’école secondaire; 14 personnes, parce qu’elles ont perdu ou n’ont pas pu faire l’apprentissage de leur langue et de leur culture. Il y a description des expériences et des sentiments, mais pas nécessairement en relation avec un " besoin " ressenti subséquemment au cours de la vie.

Parmi les 55 personnes, 11 ont accepté volontairement d’analyser les conséquences négatives du traitement dont elles avaient fait l’objet dans les pensionnats pour enfants autochtones qu’elles ont respectivement fréquentés, telles que ces conséquences se sont manifestées plus tard dans la vie, soit pour elles-mêmes ou pour d’autres personnes. Parmi celles qui ont relevé des conséquences de ce traitement, une femme a décrit son expérience personnelle comme ayant été positive, trois personnes ont décrit leur expérience comme ayant été neutre ou " à la fois bonne et mauvaise ", et sept, comme ayant été l’objet d’un traitement empreint de violence. Les conséquences perçues par ces personnes étaient les suivantes :

  • la crainte et la perte de confiance (1);
  • les problèmes en matière d’art parental (2);
  • l’alcoolisme (4);
  • la violence reliée à l’alcoolisme (2);
  • le sentiment de souffrir d’une blessure et de porter une haine en soi (1);
  • les problèmes personnels (2).

Encore moins de ces répondants avaient " fait quelque chose " ou avaient reconnu que quelque chose " pourrait être fait " (possibilités de réparation entrevues) en guise de réaction aux conséquences de l’expérience du pensionnat pour enfants autochtones. Parmi les répondants :

  • deux personnes ont mentionné le besoin que les écoles soient dirigées par les Autochtones;
  • une personne a fait des efforts délibérés pour faire l’apprentissage de la langue et de la culture de son peuple vers la cinquantaine;
  • une personne avait suivi une thérapie; une autre s’occupait de ses problèmes émotionnels, mais n’a pas dit comment;
  • une personne a dit qu’un homme " est entré en communication avec tous les élèves au sujet de leurs plaintes " et " m’a amené voir un avocat. J’ai apprécié cela. " (Aucun autre détail donné).

Le diagramme à barres (figure 1) montre la proportion des gens dont le témoignage était strictement descriptif. La figure 2 montre la distribution des six besoins qui ont été définis.

2. La Commission royale d’enquête sur les peuples autochtones, Pour sept générations : legs documentaire de la Commission royale d’enquête sur les peuples autochtones2.

La Commission royale d’enquête sur les peuples autochtones (CRPA) a été la première tribune documentée où de grands nombres de personnes ont eu l’occasion de donner volontairement des renseignements au sujet de leurs expériences respectives des pensionnats pour enfants autochtones. Comme les témoignages n’étaient pas dirigés vers des questions particulières, l’on peut présumer que les gens ont parlé des sujets qu’ils jugeaient importants. La CRPA peut avoir suscité une attente au sujet d’une action à prendre pour s’occuper du préjudice historique causé aux Premières nations et pour commencer à y remédier. Nous pourrions donc nous attendre à y trouver une plus grande proportion de personnes qui définissent les conséquences de leur expérience et qui commencent à exprimer des besoins en matière de réparation.

La CRPA a entendu le témoignage de 1 623 intervenants autochtones entre avril 1992 et avril 1994 : 591 particuliers et les représentants de 1 032 organisations. Parmi les témoignages, l’on retrouve 913 références aux pensionnats pour enfants autochtones. Nous avons examiné 308 de ces références : elles proviennent de 95 particuliers qui parlent des pensionnats pour enfants autochtones. La plupart (71 p. 100) des témoignages décrivent les traumatismes terribles qu’ont subis les enfants autochtones dans les pensionnats ainsi que les effets durables et dévastateurs de ces traumatismes dans la vie des gens.

Parmi ces 95 personnes, 28 anciens élèves ont défini 36 besoins en mentionnant des actions qui pourraient ou devraient être prises, ou les deux, pour répondre à leurs préoccupations. Il y a aussi eu cinq déclarations générales au sujet de l’urgence ou de la nécessité d’agir, mais elles ne faisaient aucune relation avec quelque moyen précis de réparation. L’annexe 3 indique les témoignages que nous avons examinés et donne la liste des témoins ainsi que le thème ou la conséquence dont ils ont parlé et les réparations ou les besoins qu’ils ont définis relativement aux pensionnats pour enfants autochtones.

Voici la répartition des mentions au sujet des besoins :

A) Sept commentaires reliés à la connaissance et à la compréhension du public.

  • Informer la société dans son ensemble.
  • Le besoin de discuter des pensionnats pour enfants autochtones et de comprendre pourquoi ils ont existé.
  • Le besoin d’un dialogue franc, particulièrement entre les personnes qui ont fréquenté les pensionnats pour enfants autochtones et les Églises qui les ont dirigés.
  • Le besoin de faire un bilan public.
  • Le besoin de faire une enquête publique.
  • La société canadienne dans son ensemble doit connaître les effets désastreux des pensionnats pour enfants autochtones.
  • Le besoin d’examiner et de compléter les dossiers sur l’enlèvement d’enfants, sur la distance qui les éloignait de chez eux, sur le coût de leur enlèvement et de l’entreprise de destruction dirigée contre eux, sur le manque d’amour et de bonté qu’ils ont subi ainsi que sur l’alcoolisme, la violence et les suicides qui ont résulté de cette situation.

B) Cinq commentaires portaient sur la divulgation.

  • Le besoin de parler pour divulguer l’expérience vécue.
  • Le besoin de parler de l’expérience vécue.
  • Les besoins de faire savoir et d’exprimer l’expérience vécue.
  • Tenir des cercles de guérison pour que les gens puissent commencer à parler de leurs expériences.
  • Le besoin d’amener les gens à comprendre ce qui s’est passé lorsqu’ils sont entrés au pensionnat pour enfants autochtones.

C) Sept commentaires au sujet de la guérison et du rétablissement.

  • La guérison est un facteur très important.
  • Il doit y avoir guérison, y compris pour les contrevenants.
  • Il doit y avoir un service aérien, car 15 minutes passées avec un psychologue, ce n’est pas assez.
  • Le besoin de passer par une longue démarche de guérison.
  • Le besoin de services de santé mentale.
  • La possibilité d’un centre de guérison.
  • La thérapie.

D) Six commentaires reliés à un dédommagement individuel.

  • Un dédommagement désiré.
  • On a entendu parler de dédommagement.
  • Un dédommagement pour les problèmes et pour l’expérience dévastatrice.
  • Une certaine aide devrait être offerte.
  • Les Églises doivent dédommager les personnes pour certaines des choses qu’elles ont faites.
  • Un dédommagement est nécessaire.

E) Cinq commentaires au sujet d’un dédommagement / du développement culturel et des collectivités.

  • Encore plus d’argent pour retrouver et conserver la culture.
  • Dédommagement : deux millions de dollars par année pour la nation nuu-chah-nulth; de l’argent et des ressources pour l’enseignement, pour des écoles, pour la langue.
  • Le manque de ressources pour composer avec les effets, spécialement au moment où l’alcool et les drogues seront en vente libre dans les villages.
  • Le besoin de ressources, de terres, d’immeubles où les gens peuvent s’occuper des problèmes qui ont résulté de l’expérience.
  • Le gouvernement devrait investir une forte somme d’argent, puisqu’il est responsable.

F) Trois commentaires spécifiques sur les habiletés parentales.

  • Les habiletés parentales (perte).
  • Le besoin d’habiletés parentales.
  • Les habiletés parentales; tenter d’enseigner les valeurs et les langues indiennes aux enfants et leur inspirer un sentiment de fierté.

G) Trois commentaires sur les excuses.

  • Le besoin d’excuses.
  • Les excuses ne sont pas suffisantes.
  • Personne ne s’est jamais excusé.

H) Un commentaire sur les responsabilités de la Gendarmerie royale du Canada (GRC).

  • La GRC doit aussi être responsable, puisqu’elle a participé à l’application des lois en procédant à des arrestations et en enlevant les enfants.

I) Cinq commentaires portant sur l’urgence ou sur des solutions, mais sans mentionner des sujets particuliers.

  • La nécessité de s’occuper de la question, et vite.
  • La nécessité de faire quelque chose immédiatement.
  • La nécessité d’entreprendre la tâche, de s’occuper de la question immédiatement.
  • La nécessité que les membres des collectivités commencent à s’occuper de la question.
  • Les réserves et les collectivités peuvent avoir besoin de solutions différentes.

La figure 3 illustre les besoins sous forme de graphique.

3. Conseil tribal nuu-chah-nulth, Indian Residential Schools: The Nuu-chah-nulth Experience et Beyond Survival (vidéo)

Les anciens élèves définissent une variété croissante de besoins dans Beyond Survival3 et dans Indian Residential Schools4, ce qui traduit vraisemblablement une sensibilisation accrue et une augmentation des attentes. La bande vidéo de la conférence sur la guérison et l’étude du Conseil tribal ont été des efforts autonomes entrepris à des fins expresses de " provoquer la guérison " et de commencer à porter ces questions à l’attention du public. Nous avons examiné les témoignages de 18 personnes qui, entre elles, ont défini 36 besoins. Bien que l’étude du Conseil tribal ait compris 96 participants, nous n’avons inclus que ceux dont les témoignages à la première personne ont été reproduits dans le livre ou dans la bande vidéo. Nous avons noté un certain dédoublement dans les présentations à la CRPA, alors que des intervenants nuu-chah-nulths se trouvaient parmi les gens et exposaient clairement les besoins et les attentes.

La figure 1 montre que la proportion de gens qui présentent un témoignage qui ne comprend pas d’analyse des besoins subséquents est beaucoup plus faible (33 p. 100). La figure 4 montre que 28 p. 100 des intervenants nuu-chah-nulths qui ont identifié des besoins ont parlé de ressources en relation thérapeutique /guérison et d’initiatives axées sur les personnes. Plusieurs de ces énoncés étaient reliés aux cercles de guérison qui avaient eu lieu et que les participants avaient trouvés bénéfiques. Les demandes pour un dédommagement individuel et pour des dédommagements /mesures pour la perte de la culture et pour la revitalisation de la collectivité ont atteint, dans les deux cas, 17 p. 100 des besoins mentionnés. Il commence également à y avoir des énoncés au sujet de la nécessité d’entreprendre une action en justice et de recourir à la justice pénale, des énoncés sur la guérison intergénérationnelle ainsi qu’au sujet de l’importance du contrôle des programmes et des démarches par les Nuu-Chah-Nulths. Il y a deux mentions du besoin d’une enquête publique. L’on a également soulevé les besoins en matière d’habiletés parentales, d’excuses et d’une action urgente.

4. Coupures de journaux (1996 à 1998)

Le portrait change de nouveau lorsque nous examinons les coupures de journaux pour y trouver des mentions se rapportant aux pensionnats pour enfants autochtones5. Dans 76 articles, lettres et éditoriaux, tirés principalement des journaux des Premières nations et des journaux nordiques ayant une grande diffusion chez les Autochtones, nous avons trouvé 109 énoncés au sujet de besoins identifiables. Seulement dix de ces documents étaient strictement descriptifs de l’expérience des pensionnats pour enfants autochtones.

(Tableau 1) Plusieurs articles visaient à faire un " énoncé de besoins ". La variété des attentes et des besoins qu’on y exprime n’est pas beaucoup plus étendue que dans le cas de l’expérience des Nuu-Chah-Nulths, mais on y trouve certaines différences.

La demande à l’effet qu’il y ait sensibilisation du public et reconnaissance de la situation, habituellement sous la forme d’une enquête, revient dans 23 . 100 des documents examinés. L’attente d’un dédommagement pour les personnes se présente dans 17 p. 100 des énoncés. L’expression de besoins en matière de services de guérison et de thérapie pour soigner les effets des préjudices subis est un peu moins importante que dans le cas des énoncés des Nuu-Chah-Nulths (20 p. 100), ce qui peut s’expliquer par l’aspect plus thérapeutique et personnel de l’initiative de ces derniers. Le besoin d’excuses de la part des Églises et de l’État, y compris l’insatisfaction au sujet de la Déclaration de réconciliation6 se retrouvait dans 14 p. 100 des besoins exprimés. La question d’un dédommagement en vue de revitaliser la culture et les collectivités et le souhait que des actions en justice pénale et civile soient entreprises représentaient chacun 10 p. 100 des énoncés. Dans les imprimés, l’analyse politique des causes et des conséquences est plus importante. Dans quatre cas, des personnes ont écrit au sujet du besoin de restitution des terres ou de l’autonomie nationale, ou les deux, à titre de moyen intrinsèque de résoudre les questions découlant de l’expérience des pensionnats pour enfants autochtones. Il y a également eu mention du contrôle des programmes et des démarches par les Premières nations. La figure 5 illustre ces résultats.

Résumé

La figure 6 montre la distribution des énoncés de besoins provenant des quatre sources : la plus grande proportion des intervenants se préoccupe des besoins personnels que sont la relation thérapeutique et la guérison, une enquête publique, un dédommagement pour les victimes en tant que personnes et une réparation générale pour avoir détruit la culture et les collectivités.

Nous soumettons, toutefois, qu’il y a un changement rapide dans la nature et dans la fréquence des demandes associées à la violence dans les pensionnats pour enfants autochtones. Les personnes qui pouvaient ne pas avoir analysé leurs expériences respectives relativement à leurs effets personnels et collectifs, il y a dix ans, le font presque certainement aujourd’hui. À mesure que la reconnaissance de l’histoire et des motifs politiques des pensionnats pour enfants autochtones s’étend, la pression en vue d’une réparation, sur le plan politique, qui toucherait la nature des relations et l’équilibre des pouvoirs pour les Autochtones au Canada augmente indubitablement. Malheureusement, nous n’avons pas compté le nombre de personnes qui ont mentionné " Oka " et " Gustafsen Lake " au cours des discussions sur les pensionnats pour enfants autochtones. Ce chiffre aurait été considérable. Pour plusieurs, les parallèles sont clairs et les attentes à l’égard d’actions importantes sont élevées.

À titre de question touchant tous les peuples autochtones de l’ensemble du Canada, et ce, depuis plusieurs générations, l’enjeu entourant les pensionnats pour enfants autochtones unit des centaines de cultures et de peuples différents autour d’une reconnaissance commune d’une injustice et d’une oppression partagées.

Notre observation finale à l’égard des témoignages examinés est que le contexte dans lequel les gens discutent et obtiennent une meilleure compréhension des conséquences des expériences de la violence affecte leurs perceptions de leurs besoins et de la meilleure façon d’obtenir réparation. Du fait que des groupes se sont concentrés sur les griefs, sur les traumatismes personnels et sur leurs conséquences ainsi que sur la façon dont ils ont affecté leurs vies et leurs communautés, les recommandations portent davantage sur la guérison à titre de solution aux problèmes collectifs. D’autres peuvent considérer les pensionnats pour enfants autochtones comme un " symbole ", l’un des moyens par lesquels les Européens ont établi leur pouvoir sur les Autochtones et en ont fait des citoyens de seconde zone. Leurs recommandations sont de nature plus politique, car ils cherchent à obtenir réparation de manière à modifier l’équilibre des pouvoirs entre les Canadiens autochtones et non autochtones7.

La mauvaise foi apparente, l’inaction ou l’obstruction (voir, par exemple, l’article reproduit à l’annexe 4) de la part de ceux qui sont réputés être responsables de la violence qui a eu lieu augmentera inévitablement l’appui à ceux qui ont une analyse politique, plutôt que personnelle, des conséquences de l’expérience des pensionnats pour enfants autochtones.

Je me souviens quand je buvais durant ma jeunesse. J’étais en ville et je venais à peine de quitter le bar. Je remontais la rue, lorsque j’ai vu une religieuse. J’ai tenté de la battre et l’on m’a arrêté. Une fois devant le juge, j’ai tenté de lui expliquer que je voulais la battre parce qu’elle m’avait rappelé les religieuses qui avaient l’habitude de me donner des coups de bâton dans le dos. L’autre avocat a arrêté le procès. Quand je suis revenu en cour, quelques semaines plus tard, j’ai découvert qu’on avait abandonné les accusations. Je me suis compté très chanceux à l’époque, mais, maintenant, après toutes ces années, j’aurais aimé avoir dit quelque chose. Je pense que j’aurais pu dire à tout le monde ce qui m’était arrivé et ils auraient alors pu comprendre pourquoi je suis comme je suis.

9.3 Conclusions qualitatives

Cette partie regroupe différentes préoccupations et opinions exprimées au sujet des possibilités de réparation. Nous avons regroupé les commentaires sous cinq titres généraux, qui nous apparaissent être les principales avenues par lesquelles il est possible de répondre à un éventail de besoins. Les voici :

  1. Enquête publique.
  2. Dédommagement individuel.
  3. Action en justice, y compris...
      3.1 Poursuite au criminel.
      3.2 Poursuite au civil.
      3.3 Solutions obtenues par la médiation et par la négociation.
  4. Excuses.
  5. Revitaliser la culture et développer les collectivités, y compris...
      5.1 Guérison des collectivités.
      5.2 Guérison individuelle.
      5.3 Problèmes sociaux.
      5.4 Langues.
      5.5 Guérison intergénérationnelle.
      5.6 Justice réparatrice.
      5.7 Changement structurel.
      5.8 Commentaires sur la guérison et sur le développement des collectivités.

Pour chacun des sujets, nous adoptons une présentation dans le cadre de laquelle nous inscrivons les éléments qui suivent.

1) Les attentes des victimes au sujet de la possibilité de réparation.
2) Les points de vue différents exprimés.
3) Les difficultés (ou limites) que nous avons trouvées au sujet de cette possibilité.

9.3.1 Enquête publique

La demande relative à une enquête publique s’est accrue continuellement à mesure que l’on mettait en lumière les expériences des pensionnats pour enfants autochtones. En plus des besoins d’ordre thérapeutique, c’est la question qui a été soulevée le plus fréquemment durant les audiences de la Commission royale d’enquête sur les peuples autochtones (CRPA) et qui vient au premier rang des besoins exprimés dans les médias au cours des deux dernières années.

Notre propre expérience du besoin des gens de raconter leur histoire dans le cadre d’une tribune réceptive a été au-delà de toute prévision. Des douzaines de personnes ont échangé leurs expériences respectives avec nous, parfois dans l’espoir que cette recherche était un lieu où quelque chose pourrait être fait au sujet des horreurs qu’elles avaient connues, parfois simplement pour en parler. Plusieurs personnes ont divulgué leur expérience de la violence pour la première fois. C’est le cas d’un groupe de femmes d’une collectivité éloignée qui a rencontré un chercheur à deux occasions afin de briser le silence et de discuter du pensionnat pour enfants autochtones que toutes avaient fréquenté, mais dont elles n’avaient jamais parlé entre elles une fois adultes. Plusieurs personnes nous ont demandé : " Allez-vous rapporter mon histoire ? " Ou bien, elles ont demandé que nous nous rendions dans des collectivités particulières pour entendre de première main les témoignages des victimes. Allan Longjohn, membre du groupe d’étude et victime qui a fréquenté l’école de Duck Lake, a émis le commentaire que quelques appels téléphoniques logés auprès de collectivités voisines amèneraient des centaines de gens à venir échanger leurs expériences respectives. Les anciens élèves qui peuvent ne pas avoir été organisés jusqu’à maintenant semblent, dans le climat actuel, prêts et anxieux de raconter leurs histoires.

1.1 Attentes

• La première étape de tout dédommagement et de toute guérison des victimes de violations flagrantes des droits humains doit être une reconnaissance de la vérité8.

• Les gens ont besoin de raconter leurs histoires respectives dans le cadre d’une tribune réceptive.

• Il faut permettre aux gens de se tenir debout, dans la dignité, de dire leur douleur et leur colère et qu’on les écoute dans le respect9.

• Il faut établir la vérité sur ce qui s’est passé, mettre fin à la négation publique et faire en sorte que l’expérience des Autochtones fasse partie des témoignages historiques.

• L’outil le plus efficace pour influencer la société, pour modifier ses perceptions, ses attitudes et ses comportements qui déterminent la façon dont elle répond au problème10.

• Cela aidera à répondre à la question " Pourquoi ? ", qui tourmente encore plusieurs victimes.

• Il est nécessaire d’enquêter afin de comprendre entièrement la nature et les ramifications des politiques relatives aux pensionnats pour enfants autochtones, ce qui outrepasse les capacités des différentes forces policières.

• Les histoires à propos des pensionnats pour enfants autochtones feront partie du discours public et donneront l’habileté d’agir et d’entreprendre la reconstruction positive de l’identité autochtone.

• Raconter les histoires " redonne sa vérité à l’histoire " et aide à recouvrer la mémoire et la conscience collectives.

1.2 Voici les points de vue différents qui ont été exprimés :

• Une enquête peut empêcher d’investir des fonds et de l’énergie dans des initiatives plus concrètes.

• Une démarche organisée par le gouvernement et par les organisations politiques des Premières nations, dont les nominations seraient effectuées par ces institutions, manquerait de crédibilité.

• Il est nécessaire de recourir à des méthodes traditionnelles et à un conseil composé de membres des collectivités reconnus pour leur honnêteté, pour leur sagesse et pour leur non engagement politique.

• Le fait qu’il y ait davantage de discussions peut être une autre excuse pour ne pas agir.

1.3 Voici les difficultés ou les limites perçues relativement à la situation actuelle :

• La nécessité d’une enquête aurait pu être évitée si le gouvernement et les Églises avaient, de leur propre chef, divulgué entièrement la vérité et accepté la responsabilité pour les préjudices causés.

• La prévarication, l’évitement, la négation, l’altération des dossiers, le fait de retenir ces dossiers et les jeux politiques sont perçus comme une caractéristique des enjeux entourant les pensionnats pour enfants autochtones qui influe sur la manipulation de ces enjeux dans le domaine public. Cette situation entaîne un climat de méfiance que seule une enquête en profondeur peut surmonter11.

Les victimes d’au moins un groupe allèguent qu’elles ont subi des expériences médicales lorsqu’elles étaient enfants. En pus des électrochocs qui faisaient partie de l’ordinaire, ces victimes rapportent l’administration d’injections inexpliquées dans le thorax et de drogues psychodysleptiques par du personnel médical qui ne parlait pas anglais. En l’absence d’appui ou de réponse de la part du gouvernement et des Églises, ce groupe poursuit ses enquêtes avec le Centre Wiesenthal et l’Organisation des Nations Unies. Étant donné l’histoire et la participation du Canada aux expériences de la CIA sur les prisonniers et sur les patients psychiatriques, et compte tenu du fait que l’on considérait que les enfants des Premières nations ne possédaient aucun droit, la tentation d’effectuer des études sur des sujets aussi isolés et vulnérables a dû être réelle. Les questions soulevées ont de bonnes raisons de l’être. Une enquête publique est vraisemblablement la seule méthode de confirmer ou de rejeter ces graves allégations, qui ont des implications très importantes quant à la nature des préjudices causés et à l’étendue de la réparation.

9.3.2 Dédommagement destiné aux personnes

Plusieurs victimes de violence croient fermement qu’on leur doit un dédommagement pour les malheurs qu’on leur a fait subir personnellement, pour les conséquences que ces derniers ont eues sur leurs enfants et sur les enfants de leurs enfants.

2.1 Attentes

• Les gens ne veulent pas l’aumône mais un dédommagement raisonnable pour la violence invalidante, suffisant pour la durée de leur vie; une somme importante qui fera vraiment une différence dans leur vie et dans les choix qu’ils sont en mesure de faire.

• La responsabilité légale pour des méfaits est reconnue par le versement de dédommagements.

• Le dédommagement est important pour que le public reconnaisse la réalité des méfaits.

• Le dédommagement doit reconnaître la gravité des crimes commis, y compris les efforts colossaux pour éliminer la culture, et que les personnes y ont droit.

• Le dédommagement adéquat estimatif pour les victimes de violence physique et sexuelle prolongée varie de 100 000 $ à 600 000 $12.

• Il y a une suggestion d’un montant estimatif pouvant atteindre trois millions de dollars en guise de dédommagement adéquat pour les personnes qui sont des victimes d’une tentative de génocide13.

2.2 Les points de vue différents exprimés

• Le dédommagement devrait être remis aux personnes qui pourraient en faire ce qu’elles en voudraient.

• Le dédommagement devrait être remis aux personnes afin qu’elles paient les services nécessaires.

• Le dédommagement devrait servir à financer les efforts et les initiatives des collectivités en matière d’éducation, de guérison et sur le plan intergénérationnel (se reporter à 9.3.5, Revitaliser la culture et développer les collectivités).

• Chacune des propositions ci-dessus est à la fois une attente et un besoin.

• Aucune somme d’argent ne suffira à réparer les préjudices.

• Un dédommagement pourrait être perçu comme une insulte ou comme le " rachat " des fautes.

• La dédommagement n’est qu’une petite partie du problème. Il est plus important encore qu’il y ait une renconnaissance du génocide et de l’existence criminelle d’institutions aussi totalitaires.

2.3 Voici les difficultés ou les limites de la situation actuelle

• Le dédommagement doit reconnaître la perte d’instruction, du potentiel de revenu et du potentiel de réalisation des victimes.

• Il n’y a eu aucune reconnaissance du fait qu’il y a des victimes âgées qui vivent dans la pauvreté.

• Le dédommagement doit reconnaître que la pauvreté est l’un des résultats des pensionnats.

• Le dédommagement est nécessaire pour financer les services d’aide, de thérapie et juridiques.

• Les Autochtones doivent avoir leur mot à dire dans le processus de prise de décisions.

• Les gens n’ont pas l’aide voulue pour exercer des choix éclairés avant d’accepter les montants négociés à l’amiable.

• Il semble que le calcul de la perte de revenu utilisé pour établir le dédommagement se fonde sur les prestations d’aide sociale.

• Il semble que des dédommagements aient été accordés à condition que les gens abandonnent leurs prestations d’aide sociale, ce qui résulte en un profit pour le gouvernement.

• La plupart des gens vont mourir avant de recevoir quelque dédommagement que ce soit14.

• Accorder des sommes importantes d’argent à des gens marginalisés ne modifie aucunement leur place dans une structure sociale qui les laisse sans pouvoir.

9.3.3 Action en justice

3.3.1 Poursuite au criminel

1.1 Attentes

• Que les auteurs de violence soient tenus responsables de leurs actes.

• Que les contrevenants soient punis.

• Que les victimes aient l’impression qu’on les croit et que le système judiciaire leur donne raison.

• Que les condamnations aident les victimes à avoir le sentiment de reprendre le contrôle de leurs vies respectives.

• Que les condamnations en cour criminelle soient une reconnaissance qu’il y a une justice pour les victimes de notre société.

• Que la violence soit reconnue comme un crime grave et non pas comme un problème psychologique.

1.2 Les points de vue différents exprimés

• Les gens qui ont fait condamner leurs agresseurs ont le sentiment d’avoir un certain contrôle sur leur vie.

• Nombre de personnes ne seront jamais capables de parler de leurs expériences.

• Certains plaignants ne recherchent qu’une reconnaissance par leurs agresseurs qu’ils ont commis les sévices et des excuses de leur part.

• Certains anciens souffrent du fait qu’on poursuive les ecclésiastiques.

• Les cours ne reflètent pas les valeurs, les traditions et les façons de faire des Autochtones.

1.3 Les difficultés ou les limites reliées aux poursuites au criminel

• Le système est lent et lourd; il comporte trop de paperasserie et permet trop d’ajournements.

• Les victimes doivent porter le fardeau du financement, de la planification, du ressourcement et du soutien durant le déroulement des procès.

• Le manque d’aide aux victimes et aux témoins.

• Le manque de financement pour les accompagnateurs ou pour les personnes qui appuient les plaignants.

• Les victimes ne peuvent pas parler de leur expérience en raison de l’altération possible de la preuve.

• La perte de contrôle sur la démarche.

• La possibilité de perdre en raison d’une technicalité.

• Le fait d’être forcé de revivre des moments horribles.

• Les procès en cour criminelle (habituellement) ne répondent aux besoins que des personnes victimes de violence sexuelle.

• Le manque d’outils pour s’occuper des cas de violence physique, émotionnelle et culturelle, de travail forcé, de nourriture horrible et de manque de soins médicaux.

• La définition subjective de la violence.

• Les limites en fonction de la gravité du préjudice.

• Le racisme présent dans le système judiciaire.

• L’incapacité à poursuivre en raison du manque de détails tels que le temps et le lieu des incidents.

• Les problèmes reliés à la mémoire et au temps qui passe de même qu’aux incohérences mineures qui peuvent servir à miner tous les souvenirs.

• Certains agresseurs ne peuvent pas être identifiés avec certitude.

• Plusieurs agresseurs sont décédés ou vivent à l’extérieur du Canada.

• Les gens sont en colère d’être obligés de se rendre en cour.

• Les poursuites criminelles ne pourront résoudre certains cas.

• Les victimes ressentent souvent de la colère ou se sentent insultées lorsque la Couronne décide que la preuve n’est pas suffisante pour porter des accusations.

• Certaines victimes ne veulent pas voir leurs agresseurs.

• Certaines personnes ne veulent pas témoigner lors d’audiences publiques.

• Les procureurs de la Couronne ne sont pas aussi utiles ou préparés qu’ils le devraient, sont surchargés de travail et n’ont que des ressources limitées.

• L’on passe peu de temps avec les témoins ou pour préparer les causes.

Dans le cadre de notre recherche, nous espérions obtenir un aperçu du nombre et de l’état des causes portées au criminel relativement aux pensionnats pour enfants autochtones à l’échelle nationale. En août 1998, nous avons reçu la permission du commissaire Cooper de demander des renseignements à la GRC au palier national, par l’intermédiaire de la Direction générale de la police des Autochtones. Nous avons convenu qu’il serait plus vraisemblable d’obtenir des réponses si les questions demeuraient brèves et simples. Avec l’aide des sergents Aimoe et Courtois, nous avons fait distribuer les questions qui suivent à toutes les divisions au début de septembre.

Relativement à la violence sexuelle, physique, mentale ou émotionnelle perpétrée contre les enfants dans les pensionnats pour enfants autochtones :

1. Combien de plaintes avez-vous reçues ?

2. Combien d’enquêtes votre division a-t-elle effectuées ?

Si l’enquête porte sur plusieurs victimes ou agresseurs, combien dans chaque cas ?

3. Combien de condamnations votre division a-t-elle obtenues ?

Si vous détenez ces renseignements, quelles étaient les accusations et quelles ont été les peines ?

Malheureusement pour nous, mais nous ne doutons pas que les renseignements seront utiles à d’autres, les dirigeants ont bonne confiance que nous recevrons les réponses tôt au début de la nouvelle année. À la mi-octobre, seule la Division " G " (T.N.-O.) avait répondu en nous fournissant les renseignements suivants :

Pensionnats pour enfants autochtones, Territoires du Nord-Ouest15

1. Nombre de plaintes : 2 écoles

  1. Chesterfield Inlet (Sir Joseph Bernier) :

    150 plaintes de violence physique;

    86 plaintes de violence sexuelle.

  2. Grollier hall : le nombre exact de plaintes est inconnu;

condamnations relatives à 25 victimes.

2. Nombre d’enquêtes :

1) Chesterfield — 101 victimes et 4 agresseurs (3 du clergé catholique et 1 civil)

Accusations : agression physique, outrage aux mœurs.

2) Grollier Hall — 25 victimes et 3 agresseurs

Accusations : outrage aux mœurs, grossière indécence, sodomie.

Paul Leroux : 18 victimes, condamné sous 14 chefs d’accusation.

George Maczynski : 5 victimes, condamné pour tous les chefs d’accusation.

Jean Comeau : 2 victimes, condamné pour les deux chefs d’accusation.

3. Condamnations et peines

1) Chesterfield — Il a été conclu que la preuve n’était pas suffisante pour justifier des accusations au criminel en se fondant sur la sévérité des infractions, sur l’intérêt public, sur l’état des prescriptions et sur les possibilités raisonnables de condamnation. Certains des agresseurs étaient morts.

2) Grollier — Leroux : 10 ans.

Maczynski : 4 ans consécutivement aux 16 ans qu’il purge actuellement pour des infractions semblables en Colombie-Britannique.

Comeau : 1 an consécutivement à 1 an qu’il purge actuellement.

Il s’agira d’une bonne documentation si on la collige et on la met à jour à l’échelle nationale.

Il est intéressant de remarquer qu’il n’y a pas encore de plaintes enregistrées concernant l’un ou l’autre des 10 autres pensionnats pour enfants autochtones ou centres d’hébergement des T.N.-O., bien qu’il y ait des groupes de soutien aux victimes dans au moins deux cas.

3.3.2 Procédure civile

Il y a des poursuites au civil en cours dans les cas des écoles Alberni, Grollier Hall, Spanish, Lower Post, Kuper Island, Chesterfield Inlet, Shubenacadie et il semble qu’il y en ait aussi dans plusieurs autres cas. Nous n’avons pas entendu parler de telles causes au Québec. Le projet Shingwauk a également recommandé de chercher à obtenir des dédommagements en passant par les tribunaux. Certains anciens élèves ont décidé, en groupe, que les actions en justice n’étaient pas leur priorité actuellement. Étant donné le temps et l’énergie nécessaires pour les poursuites devant les tribunaux, ils ont choisi plutôt de se concenter sur la guérison personnelle et sur les problèmes de la collectivité.

2.1 Attentes

• Les gens ont droit à des dédommagements pour les crimes dont ils ont été victimes.

• Le fait de conclure à la responsabilité instaure un climat de justice et redonne aux victimes un contrôle sur leur vie.

• Le public perçoit la force et la crédibilité des victimes.

• Certaines victimes disent : " Nous voulons faire tomber l’Église. "

• La justice et la guérison sont inséparables.

2.2 Les points de vue différents exprimés

• Certaines personnes ne veulent pas poursuivre l’Église.

• L’opinion est divisée quant à savoir si les actions en justice sont le bon choix.

2.3 Les difficultés ou limites reliées aux poursuites civiles

• Les victimes passent par un processus de revictimisation en cours de procès.

• Le coût est énorme. Combien reste-t-il aux victimes à la fin ?

• Certains groupes font appel à des avocats qui n’ont aucune expérience dans les causes de violence physique ou sexuelle.

• Certains avocats détournent les causes involontairement. Les victimes perdent le contrôle.

• Les victimes doivent être informées et conserver le contrôle de leurs poursuites, et les avocats doivent les appuyer dans cette démarche.

• Le temps insuffisant ou limité, ou les deux, alloué pour les divulgations.

• Parfois, il est impossible que les défenseurs ou les personnes qui appuient les victimes assistent au procès.

• Davantage d’hommes que de femmes semblent capables de se présenter devant les tribunaux et d’engager des poursuites au civil.

• Des avocats inconnus approchent les bandes et cherchent à leur vendre leurs services.

• Il manque un bureau central de renseignements au sujet des plaintes relatives aux pensionnats pour enfants autochtones.

• Le manque de soutien fédéral et d’accès aux renseignements du ministère des Affaires indiennes.

• Le manque de financement pour coordonner les différentes plaintes.

• Le manque de soutien financier de base aux victimes afin qu’elles puissent rencontrer et retenir les services d’un conseiller juridique.

• Le manque de renseignements et le manque d’accès relativement au processus judiciaire pour les gens des collectivités éloignées.

9.3.3 Solutions obtenues par la médiation et par la négociation

Le nombre croissant de poursuites devant les tribunaux relatives aux pensionnats pour enfants autochtones force le ministère de la Justice à se pencher sur des solutions négociées avec les victimes, plutôt qu’à se défendre cas par cas. Les organisations autochtones appuient généralement les mesures qui peuvent permettre aux victimes de passer plus rapidement l’étape devant les mener à l’obtention d’un dédommagement. À l’exception de la cause O’Connor, nous n’avons pas trouvé de causes relatives aux pensionnats pour enfants autochtones qui se soient conclues à la satisfaction des victimes en dehors du système judiciaire officiel, et ce, même si des groupes d’anciens élèves ont essayé cette voie16.

3.1 Attentes

• Les mécanismes qui permettent de s’occuper des préjudices de manière holistique et la tentative de résoudre les problèmes en tenant compte de toutes les parties au palier de la collectivité sont des éléments importants.

• Il est nécessaire que ce soit un exercice contrôlé à 100 p. 100 par les Autochtones afin de répondre rapidement aux besoins qui sont actuellement évidents17.

• Il s’est perdu assez de temps jusqu’à maintenant.

• Il peut y avoir une meilleure possibilité de reconnaissance de la violence émotionnelle et du préjudice culturel dans les solutions négociées que devant les tribunaux.

• Les Églises doivent être prêtes à reconnaître leurs torts aux paliers régional et local.

• Des démarches régionales ou école par école en vue d’un règlement peuvent s’avérer pratiques.

• L’Assemblée des Premières Nations planifie de réunir des groupes de discussion constitués des parties concernées afin de commencer à établir les besoins et les intérêts respectifs18.

• L’information des collectivités en matière de justice est importante19.

• Il sera profitable aux victimes de compter sur plusieurs modèles de résolution des plaintes adaptés aux groupes et aux personnes20.

3.2 Les différents points de vue exprimés

• Les cercles de guérison exigent une reconnaissance sincère de la responsabilité et l’admission de la culpabilité.

• Le plus important est que la démarche permette de répondre au besoin des victimes de confronter ceux qui leur ont causé des préjudices et de se faire entendre.

• La motivation des victimes porte sur trois aspects : elles veulent que les agresseurs reconnaissent leur reponsabilité; qu’ils paient une pénalité de quelque façon; et elles veulent une certaine forme de réhabilitation ou de dédommagement pour le préjudice subi.

• Le dédommagement personnel est une très petite partie de la question des pensionnats pour enfants autochtones; les effets de ces institutions totalitaires ainsi que la domination et le contrôle culturels sont beaucoup plus importants21.

• Les seuls résultats financiers ne semblent pas être la principale préoccupation de beaucoup de gens22.

• La réaction du gouvernement à l’égard des victimes des pensionnats pour enfants autochtones a été si dérisoire jusqu’à maintenant qu’il n’est pas conseillé aux anciens élèves et à leurs avocats de discuter de démarche de règlement avec qui que ce soit23.

• Le gouvernement sera vraiment forcé de négocier lorsqu’il saura que les plaignants sont également prêts à entreprendre des poursuites devant les tribunaux.

• Il est nécessaire de faire preuve de créativité et de réfléchir beaucoup plus préfondément à l’élaboration de démarches de remplacement. Les avocats doivent pouvoir présenter différentes façons et options pour répondre aux besoins des victimes24.

• La discussion sur les démarches de remplacement pour s’occuper des questions relatives aux pensionnats en est à ses débuts. L’APN ne fait que commencer à organiser les discussions. L’Indigenous Bar Association soulèvera la question en novembre.

3.3 Les difficultés ou les limites reliées aux procédures actuelles

• Les négociations préliminaires aux procès ne sont en rien des " solutions de remplacement ". Actuellement, c’est tout ce qui se produit.

• La médiation est une démarche lente et difficile. Cela prend du temps à élaborer une démarche qui met l’accent sur les principes qui guident les Premières nations.

• Un groupe de Fort Alberny, Ontario, tente de négocier depuis cinq ans, mais affirme que le gouvernement fédéral ne réagit pas. La province n’entreprendra rien tant que le gouvernement fédéral ne sera pas présent25.

• Un groupe du Manitoba est intéressé à la médiation, mais les dirigeants de l’Église catholique au palier régional ont nié catégoriquement que quelque type de violence que ce soit ait pu survenir dans les pensionnats pour enfants autochtones26.

• Lever le voile est un énorme défi et il est peu vraisemblable que les documents pertinents seront obtenus dans le cadre de démarches à l’amiable27.

• La dénégation par les agresseurs peut faire débouter les plaignants28.

9.3.4 Excuses

Bien qu’il ne soit pas possible de dire quelle influence a eu la Déclaration de réconciliation sur ce besoin particulier, il est clair qu’une reconnaissance significative des préjudices causés est perçue comme une étape essentielle dans la démarche qui doit mener à l’équilibre et à l’harmonie entre les peuples.

4.1 Attentes

• Les Églises et le gouvernement doivent reconnaître qu’ils ont eu des politiques d’acculturation et accepter la responsabilité pour le préjudice qui s’est ensuivi.

Une admission du préjudice causé est nécessaire pour les raisons qui suivent.

• Pour établir clairement que cela n’aura plus jamais lieu.

• Cela aidera les personnes qui vivent avec les conséquences de la violence à compléter le cycle.

• Pour reconnaître les sentiments et les expériences des gens.

• Alors, les gens veulent que le gouvernement et les Églises acceptent leurs responsabilités.

4.2 Les points de vue différents exprimés

• Des excuses suffisantes ont déjà été faites.

• Les excuses ne font aucune différence.

• Les excuses sont une diversion des questions plus importantes.

• Les excuses du gouvernement visaient seulement à répondre à la CRPA, à éviter la responsabilité et à se décharger des programmes.

4.3 Les difficultés ou les limites de la situation actuelle

• Il y a une différence entre une expression de regret et l’admission du préjudice causé.

• La nécessité pour les agresseurs de demander pardon à ceux qu’ils ont blessés.

• La portée de la déclaration telle qu’elle est, axée sur ceux qui ont subi la violence, plutôt que sur les politiques de génocide qui ont affecté tous ceux qui ont fréquenté les pensionnats pour enfants autochtones.

• On questionne la validité des excuses pour des actions prises dans le passé.

• On questionne les concepts des excuses collectives et de l’acceptation collective de ces excuses.

• La nécessité de transmettre les excuses aux personnes qui ont subi un préjudice.

Plusieurs personnes ne sont pas satisfaites de la reconnaissance des torts causés et des excuses faites jusqu’à maintenant. Plus particulièrement, plusieurs personnes ne sont pas au courant que l’Église a présenté des excuses. Il y a insatisfaction au sujet des mots choisis, de la signification, de l’intention et de la nature de la déclaration. Les personnes qui ont reçu un témoignage personnel de reconnaissance du préjudice causé et d’excuses pour ce préjudice indiquent que cela a été un événement important dans leurs vies, en plus grande proportion que celles qui ont reçu un témoignage d’excuses publiques radiodiffusé.

9.3.5 Revitaliser la culture et développer les collectivités 9.5.1 Guérison des collectivités

5.1.1 Attentes

• Des ressources pour les conférences, pour la planification de sessions et pour la consultation entre les collectivités.

• L’échange et la circulation des renseignements ainsi que les ressources nécessaires pour ce faire.

• La guérison des collectivités exige du leadership, qu’il provienne de l’intérieur de la collectivité ou de ressources extérieures dignes de confiance.

• L’aide limitée empêche de rendre plusieurs options disponibles et d’assurer que les gens connaissent ces options.

• Il est nécessaire de construire la confiance et d’assurer une guérison organisationnelle à l’intérieur des collectivités.

• La collaboration dans la recherche de solutions.

• Les ressources nécessaires à la formation et au développement de ressources locales.

• Les ressources nécessaires pour l’évaluation.

• Le respect pour les différentes visions du monde et pour les opinions différentes.

• Les ressources nécessaires pour que les gens se libèrent de la pauvreté et de la peur (y compris le financement pour la mise sur pied d’organismes qui favorisent et instaurent la sécurité par des moyens tels que les maisons sécuritaires, les centres de traitement et les possibilités de travail).

• Les possibilités économiques et la sécurité sociale sont essentielles au bien-être des collectivités.

• Ces ressources doivent venir des Églises et du gouvernement.

• Le dédommagement ne doit pas se traduire par un plus grand nombre de programmes gouvernementaux à la pièce, distribués au compte-gouttes en vue de perpétuer un climat de dépendance.

5.1.2 Les points de vue différents exprimés

• Une guérison complète nécessite une compréhension des forces sociales et politiques qui ont façonné l’histoire et dont les conséquences se vivent encore aujourd’hui29.

• Pour chaque réserve et pour chaque collectivité, il pourra y avoir nécessité de solutions particulières.

• Un grand nombre d’éléments et de ressources pour la guérison existent dans les collectivités.

• Les décisions relatives à la guérison et au développement des collectivités ne peuvent être le lot des bandes tant qu’elles n’ont pas passé par une démarche de guérison et de réconciliation.

• Les démarches de transformation semblent presque toujours devoir compter sur la stimulation ou le soutien de ressources extérieures30.

5.1.3 Les difficultés ou les limites de la situation actuelle

• L’on ne recouvrera jamais une grande part de ce qui a été perdu.

• D’une génération à l’autre, le préjudice continue de prendre de l’ampleur.

• La CRPA a recommandé que le gouvernement fédéral dépense deux milliards de dollars de plus (par année) pour que les peuples autochtones puissent rattraper le reste du Canada... Il n’y a pas eu d’engagement autre que celui du fonds de guérison.

L’annexe 5 présente un aperçu du programme proposé par Four Worlds pour la guérison des conséquences de l’expérience des pensionnats pour enfants autochtones. Il s’agit d’un exemple d’un programme de guérison holistique centré sur les collectivités.

9.5.2 Guérison individuelle

2.1 Attentes

• La guérison est une démarche particulièrement personnelle. Chacun doit y accéder de la manière qui lui convient.

• La sobriété est la première étape. Il doit y avoir des possibilités offertes pour permettre d’atteindre cet objectif et un soutien, ensuite, pour demeurer en état de sobriété.

• Des occasions de rencontrer d’autres victimes et d’échanger avec elles.

• Il faut que le soutien et les ressources nécessaires existent avant d’entreprendre une démarche douloureuse.

• L’aide nécessaire pour composer avec la colère et le deuil.

• L’accès à une variété d’activités culturelles et thérapeutiques.

• L’instauration de milieux sûrs où effectuer le travail de guérison.

• Les occasions de se retrouver soi-même, de retrouver la famille, la culture et la collectivité.

• Les victimes doivent élaborer les programmes qui répondront à leurs besoins respectifs.

• Les victimes des pensionnats pour enfants autochtones ont besoin de disposer de leurs propres groupes et lieux de rencontre. Les problèmes ne sont pas les mêmes et les personnes qui n’ont pas fréquenté les pensionnats pour enfants autochtones ne comprennent pas.

• Les aidants doivent être des Autochtones qui ont l’expérience de la vie.

• L’accès aux programmes et aux services d’aide.

• Les femmes ont besoin de disposer d’endroits sûrs où elles peuvent parler.

• L’épanouissement personnel ainsi que la sûreté et la sécurité sociales et économiques sont essentiels pour maintenir le bien-être des personnes.

2.2 Les points de vue différents exprimés

• Certaines personnes trouvent que la thérapie professionnelle ou les modèles " européens " sont utiles.

• Les spécialistes de l’extérieur ont un rôle à jouer, notamment en matière de formation.

• La sobriété n’est pas nécessairement le point de départ. Les gens y viendront à mesure qu’eux-mêmes et leurs collectivités respectives commenceront à changer.

• Les problèmes relatifs aux pensionnats pour enfants autochtones sont une partie d’un éventail de problèmes dont il faut s’occuper en vue d’une guérison. Il est possible de commencer où l’on veut.

• Le soutien des pairs, les anciens et les conseillers traditionnels jouent un rôle important.

• Certaines personnes, souvent plus âgées, ne veulent tout simplement pas qu’on parle de ce sujet.

2.3 Les difficultés ou les limites de la situation actuelle

• Plusieurs collectivités n’ont accès qu’à peu ou à aucun service de relation thérapeutique ou de guérison.

• Les victimes doivent avoir accès à un choix de thérapeutes.

• Il n’y a aucun soutien offert aux travailleurs communautaires, qui souffrent d’épuisement.

• Il y a un manque de suivi et de soutien lorsque des gens de l’extérieur viennent dans les collectivités, entreprennent de régler des problèmes, puis quittent.

• Plusieurs régions ne disposent pas des ressources ou des groupes pour travailler sur les problèmes reliés aux pensionnats pour enfants autochtones.

• Le financement est difficile à obtenir pour les initiatives locales.

• Il y a un énorme besoin de ressources thérapeutiques, mais on continue de réduire le financement.

• Dans plusieurs collectivités, il n’est pas sécuritaire de divulguer les problèmes.

• Il est difficile d’instaurer un milieu sûr et de soutien pour les personnes en prison.

• Il est difficile pour les gens de rester sobres, en santé et optimistes quand il n’y a jamais d’emplois disponibles.

5.3 Problèmes sociaux

5.3.1 Attentes

• Des engagements en matière de financement stable et à long terme.

• Un plus grand nombre de possibilités de traitement, particulièrement pour les jeunes et les jeunes adultes.

• L’accès à des possibilités de traitement.

• La prestation des programmes et des services axée sur les collectivités.

• Le contrôle des programmes et des services par les collectivités.

• La formation des fournisseurs de soins.

• Le financement des programmes sociaux et en santé, qu’il soient nouveaux ou que ce soit pour en augmenter l’envergure.

• Il faut que les Autochtones conçoivent et dispensent les services.

• Les gens doivent être en mesure de travailler avec des thérapeutes de leur propre nation.

• Le besoin de services à long terme, y compris le suivi et le soutien permanent.

• Les modèles axés sur la famille sont importants.

5.3.2 Les points de vue différents exprimés

• La création d’un plus grand nombre de moyens et d’organisations pour dispenser les services peut étaler les fonds existants, les réduisant ainsi partout.

• Si les chefs de file des collectivités ne sont pas sains, il est difficile de s’occuper des problèmes sociaux.

5.3.3 Les difficultés ou les limites de la situation actuelle

• Le gouvernement dit qu’il s’engage à aider, mais il coupe les budgets des programmes de traitement.

• L’accès aux services est restreint ou limité selon la situation.

• Les gens sont forcés de participer à certains programmes selon l’endroit où ils vivent.

• Le financement des traitements est l’objet d’une nouvelle orientation. L’on dit aux gens que certains programmes sont désormais accessibles par l’intermédiaire de La Fondation pour la guérison des Autochtones.

• Les organismes de services sociaux qui ont des listes d’attente pour les services de relation thérapeutique subissent une réduction de leur personnel et assistent à l’annulation de leurs programmes.

• Certains chefs de file sont des agresseurs ou protègent des agresseurs, ce qui rend les collectivités insécuritaires pour les femmes et les enfants.

• Pour plusieurs organismes, le financement n’a pas augmenté ou a diminué au cours des sept dernières années.

• Le manque de financement et de planification à long terme. Les programmes n’obtiennent pas le financement nécessaire tant qu’on ne retrouve pas des corps étendus sur les routes.

• Le financement et les services sont fractionnés ou se chevauchent dans plusieurs domaines de la santé et des services sociaux.

• Ce sont souvent des non-Autochtones qui ne connaissent pas les problèmes et les conséquences des pensionnats pour enfants autochtones qui prennent les décisions relativement à l’accès aux programmes et aux services.

5.4 Langues

4.1 Attentes

• Offrir des possibilités pour faire revivre et pour conserver les langues des Premières nations.

• Le soutien à la revitalisation des langues et des pratiques culturelles.

• L’élaboration de programmes d’étude des langues et des cultures, particulièrement pour les enfants.

• La reconnaissance que la langue, c’est plus que des mots; elle englobe la culture, l’identité et les croyances spirituelles.

• La reconnaissance du préjudice psychologique grave que constitue la suppression des langues.

• La reconnaissance du traumatisme causé aux enfants et aux parents qui ont été incapables de communiquer entre eux.

4.2 Les points de vue différents exprimés

• " J’ai plus de soixante ans... Pensent-ils qu’un cours de langue me permettra de me sentir mieux, maintenant ?31 "

4.3 Les difficultés ou les limites exprimées

• L’importance et l’urgence de poursuivre et d’augmenter le travail sur les langues qui s’effectue aujourd’hui.

• Certaines langues sont dans une situation critique, sinon presque disparues.

5.5 Guérison intergénérationnelle

5.1 Attentes

• La nécessité de se concentrer sur des programmes d’anticipation et préventifs tels que les programmes Bon départ et CAPC-C / Grandir ensemble.

• Le financement de programmes destinés aux jeunes parents autochtones et aux jeunes à risque.

• La reconnaissance de la nécessité des programmes interactifs destinés à toute la famille, dans le cadre desquels les jeunes gens apprennent les rôles parentaux en incorporant la langue, la culture, les valeurs traditionnelles, la fierté et l’estime de soi, et les ressources nécessaires à ces programmes.

• Le soutien aux programmes autochtones axés sur les familles à risque élevé.

• Nous avons besoin de relations thérapeutiques, de possibilités de renouer avec les traditions et la culture, d’habiletés parentales et d’aptitudes familiales qui respectent les traditions.

• Les possibilités d’enseigner aux jeunes générations qu’il y a d’autres choix que la violence.

• L’information et la sensibilisation sur les effets intergénérationnels de la violence sont nécessaires.

• Les compétences et les ressources pour s’occuper des problèmes de la jeunesse.

5.2 Les points de vue différents exprimés

• Des programmes tels que Bon départ apportent des changements avec très peu de ressources.

• C’est un domaine où l’on constate une foule de changements positifs.

• Les paroles et les façons de faire des anciens et de leurs familles ont encore une très grande influence.

5.3 Les difficultés ou les limites de la situation actuelle

• Il passera encore beaucoup de temps avant que les élèves des pensionnats pour enfants autochtones ne soient plus en âge de porter des enfants. Cela prendra encore deux générations avant que les effets de l’expérience des pensionnats pour enfants autochtones commencent à s’estomper.

• Le manque de financement des programmes destinés à la tendre enfance et aux familles, malgré la preuve de leurs effets positifs à long terme.

• La rémunération n’est pas élevée pour les professions d’assistance à autrui et il est difficile d’y attirer du personnel qualifié.

• L’incapacité à offrir des programmes d’art parental adaptés à la culture en raison du manque d’anciens qui ont des connaissances en cette matière et de la pénurie d’autres ressources culturelles.

• Il est difficile d’obtenir du financement pour les programmes.

• Le financement et les programmes d’un an sont improductifs. Le personnel passe trop de temps à remplir les demandes de financement.

5.6 Justice réparatrice

6.1 Attentes

• La mise sur pied de systèmes de justice qui reflètent les valeurs autochtones.

• Rétablir l’équilibre et apporter la guérison aux victimes et aux agresseurs.

• Les ressources nécessaires à la conception et à la formation aux paliers national, régional et local.

• Les Autochtones doivent concevoir les programmes.

• C’est une façon de donner aux collectivités le pouvoir de s’occuper d’elles-mêmes.

• Les collectivités et les gouvernements des Premières nations mettront au point leurs propres démarches et mécanismes pour rétablir et assurer la justice et une gestion responsable à l’intérieur des collectivités et des nations.

• Mettre au point ou recourir à notre propre droit coutumier dans le domaine des services sociaux destinés aux enfants est particulièrement important.

6.2 Les points de vue différents exprimés

• Les lois traditionnelles et le système des clans ont fait beaucoup pour éliminer ou pour contrôler la violence sexuelle perpétrée contre les enfants.

• Les lois traditionnelles étaient motivées par l’acceptation intériorisée plutôt que par la coercition. Les personnes s’y sentaient davantage liées32.

• Certaines personnes ont dû quitter leur collectivité parce que le programme de justice de cette dernière ne répondait pas à leur besoin de sécurité.

6.3 Les difficultés ou les limites de la situation actuelle

• La démarche judiciaire ne répond pas aux besoins des gens, mais ne s’occupe que des peines.

• Plusieurs collectivités des Premières nations ont appris à opprimer leur propre peuple, en se fondant sur un système de croyances voulant que seul le petit nombre a droit aux privilèges.

• La colonisation a miné le rôle et la voix des femmes dans les sociétés autochtones.

• Les conseils qui, par exemple, ne se préoccupent pas de la violence conjugale dans leurs collectivités respectives ne peuvent susciter la confiance lorsqu’il s’agit de représenter les voix des femmes.

• Certains anciens et chefs de file sont également des agresseurs, et nous devons trouver les moyens de régler ce problème également.

5.7 Changement structurel

7.1 Attentes

• L’autonomie dans la prise de décisions au sujet des programmes.

• Honorer les traités existants.

• Permettre aux peuples autochtones de rétablir leurs propres formes traditionnelles de gouvernement.

• Le règlement équitable, rapide et judicieux des revendications territoriales et en matière de ressources.

• Reconnaître le déséquilibre, les inégalités et les inéquités entre les peuples autochtones et non autochtones du Canada et rétablir l’équilibre, l’égalité et l’équité.

• L’autosuffisance par le moyen du développement économique et de l’exploitation des ressources.

• Offrir des outils et des ressources pour permettre d’exercer l’autodétermination.

• Les exigences d’extinction des titres doivent être levées immédiatement.

7.2 Les points de vue exprimés

• La nécessité d’accorder autant d’importance et d’attention et d’assurer l’équité dans le règlement des questions touchant les Métis et les Indiens non inscrits.

7.3 Les difficultés ou les limites de la situation actuelle

• Le gouvernement veut être trop présent dans la conception et dans la gestion des programmes.

• Les programmes sociaux sont fondés sur le manque de confiance et ne tiennent pas compte du fait que les organisateurs ont les compétences voulues pour prendre des décisions.

• Les règles et la paperasserie empêchent l’accès et le recours aux services qui existent.

• Le gouvernement n’a pas à concevoir les programmes et les structures administratives en matière de services destinés aux peuples autochtones.

3.5.8 Commentaires sur la guérison et sur le développement des collectivités

Le mouvement en faveur du mieux-être des collectivités et de la revitalisation des collectivités autochtones exige une démarche durable et globale qui se poursuivra sur une longue période de temps. Entre autres, le saupoudrage de fonds pour les programmes, sur deux ou même cinq ans, ne peut permettre les changements durables que les Autochtones désirent alors qu’ils cherchent à régler les problèmes découlant des pensionnats pour enfants autochtones et à revitaliser les nations. Les organismes de développement international et certaines fondations nord-américaines reconnaissent de plus en plus que le financement des initiatives en santé à l’échelle des collectivités doit se poursuivre sur au moins sept à dix ans pour produire un changement durable.

Une vision complète et à long terme du développement des collectivités chez les Premières nations, les Inuit et les Métis est nécessaire pour réaliser une véritable revitalisation à l’échelle nationale33. Une démarche holistique pour recouvrer la santé, là où la santé est l’enjeu du mieux-être, dans l’harmonie et en ayant le contrôle sur les forces qui gouvernent la vie de tous les jours et l’espoir à l’égard de ses enfants et de son territoire, est un facteur primordial de cette vision. Lorsqu’il y a adoption d’une démarche holistique relativement aux déterminants de la santé, chaque initiative, qu’elle porte sur la guérison des effets des pensionnats pour enfants autochtones, sur la violence sexuelle perpétrée contre les enfants, sur les habiletés parentales, sur les toxicomanies ou sur la justice réparatrice, entre autres exemples, devient une porte d’entrée pour s’occuper de tous les facteurs en relation qui influent sur le mieux-être des collectivités.

L’actuel manque d’une telle vision globale aura des conséquences sur l’efficacité de tous les programmes mis au point pour s’occuper des problèmes relevant des pensionnats pour enfants autochtones. Ils ne constitueront vraisemblablement que des cataplasmes appliqués dans une situation de panique en vue de faire " quelque chose... n’importe quoi " avant d’épuiser les fonds. Le fait de mettre l’accent simplement sur les programmes relègue aux oubliettes la nécessité d’une capacité générale de construction au palier de la collectivité. Le fait de se concentrer plutôt sur la capacité de construction donne la possibilité aux collectivités d’établir leurs besoins particuliers en matière de santé, y compris, mais sans s’y limiter, les problèmes reliés aux pensionnats pour enfants autochtones, et de s’en occuper. Cet exercice exige que les membres des collectivités définissent leurs propres besoins et élaborent eux-mêmes les principes directeurs et les instruments d’évaluation.

L’un des grands obstacles à la guérison et au développement holistiques des collectivités est le fait que la connaissance des méthodes et des démarches de guérison et que les techniques pour renforcer les ressources et les capacités existantes au sein des collectivités sont éparpillées et mal comprises. Plusieurs collectivités, urbaines et rurales, ne savent pas encore que de telles compétences existent et, si elles le savent, ces compétences demeurent inaccessibles.

Le milieu urbain présente des défis en ce qui concerne le mieux-être et la capacité de construction des collectivités autochtones, mais les mêmes principes s’appliquent dans le cas du développement efficace des collectivités. S’il existe un canevas générique pour la démarche, une compréhension commune des principes et des buts, la variété des organismes et des personnes qui travaillent ensemble dans les villes devient une force incroyable qui peut instaurer une structure urbaine de mieux-être. La première étape critique pour toutes les collectivités consiste en la définition d’une vision nationale de ce que doivent être des collectivités autochtones saines. La deuxième étape est d’avoir la possibilité à long terme d’établir la démarche et les moyens de la réaliser.

L’un des coûts estimatifs avancés relativement à la capacité à long terme de revitalisation et de développement des collectivités et qui pourrait avoir un effet durable est 100 000 $ par année, durant au moins cinq ans34. Ce chiffre comprend tout ce qu’il en coûte pour les réunions entre les animateurs et les groupes de base à l’intérieur des collectivités, pour définir les buts, la démarche et les plans ainsi que pour élaborer un programme détaillé en vue d’apporter des changements au sein de ces collectivités. Il comprend la guérison et les relations thérapeutiques des personnes et des groupes à titre de fondement du changement et de moyen d’augmenter les habiletés et les capacités au sein des collectivités. Inévitablement, il s’agit d’une démarche qui a des retombées et de l’influence au-delà des groupes de base.

Il existe des modèles de développement communautaire durable. Le Four Worlds International Institute, qui est engagé dans le développement communautaire sur la scène internationale depuis 25 ans, suggère la mise sur pied et la formation de groupes d’aide technique régionaux mobiles ayant pour objectif d’aider les collectivités à guérir. Un modèle régional permet la formation et le développement de compétences au sein des collectivités ainsi que la création d’un réservoir de ressources dont plusieurs collectivités peuvent profiter. Cela aiderait à prévenir la ponction qui se produit actuellement, alors que l’on fait appel de façon répétitive aux compétences et au leadership des mêmes collectivités. Pour qu’ils soient pratiques, de tels groupes doivent être établis et coordonnés sur une base provinciale. Mais, avant que cela soit possible, il faut se donner une véritable vision nationale.

Comme plusieurs personnes l’ont souligné, les collectivités ressentent un incroyable besoin de " guérison des collectivités " en vue de régler une foule d’effets des pensionnats pour enfants autochtones. Toutes les démarches autochtones en matière de guérison dont nous sommes au courant se fondent sur la prémisse que les nations entières sont blessées et presque complètement détruites par le colonialisme. Cette blessure atteint les éléments émotionnels, spirituels, mentaux et physiques des personnes et des nations et, en conséquence, il faut s’occuper de tous ces éléments dans le cadre d’une démarche de revitalisation35.

Nous soumettons que le financement de projets ou de programmes axés sur un seul aspect est moins susceptible de produire le renouveau social et économique qu’une démarche coordonnée, holistique et nationale en matière de développement culturel, social et économique permettrait de réaliser.

Mon frère fréquentait le pensionnat. Il recevait toujours des fessées, alors il a décidé de s’enfuir et de retourner à la maison. On ne l’a jamais retrouvé. Le prêtre a dit que c’était sa faute. Une de mes sœurs s’est suicidée un été alors que nous étions à la maison. Je pense que c’est parce qu’on lui administrait toujours des volées de coups à elle aussi. Je pense que nous avions peur tout le temps et que ma sœur n’en pouvait plus. Nous n’avons jamais reçu la viande séchée et les lettres que ma mère nous envoyait, même si elle nous a dit qu’elle en avait envoyé. Cela a été une période terrible et je suis toujours en colère contre l’Église parce qu’elle nous a traités de cette façon. Je pense qu’il devrait y avoir un groupe ici, dans cette ville, où nous pourrions raconter nos expériences parce que c’est bon d’en parler. Ma famille a besoin de parler de tout cela.

10. Recommandations

10.1 Aperçu des recommandations formulées à ce jour

La nature des recommandations faites dans le cadre de différentes tribunes, comme les besoins définis dans les énoncés des victimes, varie selon le centre d’intérêt particulier du groupe ou de l’auteur qui les formule.

Nous donnons ici un bref aperçu de ces recommandations. Plutôt que d’inclure des notes de bas de page partout dans cette partie, nous vous reportons aux textes complets des recommandations tirées de 15 sources mentionnées à l’annexe 1.

  1. Recommandations au sujet d’une enquête publique, de la reconnaissance des préjudices causés et de l’éducation

Tant la Commission royale d’enquête sur les peuples autochtones (CRPA) que le rapport de la nation nishnawbe-aski, le rapport de l’enquête effectuée relativement au pensionnat pour enfants autochtones de Chesterfield Inlet, le rapport national 1996 de l’APN, l’ouvrage The Circle Game et le rapport Grollier Hall ont demandé tout particulièrement une enquête publique. Bien qu’elle ne se soit pas arrêtée sur une méthode particulière, la conférence nuu-chah-nulth a demandé une enquête sur les décès inexpliqués et de faire connaître au grand public les cas de violence survenus dans les pensionnats pour enfants autochtones, deux objectifs qu’une enquête permettrait fort bien d’atteindre.

Des recommandations plus générales concernant " la sensibilisation du public " et " l’information du public " ont été faites dans tous les cas mentionnés ci-dessus, ainsi que dans l’étude de Rosalyn Ing, dans l’ouvrage d’Elizabeth Furniss, dans les recommandations effectuées en 1996 par le Conseil tribal nuu-chah-nulth et dans une déclaration récente des victimes tasiuqtit.

Le rapport du projet national d’examen des pensionnats pour enfants autochtones (APN, 1996) a demandé d’élever des monuments à la mémoire des enfants qui sont morts dans les pensionnats.

M. Roland Chrisjohn ne mâche pas ses mots dans sa recommandation au sujet de la reconnaissance publique. Il répète à contrecœur les variations des recommandations qui sont restées ignorées jusque-là et conclut :

Si quelque chose doit être fait pour faire aboutir ces recommandations ou ce qui leur ressemble, nous demandons de faire une déclaration empreinte d’ouverture et d’honnêteté à l’effet que notre destruction, à titre de peuples autochtones, est le résultat d’une politique officielle du gouvernement1.

2. Recommandations au sujet d’un dédommagement des personnes

La question du dédommagement des personnes revient de différentes façons. La conférence de 1991 sur les pensionnats pour enfants autochtones, Furniss et Chrisjohn recommandent clairement de compenser individuellement les victimes de violence. Peterson et la nation nishnawbe-aski recommandent que les personnes reçoivent des dédommagements qui leur permettent d’avoir accès aux services de guérison de leur choix. Le Conseil tribal nuu-chah-nulth (1994 et 1996) fait des recommandations plus générales au sujet du droit des personnes de recevoir un dédommagement.

3. Recommandations au sujet d’actions en justice

La conférence de 1994 du Conseil tribal nuu-chah-nulth a recommandé de soutenir les actions en justice, tant pour les personnes qui ont été victimes de violence que pour le préjudice culturel causé par les pensionnats pour enfants autochtones. La conférence de 1996 a recommandé différents moyens d’aider à la démarche des enquêtes criminelles. Elle a aussi recommandé d’étudier les possibilités de solutions négociées, pourvu qu’elles ne portent pas préjudice à d’autres règlements.

Le Conseil tribal nuu-chah-nulth (1996) et les victimes tasiuqtit ont fait des recommandations au sujet de l’accès aux renseignements et aux avis juridiques destinés aux victimes. Le rapport de Katherine Peterson allait plus loin en recommandant de prévoir du financement pour permettre aux anciens élèves d’étudier les possibilités du côté du système judiciaire. Ce rapport recommandait également qu’il y ait échange de renseignements relativement aux progrès des enquêtes et des poursuites devant les tribunaux.

Le rapport du programme pour les victimes et les témoins, produit dans le cadre de la cause criminelle Grollier Hall, a été le seul document à recommander d’examiner un mécanisme différent de divulgation afin de réduire le traumatisme des victimes. On y recommandait aussi un budget accru pour les services aux victimes des territoires afin d’accorder un soutien financier suffisant dans de tels procès.

4. Recommandations au sujet des excuses

Il y a eu des recommandations formulées dans les cas qui suivent au sujet des excuses des Églises et du gouvernement ainsi que du besoin d’une admission complète de leurs responsabilités respectives au sujet des pensionnats pour enfants autochtones et des préjudices qu’ils ont causés dans la suite des temps : la conférence nationale de 1991; la conférence nuu-chah-nulth de 1994; Breaking the Silence; le rapport de la nation nishnawbe-aski; Victims of Benevolence; le rapport de la Commission royale d’enquête sur les peuples autochtones; l’étude nuu-chah-nulth; le rapport de 1996 de l’APN; The Circle Game.

5. Recommandations au sujet de la guérison et de la revitalisation de la culture

a) Pour les collectivités et les nations

Le besoin d’une guérison et d’une revitalisation culturelles et d’un développement et d’une revitalisation des collectivités, et ce, à grande échelle, est le point central des recommandations de plusieurs travaux. Les recommandations formulées dans Breaking the Silence se concentrent presque entièrement sur les démarches et les principes requis pour réaliser ces objectifs. Les recommandations de la conférence de Vancouver (1991), du rapport de 1996 de l’APN et de Roland Chrisjohn touchent spécifiquement au besoin d’une valorisation culturelle adéquate, au contrôle entre les mains des Premières nations et au besoin d’ancrer le mieux-être et la planification des collectivités dans une vision claire.

Ing, les conseil tribaux caribou et nuu-chah-nulth, l’APN et les victimes tasiuqtit ont fait des recommandations à l’égard de la guérison fondée sur la culture, particulièrement du besoin de la revitalisation de la langue, de l’éducation ainsi que de programmes et de services pour les victimes de la destruction culturelle. Le fait de chercher à obtenir ou, selon le cas, d’offrir du financement pour atteindre ces objectifs fait partie des recommandations de Peterson, de la CRPA, de la nation nishnawbe-aski, du Conseil tribal nuu-chah-nulth et de la conférence nationale de 1991. Les recommandations de l’APN (1996) touchent particulièrement le besoin de nouveaux fonds (et non pas du même argent distribué autrement).

La demande relative au dédommagement pour le préjudice culturel, particulièrement la perte des langues, se retrouve dans les recommandations de Chrisjohn, de l’APN, de la nation nishnawbe-aski, de la conférence de Vancouver et du Conseil tribal nuu-chah-nulth.

Dans cinq rapports, l’on retrouve des recommandations sur le rôle et sur l’importance de la famille dans la revitalisation de la culture : Ing, le rapport de la conférence nationale de 1991, le Conseil tribal nuu-chah-nulth (1994 et 1996) et l’Assemblée des Premières Nations (1994). Dans Breaking the Silence, l’on recommande également l’élaboration de programmes de justice adaptés à la culture comme étant un élément essentiel de la revitalisation de la culture.

Plusieurs rapports font des recommandations au sujet du besoin de recherches sur les Autochtones, principalement le besoin de recueillir des dossiers, d’identifier les élèves et les agresseurs et d’établir des archives. Certains mentionnent de dresser la liste des programmes et des services qui sont à la fois adaptés et couronnés de succès. Parmi les sources, mentionnons la CRPA, l’APN (1996), les conseil tribaux nuu-chah-nulth et cariboo, Survivors Tasiuqtit et Chrisjohn.

Les recommandations au sujet du besoin de communication et d’établissement d’un réseau pour les groupes reliés aux pensionnats pour enfants autochtones se retrouvent dans trois sources, notamment la recommandation des Nuu-Chah-Nulths à l’effet que les victimes qui sont en prison participent à la démarche.

b) Pour les personnes

En ce qui concerne les besoins de guérison des personnes, le besoin de prestation, de financement et d’accès en matière de programmes et de ressources de traitement se retrouve dans les recommandations de Breaking the Silence, du rapport Peterson, de l’étude du Conseil tribal nuu-chah-nulth, de la CRPA, de The Circle Game et du rapport de 1996 de l’APN.

Les recommandations qui portent sur le besoin de rencontres ou de conférences pour les victimes apparaissent chez l’APN (1996) et le Conseil tribal nuu-chah-nulth. Ce conseil tribal, le rapport de Laurence Norbert et l’étude d’Ing font également des recommandations au sujet du personnel et de la formation nécessaires pour répondre aux besoins en matière de relations thérapeutiques. L’on retrouve des recommandations sur la grande priorité qu’est la guérison des personnes chez Ing et dans l’étude du Conseil tribal nuu-chah-nulth de 1996. Les recommandations de 1994 de ce même conseil tribal comprennent également la reconnaissance de l’importance du travail de guérison personnelle pour les chefs de file.

6) Recommandations au sujet des relations avec le gouvernement

Certaines sources traitent de la relation qui prévalait entre les Premières nations et le Canada et qui a permis que le problème des pensionnats pour enfants autochtones ait lieu. La conférence de Vancouver, Furniss, Miller et Chrisjohn mentionnent l’interférence et le paternalisme permanents du gouvernement dans les affaires autochtones. Plus particulièrement, Chrisjohn recommande que l’on règle la question des revendications territoriales en tant qu’élément fondamental de l’établissement d’une relation équitable. Dans Breaking the Silence, l’on recommande de résoudre le problème de la pauvreté des Premières nations en tant qu’élément de la démarche de règlement. Le rapport de 1996 de l’APN recommande qu’un financement plus équilibré remplace le saupoudrage actuel de fonds pour les programmes dont les exigences sont aussi grandes que changeantes. Le Conseil tribal nuu-chah-nulth propose d’adopter la justice réparatrice pour mieux refléter les besoins des Autochtones et pour mieux y répondre. Peterson parle de coordination et de communication relativement aux initiatives du gouvernement et des collectivités afin de résoudre les problèmes reliés aux pensionnats pour enfants autochtones.

Enfin, les recommandations du Conseil tribal nuu-chah-nulth (1994 et 1996), du Conseil tribal cariboo, de Peterson et de l’Assemblée des Premières Nations (1996) touchent au besoin d’une action rapide, particulièrement compte tenu du nombre des anciens concernés.

10.2 Recommandations de ce rapport 2.1 RECOMMANDATIONS URGENTES

Il est nécessaire d’agir immédiatement pour reconnaître et pour réparer le préjudice causé par la politique des pensionnats pour enfants autochtones dans le cas des personnes de 50 ans et plus. Pour ce faire, nous recommandons :

1. Un dédommagement financier pour les personnes qui ont fréquenté les pensionnats pour enfants autochtones et les centres d’hébergement2, et ce, sous forme d’un paiement d’un montant forfaitaire ou d’une pension viagère, selon la volonté des bénéficiaires.

2. L’établissement d’une démarche de divulgation, dont les responsables provinciaux auront le pouvoir :

• de sensibiliser et d’informer le public au sujet de la démarche de divulgation;

• de consigner les témoignages des victimes en privé ou en public;

• de fournir des renseignements sur les recours au criminel et au civil;

• d’établir et d’assurer un dédommagement juste et équitable pour les personnes qui ont souffert de la violence.

3. Une majorité du groupe des responsables devrait être constituée d’anciens élèves des pensionnats pour enfants autochtones. Il faut être en mesure d’entendre les victimes et de leur répondre dans la langue de leur choix. À moins qu’elle ne soit acceptée par la personne concernée, la décision du groupe au sujet du dédommagement ne devrait pas être définitive. Les personnes doivent pouvoir conserver l’option de recourir aux tribunaux.

4. La démarche de divulgation ne doit pas être limitée dans le temps.

5. Un organisme national de coordination, composé de membres respectés des collectivités non affiliés aux organisations politiques des Autochtones, devrait définir et superviser la démarche. Cet organisme, qui se fonderait sur une expertise en matière de droits humains au palier international et qui compterait sur des conseils légaux et juridiques provenant d’Autochtones et de non-Autochtones, aurait la tâche primordiale de définir des lignes directrices relativement aux dédommagements financiers.

6. La mise sur pied de mécanismes administratifs et financiers visant à assurer un traitement rapide des mesures de réparation financière.

7. Une reconnaissance officielle de l’injustice commise à l’endroit des personnes et de leurs nations, y compris des excuses et une reconnaissance complètes de la responsabilité directe du gouvernement et des Églises en ce qui concerne les pensionnats pour enfants autochtones est toujours nécessaire. Mais, dans le climat actuel, les mots ne font qu’ajouter l’insulte à l’injure. Il faut d’abord passer concrètement à l’action.

2.2 RECOMMANDATIONS GÉNÉRALES

1. Nous recommandons d’instituer une enquête publique nationale en vue d’enquêter et de documenter tous les aspects des politiques et des pratiques des pensionnats pour enfants autochtones. Cette enquête disposerait du pouvoir autorisé d’examiner les documents, d’entendre les témoignages, d’assigner des témoins et de porter des accusations. En reconnaissance du fait que les violations massives des droits humains ne relèvent pas de la compétence intérieure, cette commission doit comprendre des représentants d’organisations internationales de droits humains.

2. Nous recommandons qu’une démarche de divulgation, telle que décrite aux recommandations urgentes, numéros 2 à 6, soit offerte à tous les anciens élèves des pensionnats pour enfants autochtones en remplacement d’une procédure devant les tribunaux civils. Bien que la priorité de cette démarche soit d’entendre les anciens et de s’en occuper, il devrait appartenir à l’organisme national de décider de la méthode et du calendrier les plus pertinents pour répondre aux autres victimes.

3. Nous recommandons d’accorder un dédommagement financier aux personnes qui ont fréquenté les pensionnats pour enfants autochtones ou les centres d’hébergement, sous forme de paiement d’une somme forfaitaire ou d’une pension viagère, selon la volonté des bénéficiaires.

4. Nous recommandons que tout Autochtone souffrant des effets de la violence physique, sexuelle ou émotionelle perpétrée dans un pensionnat pour enfants autochtones puisse avoir accès sans retard ni restriction à tout traitement de son choix.

5. Nous recommandons que les gouvernements et les Églises établissent un fonds non limitatif sous le contrôle des Autochtones, et ce, aux fins suivantes :

• l’investissement dans l’épanouissement et dans la formation des personnes;

• le développement institutionnel et la construction de la capacité;

• le développement économique des collectivités;

• la guérison, l’éducation et la formation des personnes;

• l’apprentissage et le développement organisationnels;

• le développement, l’information et la programmation sur les plans social et culturel;

et toute autre tâche jugée nécessaire pour revitaliser les sociétés autochtones.

6. Nous recommandons le démantèlement du ministère des Affaires indiennes et des autres programmes sociaux, de santé, d’éducation et de développement économique du gouvernement fédéral destinés aux peuples autochtones et de les remplacer par une institution autochtone qui administrera les fonds de la manière qui correspondra aux besoins et aux philosophies des Autochtones.

7. Nous recommandons le règlement immédiat des revendications territoriales et sur les ressources d’une manière qui garantisse une base de ressources suffisante et durable pour toutes les nations.

8. Nous recommandons l’établissement d’archives nationales et de collections nationales de bandes vidéo reliées aux pensionnats pour enfants autochtones, aux fins suivantes :

• assurer et offrir l’accès des chercheurs à un dépôt centralisé de dossiers contenant des renseignements sur les pensionnats pour enfants autochtones;

• offrir une aide financière pour recueillir les témoignages et assurer la permanence de la recherche;

• travailler avec des éducateurs à concevoir un programme d’études autochtones qui explique l’histoire et les effets des pensionnats pour enfants autochtones;

• mettre en œuvre des programmes d’information du public portant sur l’histoire et sur les effets des pensionnats pour enfants autochtones.


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Weetamah News, dossier de coupures de presse.

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4. Bandes vidéo

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Siebert, John, " Being Part of the Healing: A Workshop Outline on responding to the legacy of Native Residential Schools, Mandate, janvier 1996.

Annexes

Annexe 1

Recommandations formulées antérieurement

Par ordre chronologique, à partir de 1990, nous présentons ici les recommandations déjà formulées (parfois définies comme étant des " objectifs ", des " besoins " ou des " messages-clés ") que nous avons retrouvées au sujet de la résolution et de la réparation des problèmes reliés aux pensionnats pour enfants autochtones. Les extraits en italique sont des transcriptions directes (citations) des documents originaux. Nous avons respecté le texte autant que possible.

Certaines des recommandations s’adressent au gouvernement. D’autres sont internes et visent une action dans un groupe donné. Leur cohérence et la répétition de certains thèmes sont éloquentes. Voici d’où ces recommandations proviennent :

  1. Rosalyn Ing (1990).
  2. Première conférence nationale sur les pensionnats pour enfants autochtones (1991).
  3. Étude du Conseil tribal caribou (1991).
  4. Assemblée des Premières Nations, Breaking the Silence (1994).
  5. Katherine Peterson (1994).
  6. Conférence nuu-chah-nulth sur les pensionnats pour enfants autochtones (1994).
  7. Elizabeth Furniss (1995).
  8. Rapport de la nation nishnawbe-aski (1995).
  9. La Commission royale d’enquête sur les peuples autochtones (1996).
  10. Conseil tribal nuu-chah-nulth, Indian Residential Schools (1996).
  11. Assemblée des Premières Nations, projet d’examen des pensionnats pour enfants
    autochtones (1996).
  12. Roland Chrisjohn et autres, The Circle Game (1997).
  13. Laurence Norbert, Rapport Grollier Hall (1998).
  14. Survivors Tasiuqtit, déclaration sur la violence historique (1998).

  15. XV Four Worlds International Institute, Résumé — L’autosuffisance et la réfome de la sécurité sociale (1998). Avec la permission requise, ce document et les recommandations qu’il contient suivent dans leur forme originale.


I N. Rosalyn Ing, dans The Effects of Residential Schools on Native Child-Rearing Patterns, 1990, a recommandé ce qui suit.

1. Les ateliers de guérison sont nécessaires pour aider les gens à faire le lien entre les comportements présents et l’expérience passée.

2. Les victimes portent inutilement le fardeau de la rancœur coupable, de la colère, de la revanche et des désillusions. Les spécialistes de la santé doivent encourager leurs patients à parler de ces douleurs et faire participer les guides spirituels à fournir de l’aide.

3. Il faut mettre en œuvre des programmes de formation aux rôles parentaux pour les Autochtones qui mettent l’accent sur les comportements culturels et traditionnels.

4. Les parents autochtones doivent se tourner vers les anciens qui les aideront à retrouver la vision de la famille.

5. Les conditions chaotiques de la famille autochtone remontent aux pensionnats pour enfants autochtones, qui sont la cause de cette désintégration. La société n’a pas une bonne connaissance de ce fait...

6. La participation des parents et le contrôle local en matière d’éducation.

7. Offrir des programmes de formation aux rôles parentaux fondés sur la culture et sur la tradition qui soient reliés aux institutions scolaires, car les parents qui ont fréquenté les pensionnats pour enfants autochtones craignent encore les écoles1.

II Le résumé des délibérations de la première conférence canadienne sur les pensionnats pour enfants autochtones2 (1991) contient des messages-clés.

1. Le besoin d’une planification ancrée dans une vision claire. (Phil Fontaine)

2. Le mieux-être est une condition préalable à l’autodétermination. (Chef Christopher)

3. La famille est le premier enseignant. La transformation passera par la communication. (Lorna Williams)

4. En tant que peuple, nous vivons une période critique. Notre problème fondamental est la nature de notre relation avec le Canada. Un changement structurel au chapitre des lois et des politiques est essentiel. Nous devons assurer que notre rétablissement se fonde sur un changement structurel. (Ovide Mercredi)

5. Les Églises et le gouvernement doivent reconnaître qu’ils ont engendré le problème, s’excuser et allouer les ressources qui permettront d’offrir les services et les programmes nécessaires pour la guérison, le rétablissement et le développement ainsi que pour compenser les personnes handicapées ou infirmes à la suite du traitement qu’elles ont subi dans les pensionnats pour enfants autochtones. (O. Mercredi)

6. Nous devons être responsables et crédibles pour recevoir et utiliser ces ressources. (O. Mercredi)

7. Nous devons réduire les rapports d’opposition et de confrontation, et instaurer un respect mutuel. " Guérir l’enfant, la famille, la collectivité et la nation. " (O. Mercredi)

III L’étude du Conseil tribal caribou (1991) établit des besoins dans les domaines qui suivent.

• La collaboration entre les " travailleurs en santé mentale " et les membres de la collectivité en vue de définir ce que leurs situations respectives nécessitent.

• Les mesures correctives ne devraient pas se limiter au traitement individuel.

• Une stratégie à long terme visant à intégrer les démarches des spécialistes et des collectivités qui pourrait comprendre une formation accrue des membres de ces collectivités.

• L’évaluation des programmes communautaires pour établir ce qui aide et ce qui n’aide pas.

• Une compréhension profonde des forces politiques et sociales qui ont façonné cette agression.

• Il faut rendre disponible sans tarder toute l’aide que l’on peut trouver3.

IV L’Assemblée des Premières Nations, dans Breaking the Silence (1994), a fait les recommandations qui suivent.

• Une engagement à l’égard des principes de respect, de responsabilité et de collaboration est nécessaire pour la guérison et pour la formation.

• Une effort efficace en matière de guérison commence avec la participation de tous les membres des collectivités et suit une démarche qui démontre le respect à l’égard des besoins de chaque personne et de chaque famille de la collectivité; c’est la collectivité qui doit en assurer la direction afin d’assurer qu’elle a la propriété et la responsabilité de l’initiative.

• L’exposé d’un modèle unique fondé sur les façons de voir des Premières nations a été suggéré à titre de mécanisme de guérison possible. Ce modèle se fonde sur les compréhensions traditionnelles qui mettent en valeur la multiconnectivité et la complétude. Ainsi, la guérison doit comprendre les aspects physiques, émotionnels, mentaux et spirituels de la vie des personnes, des familles et des collectivités.

• Chercher à comprendre l’histoire du point de vue des Premières nations en se tournant vers les anciens, en participant aux cérémonies et en se fondant sur les connaissances et sur les pratiques traditionnelles en matière de guérison et de vie sont des moyens de guérison spirituelle.

• Offrir des possibilités de faire revivre et de conserver les langues des Premières nations est un autre moyen de reconstruction de l’esprit.

• L’effort permanent visant le traitement des toxicomanies est une condition fondamentale de la guérison. Il y a une pénurie flagrante de choix et de possibilités de traitement, particulièrement pour les jeunes et les jeunes adultes.

• Parmi les suggestions visant la guérison, l’on retrouve l’élaboration de systèmes policier et judiciaire adaptés à la culture des Premières nations. L’élaboration de programmes familiaux qui se concentrent sur la thérapie et sur le traitement permanents des victimes et des contrevenants est plus que nécessaire. De plus, la possibilité d’apprendre une grande variété d’habiletés nécessaires à la vie familiale, y compris les habiletés parentales et en communication, la possibilité d’acquérir les compétences professionnelles et et la possibilité de conserver des emplois rémunérateurs sont également d’une importance primordiale pour avoir une vie familiale productive.

• Le bien-être des Premières nations, que ce soit sur une base individuelle ou collective, doit s’appuyer sur la reconnaissance des pertes multigénérationnelles que les Premières nations ont subies et le regret à leur égard. La démarche de résolution des problèmes tels que la pauvreté, qui continuent de sévir chez les Premières nations, doit comprendre un volet qui se préoccupe du malheur et de la perte.

• S’occuper de la violence familiale et du malheur qu’elle occasionne présuppose l’élaboration de possibilités et de programmes de guérison individuelle et collective en fonction des besoins des collectivités et des ressources disponibles4.

Le document Breaking the Silence renvoie également à la demande de certains types de recherches formulée par le Conseil tribal cariboo en 1991, dont ceux qui suivent.

• La réunion de renseignements détaillés sur les initiatives de guérison des Premières nations déjà en cours au Canada.

• L’élaboration de critères pertinents pour l’évaluation des forces et des limites de ces initiatives et l’évaluation même de ces initiatives.

• L’élaboration d’un système de réseau efficace qui permette que les renseignements descriptifs et les évaluations atteignent les personnes et les collectivités des Premières nations partout au Canada.

V Katherine Peterson, c.r., (Sir Joseph Bernier Federal Day School [Turquetil Hall] Investigation Report, 1994) a recommandé ce qui suit.

1. Que l’on soutienne financièrement les personnes qui examinent jusqu’à quel point, dans des causes particulières, des mesures de redressement en matière civile sont possibles sous forme d’une action en responsabilité civile délictuelle ou en négligence.

2. (Remplacée)

3. Il faudrait demander que la GRC et le ministère de la Justice tiennent le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest informé des décisions prises à l’égard des poursuites au criminel et des progrès réalisés dans de telles poursuites.

4. Il faut entreprendre immédiatement des négociations avec l’Église catholique romaine et le gouvernement fédéral pour définir les ressources financières et humaines à engager dans les services de guérison, de thérapie et de consultation destinés aux anciens élèves et à leurs familles.

5. Que des services de thérapie et de soutien soient offerts aux anciens élèves sous les formes qui suivent :

• des établissements de guérison régionaux;

• des services de thérapie au palier des collectivités, offerts par des personnes ayant une formation dans le domaine des victimes adultes de violence, et ce, en s’appuyant sur les conseils et sur l’aide des ressources des collectivités.

6. Que le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest se tienne en communication avec la Commission royale d’enquête sur les peuples autochtones en vue de tirer profit de son expérience et de ses ressources dans ce domaine, afin de coordonner les actions entre les différents paliers de gouvernement et les organisations autochtones.

7. Que, dans l’éventualité où les négociations avec l’Église et le gouvernement fédéral ne progresseraient pas de manière satisfaisante, l’on institue une enquête publique pour étudier l’expérience vécue par les élèves des pensionnats pour enfants autochtones partout dans les Territoires du Nord-Ouest. Le mandat d’une telle enquête publique devrait comprendre l’examen des circonstances entourant les allégations de violence physique, sexuelle et émotionnelle survenue dans les pensionnats pour enfants autochtones, de la qualité de l’instruction reçue par les élèves qui ont fréquenté ces établissements, de la disponibilité des traitements et des modèles de guérison pour les victimes de violence.

8. Que l’on forme un groupe de travail constitué de représentants d’anciens élèves des pensionnats pour enfants autochtones des Territoires du Nord-Ouest, des organisations qui dirigeaient ces établissements, telles que l’Église catholique romaine et les deux paliers de gouvernement, ainsi que de spécialistes du traitement des victimes adultes afin de consulter les anciens élèves et les collectivités en vue de recommander des modèles de traitement et des méthodes de prestation des services de soutien aux anciens élèves ou aux victimes de violence en général.

9. Que le gouvernement des Territoirres du Nord-Ouest entreprenne une campagne de sensibilisation et d’information du public orientée vers les victimes de violence, y compris la production de guides dans lesquels on pourra retrouver les expériences de certaines victimes, les symptomes communs découlant de la violence, les traumatismes et les démarches de guérison, de tels guides devant être facilement accessibles partout dans les Territoires du Nord-Ouest.

10. Que le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest tienne les anciens élèves informés de toute initiative entreprise pour s’occuper de ces questions.

Peterson conclut ses recommandations sur ces mots : " À mon avis, les préoccupations soulevées sont sérieuses et fondées, et exigent une réponse sincère et sans délai. Dans cette réponse, il faut surtout mettre l’acccent sur le fait de briser le silence, de mettre fin au stigmate et à l’isolement qui constituent une grande part des vies de ces personnes5. "

VI La conférence nuu-chah-nulth sur les pensionnats pour enfants autochtones (1994) a fait les recommandations qui suivent.

1. À titre de chefs de file, il faut reconnaître toute l’importance qu’il y a à mettre en œuvre un programme de guérison. Il faut traiter cette question comme un " CAS D’URGENCE ".

2. Dans toutes les régions, favoriser et faciliter le travail de suivi aux travaux de la conférence nuu-chah-nulth sur les pensionnats pour enfants autochtones.

3. Embaucher de nouveau les conseillers ???????? kuu-as nuu-chah-nulths sans emploi.

4. Chercher à obtenir des excuses publiques de la part des Églises qui ont dirigé les pensionnats pour enfants autochtones et des gouvernements qui les ont financés.

5. Intenter une action en justice et se pourvoir en justice pour chercher à obtenir un dédommagement monétaire de la part des gouvernements, des Églises et des personnes responsables du préjudice causé aux personnes de la nation nuu-chah-nulth et à l’ensemble de la culture de cette nation.

6. Communiquer aux personnes intéressées tout renseignement important sur les questions reliées aux pensionnats de même que les possibilités en matière de guérison.

7. Aider à rendre possible la production d’une bande vidéo racontant la réunion de travail des Nuu-Chah-Nulths sur les pensionnats pour enfants autochtones et à la diffuser.

8. Apporter un appui politique aux causes portées devant les tribunaux par les victimes des pensionnats pour enfants autochtones.

9. Aider les membres de la nation nuu-chah-nulth qui sont en prison à assister aux ateliers et aux conférences sur les pensionnats pour enfants autochtones.

10. Coordonner les efforts qui se déploient par toute la côte pour composer avec notre douleur incessante.

11. Honorer les héros nuu-chah-nulth qui ont lutté contre les Églises et contre les pensionnats pour enfants autochtones qui détruisaient notre culture.

12. Pratiquer et renforcer la langue, les chansons et la culture nuu-chah-nulths de façon régulière et continue afin d’en faire profiter nos jeunes.

13. Former les travailleurs nuu-chah-nulths du domaine de la santé à être sensibles à la culture et les identifier au sein de nos collectivités.

14. Faire enquête sur les circonstances entourant les décès des enfants nuu-chah-nulths qui sont morts dans les pensionnats pour enfants autochtones ou immédiatement après les avoir fréquentés.

15. Faite connaître au grand public le fait que certains des nôtres sont morts des suites de volées de coups reçues alors qu’ils se trouvaient dans les pensionnats pour enfants autochtones.

16. Coordonner un programme d’enseignement de la langue nuu-chah-nulth destiné aux enfants et aux adultes.

17. Favoriser l’utilisation des noms nuu-chah-nulths dans les activités du Conseil tribal nuu-chah-nulth.

18. À titre de chefs de file, s’occuper chacun de notre propre pensionnat avant de signer un traité avec les gouvernements mahmalthnii.

19. Convoquer des rencontres spéciales pour s’occuper des problèmes reliés aux pensionnats pour enfants autochtones sur le territoire nuu-chah-nulth.

20. Aider à obtenir de l’argent pour financer le travail de guérison si nécessaire.

21. Faire des problèmes sociaux et de santé mentale nos grandes priorités.

22. Aider les Nuu-Chah-Nulths à retracer leur ascendance et à dresser leur arbre généalogique et conserver ces documents généalogiques dans un dépôt central.

23. Dresser et conserver une liste complète des Nuu-Chah-Nulths victimes des pensionnats pour enfants autochtones.

24. Dresser et conserver les listes du personnel des pensionnats pour enfants autochtones qui ont commis des sévices contre les enfants nuu-chah-nulths.

25. Élaborer un plan pour offrir de l’aide aux enfants des victimes des pensionnats pour enfants autochtones.

26. À titre de chefs de file des Nuu-Chah-Nulths, pratiquer l’humilité6.

VII Elizabeth Furniss, dansVictims of Benevolence: The Dark Legacy of the Williams Lake Residential School (1995), a établi les besoins qui suivent.

• Des déclarations de l’Église et du gouvernement à l’effet qu’ils reconnaissent leurs responsabilités respectives pour les sévices commis.

• Un dédommagement financier aux victimes de violence dans les pensionnats pour enfants autochtones.

• Un soutien financier et d’autre nature aux efforts des Autochtones pour accroître la conscience historique du public canadien autre qu’autochtone.

• (Un besoin de questionner) la pertinence de la continuité de la Loi sur les Indiens, le rôle du ministère des Affaires indiennes (et les autres manifestations de) la croyance persistante que les peuples autochtones ne peuvent pas prendre des décisions responsables pour eux-mêmes7.

• Le fait de raconter les histoires des effets dévastateurs de ces attitudes dans les vies des personnes autochtones, et la manière dont elles se reflètent dans la législation et dans la politique, est crucial pour éviter que de telles tragédies se répètent8.

L’ouvrage de Furniss est descriptif et analytique. Bien qu’on n’y trouve pas réellement une liste de recommandations, le texte indique certaines directions à prendre en vue d’un changement nécessaire. Furniss étudie les pensionnats pour enfants autochtones dans le contexte de la relation structurelle entre les peuples autochtones et le gouvernement fédéral afin de relever un problème plus vaste :

" Ce problème plus vaste n’est pas le fait que le système des pensionnats pour enfants autochtones ait existé ou que ses effets aient pu être bons ou néfastes, mais que certains groupes au sein de la société ont émis le postulat qu’ils savaient quels étaient les meilleurs intérêts des peuples autochtones et que ces groupes ont détenu et continuent de détenir le pouvoir et l’autorité d’interférer dans les vies des Autochtones et de leur imposer des conditions auxquelles ceux-ci s’opposent9. "

VIII La nation nishnawbe-aski, dans son rapport des rencontres sur les pensionnats pour enfants autochtones, 1995, a recommandé ce qui suit.

• Le besoin de porter les problèmes reliés aux pensionnats pour enfants autochtones à l’attention de tout le peuple canadien de manière qu’il en ait vraiment conscience.

• Le besoin général d’information, d’une campagne nationale d’information du grand public au sujet des effets des pensionnats pour enfants autochtones.

• Le besoin d’une démarche d’enquête visant à expliquer plusieurs choses qui ont eu lieu et à apporter la paix d’esprit aux personnes dont les enfants ont disparu.

• Le besoin que le gouvernement et les Églises reconnaissent leurs politiques d’acculturation et leur responsabilité à l’égard du préjudice qui s’est ensuivi.

• Offrir un dédommagement financier aux personnes afin qu’elles puissent obtenir les services de guérison de leur choix.

• Des engagements financiers de la part de l’Église et du gouvernement pour la programmation permanente, les réunions, les conférences et les séminaires à l’attention des victimes, les centres de langue, le programme d’études en histoire pour les écoles et le programme de fomation visant à répondre aux besoins des victimes, des familles et des collectivités10.

 

IX La Commission royale d’enquête sur les peuples autochtones (1996) a recommandé ce qui suit.

1.10.1

Qu'en vertu de la partie I de la Loi sur les enquêtes, le gouvernement du Canada institue une commission d'enquête qui aurait le mandat suivant :

a) examiner et documenter l'origine et l'incidence sur l'ensemble des peuples autochtones des politiques et des pratiques des pensionnats, et notamment la nature et l'ampleur de leurs effets sur les générations subséquentes d'individus et de familles, sur les collectivités et sur les sociétés autochtones;

b) tenir d'un bout à l'autre du pays des audiences publiques suffisamment bien financées pour permettre aux personnes touchées d'y témoigner;

c) commander des études et des analyses en vue de déterminer l'ampleur des effets de ces politiques et pratiques;

d) examiner les dossiers des pensionnats en vue d'identifier les abus commis et, le cas échéant, les dispositions à prendre;

e) recommander que les gouvernements et les Églises responsables prennent les correctifs jugés nécessaires par la commission d'enquête afin d'atténuer les difficultés créées par l'expérience du pensionnat, y compris, selon le cas :

• les excuses des personnes responsables;

• le dédommagement des collectivités en vue de leur permettre de concevoir et d'administrer des programmes qui contribueront à enclencher le processus de guérison et à assainir la vie communautaire;

• le financement des traitements que voudront suivre les personnes touchées ainsi que leur famille.

1.10.2

Que la majorité des personnes nommées à cette commission d'enquête soient autochtones.

1.10.3

Que le gouvernement du Canada finance la création d'un dépôt national de documents et de vidéos sur les pensionnats, en coordonnant sa planification avec celle de l'Université internationale des peuples autochtones recommandée dans le présent rapport (voir le chapitre 5 du volume 3) et son centre de documentation électronique, afin de

• faciliter l'accès aux documents et l'échange électronique d'information sur les pensionnats;

• soutenir financièrement la collecte de témoignages et les recherches permanentes;

• travailler avec les pédagogues pour concevoir un programme d'études autochtones qui explique l'histoire et les répercussions des pensionnats;

• lancer des programmes destinés à renseigner le public sur l'histoire et les conséquences des pensionnats et les correctifs apportés pour atténuer leurs répercussions négatives11.

X Le Conseil tribal nuu-chah-nulth, dans (1996), a recommandé ce qui suit. Indian Residential Schools: The Nuu-chah-nulth Experience

1. Sensibiliser le public

a) Rendre l’étude nuu-chah-nulth sur les pensionnats pour enfants autochtones accessible dans toutes les collectivités de la nation nuu-chah-nulth.

b) Publier l’étude afin d’informer le grand public.

c) Conserver les communiqués de presse et les renseignements au sujet des pensionnats pour enfants autochtones, y compris sur les progrès des enquêtes menées par la GRC.

d) Faire en sorte que la bande vidéo de la conférence sur les pensionnats des Nuu-Chah-Nulths soit très accessible.

e) Travailler avec le Sommet des Premières nations de la Colombie-Britannique à informer et à renseigner le public au sujet des pensionnats.

f) Faire pression sur les Églises et sur les gouvernements afin qu’ils reconnaissent l’injustice dont ils ont été responsables en niant continuellement l’existence d’une violence répandue au sein du système des pensionnats pour enfants autochtones, afin qu’ils fassent des excuses pour leur responsabilité dans l’établissement, dans la supervision et dans la gestion du système des pensionnats et afin qu’ils donnent des garanties qu’ils n’imposeront plus jamais de telles violations des droits humains à qui que ce soit.

2. Soutenir l’enquête de la GRC sur les pensionnats pour enfants autochtones

a) Le Conseil tribal nuu-chah-nulth et chaque nation nuu-chah-nulth informeront la GRC de leur désir de participer à l’enquête et d’apporter du soutien aux victimes.

b) Désigner les personnes-ressources ou le personnel de soutien aux personnes qui participent à l’enquête.

c) Organiser des rencontres communautaires pour présenter les enquêteurs.

d) S’assurer que le protocole de l’enquête est accessible et que les collectivités le comprennent.

3. Offrir un soutien à court terme aux victimes des pensionnats pour enfants autochtones

a) Le Conseil tribal nuu-chah-nulth et chaque nation membre font une déclaration d’appui aux personnes qui travaillent sur les questions entourant les pensionnats pour enfants autochtones et prennent les dispositions pour respecter et reconnaître leur travail.

b) Obtenir des fonds pour prolonger le contrat des travailleurs de soutien du Conseil tribal nuu-chah-nulth relativement aux pensionnats... aussi longtemps qu’il sera nécessaire.

c) Chaque collectivité nuu-chah-nulth devrait embaucher au moins un thérapeute ou travailleur de soutien qui offrira ses services au sein de la collectivité et dont le mandat consistera à offrir du soutien relativement aux problèmes des pensionnats pour enfants autochtones.

d) Chaque collectivité nuu-chah-nulth offrira des possibilités aux gens de se réunir et de discuter des questions entourant les pensionnats pour enfants autochtones dans un milieu sûr et favorable.

e) Chaque collectivité et le Conseil tribal cherchent à obtenir les ressources nécessaires pour soutenir la démarche de guérison par les moyens de relations thérapeutiques, de groupes de soutien, de rassemblements et autres, tels que les interventions massives.

f) Respecter le besoin de chaque personne de s’occuper des questions des pensionnats pour enfants autochtones de la manière, au moment et au rythme qui lui sont propres. Soutenir les personnes qui veulent travailler maintenant et encourager les autres à le faire, mais ne pousser aucune personne à entreprendre quelque chose tant qu’elle n’est pas prête.

g) Offrir de la formation directement ou conjointement avec d’autres Premières nations afin d’assurer que les travailleurs de soutien connaissent l’histoire, les conséquences, les problèmes et les démarches de guérison entourant les problèmes des pensionnats pour enfants autochtones.

4. Plan pour la résolution des problèmes, que ce soit de façon négociée ou devant les tribunaux

a) Obtenir un avis juridique relativement aux options d’action au civil en vue d’assurer un dédommagement ou des ressources pour la guérison en se fondant, en partie, mais sans s’y limiter, sur les conclusions de l’enquête criminelle de la GRC.

b) Demeurer ouverts à la possibilité de négocier l’obtention de ressources de la part du gouvernement fédéral ou provincial et des Églises à titre de mesure provisoire, à condition que cela ne cause pas préjudice à un règlement éventuel. Les possibilités d’aider les anciens devraient mériter une attention particulière.

c) Toute solution éventuelle devrait respecter le droit des personnes à recevoir un dédommagement pour les actes préjudiciables dont elles ont été les victimes.

d) Tout règlement doit également prévoir des dispositions collectives en vue de soutenir la démarche de guérison et les institutions gouvernementales et d’éducation des Nuu-Chah-Nulths, y compris :

i) Parce que les pensionnats pour enfants autochtones étaient des institutions conçues pour détruire la culture, il est pertinent de créer une institution nuu-chah-nulth dont l’objectif sera de revitaliser et de promouvoir la culture. Une telle institution devrait intégrer la guérison, la recherche, l’enseignement et l’éducation.

ii) L’élimination de la langue a été un élément primordial de la destruction des systèmes des Nuu-Chah-Nulths. Un programme de grande envergure visant à documenter et à enseigner la langue est un moyen logique de compenser les effets de cette élimination.

iii) La guérison exigera le rétablissement des liens spirituels avec l’environnement. Ainsi, des programmes de guérison à l’extérieur, dans des lieux où les forces spirituelles n’ont pas été perturbées, seront nécessaires.

    1. Il doit y avoir des programmes qui visent la guérison des victimes des pensionnats pour enfants autochtones de manière holistique, c’est-à-dire, qui se fondent sur la vitalité des enseignements des Nuu-Chah-Nulths, et ce, en reconnaissance du fait que les problèmes à résoudre touchent plusieurs aspects, y compris le respect des autres, les aptitudes dynamiques à l’égard de la vie, les habiletés parentales, les comportements déviants et les toxicomanies.

e) La justice mahmalthni12 se fonde sur la confrontation et n’offre aucun moyen de réconciliation. Puisque les victimes du personnel des pensionnats pour enfants autochtones ont ramené leur apprentissage au foyer et qu’ils l’ont appliqué à leurs propres familles et collectivités, il sera nécessaire de concevoir et de mettre en œuvre un système communautaire de justice qui respectera la démarche nuu-chah-nulth pour corriger ces torts, pour réprimander les contrevenants et pour leur permettre de se réhabiliter avec le soutien des familles concernées13.

XI L’Assemblée des Premières Nations, dans le Final Report of the National Residential Schools Review Project, 1996, a établi les objectifs à atteindre et les activités nécessaires.

1. Lutter et faire pression pour obtenir des services et des centres de guérison sous la direction des collectivités, adaptés à sa culture et qui font appel aux méthodes traditionnelles et contemporaines de guérison.

Activités :

• Journée régionale et nationale à la mémoire des victimes des pensionnats pour enfants autochtones.

• Des monuments élevés à la mémoire des enfants qui sont morts alors qu’ils fréquentaient les pensionnats.

• Offrir des renseignements aux victimes sur les ressources en matière de soutien émotionnel.

• (Soutien puplic aux) centres communautaires de guérison des familles.

• Une démarche de sélection élaborée au palier des collectivités en ce qui concerne les travailleurs de première ligne.

• Une conférence sur le mieux-être destinée aux anciens.

• Rencontres de suivi, après avoir dispensé les soins, destinées aux victimes des pensionnats pour enfants autochtones.

• Faire pression relativement au besoin de centres et de services de guérison reliés aux pensionnats pour enfants autochtones.

2. Conjointement avec les Premières nations, élaborer et assurer un éventail complet de services pour les victimes de violence et de perte culturelle ainsi que pour leurs familles et leurs collectivités respectives afin qu’elles les aident dans leur guérison.

Activités :

• Assurer le financement des services de soutien indiqués et exigés par les coordonnateurs des questions entourant les pensionnats pour enfants autochtones. Il devrait s’agir de nouvelles sommes d’argent et non pas d’argent prévu dans les initiatives actuelles de financement.

• Lutter pour obtenir le financement de services et de programmes de traitement adaptés à la culture et pour que ce financement s’ajoute aux initiatives de financement actuelles.

• Lutter pour obtenir le financement des paliers local et régional.

3. Faire pression et lutter pour l’amélioration de la formation et des habiletés des travailleurs de première ligne et des autres fournisseurs de services qui travaillent avec les victimes du système des pensionnats pour enfants autochtones.

Activités :

• Faire des recherches sur les domaines de formation adaptés à la culture définis comme étant nécessaires pour travailler dans le domaine des pensionnats pour enfants autochtones. (... y compris) les méthodes d’intervention en cas de suicide, les habiletés parentales, la démarche de réclamation, le traitement des divulgations de cas de violence sexuelle, les enseignements traditionnels, la formation critique en débreffage en cas de stress occasionné par des incidents ainsi que la spiritualité.

4. Assurer que le gouvernement du Canada exprime immédiatement ses excuses complètes aux Premières nations pour l’intention raciste et destructrice qui fondait sa politique à l’égard des pensionnats pour enfants autochtones.

Activités :

• Le gouvernement devrait s’excuser et reconnaître son entière responsabilité relativement à l’aide qu’il a apportée aux Églises.

• (Le gouvernement devrait offrir) les ressources financières pour développer les ressources humaines et les structures physiques nécessaires (pavillons de ressourcement et centres de guérison). Les Premières nations exigent un système de financement plus équilibré... les différentes initiatives comportent un trop grand nombre de conditions et sont trop sporadiques.

• Faire pression sur les députés fédéraux qui nous appuient pour qu’ils présentent un projet de loi privé.

5. Assurer que les organisations religieuses admettront leur responsabilité pour le rôle qu’elles ont joué dans le système des pensionnats pour enfants autochtones et appuyer fermement les Premières nations qui cherchent à obtenir réparation.

Activités :

• Défendre, auprès des Églises qui ont des projets de financement visant à s’occuper des problèmes entourant les pensionnats pour enfants autochtones, la nécessité de travailler conjointement avec les collectivités des Premières nations.

• Tous les dirigeants et le personnel des Églises doivent reconnaître qu’ils ont commis une injustice et des actes de génocide culturel par le moyen du système des pensionnats pour enfants autochtones.

• Faire pression sur les gouvernements et sur les Églises pour définir et allouer un financement de dédommagement en vue de la mise en œuvre des recommandations qui apparaissent dans Breaking the Silence.

• Travailler avec les groupes religieux à obtenir réparation pour les Premières nations.

6. Conjointement avec les Premières nations, élaborer un mécanisme de dédommagement pour les Premières nations qui ont subi des sévices perpétrés par le clergé et par les fonctionnaires chargés d’administrer la politique des pensionnats pour enfants autochtones.

Activités :

• Faire pression au nom des régions, selon les besoins.

• Offrir un appui dans les négociations des Premières nations avec les Églises et le gouvernement fédéral.

• Projets régionaux pour réaliser la stratégie provinciale, pour coordonner les efforts avec les autres organismes et services de santé et pour utiliser les ressources existantes. Chaque région doit coordonner le financement et ses services avec les autres provinces, la GRC, le territoire, les paliers de gouvernement.

• Le gouvernement provincial devrait offrir des ressources et accorder priorité à la question des pensionnats pour enfants autochtones.

• Effectuer des démarches politiques en vue de résoudre la question de la transférabilité des droits à la santé; effectuer une évaluation des services de thérapie.

7. Conjointement avec les Premières nations, élaborer un mécanisme de dédommagement pour le préjudice causé aux Premières nations en matière de langue et de culture en raison de la politique des pensionnats pour enfants autochtones.

Activités :

• Appuyer les Premières nations qui cherchent à obtenir des fonds du gouvernement fédéral pour financer les écoles d’immersion, au besoin.

8. Effectuer des recherches sur la politique du gouvernement en matière de pensionnats pour enfants autochtones et d’autres questions pertinentes, selon ce qui semble nécessaire.

Activités :

• L’APN effectuera des recherches d’archives en vue de confirmer la politique gouvernementale au sujet des pensionnats.

• Faire enquête sur les membres des Premières nations qui ont été envoyés dans d’autres pensionnats pour enfants autochtones (St. John’s, Mennonites).

• Chaque collectivité fera des recherches dans les domaines propres à la tribu en vue d’aider à préparer une réponse.

9. Mettre en œuvre une démarche visant à documenter la violence subie par les anciens élèves des pensionnats pour enfants autochtones par le moyen d’un dossier historique.

Activités :

• Documenter immédiatement les expériences des anciens qui sont des victimes des pensionnats pour enfants autochtones.

• Tenir un rassemblement national sur la question des pensionnats.

• Entreprendre la démarche nécessaire à la tenue d’une enquête nationale.

10. Accroître la sensibilisation et l’information des citoyens des Premières nations et du public canadien en élaborant une stratégie d’information fondée sur la documentation existante.

Activités :

• Élaborer et mettre en œuvre un programme d’information.

• Élaborer un programme de sensibilisation que les régions et les Premières nations pourront mettre en œuvre.

• Mettre sur pied un bulletin national dont l’objectif sera de communiquer les progrès réalisés dans le cadre de la stratégie nationale.

11. Mettre sur pied un bureau central d’information à l’APN portant sur les ressources disponibles et essentielles afin que les Premières nations et les projets régionaux entourant les pensionnats pour enfants autochtones y aient accès.

Activités :

Le bureau central établira et conservera un inventaire des documents suivants :

• Une liste de référence sur les stratégies juridiques des Premières nations.

• Les affaires criminelles régionales et nationales en instance.

• Les personnes-ressources dans les régions et au palier national que les membres des collectivités des Premières nations peuvent joindre au sujet des questions légales, de guérison et de soutien.

• Des listes régionales et nationales d’anciens qui ont la compétence pour travailler avec les victimes des pensionnats pour enfants autochtones14.

XII Roland D. Chrisjohn, Sherry L. Young et d’autres, dans The Circle Game, 1997, ont recommandé ce qui suit.

La seule réponse morale à un crime de cette envergure est qu’il n’aurait jamais dû se produire. Étant donné que c’est impossible, entreprendre ou demander moins que cela, c’est s’assurer que les souffrances causées dureront indéfiniment.

1. Nous recommandons de tenir une enquête spéciale pour établir tous les faits relatifs aux pensionnats pour enfants autochtones. Cette enquête aurait le pouvoir autorisé d’examiner tout document pertinent, d’entendre des témoins, d’assigner des témoins et de déposer des accusations.

2. Nous recommandons que toutes les organisations civiles et ecclésiastiques qui ont participé au système des pensionnats pour enfants autochtones fassent des excuses complètes et reconnaissent entièrement leurs torts. Ces excuses doivent comprendre une reconnaissance explicite qu’il est impossible d’atténuer la responsabilité de ce qui est arrivé et ne laisser aucun doute sur la nature des sévices commis contre les Autochtones, tant individuellement que collectivement. Ces excuses doivent faire partie d’une campagne visant à informer les citoyens canadiens de leur rôle, même indirect, dans ces actes d’oppression.

3. Nous recommandons la mise sur pied d’archives de référence sur le système des pensionnats pour enfants autochtones, sur le modèle Fortunoff Video Archive de l’université Yale, qui présente des témoignages sur l’holocauste.

4. Nous recommandons qu’il y ait un règlement équitable, juste et immédiat des revendications territoriales et sur les ressources.

5. Nous recommandons qu’il y ait un réglement équitable, juste et immédiat des réclamations relatives à la violence dans les pensionnats pour enfants autochtones.

6. Nous recommandons que les gouvernements et les Églises établissent un fonds non limitatif auquel les nations autochtones pourraient recourir pour entreprendre les travaux de reconstruction de leurs sociétés.

7. Nous recommandons le démantèlement de cette partie de l’État thérapeutique qui a des effets sur les peuples autochtones et son remplacement par des institutions qui reflètent les philosophies autochtones et qui sont sous le contrôle des Autochtones.

8. Nous recommandons que les personnes qui souffrent des conséquences de leur expérience de la violence physique, sexuelle et émotionnelle dans les pensionnats pour enfants autochtones aient un accès illimité au traitement de leur choix.

9. Si quelque chose doit être entrepris dans le sens de la réalisation de ces recommandations ou d’initiatives semblables, nous demandons de faire une déclaration ouverte et honnête que notre destruction, à titre de peuples autochtones, est le résultat d’une politique officielle du gouvernement.

À propos de la dernière recommandation, les auteurs ont fait la remarque qui suit : L’hypocrisie est une soupe très claire; elle ne nourrit pas, elle est monotone. Pour nous deux, il serait préférable de passer le reste de nos jours en suivant des " règles de mort équitables " plutôt que de mourir à petit feu d’une maladie que nous sommes trop polis pour nommer15.

XIII Laurence Norbert, dans Report on the Victim/Witness Support Service: The Grollier Hall Experience, 1998, a recommandé ce qui suit.

1. Que l’on étudie la possibilité de mettre sur pied une démarche de divulgation et de validation en remplacement de la procédure judiciaire actuelle fondée sur le confrontation. Cela permettrait aux personnes qui n’ont pas divulgué leur expérience dans le cadre des enquêtes policières actuelles ou en instance de le faire et d’entreprendre leur guérison.

2. (Recommandations détaillées portant particulièrement sur la démarche de soutien aux victimes dans le cadre des procédures judiciaires actuelles.)

3. Formation préalable des fournisseurs de soins aux collectivités concernant les conséquences de l’expérience des pensionnats pour enfants autochtones : par exemple, l’histoire et les effets globaux du système des pensionnats pour enfants autochtones; l’intervention en situation de crise; le soutien aux victimes des pensionnats pour enfants autochtones, le soutien permanent (établissement de réseaux), et la facilitation sociale et communautaire, pour n’en nommer que quelques-uns. Cela favorisera la sensibilisation communautaire et régionale au sujet du problème et constituera une ressource additionnelle dans les collectivités.

4. Q’une enquête publique ait lieu afin d’examiner l’expérience des élèves des pensionnats pour enfants autochtones dans les T. N.-O. Cette enquête devrait pouvoir porter sur les situations faisant l’objet d’allégations de sévices physiques, sexuels, émotionnels et spirituels dans ces pensionnats, sur la qualité de l’éducation reçue par les élèves qui fréquentaient ces établissements et sur les types de traitement et de guérison disponibles pour les victimes des pensionnats pour enfants autochtones.

Il faut tenir compte des principes et des attitudes qui suivent :

• Une enquête publique peut causer un deuxième traumatisme chez les victimes.

• Les services et les démarches de soutien doivent permettre de causer le moins de préjudice possible aux témoins à l’enquête.

• Il faudrait consulter chaque témoin au sujet de ses besoins en matière de soutien et en tenir compte.

• La démarche de guérison des témoins ne se termine pas avec la conclusion d’une enquête.

• Qu’il y ait des ateliers de sensibilisation et d’information au sujet de la question des pensionnats pour enfants autochtones à l’attention des cadres supérieurs du gouvernement, des spécialistes, des fournisseurs de soins à la collectivité de première ligne et des comités juridiques des collectivités en vue d’accroître leur sensibilisation, la compréhension interculturelle et de transmettre les connaissances les plus à jour.

• Établir un soutien communautaire et régional et des protocoles de référence concernant la démarche afin que les victimes de violence puissent entrer en communication avec les services, les travailleurs de première ligne et les groupes de victimes en activité.

 

5. Qu’il y ait mise sur pied d’un programme de formation et de guérison en vue d’intégrer les victimes des pensionnats pour enfants autochtones du Nord à titre d’adjoints communautaires en matière de relation thérapeutique portant sur la violence sexuelle.

6. Que le Nats’ejee K’eh Treatment Centre et la Tl’oondih Healing Society, conjointement avec le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et les groupes de victimes des pensionnats pour enfants autochtones, conçoivent et élaborent un programme de traitement des conséquences à long terme des pensionnats à l’attention des anciens élèves de ces établissements ainsi que de leurs familles.

7. Que le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest augmente son budget de services aux victimes dans le cadre des programmes de services aux victimes existants ou futurs afin de soutenir efficacement tout procès pour violence sexuelle impliquant plusieurs victimes16.

XIV Survivors Tasiuqtit, Statement by Survivors Tasiuqtit on Historical Abuse, Assimilation Policies & Honoring All Peoples, 1998, ne contient pas de recommandations numérotées en soi, mais met en évidence des opinions exprimées fermement. Nous espérons les avoir paraphrasées avec exactitude.

• Les Inuit ont besoin qu’on les assure de reconnaître leurs voyages de guérison spéciaux et qu’on agisse en conséquence. Leurs besoins sont différents de ceux des Premières nations du sud dont l’accès aux ressources est plus facile. Cela est particulièrement vrai en ce qui concerne le coût des ressources, des communications, des déplacements et de la situation spéciale qui fait que les Inuit peuvent ne pas avoir la possibilité de faire des représentations (ils sont souvent sous-représentés et moins consultés).

• La question des effets intergénérationnels et des conséquences profondes de l’enlèvement des enfants et de la violence qu’ils ont ensuite subie exigent une validation et la présentation d’options en matière de réparations légales et politiques.

• Il est extrêmement important de s’occuper de ceux qui se sont suicidés en raison de la violence qu’ils ont subie durant leur enfance dans les pensionnats pour enfants autochtones, et ce, avant d’avoir pu faire des divulgations publiques, mais qui ont parlé de leur expérience à leur conjoints et à leurs proches amis.

• L’étendue de la violence non institutionnelle perpétrée par des étrangers contre des enfants dans des collectivités nordiques isolées mérite aussi qu’on s’y penche.

• Reconnaître l’incapacité inhérente à cette étude d’accomplir toute la tâche incroyable qui consiste à consulter adéquatement toutes les populations autochtones affectées sur chaque aspect de cette question trop délicate.

• Les Inuit ne peuvent être réduits au silence. Tous ceux qui ont des oreilles et un cœur " civilisés " les entendront, accepteront leur témoignage, les reconnaîtront, les respecteront17.

XV Four Worlds International Institute, Résumé — Autosuffisance et réforme de la sécurité sociale. Ces recommandations importantes suivent dans leur forme originale.

NOTE DU TRADUCTEUR :

Dans cette mention qui revient plus loin dans le texte, nous n’avons pas pu trouver l’équivalent français de " RC " :

Cardston

St. Mary’s

Anglican / RC

Avant 1959

  

Dans cette mention qui revient plus loin dans le texte, nous n’avons pas pu trouver l’équivalent français de " CofE " :

(D’Onion Lake)

St. Alban’s

Anglican (CofE)

1944

1951

155 en 1944

 

Four Worlds International Institute

Résumé — L’autosuffisance et la réforme de la sécurité sociale

Étant donné les conditions qui prévalent chez la plupart des Premières nations au Canada, il est clair qu’un simple rafistolage ou une simple mise au point du système de sécurité sociale actuel du pays n’a pas fonctionné et ne fonctionnera pas. La réforme de la sécurité sociale devra commencer par un nouvel exercice de conceptualisation de ce que la sécurité sociale signifie réellement pour les Autochtones. Il n’est plus possible de percevoir le rôle d’un système de sécurité sociale comme un ensemble de programmes et de services qui servent de bouche-trous et s’adressent à un petit groupe de personnes désavantagées. Il faut plutôt le voir comme une approche complète au bien-être et à la prospérité pour tous.

Lorsque nous envisageons la chose de cette façon, la prestation des programmes aux collectivités et pour les collectivités (quelque généreux qu’ils soient financièrement ou quelle qu’en soit la conception) ne peut jamais assurer la " sécurité sociale " des Autochtones. Tant que les collectivités autochtones ne recouvreront pas une partie raisonnable de ce qu’elles ont déjà possédé, la véritable " sécurité sociale " continuera d’être un objectif trompe-l’œil.

Traditionnellement, la richesse existait sous deux formes étroitement liées :

1) une base économique durable (qui procurait la nourriture, les vêtements, l’abri, les remèdes et qui comblait d’autres besoins de nature physique et matérielle);

2) des relations humaines harmonieuses (qui offraient des possibilités d’épanouissement personnel et une vie familiale et communautaire durable; qui préservaient le bien-être social et économique des gens; et qui procuraient une protection fiable à ceux qui connaissaient des temps difficiles pour quelque raison que ce soit).

Comme l’on comprend généralement l’expression dans le contexte du projet des Initiatives stratégiques autochtones, " l’autosuffisance " signifie que les gens sont en mesure de répondre à leurs besoins de base en matière de bien-être sans avoir à recourir à la richesse contrôlée par d’autres. L’autosuffisance se base donc sur l’idée que les gens ont le contrôle des ressources nécessaires et qu’ils possèdent les capacités requises pour produire leur propre richesse afin de répondre à leurs propres besoins et de participer de manière positive aux activités économiques régionales, nationales et mondiales. Autrement dit, l’autosuffisance, c’est la prospérité et le bien-être pour tous, un objectif qui est synonyme de sécurité sociale.

Pour passer de la situation dans laquelle les collectivités se trouvent actuellement à une situation où la prospérité et le bien-être sont " assurés ", il faudra transformer fondamentalement les conditions politiques, économiques, sociales et culturelles ainsi que les relations internes aux collectivités et celles qui existent entre les collectivités autochtones et le reste du Canada. Ce dont nous avons besoin, c’est d’un cadre complet qui permette de comprendre ce qui mérite transformation (quelles catégories de vie et de relations de base) et comment favoriser la démarche qui réalisera le changement qui doit produire la prospérité et le bien-être (c.-à-d., les modèles et les principes de base de guérison et de développement des collectivités). Tout changement n’est pas nécessairement bon. Il est primordial d’avoir une vision claire de ce que nous voulons changer avant d’entreprendre de le faire.

L’un des modèles les plus étoffés pour tracer la voie qui permet d’assurer le bien-être et la prospérité est le cercle d’influences, qui nous enseigne ceci :

– Il faut favoriser, maintenir et protéger la santé mentale, émotionnelle, physique et spirituelle des gens — de chaque personne.

– Un enjeu critique du développement consiste à aider à libérer les familles de toute toxicomanie et de toute violence, à ce qu’elles soient remplies de vie spirituelle, d’amour, d’affection et de responsabilité mutuelle et à ce qu’elle possède les ressources pour fonctionner en tant qu’unité économique vigoureuse.

– Les relations politiques et administratives, économiques et environnementales, spirituelles, culturelles et sociales qui tissent la vie communautaire doivent faire l’objet d’une transformation telle qu’elles puissent conduire au bien-être et à la prospérité.

– Il faut tenir compte des facteurs politiques, économiques, environnementaux, sociaux et culturels du contexte régional, national et international qui prévaut pour les collectivités des Premières nations pour entreprendre des démarches en vue d’un développement viable.

La réforme de la sécurité sociale doit tenir compte de toutes ces dimensions dans le cadre d’une approche complète du développement humain et communautaire. Qui plus est, comme toutes ces dimensions sont en étroite relation entre elles, la réforme de la sécurité sociale doit s’effectuer dans un cadre intégré et holistique et reléguer aux oubliettes la logique éclatée de la bureaucratie canadienne qui cherche à séparer le développement économique, la santé, l’éducation, les processus politiques et la spiritualité comme s’il n’y avait aucune relation entre tous ces éléments. En réalité, la réussite dans l’un ou l’autre d’entre eux dépend de la réussite dans tous les autres. Il y a donc un besoin urgent de se donner un nouveau paradigme, une nouvelle façon de conceptualiser le " développement " qui soit distinctement autochtone. Il faut donc aussi que les collectivités s’y engagent comme si elles avaient déjà les compétences voulues pour refaire le monde dans lequel elles vivent. Car, si nous ne procédons pas de cette façon, la souffrance et la dépendance inutiles ne feront que s’approfondir.

Il est également crucial de se rappeler que la vision du développement qui conduit au bien-être et à la prospérité des collectivités autochtones ne pourra jamais être uniforme. Cela signifie qu’il ne peut y avoir une recette unique qui donnera les mêmes résultats dans toutes les collectivités. Ce dont nous avons besoin, c’est de principes directeurs qui peuvent s’appliquer et s’adapter à une multitude de situations. Voici quatre principes qui peuvent servir d’exemples.

1. Le développement surgit de l’intérieur. Le bien-être et la prospérité ne sont pas des biens que l’on peut livrer aux collectivités autochtones. Le développement doit prendre racine à l’intérieur des gens, au siège spirituel même de leur existence, à l’intérieur des familles et à l’intérieur des démarches qui découlent des obligations civiques. Ce principe implique que pour réaliser la sécurité sociale, il faut qu’il y ait un effort de grande envergure pour faire participer chacun des Autochtones à une démarche collective de guérison, d’apprentissage, de consultation et d’action. Le principal défi que doivent relever les chefs de file autochtones, où qu’ils soient, consiste à faciliter cette démarche.

2. Pas de vision, pas de développement. Une vision de ce que nous pouvons devenir et de ce qu’un monde viable serait agit comme un aimant très puissant qui attire notre potentiel vers sa réalisation. Là où il n’y a pas de vision, il n’y a pas de développement. De ce principe découle que le travail d’imagination de ce à quoi pourraient ressembler la prospérité et le bien-être ainsi que les moyens d’y parvenir est d’une importance primordiale.

3. Le développement personnel et le développement collectif vont de pair. La réforme de la sécurité sociale doit se concentrer tout autant sur la croissance personnelle, sur la guérison et sur l’apprentissage que sur la transformation des structures des collectivités, de leurs mécanismes de pouvoir, de leurs institutions, de leurs organisations, de leurs politiques et de leurs comportements. Ces deux dimensions sont en relation si étroite qu’elles sont indissociables.

4. L’apprentissage est la clé qui permet d’ouvrir la porte qui donne sur le changement. Les personnes, les familles, les organisations de même que les collectivités et les nations entières peuvent apprendre. Nous avons appris à vivre comme nous le faisons actuellement, et nous pouvons apprendre à agir, à penser et à vivre différemment. Ce principe exige que nous nous concentrions de toute urgence sur l’édification de la capacité à tous les paliers en tant que champ d’action de base de la réforme de la sécurité sociale des Autochtones.

RECOMMANDATIONS

Les recommandations qui suivent sont conçues pour guider les démarches des collectivités des Premières nations relativement à la réforme de la sécurité sociale. Elles reposent sur la nécessité de parvenir à l’autosuffisance et de travailler à réaliser la prospérité et le bien-être par des moyens qui sont cohérents avec les principes énoncés ci-dessus et qui tiennent compte de toutes les dimensions du " modèle du cercle d’influences " décrit également ci-dessus. Il est important de se rappeler, cependant, que la prospérité et le bien-être des collectivités autochtones ne peuvent se réduire à quelques recommandations et modèles. Nous mettons donc les lecteurs en garde pour qu’ils aient à l’esprit qu’un aperçu aussi général que celui que procurent ces recommandations ne suffit pas à entreprendre le voyage qui doit mener à la réforme de la sécurité sociale des Autochtones. Ce voyage exigera que l’on réfléchisse attentivement à la vision et aux détails. Quant au voyage lui-même, il sera long et durera vraisemblablement plusieurs années.

Les recommandations ont été divisées en six catégories que l’on peut considérer comme les principaux champs d’activité. Les voici :

I. Développer une véritable économie

1. La prospérité des Autochtones ne se réalisera jamais à même les paiements de transfert du gouvernement. L’un des points fondamentaux de la réforme est de se concentrer sur le développement d’une véritable économie qui est en mesure de produire de la richesse, qui est durable à la fois dans ses méthodes et dans ses résultats et qui assure une distribution équitable à tous au sein des collectivités autochtones.

2. Pour y parvenir, nous recommandons de se concentrer sur les stratégies qui suivent :

a) Accroître la base territoriale et de ressources de chaque nation.

b) Favoriser l’accès équitable des microentreprises et des projets plus importants au capital et au crédit.

c) Un investissement considérable dans le développement humain et dans la formation.

d) Le développement institutionnel et l’édification de la capacité en matière de gestion des démarches économiques.

e) Mettre l’accent sur le développement d’une capacité industrielle secondaire (par exemple, passer de la récolte des arbres à la fabrication de meubles).

f) Mettre l’accent sur une circulation monétaire multipliée dans les collectivités.

g) Adopter une stratégie de base qui vise à passer des grandes aux petites et moyennes entreprises en se concentrant sur les principes du développement économique communautaire.

h) Fonder des sociétés ou des coopératives de développement économique communautaire administrées de façon démocratique.

i) Élaborer des stratégies régionales pour intégrer les efforts économiques locaux à des réseaux et à des marchés plus vastes.

3. Au-delà du développement des économies locales et régionales, nous recommandons de mettre l’accent particulièrement sur le renforcement de réseaux économiques internationaux d’Autochtones pour faciliter le commerce, la coopération économique et la collaboration dans le cadre des projets offrant des avantages mutuels.

II. Contrôle et compétence

1. Un moratoire de cinq ans dans le cas des ententes de mode optionnel de financement (MOF) et de transfert fédéral parce que ces dispositions limitent sérieusement la souveraineté des nations autochtones en ce qui concerne l’exercice du contrôle de la réforme des programmes de développement social.

2. La formation d’une Commission de développement social des Autochtones en vue de contrôler et de gérer tout le développement social et toute la réforme de la sécurité sociale des Autochtones en ce qui concerne le financement. L’intention de cette recommandation est de remplacer le contrôle qu’exerce le ministère des Affaires indiennes sur le financement par une commission de surveillance contrôlée par les Autochtones qui dispose du pouvoir autorisé d’administrer les fonds de la manière qui permet la souplesse et la créativité nécessaires pour réussir la réforme de la sécurité sociale.

III. Principales caractéristiques des programmes dans le cadre de la réforme

1. Passer de la notion du droit des personnes à des prestations à celle du bien-être des collectivités, selon laquelle l’assistance sociale n’est qu’une partie de l’effort de guérison et de développement des collectivités. Cela impliquerait de changer l’orientation des programmes qui viseraient dès lors le renforcement de la capacité des collectivités et la transformation des conditions des collectivités.

2. Mettre l’accent sur la responsabilité des collectivités en matière de bien-être social de leurs membres (et s’éloigner ainsi de la notion d’un gouvernement pourvoyeur et gardien). Il serait dès lors nécessaire de développer la volonté, la capacité et les mécanismes au sein des collectivités en vue de susciter la participation des citoyens, l’établissement de partenariats avec le gouvernement, la prise en charge des programmes et l’imputabilité.

3. Redéfinir le " travail " selon la notion qu’en ont les Autochtones, qui englobe tout service utile rendu à la collectivité. L’utilisation de l’assistance sociale et d’autres montants provenant des transferts en vue de construire ce type " d’économie sociale " accroît le capital social de la collectivité (c.-à-d., la confiance, les paliers de contrôle, les réseaux, la capacité de leadership, l’assurance, l’éthique du travail, les mécanismes de soutien mutuel, etc.).

4. Concevoir les programmes en fonction des causes qui sont à la racine de la pauvreté et de la dépendance plutôt qu’en fonction des symptômes.

5. Il faut un important investissement dans " l’édification de la capacité ", ce qui comprend une guérison, une instruction et une formation pertinentes pour les personnes ainsi qu’un apprentissage organisationnel et un développement institutionnel.

IV. Favoriser la prise de contrôle par les citoyens et leur participation

1. L’établissement de sociétés locales de développement humain et communautaire, qui fonctionnent de façon autonome par rapport au gouvernement, à titre de mécanisme de guérison et de changement au sein des collectivités. Ces sociétés seraient des promoteurs non partisans de la démarche de guérison et de développement des collectivités et disposeraient du pouvoir autorisé de recevoir des fonds et de mettre sur pied des programmes pour accomplir leur mission. Ces sociétés offriraient les moyens qui permettraient aux personnes d’apprendre, de guérir et de pratiquer les principes et les processus démocratiques en fonction des objectifs de développement.

2. Mettre l’accent particulièrement sur le développement de la capacité des collectivités en matière de démarches de consultation, d’engagements collectifs à prendre et à respecter, de résolution des conflits; mettre aussi l’accent sur le développement d’une vision, d’une planification et d’une action en matière de développement communautaire.

3. Le développement du leadership afin de former des chefs de file en matière de politiques et de programmes autochtones relativement à des approches participatives au développement.

4. L’élaboration et la promotion d’une charte autochtone des droits et des responsabilités de la personne qui incorpore le droit au bien-être humain de base (et à la guérison pour y parvenir) ainsi que les responsabilités des personnes et des collectivités dans le développement et le maintien du bien-être. La charte servirait de norme à partir de laquelle les collectivités pourraient mesurer leurs progrès ainsi que d’instrument de sensibilisation.

V. Guérison

1. Établir et mettre en œuvre des centres de guérison qui élargissent le rôle joué actuellement par les centres de traitement afin d’y inclure un volet de participation et de mieux-être communautaire, des programmes mobiles de traitement et des programmes spécialisés destinés aux jeunes, aux femmes, aux anciens, aux victimes de violence et aux chefs de file.

2. L’élaboration et la promotion d’un accord de guérison des Autochtones, un genre de pacte ou de traité qui établit les buts, les stratégies et un code de conduite portant sur les réalités et les besoins en matière de guérison des collectivités. Tous ceux qui signeraient l’accord s’engageraient par le fait même à travailler à le réaliser dans leur propre vie et dans celle de leur collectivité.

3. L’établissement d’un fonds de guérison des collectivités autochtones (auquel contribueraient le gouvernement, le secteur privé ou tout groupe voulant faire acte de réparation et ainsi favoriser la guérison des Autochtones) dont la gestion correspondrait à celle d’une fondation autonome et qui serait sous le contrôle des Autochtones. L’accès au fonds serait limité aux collectivités et aux groupes qui auraient accepté les dispositions de l’accord de guérison des Autochtones. Des programmes spéciaux mis en œuvre dans le cadre de ce fonds porteraient sur les besoins des femmes et des détenus.

VI. Stratégies pour faciliter et soutenir la démarche de réforme

1. Des équipes locales ou régionales d’édification de la capacité et d’aide technique au développement humain et communautaire, qui serviraient de guides ou de mentors auprès des programmes communautaires et des groupes de bénévoles qui chercheraient à modifier les comportements des collectivités de manière à les tourner vers le mieux-être. Deux écoles régionales spécialisées en leadership autochtone pour augmenter la capacité des chefs de file des collectivités (chefs de file politiques, des programmes ou bénévoles) en matière de guérison et de développement communautaire.

2. Un " collège virtuel " de développement humain et communautaire (un programme d’apprentissage postsecondaire sans murs qui concevrait des programmes sur mesure en fonction des besoins des collectivités en matière d’édification de la capacité.

Annexe 2

Remarques sur la liste des pensionnats pour enfants autochtones qui suit

Il n’était pas dans notre mandat ni dans notre capacité de documenter avec exactitude les pensionnats pour enfants autochtones, leurs noms, leurs périodes d’activité, leurs emplacements, leurs taux de fréquentation et les nations d’où provenaient les étudiants. Il ne nous était donc pas possible de répondre aux demandes répétées qui nous ont été adressées pour le faire.

Nous avons consigné ici les renseignements tels que nous avons pu les recueillir indirectement. Selon la source, cependant, une bonne part de ces renseignements semblent confus et très contradictoires. Notre tableau est LOIN d’être complet. Cependant, en amalgamant plusieurs sources, il constitue un dossier plus complet que tout autre dont nous ayons connaissance.

Dans plusieurs cas, nous sommes simplement tombés par hasard sur l’emplacement ou sur le nom d’un pensionnat, ce qui nous a amenés à déduire qu’un pensionnat pour enfants autochtones était en activité à tel moment. Nous avons conclu que ce pensionnat a ouvert ses portes avant et les a fermées après cette date. Dans plusieurs cas, nous n’avons pas réussi à associer le nom d’un pensionnat particulier à une date particulière. Nous avons inscrit les mentions des nations et des réserves sur la liste seulement lorsque nous trouvions ces renseignements dans un texte d’origine.

Nous n’avons pas ajouté de notes de bas de page ni décrit notre procédure de référence parce que ce serait un projet trop long et complexe. Après tout, il ne s’agit que d’un à-côté à cette recherche particulière. Nous soumettons plutôt cet aperçu avec l’espoir qu’il aura une certaine utilité pour ceux qui pousseront plus loin la recherche historique en cette matière.

Pensionnats pour enfants autochtones identifiés, par province

LIEU

NOM

CULTE

OUVERTURE

FERMETURE

NOMBRE D’ÉLÈVES

Colombie-
Britannique

     
      

Ahousat

Ahousat IRS

Presbytérien

1904

1939

 
      

Alert Bay

St. Michael’s

Anglican

1929

1975

 
 

Alert Bay Girls Home

Anglican

1888

1905

 
      

Cache Creek

  

Avant 1870

  
      

Chilliwack /

Sardis

Coqualeetza Institute

Méthodiste

1890

1941

 
      

Cranbrook

St. Eugene’s

Catholique

1890

1970

 
      

Fraser Lake

Lejac

Catholique

1910

1976

 
      

Kamloops

Kamloops IRS

Catholique

1893

1978

 

NATIONS / RÉSERVES : Secwepemc, Neskonlith, bandes chilcotin, Nicola Valley, Lillooett, Bonaparte, Skeetchestn, Kamloops, Adams lake, Chase, Chu Chua

 

Kitamaat

Elizabeth Long Memorial

Méthodiste

1922

  
      

Kuper Isl. (Chemainus)

Kuper Island

Catholique

1890

1970

 
      

Lower Post

Lower Post

Catholique

1951

1975

 
      

Lytton

St. George’s

Anglican

1901

1979

 
      

Metakatla

Industrial School

Anglican / Méthodiste

~1857

1908

 

Remarque : est devenu école industrielle en 1885.

 

Mission

St. Mary’s

Catholique

1868

1984

42 en 1890

      

Nass River

Greenville Mission (garçons)

Méthodiste

~1890

  
      

North Vancouver

St. Francis / Squamish

Catholique

1898

1959

 

Port Alberni

Alberni IRS

Presbytérien / Unie

1920

1973

~300

Pensionnats pour enfants autochtones identifiés, par province

LIEU

NOM

CULTE

OUVERTURE

FERMETURE

NOMBRE

D’ÉLÈVES

Port Simpson

Home for Indian Girls

Méthodiste

Avant 1879

  
 

Boys Home

Méthodiste

1890

Années 1920

 
      

Sechelt

Sechelt

Catholique

1922

1975

 
      

Tofino

Christie Indust. / Kakawis

Catholique

1900

1973

 

Tofino

New Christie

 

1974

1983

 
      

William’s Lake

St. Joseph’s Industrial

Catholique

Avant 1876

1981

 
      

NATIONS / RÉSERVES : Secwepemc, collectivités caribous, Nicola Valley.

 

Yale

All Hallows

Anglican

1889

1918

 
      

ALBERTA

     
      

Assumption (?)

     
      

Blood Reserve

 

Catholique

Avant 1900 ?

  

Blood reserve

St. Paul’s School

Anglican

Avant 1916

  
      

Brocket

Peigan School

Catholique

Avant 1929

  
      

Région de Calgary

Sarcee School

Catholique

~1890

~1920

 

Remarques : fermeture en raison de la tuberculose; ouvert de nouveau en tant que sanatorium en 1930.

 

Cardston

St. Mary’s

Anglican / RC

Avant 1959

  
      

Cluny

 

Catholique

   
      

Crowfoot

 

Catholique

Avant 1931

  
      

Desmarais

     
      

Dunbow (n. High River)

St. Joseph’s

Catholique

1889

1966

~ 6 en 1880

Est devenu High River Industrial School

NATIONS / RÉSERVES : Blackfoot, Blood, Peigan, Cri

Pensionnats pour enfants autochtones identifiés, par province

LIEU

NOM

CULTE

OUVERTURE

FERMETURE

NOMBRE

D’ÉLÈVES

Edmonton

Edmonton Industrial School

Méthodiste

Avant 1931

Après 1960

 
      

Hobbema

Ermineskin IRS

Catholique

Avant 1930

  
      

Fort Chipewyan

 

Catholique

   
      

Fort Vermillon

 

Catholique

Avant 1931

  
      
 

Grouard

Catholique

   
      
 

Holy Angels

Catholique

Avant 1931

  
      
 

Joussard

Catholique

Avant 1941

  
      

Lac La Biche

 

Catholique

Avant 1884

  
      

Lac Athabaska

 

Catholique

Avant 1884

  
      

Petit lac des Esclaves

 

Anglican

Avant 1931

  

Petit lac des Esclaves

 

Catholique

   
      
 

Notre-Dame

    
      

Réserve Old Suns

Old Suns

Anglican

Années 1890

  
      

Red Deer

Red Deer Industrial School

Méthodiste

1893

  
      
 

Sacred Heart

Catholique

Avant 1931

  
      

St. Albert

 

Catholique

~1884

  
      
 

St. Bernard

Catholique

Avant 1931

  
      
 

St. Bruno

Catholique

Avant 1931

  
      
 

St. Cyprian

Anglican

Avant 1931

  
      

St. Paul

Blue Quills

Catholique

1931

1970

 
      

Stoney Reserve

Morley

Méthodiste

Avant 1931

  

Sturgeon Lake

 

Catholique

Avant 1931

  

Pensionnats pour enfants autochtones identifiés, par province

LIEU

NOM

CULTE

OUVERTURE

FERMETURE

NOMBRE

D’ÉLÈVES

Wabasca

 

Catholique

Avant 1931

  
      

Whitefish Lake

 

Anglican

Avant 1927

  
      

Saskatchewan

     
      

Battleford

Industrial School

Anglican

1883

1914

30 en 1883

80 en 1891

NATIONS / RÉSERVES : P.A. District, réserve Poundwater, Ahtankakoop, Mistawasis, John Smith, Eagle Hills, Battleford, James Smith, Starblanket

Remarque : garçons seulement jusqu’en 1885.

 

Beauval

Beauval

Catholique

Avant 1931

  

Remarque : transféré au Meadow Lake Tribal Council en 1983.

Réserve de Cote

Crowstand

Presbytérien

Années 1880

  
      
 

Cowesses

Catholique

Avant 1931

  
      

Delmas

Thunderchild

Catholique

Avant 1931

1948

 

Remarque : est passé au feu.

 

Duck Lake

St. Michael’s

Catholique

1894

  

NATIONS / RÉSERVES : Cri, Ojibway, Dakota, Chipewyan.

 

Réserve de Gordon

Gordon’s IRS

Anglican

Avant 1931

Après 1984

 

Remarques : fermé temporairement en 1949 en raison d’une pénurie d’eau; les élèves ont été transférés à la PAIRS.

 

Île-à-la-Crosse

 

Catholique

Avant 1884

  
      

Kamsack

St. Phillip’s

Catholique

1903

  
      

Lac la Ronge

Lac la Ronge School

Catholique

1907

1947

Moins de 100

Remarque : est passé au feu en 1947; a déménagé au pensionnat All Saint’s dans les casernes militaires de Prince Albert; capacité légale – 100.

 

Lestock

Lestock School

Catholique

~1883

Après 1965

 
      

Marieval

 

Catholique

   
      

Pensionnats pour enfants autochtones identifiés, par province

Réserve de Muscowequan /

Réserve de Poorman

 

Catholique

Avant 1931

  
      

Onion Lake

IRS

Catholique

1907

1943

116 en 1943

Remarques : est passé au feu en 1943; les élèves ont été transférés au pensionnat St. Alban’s à Prince Albert.

      

Prince Albert

Mission School

Presbytérien

1867

1881

5 à 40

Prince Albert

Emmanuel College

Anglican

1879

1908

~11 à 30

Remarque : devient pensionnat en 1890.

(De Lac la Ronge)

All Saints

Catholique

1948

1951

120 à 314

(D’Onion Lake)

St. Alban’s

Anglican (CofE)

1944

1951

155 en 1944

NATIONS / RÉSERVES : James Smith, Battleford, Onion Lake, Carlton, Saddle Lake, Duck lake.

Prince albert

Indian Residential School

Anglican

1951

1969

300 à 500

Remarques : amalgamé aux pensionnats St. Alban’s et All Saints; la capacité légale était de 300.

 

P.A. Student Residence

Gouverne-ment

1970

1974

 

Remarque : transféré à la bande Wahpeton en 1974.

NATIONS / RÉSERVES : White Bear, The Pas, Mistawasis, Mosquito-Grizzly Bear Head,

Red Pheasant, Gordon’s, Shoal Lake, Cote, Aklavik, Peepeekisis, James Smith, Moosomin,

Little Pie, Sweet Grass, Key, Lac la Ronge, Sturgeon Lake, Churchill, John Smith, Peter

Ballantyne, Ochapowace, Red Earth, White Caps, Sandy Lake.

      

Qu’Appelle

Industrial School / Lebret

Catholique

1884

Jusqu’à présent

 

Remarque : maintenant sous le contrôle des Premières nations.

 

Regina

Industrial School

Presbytérien

1895

Après 1930

 
      

Regina

File Hills Academy

Presbytérien

~1889

Après 1949

 
      

Round Lake

Round Lake School

Presbytérien

1918

Après 1929

 

Round Lake

 

Catholique

1840

  

MANITOBA

      

Birtle

 

Presbytérien

Avant 1890

  

Pensionnats pour enfants autochtones identifiés, par province

LIEU

NOM

CULTE

OUVERTURE

FERMETURE

NOMBRE

D’ÉLÈVES

Birtle

 

Méthodiste / Unie

   
      

Birtle

 

Catholique

   
      

Brandon

Brandon Industrial

Méthodiste

Avant 1903

 

~170

      

Camperville

 

Catholique

   

Remarque : à la fermeture, les élèves ont été transférés au pensionnat Assiniboia (Winnipeg).

      

Churchill

Vocational Centre

    

NATIONS / RÉSERVES : North & South Baffin, Keewatin.

 

Cross lake

St. Joseph’s

Catholique

 

1930

 

Remarque : est passé au feu.

 

Dog Creek

     
      

Elkhorn

Elkhorn Institute

Anglican

Avant 1888

  
      

Fort Alex / (Sandy Bay ?)

 

Catholique

Avant 1931

  
      

Fort Pelly

     
      
 

Guy Hill

    
      

MacKay

 

Anglican

Avant 1914

  
      

Middlechurch

 

Anglican

Avant 1893

  
      

Montreal Lake

     
      

Norway House

Norway House School

Méthodiste / Unie

Avant 1931

Après 1950

 
      

Norway House

 

Catholique

   
      
 

Notre-Dame

    
      

Pine Creek

 

Catholique

Avant 1930

  
      

Portage La Prairie

 

Presbytérien

1886

1958

21 en 1895

Pensionnats pour enfants autochtones identifiés, par province

LIEU

NOM

CULTE

OUVERTURE

FERMETURE

NOMBRE

D’ÉLÈVES

      
 

Red River Mission

Anglican

1820

1833

10 en 1820

NATIONS / RÉSERVES : Cri-des-plaines, Moskégon, Assiniboine, Chipewyan

     
      

Selkirk

Rupert’s Land Industrial

Anglican

Avant 1891

  
      

Saint-Boniface

St. Boniface Industrial

Catholique

Avant 1881

  
      

The Pas

 

Catholique

   
      

The Pas

The Pas Anglican School

Anglican

Avant 1922

  
      

Waterhen

     
      

Winnipeg

Assiniboia Hostel

Catholique

Avant 1931

  

NATIONS / RÉSERVES : Pine Falls, Fort Alexander, The Pas, Camperville.

 

ONTARIO

 

Alderville

Boarding School

Méthodiste

1838

  
      

Alnwick

Industrial School

 

1842

  
      

Brantford

Mohawk Institute

Anglican

1834

1970

 

NATIONS / RÉSERVES : New Credit, Nawash, Oneida, Mistassini, Scugog, Chippewa,

Tuscarora, Moraviatown, Parry Island, Mud Lake, Walpole Island, Upper Mohawk,

Lower Mohawk, Muncey, Waswanipi, Fort William, Long Lake, Saint Regis, Kettle Point, Christian Island, North Seneca, Deer Lake, Baie de Quinte, Upper Cayuga, Lower Cayuga, lac Trout, Gibson.

 

Chapleau

St. John’s IRS

Anglican

Avant 1926

  

NATIONS / RÉSERVES : Cri, Ojibway, baie James.

 

Fort Albany

St. Ann’s

Catholique

Avant 1908

  
      

Fort Frances

 

Catholique

Avant 1925

  

NATIONS / RÉSERVES : Couchiching.

Pensionnats pour enfants autochtones identifiés, par province

LIEU

NOM

CULTE

OUVERTURE

FERMETURE

NOMBRE

D’ÉLÈVES

Grape Island (Quinte)

Boarding School for Girls

Méthodiste

1828

 

4 en 1828

      

Kenora

St. Mary’s School

Catholique

Avant 1931

  

(Anishnabek)

McIntosh

Catholique

Avant 1931

  
      

Mimico

Victoria School for Boys

 

1887

  
      

Moose factory

 

Anglican

Avant 1930

 

35 en 1944

      

Moosoonee

     
      

Muncey

Mount Elgin

Unie

1850

1946

 

NATIONS / RÉSERVES : Walpole Island, Oneida, Chippewa, Gibson, Saugeen, Caughnawaga,

Kettle Point, Stony Point, Christian Island, Newash, Caldwell, Six-Nations, Sarnia,

Moraviatown, Cape Croker, Rama, Muncey, New credit.

      

Rice lake

  

~1830

  
      

Sault Ste. Marie

Shingwauk Institute

Anglican

1873

1971

 
      

Shoal Lake

Shoal Lake / Cecelia Jeffrey

Presbytérien

Avant 1923

  

Remarque : nom changé en Cecelia Jeffrey à Kenora.

      

Sioux Lookout

Pelican Lake

Anglican

Avant 1931

Après 1960

 

NATIONS / RÉSERVES : Garden River, Walpole Island.

      

Spanish

St. Peter Claver’s Ind.

 

1929

1958

 

Spanish

St. Joseph’s Girl’s School

Catholique

 

1958

 

NATIONS / RÉSERVES : Akwesasne, Kahnawake, Kanesatake, Kettle Point.

      
 

St. Margaret’s

    
      

Thunder Bay (Fort William)

 

Catholique

Avant 1931

  
      

Wikwemikong

Industrial

Catholique

1850

1911

 

Remarque : est devenu un pensionnat industriel en 1887.

NATIONS / RÉSERVES : Ojibway, Akwesasne, Kahnawake.

Pensionnats pour enfants autochtones identifiés, par province

LIEU

NOM

CULTE

OUVERTURE

FERMETURE

NOMBRE

D’ÉLÈVES

QUÉBEC

     
      

Amos

 

Catholique

   
      

Chisasipi (Fort George)

Fort George RC School

Catholique

Avant 1939

Après 1956

 

Chisasipi

 

Anglican

   
      

Poste-de-la-Baleine

Federal Day (pensionnat)

Anglican

   
      

La Tuque

Pensionnat

Catholique

1956

  
      

Montréal

Kateri Tecakwitha

    
 

Kahnawake Residence (?)

    
      

Pointe-Bleue

Pensionnat indien de Pointe-Bleue

Catholique

XVIIe siècle ?

  
      

Sept-Îles

 

Catholique

 

Après 1959

 
      

ATLANTI-QUE

     
      

Shubenacadie, N.-É.

Shubenacadie IRS

Catholique

1929

1967

~ 200 dans les années 1930–1940

NATIONS / RÉSERVES : Mi’kmaw, Malécite, Pescomody, Cambridge, Pictou Landing.

Antigonish, Indian Brook, Î.P.-É.

     
      

YUKON, T.N.-0., NUNAVUT

     
      

Carcross, Yn

Chooutla School

Anglican

1900

Après 1960

Max. 40

      

Dawson City,Yn

St. Paul’s Hostel

Anglican

Années 1920

  

Forty Mile

Boarding School

Anglican

1921

  

Remarque : a déménagé à Carcross.

Pensionnats pour enfants autochtones identifiés, par province

LIEU

NOM

CULTE

OUVERTURE

FERMETURE

NOMBRE

D’ÉLÈVES

Rampart Landing, Yn

Rampart House

Anglican

Avant 1925

  
      

Whitehorse, Yn

Baptist Mission Hostel

Baptiste

~ 1945

  
      

Whitehorse

Courdet Hall

Catholique

   
      

Aklavik,

T.N.-O.

 

Anglican

Avant 1930

  

Aklavik,

T.N.-O.

 

Catholique

Avant 1931

  

Remarque : a déménagé à Inuvik.

      

Chesterfield Inlet, Nvut

Joseph Bernier / Turquetil

Catholique

1950

 

463

RÉGIONS : Baffin, Keewatin

     
      

Coppermine, Nvut

     
      

Fort McPherson,

T.N.-O.

 

Anglican

Avant 1920

  
      

Fort Providence,

T.N.-O.

Providence Mission

Catholique

1867

  
      

Fort Resolution,

T.N.-O.

 

Catholique

1867

  
      

Fort Simpson, T.N.-O.

 

Anglican

Avant 1920

  
      

Fort Smith, T.N.-O.

     
      

Hay River,

T.N.-O.

 

Anglican

Avant 1920

  
      

Inuvik,

T.N.-O.

Grollier Hall

 

1959

1996

 

COLLECTIVITÉS : Inuvik, Aklavik, Tsiigehtchic, Colville Lake, Fort Good Hope, Norman Wells,

Fort Norman...

Pensionnats pour enfants autochtones identifiés, par province

LIEU

NOM

CULTE

OUVERTURE

FERMETURE

NOMBRE

D’ÉLÈVES

 

Stringer Hall

    
      

Yellowknife,

T.N.-O.

Akaitcho Hall

    

 

Annexe 3

Témoignages devant la Commission royale d’enquête sur les peuples autochtones

Répartition des thèmes et des besoins

TÉMOIGNAGES DES VICTIMES DEVANT LA CRPA

LIEU

DATE

TÉMOIN

THÈMES / EFFETS PRINCIPAUX

BESOINS DÉFINIS

     

Winnipeg

92-04-21

George Erasmus

Les pensionnats pour enfants autochtones n’auraient jamais dû exister.

 
  

Mary Sillett

 

 

Perte de la langue. Nous sommes des victimes, nous avons appris à accepter les difficultés de la vie et à célébrer.

 
  

Phil Fontaine

Violence. Effets sociaux : violence, violence domestique, prisons, vivre l’oppression, effets intergénérationnels.

Excuses; besoin de parler pour divulguer, un dossier public.

 

92-04-22

Eileen Courchesne

Destruction du rôle des femmes, apprentissage de l’asservissement.

 
  

Iris Lauzon

Perte de la langue.

 

Charlottetown

92-05-05

John Joe Sark

Violence

 

Eskasoni

92-05-06

Blair Paul

Puni pour avoir parlé dans sa langue et pratiqué sa culture et ses croyances.

 
  

Will Basque

Force des victimes.

 
  

Alex Christmas

Violence

Dédommagement.

  

Alex Denny

Perte de la culture et des connaissances acquises depuis des générations.

 
  

Charles J. Bernard Jr

Questions de droits humains, traitement et cruauté.

 
  

Viola Robinson

L’on ne peut attendre les réponses trop longtemps; grande priorité.

 

TÉMOIGNAGES DES VICTIMES DEVANT LA CRPA

  

Albert Marshall

Perte de la culture et des traditions.

 

Inuvik

92-05-05

Bonita Chlow

Perte des générations; pertes d’habiletés chez les jeunes.

 

Fort MacPherson

92-05-07

Eileen Koe

Perte de la langue.

 

The Pas

92-05-20

Kathy Martin

La violence familiale et la violence sexuelle continuent aujourd’hui.

Dédommagement pour les problèmes et l’expérience dévastatrice vécus.

Port Alberni

92-05-20

Nelson Keitlah

Piètre instruction.

  

Charlie Cootes

Les 2/3 de la dernière génération qui a fréquenté les pensionnats n’ont pas survécu : (violence, toxicomanies, suicides, accidents). Les effets durables ne pourront se guérir que lorsqu’il y aura eu réparation du préjudice causé aux familles. Perte de la culture.

Les excuses ne sont pas suffisantes. Dédommagement : 2 millions de dollars par année pour les Nuu-Chah-Nulths. Du financement et des ressources pour l’enseignement, les écoles, la langue; informer la société dans son ensemble.

  

Violet Mundy

 

Besoin de services de santé mentale.

  

Tim Paul

Les problèmes nous affectent toujours.

 
  

Charlie Thompson

Violence physique, sexuelle et émotionnelle; absence des parents.

 
  

Jackie Adams

Nous sommes des victimes.

 
  

Bunt Cranmer

 

Dédommagement.

Big Cove, N.-B.

92-05-20

Clifton Simon

Perte de la langue.

 

Esquimault

92-05-21

Andrew Thomas

Un grand préjudice.

Besoin d’en parler et de passer par une longue démarche de guérison.

TÉMOIGNAGES DES VICTIMES DEVANT LA CRPA

Victoria

92-05-22

John Elliot

Perte de la langue, honte et perte de la fierté.

 
  

Barbara Becker

Les effets générationnels se poursuivent dans les familles élargies. Le silence des anciens; certains ne peuvent pas en parler.

 
  

Norman Evans

 

Le public canadien doit connaître absolument les effets.

  

Wally Samuel

 

Plus d’argent pour revitaliser et conserver la culture.

  

Mavis Gillie

La force dans l’état de survivance.

Le besoin de s’en occuper et bientôt. Le besoin de se prendre en main et de l’exprimer.

Wahpeton, Sask.

92-05-26

Calvin McArthur

Perte de la langue, de la culture et des valeurs.

 
  

George Erasmus

Chaque collectivité a parlé des répercussions.

 

Teslin, Yn

92-05-26

Eric Morris

Liens familiaux brisés, perte de la culture, des traditions, de l’histoire orale, des histoires et des légendes. Les effets intergénérationnels, notamment la violence.

Le manque de ressources pour guérir les effets, notamment au moment où les villages abandonnent l’alcool et la drogue.

  

Viola Robinson

Il n’y a pas une collectivité où l’on n’a pas signalé que les pensionnats pour enfants autochtones ont contribué à la blessure, à la douleur et au dysfonctionnement des familles d’aujourd’hui.

Le besoin de faire quelque chose immédiatement. Le besoin d’une enquête publique.

TÉMOIGNAGES DES VICTIMES DEVANT LA CRPA

Prince Albert

92-05-27

Jessie Teasley

Les gens sont en prison parce qu’ils ont perdu leur culture et leurs traditions.

  

Ken Noskiye

Les pensionnats ont quelque chose à voir avec les familles dysfonctionnelles où règne la violence. Le manque de liens familiaux.

  

Hugh Bolton

Le produit du système des pensionnats pour enfants autochtones, des centres d’éducation surveillée, du système provincial, et jusqu’au système fédéral.

La Ronge, Sask.

92-05-28

Lillian Sanderson

Les problèmes sociaux comme la violence familiale, la violence perpétrée contre les enfants, les drogues, l’alcool, le suicide, la violence sexuelle sont le résultat des pensionnats et des Églises.

  

Winston McKay

Nous sommes des victimes. Non pas qu’il n’y ait jamais eu de problèmes avant, mais ceux que nous vivons peuvent être associés aux pensionnats pour enfants autochtones et à la colonisation des Autochtones.

TÉMOIGNAGES DES VICTIMES DEVANT LA CRPA

Pangnirtung, Nvut

92-05-28

Saqiasi Sauluapik

J’ai eu à apprendre l’anglais. L’on n’a appris l’inuktitut qu’avec l’enseignement de la religion.

Fort Simpson

92-05-26

Ethel Lamothe

J’ai été emmenée à l’école à quatre ans et demi alors que je ne parlais pas anglais. Je ne pouvais pas parler avec la famille au retour à la maison. Durant des années, on m’a dit que nos façons de faire étaient celles du diable, on m’a fait avoir peur de ma propre spiritualité, qui était l’œuvre du diable et de Satan. J’ai encore de la difficulté à pratiquer les traditions des Dénés.

  

Kerry Hardisty

Les enfants emmenés au loin. Impossible de parler notre langue. Perte de la culture.

Moose Factory

92-06-09

George Erasmus

Traditionnellement, les femmes avaient un rôle important à jouer, car elles donnaient la vie. Les pensionnats ont anéanti ce rôle en enseignant que les hommes sont les maîtres et que les femmes sont inférieures.

TÉMOIGNAGES DES VICTIMES DEVANT LA CRPA

Lac la Biche

92-06-09

Joe Blyan

C’est mieux maintenant. Les familles participent aux programmes scolaires et familiaux.

 

Waswanipi

92-06-09

Peter Gull

En 1960, la plupart de la population d’âge scolaire fréquentait les pensionnats. Il y a eu des changements. En éducation, en économie, en développement, en santé, et en piégeage, les Autochtones ont un mot plus important à dire.

 
  

Lily Sutherland

Pas de modèles parentaux. L’apprentissage de la colère.

Besoin d’habiletés parentales.

  

Alain Vachon

Manque d’éducation pour obtenir des emplois.

 

Hobberna

92-06-10

Carol Wildcat

Victimes de violence physique, sexuelle et mentale.

 
  

Wilson Okeymaw

Violence : les enfants battus chaque jour. L’alcoolisme découle de l’expérience des pensionnats.

 

Moosoonee

92-06-10

Wilbert Wesley

Perte de la langue.

 

Edmonton

92-06-11

Edward Morin

N’a pas vu ses parents durant dix mois. Conduit en camion à St. Albert.

 
  

Maggie Hodgson

L’état de désespoir qui a découlé des pensionnats et les répercussions de rendre la cérémonie illégale.

 

TÉMOIGNAGES DES VICTIMES DEVANT LA CRPA

Sault Ste. Marie

92-06-11

Carole Gauthier

Violence sexuelle et effets intergénérationnels.

Il doit y avoir guérison, y compris pour les agresseurs.

  

Marvin Assinewai

La perte de vos enfants durant dix mois au cours desquels ils sont supposés recevoir l’inestimable présent de l’éducation.

 

Fort Chipewan

92-06-18

Emile Trip-de-Roche

La perte de la langue; la cruauté.

L’on devrait fournir une certaine aide.

Happy Valley

92-06-16

Mme Millicent Loder

L’on m’a prise et emmenée en bateau quand j’étais petite.

 
  

Mme Beatrice Watts

Un effet positif a été de donner une forme écrite à la langue inuktitut et la traduction que les Églises ont faite.

 

Fort McMurray

92-06-16

Nancy Scanie

La perte de la langue et l’imposition de la langue anglaise. La pauvreté pour les gens dans les réserves et une situation pire encore pour ceux à l’extérieur.

Personne n’a jamais formulé des excuses.

TÉMOIGNAGES DES VICTIMES DEVANT LA CRPA

Kispiox, C.-B.

92-06-16

Matt Vickers

Le dysfonctionnement personnel, familial et de la collectivité prend racine dans les pensionnats. Forcés de parler anglais. Les mauvais traitements des élèves, avec violence, le dénigrement de la langue et de la culture. La violence honteuse des enseignants, des prêtres et des politiciens. Les modèles de comportement autodestructeurs sont la conséquence de l’expérience des pensionnats dans les familles, les familles élargies; les effets intergénérationnels. Les problèmes sociaux non résolus et toujours objet de litige.

 
  

Marvin Sampson

La violence sexuelle, le dysfonctionnement familial, l’éclatement de la famille.

Service aérien, car 15 minutes avec un psychologue, ce n’est pas assez.

  

Brian Williams

Les objectifs d’assimilation et de génocide par le moyen de lois, la création de réserves, les pensionnats. Une instruction insuffisante en fonction de l’emploi.

 

TÉMOIGNAGES DES VICTIMES DEVANT LA CRPA

  

Lorraine Dennis

Nous sommes tous des victimes. Des répercussions très étendues, le dysfonctionnement familial, les effets intergénérationnels. Les parents, les grands-parents et les arrière-grands-parents ont tous honte d’être des Indiens.

La guérison est un facteur très important.

  

Alice Kruta

Les pensionnats ont suscité beaucoup de honte; les victimes le comprennent et n’acceptent plus les excuses.

 

Stoney Creek

92-06-18

George Erasmus

Reconnaître l’incroyable préjudice causé à la culture, aux langues et toutes les structures qu’on nous a imposées et qui ont eu des répercussions sur la culture autochtone; la volonté de savoir ce qu’on en fera.

 
  

Bertha Wilson

Reconnaître les terribles répercussions et conséquences des pensionnats; il faut se concentrer sur ce qui peut être fait dans l’avenir.

 

TÉMOIGNAGES DES VICTIMES DEVANT LA CRPA

  

Peter Quaw

L’on a appris aux enfants des façons de faire qui n’étaient pas de nature autochtone; la négation de leur propre langue; on a déclaré la culture illégale; la conspiration pour éliminer notre spiritualité et pour nous transformer en Européens.

  

Leonard Thomas

Le pensionnat a été construit sur la terre qu’ils occupaient, mais on n’a jamais eu accès à cette terre.

  

Bob Gill

La négation perpétuelle du droit de pratiquer et de conserver la culture des Premières nations; la pression constante du gouvernement pour assimiler les Premières nations; les pensionnats en sont l’exemple le plus scandaleux. Les valeurs familiales et culturelles arrachées aux enfants sans aucune précaution.

Toronto

92-06-25

John Kim Bell

La langue mise hors la loi; la mise en valeur de la culture se révèle souvent dans l’art qui a survécu à l’imposition des nouvelles façons de faire.

  

Ron George

Les pensionnats sont un exemple de toutes les façons dont on a traité les Autochtones pour leur enlever le droit d’être ce qu’ils étaient.

TÉMOIGNAGES DES VICTIMES DEVANT LA CRPA

 

92-06-25

Catherine Brooks

L’étendue de l’oppression de notre peuple : la Loi sur les Indiens, les pensionnats, le manque d’empressement mal avisé en matière de bien-être des enfants. Les enfants emmenés parfois à 500 et jusqu’à 1 000 milles de la maison à l’âge de 5 ans; avec l’aide de la police; les parents qui résistaient étaient parfois jetés en prison. Interdiction de parler sa langue ou de parler à ses frères et sœurs. Les agressions, la violence et les idées occidentales sur les rôles des hommes et des femmes; comment l’égalité a été perdue. Le programme Anduhyaun pour les femmes qui ont été victimes de violence sexuelle durant leur enfance.

Saskatoon

92-10-27

Cindy Sparvier

Les Métis ont souffert tout autant que les Indiens. Les parents de plusieurs Métis ont fréquenté les pensionnats.

TÉMOIGNAGES DES VICTIMES DEVANT LA CRPA

Emile Bell

Le bris des traités; l’on n’a pas dispensé l’instruction; une charge contre la langue, l’identité, les valeurs, l’unité familiale; le préjudice intergénérationnel causé. Près d’un million de dollars sont allés aux pensionnats. Toutes sortes d’atrocités; les violations des droits humains; nous souffrons maintenant en raison de cela, mais nous commençons à parler. Tant de problèmes dans de si nombreux secteurs. Une violence terrible. Les problèmes sociaux en résultent. Les Autochtones commencent à se relever.

Les Églises doivent dédommager les personnes pour certaines des choses qu’elles ont faites. Le besoin de ressources, de territoires, d’immeubles où les gens peuvent se rencontrer pour régler les problèmes qui ont résulté de ces situations. Les habiletés parentales; chercher à enseigner aux enfants indiens les valeurs, les langues, de susciter chez eux la fierté. Organiser des cercles d’influences pour que les gens commencent à parler. Le gouvernement devrait injecter beaucoup d’argent puisqu’il est responsable. La GRC doit aussi être tenue responsable parce qu’elle a participé à l’application de ces lois, qu’elle a appréhendé et enlevé des gens.

Joan Lavallée

Est d’accord avec l’énoncé ci-dessus.

 

Vicky Wilson

Le dysfonctionnement familial. Certaines collectivités tiennent des cercles d’influences. Les femmes et les enfants s’envolent vers les villes parce qu’il ne se passe rien chez eux.

 

TÉMOIGNAGES DES VICTIMES DEVANT LA CRPA

 

92-10-28

Clem Chartier

Le manque de mention des préoccupations des Métis en matière de perte des langues, des cultures, de l’identité par le moyen des pensionnats.

 

Thunder Bay

92-10-27

Paul Nadjiwan

 

Le besoin d’informer les gens de ce qui est arrivé lorsqu’ils sont partis pour le pensionnat.

  

Moffat Makuto

L’éclatement des familles; les enfants éloignés des soins parentaux; l’absence d’habiletés élémentaires telles que l’art d’être parent; les jeunes en subissent les effets.

 
  

Bert Sellick

Nombre de jeunes parents issus des pensionnats se préoccupent des rôles parentaux.

 
  

Eli Mandamin

Les préjudices causés à la culture des Premières nations, des épidémies aux pensionnats, ont amené les Autochtones au point où il leur est difficile de survivre. Mais il y a résurgence de la culture; les cérémonies spirituelles reprennent; en conséquence, nous pourrons apporter beaucoup à la société non autochtone.

 

Kenora

92-10-28

Mary Sillett

Quelle action est nécessaire pour rétablir les faits véritables au sujet des pensionnats ?

 

TÉMOIGNAGES DES VICTIMES DEVANT LA CRPA

  

Richard Kelly

L’aliénation des générations qui ont fréquenté les pensionnats.

 

Fort Alexander

92-10-29

Phil Fontaine

 

Le besoin d’un dialogue franc, particulièrement entre ceux qui ont fréquenté les pensionnats et les Églises qui les ont dirigés.

  

Gilbert Abraham

Emmené au pensionnat à 3 ans; violence, désespoir et souffrance.

 
  

Jerry Fontaine

Comment briser le cycle ?

Peut-être un cercle d’influences; a entendu parler de dédommagement.

  

Patrick Bruyere

Le produit d’un pensionnat.

 
  

Elmer Courchene

La douleur suscitée par les expériences qui ont provoqué une colère amère.

 
  

Eva Courchene

Le cycle qui a débuté à la fin des années 1800 se poursuit aujourd’hui; peu d’enfants peuvent serrer leurs parents dans leurs bras et leur dire " Je vous aime ". C’est un problème générationnel. Un préjudice grave : on nous a dit que nous étions des moins que rien, pas égaux aux Blancs, et on a médit de nos grands-parents alors que nous étions des enfants.

 
  

Jerry Fontaine

 

Le besoin d’entreprendre la tâche, de s’en occuper immédiatement.

TÉMOIGNAGES DES VICTIMES DEVANT LA CRPA

  

Mary Sillett

 

Des réserves et des collectivités différentes peuvent avoir besoin de solutions différentes.

North Battleford

92-10-29

George Erasmus

Impossible d’avoir fréquenté le pensionnat et d’être fier de votre langue et de votre culture.

 

Cranbrook

92-11-03

Denise Birdstone

Les parents n’appuient pas les enfants dans leur éducation, car ils n’ont eu aucun contrôle sur la leur, aucun droit sur leurs enfants, et cela continue aujourd’hui.

 
  

Sophie Pierre

Des milliers de personnes ont été victimes d’un viol culturel; une source de souffrance aujourd’hui; une expérience épouvantable; l’absence de traitement et de relation thérapeutique.

 

Fort Alexander

92-10-20

Jill Henderson

Les histoires de ma mère et des grands-parents qui n’avaient pas le droit de parler leur langue; privés de leur langue et de leur dignité, mais la langue ne s’oublie jamais et elle revient tranquillement, ce qui redonne la fierté et la dignité.

 
  

Elmer Courchene

L’éclatement des familles, de la collectivité et de soi-même.

 

TÉMOIGNAGES DES VICTIMES DEVANT LA CRPA

  

Connie Eyolfson

La spiritualité autochtone remplit le vide des gens traumatisés par les pensionnats; un endroit où apprendre la culture et la spiritualité (Strong Earth Woman Lodge).

 
  

Kenneth Emberley

 

La nécessité d’examiner et de compléter les dossiers sur le rapt des enfants, à quelle distance ils ont été emmenés, le coût de ces enlèvements et pour les détruire, le manque d’amour et d’affection; résultat : l’alcoolisme, la violence et le suicide.

Merritt

92-11-05

Mandy Na’Zinek Jimmy

Les conséquences de l’expérience institutionnelle sur la langue et la culture, ces pertes.

 

Toronto

92-11-02

Ken Richard

Traiter les gens à partir de la troisième génération passée dans les pensionnats par l’intermédiaire des services à l’enfance et à la famille; le programme de rétablissement pour les femmes victimes de violence sexuelle fait appel aux guérisseurs et aux enseignants traditionnels (projet Mook’am).

 

TÉMOIGNAGES DES VICTIMES DEVANT LA CRPA

  

Susan Eng

 

Le besoin de discuter des pensionnats et de comprendre pourquoi cela est arrivé.

 

92-11-03

Colleen Wassegijig

Les répercussions intergénérationnelles, l’intériorisation des conséquences, des effets, des émotions et des attitudes chez ceux qui ont fréquenté les pensionnats. Plusieurs le nient.

Il faut que les gens dans les collectivités commencent à s’en occuper.

Timmins

92-11-05

Andrew Wesley

Mise en œuvre de programmes à Fort Albany pour les gens qui ont fréquenté les pensionnats.

 
  

Lindberg Louttit

La violence, la brutalité et le suicide.

 
  

Ed Metatawabin

L’assimilation, les habiletés parentales, les problèmes intergénérationnels.

Les habiletés parentales et les relations thérapeutiques.

  

Peter Sackeney

Forcé de parler français.

 

 

 

Annexe 4

[traduction]

Un document du gouvernement prévient des risques que comporteraient des excuses à l’égard des pensionnats pour enfants autochtones

Wendy Cox, 27 juillet 1998, paru dans l’Ottawa Citizen

OTTAWA (CP) — Selon un document interne, les fonctionnaires du gouvernement ont été incités, il y a deux ans, à offrir un régime de dédommagement aux Autochtones qui ont souffert de l’expérience des pensionnats pour enfants autochtones afin de chercher à contrôler les coûts éventuellement hors de contrôle des poursuites. Le rapport sur lequel apparaît la mention " Secret " et qu’a obtenu The Canadian Press analyse les avantages et les désavantages qu’il y a à forcer les plaignants à se rendre en cour comparativement au fait d’offrir une réparation financière aux victimes. Il conclut qu’à longue échéance, le dédommagement coûtera moins cher.

" Le nombre de plaintes individuelles et toute conséquence négative qui pourrait découler du fait que le gouvernement fédéral se défende contre de telles actions (poursuites devant les tribunaux) seraient vraisemblablement réduits si la politique du gouvernement, y compris une certaine forme de régime de dédommagement, s’adaptaient à la situation ", mentionne la rapport de 20 pages. Le document prévient aussi de ne pas utiliser le mot " excuse ", lui préférant plutôt " une reconnaissance ou expression de regret ". " Il faudrait l’exprimer de manière à ne pas blâmer qui que ce soit. "

Les fonctionnaires du gouvernement ont confirmé l’existence du rapport qui s’intitule simplement Document de travail sur les pensionnats pour enfants autochtones. Ce document a été rédigé à la fin de 1995 ou au début de 1996 à l’attention de Ron Irwin, alors ministre des Affaires indiennes. Il se peut aussi qu’il ait été préparé pour le ministère de la Justice. Le rapport ne s’est jamais rendu à la ministre actuelle des Affaires indiennes, Jane Stewart, et l’avis qu’il contient n’a jamais constitué la base des actions qu’elle a prises par la suite, disent les fonctionnaires. Plus tôt cette année, Stewart a fait une Déclaration de réconciliation selon laquelle le gouvernement exprimait ses " profonds regrets " à l’égard de ceux qui ont " tragiquement " subi des sévices physiques et sexuels dans les pensionnats.

La déclaration annonçait également un fonds de guérison de 350 millions de dollars. " Il était crucial pour nous que les excuses aient une signification, a déclaré Shawn Tupper, le porte-parole de la Ministre sur la question des pensionnats pour enfants autochtones. Nous pouvons indiquer (le fonds de guérison de 350 millions de dollars) et dire que nous faisons quelque chose de concret pour le soutenir. " La déclaration a été acceptée par le chef national Phil Fontaine. Cependant, d’autres chefs de file ont déclaré, à cette époque, que ce n’était pas suffisant. Par ailleurs, les critiques qui ont lu le document de 1996 disent que le gouvernement fédéral a suivi l’avis qu’il présentait. Ils disent qu’il est évident que la déclaration n’est aucunement une excuse, mais simplement une tentative de contrôler les coûts. L’ancien chef national Ovide Mercredi a affirmé que le document montre que " la Ministre n’a pas suivi ce que son cœur ou son sens de la justice lui dictaient ". " Elle a suivi l’avis juridique et cet avis visait à réduire la responsabilité légale à tout prix et cette mesure du gouvernement vise cet objectif. " Le chef Fontaine n’était pas disponible pour commenter l’affaire.

Le document mentionne que le fait de forcer les anciens élèves à poursuivre le gouvernement devant les tribunaux assurerait que ces derniers aient à démontrer le bien-fondé de leurs plaintes. Cela aurait aussi cet autre avantage de limiter les poursuites, établit le rapport.

<<<<<<< " Généralement, les personnes qui ont subi la violence sont peu enclines à témoigner sur une question aussi personnelle et douloureuse dans le cadre d’une tribune publique axée sur la confrontation ", lit-on dans le rapport. >>>>>>>

" Une approche fondée sur le litige pourrait maintenir le nombre des plaignants au minimum. "

Cependant, le fait de se défendre devant les tribunaux coûterait cher au gouvernement en argent et en mauvaise presse, conclut le rapport. L’auteur, anonyme, recommande plutôt un régime de dédommagement. Depuis la rédaction du rapport, des milliers d’anciens élèves ont intenté des recours collectifs ou entrepris personnellement des poursuites contre le gouvernement fédéral. Le mois dernier, un arrêt de la cour de la Colombie-Britannique qui fait jurisprudence a déclaré pour la première fois que le gouvernement fédéral et l’Église unie sont légalement responsables de la violence sexuelle et physique généralisée perpétrée dans un pensionnat de Port Alberni, en Colombie-Britannique, et leur a ordonné de dédommager environ 30 anciens élèves. L’on n’a pas encore arrêté un chiffre pour ce dédommagement. Le rapport de 1996 prévoit l’augmentation des poursuites devant les tribunaux, mais il avertit que les excuses sont un terrain miné.

" Quelle que soit l’appellation, le Ministère devra s’assurer que la déclaration ne peut être utilisée subséquemment pour établir un grief contre la Couronne dans quelque cause individuelle que ce soit, établit le document. Il faudrait faire voir que ce gouvernement est résolument tourné vers l’avenir et qu’en cette période économique difficile, il n’a pas l’intention de s’engager à quoi que ce soit qui coûterait trop cher ou qui serait lié au passé. " Tupper a signalé que la réflexion du Ministère a évolué depuis ce rapport. Lorsqu’on lui a demandé, lors d’une conférence de presse qui a eu lieu en janvier dernier, si la Déclaration de réconciliation était une excuse, Stewart a répondu oui. " Selon nous, la Déclaration de réconciliation n’est pas une reconnaissance de culpabilité devant une cour de justice, a affirmé Tupper. C’est une reconnaissance d’une politique historique et des conséquences négatives de cette politique et c’est un engagement de faire quelque chose relativement à ces conséquences. "

 

Toutefois, l’avocat John McKiggan, qui représente environ 800 anciens élèves du pensionnat pour enfants autochtones de Shubenacadie, en Nouvelle-Écosse, affirme que le document interne révèle la stratégie du gouvernement fédéral. " Il y a une similarité étonnante entre ce qui se passe actuellement et les suggestions contenues dans le document, dit-il. La Déclaration de réconciliation ne fait pas d’excuses pour les actes posés par le gouvernement. Elle reconnaît la douleur. Elle n’admet aucune responsabilité pour cette douleur. " © The Canadian Press, 1998.

***

Même avant la parution de cet article, certaines personnes avec lesquelles nous étions entrés en communication étaient sceptiques au sujet de la recherche relative à la réparation commandée par le ministère de la Justice. Les médias des Premières nations, en particulier, avaient " entendu des rumeurs " à l’effet que le gouvernement recherchait le moyen le moins cher de se sortir d’un problème complexe et qui coûterait cher inévitablement.

Nous avons catégoriquement tenu à ce que notre recherche n’ait aucune intention de faire partie d’un tel plan et nous ne croyons pas que ce soit l’intention de la Commission du droit du Canada. Cependant, l’existence de ce rapport cause des problèmes et une spéculation auxquels nous ne pourrons répondre efficacement que par une action significative.

Annexe 5

Le programme de guérison de l’expérience des pensionnats pour enfants autochtones de four worlds

Le défi

À mesure que les générations d’enfants autochtones revenaient des pensionnats, plusieurs d’entre eux rapportaient avec eux la honte et le traumatisme découlant des différents cas de violence dont ils avaient fait l’expérience et qui allaient avoir des répercussions sur la vie de leurs familles et de leurs collectivités pour les générations qui suivraient. Durant des années, nombre d’entre eux ont tenté d’oublier et de mettre derrière eux leur historique afin de pouvoir vivre la vie de tous les jours. Cependant, le fait est qu’aujourd’hui, plusieurs des difficultés que nos collectivités vivent ont pris racine, au moins partiellement, dans l’expérience des pensionnats pour enfants autochtones. L’héritage des pensionnats, qui influe encore aujourd’hui sur nombre de collectivités autochtones, comprend les éléments qui suivent.

•Perte de la langue et anéantissement de la culture

• Méfiance à l’égard du leadership et de l’autorité

• Violence sexuelle intergénérationnelle

• Luttes politiques intestines et travail de sape

• Toxicomanies chroniques

• Dépendance de la pensée

• Reproches et querelles durables

• Liens d’amour, de confiance et d’affection faibles ou brisés

• Violence interpersonnelle

• Manque d’initiative et d’esprit d’entreprise

• Éclatement des familles

• Violence physique commise contre les enfants ou d’autres personnes vulnérables

• Rage, honte et dysfonctionnement personnel

• Honte de sa spiritualité et de sa culture

Le programme

Le programme de guérison de l’expérience des pensionnats pour enfants autochtones de Four Worlds est conçu pour soutenir, former et guider les collectivités autochtones dans leurs démarches de mise en œuvre d’un programme efficace pour aller au fond de la question des pensionnats pour enfants autochtones, pour panser les blessures subies dans ces pensionnats et pour entreprendre de reconstruire la vie des personnes, des familles et des collectivités. Le programme de guérison de l’expérience des pensionnats pour enfants autochtones comprend quatre (4) étapes de formation et d’orientation pour le personnel et pour les membres des collectivités.

Étape I — Évaluation

Au cours de cette étape, une consultation en profondeur cherche à mettre à jour ce qui est survenu dans les pensionnats pour enfants autochtones, les conséquences dans la vie des gens et les démarches et mesures légales qui peuvent être nécessaires pour soutenir la guérison et le changement nécessaires. Le personnel de Four Worlds documente cette démarche de manière détaillée. Entre les étapes I et II, les conclusions écrites de la démarche d’évaluation font l’objet d’une distribution à tous les membres de la collectivité pour qu’ils les étudient et en discutent. Il est très important que quiconque désire apporter son concours à cette démarche ait toute la possibilité voulue d’y contribuer et de se faire entendre. La documentation fera alors l’objet d’une révision afin de refléter cet apport additionnel.

Étape II — Planification

Dans le cadre de cette étape, des membres choisis du personnel et de la collectivité travaillent avec l’équipe de Four Worlds à planifier les champs d’action stratégiques nécessaires pour guérir la collectivité et pour qu’elle se remette en route. Le plan provisoire qui résultera de cette étape fera de nouveau l’objet d’une distribution aux chefs de file de la collectivité et à tous les membres intéressés aux fins d’étude, puis une révision aura lieu pour refléter leur nouvel apport.

Étape III — Formation et démarrage

Cette étape comprend la formation du personnel-clé et des membres de la collectivité à différentes démarches de relation thérapeutique et de développement de la collectivité directement reliées aux champs d’action planifiés à l’étape II. Une fois cette étape franchie, le plan devrait se mettre en marche. L’étape qui suivra se concentrera sur l’objectif de faire participer pleinement la collectivité à ce programme.

Étape IV — Ateliers spéciaux de guérison et évaluation par l’équipe locale

Au cours de cette étape, les guides de Four Worlds travailleront de concert avec la collectivité pour conduire des ateliers spéciaux de guérison qui exigent un plus grand soutien (p. ex., pour les victimes de violence sexuelle ou en matière de résolution de longs conflits). Également, l’équipe effectuera une évaluation d’ensemble des six premiers mois d’application du programme afin de définir les modifications nécessaires au plan ainsi que les nouvelles stratégies ou les nouveaux besoins en matière d’édification d’une capacité de ressources humaines.

Le programme de guérison de l’expérience des pensionnats pour enfants autochtones de Four Worlds n’exigera pas l’embauche d’un personnel additionnel dans la collectivité, mais fonctionnera de pair avec les programmes existants, le personnel et les bénévoles de la collectivité. Cette démarche ne pourra être vraiment efficace que si le chef, le conseil et les cadres supérieurs s’entendent tous pour qu’elle fonctionne en raison de son importance pour le bien-être de la collectivité.

Coûts

Les coûts du programme feront l’objet d’une négociation collectivité par collectivité afin qu’ils reflètent la taille de chacune, les besoins et les conditions particulières à chacune, les frais de déplacement et d’autres dépenses reliées directement au programme.

Notre personnel

Le programme de guérison de l’expérience des pensionnats pour enfants autochtones de Four Worlds a été conçu et mis au point par Four Worlds International et Four Worlds Centre for Development Learning. Four Worlds a un long bilan de bons et loyaux services reliés au travail de guérison et de développement communautaire dans les collectivités autochtones. Les membres de l’équipe ont récemment rédigé plusieurs manuels portant sur l’intervention en matière de violence sexuelle dans les collectivités autochtones. De plus, nous avons travaillé étroitement avec plusieurs collectivités autochtones depuis plus d’une décennie dans le domaine de la violence et des problèmes reliés aux pensionnats pour enfants autochtones. Notre film Healing the Hurts documente en partie cet important travail. Four Worlds est bien connu pour sa façon de travailler respectueuse de la culture et qui se fonde sur les principes et sur les démarches issues de l’encadrement d’anciens sages et qui ont été testés dans des centaines de collectivités autochtones durant plusieurs années.

Autres renseignements ?

Ce programme s’adresse aux collectivités qui sont prêtes à entreprendre une action efficace pour s’occuper de la question des pensionnats pour enfants autochtones. Si vous désirez de plus amples renseignements, veuillez joindre :

The Four Worlds International Institute for Human and Community Development

Téléphone : (403) 320-7144 Télécopieur : (403) 329-8383

Courriel : 4worlds@uleth.ca

Annexe 6

Ce que je veux et attends du ministère des Affaires indiennes et des robes noires (jésuites) et autres

Rédigé par Gilbert Oskaboose

Une victime du pensionnat pour enfants autochtones Garnier, à Spanish, Ontario, de 1946 à 1956

Ce que j’attends de vous, c’est une importante somme d’argent en guise de dédommagement pour la vie d’enfer que vous m’avez fait mener au pensionnat pour enfants autochtones... dix ans sous les caresses affectueuses de la lanière de cuir des jésuites dans l’une de vos institutions infâmes. C’est aussi simple que cela.

Aucune somme d’argent ne réussira jamais à faire oublier la douleur que j’ai connue au cours de ces années et le préjudice que moi, ma famille, ma collectivité et ma nation avons subis. Cela ne servira qu’à me faciliter le voyage dans mes années de vieillesse. La même chose s’applique à mon épouse, une autre victime.

Je n’ai aucune espèce d’intérêt pour vos foutues excuses. Les excuses ne sont que des mots et les mots sont comme de la poussière dans le vent. Ils ne veulent rien dire. Il n’est pas possible de faire du mal à quelqu’un durant dix ans et de dire, ensuite, " Ah ! je m’excuse ! ", de " souffler le chaud et le froid " sur un groupe, puis d’aller se balader main dans la main avec lui à l’heure du rose crépuscule. Ça ne marche pas de cette façon.

Les programmes " d’apprentissage de la langue " suggérés sont ridicules. Ma femme et moi arrivons à la soixantaine. Il est un peu tard pour tenter d’apprendre une nouvelle langue. La même chose en ce qui concerne les centres de relations thérapeutiques et de guérison que vous proposez. Jamais ma femme ni moi n’allons commencer à répandre nos tripes devant quelque jeune blanc-bec fraîchement sorti de l’université, serrant bien fort dans sa petite main chaude un diplôme en thérapie freudienne. Pleurer sur ses problèmes ne correspond pas à la façon indienne de faire.

Ces 350 millions de dollars que le gouvernement a mis de côté devraient aller directement aux victimes des pensionnats. C’est eux qui étaient là. C’est eux qui ont payé le prix amer. C’est eux qui continueront à payer le prix jusqu’à ce qu’ils meurent.

Bon dieu, est-ce que vous n’en finissez jamais ? Vous agissez mal durant une centaine d’années. Vous faites du mal à des milliers de personnes. Ensuite, il faut vous contraindre à confesser votre erreur. Il faut vous contraindre à comparaître devant les tribunaux pour payer le prix. Puis, vous faites des demi-excuses, mais vous interjetez appel des décisions rendues contre vous dans vos propres cours. Est-ce que vous n’en finissez jamais ?

S’il vous plaît, n’envoyez pas cet argent aux gens bien engraissés des organisations autochtones des territoires et des provinces qui se spécialisent dans la création de programmes " adaptés à la culture " pour les Indiens dans le besoin. Ils s’engraissent de notre douleur. Ne l’envoyez pas aux légions de bureaucrates qui infestent les Affaires indiennes et qui jettent l’argent par les fenêtres. Ne l’envoyez pas aux cinglés qui administrent les bureaux des bandes. Ils ont l’art de transformer le gaspillage des fonds gouvernementaux en science.

Si vous regrettez vraiment et si vous désirez faire amende honorable, alors il n’y a qu’une chose à faire. Laissez vos erreurs derrière vous et faites la bonne chose, pour une fois. Divisez cet argent entre les anciens élèves qui ont fréquenté les pensionnats pour enfants autochtones. Mettez-en un peu de côté pour les enfants des victimes. Ils ont hérité directement des ordures que nous avons rapportées à la maison.

Annexe 7

Options et exemples : programmes pour le changement

Ce qui suit est un petit échantillon des centaines de programmes en cours qui visent à faire revivre et à renforcer les cultures autochtones dans le sillage de la destruction qui caractérise le colonialisme. Il n’y a pas de logique particulière qui sous-tende notre choix. Il s’agit simplement de quelques exemples parmi nombre d’initiatives qui, toutes, méritent attention et soutien.

1. Programme de rapatriement des Premières nations du Manitoba

Personne-ressource : Shirlene Asham, coordonnatrice
167, avenue Lombard, bureau 704,
Winnipeg (Manitoba) R3B 0V3
Téléphone : 1 800 665-5762

Lorsque les pensionnats pour enfants autochtones ont commencé à fermer leurs portes au cours des années 1960, le gouvernement du Manitoba a invité les services de bien-être et de protection de la jeunesse à se rendre dans les réserves pour y visiter les foyers sur une base aléatoire. Cela s’est fait sans le consentement des chefs des réserves ou des collectivités. Par la suite, plus de 3 000 enfants des Premières nations du Manitoba ont été arrachés à leur foyer et mis en adoption. La majorité d’entre eux se sont retrouvés dans des familles non autochtones aux États-Unis. Les services de bien-être et de protection de la jeunesse ont justifié ces retraits des enfants à la garde de leurs parents en alléguant que ceux-ci étaient inaptes à s’en occuper adéquatement. Ces décisions ont été prises dans le contexte d’une cour étrangère aux Autochtones où ceux-ci avaient peu de possibilités de se défendre eux-mêmes. Plusieurs enfants ont été arrachés à leur famille sans la signature des parents, ou sans même que ceux-ci comprennent ce qui se passait. Presque tous les parents et plusieurs des enfants étaient les produits du système des pensionnats pour enfants autochtones.

Dans les collectivités autochtones, au cours des années 1980, nombre de parents et de grands-parents ont fait des demandes pour ramener ces enfants dans leurs lieux d’origine. Toutes les provinces ont un registre de post-adoption, mais les Autochtones voulaient un organisme administré par les Premières nations, au sein duquel ils auraient l’impression d’être mieux compris. En 1992, le ministère des Affaires indiennes a promis 90 000 $ par année pour entreprendre le programme de rapatriement des Autochtones du Manitoba, qui se fonde sur un programme des Premières nations qui existait déjà en Colombie-Britannique.

Le programme fonctionne selon le postulat que chaque personne a le droit à " l’intégrité ", principe qui se définit en grande partie comme étant la connaissance de sa propre histoire. La plupart des enfants adoptés ne savent même pas de quelle tribu ils sont originaires. Plusieurs ont grandi dans un milieu où ils étaient le seul enfant autochtone dans une grande collectivité blanche américaine et ont fait l’expérience du racisme et du sentiment profond de ne pas avoir d’identité.

Le programme de rapatriement compte actuellement 576 dossiers en cours et le taux de succès est élevé. Le bilan est de 800 clients et de 300 réunions réussies. Lorsque l’on retrouve les enfants, le programme rend possible une réunification en terre manitobaine.

Le programme offre un soutien et une relation thérapeutique de base aux familles ainsi que des références relativement à des systèmes de soutien plus étendus. Durant les mois d’hiver, on y travaille sur les programmes d’apprentissage de la culture dans le cadre desquels on invite les anciens à prendre la parole et les clients à des cérémonies culturelles pertinentes.

Le plus important obstacle que rencontre ce programme est un sérieux manque de fonds. L’année dernière, le gouvernement fédéral a augmenté son budget de fonctionnement à 120 000 $ et, pour la toute première fois, la province a accordé une somme de 20 000 $. En raison de ces ressources limitées, l’on ne peut embaucher que deux personnes pour administrer le programme, mais on apprécierait beaucoup obtenir du financement pour embaucher deux spécialistes en relation thérapeutique. Les coupes budgétaires dans les services de bien-être et de protection de la jeunesse du Manitoba affectent aussi le programme, car ces services aident à financer les réunions. Or, ils ont plus de difficulté à le faire dans ce contexte de restrictions budgétaires. Il s’investit beaucoup d’énergie dans les campagnes de financement qui s’effectuent sous forme de ventes d’oranges et de jeans, de tombolas et de ventes aux enchères.

La coordonnatrice du programme, Shirlene Asham, est amère, car le gouvernement a engendré le problème et ce sont les Premières nations qui doivent le régler sans avoir les fonds suffisants : c’est presque comme si le programme " avait été établi de manière à ce qu’il ne puisse atteindre son objectif ".

2. Headlines Theatre : Reclaiming Our Spirits

Renseignements : Headlines Theatre
320, 2e Avenue est, app. 203
Vancouver (C.-B.) V5T 4R8
Téléphone : (604) 871-0508

Ce théâtre à vocation politique croit à l’idée de faire du théâtre avec la collectivité, et non pas au théâtre auquel la collectivité se contente d’assister. Chaque année, la troupe se rend dans des collectivités pour mettre en œuvre un programme intitulé " Theatre for Living ". Le directeur David Diamond signale que lorsque les personnes et les collectivités perdent leur capacité de dire leurs histoires, elles deviennent malades. Le " Theatre for Living " aide les gens à raconter leurs histoires.

En collaboration avec l’organisme United Native Nations, Headlines Theatre a conçu un programme intitulé Out of the Silence qui traite de sujets entourant la violence physique. En collaboration avec le Conseil tribal nuu-chah-nulth, il a évolué pour devenir Reclaiming Our Spirits, qui se concentre sur les pensionnats pour enfants autochtones.

En 1996, un atelier d’une semaine a eu lieu au Kakawis Healing Centre, l’ancien pensionnat pour enfants autochtones Christie. Les participants étaient des anciens élèves ou des enfants de ces derniers. Six journées de séances théâtrales intenses et émotives ont entraîné la présentation de deux courtes pièces : l’une traite des questions historiques relatives aux pensionnats; l’autre porte sur les conséquences de ces pensionnats aujourd’hui. Cela a semblé une expérience tellement profonde et positive que le Conseil tribal nuu-chah-nulth et le B.C. Provincial Residential School Project ont aidé à financer Headlines pour que la troupe reprenne l’atelier dans dix autres collectivités de la C.-B.

Les collectivités ont trouvé que les ateliers et les pièces constituaient une répétition pour le changement social. Par exemple, la partie interactive avec l’auditoire a permis aux spectateurs d’interagir avec les acteurs et de crier " ASSEZ " lorsqu’ils jugeaient qu’un personnage était irrespectueux. Tel spectateur pouvait alors s’avancer sur la scène et jouer d’une façon qui commandait le respect. Ces dialogues en cours d’action ont permis à plusieurs personnes de traiter de certains problèmes en leur montrant des moyens de transformer les modèles négatifs en modèles positifs.

Diamond insiste sur le fait que ce programme est une démarche théâtrale, et non pas une démarche de relation thérapeutique, même si elle favorise une extraordinaire guérison. Il y a des thérapeutes présents durant les ateliers. L’on insiste sur l’aspect politique en mettant l’accent sur la reprise en main des participants. Même si ce projet est terminé, il y a encore beaucoup de demandes pour tenir des ateliers. On a facilité la mise sur pied de programmes relatifs aux pensionnats pour enfants autochtones, qui portent sur la violence familiale, en Ontario et à Ahousat, C.-B.

3. Projet pour les femmes autochtones

Renseignements : Alberta Native Friendship Centres Association
10025, 106e Rue, bureau 1102
Edmonton (Alberta) T5J 1G4
Téléphone : (403) 423-3138

Après avoir remarqué que plusieurs programmes d’apprentissage de la guérison et de la culture avaient été élaborés en fonction des hommes, la Friendship Centres Association a entrepris de répondre particulièrement aux besoins insatisfaits des femmes par le moyen de son projet pour les femmes autochtones. Grâce au financement accordé par Condition féminine Canada, Patrimoine canadien et l’Alberta Friendship Centres Association, l’initiative permet d’offrir une variété de programmes destinés aux femmes.

La retraite pour les femmes autochtones, plus particulièrement, a connu du succès. À l’occasion de fins de semaine pour femmes seulement, dans un campement dans un lieu rural naturel, les femmes ont traité des questions de la guérison des collectivités, du mieux-être des familles, des relations harmonieuses, des toxicomanies, du rétablissement et de la guérison par le moyen de la tenue d’un journal et par la créativité. Elles ont également discuté de questions essentiellement féminines dans le cadre d’une cérémonie de " la jeune fille qui devient une femme " et, notamment, de la ménopause du point de vue autochtone.

Les rassemblements destinés aux femmes seulement sont considérés comme une part importante de la guérison. C’est là qu’elles peuvent mieux comprendre et transformer leur compréhension d’elles-mêmes et de leurs collectivités.

4. Justice communautaire kwanlin dün — Cercle de détermination de la peine au Yukon

Les membres de la collectivité kwanlin dün ont commencé à remarquer le nombre élevé de ceux d’entre eux qui étaient déclarés coupables de crimes et qui récidivaient une fois sortis de prison. Ils ont eu l’impression que les systèmes occidentaux de justice ne correspondaient pas aux besoins de leur peuple, car il y avait peu de preuves de réhabilitation. À la recherche de solutions, ils ont émis l’hypothèse qu’une grande partie du problème était le manque de participation de la collectivité dans la détermination de la peine et dans la réhabilitation.

En 1992, les fonctionnaires de la bande et du ministère de la Justice ont élaboré le Circle Sentencing Program (programme du cercle de détermination de la peine) dont l’objectif est de " guérir le préjudice causé par le crime " et de réintégrer le contrevenant dans la collectivité. Le cercle se compose de fonctionnaires de la cour, d’anciens et de membres des familles et de la collectivité. En consultation, ils déterminent les peines de façon plus holistique.

Ce modèle de justice, qui est une tentative d’adoption d’une approche réparatrice plutôt que rétributive, dans le cadre de laquelle les collectivités participent à la démarche en tant que participants actifs, a gagné en popularité dans les cours comme dans les collectivités partout dans le Nord en 1990. Le principal désavantage est que dans les collectivités qui n’ont pas entrepris une démarche de guérison, les membres du conseil et les anciens qui participent au cercle sont parfois eux-mêmes reconnus au sein des collectivités pour être des contrevenants, ce qui perpétue les structures dysfonctionnelles du pouvoir et l’oppression des membres des collectivités.

5. Fraternité des Autochtones

La Fraternité est apparue en 1958 au pénitencier de Stoney Mountain. Il s’agissait du premier programme d’entraide élaboré en prison par les prisonniers eux-mêmes. Ces prisonniers pensaient que le crime découlait de la perte de leur culture et ont décidé de chercher à promouvoir la fierté du patrimoine autochtone par le moyen d’activités, d’apprentissage, d’engagement communautaire et de la connaissance du système judiciaire et des autres institutions sociales. Par la formation en leadership et les présentations publiques, par la formation de personnes qui pouvaient parler au nom des prisonniers autochtones ainsi que par l’apprentissage de l’autonomie fonctionnelle, de la connaissance de soi et de la communication, il y a eu formation de réseaux de soutien étendus à mesure que la philosophie de la Fraternité se propageait parmi les détenus du pays.

Le mouvement a pris de l’essor durant les années 1960 et 1970 et une sororité a pris forme parmi les femmes. Les activités des détenus comprenaient des bulletins, des activités culturelles, des émissions de radio et le parrainage de programmes pour les jeunes à même les profits des coopératives administrées par les détenus. La Fraternité a contribué à la lutte pour les droits des Autochtones de pratiquer leurs traditions dans les prisons. À différents moments, les autorités l’ont perçue comme une menace, compte tenu que les membres de la Fraternité forment souvent la majorité de la population carcérale. Il y a eu souvent des transferts afin de démanteler le mouvement et son leadership.

Malgré de tels contretemps, la Fraternité demeure une source de force pour les gens qui sont en prison. Elle a fort bien réussi à remplacer la honte par la fierté de la culture et des valeurs autochtones.

6. Programme d’indemnisation des victimes atoskata pour la jeunesse

Renseignements : Regina Native Friendship Centre

Le ministère des Services sociaux de la Saskatchewan a remarqué que son taux de peines de détention pour les jeunes était supérieur à tout autre au Canada, et ce, dans une proportion de 70 p. 100. Dans beaucoup de cas, ces détentions avaient trait à des vols d’automobiles et ces jeunes étaient des Autochtones. Le système judiciaire semblait réagir à un problème d’augmentation des vols en prononçant des peines de détention plus longues.

Le programme atoskata a été établi sous le contrôle du Regina Friendship Centre en vue, d’une part, de garder les contrevenants plus près de leur collectivité et, d’autre part, de mettre en œuvre une démarche plus juste relativement au problème des vols d’automobiles. Les jeunes contrevenants référés au programme atoskata sont supervisés par les anciens de la collectivité dans le cadre d’un programme de placement professionnel, et le salaire qu’ils reçoivent est versé aux victimes de leurs crimes.

7. Hollow Water — Justice réparatrice

Le programme Hollow Water, dans la réserve ojibway du lac Winnipeg, est devenu le centre d’intérêt dans les discussions sur la relation thérapeutique en matière de violence sexuelle en raison de son Community Holistic Healing Circle (cercle de guérison holitisque communautaire). Ce sont les collectivités d'Hollow Water et trois collectivités voisines de Métis, qui comptent un total de 1 000 personnes, qui ont mis au point le programme.

Les collectivités ont rejeté le blâme pour les problèmes manifestes que connaissait la collectivité sur les facteurs suivants : la fréquentation durant quatre générations des pensionnats pour enfants autochtones; la violence que constitue le fait d’avoir volé aux Autochtones la signification d’une véritable vie familiale et leur capacité de juger ce qui constitue une sexualité saine.

Dans la plupart des collectivités, l’existence et l’étendue de la violence sexuelle est l’objet d’une ignorance répandue. C’était également le cas à Hollow Water jusqu’à ce qu’une recherche indique que 80 p. 100 de la population avait été victime de violence, le plus souvent par un membre de la famille, et que 50 p. 100 des membres de la collectivité étaient des agresseurs. Il y avait définitivement un problème dont il fallait s’occuper, mais comment ? Le système de justice classique, caractérisé par ses hauts taux de condamnations, aurait conduit à l’incarcération d’une grande proportion de la population, ce qui aurait causé la dévastation dans la collectivité tout en ne faisant rien pour résoudre les problèmes sous-jacents.

Au milieu des années 1980, 24 membres des collectivités se sont réunis et se sont donné pour objectif de guérir ces dernières de la violence sexuelle et familiale. À la suite d’une planification et d’une formation poussées, il y a eu la mise sur pied du cercle de guérison holitisque communautaire. Ce projet vise à rétablir l’équilibre dans les collectivités en travaillant à la fois avec les victimes et les agresseurs. La démarche holistique, qui repose sur l’analogie d’un cercle et qui perçoit la collectivité comme une toile de relations, met l’accent sur le fait que la résolution des problèmes et la guérison ne peuvent se réaliser isolément, mais plutôt dans le cadre de relations. À mesure que les gens divulguaient la situation de violence, cela encourageait les autres à faire de même.

Le cercle de guérison travaille en relation étroite avec les services de protection de la jeunesse, la police et les cours. Lorsqu’il y a assez de preuves qu’il y a eu une infraction, l’on aborde l’agresseur et lui présente le choix de passer par le système de justice criminelle ou, s’il reconnaît son infraction, il entreprend une démarche dans le cadre du cercle de guérison, ce qui lui donne la possibilité d’accepter sa responsabilité pour le préjudice causé et d’entreprendre sa guérison plutôt que de se retrouver en prison. C’est là la différence entre la justice réparatrice et la justice rétributive.

Le programme est important en ce qu’il réunit les victimes et les agresseurs — qui sont souvent eux-mêmes des victimes — dans une même démarche de guérison. Les agresseurs demeurent au sein de la collectivité, sous surveillance et avec certaines restrictions, tout en poursuivant une relation thérapeutique et des activités de guérison, y compris le fait de partager des cercles, des sueries et des jeûnes. S’ils ne sont pas blâmés pour leurs actes, les agresseurs n’en sont pas moins tenus responsables.

La démarche du cercle de guérison se divise en 13 étapes :
1) la divulgation;
2) assurer la sécurité de la victime;
3) confronter l’agresseur;
4) soutenir le conjoint ou parent;
5) soutenir la ou les familles et la collectivité;
6) la réunion de l’équipe d’évaluation en compagnie de la GRC;
7) la tenue de cercles avec l’agresseur;
8) la tenue de cercles avec la victime et l’agresseur;
9) préparer la famille de la victime;
10) préparer la famille de l’agresseur;
11) un rassemblement spécial : le cercle de détermination de la peine;
12) l’analyse de la peine;
13) la cérémonie purificatoire.

Le cercle de guérison communautaire a l’appui des fonctionnaires du système judiciaire. En 1995, le cercle avait déjà eu à traiter avec plus de 100 victimes et agresseurs et avec plus de 200 parents. Seulement cinq agresseurs s’étaient retrouvés en prison, et seulement deux autres avaient récidivé.

Comme pour tous les programmes autochtones et sociaux, le financement est une question de vive préoccupation. Les changements au plan politique, les changements parmi les fonctionnaires et les représentants élus, tout cela a des répercussions sur la capacité du cercle de guérison de fonctionner. Les organisateurs trouvent ironique de devoir dépenser tant de temps et d’énergie à " comprendre les machinations bureaucratiques des systèmes mêmes qui ont provoqué une si grande part du dysfonctionnement de la collectivité1 ".

Des programmes de justice holistiques fondés sur les principes qui guident les Premières nations, dirigés par des Autochtones et qui cherchent à rétablir l’équilibre des collectivités par les moyens de la justice et de la guérison sont en activité dans plusieurs collectivités, notamment en C.-B. et en Saskatchewan.

8. St. Norbert Foundation / Selkirk Healing Centre

Le Selkirk Healing Centre est une communauté thérapeutique qui cherche à réaliser un changement positif dans le milieu, dans les groupes de pairs, dans les relations familiales, dans les habitudes de travail, dans les attitudes et dans les valeurs de ses résidants. Cette communauté se concentre sur l’abstinence, la non-consommation abusive d’alcool et autres drogues, et tire avantage du soutien des personnes concernées qui travaillent ensemble pour s’aider elles-mêmes et chacun des autres membres de ce milieu holistique.

Les volets du programme mettent l’accent sur une responsabilité accrue de chacun en ce qui concerne ses actes et ses comportements et comprennent la mise en valeur, la compréhension et la confiance à l’égard de son rôle en tant qu’Autochtone. La reconnaissance des principaux problèmes qui contribuent à la consommation abusive d’alcool et autres drogues et la sensibilisation accrue de la personne en ce qui concerne ses forces et ses faiblesses sont les éléments principaux d’une expérience réussie dans le cadre de ce programme. Les activités reliées au programme et celles de la communauté sont rehaussées de cérémonies du calumet, de cercles de guérison, de cérémonies du printemps et de l’automne, de cérémonies d’attribution de noms, de danses en rond, de sueries et de pâwâs traditionnels de même que d’autres activités culturelles. Le centre de guérison emploie des anciens à titre de chefs culturels et spirituels de la communauté et invite des anciens de tout le pays à y faire des visites et à y demeurer durant de longues périodes. Également, un comité spécial qui porte le nom de " Council of Elders " (conseil des anciens) dont les membres proviennent de tout le Canada, conseille le conseil d’administration sur la programmation traditionnelle, culturelle et spirituelle autochtone.

Le Selkirk Healing Centre est situé sur une terre pittoresque de 320 acres sur les rives de la rivière Rouge, deux milles au nord de la municipalité de Selkirk au Manitoba. En plus de sa résidence de type pension, le centre de guérison comprend un gymnase, un centre de jour, un atelier de menuiserie, une résidence pour les anciens, des installations d’artisanat traditionnel et un immeuble pour le bureau administratif.

On offre à chaque résidant des possibilités d’expérience d’emploi et on l’assigne à des responsabilités précises relativement au fonctionnement des lieux. Les jeunes d’âge scolaire fréquentent des classes locales du mois de septembre au mois de juin; du tutorat et des classes pour enfants en difficulté sont disponibles sur les lieux.

Au personnel du centre de guérison s’ajoutent un médecin et un psychologue-conseil dont les services font l’objet de contrats. Les résidants qui veulent participer à des séances de groupes de soutien reçoivent l’aide du personnel pour choisir un groupe et pour organiser le transport2.

Les coupes dans les budgets sont également une préoccupation sérieuse de la fondation qui, bien qu’elle soit un organisme sans but lucratif, n’est pas reconnue dans le cadre du programme Toxicomanie et programmes subventionnés par la communauté. Quand la Direction des services médicaux a modifié sa politique de manière à ne financer que les Indiens inscrits qui participent à ce programme, la fondation a dû couper son programme familial pour lequel elle avait une liste d’attente de 500 personnes3.

9. Le cercle d’éducation et de formation anishnabe

Renseignements : Native Program Development, Community-Based Training
A/S Georgian College
Un promenade Georgian
Barrie (Ontario) L4M 3X9
Téléphone : (705) 728-1968, poste 1317

En 1992, l’Anishnabe Education & Training Circle (AETC) a constitué un partenariat avec le Georgian College ayant pour objectif d’attirer et de retenir un plus grand nombre d’Autochtones dans un milieu postsecondaire et d’augmenter le nombre de leurs diplômés. L’AETC est une initiative de collaboration entre 15 collectivités et organisations autochtones dont l’objectif est de s’occuper de l’ensemble des questions touchant l’éducation postsecondaire des Anishnabe afin d’assurer que les sept générations qui suivront auront accès à une éducation postsecondaire adaptée culturellement et contrôlée par eux.

La vision de ce cercle est de faire reconnaître à l’échelle nationale un cercle d’apprentissage autochtone centré sur la spiritualité, axé sur la culture et fondé sur l’apprentissage holistique qui perpétuera la mode de vie autochtone. Il instaurera un milieu et une démarche d’apprentissage qui assureront que les Autochtones auront la responsabilité de la mise en valeur et de l’autodétermination complètes en matière d’éducation continue.

Le programme annuel des fondations, la " nouvelle voie ", Shki-Miikan, est conçu de manière à améliorer la conception que se font les élèves autochtones de l’identité culturelle et à développer une base théorique solide qui leur permettra de réussir leurs études supérieures. Les cours comprennent le patrimoine, la tradition, les cultures, les rites et les cérémonies autochtones; la langue ojibway, les questions et les points de vue autochtones ainsi que les cours fondamentaux en mathématiques, en communication, en langue et en planification de carrière et du mode de vie.

Un programme de deux ans en développement communautaire et social autochtone enseigne les habiletés nécessaires pour planifier, élaborer, évaluer et gérer des programmes communautaires de services sociaux et de santé. Tout comme les cours mentionnés ci-dessus, ce programme comprend les principes de la santé et de la guérison holistiques, la psychologie, les questions sociales et de santé, la relation thérapeutique, l’administration, la gestion des ressources humaines ainsi que la planification et l’évaluation de programmes.

L’AETC conçoit et dispense également des programmes de formation communautaires, y compris la formation en mode de vie autochtone, la planification de carrière, la gestion du mode de vie et autres.

10. Waseskun House4

Waseskun House est un centre résidentiel communautaire situé à Montréal qui offre un programme basé sur une démarche englobante de la tradition culturelle autochtone et sur une conception anticipatoire de la réinsertion responsable des personnes au sein d’une société harmonieuse. Les participants se servent du cercle d’influences comme modèle pour le développement et pour l’équilibre émotionnel, physique, mental et spirituel de la nature humaine; il s’agit d’un instrument d’intégration qui leur permet d’examiner leur expérience de vie personnelle dans le contexte des principes naturels qui guident la compréhension autochtone traditionnelle de la réalité.

Les programmes thérapeutiques de groupe et individuels aident les personnes à comprendre les traumatismes personnels et à bien panser les blessures causées par les pertes particulières à l’expérience autochtone contemporaine. Il y a examen et compréhension du potentiel personnel en fonction de ses implications pour les générations futures et de ses effets sur la communauté mondiale.

Ce programme structuré de manière unique, qui se penche particulièrement sur la situation des personnes qui ont un historique de consommation abusive d’alcool et autres drogues comprend :

* la thérapie personnelle;
* la thérapie de groupe;
* la sensibilisation aux systèmes familiaux autochtones;
* la sexualité humaine;
* les questions relatives aux hommes;
* la résolution des conflits;
* les habiletés en matière d’autonomie fonctionnelle;
* la sensibilisation des Autochtones aux toxicomanies;
* la gestion de la colère et l’équilibre physique;
* les cercles de guérison;
* les cérémonies de purification;
* les sueries;
* les enseignements traditionnels des anciens;
* les célébrations traditionnelles.

Durant les mois d’été, les clients et, quand il y a lieu, leurs familles ont la possibilité de participer à des campements dans un milieu isolé où se tiennent des sessions thérapeutiques intensives.

Le programme a desservi plus de 400 clients inuit et des Premières nations du Québec depuis son inauguration en 1988. En plus d’être une résidence pour les clients des services correctionnels fédéraux et provinciaux, Waseskun House assure la surveillance des libérés correctionnels dans les collectivités.

11. The Pas Sweetgrass Head Start Centre

(Une initiative autochtone Bon départ financée par Santé Canada)

Renseignements : C.P. 2040
The Pas (Manitoba)
Téléphone : (204) 627-6864

Le The Pas Sweetgrass Head Start Centre appuie les stratégies de développement de la tendre enfance conçues et contrôlées par les Autochtones. Cette initiative offre aux enfants d’âge préscolaire autochtones des possibilités de développer une image positive de soi et un désir d’apprendre de même que des possibilités de réussir à se développer pleinement durant leur vie.

Le but et les objectifs du centre sont de former les parents et les pourvoyeurs de soins à se sentir plus compétents, plus à l’aise et plus souples dans leurs relations avec les enfants; de soutenir les membres des familles élargies à enseigner aux enfants et à s’en occuper; de favoriser les possibilités d’exercer son indépendance et sa responsabilité; d’apprendre dans une atmosphère de constance et de confiance. Par le moyen des enseignements traditionnels, nos " futurs gardiens de notre mère la Terre " acquerront la connaissance des valeurs et des croyances autochtones dans un milieu holistique et sécuritaire.

Le programme adapté à la culture comprend les légendes, la langue crie, les cérémonies, les enseignements traditionnels, les chansons et les danses. Le centre offre des programmes aux parents tels que Parenting Us; des programmes et des ateliers sur la gestion du stress et de la colère, sur l’estime de soi, la violence, le suicide, la santé et la condition physique, la sécurité, le jeu et le tabagisme, la dépression, les habiletés en matière de préparation à l’emploi, la nutrition, la préparation des aliments et autres. Les programmes pour les enfants sont en activité quatre jours par semaine et offrent des séances le matin et l’après-midi. Chaque vendredi sert à la formation des parents et du personnel. Il n’y a pas de frais pour les familles. Le transport est offert à ceux qui en ont besoin et l’on sert des collations nutritives.

Les programmes Bon départ auxquels participent les familles entières pour acquérir des habiletés parentales comprennent souvent une solide base culturelle en ce qui concerne les habiletés parentales et familiales, et présentent en plusieurs occasions un aperçu de la programmation des centres d’amitié et d’accueil partout au Canada. Ceux qui dirigent ces programmes mentionnent souvent leurs craintes au sujet de la permanence du financement pour la tendre enfance, l’incapacité de payer de meilleurs salaires au personnel, l’énorme besoin d’habiletés parentales comparativement au peu de programmes offerts.

12. Enaahtig Healing Lodge and Learning Centre

Renseignements : R.R. 1
Victoria Harbour (Ontario) L0K 2A0
Téléphone : (705) 534-3724

L’Enaahtig Healing Lodge and Learning Centre a été établi pour offrir des possibilités de guérison et d’apprentissage holistiques fondés sur les principes de la culture autochtone aux personnes et aux familles, dans un milieu sécuritaire, afin de favoriser la vigueur et l’équilibre des collectivités et des nations.

L’on y offre des programmes de foyers de groupe de quatre semaines pour les familles et autres afin de permettre un travail concentré et intensif de guérison; l’on y offre aussi des programmes en externat et communautaires pour les gens de tous les âges. La guérison traditionnelle intégrée aux habiletés et aux pratiques contemporaines est centrale à tous les programmes et à tous les services. À cette fin, le centre est un lieu de consultation, d’apprentissage des enseignements du Créateur, de suerie, de jeûne et de cérémonies de guérison et de célébration. C’est également un lieu de redécouverte et d’apprentissage de nouvelles façons de bien vivre.

Les objectifs du centre sont les suivants :

1) Établir et diriger un centre de guérison et d’apprentissage pour les Autochtones.

2) Promouvoir les valeurs et les croyances autochtones traditionnelles de manière à favoriser et à stimuler la guérison, la reconstruction et le revigoration des collectivités autochtones.

3) Promouvoir le bien-être spirituel, émotionnel, mental et physique des personnes, des familles et des collectivités autochtones.

4) Offrir des programmes et des activités qui répondent aux besoins des collectivités autochtones dans les domaines social, culturel, éducatif et linguistique.

5) Offrir des possibilités aux personnes et aux familles de renouer avec le monde naturel par le moyen d’activités culturelles fondées sur le territoire.

Les buts de ses programmes et de ses services sont :

• Offrir un lieu sain et naturel qui soit sécuritaire, respectueux et qui offre une atmosphère de confidentialité pour la guérison.

• Offrir aux personnes et aux familles des possibilités de guérir par les moyens de la relation thérapeutique traditionnelle et contemporaine, des cercles de discussion et de guérison, des cérémonies de guérison et d’autres services holistiques.

• Aider les gens à se retrouver spirituellement et à se renouveler dans le cadre de leurs traditions par le moyen des enseignements culturels, des cérémonies, des sueries et des célébrations.

• Offrir des possibilités de relations harmonieuses au sein des familles, des familles élargies et des collectivités et soutenir le changement positif chez les personnes et chez les familles par le moyen de l’éducation fondée sur la culture.

• Promouvoir l’amélioration en matière d’estime de soi, d’autosuffisance, de responsabilité sociale et d’intégration sociale par le moyen d’activités qui développent la capacité d’initiative personnelle et d’aide mutuelle.

• Aider les gens à adopter des modes et des situations de vie plus sains par le moyen de connaissances, d’habiletés et d’attitudes améliorées.

• Offrir aux femmes et à leurs partenaires des programmes et des services prénatals et postnatals adaptés à la culture.

• Offrir des programmes qui répondent aux besoins des enfants et de la jeunesse.

13. Mook’am Sexual Abuse Project (un modèle de programme de développement)5

Native Child and Family Services of Metro Toronto

Ce programme propose une approche innovatrice pour répondre aux besoins des adultes et des enfants autochtones victimes de violence sexuelle et à ceux de leurs familles. Son but est de mettre en œuvre un programme complet qui soit adapté à la culture et qui réponde aux besoins des Autochtones. Le programme en est à ses débuts et évolue avec l’expérience acquise, l’étude et la consultation avec les anciens, le personnel et d’autres programmes qu’on retrouve à Toronto.

Le programme reconnaît que la colonisation est la cause principale de la violence sexuelle dans les collectivités autochtones et postule qu’avant le contact avec les Européens, ces collectivités connaissaient peu la violence. Il établit les répercussions de la colonisation comme suit :

• l’éclatement des normes, des rôles, des règles et des responsabilités culturelles (p. ex., l’éclatement du système de clan);

• les pensionnats pour enfants autochtones où la furie de l’autorité s’exprimait dans la violence sexuelle, ce qui a laissé au moins deux générations sans connaissance des rôles parentaux modèles;

• différentes politiques gouvernementales, telle la Loi sur les Indiens, qui ont souvent volé aux Autochtones leur fierté et leur dignité;

• l’encouragement à un système de soins qui a placé les enfants autochtones dans des maisons de Blancs qui étaient différentes du point de vue culturel et qui offraient des occasions de violence;

• les adoptions d’Autochtones partout dans le monde;

• l’urbanisation qui a engendré l’isolement, le manque de soutien de la famille élargie et un éclatement encore plus complet des valeurs et des normes culturelles;

• le système pénal qui traite un pourcentage extraordinairement élevé d’Autochtones.

Le programme reconnaît que ces facteurs historiques et structurels ont conduit à la colère intériorisée, à la perte de contrôle et à l’érosion de la dignité et de l’estime de soi. Le volet du programme qui s’occupe du traitement des adultes vise à réduire le risque de problèmes pour l’avenir en donnant aux parents ou aux futurs parents la capacité émotive de tenir leurs rôles parentaux et de protéger leurs enfants. Le traitement destiné aux enfants vise à évaluer l’existence de la violence sexuelle et à aider les enfants à composer avec le traumatisme qui en résulte.

Le projet identifie les bénéficiaires directs du programme, tels que les adultes et les enfants victimes de violence sexuelle, et, également, les bénéficiaires indirects, tels que les membres de leurs familles. Les enfants des victimes profitent de la meilleure estime de soi de leurs parents, des habiletés parentales et de leur capacité à entrer en relation avec les autres. Ces facteurs aident à réduire le risque que se reproduisent les cycles intergénérationnels de la violence. Les personnes qui commettent des actes de violence ne font pas l’objet d’un traitement dans le cadre du programme Mook’am pour le moment, mais on les réfère à d’autres programmes.

*

Encore une fois, il ne s’agit ici que de quelques exemples de la revitalisation de la culture autochtone qui a cours partout au Canada. Dans chaque domaine — les sciences, l’éducation, les arts, la musique, le journalisme, la justice, le développement communautaire, les affaires, l’administration, pour n’en nommer que quelques-uns — il y a un progrès indéniable qui se concrétise par la résurgence de nations autochtones fortes et dynamiques. La reconnaissance et la réparation du préjudice causé par les pensionnats pour enfants autochtones assureront que cette résurgence se poursuivra d’une manière et dans un esprit qui bénéficieront à toutes les nations du Canada et qui en assureront la guérison.

 

__________________

[1] Hoff, Lee Ann, People in Crisis: Understanding and Helping, 2e éd. , Don Mills: Addison Wesley, 1984, p. 230.
[2] Assemblée des Premières Nations, Breaking the Silence: An Interpretive Study of Residential School Impact and Healing as Illustrated by the Stories of First Nations Individuals, Ottawa, 1994, p. 189.
[3] Loi sur les services à l'enfance et à la famille de l'Ontario : II. Définition de mauvais traitement Le paragraphe 72(1) de la Loi sur les services à l'enfance et à la famille définit le fait de " subir de mauvais traitements " comme étant un " besoin de protection " au sens des alinéas 37(2)a), c), e), f) ou h); a) l'enfant qui a subi des maux physiques infligés par la personne qui en est responsable ou causés par le défaut de cette personne de lui fournir des soins, de subvenir à ses besoins, de le surveiller et de le protéger convenablement; c) l'enfant qui a subi une atteinte aux mœurs ou qui a été exploité sexuellement par la personne qui en est responsable ou par une autre personne si la personne qui en est responsable sait ou devrait savoir qu'il existe des dangers d'atteinte aux mœurs ou d'exploitation sexuelle et qu'elle ne protège pas l'enfant; e) l'enfant qui a besoin d'un traitement médical en vue de guérir, de prévenir ou de soulager des maux physiques ou sa douleur, si son père ou sa mère ou la personne qui en est responsable ne fournit pas le traitement, refuse ou n'est pas en mesure de donner son consentement à ce traitement, ou n'est pas disponible pour ce faire; f) l'enfant qui a subi des maux affectifs qui se traduisent par, selon le cas : (i) un sentiment profond d'angoisse, (ii) un état dépressif grave, (iii) un fort repliement sur soi, (iv) un comportement autodestructeur ou agressif, si son père ou sa mère ou la personne qui en est responsable ne fournit pas des services ou un traitement afin de remédier à ces maux ou de les soulager, refuse ou n'est pas en mesure de donner son consentement à ce traitement ou ces services, ou n'est pas disponible pour ce faire; h) l'enfant dont l'état mental ou affectif ou de développement risque, s'il n'y est pas remédié, de porter gravement atteinte à son développement, si son père ou sa mère ou la personne qui en est responsable ne fournit pas un traitement afin de remédier à cet état ou de le soulager, refuse ou n'est pas en mesure de donner son consentement à ce traitement, ou n'est pas disponible pour ce faire;
[4] Gannage, Mark, An International Perspective: A Review and Analysis of Approaches to Addressing Past Institutional or Systemic Abuse in Selected Countries, Rapport provisoire à la Commission du droit du Canada, 1998, p.3
[5] Gannage, 1998
[6] Crowder, Adrienne et Hawkings, Rob. Quand la porte s'ouvre : modèle de traitement des personnes de sexe masculin qui ont survécu à l'abus sexuel, Ottawa : Santé et bien-être Canada (Centre national d'information sur la violence dans la famille), 1993.
[7] Hamilton, Ron, chercheur au Conseil de la santé nuu-chah-nulth, conversation, juin 1998.
[8] Saskatchewan Education, Indian and Métis Staff Development, Regina, Saskatchewan Education, 1994.
[9] The Concise Oxford Dictionary, 9e éd., Oxford, Oxford University Press, 1995.
[10] APN, 1994, p.189
[11] Graham, Elizabeth, The Mush Hole: Life at Two Indian Residential Schools, Waterloo, Heffle Publishing, 1997.
[12] Chrisjohn, Roland, présentation devant la Commission royale d'enquête sur les peuples autochtones.
[13] APN, 1994, p. 5
[14] Chrisjohn, Roland, Young, Sherri L. et al, The Circle Game: Shadows and Substance in the Indian Residential School Experience in Canada, Penticton, C.-B., Theytus Books Ltd, 1997.p. 244.
[15] Pour discussion du fondement du récit ethnographique, voir, par exemple, Robin Ridington, Trail to Heaven: Knowledge and Narrative in a Northern Native Community, Iowa, University of Iowa Press, 1988.
[16] Davin, Nicholas F., Report on Industrial Schools for Indians and Halfbreeds, Ottawa, 1879.
[17] Crey, Ernie et Fournier, Suzanne, Stolen From Our Embrace: The Abduction of First Nations Children and Restoration of Aboriginal Communities, Vancouver, Douglas and McIntyre Ltd., 1997, p. 50.
[18] Rheaume, Gene, conseil d'administration, La Fondation pour la guérison des Autochtones, correspondance, septembrre 1998.
[19] APN, 1994, p. 13-19.
[20] Daniels, E. R., Ph. D., How Similar? How Different? The Patterns of Education for Indian and non-Indian Students in Canada, préparé pour la Commission royale d'enquête sur les peuples autochtones, décembre 1992, p. 5.
[21] Whitehead, Margaret, The Cariboo Mission: A History of the Oblates, Victoria, Sono Nis Press, 1981. p. 118, citée dans Haig-Brown, p. 29.
[22] Titley, E. Brian, A Narrow Vision: Duncan Campbell Scott and the Administration of Indian Affairs in Canada, Vancouver, University of British Columbia Press, 1988, p .75.
[23] Haig-Brown, Celia, Resistance and Renewal: Surviving the Indian Residential School, Vancouver, Tillacum Library, 1988, p. 25; également dans Grant, p. 59.
[24] Grant, Agnes, No End of Grief: Indian Residential Schools in Canada, Winnipeg, Pemmican Publications Inc., 1996, p. 59.
[25] Graham, p.40.
[26] Davin, Nicholas F., Report on Industrial Schools for Indians and Halfbreeds, Ottawa, 1879, p. 1; dans Haig-Brown, p. 26.
[27] Davin, p. 12, dans Haig-Brown, p. 26.
[28] Indian Tribes of Manitoba, Wahbung: Our Tomorrows, Manitoba, Manitoba Indian Brotherhood, 1971. p. 113, dans Grant, p.64.
[29] Calgary Herald, éditorial, " Our Indian Schools ", 10 février 1892, dans Miller, p. 183.
[30] Miller, J. R., Shingwauk's Vision: A History of Native Residential Schools, Toronto, University of Toronro Press, 1996, p. 186.
[31] Grant, p. 61.
[32] Grant, p. 62.
[33] Grant, p.63.
[34] Daniels, p.10.
[35] Canada, 57-58, Victoria, c.32, s.11, cité dans Daniels, p. 11.
[36] Haig Brown, p. 27, citant Kahn-tineta, Lerchs, George et Miller Historique de la Loi sur les Indiens (Ottawa, Centre de recherches historiques et d'étude des traités), 1980, p. 114.
[37] Eded, Jeane et Reyhner, Jon, " A History of Indian Education ", Teaching American Indian Students, direction Jon Reyhner, Norman, Univ. of Oklahoma Press, 1988, p. 35-40, dans Grant, p. 56.
[38] Harper, Allan G., Canada's Indian Administration: Basic Concepts and Objectives, Americana Indigena 5,2, avril 1945, p. 127, dans Miller, p. 184-185.
[39] Minutes of Proceedings and Evidence No.1, Ottawa, Imprimeur du Roi, 1947, dans Haig-Brown, p. 28.
[40] Dyck, Noel, Differing Visions: Administering Indian Residential Schooling in Prince Albert 1867-1995, Grand conseil de Prince Albert, 1997, p. 61.
[41] Dyck, p. 7
[42] Fournier et Crey, p. 52.
[43] Knockwood, Isabelle, Out of the Depths: The Experiences of Mi'kmaw Children at the Indian Residential School at Shubenacadie, Nova Scotia, Roseway Publishing, Lockeport, N.-É., 1992.
[44] Knockwood, p. 17.
[45] Témoignage de Bernie Knockwood, dans Knockwood, p. 20.
[46] Fournier et Crey, p. 64.
[47] Ing, Rosalyn, The Effects of Residential Schooling on Native Child-Rearing Practices, thèse de maîtrise, University of British Columbia; ouvrage publié également dans Canadian Journal of Native Education, vol. 18, 1991.
[48] Ing, p. 53-54.
[49] Ing, p. 36.
[50] Danziger, Edmund et Miller, James, In the Care of Strangers: Walpole Island First Nation's Experiences with Canadian Residential Schools Since World War I, non publié, octobre 1997.
[51] Assemblée des Premières Nations, 1994.
[52] Assemblée des Premières Nations, 1994, p. 22.
[53] Assemblée des Premières Nations, p. 22
[54] Knockwood, p. 41.
[55] Knockwood, p. 50.
[56] Knockwood, p. 93-95
[57] Furniss, Elizabeth, Victims of Benevolence: The Dark Legacy of the Williams Lake Residential School, Arsenal Pulp Press, Vancouver, 1995.
[58] Grant, p. 19.
[59] Grant, p. 20.
[60] Grant, p. 21.
[61] Grant, p. 25.
[62] Grant, p. 224-225.
[63] Grant. p. 156-157.
[64] Grant. p. 224-225.
[65] Conseil tribal Nuu-Chah-Nulth, Indian Residential Schools: The Nuu-chah-nulth Experience, Port Alberni, 1996.
[66] Chrisjohn, R., Belleau, C., et al., " Faith Misplaced: Lasting Effects of Abuse in a First Nations Community. ", Canadian Journal of Native Education, vol. 18, no 2, 1991, p. 161-197.
[67] Chrisjohn et al, 1991, p. 169.
[68] Chrisjohn et al., 1991, p. 173.
[69] Miller, J.R., p. 322.
[70] Miller, J.R., p. 318-333.
[71] Australian Human Rights Commission Report on Aboriginal Injustices, dans Grant.
[72] Chrisjohn, 1997, p. 46-52.
[73] Grant, p. 270.
[74] Grant, p. 270.
[75] Annett, rév. K.D., correspondance, sept. 1998.
[76] Grant, p. 270.
[77] Knockwood, p. 107-108.
[78] Fournier et Crey, p. 58-59.
[79] Haig-Brown, p. 104.
[80] Rapport de la Commission royale d'enquête sur les peuples autochtones, vol. 1, partie II, chapitre 10, " Pensionnats ", Canada Communications Group, Ottawa, 1996, p. 368.
[81] Grant, p. 134.
[82] Fournier et Crey, p. 58.
[83] Personnes-ressources à des centres d'accueil et dans des médias autochtones du pays.
[84] Fournier et Crey, p. 75.
[85] Grant, p. 26.
[86] Conversation avec le sergent Robert Grinstead, enquêteur, juillet 1998.
[87] Grant, p. 270-271.
[88] Titley, p. 90.
[89] CRPA, p. 357-358.
[90] CRPA, p. 357-358.
[91] CRPA, p. 365.
[92] Fournier et Crey, p. 49.
[93] Fournier et Crey, p. 58.
[94] CRPA, p. 357.
[95] Roberts, David, " Deaths Casts Shadow at Boarding School for Indian Children ", The Globe and Mail, 15 nov. 1990, p. A-6.
[96] Grant, p. 133.
[97] grant, p. 138.
[98] Grant, p. 271.
[99] Chrisjohn, 1997, p. 31-33.
[100] Renseignements tirés de sources citées dans la biobliographie.
[101] CRPA, p. 369.
[102] CRPA, 368-373.
[103] Grant, p. 193.
[104] Grant, p. 194.
[105] Chrisjohn, p. 33.
[106] Chrisjohn, p. 43.
[107] Chrisjohn, p. 44.
[108] Means, Russell (nation Lakota Sioux), dans Churchill, Ward, " Colonialism, Genocide and the Expropriation of Indigenous Spiritual Tradition in Contemporary Academia ", Border/Lines, dir. Kapashesit, Randy, et LaDuke, Winona, York University, Toronto, hiver 1991-1992, p. 41.
[109] Churchill, citant les chercheurs Mark Davis et Robert Zannis, P. 41.
[110] Grant, p. 273.
[111] CRPA, p. 334.
[112] La CRPA cite plusieurs sources, y compris la correspondance ministérielle et le rapport Davin.
[113] CRPA, p. 357.
[114] Knockwood, p. 112.
[115] Conversations avec des personnes-ressources; également, Sellars, chef Bev, allocution à l'occasion de l'inauguration de la première conférence nationale sur les pensionnats, 18 juin 1991, reproduit dans Furniss, p. 127, et dans Haig-Brown, p. 87.
[116] Grant, p. 272.
[117] Grant, p. 28.
[118] APN, 1994, p. 167-168.
[119] Conseil tribal Nuu-Chah-Nulth, 1996, p. 6-7.
[120] Ing, p. 65-118.
[121] Metcalf, Ann, " From Schoolgirl to Mother: The Effects of Education on Navajo Women ", Social Problems, 23(5): p. 544, dans Ing, p. 44.
[122] More, Janet, Cultural Foundations of Personal Meaning: Their Loss and Recovery, University of British Columbia, thèse de maîtrise non publiée, dans Ing, p. 45.
[123] Haig-Brown, dans Ing, p. 45.
[124] Ryan, Joan, Squamish Socialization, University of British Columbia, thèse de doctorat non publiée, 1973.
[125] Four Worlds Development Project, How History Has Affected Native Life Today, 1984; et Atkinson, Jim, The Mission School Syndrome, Northern Native Broadcasting, vidéo, Yukon, 1988.
[126] Ing, p. 59.
[127] Ing, p. 71-72.
[128] Knockwood, 1992, p. 156.
[129] Knockwood, p. 158.
[130] Furniss, p. 31.
[131] Nation nishnawbe-aski, Report on Residential School Meetings, mai 1995, p. 3.
[132] Nation nishnawbe-aski, p. 7.
[133] Grant, p. 84.
[134] Grant, p. 106.
[135] Grant, p. 182.
[136] Young, Doris, " Walking in our Mothers Footsteps: Aboriginal Women and Traditional Self-Government ", Herizons 6.1, printemps 1992, p. 25.
[137] " Nun's students learned hatred ", Winnipeg Free Press, 2 novembre 1990.
[138] Miller et Danziger, p. 11.
[139] Miller et Danziger, p. 12.
[140] Fournier et Crey, Stolen From Our Embrace: The Abduction of First Nations Children and Restoration of Aboriginal Communities, Douglas and McIntyre Ltd., Vancouver, 1997.
[141] Miller, J.R., p. 93-97.
[142] Miller, J.R., p. 411.
[143] Miller, J.R., p. 436.
[144] Flynn, Lindy-Lou, To Break the Conspiracy of Silence: The Healing and Empowerment of Native Peoples Across Canada, University of Western Ontario, 1993, p. 96.
[145] Flynn, P. 98.
[146] Flynn, p. 106.
[147] Flynn, p. 105-106.
[148] Chrisjohn, 1991, p. 172.
[149] Chrisjohn, 1991, p. 186.
[150] Chrisjohn, 1991, p. 255.
[151] Chrisjohn, 1997, p. 256.


[1] Ferguson, Rosanna, citant Dan Highway, dans Weetawah, février 1998.
[2] Commission royale d'enquête sur les peuples autochtones, Pour sept générations : legs documentaire de la Commission royale d'enquête sur les peuples autochtones, CD-ROM, Libraxus Inc., Ottawa, 1997.
[3] Conseil tribal nuu-chah-nulth, Beyond Survival (vidéo), Edward L.J. Lee Video Prod., Port Alberni, 1996.
[4] Conseil tribal nuu-chah-nulth, Indian Residential Schools: The Nuu-chah-nulth Experience, 1996.
[5] Nous avons passé en revue les parutions (ou le maximum de parutions disponibles) des médias suivants couvrant une période de deux ans : First Perspective, Windspeaker, Weetamah News, Raven's Eye, NewsNorth, Nunatsiaq News, Mimac Maliseet Nations News ainsi que des dossiers de coupures de journaux portant sur le sujet du Kivalliq News et du Ha-Shilth-Sa. Nous avons également reçu des coupures tirées des journaux suivants : Halifax Chronicle Herald, National News Journal, The Globe and Mail, Ottawa Citizen et Edmonton Journal.
[6] L'expression publique des regrets du gouvernement fédéral aux peuples autochtones transmise par le ministre des Affaires indiennes, 7 janvier 1998.
[7] Le document du Four Worlds International Institute préparé pour l'APN, Community Healing and Aboriginal Social Security Reform, mars 1998, présente un très bon examen de la façon dont les différentes démarches affectent le développement des collectivités.
[8] Rapport de l'Australian Human Rights Commission sur les injustices commises contre les Autochtones, mai 1997, cité dans le rapport de l'enquête sur le pensionnat pour enfants autochtones Alkali, juin 1997.
[9] CRPA, p. 37.
[10] Ibidem.
[11] Pour un exemple, se reporter à l'article de l'Ottawa Citizen, à l'annexe 4; également, le témoignage d'Isabelle Knockwood au sujet de la disparition de tous les exemplaires du rapport Audette, une Commission royale d'enquête sur la flagellation de 19 garçons à l'école Shubenacadie, de même que des dossiers s'échelonnant sur plusieurs années (p. 151-152); la Truth and Justice Commission de Vancouver (et anciennement le Circle of Justice) décrit aussi les dossiers qui manquaient lors de leurs recherches d'archives.
[12] L'avocat Peter Grant.
[13] Le juge américain Rudy James, International Human Rights Association of American Minorities, conversation, juin 1998.
[14] Le modérateur de l'Église unie Bill Phipps, dans First Perspective, juin 1998.
[15] Renseignements soumis au sergent Laurence Aimoe par le caporal Charlotte Evans, Division " G ".
[16] P. ex., des groupes du nord du Manitoba et de Fort Albany.
[17] Kocis, Shaun, avocat du Manitoba, conversation, sept. 1998.
[18] Hodgson, Maggie, conversation, sept. 1998.
[19] La Federation of Saskatchewan Indians commence à agir dans ce domaine, incitée en cela par les victimes qui ont connu des expériences négatives au sein du système judiciaire et par des considérations éthiques soulevées par des avocats au sujet de la gestion actuelle de causes relatives aux pensionnats pour enfants autochtones.
[20] La Federation of Saskatchewan Indians, entre autres, a une version d'un plan qui en est aux étapes finales d'approbation.
[21] Metatawabin, Ed, porte-parole, Peetatek Keway Keekaywin (association des victimes du pensionnat pour enfants autochtones St. Ann).
[22] Peterson, Katherine, enquête sur le pensionnat pour enfants autochtones de Chesterfield Inlet.
[23] Ramji, Karim, avocat de certains plaignants de la Colombie-Britannique, sept. 1998.
[24] Corbière, Diane, Indigenous Bar Association, sept. 1998.
[25] Metatawabin, Ed, remarque que l'Église catholique est représentée et attend le début des négociations, mais que les deux paliers de gouvernement n'ont pas fait preuve de collaboration. Il signale que le groupe a encore des possibilités de recours judiciaires, sept. 1998.
[26] Kocis, Shaun, avocat des Premières nations du Manitoba qui représente 150 victimes et qui participe à un réseau de 300 à 400 autres victimes, sept. 1998.
[27] Carlson, D. et Williams, S., avocats qui représentent d'anciens élèves dans des plaintes logées au civil en Colombie-Britannique, sept. 1998.
[28] Angecomb, G., présentation à la conférence de la nation nishnawbe-aski, 1996. M. Angecomb a planifié et mis au point sa propre démarche de médiation, avec l'appui de l'Église, en vue de confronter un agresseur et de tenter d'en arriver à une solution avec lui. La dénégation de l'agresseur a résulté en une déclaration de culpabilité en cour criminelle.
[29] Chrisjohn, Roland, à la Première conférence nationale, Vancouver, 1991.
[30] Four Worlds International Institute, mars 1998, p. 172.
[31] Oskaboose, Gilbert, août 1998.
[32] Fournier, p. 177.
[33] Nous devons beaucoup à Michael Bopp et à Phil Lane (Four Worlds International Institute) qui ont discuté des enjeux entourant la guérison des collectivités, des valeurs et des principes qui sous-tendent le développement communautaire holistique efficace des collectivités et qui ont clarifié ces questions. Leur ouvrage, Community Healing and Aboriginal Social Security Reform: A Study prepared for the Assembly of First Nations, est une référence remarquable dans ce domaine.
[34] Michael Bopp et Phil Lane, conversation, sept. 1998.
[35] Flynn, p. 19. 1 Chrisjohn, 1997, p. 112. 2 Le terme " fréquentation " s'applique aux enfants qui vivaient au pensionnat durant l'année scolaire et que l'on embarrait à l'intérieur la nuit.


[1] Ing, 1990, p. 80-82.
[2] Mussell, W.J. (Bill), Institutionalization and Cultural Devaluation: The Effects of Residential Schooling, délibérations de la conférence, Vancouver, 1991, p. 8-9.
[3] Chrisjohn, R., Belleau, C. et al. 1991, p. 185-186.
[4] APN, 1994, p. 185-186.
[5] Peterson, 1994, p. 29-31.
[6] Conseil tribal nuu-chah-nulth, 1996, p. 209-210.
[7] Furniss, 1995, p. 114-118.
[8] Ibidem, p. 119-120.
[9] Ibidem, p. 35.
[10] Nation nishnawbe-aski, 1995, p. 10-15.
[11] CRPA, vol. 1, chap. 10, site Web http://www.gcc.ca/????????????????? p. 37-38.
[12] Littéralement, " les réfugiés de la mer ", Conseil tribal nuu-chah-nulth, 1996, p. IX.
[13] Conseil tribal nuu-chah-nulth, 1996, p. 207-209.
[14] APN, 1996, p. 11-15.
[15] Chrisjohn, 1997, p. 109-112.
[16] Norbert, 1998, p. 16-18.
[17] Immaroitok, Richard et Kunnuk, Simeonie, Statement by Survivors Tasiuqtit on Historical Abuse, Assimilation Policies and Honoring All Peoples, sept. 1998.


[1] Solliciteur général du Canada, Healing: Selected Reports from the Aboriginal Peoples Collection, CD-ROM, 1996; The Four Circles of Hollow Water, p. 126.
[2] Tiré de la documentation qui décrit le programme de St. Norbert.
[3] Conversation avec le directeur, Lorne Wier, juin 1998.
[4] Pour plus de renseignements : http://www.waseskun.net
[5] Native Child & Family Services of Metro Toronto, The Mook'am Sexual Abuse Project (troisième version provisoire), octobre 1991.


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