L'Argentine: au bord du chaos politique et institutionnel

Avertit une mission d'enquête de Droits et Démocratie et la Fédération internationale des Ligues des droits de l'homme

MONTRÉAL, 13 mars 2002 - La crise économique qui sévit en Argentine m'ne le pays au bord du chaos politique et institutionnel, selon la représentante de Droits et Démocratie qui vient de participer à une mission d'enquête dans ce pays d'Amérique du Sud.

« La crise économique aigue est exacerbée par le fait que toute la classe politique argentine et ses institutions ont été sévèrement discréditée, » a indiqué Yasmine Shamsie, une spécialiste en économie politique et développement de l'Université York qui a représenté Droits et Démocratie dans le cadre de cette mission et qui rentre au pays cette semaine.

Organisée par la Fédération internationale des Ligues des droits de l'homme (FIDH), la mission a cherché à documenter les violations des droits civils et politiques, résultat de la réaction officielle au vaste mouvement de protestation sociale devant l'incapacité du gouvernement de garantir à ses citoyens leurs droits fondamentaux sociaux, économiques et culturels.

La mission a constaté une dégradation inquiétante du niveau de vie de la majorité des Argentins et la violation flagrante par le gouvernement de ses obligations envers ses citoyens en vertu du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ratifié par l'Argentine en 1986. Les statistiques officielles démontrent que 15 millions d'Argentins sur une population de 37 millions, vivent en dessous du seuil de pauvreté; ce nombre augmente tous le jours et la classe moyenne tout autant que les classes défavorisées sont touchées. L'appareil de production national est quasi paralysé et le gouvernement, qui ne recouvre plus que 50% des impïts et des dettes, est sur le bord de la faillite.

Alors que tous les jours le fossé se creuse encore un peu plus, entre les citoyens d'Argentine et leurs institutions nationales, les membres de la mission d'enquête ont constaté avec inquiétude que le gouvernement criminalise les protestations sociales légitimes. Des centaines de cas, tel que celui du militant Emilio Ali, (qui réclamait le droit de manger à sa faim), sont devenus les symboles des tentatives gouvernementales visant à criminaliser la dissidence légitime, et contribue encore plus à discréditer l'appareil judiciaire déjà méprisés pour avoir refusé de juger les anciens chefs militaires accusés de crimes contre l'humanité.

« Il est extr'mement préoccupant de constater que les Argentins ont perdu toute confiance en leurs leaders politiques, judiciaires et économiques, » a indiqué Yasmine Shamsie. Cette dernière est ses coll'gues de la FIDH ont aussi noté un vacuum au sein de l'ar'ne politique et ont dit craindre que le slogan qu'ils ont souvent entendu répéter: °Que se vayan todos! (Qu'ils s'en aillent tous!) n'annonce une encore plus grande détérioration sociale.

La dégradation des institutions gouvernementales laisse l' État argentin dans une position vulnérable face aux politiques des institutions financières internationales et aux intér'ts des sociétés transnationales; une situation qui ne peut qu'aggraver la crise dans laquelle sont plongées les institutions démocratiques et la gouvernance, ont fait savoir les membres de la mission d'enquête.

« La situation qui sévit présentement en Argentine vient confirmer l'indivisibilité des droits sociaux, économiques, civils et politiques, " a déclaré Mme Shamsie. " En criminalisant et réprimant les demandes des citoyens argentins qui réclament leurs droits économiques fondamentaux, l'État a accéléré la spirale de la dégradation institutionnelle et cela nous fait craindre le pire. »

Yasmine Shamsie participera à une réunion publique organisée par Droits et Démocratie le jeudi 14 mars à 19 heurs dans ses bureaux au 1001 boul. de Maisonneuve est, 11e étage à Montréal (métro Berri). Victor Armony, un professeur de l'UQAM d'origine argentine, qui rentre également d'Argentine, participera aussi à la rencontre.

Droits et Démocratie est une organisation indépendante investie d'un mandat international, créée par le Parlement canadien en 1988 pour favoriser et appuyer les valeurs universelles des droits de la personne et pour promouvoir les institutions et les pratiques démocratiques dans le monde entier. En coopération avec des individus, des organisations et des gouvernements, au Canada et à l'étranger, Droits et Démocratie défend les droits de la personne et les droits démocratiques définis dans la Charte internationale des droits de l'homme des Nations Unies.

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